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Décisions

CA Douai, ch. 2 sect. 1, 3 juillet 2025, n° 23/03188

DOUAI

Arrêt

Autre

CA Douai n° 23/03188

3 juillet 2025

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 2 SECTION 1

ARRÊT DU 03/07/2025

****

N° de MINUTE : 25/402

N° RG 23/03188 - N° Portalis DBVT-V-B7H-U7W6

Jugement (N° 22/02612) rendu le 10 Janvier 2023 par le Tribunal de Commerce de Lille

APPELANTE

Maxamcorp Holding, société de droit espagnol, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 9]

[Adresse 7]

[Localité 1] (Espagne)

représentée par Me Marie Hélène Laurent, avocat au barreau de Douai, avocat constitué, assistée de Me Laurent Cotret, avocat au barreau de Paris, avocat plaidant

INTIMÉES

SELAS. MJS Partners représentée par Me [L] [J] en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société [Y] [H] SAS

[Adresse 8]

[Localité 4]

SCP Alpha Mandataires Judiciaires prise en la personne de Me [Z] [D] en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société [Y] [H] SAS

[Adresse 2]

[Localité 6]

représentées par Me Catherine Camus-Demailly, avocat au barreau de Douai, avocat constitué, assistées de Me Thomas Deschryver, avocat au barreau de Lille substitué par Me Mélanie Gabreau, avocat au barreau de Lille

SELURL [A] [S] [E] [W] prise en la personne de Me [S] [A] en sa qualité de mandataire ad'hoc de la SAS [Y] [H] SAS

[Adresse 3]

[Localité 5]

défaillante , à qui la déclaration d'appel le 07 septembre 2023 à personne habilitée

DÉBATS à l'audience publique du 14 mai 2025 tenue par Dominique Gilles magistrat chargé d'instruire le dossier qui, a entendu seul(e) les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS :Béatrice Capliez

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Dominique Gilles, président de chambre

Pauline Mimiague, conseiller

Aude Bubbe, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 03 juillet 2025 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Dominique Gilles, président et Béatrice Capliez, adjoint administratif faisant fonction de greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 23 avril 2025

****

EXPOSE DU LITIGE

La société par action simplifiée [Y] [H] SAS est spécialisée dans la production, le transport par sous-traitance, la vente et l'utilisation de nitrates d'ammonium (NASC, NAI), acides nitrites, solutions d'ammoniaques (ALCALI) et autres dérivés de l'ammoniac.

Une procédure de mandat ad'hoc ayant abouti à la désignation de la SELARL [A] [S] & [E] [W], le tribunal de commerce de Lille Métropole, par jugement du 26 octobre 2020, a':

- ouvert une procédure de redressement judiciaire à son encontre,

- désigné la SCP Alpha Mandataires judiciaires prise en la personne de Me [Z] [D] et la SELAS MJS Partners prise en la personne de Me [L] [J] en qualité de mandataires judiciaires ainsi que la SELARL Aja pris en la personne de Me [L] [K] et Maître [T] [I] en qualité d'administrateurs judiciaires,

- fixé la date provisoire de cessation des paiements au 22 octobre 2020.

Par jugement du 13 janvier 2021, le tribunal de commerce de Lille Métropole a notamment :

- converti la procédure de sauvegarde en liquidation judiciaire,

- autorisé une poursuite de l'activité jusqu'au 13 avril 2021,

- nommé les mandataires en place en qualité de liquidateurs judiciaires.

Par jugement du 7 avril 2021, le tribunal de commerce de Lille Métropole a prolongé l'autorisation de poursuite de l'activité pour trois mois supplémentaires soit jusqu'au 13 juillet 2021.

Par jugement du 12 mai 2021, le tribunal de commerce de Lille Métropole a notamment :

- mis fin à la poursuite de l'activité par suite de la sécurisation du site,

- mis fin avec effet immédiat à la mission des co-administrateurs judiciaires.

Par requête du 3 mai 2021, la société de droit espagnol Maxamcorp Holding a saisi le juge commissaire d'une demande en relevé de forclusion, afin de lui permettre de déclarer sa créance au passif de la procédure collective de la société [Y] [H] SAS à défaut de déclaration dans le délai légal.

Par ordonnance du 24 novembre 2021, le juge-commissaire a débouté la société Maxamcorp de sa demande.

