CA Versailles, ch. com. 3-2, 8 juillet 2025, n° 25/00076
VERSAILLES
Arrêt
Autre
COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 4AE
Chambre commerciale 3-2
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 8 JUILLET 2025
N° RG 25/00076 - N° Portalis DBV3-V-B7J-W56W
AFFAIRE :
S.A.S.U. FRANCE ECO SOLUTION
C/
S.A.S. TOTALENERGIES MARKETING FRANCE
LE PROCUREUR GENERAL
...
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 19 Décembre 2024 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE
N° Chambre : 9
N° RG : 2024P00970
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Banna NDAO
Me Anne-sophie REVERS
Me Oriane DONTOT
PG
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE HUIT JUILLET DEUX MILLE VINGT CINQ,
La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
APPELANT :
S.A.S.U. FRANCE ECO SOLUTION
N° SIRET : 853 002 293 RCS [Localité 11]
Ayant son siège
[Adresse 5]
[Localité 8]
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social
Représentant : Me Banna NDAO, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 667 - N° du dossier 24/211
Plaidant : Me Paul ZEITOUN de la SELEURL PZA PAUL ZEITOUN, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D1878 -
****************
INTIMES :
LE PROCUREUR GENERAL
POLE ECOFI - COUR D'APPEL DE VERSAILLES
[Adresse 3]
[Localité 6]
S.A.S. TOTALENERGIES MARKETING FRANCE
Ayant son siège
[Adresse 4]
[Localité 7]
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social
Représentant : Me Anne-sophie REVERS de la SELARL ANNE-SOPHIE REVERS AVOCAT, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 4 - Plaidant : Me Rodolfo VIERA SANTA CRUZ, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D0205
S.E.L.A.R.L. AJRS
prise en la personne de Maître [E] [B], ès qualités d'administrateur judiciaire de la société FRANCE ECO SOLUTION
Ayant son siège
[Adresse 2]
[Localité 9]
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social
Représentant : Me Oriane DONTOT de la SELARL JRF & TEYTAUD SALEH, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 617 - N° du dossier 20250047
Plaidant : Me Olivier PECHENARD de la SELARL PBM AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : B0899 -
S.E.L.A.R.L. SELARL [W] [M] prise en la personne de Maître [X] [M], ès qualités de mandataire judiciaire de la société FRANCE ECO SOLUTION
Ayant son siège
[Adresse 1]
[Localité 9]
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social
Représentant : Me Oriane DONTOT de la SELARL JRF & TEYTAUD SALEH, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 617 - N° du dossier 20250047
Plaidant : Me Olivier PECHENARD de la SELARL PBM AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : B0899
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 16 Juin 2025 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Ronan GUERLOT, président chargé du rapport et Monsieur Cyril ROTH.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Ronan GUERLOT, Président de chambre,
Monsieur Cyril ROTH, Président de chambre,
Madame Gwenael COUGARD, Conseillère,
Greffier, lors des débats : Madame Françoise DUCAMIN,
En la présence du Ministère Public, représenté par Madame Anne CHEVALIER, Avocat Général dont l'avis du 7 mai 2025 a été transmis le 7 mai 2025 au greffe par la voie électronique.
EXPOSE DU LITIGE
Le 22 juillet 2024, la société TotalEnergies Marketing France a assigné la société France Eco Solution devant le tribunal de commerce de Nanterre afin de voir ouvrir à son égard une procédure collective.
Le 19 décembre 2024, par jugement contradictoire, ce tribunal a :
- ouvert la procédure de redressement judiciaire de la société France Eco Solution ;
- désigne la SELARL AJRS, mission conduite par M. [B], administrateur judiciaire, avec pour mission, outre les pouvoirs conférés par la loi, d'assister le débiteur pour tous les actes relatifs à la gestion ;
- désigné la SELARL [W] [M], mission conduite par M. [M], mandataire judiciaire, pour exercer les fonctions définies à l'article L. 622-20 du code de commerce ;
- fixé provisoirement au 20 juin 2023 la date de cessation des paiements compte tenu du non-paiement des dettes sociales.
Le 24 décembre 2024, la société France Eco Solution a interjeté appel de ce jugement en tous ses chefs de disposition.
Le 30 mai 2025, le premier président a rejeté la demande d'arrêt de l'exécution provisoire attachée au jugement du 19 décembre 2024.
Par dernières conclusions du 16 mai 2025, la société France Eco Solution demande à la cour de :
- infirmer le jugement dont appel en toute ses dispositions ;
Et statuant à nouveau,
- juger de l'absence de son état de cessation des paiements au jour où la cour statue ;
En conséquence,
- dire n'y avoir lieu à ouverture d'une procédure collective ;
- condamner solidairement les sociétés AJRS et [W] [M] aux dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de Maître Ndao.
Par dernières conclusions du 15 avril 2025, les sociétés [W] [M] et AJRS demandent à la cour de :
- confirmer en toutes ses dispositions le jugement du 19 décembre 2024 ;
- ordonner l'emploi des dépens en frais privilégiés de la procédure collective ;
Dans l'hypothèse où la cour infirmerait le jugement en toutes ses dispositions et dirait n'y avoir lieu à l'ouverture d'une procédure collective :
- condamner la société France Eco Solution aux entiers dépens ;
- condamner la société France Eco Solution à leur payer la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner la société France Eco Solution à payer les frais de justice, en ce compris les frais de greffe et le montant de l'émolument fixe qui leur est dû, en application des articles R. 663-3 et suivants et A. 663-4 et suivants du code de commerce.
