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Décisions

CA Basse-Terre, 1re ch., 7 juillet 2025, n° 24/00830

BASSE-TERRE

Ordonnance

Autre

CA Basse-Terre n° 24/00830

7 juillet 2025

COUR D'APPEL

DE [Localité 8]

MISE EN ETAT

ORDONNANCE DE MISE EN ETAT

DU 7 JUILLET 2025

RG N° : N° RG 24/00830 - N° Portalis DBV7-V-B7I-DXES

1ère Chambre

Nous Madame Judith DELTOUR, Président de chambre, chargé de la mise en état, assistée de Madame Prescillia ARAMINTHE, greffier,

M. [E] [U]

[Adresse 4]

[Localité 6]

Représentant : Me Michaël SARDA, avocat au barreau de Guadeloupe Saint-Martin Saint-Barthélemy

APPELANT

M. [W] [R]

[Adresse 7]

[Localité 5]

Représentant : Me Maryan MOUGEY, avocat au barreau de Guadeloupe Saint-Martin Saint-Barthélemy

INTIMÉ

Procédure

Se fondant sur un prêt consenti le 12 octobre 2010 et des reconnaissances de dettes, suivant assignation du 16 novembre 2023, par jugement réputé contradictoire rendu le 17 mai 2024, le tribunal de proximité de Saint-Martin Saint-Barthélemy a, dans l'instance opposant M. [W] [R] à M. [E] [U],

- déclaré irrecevable comme prescrite l'action en paiement intentée par M. [R] à l'encontre de la société Boucherie de Concordia,

- condamné M. [U] à payer à M. [R] la somme de 200 000 dollars américains convertis au taux de change en euros à la date de la décision, avec intérêts au taux légal à compter du 16 novembre 2023 ;

- débouté M. [R] de sa demande de dommages-intérêts ;

- condamné M. [U] à payer la somme de 1000 euros à M. [R] en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- dit n'y avoir lieu d'écarter l'exécution provisoire de plein droit ;

- condamne M. [U] aux dépens avec distraction au pro't de Me André.

Suivant signification du 24 juillet 2024, par déclaration reçue le 30 août 2024, M. [U] a interjeté appel de la décision en ce qu'elle l'a condamné à payer à M. [R] la somme de 200 000 dollars américains convertis au taux de change en euros à la date de la décision, avec intérêts au taux légal à compter du 16 novembre 2023, au paiement des dépens et de 1000 euros à M. [R] en application de l'article 700 du code de procédure civile et dit n'y avoir lieu d'écarter l'exécution provisoire de plein droit.

Suivant conclusions d'appel communiquées le 29 novembre 2024, par conclusions d'incident du 28 février 2025, reprises et développées par conclusions d'incident communiquées le 16 mai 2025 et le 6 juin 2025, M. [R] a sollicité au visa de l'ancien article 526 du code de procédure civile, de

- constater que l'appelant n'a pas exécuté la décision de première instance revêtue de

l'exécution provisoire de droit

- prononcer la radiation du rôle de l'affaire enregistrée sous le RG 24/00830

- condamner M. [U] à lui payer la somme de 1000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et au paiement des dépens avec distraction.

Par conclusions d'incident communiquées le 16 mai 2025, reprises et développées le 19 mai 2025, M. [U] a demandé, au via des articles 526, 521 et 954 du code de procédure civile et de l'article 6§ 1er de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de

- dire et juger qu'il justifie d'une impossibilité manifeste d'exécuter la décision entreprise, en raison de sa situation économique avérée, de son âge avancé et de l'absence de patrimoine mobilisable ;

- dire et juger que l'exécution de la décision entreprise aurait pour lui des conséquences manifestement excessives au sens de l'article 526 alinéa 2 du code de procédure civile au regard du montant exigé et de sa situation de précarité ;

- dire et juger qu'il a interjeté appel de bonne foi, constitué avocat, conclu dans les délais et agi dans le respect du contradictoire ;

- dire et juger que l'appel présente une utilité manifeste en ce qu'il tend à contester une reconnaissance de dette sur le fondement de moyens sérieux, tirés notamment de la prescription, de la nullité de l'acte et de la confusion de patrimoines ;

- rejeter la demande de radiation du rôle ;

- condamner M. [R] à lui payer la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Suivant avis du greffe du 12 mai 2025, l'incident a été fixé à l'audience du 16 juin 2025. L'affaire a été mise en délibéré pour être rendu le 7 juillet 2025.

