CA Chambéry, chbre soc. prud'hommes, 3 juillet 2025, n° 23/01285
CHAMBÉRY
Arrêt
Autre
CS25/163
COUR D'APPEL DE CHAMBÉRY
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 03 JUILLET 2025
N° RG 23/01285 - N° Portalis DBVY-V-B7H-HKCS
AKKA INGENIERIE PRODUIT SAS Prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège
C/ [N], [R] [E] sans profession
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CHAMBERY en date du 27 Juillet 2023, RG F 21/00178
APPELANTE :
AKKA INGENIERIE PRODUIT SAS Prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 8]
[Adresse 2]
[Localité 5]
Représentant : Me Nathalie ATTIAS de la SCP SCP ATTIAS, avocat au barreau de PARIS - Représentant : Me Christophe LHERMITTE de la SELEURL GAUVAIN, DEMIDOFF & LHERMITTE, avocat au barreau de RENNES
INTIME :
Monsieur [N], [R] [E] sans profession
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représentant : Me Elif ERDOGAN, avocat au barreau de TOURS
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue en audience publique le 11 Mars 2025, devant Madame Valéry CHARBONNIER, Présidente, qui s'est chargé(e) du rapport, les parties ne s'y étant pas opposées, avec l'assistance de Monsieur Bertrand ASSAILLY, Greffier à l'appel des causes et dépôt des dossiers et de fixation de la date du délibéré,
et lors du délibéré :
Madame Valéry CHARBONNIER, Présidente,
Monsieur Cyril GUYAT, Conseiller,
Madame Laëtitia BOURACHOT, Conseillère,
********
Exposé du litige :
M. [E] a été embauché par la SAS Akka ingenierie produit en contrat à durée indéterminée le 6 juin 2018 en qualité de chargé de projet, statut cadre, position 2.2, coefficient 130 ave la précision que « M. [N] [E] exercera ses fonctions au sein de l'établissement à [Localité 10] » avec la précision que « le salarié reconnaît que son lieu de travail ne constitue pas un élément essentiel de son contrat de travail. Dans le cadre de ses fonctions qui peuvent nécessiter une intervention constante auprès des clients de la société ou de fréquents déplacements, le salarié pourra être amené, sur simple demande de la société, à effectuer des missions pour une durée variable en France et/ou à l'étranger, mission qu'il accepte d'ores et déjà sans pouvoir se prévaloir d'une modification de son contrat de travail. À ce titre un ordre de mission décrivant les conditions et les modalités de ladite mission sera établie. Le salarié déclare accepter par avance sa mutation dans d'autres établissements de l'entreprise en fonction des nécessités de l'entreprise. Les établissements sont situés dans la zone géographique suivante : France métropolitaine. Lorsqu'une mutation sera envisagée, un délai de prévenance d'au moins un mois devra être respecté. »
La SAS Akka ingenierie produit comporte un effectif de plus de 11 salariés et la convention collective applicable est la convention Syntec.
Un ordre de mission du salarié pour « assistance technique » au sein de la société cliente Framatome (Areva) à [Localité 9] (38) a été établi avec un démarrage de la mission le 2 novembre 2020 et un terme fixé au 31 mars 2021. Des frais à hauteur de 36,90 € par jour étaient précisés dans les conditions de déplacement.
Le 28 décembre 2020, la société Framatome (Areva) a sollicité de l'employeur une offre pour la prolongation de M. [E] pour13 mois supplémentaires.
M. [E] était en inter contrat du 1er au 6 avril 2021 et non présent chez le client Framatome.
Le 7 avril 2021, un nouvel ordre de mission a été adressé à M. [E] pour la période du 7 avril 2021 au 30 juin 2021 avec la précision de frais à hauteur de 36,90 € par jour étaient précisés dans les conditions de déplacement.
M. [E] accusait réception de l'ordre de mission par mail du même jour 7 avril 2021 et contestait s'agissant de ses indemnités de déplacement comme suit « cet ordre de mission qui comporte des dispositions illégales notamment par l'utilisation de mon véhicule personnel sans mon accord explicite » et précisait qu'il ne signerait pas ce document et que « actuellement en déplacement sur le site du client pour cette semaine et de retour à mon domicile à la fin de la semaine, je ne serai pas présent lundi prochain 12 avril 2021 sur le site du client à défaut de nouvelles avancées de la part de Akka » .
Le 9 avril 2021, M. [C] indique à M. [E] qu'il « réitère la nécessité d'honorer ses obligations contractuelles avec nous et demande donc de te rendre sur site client Framatome le lundi 12 avril au matin ». M. [E] répondait le même jour qu'il ne refusait pas la mission mais contestait les modalités déplacement ... et que pour le moment sa position et ses décisions restées inchangées, précisant que « le client sera averti ce vendredi 9 avril ».
Le 12 avril 2021, la SAS Akka ingenierie produit adressait à M. [E] une mise en demeure de signer la prolongation de l'ordre de mission dans un délai de 48 heures sous réserve d'une sanction disciplinaire.
M. [E] ne se présentait pas chez le client Framatome (Areva) du 12 au 14 avril 2021 et reprenait ses fonctions le 15 avril 2021.
Le 14 avril 2021, la SAS Akka ingenierie produit adressait un nouvel ordre de mission au salarié et lui enjoignait de reprendre son poste chez le client dès le lendemain 15 avril 2021. M. [E] le signait avec des réserves l'estimant incomplet.
Par courrier du 14 avril 2021, M. [E] était convoqué à un entretien préalable à licenciement prévu le 27 avril 2021.
Par mail du 16 avril 20221, la SAS Akka ingenierie produit informait M. [E] qu'ils avaient été convoqués
Par courrier du 7 mai 2021, M. [E] était licencié pour faute simple.
M. [E] a saisi le conseil des prud'hommes de [Localité 7] en date du 23 septembre 2021 aux fins de contester le bien-fondé de son licenciement et obtenir les indemnités afférentes.
Par jugement du 27 juillet 2023, le conseil des prud'hommes de [Localité 7] a :
Jugé que le licenciement de M. [E] est sans cause réelle et sérieuse
Condamné la SAS Akka ingenierie produit à lui payer la somme de 11614,98 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
Débouté M. [E] de sa demande de 5750,46 € au titre de l'indemnité de déplacement
Fixé la moyenne des salaires à 37871,66 €
Débouté M. [E] de sa demande d'exécution provisoire du jugement prononcé
Condamné la SAS Akka ingenierie produit à payer à M. [E] la somme de 2500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile
Condamné la SAS Akka ingenierie produit aux éventuels dépens
La décision a été notifiée aux parties et M. [E] en a interjeté appel par le Réseau Privé Virtuel des Avocats le 24 août 2024 et la SAS Akka ingenierie produit en a interjeté appel incident le 18 janvier 2024.
Par dernières conclusions en date du 6 novembre 2023, M. [E] demande à la cour d'appel de :
REJETER les prétentions de la société AKKA INGENIERIE PRODUIT
CONFIRMER le jugement dont appel en ce qu'il a :
Dit et jugé que le licenciement de Monsieur [N] [E] est sans cause réelle et sérieuse
Condamné la société AKKA INGENIERIE PRODUIT à payer M. [E] la somme de 11.614,98 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
Fixé la moyenne des salaires à la somme de 3871,66 euros
Condamné la société AKKA INGENIERIE PRODUIT à payer à M. [E] la somme de 2500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile
INFIRMER le jugement dont appel en ce qu'il a :
Débouté M. [E] de sa demande de la somme de 5750,46 euros au titre de l'indemnité de déplacement
Statuant de nouveau,
CONDAMNER la société AKKA INGENIERIE PRODUIT à payer à M. [E] la somme de 5750,46 euros au titre de l'indemnité de déplacement
En tout état de cause,
CONDAMNER la société AKKA INGENIERIE PRODUIT à payer à M. [E] la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 pour la procédure en
appel ainsi qu'aux dépens.
CONDAMNER la société AKKA INGENIERIE PRODUIT aux dépens
A titre subsidiaire,
Il est demandé à la Cour de :
REJETER les prétentions de la société AKKA INGENIERIE PRODUIT
INFIRMER le jugement dont appel sur le montant des dommages et intérêts pour
licenciement sans cause réelle et sérieuse mais le CONFIRMER sur le principe de la
condamnation à payer des dommages et intérêts
Statuant de nouveau,
CONDAMNER la société AKKA INGENIERIE PRODUIT à payer à
Monsieur [E] la somme de 34.844,94 euros nets à titre de dommages et
intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
INFIRMER le jugement dont appel en ce qu'il a :
Débouté M. [E] de sa demande de la somme de 5750,46 euros
au titre de l'indemnité de déplacement
Statuant de nouveau,
CONDAMNER la société AKKA INGENIERIE PRODUIT à payer à M. [E] la somme de 5750,46 euros au titre de l'indemnité de déplacement
CONFIRMER la condamnation de la société AKKA INGENIERIE PRODUIT à payer à
M. [E] [Z] la somme de 2500 euros au titre de l'article 700 du
Code de procédure civile
En tout état de cause,
CONDAMNER la société AKKA INGENIERIE PRODUIT à payer à M. [E] la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure
civile pour la procédure en appel
CONDAMNER la société AKKA INGENIERIE PRODUIT aux dépens
Par dernières conclusions en réponse en date du 13 mars 2024, la SAS Akka ingenierie produit demande à la cour d'appel de :
D'infirmer le jugement du 27 juillet 2023 rendu par le Conseil de prud'hommes de Chambéry en ce qu'il a :
jugé le licenciement de Monsieur [E] sans cause réelle et sérieuse ;
condamné la société Akka Ingénierie Produit à payer à Monsieur [E] les sommes de 11.614,98 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et 2.500 € au titre des frais irrépétibles, outre les entiers dépens.
débouté la société Akka Ingénierie Produit de ses demandes au titre des frais irrépétibles et dépens.
Confirmer le jugement du 27 juillet 2023 rendu par le Conseil de prud'hommes de Chambéry pour le surplus.