Par dernières conclusions formant appel incident du 29 avril 2025, la société Total Energies Marketing France demande à la cour de :
A titre principal :
- infirmer le jugement de redressement judiciaire du 19 décembre 2024 en toutes ses dispositions ;
Statuant à nouveau,
- juger que les deux virements pour un montant de 17 025,13 euros, réalisés par la société France Eco Solution, sont intervenus avant le jugement de redressement judiciaire du 19 décembre 2025 ;
- condamner la société France Eco Solution aux entiers dépens ;
- condamner la société France Eco Solution à lui payer la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
A titre subsidiaire,
Dans l'hypothèse où la cour confirmerait le jugement en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau,
- juger que les deux virements pour un montant de 17 025,13 euros, réalisés par la société France Eco Solution, sont intervenus avant le jugement de redressement judiciaire du 19 décembre 2025.
Le 7 mai 2025, le ministère public a émis un avis tendant à ce que la cour confirme le jugement entrepris en tous points.
La clôture de l'instruction a été prononcée le 26 mai 2025.
Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux conclusions susvisées.
MOTIFS
- Sur l'état de cessation des paiements
L'appelante conteste être en cessation des paiements. Elle fait valoir que son passif exigible s'élève à 247 680,72 euros ; qu'elle dispose d'une trésorerie d'un montant de 386 154 euros ; qu'elle a réglé sa dette à l'égard de la société Total Energie Marketing France ; que [Localité 10] Humanis lui a consenti un échéancier qu'elle respecte ; qu'à la suite de règlements, sa dette à l'égard de l'URSSAF a été réduite à 63 935,80 euros.
Elle souligne qu'elle est structurellement bénéficiaire en 2023 et en 2024 et que son provisionnel en 2025 est excellent en raison de plusieurs chantiers estivaux.
La société TotalEnergies Marketing France sollicite l'infirmation du jugement. Elle fait valoir que l'appelante lui a totalement réglé le 19 décembre 2024 sa créance en deux virements de 8 813 euros et de 8 212,13 euros.
Les organes de la procédure demandent la confirmation du jugement. Ils font valoir que la plupart des paiements effectués par l'appelante ont été fait en méconnaissance de la règle de l'interdiction des paiements des créances antérieures, ce qui est le cas du paiement des créances de Total Energies Marketing France, de [Localité 10] Humanis et d'autres fournisseurs. Ils soulignent que le passif de l'appelante a fortement augmenté au cours de l'exercice clos au 31 décembre 2023 pour s'établir à 4 249 317 euros ; que le montant du passif fournisseurs indiqué par l'expert-comptable à hauteur de 34 140,11 euros est incohérent avec les encours figurant dans le bilan. Ils ajoutent que des doutes subsistent sur l'exhaustivité du passif exigible en raison des discordances entre ses conclusions de première instance et ses bilans ; que le montant du passif déclaré s'élève à 1 245 597,27 euros dont 967 729,25 euros de passif non définitif ; que l'appelante fait état d'un solde bancaire créditeur de 278 508,62 euros, sans toutefois communiquer de relevé de compte ; qu'un crédit de TVA ne constitue pas un actif disponible ; que l'actif est insuffisant à couvrir le passif exigible.
Le ministère public expose qu'au regard de son passif exigible (1 245 597,27 euros) et de son actif disponible (278 508,62 euros), la société France Eco Solution est en état de cessation des paiements. Il souligne toutefois que sa situation financière n'est pas totalement obérée en ce qu'elle dispose de la possibilité d'obtenir des moratoires et d'une capacité à générer de la trésorerie.
Réponse de la cour
L'article L. 631-1, alinéa 1er, du code de commerce prévoit :
Il est institué une procédure de redressement judiciaire ouverte à tout débiteur mentionné aux articles L. 631-2 ou L. 631-3 qui, dans l'impossibilité de faire face au passif exigible avec son actif disponible, est en cessation des paiements. Le débiteur qui établit que les réserves de crédit ou les moratoires dont il bénéficie de la part de ses créanciers lui permettent de faire face au passif exigible avec son actif disponible n'est pas en cessation des paiements.
La cour d'appel apprécie l'état de cessation des paiements au jour où elle statue.
Il ressort de l'état des situations en cours actualisé au 26 mars 2025 établi par le mandataire judiciaire que le passif déclaré s'élève à 1 245 597,27 euros dont 890 965,25 euros de passif contesté, 76 764 euros de passif déclaré à titre provisionnel soit 967 729,25 euros de passif non définitif.
L'appelante soutient que son passif exigible doit être retraité et est limité à 247 680,72 euros compte tenu de ses contestations ou de moratoires obtenus.
Pour établir que son passif exigible est inférieur à celui qui a été déclaré, l'appelante fait d'abord valoir que quatre créanciers (Arcadia Audit, Elite Inspection, Habitat & CO et Eco négoce) dont le montant total des créances s'élève à 350 060,56 euros ont renoncé à l'exigibilité immédiate de leur créance.
A cet égard, elle verse aux débats les éléments suivants :
- Une attestation datée du 9 mai 2025 d'Arcadia Audit établissant l'existence d'un échéancier de 12 mois à compter de septembre 2025 pour le règlement d'une créance de 31 200 euros ;
- Une attestation datée du 9 mai 2025 de la société Elite Inspection aux termes de laquelle cette dernière a accepté un échéancier de 12 mois, à compter de septembre 2025 pour le paiement de sa créance de 36 198 ,50 euros ;
- Une attestation d'Habitat & CO du 9 mai 2025 indiquant que ce créancier accorde un échéancier de 12 mois à compter de septembre 2025 pour le règlement de sa dette de 213 521,78 euros.