Motifs de la décision

En application de l'article 524 du code de procédure civile applicable au litige, lorsque l'exécution provisoire est de droit ou a été ordonnée, le premier président ou, dès qu'il est saisi, le conseiller de la mise en état peut, en cas d'appel, décider, à la demande de l'intimé et après avoir recueilli les observations des parties, la radiation du rôle de l'affaire lorsque l'appelant ne justifie pas avoir exécuté la décision frappée d'appel ou avoir procédé à la consignation autorisée dans les conditions prévues à l'article 521, à moins qu'il lui apparaisse que l'exécution serait de nature à entraîner des conséquences manifestement excessives ou que l'appelant est dans l'impossibilité d'exécuter la décision. La demande de l'intimé doit, à peine d'irrecevabilité prononcée d'office être présentée avant l'expiration des délais prescrits aux articles 905-2, 909, 910 et 911.

En l'espèce, la demande de radiation est recevable pour avoir été formée avant l'expiration des délais accordés à l'intimé pour conclure au fond et après la signification du jugement le 24 juillet 2024.

Il est constant que M. [U] n'a pas sollicité du premier président l'arrêt de l'exécution provisoire et qu'il n'a pas fait valoir devant lui une impossibilité d'exécution ou des conséquences manifestement excessives. Les chances de succès de la procédure d'appel qui peuvent être soutenues devant le premier président statuant en matière d'arrêt de l'exécution provisoire, ne peuvent pas l'être devant le conseiller de la mise en état statuant en matière de radiation de l'appel.

Les demandes de dire et juger constituent éventuellement des moyens au soutien des demandes mais non des prétentions au sens de l'article 4 du code de procédure civile et, en tout état de cause, le conseiller de la mise en état statuant en matière de radiation, n'est pas juge d'appel de la décision, de sorte que les arguments de fond relatifs à la reconnaissance de dette, à son éventuelle nullité et à la confusion des patrimoines ne sont pas pertinents, pas plus que la question de la bonne foi ou du respect du contradictoire.

M. [U] supporte la charge de l'impossibilité d'exécution de la décision ou de l'existence de conséquences manifestement excessives. Force est de relever que les arguments tirés de l'âge ou de la situation de retraité ne sont pas pertinents, appelant et intimé étant tous deux retraités, M. [R] est né le [Date naissance 2] 1943 et M. [U] le [Date naissance 3] 1944.

Il résulte des pièces produites par M. [R] que M. [U] est le gérant d'une SCI [L], propriétaire d'immeubles, maison et terrain agricole préservés grâce à un prêt de 250 000 euros de M. [R], ainsi qu'établi par le procès-verbal d'assemblée générale du 18 décembre 2014 ; l'immeuble fait d'ailleurs l'objet d'une inscription d'hypothèque en vertu de ce prêt ; il est également le gérant d'une SCI Swann propriétaire d'une maison lot [Adresse 1] [Adresse 9] à Saint-Martin. Une SARL Enzo, ayant une activité de gestion de biens et de fonds est d'ailleurs domiciliée à l'adresse de la SCI Swann. M. [U] ne mentionne pas ces éléments dans ses écritures qui sont démontrés par les pièces produites par son adversaire. M. [U] est également à la tête d'une SARL Concordia ayant une activité de boucherie et de restauration, pour laquelle il produit une déclaration d'impôt sur les sociétés mentionnant un déficit. Quoiqu'il en soit, si le patrimoine de la SARL et sa situation sont indifférentes, en l'état d'une distinction des patrimoines, tel n'est pas le cas du patrimoine immobilier de M. [U] constitué par le biais de SCI propriétaires d'immeubles, qui, nonobstant les prétentions contraires de l'intéressé constituent un patrimoine mobilisable. Il n'est fait état d'aucun risque pour le recouvrement en cas d'infirmation de la décision.

S'agissant de l'entrave alléguée au droit d'accès au juge d'appel, la mesure de radiation pour défaut d'exécution a été jugée non contraire à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés, considérant qu'il existe un rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but recherché. En l'espèce, la mesure de radiation est prise aux motifs que M. [U], qui n'a pas sollicité ni l'arrêt ni l'aménagement de l'exécution provisoire, n'a démontré ni l'impossibilité d'exécuter le jugement régulièrement signifié, ni le risque de conséquences manifestement excessives résultant de l'exécution la décision de première instance.

Il résulte de ces éléments que la demande de radiation est fondée.

M. [U] qui succombe est condamné au paiement des dépens de l'incident. En application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, il est débouté de sa demande et condamné à payer à M. [R] une somme de 1 000 euros.

Par ces motifs

Nous président de chambre conseiller de la mise en état,

- ordonnons la radiation de l'appel N°24-830 ;

- condamnons M. [E] [U] au paiement des dépens de l'incident ;

- condamnons M. [E] [U] à payer à M. [W] [R] la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

La décision a été signée par le conseiller de la mise en état et le greffier

Le conseiller de la mise en état Le greffier

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