Statuant à nouveau,
Juger que le licenciement de Monsieur [E] est justifié par une cause réelle et sérieuse.
Juger que Monsieur [E] ne peut prétendre à aucune indemnité de déplacement.
En conséquence,
Débouter Monsieur [E] de l'ensemble de ses demandes.
Condamner Monsieur [E] à lui payer 5.000 € au titre des frais irrépétibles, outre les entiers dépens.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 19 février 2025.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère à la décision attaquée et aux dernières conclusions déposées.
SUR QUOI :
Sur le bienfondé du licenciement :
Il ressort de la lettre de licenciement de M. [E] pour faute simple qu'il lui est reproché d'avoir, alors qu'il était en mission depuis le 2 novembre 2020 auprès du client Framatome (Areva) basé à [Localité 9] (38), le 12 avril 2021 indiqué par mail ne plus se rendre sur son lieu de mission au motif que l'ordre de mission émis le 7 avril 2021 dans le cadre du renouvellement de sa mission n'était pas légal, puis d'avoir repris sa mission sur les directives de l'employeur le 15 avril 2021 générant une incompréhension chez le client qui a voulu faire le point et obtenir des explications et n'a pas caché son mécontentement et sa perte de confiance ; le client mettant fin à la mission de façon prématurée le 14 mai 2021 engendrant une perte financière de 100 000 € et détériorant la notoriété et la crédibilité du groupe.
Moyens des parties :
M. [E] conteste son licenciement et expose que sa mission chez le client Framatome (Areva) basé à [Localité 9] (38) devait durer cinq mois renouvelables à compter du 2 novembre 2020, qu'un litige est né avec son employeur sur la prise en charge des frais de déplacement et qu'il ne s'est pas présentée chez le client du 12 au 14 avril 2021, à la suite de quoi le client aurait rompu ses relations avec l'employeur. Il soutient qu'il n'a pas été licencié pour absence injustifiée ni abandon de poste mais pour perte de confiance du fait de son comportement non professionnel. L'ordre de mission qui aurait dû lui être adressé dans un délai raisonnable ne lui a été adressé que le 18 novembre soit bien postérieurement au début de sa mission. Il a été mis devant le fait accompli s'agissant de la prise en charge des frais de déplacement et celle-ci ne permettait pas de couvrir la totalité des frais engagés. Il expose qu'en décembre 2020, le client satisfait de la prestation réalisée, a souhaité renouveler la mission à compter du 1er avril 2021. Avant le renouvellement de sa mission, M. [E] a sollicité une entrevue avec son employeur dès le 21 mars 2021 et une discussion sur les modalités de prise en charge des frais de déplacement dans la mesure où il a été contraint d'utiliser son véhicule personnel pour se rendre chez le client. Après relance de sa part, une entrevue a eu lieu le 31 mars 2021 soit la veille de la date du renouvellement prévu de la mission. Du 1er au 5 avril 2021, il était en intermission. Il n'était donc pas présent chez le client à la demande de l'employeur. Il a repris sa mission à compter du 5 avril 2021. Le nouvel ordre de mission lui a été adressé le 7 avril 2021 soit postérieurement au début de la mission et sans tenir compte de ses souhaits et revendications. Il a dès lors informé son employeur le 7 avril 2021 qu'il ne serait pas présent sur le site du client et dès le 9 avril 2021 et a clairement indiqué qu'il ne refusait pas la mission mais les modalités de déplacement. La seule réponse de l'employeur a été de fixer une nouvelle entrevue le 13 avril ramenée au 12 avril. Face à la persistance de la mésentente et l'absence de prise en considération de ses besoins, il a averti sa hiérarchie et le client qu'il suspendait sa mission. L'ordre de mission du 7 avril 2021 ne proposait que l'utilisation des transports en commun sans tenir compte des correspondances à prendre, du temps de trajet de six heures, ni de l'absence de respect du temps de repos. Compte tenu de l'éloignement, il était contraint d'utiliser son véhicule personnel alors que le contrat de travail ne prévoit pas l'obligation pour le salarié d'utiliser son véhicule personnel. Or en utilisant les transports en commun, il aurait eu droit à un remboursement à 100 % des frais de transport, ce qui n'a pas été son cas puisque le trajet en transport en commun s'avérait impossible.Le 14 avril 2021, face à la menace de licenciement (mise en demeure de l'employeur), il a repris sa mission et a signé le renouvellement de l'ordre de mission en y inscrivant ses réserves sur la prise en charge de ces frais de déplacement. Le 15 avril 2021, il a repris sa mission chez le client Framatome. M. [E] soutient que le licenciement ne peut en rien lui être imputé mais résulte de l'inertie de l'employeur qui a fait transposer à son client des problèmes d'ordre interne. Le salarié étant fondé à refuser une mission présence d'une mésentente sur la prise en charge des frais de déplacement. Il ne s'est pas absenté du site du client sans raison et sans information préalable, ce qui ne constitue pas une absence injustifiée ou un abandon de poste. Il a signé les deux ordres de mission. Il était considéré en petit déplacement alors qu'il aurait dû être indemnisé comme étant grand déplacement. Enfin, il allègue que le préjudice de la société n'est pas démontré (correspondance de la société Framatome ni tamponnée ni signée et AR non communiqué) et le client ne fait pas référence à M. [E]. Rien ne peut lui être reproché s'agissant de ses compétences et il a eu la délicatesse de prévenir le client.
La SAS Akka ingénierie produit expose pour sa part qu'à compter du 2 novembre 2020, M. [E] a été affecté sur une mission auprès du client Framatome (Areva) à [Localité 9] (38). A cette occasion, un ordre de mission sur lequel sont indiquées les conditions de remboursement de ses frais professionnels, lui a été remis, qu'il a accepté et il a accompli la mission sans difficulté aucune jusqu'à son terme, le 31 mars 2021. Le 28 décembre 2020, la société Framatome demandait à la société Akka une prolongation de la mission du salarié pour 13 mois. Du 1er au 6 avril 2021, le salarié est en inter-contrat, car la mission n'est pas encore officiellement prolongée, mais il lui est indiqué le mardi 6 avril 2021, que la mission a été prolongée par le client vendredi 2 avril 2021 et se poursuivra dès le mercredi 7 avril 2020 et qu'il recevra un ordre de mission. Il lui est demandé d'être présent sur son lieu de mission dès le lendemain pour assurer la continuité du projet dont il a la charge.A compter du 7 avril 2021, la mission est officiellement prolongée et un ordre de mission est identique au premier, lui est remis. Le même jour, le salarié a refusé de signer ce nouvel ordre de mission aux motifs que ses conditions d'indemnisation de ses frais ne seraient pas conformes aux « règles de l'Urssaf », que l'employeur ne peut imposer l'utilisation de son véhicule personnel et qu'il conviendrait de prendre en compte le temps de déplacement. Il indique qu'il ne se présentera pas sur son lieu de mission. A aucun moment, le salarié se plaint d'avoir reçu « tardivement » la prolongation de son ordre de mission et pour cause, il était identique à celui qu'il avait accepté au démarrage de la mission quelques mois plus tôt.Le 8 avril 2021, l'employeur lui indique qu'il s'entretiendra avec lui le 13 avril 2021 pour lui apporter des explications sur la validité de cet ordre de mission au regard des règles d'indemnisation et que d'ici là, il conviendra de se présenter sur son lieu de mission.Le 9 avril 2021, le salarié maintient sa position quant au fait qu'il ne se présentera pas sur son lieu de mission. Le même jour, l'employeur lui demande à nouveau de prendre ses fonctions chez le client. Le 12 avril 2021, la société Akka demandait au salarié de signer son ordre de mission parfaitement conforme au barème interne applicable et de se présenter sur son lieu de mission conformément à ses obligations contractuelles. Le jour même, le salarié refuse de se présenter sur son lieu de mission, car il estime qu'il faut son accord pour l'utilisation de son véhicule personnel. Dans le même temps, les 12 et 13 avril 2021, le client Framatome déplore l'absence du salarié. Le 14 avril 2021, un nouvel ordre de mission lui est adressé avec l'utilisation des moyens de transport. Le 15 avril 2021, non sans se contredire, le salarié signe l'ordre de mission avec les réserves qu'il veut être remboursé de ses indemnités kilométriques, donc pour l'utilisation de son véhicule personnel, ainsi que de ses temps de déplacements aller-retour domicile/lieu de mission.Le même jour et en raison de l'absence du salarié, le client Framatome annonçait à la société Akka la résiliation du contrat qui les liait alors qu'il y avait une prolongation de 12 mois et quand bien même le salarié avait repris sa mission.
La SAS Akka ingenierie produit rappelle qu'au-delà du fait que le contrat de travail du salarié envisage l'hypothèse d'une utilisation professionnelle de son véhicule personnel et qu'il doit être rappelé que l'employeur peut choisir le mode de transport le plus adapté à la mission conformément à l'article 59 de la CCN Syntec, important donc peu que le contrat de travail du salarié n'indique pas que l'employeur pourrait lui imposer l'utilisation de son véhicule personnel.bh
Le salarié percevait une indemnité de repas de 9,50 € par jour, outre une indemnité journalière forfaitaire de 36,90 € au titre de ses indemnités kilométriques, c'est-à-dire suffisante selon la jurisprudence.L'employeur lui a demandé de continuer à utiliser son véhicule personnel comme il l'avait accepté au cours des 4 premiers mois et de l'indemniser à ce titre conformément au barème interne applicable, précisément pour lui éviter d'accomplir 6 heures de transport en commun par jour !