- Un courrier de la société Eco négoce libellée dans les termes suivants :
La finalité des modalités de paiement que nous avons mises en place, concernant la créance déclarée au passif de FES, avec la société France Eco Solution est que les factures que nous éditons ne sont exigibles qu'après encaissement par notre client de sa rémunération par les délégataires sur les dossiers concernés. Nous estimons donc, qu'à ce jour, que France Eco Solution est à jour de ses obligations à l'égard de notre établissement. Par conséquent, nous acceptons d'être payé de la créance déclarée au passif de la procédure collective ouverte à l'égard de FES en dehors du plan de redressement par voie de continuation qui pourrait être adopté par le Tribunal, plan qui nous a été adressé en copie, et qui consiste en un paiement en une échéance unique, à l'adoption du plan, de l'ensemble du passif. (Soulignement ajouté par la cour)
Il ressort de ce courrier ambigu que la société Econégoce a accepté un report de l'exigibilité de sa créance de sorte que cette créance déclarée de 69 140 ,28 euros ne constitue pas un passif exigible au jour où la cour statue.
Selon l'état des situations en cours, trois de ces créances (Elite Quality Inspection, Habitat &CO) sont mentionnées comme contestées. La créance Arcadia Audit est indiquée comme devant être traitées hors plan au motif que le créancier a renoncé à son exigibilité. Aucune mention n'est en revanche portée sur l'état des situations pour la créance Eco négoce.
Hormis la créance d'Eco négoce, toutes ces créances ont été comptabilisées dans le passif contesté.
Compte tenu des moratoires accordés par les créanciers, ces quatre créances représentant une somme globale de 350 060,06 euros ne peuvent donc être comprises dans le passif exigible.
L'appelante expose également que la créance d'ADCC a été déclarée en doublon.
Une attestation du 5 mars 2025 de cette dernière indique que le montant de ses créances à l'encontre de l'appelante ne s'élève qu'à 29 511,77 euros. L'état des situations en cours mentionne pour ce créancier deux déclarations dont l'une à hauteur de 6 071,29 euros qui est indiquée comme contestée.
De là il suit que seule la créance de 29 511,77 euros constitue un passif exigible.
L'appelante fait en outre valoir que la société Fleet Fo a déclaré deux créances faisant doublon avec celle déclarée par la Compagnie des cartes de carburant pour 4 091,05 euros.
Il ressort d'un courrier du 28 janvier 2025 que la Compagnie des cartes de carburants a déclaré au passif de l'appelante une créance de 1 469,04 euros. A cette déclaration est notamment jointe une facture « Ticket Fleet Pro » du même montant.
Selon l'état des situations en cours, la Fleet Flo a déclaré deux créances de 2 866,86 euros + 1 224,19 euros, indiquées comme contestées. Ce document indique que, selon le débiteur, cette créance fait doublon avec la créance 6 de la Compagnie des cartes de carburant.
D'après, l'état des situations en cours, la Compagnie des cartes de carburant a déclaré une créance de 1 469,04 euros.
La cour relève que la facture Fleet Flo jointe à la déclaration de créance de la Compagnie des cartes de carburant mentionne une somme de 1 224,19 euros HT (soit 1 469,04 euros TTC) qui correspond à l'une des créances déclarée par Fleet Flo.
D'où il suit que cette créance fait effectivement doublon avec celle de la Compagnie des cartes de carburant et ne doit pas être comptée dans le passif exigible.
L'appelante soutient encore que la créance de la société Groupe Sofradom déclarée pour 694,40 euros a été réglée. Cette créance est indiquée comme contestée dans l'état des situations en cours.
Elle verse aux débats un courriel de Sofradom ainsi qu'un extrait d'un document comptable et un document mentionnant divers règlements sans indication de destinataire.
Si ce courriel précise « suite à notre échange téléphonique, vous trouverez en pièces joints les encaissements réalisées par CB ainsi que l'extrait de compte », aucun des montants indiqués dans ces trois documents ne correspond au montant de la créance déclarée.
D'où il suit que la créance de 694,40 euros ne peut pas être considérée comme payée et constitue un passif exigible.
L'appelante soutient encore que la créance déclarée par [Localité 10] Humanis pour 58 722,36 euros doit être réduite à 37 883,78 euros en raison d'un crédit non affecté de cette dernière à hauteur de 20 838,58 euros. Cette justification est mentionnée dans l'état des situations pour expliquer la contestation du débiteur. Elle produit un courriel du 11 février 2025 de [Localité 10] Humanis dont il ressort que le solde de la société France Eco Solution est débiteur de 22 700 euros au titre de l'exercice 2022, de 3 155,78 euros au titre de l'exercice 2023, de 32 866,36 euros au titre de l'exercice 2024 soit 58 722,14 euros.
Si [Localité 10] Humanis confirme avoir un « montant non affecté (crédit sur le compte) » de 20 838,58 euros, elle n'a toutefois pas défalqué ce crédit sur lequel aucune information n'est donnée, en particulier sur son imputation.
Il en résulte que la somme déclarée par [Localité 10] doit être retenue comme passif exigible étant observé que la contestation doit être le cas échéant tranchée par le juge-commissaire.
