Livv
Décisions

CA Douai, ch. 2 sect. 1, 3 juillet 2025, n° 23/02989

DOUAI

Arrêt

Autre

CA Douai n° 23/02989

3 juillet 2025

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 2 SECTION 1

ARRÊT DU 03/07/2025

N° de MINUTE : 25/401

N° RG 23/02989 - N° Portalis DBVT-V-B7H-U7D4

Ordonnance (N° 2022/572-1) rendue le 02 Juin 2023 par le Juge commissaire de [Localité 7] Metropole

APPELANTE

SAS TADP prise en la personne de son représentant légal domicilié ès qualités audit siège

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par Me Julie Penet, avocat au barreau de Lille, avocat constitué

INTIMÉS

Monsieur [R] [F]

né le [Date naissance 1] 1972 à [Localité 8]

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 5]

représenté par Me Mickaël Andrieux, avocat au barreau de Lille, avocat constitué

SELAS Mjs Partners ès qualités de mandataire judiciaire de la SASU TADP

[Adresse 6]

[Localité 4]

défaillante, à qui la déclaration d'appel a été signifiée le 22 septembre 2023 à personne habilitée

DÉBATS à l'audience publique du 14 mai 2025 tenue par Dominique Gilles magistrat chargé d'instruire le dossier qui, a entendu seul(e) les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS :Béatrice Capliez

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Dominique Gilles, président de chambre

Pauline Mimiague, conseiller

Aude Bubbe, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 03 juillet 2025 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Dominique Gilles, président et Béatrice Capliez, adjoint administratif faisant fonction de greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 23 avril 2025

****

EXPOSE DU LITIGE

Par un arrêt rendu par la cour d'appel de Douai le 8 juillet 2022 (chambre sociale) la société TADP a notamment été condamnée à payer à M. [R] [F] les sommes suivantes :

- 1 049,42 euros à titre d'indemnités compensatrices de congés payés,

- 1 000 euros de dommages et intérêts en réparation du préjudice causé par les sanctions disciplinaires abusives,

- 3 000 euros de dommages et intérêts en réparation du préjudice causé par l'entrave à ses fonctions de délégué du personnel,

- 6 000 euros en réparation de son préjudice moral causé par le harcèlement moral qu'il a subi,

- 55 414,10 euros à titre d'indemnité pour la violation de son statut protecteur,

- 11 082,78 euros à titre d'indemnité pour licenciement nul,

- 3 694,26 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 369,42 euros pour les congés payés y afférents,

- 1962,60 euros d'indemnité légale de licenciement,

- 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Par jugement du 8 août 2022, le tribunal de commerce de Lille- Métropole a ouvert une procédure de sauvegarde judiciaire au bénéfice de la société TADP et a désigné comme mandataire judiciaire la SELAS MJS Partners.

Le 8 septembre 2022, la société TADP a formé un pourvoi en cassation contre l'arrêt de la cour d'appel de Douai du 8 juillet 2022.

M. [R] [F] a déclaré sa créance à la procédure collective de la société TADP pour un montant total de 83 203,16 euros. Le mandataire judiciaire a notifié au créancier, par lettre recommandée avec accusé de réception, que cette créance était rejetée, l'invitant à former des explications.

Par ordonnance du 2 juin 2023, le juge-commissaire a admis la créance de M. [R] [F] pour un montant de 83 203,16 euros à titre privilégié au passif de la procédure collective de la société TADP, au motif que la décision de la cour d'appel était exécutoire malgré le pourvoi en cassation.

Par déclaration d'appel reçue au greffe de la cour par voie électronique le 28 juin 2023, la société TADP a relevé appel de cette décision, en intimant M. [R] [F] et la SELAS MJS Partners. Cette déclaration a été notifiée par le greffe à la SELAS MJS Partners le 29 juin 2023.

M. [R] [F] a constitué avocat le 21 août 2023.

La SELAS MJS Partners n'a pas constitué avocat et le greffe, le 24 août 2023, a donné avis à l'appelante d'avoir à signifier sa déclaration d'appel à ce mandataire.

Aux termes de ses conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 21 septembre 2023, signifiées en même temps que la déclaration d'appel à la société MJS Partners, le 22 septembre 2023, la société TADP demande à la cour d'infirmer l'ordonnance du 2 juin 2023 et, statuant à nouveau, de :

- dire que la créance de M. [R] [F] n'est pas définitive et qu'elle ne peut à ce titre être admise au passif de la procédure collective de la société TADP à titre privilégié ;

- constater qu'une instance est en cours ;

- condamner M. [R] [F] à lui payer la somme de 1'500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner M. [R] [F] aux entiers dépens.

Elle soutient, en application de l'article L.624-2 du code de commerce, que la créance n'est pas certaine puisqu'elle fait l'objet d'une contestation et qu'une instance est en cours s'agissant du pourvoi en cassation, et que dans ces conditions, le juge-commissaire ne pouvait pas statuer sur l'admission ou le rejet de la créance au passif de la procédure collective de la société TADP.

Elle fait valoir que cette solution est logique dans la mesure où une fois que la créance est admise, elle ne peut plus être contestée quant à son quantum notamment.

M. [R] [F] n'a pas conclu.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 23 avril 2025 et l'affaire a été appelée à l'audience du 14 mai suivant.

SUR CE

La notion d'instance en cours de l'article L.624-2 du code de commerce renvoie directement à celle de l'article L.622-21 du même code qui énonce que le jugement d'ouverture interrompt toute action en justice engagée par le créancier dont la créance est née antérieurement. Il s'agit des actions tendant à la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent ou tendant à la résolution d'un contrat pour défaut de paiement d'une somme d'argent.

L'article L.622-22 du même code précise que l'instance est interrompue jusqu'à ce que le créancier poursuivant ait procédé à la déclaration de sa créance et elle est reprise de plein droit, les organes de la procédure collective dûment appelés mais ne tend qu'à la constatation de la créance et à la fixation de son montant.

Lorsqu'une instance, qui porte sur la créance, est pendante devant un juge du fond à la date du jugement d'ouverture, cette instance est interrompue pour permettre au créancier de déclarer sa créance, et mettre en cause l'organe de la procédure qui assiste ou représente le débiteur. Et c'est le tribunal initialement saisi qui, si la créance est fondée, en fixera le montant au passif de la procédure collective mais aucune condamnation ne peut être prononcée. Ainsi, l'instance en cours ôte au juge-commissaire le pouvoir de statuer sur la créance.

Toutefois, en l'espèce, nulle instance n'était en cours au moment de l'ouverture de la procédure de sauvegarde, dès lors que la cour d'appel s'était antérieurement prononcée sur l'existence de la créance litigieuse, par une décision ayant force de chose jugée.

Il n'est par conséquent pas valablement soutenu que le juge commissaire n'avait pas le pouvoir de statuer sur la créance litigieuse.

La décision entreprise doit être confirmée.

La SAS TADP doit voir rejeter toutes ses demandes.

Elle sera condamnée aux dépens.

PAR CES MOTIFS

Confirme l'ordonnance entreprise,

Rejette les prétentions de la SAS TADP,

La condamne aux dépens.

Le greffier

Béatrice CAPLIEZ

Le président

Dominique GILLES

© LIVV - 2025

 

[email protected]

CGUCGVMentions légalesPlan du site