La SAS Akka ingénierie soutient d'une part que la loi n'impose pas la prise en charge intégrale par l'employeur des frais exposés par le salarié pour l'exécution du contrat de travail et qu'il n'est pas illégal que le salarié conserve à sa charge tout ou partie de ses frais professionnels. En l'absence de stipulations contractuelles précises, la question du remboursement des frais professionnels ne relève pas de la sphère contractuelle mais uniquement du pouvoir de direction de l'employeur. La convention collective Syntec applicable au litige n'impose pas une prise en charge intégrale des frais de déplacement pour l'employeur ni des indemnités kilométriques mais précises que si le salarié doit utiliser son véhicule personnel pour ses déplacements professionnels, il doit se mettre d'accord avec son employeur et cet accord déterminera l'étendue de la prise en charge. Il ne suffit pas de dire que l'employeur a autorisé le salarié à utiliser son véhicule personnel mais dispose aussi de montrer qu'il existe un accord écrit de prise en charge de cette utilisation. Or, aucun accord écrit n'a été signé avec M. [E]. Ni dans le contrat de travail, ni dans les ordres de mission, l'employeur ne s'est engagé à payer intégralement les indemnités kilométriques conformément aux dispositions de la convention collective applicable Syntec.
L'article 60 de la convention collective ne peut éventuellement s'appliquer que sous réserve de l'alinéa deux de l'article 50 de la convention collective : dès lors que les frais ont été forfaitisés par accord particulier ou selon un règlement spécifique approprié, le salarié ne peut en demander le remboursement intégral (aux frais réels). On ne peut pas revendiquer un droit à remboursement offrirait à partir du moment où les partenaires sociaux ont expressément prévu la possibilité d'un remboursement forfaitaire. C'est le barème interne qui s'applique sans que le salarié puisse interpréter l'article 50 de la convention collective comme impliquant un remboursement intégral de ses frais de déplacement ou comme l'obligation de lui rembourser des frais de déplacement sur la base d'un mode de transport qui serait imposé par le salarié. De plus la jurisprudence précise non que la convention Syntec indique que l'employeur doit prendre en charge l'intégralité des frais de déplacement mais que les déplacements ne doivent pas être une charge supplémentaire pour le salarié c'est-à-dire un coût supérieur à celui qu'il aurait parcouru pour se rendre sur son lieu de travail habituel comme n'importe quel salarié ; seul le surcoût est à la charge de l'entreprise. S'agissant des indemnités kilométriques pour les déplacements domicile/lieu de travail et inversement l'employeur n'a strictement aucune obligation de remboursement. Cette convention ne prévoit pas non plus une prise en charge intégrale des indemnités kilométriques sur les trajets domicile lieu de mission par dérogation au droit commun. Le barème est d'autant plus légitime qu'il acceptait d'aller en mission sur la base d'un ordre mission qui reprend les modalités de remboursement forfaitaire des frais professionnels notamment sur la question de la triangulation.
Sur ce,
Aux termes des dispositions des articles L.1232-1 à L.1232-6 du code du travail, tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse, énoncée dans une lettre notifiée au salarié après une convocation à un entretien préalable à un éventuel licenciement effectuée par lettre recommandée avec accusé de réception ou lettre remise en main propre, qui doit se tenir 5 jours ouvrables après la présentation de la lettre recommandée ou la remise ne main propre de la lettre de convocation. Cette lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige doit exposer des motifs précis et matériellement vérifiables, permettant au juge d'en apprécier la réalité et le sérieux. Si un doute subsiste, il profite au salarié. Le caractère fautif d'un comportement imputable à un salarié n'est pas subordonné à l'existence d'un préjudice subi par l'employeur.
En l'espèce, il ressort du contrat de travail de M. [E] « qu'il exercera ses fonctions au sein de l'établissement à [Localité 10] » avec la précision que « le salarié reconnaît que son lieu de travail ne constitue pas un élément essentiel de son contrat de travail. Dans le cadre de ses fonctions qui peuvent nécessiter une intervention constante auprès des clients de la société ou de fréquents déplacements, le salarié pourra être amené, sur simple demande de la société, à effectuer des missions pour une durée variable en France et/ou à l'étranger, mission qu'il accepte d'ores et déjà sans pouvoir se prévaloir d'une modification de son contrat de travail. À ce titre un ordre de mission décrivant les conditions et les modalités de ladite mission sera établie.
Le salarié a été affecté par un premier ordre de mission pour « assistance technique » au sein de la société cliente Framatome (Areva) à [Localité 9] (38) avec un démarrage de la mission le 2 novembre 2020 et un terme fixé au 31 mars 2021. Des frais à hauteur de 36,90 € par jour étaient précisés dans les conditions de déplacement.
La SAS Akka ingenierie produit justifie d'un mail du 6 avril 2021 adressé à M. [E] par, M. [C], Business Unit Manager informant M. [E] que « comme discuté ensemble, nous avons reçu vendredi dernier la commande pour ta prolongation de mission de la part de Framatome [Localité 9]. Par conséquent la prolongation de l'OM sera envoyée demain matin par [F]. Merci de te rendre sur site client demain matin pour poursuivre ta mission. Un point avec [D] [J] sera organisé dans la semaine afin de clarifier la situation que tu nous as fait remonter. »
Il convient d'en déduire que M. [E] était d'ores et déjà informé du prochain renouvellement de sa mission.
Une prolongation de l'ordre de mission lui a ensuite été adressée le 7 avril 2021 dans des conditions identiques à la première.
Il ressort des éléments relatés dans l'exposé des faits et n'est pas contesté qu'il existait entre M. [E] et son employeur un conflit s'agissant des conditions de remboursement de ses frais de déplacement dans le cadre de la mission et que le salarié souhaitait obtenir de meilleures conditions de remboursement.
Il ressort de la lettre du licenciement en date du 7 mai 2021que M. [E] a bien été licencié pour après en avoir menacé l'employeur, ne pas s'être présenté chez le client Framatome du 12 au 14 avril 2021 « suscitant chez le client l'incompréhension et le mécontentement et une perte de confiance » l'employeur considérant ce comportement comme « non professionnel et inacceptable » et fautif.
Sans qu'il soit nécessaire à ce stade de statuer sur la légitimité des conditions de remboursement prévues des frais de déplacement et leur conformité éventuelle au contrat de travail et à la convention collective Syntec, il y a lieu de constater que M. [E], au lieu de saisir le conseil des prud'hommes de demandes relatives à ses frais de déplacement ou éventuellement de démissionner ou prendre acte de la rupture de son contrat de travail faute d'accord sur les conditions d'exécution de son contrat de travail, a, à la fois refusé de signer et d'exécuter son nouvel ordre de mission en contradiction avec les stipulations de son contrat de travail susvisées, mais ne s'est présenté ni chez le client Framatome ni chez son employeur au [Localité 6] du 12 au 14 avril 2021 inclus en exerçant par ailleurs un chantage et en indiquant dès le 9 avril à la SAS Akka ingenierie produit qu'il ne se présenterait pas chez le client et le préviendrait faute des modification de l'ordre de mission. La SAS Akka ingenierie justifie au surplus que le client Framatome a exprimé son mécontentement et a résilié la commande des 12 mois restant après l'avoir convoqué sur le site de Framatome [Localité 9] en présence du prescripteur technique pour la mission en cours de M. [E]. Il doit par ailleurs être rappelé que le caractère fautif d'un comportement imputable à un salarié n'est pas subordonné à l'existence d'un préjudice subi par l'employeur. La matérialité des faits fautifs de M. [E] est dès lors établie.
Il convient dès lors de juger par voie d'infirmation du jugement déféré que le licenciement de M. [E] est fondé sur une cause réelle et sérieuse.
Sur la demande de rappel au titre de l'indemnité de déplacement :
Moyens des parties :
M. [E] sollicite la condamnation de la SAS Akka ingenierie produit à lui verser une somme de 5750, 46 € au titre de l'indemnité de déplacement. Il expose que la SAS Akka ingenierie produit a fait le choix de le rembourser forfaitairement des frais de déplacement ayant pour conséquence qu'il conservait à sa charge une partie des frais exposés mais que l'indemnité forfaitaire proposée ne doit pas être disproportionnée par rapport au montant réel des frais engagés par le salarié, l'employeur devant faire application du système de prise en charge des frais prévu par la convention Syntec et non les dispositions d'un accord contraire. Il explique que dans le barème mis en place par la SAS Akka ingenierie produit , le montant du remboursement est le même quel que soit le lieu d'exercice de la mission, qu'l s'agisse d'un déplacement local ou d'un grand ou très grand déplacement (0,39 € par kilomètres parcouru) en contradiction avec l'article 60 de la convention syntec qui prévoit le remboursement des frais tiendra compte de l'amortissement du véhicule, des frais de garage, de réparation et d'entretien, des frais d'assurance éventuellement des impôts et taxes sur les véhicules. Il expose qu'il a été contraint d'utiliser son véhicule personnel puisque l'utilisation des moyens de transport nécessitait six heures de trajet et que la prise en charge doit correspondre aux frais occasionnés contrairement au barème interne de la société c'est-à-dire prendre en conclusion du véhicule, les frais d'entretien' il n'a donc été indemnisé que partiellement. Par ailleurs l'utilisation du véhicule personnel doit être précédée d'un accord qui ne figure absolument pas sur les ordres de mission communiqués. En outre le barème interne permet l'utilisation d'un véhicule de service, ce qui ne lui a pas été proposé. Il est lésé par cette situation puisque s'il avait utilisé les transports en commun, il aurait pu bénéficier d'un remboursement à 100 %. Compte tenu de son impossibilité de rentrer à son domicile tous les soirs, il devrait entrer dans la catégorie des grands déplacements, ce qui aurait contraint l'employeur à l'indemniser à hauteur de 63,60 € par jour pour les repas et le logement au lieu des 9,50 € par jour pour les repas seulement comme prévu dans le barème interne. Son temps de repos n'aurait pas non plus été respecté s'il avait dû utiliser les transports en commun. Les difficultés ont été signalées à son employeur mais il n'a eu aucune réponse. Les demandes d'entrevue ont été traitées très tardivement.