Le même jour, la société Maxamcorp Holding, unique actionnaire de la société [Y] [H] SAS, et détenue à 99,9 % par la société Maxamcorp a formé opposition contre cette ordonnance.

Par jugement contradictoire du 10 janvier 2023, le tribunal de commerce de Lille Métropole a':

- déclaré recevable mais non fondée l'opposition de la société Maxamcorp

Holding ;

- confirmé l'ordonnance du juge-commissaire du 24 novembre 2021 dans toutes ses dispositions ;

- débouté la société Maxamcorp Holding de l'ensemble de ses demandes ;

- condamné la société Maxamcorp Holding à payer à la SELAS MJS Partners prise en la personne de Me [L] [J] et la SCP Alpha Mandataires Judiciaires prise en la personne de Me [Z] [D], ès qualités de liquidateurs judiciaires, la somme de 1 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure

civile ;

- dit que le jugement sera signifié par la partie la plus diligente ou par celle qui y a un intérêt ;

- condamné la société Maxamcorp Holding aux dépens.

Par déclaration d'appel déposée au greffe le 10 juillet 2023, la société Maxamcorp Holding a relevé appel de ce jugement, déférant à la cour l'ensemble de ses chefs.

Le 28 août 2023, la SELAS MJS Partners, représentée par Me [Z] [D] et la SCP Alpha Mandataires représentée par Me [L] [J] ont constitué avocat.

La SELARL [A] [S] & [E] [W] n'a pas constitué avocat.

La déclaration d'appel lui a été signifiée en application de l'article 902 du code de procédure civile par exploit du 7 septembre 2023.

Aux termes de ses dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 30 avril 2025, la société Maxamcorp Holding demande à la cour

de :

- infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Lille Métropole le 10 janvier 2023 en ce qu'il a confirmé l'ordonnance du juge-commissaire et débouté la société Maxamcorp Holding de ses demandes ;

- dire que [Y] [H] a omis la créance à échoir de la société Maxamcorp Holding de la liste des créanciers visées à l'article L.622-6 du code de commerce ;

- dire la demande de relevé de forclusion de la société Maxamcorp Holding recevable et bien fondée';

- ordonner le relevé de forclusion de la société Maxamcorp Holding ;

- autoriser la société Maxamcorp Holding à déclarer sa créance de recours auprès des liquidateurs judiciaires ;

- rejeter l'ensemble des demandes des autres parties ;

- condamner solidairement les liquidateurs judiciaires à régler à la société Maxamcorp Holding la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner solidairement les liquidateurs judiciaires aux entiers dépens de l'instance.

Ces demandes ont été précédemment signifiées à la SELARL [A] [S] & [E], par acte du 22 décembre 2023.

La société Maxamcorp Holding soutient, en application de l'article L. 622-26 alinéa 1er du code de commerce, que sa demande en relevé de forclusion est recevable, dans la mesure où l'absence de déclaration de créance n'est pas de son fait mais résulte de l'omission du débiteur. Elle indique en effet que la société [Y] [H] SAS a omis dans la liste de déclarer les créances 'à échoir' et s'est contentée uniquement de déclarer les créances échues. Elle fait en effet valoir qu'elle détient à l'encontre de la société [Y] Tran SAS une créance au titre de son recours personnel et subrogatoire de garant en application de l'article 16 du bail conclu le 19 février 2011 entre la société GPB (bailleur) et la société [Y] Tran SAS (preneur). Elle soutient que dès lors que la liste des créances n'est pas conforme aux dispositions de l'article R. 622-5 alinéa 1er du code de commerce, la créance ne peut être considérée comme ayant été valablement portée sur la liste des créances de l'article L. 622-26 du même code et que cette omission de la créance «'à échoir'», peu important qu'elle ait eu connaissance de l'ouverture de la procédure collective, la relève automatiquement de la forclusion.

Elle précise qu'en première instance, la société Maxamcorp Holding avait sollicité un renvoi pour lui permettre de faire valoir ses arguments et ses pièces et que cette demande a été rejetée, de sorte que ses conclusions et pièces présentées à une date proche de l'audience ont été écartées par le tribunal de commerce et qu'elle n'a pas été en mesure de les faire valoir en première instance.