S'agissant des créances 22 à 26 du PRS Haut-de Seine, l'appelante fait valoir que la créance n° 26 de TVA déclarée à titre provisionnel pour 561 418 euros s'élève en réalité à 720 euros.
L'état des situations en cours indique que selon le débiteur, « la société fait l'objet d'un contrôle fiscal sur cette période dont il résulte qu'elle n'est pas redevable de la somme déclarée ».
Il ressort de ce document que la déclaration concerne l'année 2023 (« année 2023 provi »).
Il ressort d'une lettre du 2 juillet 2024 de l'administration fiscale que l'appelante a fait l'objet d'une vérification fiscale pour la période allant du 9 juillet 2019 au 31 mai 2025 pour la TVA ; que l'administration a retenu au titre de l'année 2020, un rappel de 381 euros, au titre de l'année 2022, un rappel de 12 264 euros et de 720 euros au titre de l'année 2023.
Au vu du courrier de l'administration qui n'a retenu finalement qu'une créance de TVA de 720 euros pour l'année 2023 compte tenu des éléments communiqués par la débitrice, le passif déclaré à titre provisionnel pour 561 418 euros au titre d'un rappel de TVA pour 2023 ne constitue pas à l'évidence un passif exigible.
L'appelante fait ensuite valoir que la créance n° 23 du PRS déclarée pour 136 327 euros à titre provisionnel ne s'élève en réalité qu'à hauteur de 36 469 euros au titre de « Impôt sur les sociétés 2024 », ce qui est attesté le 14 mai 2025 par son expert-comptable qui indique que son attestation est faite « sur la base des résultats prévisionnels » et qu'elle « peut être sujette à modification en fonction des résultats définitifs de l'exercice. »
En l'absence d'information de l'administration, cette attestation ne peut suffire à établir que le montant de l'impôt est moins important que la créance déclarée. Cette créance doit donc être considérée comme un passif exigible.
Il est en revanche constant que les créances de Total Energie Marketing France (15 427,27 euros) ne constitue plus un passif exigible puisque le créancier admet qu'elles ont été complètement payées en décembre 2024.
L'appelante soutient enfin que la créance de la société Noah a été déclarée à deux reprises.
Si l'état des situations en cours mentionne une créance de cette société de 1 504,40 euros déclarée à deux reprises (créance 7 et 16), aucun élément ne permet d'établir qu'il s'agit de la même créance.
Ces deux créances doivent donc être considérées comme un passif exigible.
Au regard de l'ensemble de ces éléments, il apparait que le passif déclaré exigible pour 1 245 597,27 euros peut être réduit des montants suivants :
- de 350 060,06 euros en raison de moratoires accordés par Arcadia Audit, Elite Inspection, Habitat & CO ;
- de 1 224,19 euros (doublon d'une créance de la Compagnie des carburants avec une créance de Fleet Pro) ;
- de 560 698 euros (561 418 ' 720 euros) compte tenu du courrier de l'administration fiscale sur la créance de TVA au titre de l'année 2023 ;
- de 15 427,27 euros raison du paiement de la créance déclarée par Total Energie Marketing France ;
de sorte que le passif exigible peut être évalué à 1 245 597,27 euros (passif total déclaré) ' 350 060, 06 euros ' 1 224,19 euros ' 560 698 euros ' 15 427,27 euros soit 317 905,75 euros et non à 247 680,72 euros comme le soutient l'appelante.
Au titre de son actif disponible, l'appelante soutient qu'elle dispose d'une trésorerie s'élevant à la somme totale de 386 154 euros.
Il ressort d'un relevé de compte arrêté au 30 avril 2025 de la banque Dulubac & Cie que le compte de l'appelante est créditeur de 250 552 euros à cette date (pièce 22).
Il ressort en outre d'un relevé de compte arrêté au 30 avril 2025 que le compte de l'appelante ouvert dans les livres de la banque Pennylane est créditeur à hauteur de 135 612,16 euros.
L'appelante justifie donc trésorerie totale de 250 552 + 135 612,16 = 386 164,16 euros au 30 avril 2025. Il n'est pas démontré qu'elle dispose d'une trésorerie moins importante à ce jour.
Il n'est pas fait état d'autres actifs disponibles.
A cet égard, les organes de la procédure font valoir à juste titre qu'une créance de TVA n'est pas un actif disponible. Toutefois, la cour relève que l'appelante ne s'en prévaut pas dans ses dernières écritures et ne comptabilise au titre de son actif disponible que les soldes créditeurs de ses comptes bancaires.
Au vu des éléments communiqués à la cour, le passif exigible (317 905,75 euros) est donc inférieur à l'actif disponible (386 154,16 euros).
A ce jour, la société appelante n'est donc pas en état de cessation des paiements, ce qui implique l'infirmation du jugement entrepris et le non-lieu à procédure collective
- Sur les demandes accessoires
La société France Eco Solution sera condamnée à payer à la société Total Energie Marketing la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
La demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile des organes de la procédure, ès qualités, doit être écartée.
PAR CES MOTIFS,
La cour, statuant contradictoirement,
Infirme le jugement en toutes ses dispositions ;
Dit n'y avoir lieu à procédure collective à l'égard de la société France Eco Solution ;
Condamne la société France Eco Solution aux dépens de première instance et d'appel, dont les frais de la procédure collective ;
Condamne la société France Eco Solution à payer à la société Total Energie Marketing France la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Rejette les autres demandes des parties.