La SAS Akka ingenierie produit fait valoir que l' article 60 de la convention collective Syntec n'a pour seul objet que de faire supporter à l'employeur sur la base d'un accord écrit des frais d'utilisation de fonctionnement du véhicule personnel du salarié et rien d'autre (indemnités kilométriques) et cette disposition conventionnelle n'est pas applicable en l'espèce. À aucun moment cette convention ne prévoit que l'employeur devra prendre en charge intégralement les indemnités kilométriques qui n'y sont même pas évoquées. Si les partenaires sociaux avaient voulu consacrer une prise en charge intégrale des indemnités kilométriques sur les trajets domicile/ lieu de mission et déroger au droit commun, ils l'auraient tout simplement écrit de manière claire et non équivoque. L'article 60 ne trouve à s'appliquer éventuellement que sous réserve de l'alinéa deux de l'article 50 de la même convention c'est-à-dire dès lors que les frais ont été forfaitisés par accord particulier ou selon un règlement spécifique approprié, le salarié ne peut pas en demander le remboursement intégral (aux frais réels) ; on ne peut pas revendiquer un droit à remboursement (du moment où les partenaires sociaux ont expressément prévu la possibilité d'un remboursement forfaitaire). Les barèmes internes applicables au sein du groupe notamment celui instituant la triangulation, sont conformes aux dispositions légales et conventionnelles et s'imposent au salarié.
Sur ce,
Il est de principe que les frais qu'un salarié justifie avoir exposés pour les besoins de son activité professionnelle et dans l'intérêt de l'employeur doivent lui être remboursés sans qu'ils ne puissent être imputés sur la rémunération qui lui est due, à moins qu'il n'ait été contractuellement prévu qu'il en conserverait la charge moyennant le versement d'une somme fixée à l'avance de manière forfaitaire et à la condition que la rémunération proprement dite du travail reste au moins égale au SMIC et que le montant de l'indemnité forfaitaire ne soit pas manifestement disproportionné par rapport aux montants des frais engagés.
L'article 50 de la convention collective Syntec relatif aux frais de déplacement et applicable au présent litige dispose que « les déplacements hors du lieu de travail habituel nécessités par le service ne doivent pas être pour le salarié l'occasion d'une charge supplémentaire ou d'une diminution de salaire. L'importance des frais dépend du lieu où s'effectuent les déplacements, ils ne sauraient être fixés d'une façon uniforme. Ils seront remboursés de manière à couvrir les frais d'hôtels et de restaurants du salarié. Ils pourront faire l'objet d'un forfait préalablement au départ, soit par accord particulier soit pas règlement spécifique approprié' »
L'article 51 prévoit qu'avant l'envoi d'un salarié en déplacement, un ordre de mission sera normalement établi, se référant au présent titre. L'ordre de mission pourra être permanent pour les salariés dont les fonctions, telles que précisées dans le contrat de travail, les conduisent à effectuer des déplacements multiples pour des interventions ponctuelles.
L'article 53 prévoit que « le salarié dont la lettre d'engagement mentionne qu'il doit travailler tout ou partie de l'année en déplacement continu aura droit, outre son salaire, à une indemnité de remboursement de frais pendant la durée de ce déplacement. Cette indemnité sera :
- soit forfaitaire, auquel cas, elle représentera la différence entre les frais de séjour et les dépenses normales du salarié s'il vivait au lieu où il a été engagé, et sera fixée par accord préalable entre l'employeur et le salarié, sauf règlement spécifique conformément à l'article 50 ;
- soit versée sur pièces justificatives ».
Selon l'article 59, les déplacements professionnels peuvent être effectués par :
1. Tous les moyens de transport en commun selon les modalités suivantes, sauf stipulation contraire :
- avion (classe touriste) ;
- train et bateau : 2e classe ou confort équivalent pour les ETAM, 1re classe ou confort équivalent pour les IC.
2. Tous les moyens personnels du salarié lorsque celui-ci a été autorisé par son employeur à les utiliser à des fins professionnelles.
L'article 60 de la même convention collective dans sa version applicable au présent litige dispose que lorsque le salarié utilise pour les besoins du service un véhicule automobile, une motocyclette ou un cyclomoteur, les frais occasionnés sont à la charge de l'employeur, à condition qu'un accord écrit ait précédé cette utilisation. Cet accord peut être permanent.
Il ressort de l'article 7 relatif aux frais professionnels du contrat de travail que « les frais professionnels que M. [E] exposera dans le cadre et pour les besoins de ses fonctions lui seront remboursés conformément aux règles et usages en vigueur au sein de la société. La société se réserve le droit de modifier à tout moment le système de remboursement des frais professionnels en y substituant tout autre système qui se révélerait plus adapté à l'évolution de la réglementation et des circonstances, sans que cela représente une modification du présent contrat travail ... »
Il résulte des dispositions susvisées que les déplacements hors du lieu de travail habituel nécessités par le service ne doivent pas être pour le salarié l'occasion d'une charge supplémentaire ou d'une diminution de salaire.
Le mode de prise en charge par l'employeur de ces frais de déplacements peut se faire de manière forfaitaire par un forfait préalablement prévu au départ :
- Soit par accord particulier
- Soit par règlement spécifique approprié
Il n'est pas contesté l'existence d'un barème interne au sein de la SAS Akka ingenierie produit intitulé « barème de remboursement des frais professionnels pour les missions localisées en France métropolitaine » daté du 3 mars 2014 notamment instituant un système de triangulation pour caractériser la nature des déplacements dans son article 4.
Il n'est pas démontré que l'article 60 susvisé exclurait le système de triangulation mis en 'uvre dans le barème interne susvisé qui caractérise le type de déplacement.
Ce barème constitue un règlement spécifique de prise en charge des frais de déplacement de manière forfaitaire comme prévu à l'article 50 et auquel le contrat de travail fait référence. Par conséquent, la prise en charge forfaitaire des frais de déplacement ne nécessitait pas l'accord particulier du salarié pour être mise en 'uvre.
L'application de ce barème interne doit toutefois prévoir un montant de l'indemnité forfaitaire qui ne soit pas manifestement disproportionné par rapport aux montants des frais réellement engagés par le salarié afin de se rendre sur son lieu de mission, les déplacements ne devant pas constituer l'occasion « d'une charge supplémentaire ou d'une diminution de salaire » c'est-à-dire un coût plus important à celui engendré pour se rendre sur le lieu de travail habituel.
Ledit barème interne litigieux fait une distinction entre le déplacement local, le petit déplacement, le grand et le très grand déplacement selon la méthode de la triangulation et prévoit des prises en charge distinctes pour chaque type de déplacement.
M. [E] expose qu'il a été dans l'obligation prendre sa voiture personnelle et de dormir sur son lieu de mission à [Localité 9] (38) ne pouvant utiliser les transports en commun générant un trajet trop long de 6 heures sans respect de son temps de repos quotidien malgré un remboursement qui aurait été dans ce cas de 100 %. M. [E] considère qu'il aurait dû bénéficier de l'indemnisation des grands déplacements à hauteur de 63,60 € par jour pour les repas et le logement.
Or, il ressort de différents sites de calculs d'itinéraires (Via Michelin, Google...) que le trajet entre le siège de l'entreprise, lieu habituel d'exécution du contrat de travail ([Adresse 1] à [Localité 10] (73)) et le lieu d'exécution de la mission ([Adresse 11] à [Localité 9] (38)) est compris entre 77,7 kilomètres et 81,6 km selon les voies choisies.
Par conséquent M. [E] aurait valablement dû bénéficier de l'application du barème interne (entre 76 et 275 Kms) des grands déplacements, soit 63,60 € par jour pour les 3 premiers mois et 54,10 € à partir du premier jour du 4° mois par jour travaillé (soit 4 jours) outre l'indemnité kilométrique de 0,39 € par kilomètres pour un trajet aller/retour par semaine + le péage pour un aller et retour par semaine, soit la somme de 4 492,25 € pour les trois premiers mois et 4177, 94 € pour les mois suivants soit une somme totale de 8 670,19 €.
La SAS Akka ingenierie produit justifie que M. [E] a été indemnisé à hauteur de 5 343,90 € (935,90 € le 30 novembre 2020, 788,80 € et 881,60 € l4 mars 2021, 649,60 et 1020,80 € le 13 avril 2021649,60 € et 417,60 € le 26 mai 2020) pour la totalité de la mission exécutée à [Localité 9] (38) avec son véhicule à savoir à hauteur du 0,39 € du kilomètre et 9,50 € de repas par jour conformément au barème interne applicable, l'entreprise appliquant le remboursement des petits déplacements (entre 15 et 75 kilomètres) en application du système de triangulation.
Il convient dès lors de condamner la SAS Akka ingenierie produit à verser à M. [E] la somme de 3 326,29 € de frais de déplacement complémentaires par voie d'infirmation du jugement déféré.
Sur les demandes accessoires :
Il convient de confirmer la décision de première instance s'agissant des dépens et de l'infirmer s'agissant des frais irrépétibles.
La SAS Akka ingenierie produit, partie perdante qui sera condamnée aux dépens et déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile, devra payer à M. [E], la somme de 3 000 € au titre de ses frais irrépétibles engagés en première instance et en appel.
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant contradictoirement après en avoir délibéré conformément à la loi,
CONFIRME le jugement déféré en ce qu'il a :
Fixé la moyenne des salaires à 37871,66 €
Débouté M. [E] de sa demande d'exécution provisoire du jugement prononcé
Condamné la SAS Akka ingenierie produit aux éventuels dépens
L'INFIRME pour le surplus,
STATUANT à nouveau sur les chefs d'infirmation,
DIT que le licenciement de M. [E] est fondé sur une cause réelle et sérieuse et DEBOUTE M. [E] de l'ensemble des demandes à ce titre
CONDAMNE la SAS Akka ingenierie produit à verser à M. [E] la somme de 3 326,29 € au titre de frais de déplacement complémentaires,
Y ajoutant,
CONDAMNE la SAS Akka ingenierie produit aux dépens d'appel.
CONDAMNE la SAS Akka ingenierie produit à payer à M. [E] la somme de 3 000 € à sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour l'instance.
