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Décisions

CA Caen, référés, 8 juillet 2025, n° 25/00032

CAEN

Ordonnance

Autre

CA Caen n° 25/00032

8 juillet 2025

N° RG : 25/00032

N° Portalis DBVC-V-B7J-HUTX

COUR D'APPEL DE CAEN

Minute n° 40/2025

PREMIÈRE PRÉSIDENCE

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ DU 08 JUILLET 2025

DEMANDEURS AU RÉFÉRÉ :

Monsieur [S] [T]

Né le [Date naissance 1] 1975 à [Localité 7]

[Adresse 10]

NOTRE DAME DE [Localité 8]

[Localité 3]

Non comparant, ayant pour avocat postulant la SELARL Inter-barreaux KAEM'S AVOCATS, agissant par Me Gaël BALAVOINE, avocat au Barreau de CAEN et pour avocat plaidant la SELARL Inter-barreaux KAEM'S AVOCATS, agissant par Me Blandine DAVID, avocat au Barreau de PARIS, comparante

Madame [A] [E] épouse [T]

Née le [Date naissance 6] 1976 à [Localité 9]

[Adresse 10]

NOTRE DAME DE [Localité 8]

[Localité 3]

Non comparante, ayant pour avocat postulant la SELARL Inter-barreaux KAEM'S AVOCATS, agissant par Me Gaël BALAVOINE, avocat au Barreau de CAEN et pour avocat plaidant la SELARL Inter-barreaux KAEM'S AVOCATS, agissant par Me Blandine DAVID, avocat au Barreau de PARIS, comparante

SCEA DU VAL FORÊT,

dont le siège social est [Adresse 11]

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

Non comparante, ayant pour avocat postulant la SELARL Inter-barreaux KAEM'S AVOCATS, agissant par Me Gaël BALAVOINE, avocat au Barreau de CAEN et pour avocat plaidant la SELARL Inter-barreaux KAEM'S AVOCATS, agissant par Me Blandine DAVID, avocat au Barreau de PARIS, comparante

Copie exécutoire délivrée à Me LEJARD, le 08/07/2025

Copie certifiée conforme délivrée à Me BALAVOINE & Me LEJARD & SELARL AJIRE, le 08/07/2025

DÉFENDEURS AU RÉFÉRÉ :

Maître [H] [F], mandataire judiciaire, domicilié [Adresse 2], ès qualités de commissaire à l'exécution du plan d'apurement du passif et de liquidateur à la liquidation judiciaire de la SCEA DU VAL FORET, de feu Madame [Z] [X] épouse [T], de Monsieur [S] [T] et de Madame [A] [E] épouse [T]

Non comparant, représenté par Me Noël LEJARD, avocat au Barreau de CAEN

S.E.L.A.R.L. AJIRE, dont le siège social est [Adresse 4],

ès qualités d'administrateur ad'hoc de Madame [R] [Z] [X] épouse [T]

Non comparante ni représentée

COMPOSITION LORS DES DÉBATS :

PRÉSIDENTE :

Madame L. DELAHAYE, présidente de chambre déléguée par ordonnance du premier président de la Cour d'appel de Caen en date du 02 juin 2025

GREFFIÈRE :

Madame J. LEBOULANGER

DÉBATS :

L'affaire a été appelée à l'audience publique du 17 juin 2025 puis renvoyée à la demande des parties à l'audience du 17 Juin 2025 au cours de laquelle elle a été débattue.

ORDONNANCE :

Prononcée publiquement le 08 juillet 2025 par mise à disposition au greffe de la cour et signée par Madame L. DELAHAYE, présidente et par Madame J. LEBOULANGER, greffière.

Par jugement du 16 janvier 2015, sur déclaration de cessation des paiements effectuée par le GAEC du Val Forêt et ses trois associés, Mme [Z] [X] épouse [T], son fils, M. [S] [T] et l'épouse de celui-ci Mme [A] [E] épouse [T] (ci-après les consorts [T]), le tribunal de grande instance de Lisieux a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'égard du GAEC et de ses trois associés et désigné Maître [H] [F] en qualité de mandataire judiciaire.

Par un jugement du 4 septembre 2015, le tribunal de grande instance de Liseux a, à la demande de Maître [H] [F] ès qualités en raison de la confusion des patrimoines de la personne morale et des trois personnes physiques associées au sein de la première, précisé que les actifs et passifs du GAEC et de chacune des trois personnes physiques sont communs dans le cadre de la procédure de redressement judiciaire ouverte le 16 janvier 2015.

Par jugement du 30 janvier 2017, le tribunal a arrêté un plan d'apurement du passif du GAEC du [Adresse 12] Forêt et des consorts [T], sur une durée de 14 années.

A la demande de Maître [H] [F] ès qualités de commissaire à l'exécution du plan, et pour prendre en compte notamment le développement d'une activité complémentaire de travaux publics, le tribunal a par jugement du 25 février 2019 dit que la société civile d'exploitation agricole créée par les associés du GAEC sera tenue de l'exécution du plan :

Ces modifications ont été entérinées par une assemblée générale extraordinaire en date du 1er juin 2019 en vertu de laquelle la collectivité des associés a décidé de la transformation du GAEC du Val Forêt en société civile d'exploitation agricole dénommée (SCEA) «du Val Forêt », adopté de nouveaux statuts et pris acte de la démission de ses fonctions de gérante de Mme [Z] [T] au 1er juin 2019, celle-ci demeurant associée exploitante.