Aux termes de ses dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 23 avril 2025, les liquidateurs judiciaires demandent à la cour de :

- confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Lille Métropole le 10 janvier 2023 en toutes ses dispositions ;

Et en tout état de cause :

- débouter la société Maxamcorp Holding de toutes ses demandes ;

- condamner la société Maxamcorp Holding à payer à la SELARL MJS Partners représentée par Me [L] [J], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société [Y] [H] SAS la somme de 5'000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile :

- condamner la société Maxamcorp Holding à payer à la SCP Alpha Mandataires judiciaires représentée par Me [Z] [D], ès qualités de co-liquidateur judiciaire de la société [Y] [H] SAS la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Ces conclusions comportent des demandes précédemment signifiées à la SELARL [A] [S] & [E] [W] par exploit du 4 avril 2024, en dehors des sommes réclamées au titre de l'article 700 du code de procédure civile portées de 3'000 à 5'000 euros dans les conclusions du 23 avril.

Les liquidateurs soutiennent que la société MaxamCorp Holding figurait bien sur la liste des créanciers présentée par le débiteur conformément aux dispositions légales et que l'absence de mention d'une créance à échoir est inopérante pour l'appréciation du bien-fondé d'un relevé de forclusion, dès lors qu'elle avait connaissance de la procédure collective et qu'il lui appartenait de signaler au liquidateur l'incomplétude éventuelle de la créance déclarée.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 7 mai 2025.

MOTIFS DE LA DECISION

Il est constant que la demande de relevé de forclusion a été effectuée dans les délais, compte-tenu de l'allongement des délais de procédure au bénéfice de l'appelante, qui est une société dont le siège est en Espagne.

Sur le fond de la demande en relevé de forclusion, les premiers juges ont exactement statué par de justes motifs que la cour adopte.

A ces justes motifs, il sera ajouté ce qui suit.

Nonobstant le fait que la société MaxamCorp Holding est l'associé unique du débiteur, il doit être rappelé que lorsque le débiteur a porté une créance à la connaissance du mandataire judiciaire, il est légalement présumé avoir agi pour le compte du créancier tant que celui-ci n'a pas adressé de déclaration de créance.

Or, il est exact qu'en l'espèce le débiteur a bien porté la société MaxamCorp Holding sur la liste des créanciers, pour la somme de 11'326,24 euros à titre chirographaire, et que le mandataire en a avisé celui-ci par lettre du 13 novembre 2020 l'informant de cette production et de son montant, au visa des articles L. 622-6 et R. 622-5 du code de commerce. Le créancier n'a pas effectué d'autre déclaration de créance malgré l'invitation également contenue dans cette lettre.

Or, le débiteur est présumé avoir mentionné la créance au nom et pour le compte de la société MaxamCorp Holding.

Par conséquent, il n'est pas valablement soutenu que l'omission prétendue par le débiteur d'une créance à échoir, correspondant, comme la créance de 11'326,24 euros, au recours personnel et subrogatoire du garant en application de l'article 16 du bail conclu au bénéfice du débiteur, devrait s'analyser comme une irrégularité au regard dispositions de l'article R. 622-5 alinéa 1er du code de commerce, entraînant que la créance n'aurait pas été valablement portée sur la liste des créances de l'article L. 622-26 du même code.

Il en résulte que les premiers juges doivent être approuvés d'avoir considéré que qu'il n'y avait pas eu d'omission dans la communication de la liste des créanciers du débiteur.

Ils ont également exactement retenu que le créancier n'établissait pas que la défaillance n'était pas due de son fait.

Par conséquent le jugement entrepris sera confirmé.

En équité, la cour alloue aux liquidateurs ès qualités une somme au titre de l'article 700 du code de procédure en appel, dont le montant sera précisé au dispositif du présent arrêt.

L'appelante sera également condamnée aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement entrepris,

Déboute la société MaxamCorp Holding de toutes ses demandes,

La condamne, au titre de l'article 700 du code de procédure civile en appel, à verser 2'000 euros à la SELAS MJS Partners et 2'000 euros à la SCP Alpha Mandataires Judiciaires, ces deux sociétés étant prise en leur qualité de liquidateur judiciaire de la SAS [Y] [H],

Condamne la société MaxamCorp Holding aux dépens d'appel,

Rejette les prétentions plus amples ou contraires.

Le greffier

Béatrice CAPLIEZ

Le président

Dominique GILLES

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