Ainsi prononcé publiquement le 03 Juillet 2025 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Madame Valéry CHARBONNIER, Présidente, et Monsieur Bertrand ASSAILLY,Greffier pour le prononcé auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier La Présidente
COUR D'APPEL DE CHAMBÉRY
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 03 JUILLET 2025
N° RG 23/01285 - N° Portalis DBVY-V-B7H-HKCS
AKKA INGENIERIE PRODUIT SAS Prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège
C/ [N], [R] [E] sans profession
Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CHAMBERY en date du 27 Juillet 2023, RG F 21/00178
APPELANTE :
AKKA INGENIERIE PRODUIT SAS Prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 8]
[Adresse 2]
[Localité 5]
Représentant : Me Nathalie ATTIAS de la SCP SCP ATTIAS, avocat au barreau de PARIS - Représentant : Me Christophe LHERMITTE de la SELEURL GAUVAIN, DEMIDOFF & LHERMITTE, avocat au barreau de RENNES
INTIME :
Monsieur [N], [R] [E] sans profession
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représentant : Me Elif ERDOGAN, avocat au barreau de TOURS
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue en audience publique le 11 Mars 2025, devant Madame Valéry CHARBONNIER, Présidente, qui s'est chargé(e) du rapport, les parties ne s'y étant pas opposées, avec l'assistance de Monsieur Bertrand ASSAILLY, Greffier à l'appel des causes et dépôt des dossiers et de fixation de la date du délibéré,
et lors du délibéré :
Madame Valéry CHARBONNIER, Présidente,
Monsieur Cyril GUYAT, Conseiller,
Madame Laëtitia BOURACHOT, Conseillère,
********
Exposé du litige :
M. [E] a été embauché par la SAS Akka ingenierie produit en contrat à durée indéterminée le 6 juin 2018 en qualité de chargé de projet, statut cadre, position 2.2, coefficient 130 ave la précision que « M. [N] [E] exercera ses fonctions au sein de l'établissement à [Localité 10] » avec la précision que « le salarié reconnaît que son lieu de travail ne constitue pas un élément essentiel de son contrat de travail. Dans le cadre de ses fonctions qui peuvent nécessiter une intervention constante auprès des clients de la société ou de fréquents déplacements, le salarié pourra être amené, sur simple demande de la société, à effectuer des missions pour une durée variable en France et/ou à l'étranger, mission qu'il accepte d'ores et déjà sans pouvoir se prévaloir d'une modification de son contrat de travail. À ce titre un ordre de mission décrivant les conditions et les modalités de ladite mission sera établie. Le salarié déclare accepter par avance sa mutation dans d'autres établissements de l'entreprise en fonction des nécessités de l'entreprise. Les établissements sont situés dans la zone géographique suivante : France métropolitaine. Lorsqu'une mutation sera envisagée, un délai de prévenance d'au moins un mois devra être respecté. »
La SAS Akka ingenierie produit comporte un effectif de plus de 11 salariés et la convention collective applicable est la convention Syntec.
Un ordre de mission du salarié pour « assistance technique » au sein de la société cliente Framatome (Areva) à [Localité 9] (38) a été établi avec un démarrage de la mission le 2 novembre 2020 et un terme fixé au 31 mars 2021. Des frais à hauteur de 36,90 € par jour étaient précisés dans les conditions de déplacement.
Le 28 décembre 2020, la société Framatome (Areva) a sollicité de l'employeur une offre pour la prolongation de M. [E] pour13 mois supplémentaires.
M. [E] était en inter contrat du 1er au 6 avril 2021 et non présent chez le client Framatome.
Le 7 avril 2021, un nouvel ordre de mission a été adressé à M. [E] pour la période du 7 avril 2021 au 30 juin 2021 avec la précision de frais à hauteur de 36,90 € par jour étaient précisés dans les conditions de déplacement.
M. [E] accusait réception de l'ordre de mission par mail du même jour 7 avril 2021 et contestait s'agissant de ses indemnités de déplacement comme suit « cet ordre de mission qui comporte des dispositions illégales notamment par l'utilisation de mon véhicule personnel sans mon accord explicite » et précisait qu'il ne signerait pas ce document et que « actuellement en déplacement sur le site du client pour cette semaine et de retour à mon domicile à la fin de la semaine, je ne serai pas présent lundi prochain 12 avril 2021 sur le site du client à défaut de nouvelles avancées de la part de Akka » .
Le 9 avril 2021, M. [C] indique à M. [E] qu'il « réitère la nécessité d'honorer ses obligations contractuelles avec nous et demande donc de te rendre sur site client Framatome le lundi 12 avril au matin ». M. [E] répondait le même jour qu'il ne refusait pas la mission mais contestait les modalités déplacement ... et que pour le moment sa position et ses décisions restées inchangées, précisant que « le client sera averti ce vendredi 9 avril ».
Le 12 avril 2021, la SAS Akka ingenierie produit adressait à M. [E] une mise en demeure de signer la prolongation de l'ordre de mission dans un délai de 48 heures sous réserve d'une sanction disciplinaire.
M. [E] ne se présentait pas chez le client Framatome (Areva) du 12 au 14 avril 2021 et reprenait ses fonctions le 15 avril 2021.
Le 14 avril 2021, la SAS Akka ingenierie produit adressait un nouvel ordre de mission au salarié et lui enjoignait de reprendre son poste chez le client dès le lendemain 15 avril 2021. M. [E] le signait avec des réserves l'estimant incomplet.
Par courrier du 14 avril 2021, M. [E] était convoqué à un entretien préalable à licenciement prévu le 27 avril 2021.
Par mail du 16 avril 20221, la SAS Akka ingenierie produit informait M. [E] qu'ils avaient été convoqués
Par courrier du 7 mai 2021, M. [E] était licencié pour faute simple.
M. [E] a saisi le conseil des prud'hommes de [Localité 7] en date du 23 septembre 2021 aux fins de contester le bien-fondé de son licenciement et obtenir les indemnités afférentes.
Par jugement du 27 juillet 2023, le conseil des prud'hommes de [Localité 7] a :
Jugé que le licenciement de M. [E] est sans cause réelle et sérieuse
Condamné la SAS Akka ingenierie produit à lui payer la somme de 11614,98 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
Débouté M. [E] de sa demande de 5750,46 € au titre de l'indemnité de déplacement
Fixé la moyenne des salaires à 37871,66 €
Débouté M. [E] de sa demande d'exécution provisoire du jugement prononcé
Condamné la SAS Akka ingenierie produit à payer à M. [E] la somme de 2500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile
Condamné la SAS Akka ingenierie produit aux éventuels dépens
La décision a été notifiée aux parties et M. [E] en a interjeté appel par le Réseau Privé Virtuel des Avocats le 24 août 2024 et la SAS Akka ingenierie produit en a interjeté appel incident le 18 janvier 2024.
Par dernières conclusions en date du 6 novembre 2023, M. [E] demande à la cour d'appel de :
REJETER les prétentions de la société AKKA INGENIERIE PRODUIT
CONFIRMER le jugement dont appel en ce qu'il a :
Dit et jugé que le licenciement de Monsieur [N] [E] est sans cause réelle et sérieuse
Condamné la société AKKA INGENIERIE PRODUIT à payer M. [E] la somme de 11.614,98 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
Fixé la moyenne des salaires à la somme de 3871,66 euros
Condamné la société AKKA INGENIERIE PRODUIT à payer à M. [E] la somme de 2500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile
INFIRMER le jugement dont appel en ce qu'il a :
Débouté M. [E] de sa demande de la somme de 5750,46 euros au titre de l'indemnité de déplacement
Statuant de nouveau,
CONDAMNER la société AKKA INGENIERIE PRODUIT à payer à M. [E] la somme de 5750,46 euros au titre de l'indemnité de déplacement
En tout état de cause,
CONDAMNER la société AKKA INGENIERIE PRODUIT à payer à M. [E] la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 pour la procédure en
appel ainsi qu'aux dépens.
CONDAMNER la société AKKA INGENIERIE PRODUIT aux dépens
A titre subsidiaire,
Il est demandé à la Cour de :
REJETER les prétentions de la société AKKA INGENIERIE PRODUIT
INFIRMER le jugement dont appel sur le montant des dommages et intérêts pour
licenciement sans cause réelle et sérieuse mais le CONFIRMER sur le principe de la
condamnation à payer des dommages et intérêts
Statuant de nouveau,
CONDAMNER la société AKKA INGENIERIE PRODUIT à payer à
Monsieur [E] la somme de 34.844,94 euros nets à titre de dommages et
intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
INFIRMER le jugement dont appel en ce qu'il a :
Débouté M. [E] de sa demande de la somme de 5750,46 euros
au titre de l'indemnité de déplacement
Statuant de nouveau,
CONDAMNER la société AKKA INGENIERIE PRODUIT à payer à M. [E] la somme de 5750,46 euros au titre de l'indemnité de déplacement
CONFIRMER la condamnation de la société AKKA INGENIERIE PRODUIT à payer à
M. [E] [Z] la somme de 2500 euros au titre de l'article 700 du
Code de procédure civile
En tout état de cause,
CONDAMNER la société AKKA INGENIERIE PRODUIT à payer à M. [E] la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure
civile pour la procédure en appel
CONDAMNER la société AKKA INGENIERIE PRODUIT aux dépens
Par dernières conclusions en réponse en date du 13 mars 2024, la SAS Akka ingenierie produit demande à la cour d'appel de :
D'infirmer le jugement du 27 juillet 2023 rendu par le Conseil de prud'hommes de Chambéry en ce qu'il a :
jugé le licenciement de Monsieur [E] sans cause réelle et sérieuse ;
condamné la société Akka Ingénierie Produit à payer à Monsieur [E] les sommes de 11.614,98 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et 2.500 € au titre des frais irrépétibles, outre les entiers dépens.
débouté la société Akka Ingénierie Produit de ses demandes au titre des frais irrépétibles et dépens.
Confirmer le jugement du 27 juillet 2023 rendu par le Conseil de prud'hommes de Chambéry pour le surplus.
Statuant à nouveau,
Juger que le licenciement de Monsieur [E] est justifié par une cause réelle et sérieuse.