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Monsieur Ronan GUERLOT, Président, et par Madame Françoise DUCAMIN, Greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT,
DE
VERSAILLES
Code nac : 4AE
Chambre commerciale 3-2
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 8 JUILLET 2025
N° RG 25/00076 - N° Portalis DBV3-V-B7J-W56W
AFFAIRE :
S.A.S.U. FRANCE ECO SOLUTION
C/
S.A.S. TOTALENERGIES MARKETING FRANCE
LE PROCUREUR GENERAL
...
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 19 Décembre 2024 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE
N° Chambre : 9
N° RG : 2024P00970
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Banna NDAO
Me Anne-sophie REVERS
Me Oriane DONTOT
PG
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE HUIT JUILLET DEUX MILLE VINGT CINQ,
La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
APPELANT :
S.A.S.U. FRANCE ECO SOLUTION
N° SIRET : 853 002 293 RCS [Localité 11]
Ayant son siège
[Adresse 5]
[Localité 8]
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social
Représentant : Me Banna NDAO, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 667 - N° du dossier 24/211
Plaidant : Me Paul ZEITOUN de la SELEURL PZA PAUL ZEITOUN, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D1878 -
****************
INTIMES :
LE PROCUREUR GENERAL
POLE ECOFI - COUR D'APPEL DE VERSAILLES
[Adresse 3]
[Localité 6]
S.A.S. TOTALENERGIES MARKETING FRANCE
Ayant son siège
[Adresse 4]
[Localité 7]
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social
Représentant : Me Anne-sophie REVERS de la SELARL ANNE-SOPHIE REVERS AVOCAT, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 4 - Plaidant : Me Rodolfo VIERA SANTA CRUZ, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D0205
S.E.L.A.R.L. AJRS
prise en la personne de Maître [E] [B], ès qualités d'administrateur judiciaire de la société FRANCE ECO SOLUTION
Ayant son siège
[Adresse 2]
[Localité 9]
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social
Représentant : Me Oriane DONTOT de la SELARL JRF & TEYTAUD SALEH, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 617 - N° du dossier 20250047
Plaidant : Me Olivier PECHENARD de la SELARL PBM AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : B0899 -
S.E.L.A.R.L. SELARL [W] [M] prise en la personne de Maître [X] [M], ès qualités de mandataire judiciaire de la société FRANCE ECO SOLUTION
Ayant son siège
[Adresse 1]
[Localité 9]
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social
Représentant : Me Oriane DONTOT de la SELARL JRF & TEYTAUD SALEH, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 617 - N° du dossier 20250047
Plaidant : Me Olivier PECHENARD de la SELARL PBM AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : B0899
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 16 Juin 2025 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Ronan GUERLOT, président chargé du rapport et Monsieur Cyril ROTH.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Ronan GUERLOT, Président de chambre,
Monsieur Cyril ROTH, Président de chambre,
Madame Gwenael COUGARD, Conseillère,
Greffier, lors des débats : Madame Françoise DUCAMIN,
En la présence du Ministère Public, représenté par Madame Anne CHEVALIER, Avocat Général dont l'avis du 7 mai 2025 a été transmis le 7 mai 2025 au greffe par la voie électronique.
EXPOSE DU LITIGE
Le 22 juillet 2024, la société TotalEnergies Marketing France a assigné la société France Eco Solution devant le tribunal de commerce de Nanterre afin de voir ouvrir à son égard une procédure collective.
Le 19 décembre 2024, par jugement contradictoire, ce tribunal a :
- ouvert la procédure de redressement judiciaire de la société France Eco Solution ;
- désigne la SELARL AJRS, mission conduite par M. [B], administrateur judiciaire, avec pour mission, outre les pouvoirs conférés par la loi, d'assister le débiteur pour tous les actes relatifs à la gestion ;
- désigné la SELARL [W] [M], mission conduite par M. [M], mandataire judiciaire, pour exercer les fonctions définies à l'article L. 622-20 du code de commerce ;
- fixé provisoirement au 20 juin 2023 la date de cessation des paiements compte tenu du non-paiement des dettes sociales.
Le 24 décembre 2024, la société France Eco Solution a interjeté appel de ce jugement en tous ses chefs de disposition.
Le 30 mai 2025, le premier président a rejeté la demande d'arrêt de l'exécution provisoire attachée au jugement du 19 décembre 2024.
Par dernières conclusions du 16 mai 2025, la société France Eco Solution demande à la cour de :
- infirmer le jugement dont appel en toute ses dispositions ;
Et statuant à nouveau,
- juger de l'absence de son état de cessation des paiements au jour où la cour statue ;
En conséquence,
- dire n'y avoir lieu à ouverture d'une procédure collective ;
- condamner solidairement les sociétés AJRS et [W] [M] aux dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de Maître Ndao.
Par dernières conclusions du 15 avril 2025, les sociétés [W] [M] et AJRS demandent à la cour de :
- confirmer en toutes ses dispositions le jugement du 19 décembre 2024 ;
- ordonner l'emploi des dépens en frais privilégiés de la procédure collective ;
Dans l'hypothèse où la cour infirmerait le jugement en toutes ses dispositions et dirait n'y avoir lieu à l'ouverture d'une procédure collective :
- condamner la société France Eco Solution aux entiers dépens ;
- condamner la société France Eco Solution à leur payer la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner la société France Eco Solution à payer les frais de justice, en ce compris les frais de greffe et le montant de l'émolument fixe qui leur est dû, en application des articles R. 663-3 et suivants et A. 663-4 et suivants du code de commerce.