Dans l'intervalle, le 15 janvier 2019, à la demande alors du GAEC du Val Forêt et ses trois associés, le tribunal par jugement du 3 juin 2019 a ordonné la modification du plan.

Le plan a encore été modifié à deux reprises, par jugement du 21 février 2020 puis par jugement du 21 juin 2021 (avec une année blanche en 2021).

Le 6 septembre 2022, Me [F] a saisi le tribunal d'une requête aux fins de résolution du plan pour inexécution, et par jugement du 21 novembre 2022 rectifié le 21 novembre 2022, le tribunal a ordonné la conversion de la procédure de redressement judiciaire en liquidation judiciaire, a prononcé la résolution du plan, a ordonné l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire à l'encontre du GAEC devenu SCEA du Val Forêt et des consorts [T], et sur appel de ces derniers, la cour d'appel par arrêt du 9 novembre 2023 a annulé ces jugements.

Entre temps, Mme [T] (mère) est décédée et la Sélarl AJIRE a été désignée en qualité de mandataire ad hoc.

Une nouvelle requête en résolution du plan de Me [F] a été rejetée par un jugement du tribunal judiciaire de Lisieux du 17 juin 2024 qui a par ailleurs modifié le plan à la demande des débiteurs et a ainsi décidé que les échéances 4, 5 et 6 seront réglées cumulativement et en même temps que l'échéance 7 prévue au 30 avril 2025.

Par requête du 6 février 2025, Maître [F] a saisi le tribunal judiciaire pour statuer sur la résolution du plan et par jugement du 19 mai 2025, le tribunal a :

- prononcé la résolution du plan d'apurement du passif du GAEC du Val Forêt, auquel est tenue la SCEA, et de ses trois associés, Mme [Z] [X] épouse [T], M. [S] [T] et Mme [A] [E] épouse [T],

- constaté l'état de cessation des paiements du GAEC du Val Forêt et de ses trois associés, Mme [Z] [X] épouse [T], représentée par la Selarl AJIRE, Monsieur [S] [T] et Mme [A] [E] épouse [T],

- ordonné l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire à l'encontre du GAEC du Val Forêt. devenu la SCEA du Val Forêt, et de Mme [Z] [X] épouse [T], M. [S] [T] et Mme [A] [E] épouse [T],

- rappelé que la date de cessation des paiements avait été initialement fixée provisoirement au 16 janvier 2015,

- mis fin à la mission de Maitre [H] [F] en qualité de commissaire à l'exécution du plan,

- désigné Maître [H] [F], en qualité de mandataire liquidateur,

- maintenu Mme [P] [W], vice-présidente en qualité de juge-commissaire,

- dit que le liquidateur devra établir, dans les trois (3) mois suivant sa désignation, un rapport sur la situation du débiteur,

- dit que les créanciers disposent d'un délai de deux (2) mois à compter de la publication du présent jugement au B.O.D.A.C.C. pour déclarer leurs créances, à l'exception des créanciers déjà admis au plan qui en sont dispensés,

- confié au liquidateur la mission de réaliser, s'il y a lieu, l'inventaire mentionné à l'article L.641-2, alinéa 2, du code de commerce,

- désigné Maître [C] [J], commissaire-priseur, sis [Adresse 5], aux fins de réaliser, si nécessaire, l'inventaire prévu à l'article L.622-6 du code du commerce, et d'effectuer une prisée des actifs,

- fixé à un an soit au 19 mai 2026 au plus tard, le délai avant l'expiration duquel le tribunal de ce siège devra être saisi aux fins de clôture de la procédure de liquidation judiciaire,

- rappelé que le présent jugement est assorti de droit de l'exécution provisoire,

- ordonné la publication conformément à la loi,

- dit que les dépens seront employés en frais privilégiés de procédure.

Par déclaration au greffe du 2 juin 2025, la SCEA du Val Forêt, M. [S] [T] et Mme [A] [T] ont formé appel, intimant Maître [F] et la Sélarl AJIRE.

Selon ordonnance du 10 juin 2025, ils ont été autorisés à assigner pour l'audience du 17 juin 2025 et ont fait assigner par acte d'huissier du 11 juin 2025 Maître [F] et la Sélarl AJIRE aux fins d'obtenir l'arrêt de l'exécution provisoire du jugement du 19 mai 2025.

Par conclusions remises au greffe le 16 juin 2025, Maître [F] en sa qualité de commissaire à l'exécution du plan et mandataire judiciaire demande à ce qu'ils soient déboutés de leurs demandes et de statuer ce de droit quant aux dépens lesquels seront employés en frais privilégiés de la procédure collective.

Par avis du 17 juin 2025, le parquet général a conclu au rejet de la requête.