Juger que Monsieur [E] ne peut prétendre à aucune indemnité de déplacement.
En conséquence,
Débouter Monsieur [E] de l'ensemble de ses demandes.
Condamner Monsieur [E] à lui payer 5.000 € au titre des frais irrépétibles, outre les entiers dépens.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 19 février 2025.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère à la décision attaquée et aux dernières conclusions déposées.
SUR QUOI :
Sur le bienfondé du licenciement :
Il ressort de la lettre de licenciement de M. [E] pour faute simple qu'il lui est reproché d'avoir, alors qu'il était en mission depuis le 2 novembre 2020 auprès du client Framatome (Areva) basé à [Localité 9] (38), le 12 avril 2021 indiqué par mail ne plus se rendre sur son lieu de mission au motif que l'ordre de mission émis le 7 avril 2021 dans le cadre du renouvellement de sa mission n'était pas légal, puis d'avoir repris sa mission sur les directives de l'employeur le 15 avril 2021 générant une incompréhension chez le client qui a voulu faire le point et obtenir des explications et n'a pas caché son mécontentement et sa perte de confiance ; le client mettant fin à la mission de façon prématurée le 14 mai 2021 engendrant une perte financière de 100 000 € et détériorant la notoriété et la crédibilité du groupe.
Moyens des parties :
M. [E] conteste son licenciement et expose que sa mission chez le client Framatome (Areva) basé à [Localité 9] (38) devait durer cinq mois renouvelables à compter du 2 novembre 2020, qu'un litige est né avec son employeur sur la prise en charge des frais de déplacement et qu'il ne s'est pas présentée chez le client du 12 au 14 avril 2021, à la suite de quoi le client aurait rompu ses relations avec l'employeur. Il soutient qu'il n'a pas été licencié pour absence injustifiée ni abandon de poste mais pour perte de confiance du fait de son comportement non professionnel. L'ordre de mission qui aurait dû lui être adressé dans un délai raisonnable ne lui a été adressé que le 18 novembre soit bien postérieurement au début de sa mission. Il a été mis devant le fait accompli s'agissant de la prise en charge des frais de déplacement et celle-ci ne permettait pas de couvrir la totalité des frais engagés. Il expose qu'en décembre 2020, le client satisfait de la prestation réalisée, a souhaité renouveler la mission à compter du 1er avril 2021. Avant le renouvellement de sa mission, M. [E] a sollicité une entrevue avec son employeur dès le 21 mars 2021 et une discussion sur les modalités de prise en charge des frais de déplacement dans la mesure où il a été contraint d'utiliser son véhicule personnel pour se rendre chez le client. Après relance de sa part, une entrevue a eu lieu le 31 mars 2021 soit la veille de la date du renouvellement prévu de la mission. Du 1er au 5 avril 2021, il était en intermission. Il n'était donc pas présent chez le client à la demande de l'employeur. Il a repris sa mission à compter du 5 avril 2021. Le nouvel ordre de mission lui a été adressé le 7 avril 2021 soit postérieurement au début de la mission et sans tenir compte de ses souhaits et revendications. Il a dès lors informé son employeur le 7 avril 2021 qu'il ne serait pas présent sur le site du client et dès le 9 avril 2021 et a clairement indiqué qu'il ne refusait pas la mission mais les modalités de déplacement. La seule réponse de l'employeur a été de fixer une nouvelle entrevue le 13 avril ramenée au 12 avril. Face à la persistance de la mésentente et l'absence de prise en considération de ses besoins, il a averti sa hiérarchie et le client qu'il suspendait sa mission. L'ordre de mission du 7 avril 2021 ne proposait que l'utilisation des transports en commun sans tenir compte des correspondances à prendre, du temps de trajet de six heures, ni de l'absence de respect du temps de repos. Compte tenu de l'éloignement, il était contraint d'utiliser son véhicule personnel alors que le contrat de travail ne prévoit pas l'obligation pour le salarié d'utiliser son véhicule personnel. Or en utilisant les transports en commun, il aurait eu droit à un remboursement à 100 % des frais de transport, ce qui n'a pas été son cas puisque le trajet en transport en commun s'avérait impossible.Le 14 avril 2021, face à la menace de licenciement (mise en demeure de l'employeur), il a repris sa mission et a signé le renouvellement de l'ordre de mission en y inscrivant ses réserves sur la prise en charge de ces frais de déplacement. Le 15 avril 2021, il a repris sa mission chez le client Framatome. M. [E] soutient que le licenciement ne peut en rien lui être imputé mais résulte de l'inertie de l'employeur qui a fait transposer à son client des problèmes d'ordre interne. Le salarié étant fondé à refuser une mission présence d'une mésentente sur la prise en charge des frais de déplacement. Il ne s'est pas absenté du site du client sans raison et sans information préalable, ce qui ne constitue pas une absence injustifiée ou un abandon de poste. Il a signé les deux ordres de mission. Il était considéré en petit déplacement alors qu'il aurait dû être indemnisé comme étant grand déplacement. Enfin, il allègue que le préjudice de la société n'est pas démontré (correspondance de la société Framatome ni tamponnée ni signée et AR non communiqué) et le client ne fait pas référence à M. [E]. Rien ne peut lui être reproché s'agissant de ses compétences et il a eu la délicatesse de prévenir le client.
La SAS Akka ingénierie produit expose pour sa part qu'à compter du 2 novembre 2020, M. [E] a été affecté sur une mission auprès du client Framatome (Areva) à [Localité 9] (38). A cette occasion, un ordre de mission sur lequel sont indiquées les conditions de remboursement de ses frais professionnels, lui a été remis, qu'il a accepté et il a accompli la mission sans difficulté aucune jusqu'à son terme, le 31 mars 2021. Le 28 décembre 2020, la société Framatome demandait à la société Akka une prolongation de la mission du salarié pour 13 mois. Du 1er au 6 avril 2021, le salarié est en inter-contrat, car la mission n'est pas encore officiellement prolongée, mais il lui est indiqué le mardi 6 avril 2021, que la mission a été prolongée par le client vendredi 2 avril 2021 et se poursuivra dès le mercredi 7 avril 2020 et qu'il recevra un ordre de mission. Il lui est demandé d'être présent sur son lieu de mission dès le lendemain pour assurer la continuité du projet dont il a la charge.A compter du 7 avril 2021, la mission est officiellement prolongée et un ordre de mission est identique au premier, lui est remis. Le même jour, le salarié a refusé de signer ce nouvel ordre de mission aux motifs que ses conditions d'indemnisation de ses frais ne seraient pas conformes aux « règles de l'Urssaf », que l'employeur ne peut imposer l'utilisation de son véhicule personnel et qu'il conviendrait de prendre en compte le temps de déplacement. Il indique qu'il ne se présentera pas sur son lieu de mission. A aucun moment, le salarié se plaint d'avoir reçu « tardivement » la prolongation de son ordre de mission et pour cause, il était identique à celui qu'il avait accepté au démarrage de la mission quelques mois plus tôt.Le 8 avril 2021, l'employeur lui indique qu'il s'entretiendra avec lui le 13 avril 2021 pour lui apporter des explications sur la validité de cet ordre de mission au regard des règles d'indemnisation et que d'ici là, il conviendra de se présenter sur son lieu de mission.Le 9 avril 2021, le salarié maintient sa position quant au fait qu'il ne se présentera pas sur son lieu de mission. Le même jour, l'employeur lui demande à nouveau de prendre ses fonctions chez le client. Le 12 avril 2021, la société Akka demandait au salarié de signer son ordre de mission parfaitement conforme au barème interne applicable et de se présenter sur son lieu de mission conformément à ses obligations contractuelles. Le jour même, le salarié refuse de se présenter sur son lieu de mission, car il estime qu'il faut son accord pour l'utilisation de son véhicule personnel. Dans le même temps, les 12 et 13 avril 2021, le client Framatome déplore l'absence du salarié. Le 14 avril 2021, un nouvel ordre de mission lui est adressé avec l'utilisation des moyens de transport. Le 15 avril 2021, non sans se contredire, le salarié signe l'ordre de mission avec les réserves qu'il veut être remboursé de ses indemnités kilométriques, donc pour l'utilisation de son véhicule personnel, ainsi que de ses temps de déplacements aller-retour domicile/lieu de mission.Le même jour et en raison de l'absence du salarié, le client Framatome annonçait à la société Akka la résiliation du contrat qui les liait alors qu'il y avait une prolongation de 12 mois et quand bien même le salarié avait repris sa mission.
La SAS Akka ingenierie produit rappelle qu'au-delà du fait que le contrat de travail du salarié envisage l'hypothèse d'une utilisation professionnelle de son véhicule personnel et qu'il doit être rappelé que l'employeur peut choisir le mode de transport le plus adapté à la mission conformément à l'article 59 de la CCN Syntec, important donc peu que le contrat de travail du salarié n'indique pas que l'employeur pourrait lui imposer l'utilisation de son véhicule personnel.bh
Le salarié percevait une indemnité de repas de 9,50 € par jour, outre une indemnité journalière forfaitaire de 36,90 € au titre de ses indemnités kilométriques, c'est-à-dire suffisante selon la jurisprudence.L'employeur lui a demandé de continuer à utiliser son véhicule personnel comme il l'avait accepté au cours des 4 premiers mois et de l'indemniser à ce titre conformément au barème interne applicable, précisément pour lui éviter d'accomplir 6 heures de transport en commun par jour !
La SAS Akka ingénierie soutient d'une part que la loi n'impose pas la prise en charge intégrale par l'employeur des frais exposés par le salarié pour l'exécution du contrat de travail et qu'il n'est pas illégal que le salarié conserve à sa charge tout ou partie de ses frais professionnels. En l'absence de stipulations contractuelles précises, la question du remboursement des frais professionnels ne relève pas de la sphère contractuelle mais uniquement du pouvoir de direction de l'employeur. La convention collective Syntec applicable au litige n'impose pas une prise en charge intégrale des frais de déplacement pour l'employeur ni des indemnités kilométriques mais précises que si le salarié doit utiliser son véhicule personnel pour ses déplacements professionnels, il doit se mettre d'accord avec son employeur et cet accord déterminera l'étendue de la prise en charge. Il ne suffit pas de dire que l'employeur a autorisé le salarié à utiliser son véhicule personnel mais dispose aussi de montrer qu'il existe un accord écrit de prise en charge de cette utilisation. Or, aucun accord écrit n'a été signé avec M. [E]. Ni dans le contrat de travail, ni dans les ordres de mission, l'employeur ne s'est engagé à payer intégralement les indemnités kilométriques conformément aux dispositions de la convention collective applicable Syntec.
L'article 60 de la convention collective ne peut éventuellement s'appliquer que sous réserve de l'alinéa deux de l'article 50 de la convention collective : dès lors que les frais ont été forfaitisés par accord particulier ou selon un règlement spécifique approprié, le salarié ne peut en demander le remboursement intégral (aux frais réels). On ne peut pas revendiquer un droit à remboursement offrirait à partir du moment où les partenaires sociaux ont expressément prévu la possibilité d'un remboursement forfaitaire. C'est le barème interne qui s'applique sans que le salarié puisse interpréter l'article 50 de la convention collective comme impliquant un remboursement intégral de ses frais de déplacement ou comme l'obligation de lui rembourser des frais de déplacement sur la base d'un mode de transport qui serait imposé par le salarié. De plus la jurisprudence précise non que la convention Syntec indique que l'employeur doit prendre en charge l'intégralité des frais de déplacement mais que les déplacements ne doivent pas être une charge supplémentaire pour le salarié c'est-à-dire un coût supérieur à celui qu'il aurait parcouru pour se rendre sur son lieu de travail habituel comme n'importe quel salarié ; seul le surcoût est à la charge de l'entreprise. S'agissant des indemnités kilométriques pour les déplacements domicile/lieu de travail et inversement l'employeur n'a strictement aucune obligation de remboursement. Cette convention ne prévoit pas non plus une prise en charge intégrale des indemnités kilométriques sur les trajets domicile lieu de mission par dérogation au droit commun. Le barème est d'autant plus légitime qu'il acceptait d'aller en mission sur la base d'un ordre mission qui reprend les modalités de remboursement forfaitaire des frais professionnels notamment sur la question de la triangulation.
Sur ce,
Aux termes des dispositions des articles L.1232-1 à L.1232-6 du code du travail, tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse, énoncée dans une lettre notifiée au salarié après une convocation à un entretien préalable à un éventuel licenciement effectuée par lettre recommandée avec accusé de réception ou lettre remise en main propre, qui doit se tenir 5 jours ouvrables après la présentation de la lettre recommandée ou la remise ne main propre de la lettre de convocation. Cette lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige doit exposer des motifs précis et matériellement vérifiables, permettant au juge d'en apprécier la réalité et le sérieux. Si un doute subsiste, il profite au salarié. Le caractère fautif d'un comportement imputable à un salarié n'est pas subordonné à l'existence d'un préjudice subi par l'employeur.
En l'espèce, il ressort du contrat de travail de M. [E] « qu'il exercera ses fonctions au sein de l'établissement à [Localité 10] » avec la précision que « le salarié reconnaît que son lieu de travail ne constitue pas un élément essentiel de son contrat de travail. Dans le cadre de ses fonctions qui peuvent nécessiter une intervention constante auprès des clients de la société ou de fréquents déplacements, le salarié pourra être amené, sur simple demande de la société, à effectuer des missions pour une durée variable en France et/ou à l'étranger, mission qu'il accepte d'ores et déjà sans pouvoir se prévaloir d'une modification de son contrat de travail. À ce titre un ordre de mission décrivant les conditions et les modalités de ladite mission sera établie.
Le salarié a été affecté par un premier ordre de mission pour « assistance technique » au sein de la société cliente Framatome (Areva) à [Localité 9] (38) avec un démarrage de la mission le 2 novembre 2020 et un terme fixé au 31 mars 2021. Des frais à hauteur de 36,90 € par jour étaient précisés dans les conditions de déplacement.
La SAS Akka ingenierie produit justifie d'un mail du 6 avril 2021 adressé à M. [E] par, M. [C], Business Unit Manager informant M. [E] que « comme discuté ensemble, nous avons reçu vendredi dernier la commande pour ta prolongation de mission de la part de Framatome [Localité 9]. Par conséquent la prolongation de l'OM sera envoyée demain matin par [F]. Merci de te rendre sur site client demain matin pour poursuivre ta mission. Un point avec [D] [J] sera organisé dans la semaine afin de clarifier la situation que tu nous as fait remonter. »
Il convient d'en déduire que M. [E] était d'ores et déjà informé du prochain renouvellement de sa mission.
Une prolongation de l'ordre de mission lui a ensuite été adressée le 7 avril 2021 dans des conditions identiques à la première.
Il ressort des éléments relatés dans l'exposé des faits et n'est pas contesté qu'il existait entre M. [E] et son employeur un conflit s'agissant des conditions de remboursement de ses frais de déplacement dans le cadre de la mission et que le salarié souhaitait obtenir de meilleures conditions de remboursement.
Il ressort de la lettre du licenciement en date du 7 mai 2021que M. [E] a bien été licencié pour après en avoir menacé l'employeur, ne pas s'être présenté chez le client Framatome du 12 au 14 avril 2021 « suscitant chez le client l'incompréhension et le mécontentement et une perte de confiance » l'employeur considérant ce comportement comme « non professionnel et inacceptable » et fautif.
Sans qu'il soit nécessaire à ce stade de statuer sur la légitimité des conditions de remboursement prévues des frais de déplacement et leur conformité éventuelle au contrat de travail et à la convention collective Syntec, il y a lieu de constater que M. [E], au lieu de saisir le conseil des prud'hommes de demandes relatives à ses frais de déplacement ou éventuellement de démissionner ou prendre acte de la rupture de son contrat de travail faute d'accord sur les conditions d'exécution de son contrat de travail, a, à la fois refusé de signer et d'exécuter son nouvel ordre de mission en contradiction avec les stipulations de son contrat de travail susvisées, mais ne s'est présenté ni chez le client Framatome ni chez son employeur au [Localité 6] du 12 au 14 avril 2021 inclus en exerçant par ailleurs un chantage et en indiquant dès le 9 avril à la SAS Akka ingenierie produit qu'il ne se présenterait pas chez le client et le préviendrait faute des modification de l'ordre de mission. La SAS Akka ingenierie justifie au surplus que le client Framatome a exprimé son mécontentement et a résilié la commande des 12 mois restant après l'avoir convoqué sur le site de Framatome [Localité 9] en présence du prescripteur technique pour la mission en cours de M. [E]. Il doit par ailleurs être rappelé que le caractère fautif d'un comportement imputable à un salarié n'est pas subordonné à l'existence d'un préjudice subi par l'employeur. La matérialité des faits fautifs de M. [E] est dès lors établie.
Il convient dès lors de juger par voie d'infirmation du jugement déféré que le licenciement de M. [E] est fondé sur une cause réelle et sérieuse.
Sur la demande de rappel au titre de l'indemnité de déplacement :
Moyens des parties :
M. [E] sollicite la condamnation de la SAS Akka ingenierie produit à lui verser une somme de 5750, 46 € au titre de l'indemnité de déplacement. Il expose que la SAS Akka ingenierie produit a fait le choix de le rembourser forfaitairement des frais de déplacement ayant pour conséquence qu'il conservait à sa charge une partie des frais exposés mais que l'indemnité forfaitaire proposée ne doit pas être disproportionnée par rapport au montant réel des frais engagés par le salarié, l'employeur devant faire application du système de prise en charge des frais prévu par la convention Syntec et non les dispositions d'un accord contraire. Il explique que dans le barème mis en place par la SAS Akka ingenierie produit , le montant du remboursement est le même quel que soit le lieu d'exercice de la mission, qu'l s'agisse d'un déplacement local ou d'un grand ou très grand déplacement (0,39 € par kilomètres parcouru) en contradiction avec l'article 60 de la convention syntec qui prévoit le remboursement des frais tiendra compte de l'amortissement du véhicule, des frais de garage, de réparation et d'entretien, des frais d'assurance éventuellement des impôts et taxes sur les véhicules. Il expose qu'il a été contraint d'utiliser son véhicule personnel puisque l'utilisation des moyens de transport nécessitait six heures de trajet et que la prise en charge doit correspondre aux frais occasionnés contrairement au barème interne de la société c'est-à-dire prendre en conclusion du véhicule, les frais d'entretien' il n'a donc été indemnisé que partiellement. Par ailleurs l'utilisation du véhicule personnel doit être précédée d'un accord qui ne figure absolument pas sur les ordres de mission communiqués. En outre le barème interne permet l'utilisation d'un véhicule de service, ce qui ne lui a pas été proposé. Il est lésé par cette situation puisque s'il avait utilisé les transports en commun, il aurait pu bénéficier d'un remboursement à 100 %. Compte tenu de son impossibilité de rentrer à son domicile tous les soirs, il devrait entrer dans la catégorie des grands déplacements, ce qui aurait contraint l'employeur à l'indemniser à hauteur de 63,60 € par jour pour les repas et le logement au lieu des 9,50 € par jour pour les repas seulement comme prévu dans le barème interne. Son temps de repos n'aurait pas non plus été respecté s'il avait dû utiliser les transports en commun. Les difficultés ont été signalées à son employeur mais il n'a eu aucune réponse. Les demandes d'entrevue ont été traitées très tardivement.
La SAS Akka ingenierie produit fait valoir que l' article 60 de la convention collective Syntec n'a pour seul objet que de faire supporter à l'employeur sur la base d'un accord écrit des frais d'utilisation de fonctionnement du véhicule personnel du salarié et rien d'autre (indemnités kilométriques) et cette disposition conventionnelle n'est pas applicable en l'espèce. À aucun moment cette convention ne prévoit que l'employeur devra prendre en charge intégralement les indemnités kilométriques qui n'y sont même pas évoquées. Si les partenaires sociaux avaient voulu consacrer une prise en charge intégrale des indemnités kilométriques sur les trajets domicile/ lieu de mission et déroger au droit commun, ils l'auraient tout simplement écrit de manière claire et non équivoque. L'article 60 ne trouve à s'appliquer éventuellement que sous réserve de l'alinéa deux de l'article 50 de la même convention c'est-à-dire dès lors que les frais ont été forfaitisés par accord particulier ou selon un règlement spécifique approprié, le salarié ne peut pas en demander le remboursement intégral (aux frais réels) ; on ne peut pas revendiquer un droit à remboursement (du moment où les partenaires sociaux ont expressément prévu la possibilité d'un remboursement forfaitaire). Les barèmes internes applicables au sein du groupe notamment celui instituant la triangulation, sont conformes aux dispositions légales et conventionnelles et s'imposent au salarié.
Sur ce,
Il est de principe que les frais qu'un salarié justifie avoir exposés pour les besoins de son activité professionnelle et dans l'intérêt de l'employeur doivent lui être remboursés sans qu'ils ne puissent être imputés sur la rémunération qui lui est due, à moins qu'il n'ait été contractuellement prévu qu'il en conserverait la charge moyennant le versement d'une somme fixée à l'avance de manière forfaitaire et à la condition que la rémunération proprement dite du travail reste au moins égale au SMIC et que le montant de l'indemnité forfaitaire ne soit pas manifestement disproportionné par rapport aux montants des frais engagés.
L'article 50 de la convention collective Syntec relatif aux frais de déplacement et applicable au présent litige dispose que « les déplacements hors du lieu de travail habituel nécessités par le service ne doivent pas être pour le salarié l'occasion d'une charge supplémentaire ou d'une diminution de salaire. L'importance des frais dépend du lieu où s'effectuent les déplacements, ils ne sauraient être fixés d'une façon uniforme. Ils seront remboursés de manière à couvrir les frais d'hôtels et de restaurants du salarié. Ils pourront faire l'objet d'un forfait préalablement au départ, soit par accord particulier soit pas règlement spécifique approprié' »
L'article 51 prévoit qu'avant l'envoi d'un salarié en déplacement, un ordre de mission sera normalement établi, se référant au présent titre. L'ordre de mission pourra être permanent pour les salariés dont les fonctions, telles que précisées dans le contrat de travail, les conduisent à effectuer des déplacements multiples pour des interventions ponctuelles.
L'article 53 prévoit que « le salarié dont la lettre d'engagement mentionne qu'il doit travailler tout ou partie de l'année en déplacement continu aura droit, outre son salaire, à une indemnité de remboursement de frais pendant la durée de ce déplacement. Cette indemnité sera :
- soit forfaitaire, auquel cas, elle représentera la différence entre les frais de séjour et les dépenses normales du salarié s'il vivait au lieu où il a été engagé, et sera fixée par accord préalable entre l'employeur et le salarié, sauf règlement spécifique conformément à l'article 50 ;
- soit versée sur pièces justificatives ».
Selon l'article 59, les déplacements professionnels peuvent être effectués par :
1. Tous les moyens de transport en commun selon les modalités suivantes, sauf stipulation contraire :
- avion (classe touriste) ;
- train et bateau : 2e classe ou confort équivalent pour les ETAM, 1re classe ou confort équivalent pour les IC.
2. Tous les moyens personnels du salarié lorsque celui-ci a été autorisé par son employeur à les utiliser à des fins professionnelles.
L'article 60 de la même convention collective dans sa version applicable au présent litige dispose que lorsque le salarié utilise pour les besoins du service un véhicule automobile, une motocyclette ou un cyclomoteur, les frais occasionnés sont à la charge de l'employeur, à condition qu'un accord écrit ait précédé cette utilisation. Cet accord peut être permanent.
Il ressort de l'article 7 relatif aux frais professionnels du contrat de travail que « les frais professionnels que M. [E] exposera dans le cadre et pour les besoins de ses fonctions lui seront remboursés conformément aux règles et usages en vigueur au sein de la société. La société se réserve le droit de modifier à tout moment le système de remboursement des frais professionnels en y substituant tout autre système qui se révélerait plus adapté à l'évolution de la réglementation et des circonstances, sans que cela représente une modification du présent contrat travail ... »
Il résulte des dispositions susvisées que les déplacements hors du lieu de travail habituel nécessités par le service ne doivent pas être pour le salarié l'occasion d'une charge supplémentaire ou d'une diminution de salaire.
Le mode de prise en charge par l'employeur de ces frais de déplacements peut se faire de manière forfaitaire par un forfait préalablement prévu au départ :
- Soit par accord particulier
- Soit par règlement spécifique approprié
Il n'est pas contesté l'existence d'un barème interne au sein de la SAS Akka ingenierie produit intitulé « barème de remboursement des frais professionnels pour les missions localisées en France métropolitaine » daté du 3 mars 2014 notamment instituant un système de triangulation pour caractériser la nature des déplacements dans son article 4.
Il n'est pas démontré que l'article 60 susvisé exclurait le système de triangulation mis en 'uvre dans le barème interne susvisé qui caractérise le type de déplacement.
Ce barème constitue un règlement spécifique de prise en charge des frais de déplacement de manière forfaitaire comme prévu à l'article 50 et auquel le contrat de travail fait référence. Par conséquent, la prise en charge forfaitaire des frais de déplacement ne nécessitait pas l'accord particulier du salarié pour être mise en 'uvre.
L'application de ce barème interne doit toutefois prévoir un montant de l'indemnité forfaitaire qui ne soit pas manifestement disproportionné par rapport aux montants des frais réellement engagés par le salarié afin de se rendre sur son lieu de mission, les déplacements ne devant pas constituer l'occasion « d'une charge supplémentaire ou d'une diminution de salaire » c'est-à-dire un coût plus important à celui engendré pour se rendre sur le lieu de travail habituel.
Ledit barème interne litigieux fait une distinction entre le déplacement local, le petit déplacement, le grand et le très grand déplacement selon la méthode de la triangulation et prévoit des prises en charge distinctes pour chaque type de déplacement.
M. [E] expose qu'il a été dans l'obligation prendre sa voiture personnelle et de dormir sur son lieu de mission à [Localité 9] (38) ne pouvant utiliser les transports en commun générant un trajet trop long de 6 heures sans respect de son temps de repos quotidien malgré un remboursement qui aurait été dans ce cas de 100 %. M. [E] considère qu'il aurait dû bénéficier de l'indemnisation des grands déplacements à hauteur de 63,60 € par jour pour les repas et le logement.
Or, il ressort de différents sites de calculs d'itinéraires (Via Michelin, Google...) que le trajet entre le siège de l'entreprise, lieu habituel d'exécution du contrat de travail ([Adresse 1] à [Localité 10] (73)) et le lieu d'exécution de la mission ([Adresse 11] à [Localité 9] (38)) est compris entre 77,7 kilomètres et 81,6 km selon les voies choisies.
Par conséquent M. [E] aurait valablement dû bénéficier de l'application du barème interne (entre 76 et 275 Kms) des grands déplacements, soit 63,60 € par jour pour les 3 premiers mois et 54,10 € à partir du premier jour du 4° mois par jour travaillé (soit 4 jours) outre l'indemnité kilométrique de 0,39 € par kilomètres pour un trajet aller/retour par semaine + le péage pour un aller et retour par semaine, soit la somme de 4 492,25 € pour les trois premiers mois et 4177, 94 € pour les mois suivants soit une somme totale de 8 670,19 €.
La SAS Akka ingenierie produit justifie que M. [E] a été indemnisé à hauteur de 5 343,90 € (935,90 € le 30 novembre 2020, 788,80 € et 881,60 € l4 mars 2021, 649,60 et 1020,80 € le 13 avril 2021649,60 € et 417,60 € le 26 mai 2020) pour la totalité de la mission exécutée à [Localité 9] (38) avec son véhicule à savoir à hauteur du 0,39 € du kilomètre et 9,50 € de repas par jour conformément au barème interne applicable, l'entreprise appliquant le remboursement des petits déplacements (entre 15 et 75 kilomètres) en application du système de triangulation.
Il convient dès lors de condamner la SAS Akka ingenierie produit à verser à M. [E] la somme de 3 326,29 € de frais de déplacement complémentaires par voie d'infirmation du jugement déféré.
Sur les demandes accessoires :
Il convient de confirmer la décision de première instance s'agissant des dépens et de l'infirmer s'agissant des frais irrépétibles.
La SAS Akka ingenierie produit, partie perdante qui sera condamnée aux dépens et déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile, devra payer à M. [E], la somme de 3 000 € au titre de ses frais irrépétibles engagés en première instance et en appel.
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant contradictoirement après en avoir délibéré conformément à la loi,
CONFIRME le jugement déféré en ce qu'il a :
Fixé la moyenne des salaires à 37871,66 €
Débouté M. [E] de sa demande d'exécution provisoire du jugement prononcé
Condamné la SAS Akka ingenierie produit aux éventuels dépens
L'INFIRME pour le surplus,
STATUANT à nouveau sur les chefs d'infirmation,
DIT que le licenciement de M. [E] est fondé sur une cause réelle et sérieuse et DEBOUTE M. [E] de l'ensemble des demandes à ce titre
CONDAMNE la SAS Akka ingenierie produit à verser à M. [E] la somme de 3 326,29 € au titre de frais de déplacement complémentaires,
Y ajoutant,
CONDAMNE la SAS Akka ingenierie produit aux dépens d'appel.
CONDAMNE la SAS Akka ingenierie produit à payer à M. [E] la somme de 3 000 € à sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour l'instance.
Ainsi prononcé publiquement le 03 Juillet 2025 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Madame Valéry CHARBONNIER, Présidente, et Monsieur Bertrand ASSAILLY,Greffier pour le prononcé auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier La Présidente