Par dernières conclusions formant appel incident du 29 avril 2025, la société Total Energies Marketing France demande à la cour de :
A titre principal :
- infirmer le jugement de redressement judiciaire du 19 décembre 2024 en toutes ses dispositions ;
Statuant à nouveau,
- juger que les deux virements pour un montant de 17 025,13 euros, réalisés par la société France Eco Solution, sont intervenus avant le jugement de redressement judiciaire du 19 décembre 2025 ;
- condamner la société France Eco Solution aux entiers dépens ;
- condamner la société France Eco Solution à lui payer la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
A titre subsidiaire,
Dans l'hypothèse où la cour confirmerait le jugement en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau,
- juger que les deux virements pour un montant de 17 025,13 euros, réalisés par la société France Eco Solution, sont intervenus avant le jugement de redressement judiciaire du 19 décembre 2025.
Le 7 mai 2025, le ministère public a émis un avis tendant à ce que la cour confirme le jugement entrepris en tous points.
La clôture de l'instruction a été prononcée le 26 mai 2025.
Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux conclusions susvisées.
MOTIFS
- Sur l'état de cessation des paiements
L'appelante conteste être en cessation des paiements. Elle fait valoir que son passif exigible s'élève à 247 680,72 euros ; qu'elle dispose d'une trésorerie d'un montant de 386 154 euros ; qu'elle a réglé sa dette à l'égard de la société Total Energie Marketing France ; que [Localité 10] Humanis lui a consenti un échéancier qu'elle respecte ; qu'à la suite de règlements, sa dette à l'égard de l'URSSAF a été réduite à 63 935,80 euros.
Elle souligne qu'elle est structurellement bénéficiaire en 2023 et en 2024 et que son provisionnel en 2025 est excellent en raison de plusieurs chantiers estivaux.
La société TotalEnergies Marketing France sollicite l'infirmation du jugement. Elle fait valoir que l'appelante lui a totalement réglé le 19 décembre 2024 sa créance en deux virements de 8 813 euros et de 8 212,13 euros.
Les organes de la procédure demandent la confirmation du jugement. Ils font valoir que la plupart des paiements effectués par l'appelante ont été fait en méconnaissance de la règle de l'interdiction des paiements des créances antérieures, ce qui est le cas du paiement des créances de Total Energies Marketing France, de [Localité 10] Humanis et d'autres fournisseurs. Ils soulignent que le passif de l'appelante a fortement augmenté au cours de l'exercice clos au 31 décembre 2023 pour s'établir à 4 249 317 euros ; que le montant du passif fournisseurs indiqué par l'expert-comptable à hauteur de 34 140,11 euros est incohérent avec les encours figurant dans le bilan. Ils ajoutent que des doutes subsistent sur l'exhaustivité du passif exigible en raison des discordances entre ses conclusions de première instance et ses bilans ; que le montant du passif déclaré s'élève à 1 245 597,27 euros dont 967 729,25 euros de passif non définitif ; que l'appelante fait état d'un solde bancaire créditeur de 278 508,62 euros, sans toutefois communiquer de relevé de compte ; qu'un crédit de TVA ne constitue pas un actif disponible ; que l'actif est insuffisant à couvrir le passif exigible.
Le ministère public expose qu'au regard de son passif exigible (1 245 597,27 euros) et de son actif disponible (278 508,62 euros), la société France Eco Solution est en état de cessation des paiements. Il souligne toutefois que sa situation financière n'est pas totalement obérée en ce qu'elle dispose de la possibilité d'obtenir des moratoires et d'une capacité à générer de la trésorerie.
Réponse de la cour
L'article L. 631-1, alinéa 1er, du code de commerce prévoit :
Il est institué une procédure de redressement judiciaire ouverte à tout débiteur mentionné aux articles L. 631-2 ou L. 631-3 qui, dans l'impossibilité de faire face au passif exigible avec son actif disponible, est en cessation des paiements. Le débiteur qui établit que les réserves de crédit ou les moratoires dont il bénéficie de la part de ses créanciers lui permettent de faire face au passif exigible avec son actif disponible n'est pas en cessation des paiements.
La cour d'appel apprécie l'état de cessation des paiements au jour où elle statue.
Il ressort de l'état des situations en cours actualisé au 26 mars 2025 établi par le mandataire judiciaire que le passif déclaré s'élève à 1 245 597,27 euros dont 890 965,25 euros de passif contesté, 76 764 euros de passif déclaré à titre provisionnel soit 967 729,25 euros de passif non définitif.
L'appelante soutient que son passif exigible doit être retraité et est limité à 247 680,72 euros compte tenu de ses contestations ou de moratoires obtenus.
Pour établir que son passif exigible est inférieur à celui qui a été déclaré, l'appelante fait d'abord valoir que quatre créanciers (Arcadia Audit, Elite Inspection, Habitat & CO et Eco négoce) dont le montant total des créances s'élève à 350 060,56 euros ont renoncé à l'exigibilité immédiate de leur créance.
A cet égard, elle verse aux débats les éléments suivants :
- Une attestation datée du 9 mai 2025 d'Arcadia Audit établissant l'existence d'un échéancier de 12 mois à compter de septembre 2025 pour le règlement d'une créance de 31 200 euros ;
- Une attestation datée du 9 mai 2025 de la société Elite Inspection aux termes de laquelle cette dernière a accepté un échéancier de 12 mois, à compter de septembre 2025 pour le paiement de sa créance de 36 198 ,50 euros ;
- Une attestation d'Habitat & CO du 9 mai 2025 indiquant que ce créancier accorde un échéancier de 12 mois à compter de septembre 2025 pour le règlement de sa dette de 213 521,78 euros.