Par lettre reçue le 16 juin 2025, la Sélarl AJIRE a indiqué qu'elle ne serait ni présente ni représentée.

MOTIFS

Selon l'article R266-1 du code du commerce, « Les jugements et ordonnances rendus en matière de mandat ad hoc, de conciliation, de sauvegarde, de redressement judiciaire, de rétablissement professionnel et de liquidation judiciaire sont exécutoires de plein droit à titre provisoire.

('..).

Les dispositions des articles 514-1 et 514-2 du code de procédure civile ne sont pas applicables.

Par dérogation aux dispositions de l'article 514-3 du code de procédure civile, le premier président de la cour d'appel, statuant en référé, ne peut arrêter l'exécution provisoire des décisions mentionnées aux deux premiers alinéas du présent article que lorsque les moyens à l'appui de l'appel paraissent sérieux. L'exécution provisoire des décisions prises sur le fondement de l'article L. 663-1-1 peut être arrêtée, en outre, lorsque l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives. Dès le prononcé de la décision du premier président arrêtant l'exécution provisoire, le greffier de la cour d'appel en informe le greffier du tribunal.

Les requérants vont valoir les moyens suivants :

- la nullité de l'acte introductif d'instance en application de l'article 117 du code de procédure civile, en ce que la requête a été dirigée contre Mme [Z] [T] qui est décédée, que la procédure aurait dû être introduite contre ses héritiers, peu important la désignation de la Sélarl AJIRE, cette nullité conduisant à la nullité du jugement ;

Mais comme le souligne justement Maître [F], il résulte du jugement que Mme [Z] [T] était représentée par la Sélarl AJIRE désignée, suite au décès de Mme [T], comme administrateur ad hoc.

Maître [F] n'étant en outre pas utilement contredit lorsqu'il indique que la mise en cause des ayants-droits n'est pas possible puisqu'elle pourrait conduire au prononcé de leur liquidation judiciaire.

Le moyen est donc inopérant.

- le non respect du principe du contradictoire, en ce que le jugement a prononcé la résolution du plan en se fondant sur le non paiement des échéances alors que d'une part la requête était fondée sur le non paiement des honoraires si bien que le tribunal a statué à l'égard des défendeurs non comparants en se fondant sur des moyens de fait et de droit dont ils n'ont pas été avisés, d'autre part que les échéances du plan n'étaient pas exigibles lors de l'audience du 28 avril 2025.

Au vu des mentions du jugement, Mme [O] [T] et la Sélarl AJIRE dûment convoquées n'étaient ni présentes ni représentées à l'audience du 28 avril 2025.

La requête de Maître [F] faisait effectivement état du non paiement des honoraires du plan pour 2021, 2022 et 2024, le non paiement des quatres annuités du plan a été évoqué lors de l'audience, M. [T] proposant un renvoi pour rassembler ces documents et solder les dettes. Si le jugement s'est fondé sur le non paiement des échéances du plan pourtant non encore exigibles lors de son audience, force est toutefois de relever qu'il a également retenu pour justifier la résolution du plan le non paiement des honoraires du plan pour un montant de 3121.84 € ;

Ce moyen est donc également inopérant.

- l'absence de motif de résolution du plan et l'absence d'état de cessation des paiement.

A ce jour, il n'est pas justifié du paiement ni des honoraires du plan ni de l'échéance du plan exigible depuis le 30 avril 2025 pour un montant de 235 047.83 € ;

Les requérants font valoir un chiffre d'affaires de 11 650 € correspondant aux travaux de vidange de fosses et de devis pour des travaux de terrassement pour 558 769.30€.

Toutefois, il est produit la copie des factures clients pour des prestations de vidanges de fosse entre janvier 2024 et mai 2025 de 200 € chacune, mais il n'est pas justifié de leur paiement effectif.

Concernant les devis produits, trois datent de la fin d'année 2023, trois autres du premier trimestre 2024 et enfin deux du 25 février et du 20 mai 2025. Si ces devis sont signés, il n'est cependant justifié d'aucun versement d'acompte, ni de commencement des travaux alors que certains d'entre eux ont été signés en 2023.

Ces éléments ne sont pas à ce stade de nature à garantir l'exécution du plan par les débiteurs.

Par ailleurs, alors qu'ils ne respectent pas les échéances du plan, les débiteurs ne produisent aucun document comptable ou élément permettant de vérifier leurs capacités financières, ce défaut de transparence était évoqué par Maître [F] devant les premiers juges qui se plaignait de l'absence d'accès aux documents comptables et de contacts notamment avec M. [T].

Dès lors et encore, à ce stade, ce moyen est inopérant.

De ce qui vient d'être exposé, les requérants ne justifient d'aucun moyen sérieux de réformation, si bien que leur requête aux fins d'arrêt de l'exécution provisoire ne peut qu'être rejetée.

PAR CES MOTIFS

Rejette la demande d'arrêt de l'exécution provisoire du jugement rendu le 19 mai 2025 par le tribunal judiciaire de Lisieux ;

Dit que les dépens seront employés en frais privilégiés de la procédure collective.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

J. LEBOULANGER L. DELAHAYE

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