- Un courrier de la société Eco négoce libellée dans les termes suivants :
La finalité des modalités de paiement que nous avons mises en place, concernant la créance déclarée au passif de FES, avec la société France Eco Solution est que les factures que nous éditons ne sont exigibles qu'après encaissement par notre client de sa rémunération par les délégataires sur les dossiers concernés. Nous estimons donc, qu'à ce jour, que France Eco Solution est à jour de ses obligations à l'égard de notre établissement. Par conséquent, nous acceptons d'être payé de la créance déclarée au passif de la procédure collective ouverte à l'égard de FES en dehors du plan de redressement par voie de continuation qui pourrait être adopté par le Tribunal, plan qui nous a été adressé en copie, et qui consiste en un paiement en une échéance unique, à l'adoption du plan, de l'ensemble du passif. (Soulignement ajouté par la cour)
Il ressort de ce courrier ambigu que la société Econégoce a accepté un report de l'exigibilité de sa créance de sorte que cette créance déclarée de 69 140 ,28 euros ne constitue pas un passif exigible au jour où la cour statue.
Selon l'état des situations en cours, trois de ces créances (Elite Quality Inspection, Habitat &CO) sont mentionnées comme contestées. La créance Arcadia Audit est indiquée comme devant être traitées hors plan au motif que le créancier a renoncé à son exigibilité. Aucune mention n'est en revanche portée sur l'état des situations pour la créance Eco négoce.
Hormis la créance d'Eco négoce, toutes ces créances ont été comptabilisées dans le passif contesté.
Compte tenu des moratoires accordés par les créanciers, ces quatre créances représentant une somme globale de 350 060,06 euros ne peuvent donc être comprises dans le passif exigible.
L'appelante expose également que la créance d'ADCC a été déclarée en doublon.
Une attestation du 5 mars 2025 de cette dernière indique que le montant de ses créances à l'encontre de l'appelante ne s'élève qu'à 29 511,77 euros. L'état des situations en cours mentionne pour ce créancier deux déclarations dont l'une à hauteur de 6 071,29 euros qui est indiquée comme contestée.
De là il suit que seule la créance de 29 511,77 euros constitue un passif exigible.
L'appelante fait en outre valoir que la société Fleet Fo a déclaré deux créances faisant doublon avec celle déclarée par la Compagnie des cartes de carburant pour 4 091,05 euros.
Il ressort d'un courrier du 28 janvier 2025 que la Compagnie des cartes de carburants a déclaré au passif de l'appelante une créance de 1 469,04 euros. A cette déclaration est notamment jointe une facture « Ticket Fleet Pro » du même montant.
Selon l'état des situations en cours, la Fleet Flo a déclaré deux créances de 2 866,86 euros + 1 224,19 euros, indiquées comme contestées. Ce document indique que, selon le débiteur, cette créance fait doublon avec la créance 6 de la Compagnie des cartes de carburant.
D'après, l'état des situations en cours, la Compagnie des cartes de carburant a déclaré une créance de 1 469,04 euros.
La cour relève que la facture Fleet Flo jointe à la déclaration de créance de la Compagnie des cartes de carburant mentionne une somme de 1 224,19 euros HT (soit 1 469,04 euros TTC) qui correspond à l'une des créances déclarée par Fleet Flo.
D'où il suit que cette créance fait effectivement doublon avec celle de la Compagnie des cartes de carburant et ne doit pas être comptée dans le passif exigible.
L'appelante soutient encore que la créance de la société Groupe Sofradom déclarée pour 694,40 euros a été réglée. Cette créance est indiquée comme contestée dans l'état des situations en cours.
Elle verse aux débats un courriel de Sofradom ainsi qu'un extrait d'un document comptable et un document mentionnant divers règlements sans indication de destinataire.
Si ce courriel précise « suite à notre échange téléphonique, vous trouverez en pièces joints les encaissements réalisées par CB ainsi que l'extrait de compte », aucun des montants indiqués dans ces trois documents ne correspond au montant de la créance déclarée.
D'où il suit que la créance de 694,40 euros ne peut pas être considérée comme payée et constitue un passif exigible.
L'appelante soutient encore que la créance déclarée par [Localité 10] Humanis pour 58 722,36 euros doit être réduite à 37 883,78 euros en raison d'un crédit non affecté de cette dernière à hauteur de 20 838,58 euros. Cette justification est mentionnée dans l'état des situations pour expliquer la contestation du débiteur. Elle produit un courriel du 11 février 2025 de [Localité 10] Humanis dont il ressort que le solde de la société France Eco Solution est débiteur de 22 700 euros au titre de l'exercice 2022, de 3 155,78 euros au titre de l'exercice 2023, de 32 866,36 euros au titre de l'exercice 2024 soit 58 722,14 euros.
Si [Localité 10] Humanis confirme avoir un « montant non affecté (crédit sur le compte) » de 20 838,58 euros, elle n'a toutefois pas défalqué ce crédit sur lequel aucune information n'est donnée, en particulier sur son imputation.
Il en résulte que la somme déclarée par [Localité 10] doit être retenue comme passif exigible étant observé que la contestation doit être le cas échéant tranchée par le juge-commissaire.
S'agissant des créances 22 à 26 du PRS Haut-de Seine, l'appelante fait valoir que la créance n° 26 de TVA déclarée à titre provisionnel pour 561 418 euros s'élève en réalité à 720 euros.
L'état des situations en cours indique que selon le débiteur, « la société fait l'objet d'un contrôle fiscal sur cette période dont il résulte qu'elle n'est pas redevable de la somme déclarée ».
Il ressort de ce document que la déclaration concerne l'année 2023 (« année 2023 provi »).
Il ressort d'une lettre du 2 juillet 2024 de l'administration fiscale que l'appelante a fait l'objet d'une vérification fiscale pour la période allant du 9 juillet 2019 au 31 mai 2025 pour la TVA ; que l'administration a retenu au titre de l'année 2020, un rappel de 381 euros, au titre de l'année 2022, un rappel de 12 264 euros et de 720 euros au titre de l'année 2023.
Au vu du courrier de l'administration qui n'a retenu finalement qu'une créance de TVA de 720 euros pour l'année 2023 compte tenu des éléments communiqués par la débitrice, le passif déclaré à titre provisionnel pour 561 418 euros au titre d'un rappel de TVA pour 2023 ne constitue pas à l'évidence un passif exigible.
L'appelante fait ensuite valoir que la créance n° 23 du PRS déclarée pour 136 327 euros à titre provisionnel ne s'élève en réalité qu'à hauteur de 36 469 euros au titre de « Impôt sur les sociétés 2024 », ce qui est attesté le 14 mai 2025 par son expert-comptable qui indique que son attestation est faite « sur la base des résultats prévisionnels » et qu'elle « peut être sujette à modification en fonction des résultats définitifs de l'exercice. »
En l'absence d'information de l'administration, cette attestation ne peut suffire à établir que le montant de l'impôt est moins important que la créance déclarée. Cette créance doit donc être considérée comme un passif exigible.
Il est en revanche constant que les créances de Total Energie Marketing France (15 427,27 euros) ne constitue plus un passif exigible puisque le créancier admet qu'elles ont été complètement payées en décembre 2024.
L'appelante soutient enfin que la créance de la société Noah a été déclarée à deux reprises.
Si l'état des situations en cours mentionne une créance de cette société de 1 504,40 euros déclarée à deux reprises (créance 7 et 16), aucun élément ne permet d'établir qu'il s'agit de la même créance.
Ces deux créances doivent donc être considérées comme un passif exigible.
Au regard de l'ensemble de ces éléments, il apparait que le passif déclaré exigible pour 1 245 597,27 euros peut être réduit des montants suivants :
- de 350 060,06 euros en raison de moratoires accordés par Arcadia Audit, Elite Inspection, Habitat & CO ;
- de 1 224,19 euros (doublon d'une créance de la Compagnie des carburants avec une créance de Fleet Pro) ;
- de 560 698 euros (561 418 ' 720 euros) compte tenu du courrier de l'administration fiscale sur la créance de TVA au titre de l'année 2023 ;
- de 15 427,27 euros raison du paiement de la créance déclarée par Total Energie Marketing France ;
de sorte que le passif exigible peut être évalué à 1 245 597,27 euros (passif total déclaré) ' 350 060, 06 euros ' 1 224,19 euros ' 560 698 euros ' 15 427,27 euros soit 317 905,75 euros et non à 247 680,72 euros comme le soutient l'appelante.
Au titre de son actif disponible, l'appelante soutient qu'elle dispose d'une trésorerie s'élevant à la somme totale de 386 154 euros.
Il ressort d'un relevé de compte arrêté au 30 avril 2025 de la banque Dulubac & Cie que le compte de l'appelante est créditeur de 250 552 euros à cette date (pièce 22).
Il ressort en outre d'un relevé de compte arrêté au 30 avril 2025 que le compte de l'appelante ouvert dans les livres de la banque Pennylane est créditeur à hauteur de 135 612,16 euros.
L'appelante justifie donc trésorerie totale de 250 552 + 135 612,16 = 386 164,16 euros au 30 avril 2025. Il n'est pas démontré qu'elle dispose d'une trésorerie moins importante à ce jour.
Il n'est pas fait état d'autres actifs disponibles.
A cet égard, les organes de la procédure font valoir à juste titre qu'une créance de TVA n'est pas un actif disponible. Toutefois, la cour relève que l'appelante ne s'en prévaut pas dans ses dernières écritures et ne comptabilise au titre de son actif disponible que les soldes créditeurs de ses comptes bancaires.
Au vu des éléments communiqués à la cour, le passif exigible (317 905,75 euros) est donc inférieur à l'actif disponible (386 154,16 euros).
A ce jour, la société appelante n'est donc pas en état de cessation des paiements, ce qui implique l'infirmation du jugement entrepris et le non-lieu à procédure collective
- Sur les demandes accessoires
La société France Eco Solution sera condamnée à payer à la société Total Energie Marketing la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
La demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile des organes de la procédure, ès qualités, doit être écartée.
PAR CES MOTIFS,
La cour, statuant contradictoirement,
Infirme le jugement en toutes ses dispositions ;
Dit n'y avoir lieu à procédure collective à l'égard de la société France Eco Solution ;
Condamne la société France Eco Solution aux dépens de première instance et d'appel, dont les frais de la procédure collective ;
Condamne la société France Eco Solution à payer à la société Total Energie Marketing France la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Rejette les autres demandes des parties.
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Monsieur Ronan GUERLOT, Président, et par Madame Françoise DUCAMIN, Greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT,