CA Paris, Pôle 6 - ch. 3, 9 juillet 2025, n° 22/05745
PARIS
Arrêt
Autre
Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 3
ARRET DU 09 JUILLET2025
(n° , 9 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/05745 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CF3CZ
Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Avril 2022 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° F 19110204
APPELANT - INTIME INCIDENT
Monsieur [H] [S]
Né le 27 septembre 1949 à [Localité 9]
Chez Madame [X] [Y]
[Adresse 1]
[Localité 6]
Représenté par Me Jean-Claude CHEVILLER, avocat au barreau de PARIS, toque : D0945
INTIMEE - APPELANTE INCIDENTE
S.D.C. DE L'IMMEUBLE SIS [Adresse 3], prise en la personne de son représentant légal
N° RCS de [Localité 8] : 399 894 450
[Adresse 2]
[Localité 7]
Représentée par Me Audrey SCHWAB, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 Avril 2025, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Fabienne ROUGE, Présidente de chambre, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :
Fabienne ROUGE, président
Véronique MARMORAT, président
Christophe BACONNIER, président
Greffier, lors des débats : Madame Eva DA SILVA GOMETZ
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, initialement prévu le 11 juin 2025 et prorogé au 9 juillet 2025, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Fabienne ROUGE, Présidente de chambre et par Laetitia PRADIGNAC, greffière, présente lors de la mise à disposition.
***
EXPOS'' DU LITIGE
M. [H] [S] a été engagé par contrat à durée indéterminée le 1er juin 1990 avec effet au 1er avril 1990 par le syndicat des copropriétaires du [Adresse 4], en qualité de concierge.
Dans le dernier état de la relation contractuelle, la rémunération mensuelle brute de M [S] s'élevait à 1 744,4. Il disposait d'un logement de fonction, composé d'une loge située au rez-de-chaussée La convention collective applicable est celle des concierges. L'entreprise compte moins de 11 salariés.
Par lettre du 27 août 2019, M. [S] est mis à la retraite d'office à compter du 1er septembre 2019 et il lui est demandé de quitter sa loge le 13 septembre 2019.
Par lettre du 10 septembre 2019, M. [S] a contesté les conditions de sa mise à la retraite d'office.
Le 8 octobre 2019,M. [S] est convoqué à un entretien préalable à sa mise à la retraite fixé au 15 octobre 2019.
Par lettre du 24 octobre 2019, M. [S] est mis à la retraite d'office à compter du 10 mai 2020.
Le 18 novembre 2019,M. [S] a saisi le conseil de prud'hommes de Paris d'une demande de contestation de la rupture de son contrat de travail et de différentes demandes.
Par ordonnance en date du 18 novembre 2020, le tribunal judiciaire de Paris a ordonné à la demande du syndicat des copropriétaires du [Adresse 4], l'expulsion de M. [S] et l'a condamné à verser une indemnité d'occupation mensuelle de 800 euros.
Par un jugement du 15 avril 2022, le conseil de prud'hommes de Paris a :
- Dit que la rupture de la relation de travail entre le syndicat des copropriétaires du [Adresse 4] représenté par son syndic, le cabinet Habrial et monsieur [S] est un licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- Condamné le syndicat des copropriétaires du [Adresse 4] représenté par son syndic, le cabinet Habrial à payer à M. [S] les sommes suivantes :
' 10 500 euros au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse,
' 5 323 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,
' 532 euros au titre des congés payés y afférents,
' 20 879 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement,
' 9 600 euros au titre de l'absence de logement décent,
' 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
- S'est déclaré incompétent pour les demandes relatives à la fixation de l'indemnité d'occupation et à la condamnation du salarié à payer une indemnité d'occupation,
- Débouté les parties du surplus de leurs demandes,
- Dit que les dépens seront supportés par la société,
- Ordonné l'exécution provisoire du jugement.
M. [S] a interjeté appel de ce jugement le 18 mai 2022.
Par conclusions récapitulatives déposées par RPVA le 8 février 2023 auxquelles il convient de se reporter en ce qui concerne ses moyens, M. [S] demande à la Cour de :
- Déclarer recevable et bien fondé l'appel formé par M. [S] ;
Y faisant droit,
- Infirmer le jugement rendu le 15 avril 2022 en ce qu'il a :
-écarté le caractère discriminatoire du licenciement résultant de la mise à la retraite d'office irrégulière de M. [S], prise le 27 août 2019 par le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5]
- considéré que le licenciement en résultant, pourtant fondé sur motif personnel, lié à l'âge du salarié, ne constitue pas une mesure discriminatoire et qu'en conséquence le licenciement ne serait pas nul,
- limité le montant de l'indemnité du licenciement à la somme de 10.500 euros
- limité l'indemnité au titre d'un logement décent à la somme de 9.600 euros,
- débouté de ses demandes:
au titre du non-respect de la procédure de licenciement, au titre d'une indemnité de fin de contrat au titre d'une indemnité au titre des salaires, du fait de la privation du droit d'accéder à la chambre du 6ème étage, élément de la rémunération,
- Limité à la somme de 1 500 euros le montant de la condamnation prononcée au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Confirmer le jugement rendu le 15 avril 2022 par le Conseil de Prud'hommes de Paris en ce qu'il a jugé que :
les conditions de mise à la retraite d'office de M. [S], décidée prise par le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5], le 27 août 2019, ne sont pas réunies, cette mise à la retraite d'office est irrégulière et constitue un licenciement ayant entraîné la rupture du contrat de travail avec effet au 1er septembre 2019,
le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] ne peut revenir sur ce licenciement sans l'accord de M. [S], qui l'a refusé,
condamné le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] à payer à M. [S] :
- 5.323 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, 532 euros au titre de congés payés afférents,
- 20.879 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement,
- Débouté le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] de ses demandes dirigées à l'encontre de M. [S] ;
Statuant à nouveau sur les chefs infirmés,
- Juger que la rupture du contrat de travail de M. [S] résultant de la mise à la retraite d'office irrégulière en date du 27 août 2019 constitue un licenciement pour motif personnel ;
- Prononcer la nullité du licenciement de M. [S], fondé sur l'âge de monsieur [S], les conditions de mise à la retraite d'office, à la date de la notification faite le 27 août 2019 par le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5], n'étaient pas réunies à cette date, ce qui constitue une mesure discriminatoire ;
- Juger que le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] ne pouvait pas se contredire en affirmant lors de l'audience des plaidoiries devant le Conseil de Prud'hommes de Paris, service départage, que M. [S] disposait du droit d'utiliser la chambre du 6ème étage muni d'une douche jusqu'en juin 2019 alors qu'il a soutenu, avant et pendant la procédure qu'il n'avait jamais bénéficié du droit d'utiliser cette chambre ;
- Constater que M.[S] n'a pas disposé d'un logement décent pendant 31 ans ;
En conséquence,
- Condamner le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5], au regard la gravité des manquements commis par ce dernier à verser, à M. [S] les sommes suivantes :
' 1 744 euros au titre du non-respect de la procédure de licenciement ;
' 53 232 euros au titre de l'indemnité pour licenciement nul ;
' 525 000 euros au titre de la privation d'un logement décent pendant 31 ans, ou, à titre subsidiaire, s'il était jugé que le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] a pu valablement se contredire et que cette privation date du mois de juin 2019, la somme de 9 600 euros, confirmant sur ce point le jugement entrepris ;
' 15 000 euros au titre des salaires du fait de la privation du droit d'accéder à la chambre du 6ème étage, élément de la rémunération de M. [S] ;
En tout état de cause,
- Débouter le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] de l'ensemble de ses demandes, moyens et conclusions ;
- Ordonner la publication du dispositif de la décision à intervenir, aux frais du syndicat des copropriétaires du [Adresse 5], dans deux éditions, au choix de M. [S], à raison d'une publication toutes les deux semaines soit deux par mois et six sur la période de trois mois ;
- Condamner le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] à payer à M. [S] le droit proportionnel de recouvrement et d'encaissement de l'article A444-32 du Code de commerce (émolument n°129 du tableau 3-1 de l'annexe 4-7), qui serait mis à charge ; et
- Condamner le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] à payer à M. [S] la somme de 20.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.
Par conclusions récapitulatives déposées par RPVA le 10 mars 2025 auxquelles il convient de se reporter en ce qui concerne ses moyens, le syndicat des copropriétaires du [Adresse 4] représenté par le cabinet Habrial demande à la Cour de :
- Recevoir le Syndicat des copropriétaires du [Adresse 4] en sa constitution et en son appel incident et l'en dire bien fondé.
- Infirmer le jugement du Conseil de Prud'hommes de Paris du 15 avril 2022 en ce qu'il a dit que la rupture de la relation de travail entre le Syndicat des copropriétaires du [Adresse 4] et M. [S] était un licenciement sans cause réelle et sérieuse, et en ce qu'il l'a condamné à payer à M. [S] les sommes suivantes :
' 10 500 euros au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse,
' 5 323 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,
' 532 euros au titre des congés payés y afférents,
' 20 879 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement,
' 9 600 euros au titre de l'absence de logement décent,
' 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
' les dépens.
- Juger au contraire, et à titre principal, que la procédure de mise à la retraite initiée par le syndicat des copropriétaires du [Adresse 4] était bien fondée sur les plans légal et conventionnel.
- Débouter M. [S] de l'intégralité de ses demandes à l'encontre du syndicat des copropriétaires du [Adresse 4].
A titre subsidiaire :
- Débouter M. [S] de sa demande de nullité du licenciement en l'absence de toute discrimination liée à l'âge.
- Juger que l'indemnité versée à M. [S] au titre de la cessation de son contrat de travail pour cause de retraite couvre tout du moins quasi en intégralité l'indemnité conventionnelle de licenciement ; en conséquence, ordonner une compensation entre ces deux sommes.
- Réduire à de plus justes proportions l'indemnité accordée le cas échéant à M.[S] pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, soit à trois mois de salaire conformément aux ordonnances du 22 septembre 2017.
- Allouer à M. [S] une indemnité au titre de l'impossibilité d'utiliser la douche de son logement sur une période de 10 mois à hauteur de la somme maximum de 5 000 euros, et à titre infiniment subsidiaire, de 9 600 euros.
- Débouter M. [S] de toutes ses autres demandes, notamment celle de paiement d'une somme de 525 000 formulée au titre de la privation d'un logement décent pendant 31 ans, et ce faisant, confirmer le jugement prud'homal en ce qu'il a débouté monsieur [S] du surplus de ses demandes.
- Débouter M. [S] de sa demande d'indemnité au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, et à défaut, la Réduire à de plus justes proportions, et rejeter la demande de mise à la charge du concluant des frais de recouvrement de créance qui ne s'appliquent pas aux créances prud'hommales.
En tout état de cause :
- Condamner M.[S] à payer au syndicat des copropriétaires du [Adresse 4] une somme de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel dont le recouvrement sera poursuivi par la société 2H Avocats, en la personne de Maître Audrey Schwab, par application des dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 25 mars 2025 et l'audience de plaidoiries a été fixée au 7 avril 2025.
La Cour se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, à la décision déférée et aux dernières conclusions échangées en appel.
MOTIFS
Sur le licenciement
M. [S] soutient que :
- il a fait l'objet d'un licenciement pour motif personnel puisqu'il n'avait pas 70 ans ni à la date de la lettre du 27 août 2019 lui notifiant sa mise à la retraite, ni à la date du 1er septembre 2019 date de sa mise à la retraite effective,
- cette mise à la retraite d'office constituait une mesure discriminatoire emportant la nullité du licenciement puisque l'employeur n'ignorait pas la date de naissance de M. [S] et qu'il s'agissait d'une décision délibérée pour l'obliger à quitter les lieux le plus rapidement possible afin de louer la loge et de vendre la chambre du 6e étage
- le syndicat des copropriétaires du [Adresse 4] a tenté une régularisation par la lettre du 8 octobre 2019 mais elle n'a produit aucun effet juridique car le contrat de monsieur [S] a été rompu à la suite de la première décision de mise à la retraite d'office et que le syndicat des copropriétaires du [Adresse 4] ne pouvait se rétracter unilatéralement sans l'accord de monsieur [S], qui n'a jamais accepté de revenir sur la mesure de licenciement.
Le syndicat des copropriétaires du [Adresse 4] soutient que :
- il n'a jamais eu la volonté de licencier M.[S], seule une procédure de mise à la retraite ayant été envisagée,
- aucune discrimination liée à l'âge ne peut être déduite du fait que la procédure de mise à la retraite d'office a été initiée 21 jours trop tôt, ce qui résulte d'une maladresse administrative,
- cette erreur a été rectifiée dès le 8 octobre 2019 par une lettre qui l'a convoqué pour un nouvel entretien préalable aux fins de l'aviser d'une mise à la retraite en avril 2020 puisque le contrat de travail de M. [S] n'a pas été rompu au 1er septembre 2019 comme le démontre le fait que M. [S] ait continué à exercer au sein de la copropriété.
M. [S] est né le 27 septembre 1949, ce que son employeur devait savoir ou à tout le moins prendre le soin de vérifier avant de décider de le mettre à la retraite d'office.
Cette erreur ne peut être légitimement invoquée, par le syndicat des copropriétaires. Celui-ci n'a pas non plus respecté la convention collective prévoyant, 6 mois de préavis ainsi que le syndic va le reconnaître dans sa tentative de rectification du 24 octobre 2019, faisant débuter ce préavis à la date de présentation de cette lettre recommandée lui signifiant à nouveau sa date de mise à la retraite.
Cette méconnaissance que le syndic professionnel se doit de connaître démontre la volonté de libérer la loge occupé par M. [S] au plus vite.
Il sera observé que la première notification de mise à la retraite a été faite alors que le salarié n'avait pas atteint l'age permettant à l'employeur de le mettre d'office à la retraite. Cette mise à la retraite impossible s'analyse comme un licenciement.
Sur la discrimination
Par application de l'article L.1132-1 du code du travail, aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie par l'article 1er de la loi du 27 mai 2008, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L. 3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses m'urs, de son orientation sexuelle, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille ou en raison de son état de santé ou de son handicap.
L'article L 1134 - 1 du code du travail prévoit qu'en cas de litige relatif à l'application de ce texte, le salarié concerné présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte telle que définie par l'article 1er de la loi du 27 mai 2008 ; au vu de ces éléments, il incombe à l'employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.
Le juge forme sa conviction, après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles
M. [S] soutient que compte tenu du motifs de la lettre de licenciement celui-ci est fondé sur son âge.
Il établit des éléments laissant supposer l'existence d'une discrimination, il appartient donc à l'employeur de démontrer que l'âge est sans lien avec le licenciement.
Les différents courriers versés aux débats mentionnent l'âge du salarié. Il convient donc de constater que l'âge de M. [S] est la cause de ce licenciement, et que l'employeur n'a pas respecté les dispositions légales notamment en matière de préavis limitant le préavis de 6 mois à 13 jours.
L'information préalable faite par le syndic à différentes reprises, du fait que celui-ci sera mis à la retraite dès ses 70 ans, ne régularise pas la situation et n'accrédite pas l'erreur matérielle de date.
Dès lors le licenciement est nul pour discrimination fondée sur l'âge.
La seconde procédure n'a pu dès lors régulariser la situation.
M. [S] sollicite paiement de la somme de 53 232 euros pour licenciement nul, compte tenu des éléments versés aux débats il lui sera alloué la somme de 12 271 euros à ce titre, le jugement étant infirmé.
Sur l'indemnité conventionnelle de licenciement
M. [S] sollicite à ce titre la confirmation du jugement qui lui a alloué la somme de 20. 879 euros.
Le syndicat des copropriétaires ne conteste pas ce montant mais rappelle que M.[S] a bénéficié d'une indemnité de mise à la retraite d'un montant de 19 539,09 euros.
Il soutient à juste titre que cette indemnité en cas de requalification d'une mise à la retraite en licenciement ne peut se cumuler avec l'indemnité conventionnelle de licenciement. Il lui sera néanmoins dû la somme de 1 340 euros.
Sur l'irrégularité de la procédure
M. [S] soutient que le syndicat des copropriétaire n'a pas respecté la procédure. Aucune lettre de convocation à un entretien préalable n'est versée aux débats. La procédure n'a pas été respectée, il sera alloué à M. [S] la somme de 1 744 euros
Sur le logement décent
En application de l'article 20 de la convention collective nationale des gardiens
concierges et employés d'immeubles du 11 décembre 1979, un gardien employé d'immeuble relevant de la catégorie B ce qui est le cas en l'espèce, doit être logé au titre d'accessoire de son contrat de travail dans l'immeuble où il exerce ses fonctions ce qui implique l'attribution d'un logement de fonction.
Ce logement devra être au moins conforme aux normes relatives au logement décent.
Un logement décent doit notamment comprendre une installation sanitaire intérieure au logement comprenant un w-c, séparé de la cuisine et de la pièce où sont pris les repas, et un équipement pour la toilette corporelle, comportant une baignoire ou une douche, aménagé de manière à garantir l'intimité personnelle, alimenté en eau chaude et froide et muni d'une évacuation des eaux usées.
M. [S] soutient que le syndicat des copropriétaires du [Adresse 4] prétend que ce dernier n'a jamais eu le droit d'utiliser la chambre du 6ème étage, ce qui constitue un aveu que le logement de monsieur [S] était dépourvu de douche pendant 31 ans. Il demande réparation de son préjudice lié à l'occupation d'un logement non décent pendant plus de 30 ans.
Le syndicat des copropriétaires du [Adresse 4] soutient que la chambre du 6ème n'était pas mise à la disposition de monsieur [S] mais qu' il y a eu accès pendant 30 ans pour se laver, cet accès ayant cessé de fait au changement de destination du bien mis en vente à compter de juin 2019.Elle considère que l'impossibilité de M. [S] de se doucher n'a duré que 10 mois puisqu'une douche a été installée dans la loge le 13 mars 2020.
Les différentes pièces versées aux débats démontrent que M. [S] a eu l'usage d'une chambre de bonne située au 6ème étage de l'immeuble qui était dotée d'une douche. Cependant à compter du mois de juin 2019 cette chambre qui était considérée comme une partie commune de l'immeuble ainsi que cela résulte du courrier du cabinet Habral, en date du 18 juillet 2019 a été mise en vente. M. [S] a d'ailleurs fait constater par huissier qu'il ne pouvait plus y accéder, la serrure ayant été changée.
Lors de l'assemblée générale des copropriétaires du 25 juin 2019, il était voté une résolution de faire réaliser des travaux dans la loge du gardien afin notamment de l'équiper d'une douche.
Il a néanmoins fallu la saisine du Conseil des prud'hommes en sa formation des référé et l'ordonnance rendue en date du 26 décembre 2019 pour que les travaux débutent en février 2020.
Par constat d'huissier en date du 9 mars 2020 M. [S] faisait constater que du fait des travaux exécutés dans la loge, il n'avait plus accès à l'eau et n'avait plus d'espace pour cuisiner.
Ainsi que le reconnait le syndicat des copropriétaires, M. [S] a été privé pendant plus de 10 mois de l'accès à un logement décent.
Celui-ci sollicitant à titre subsidiaire la confirmation du jugement qui a évalué son préjudice à la somme de 9 600 euros sera confirmé.
Sur la demande d'indemnisation du fait de la privation de la chambre du 6ème étage
Il sera observé que l'écriture, notant une chambre du 6ème figurant sur l'exemplaire du contrat de travail produit par M. [S], mention qui ne figure pas sur l'exemplaire de l'employeur, est différente de l'écriture des autres mentions.
Ainsi la démonstration du fait que cette chambre soit un élément de sa rémunération n'est pas apportée.
Il sera débouté de cette demande,
Sur la demande de publication de la décision
La cour confirme le jugement qui a débouté M.[S] de cette demande par adoption des motifs.
Sur la charge des frais de recouvrement
La demande est fondée sur l'éventuelle application d'un droit proportionnel de recouvrement et d'encaissement, il n'y sera pas fait droit.
Le syndicat des copropriétaires succombant partiellement sera condamné au paiement de la somme de 1500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues par l'article 450 du code de procédure civile,
CONFIRME le jugement sur le montant du préavis octroyé et les congés payés afférents ainsi que sur les dommages et intérêts pour l'absence de logement décent ;
l'INFIRMANT sur le surplus ;
Y ajoutant,
REQUALIFIE la mise à la retraite en licenciement nul pour discrimination ;
CONDAMNE Syndicat des copropriétaires du [Adresse 4] représenté par le syndic le Cabinet Habrial à payer à M. [S] les sommes de :
- 12 271 euros à titre d'indemnité pour licenciement nul
- 1 340 euros à titre de solde d'indemnité conventionnelle de licenciement
- 1 744 euros à titre d'indemnité pour non respect de la procédure
Vu l'article 700 du code de procédure civile
CONDAMNE Syndicat des copropriétaires du [Adresse 4] représenté par le syndic le Cabinet Habrial à payer à M. [S] en cause d'appel la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
DEBOUTE les parties du surplus des demandes ;
LAISSE les dépens à la charge du Syndicat des copropriétaires du [Adresse 4] représenté par le syndic le Cabinet Habrial
LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE
délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 3
ARRET DU 09 JUILLET2025
(n° , 9 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/05745 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CF3CZ
Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Avril 2022 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° F 19110204
APPELANT - INTIME INCIDENT
Monsieur [H] [S]
Né le 27 septembre 1949 à [Localité 9]
Chez Madame [X] [Y]
[Adresse 1]
[Localité 6]
Représenté par Me Jean-Claude CHEVILLER, avocat au barreau de PARIS, toque : D0945
INTIMEE - APPELANTE INCIDENTE
S.D.C. DE L'IMMEUBLE SIS [Adresse 3], prise en la personne de son représentant légal
N° RCS de [Localité 8] : 399 894 450
[Adresse 2]
[Localité 7]
Représentée par Me Audrey SCHWAB, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 Avril 2025, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Fabienne ROUGE, Présidente de chambre, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :
Fabienne ROUGE, président
Véronique MARMORAT, président
Christophe BACONNIER, président
Greffier, lors des débats : Madame Eva DA SILVA GOMETZ
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, initialement prévu le 11 juin 2025 et prorogé au 9 juillet 2025, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Fabienne ROUGE, Présidente de chambre et par Laetitia PRADIGNAC, greffière, présente lors de la mise à disposition.
***
EXPOS'' DU LITIGE
M. [H] [S] a été engagé par contrat à durée indéterminée le 1er juin 1990 avec effet au 1er avril 1990 par le syndicat des copropriétaires du [Adresse 4], en qualité de concierge.
Dans le dernier état de la relation contractuelle, la rémunération mensuelle brute de M [S] s'élevait à 1 744,4. Il disposait d'un logement de fonction, composé d'une loge située au rez-de-chaussée La convention collective applicable est celle des concierges. L'entreprise compte moins de 11 salariés.
Par lettre du 27 août 2019, M. [S] est mis à la retraite d'office à compter du 1er septembre 2019 et il lui est demandé de quitter sa loge le 13 septembre 2019.
Par lettre du 10 septembre 2019, M. [S] a contesté les conditions de sa mise à la retraite d'office.
Le 8 octobre 2019,M. [S] est convoqué à un entretien préalable à sa mise à la retraite fixé au 15 octobre 2019.
Par lettre du 24 octobre 2019, M. [S] est mis à la retraite d'office à compter du 10 mai 2020.
Le 18 novembre 2019,M. [S] a saisi le conseil de prud'hommes de Paris d'une demande de contestation de la rupture de son contrat de travail et de différentes demandes.
Par ordonnance en date du 18 novembre 2020, le tribunal judiciaire de Paris a ordonné à la demande du syndicat des copropriétaires du [Adresse 4], l'expulsion de M. [S] et l'a condamné à verser une indemnité d'occupation mensuelle de 800 euros.
Par un jugement du 15 avril 2022, le conseil de prud'hommes de Paris a :
- Dit que la rupture de la relation de travail entre le syndicat des copropriétaires du [Adresse 4] représenté par son syndic, le cabinet Habrial et monsieur [S] est un licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- Condamné le syndicat des copropriétaires du [Adresse 4] représenté par son syndic, le cabinet Habrial à payer à M. [S] les sommes suivantes :
' 10 500 euros au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse,
' 5 323 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,
' 532 euros au titre des congés payés y afférents,
' 20 879 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement,
' 9 600 euros au titre de l'absence de logement décent,
' 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
- S'est déclaré incompétent pour les demandes relatives à la fixation de l'indemnité d'occupation et à la condamnation du salarié à payer une indemnité d'occupation,
- Débouté les parties du surplus de leurs demandes,
- Dit que les dépens seront supportés par la société,
- Ordonné l'exécution provisoire du jugement.
M. [S] a interjeté appel de ce jugement le 18 mai 2022.
Par conclusions récapitulatives déposées par RPVA le 8 février 2023 auxquelles il convient de se reporter en ce qui concerne ses moyens, M. [S] demande à la Cour de :
- Déclarer recevable et bien fondé l'appel formé par M. [S] ;
Y faisant droit,
- Infirmer le jugement rendu le 15 avril 2022 en ce qu'il a :
-écarté le caractère discriminatoire du licenciement résultant de la mise à la retraite d'office irrégulière de M. [S], prise le 27 août 2019 par le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5]
- considéré que le licenciement en résultant, pourtant fondé sur motif personnel, lié à l'âge du salarié, ne constitue pas une mesure discriminatoire et qu'en conséquence le licenciement ne serait pas nul,
- limité le montant de l'indemnité du licenciement à la somme de 10.500 euros
- limité l'indemnité au titre d'un logement décent à la somme de 9.600 euros,
- débouté de ses demandes:
au titre du non-respect de la procédure de licenciement, au titre d'une indemnité de fin de contrat au titre d'une indemnité au titre des salaires, du fait de la privation du droit d'accéder à la chambre du 6ème étage, élément de la rémunération,
- Limité à la somme de 1 500 euros le montant de la condamnation prononcée au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Confirmer le jugement rendu le 15 avril 2022 par le Conseil de Prud'hommes de Paris en ce qu'il a jugé que :
les conditions de mise à la retraite d'office de M. [S], décidée prise par le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5], le 27 août 2019, ne sont pas réunies, cette mise à la retraite d'office est irrégulière et constitue un licenciement ayant entraîné la rupture du contrat de travail avec effet au 1er septembre 2019,
le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] ne peut revenir sur ce licenciement sans l'accord de M. [S], qui l'a refusé,
condamné le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] à payer à M. [S] :
- 5.323 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, 532 euros au titre de congés payés afférents,
- 20.879 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement,
- Débouté le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] de ses demandes dirigées à l'encontre de M. [S] ;
Statuant à nouveau sur les chefs infirmés,
- Juger que la rupture du contrat de travail de M. [S] résultant de la mise à la retraite d'office irrégulière en date du 27 août 2019 constitue un licenciement pour motif personnel ;
- Prononcer la nullité du licenciement de M. [S], fondé sur l'âge de monsieur [S], les conditions de mise à la retraite d'office, à la date de la notification faite le 27 août 2019 par le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5], n'étaient pas réunies à cette date, ce qui constitue une mesure discriminatoire ;
- Juger que le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] ne pouvait pas se contredire en affirmant lors de l'audience des plaidoiries devant le Conseil de Prud'hommes de Paris, service départage, que M. [S] disposait du droit d'utiliser la chambre du 6ème étage muni d'une douche jusqu'en juin 2019 alors qu'il a soutenu, avant et pendant la procédure qu'il n'avait jamais bénéficié du droit d'utiliser cette chambre ;
- Constater que M.[S] n'a pas disposé d'un logement décent pendant 31 ans ;
En conséquence,
- Condamner le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5], au regard la gravité des manquements commis par ce dernier à verser, à M. [S] les sommes suivantes :
' 1 744 euros au titre du non-respect de la procédure de licenciement ;
' 53 232 euros au titre de l'indemnité pour licenciement nul ;
' 525 000 euros au titre de la privation d'un logement décent pendant 31 ans, ou, à titre subsidiaire, s'il était jugé que le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] a pu valablement se contredire et que cette privation date du mois de juin 2019, la somme de 9 600 euros, confirmant sur ce point le jugement entrepris ;
' 15 000 euros au titre des salaires du fait de la privation du droit d'accéder à la chambre du 6ème étage, élément de la rémunération de M. [S] ;
En tout état de cause,
- Débouter le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] de l'ensemble de ses demandes, moyens et conclusions ;
- Ordonner la publication du dispositif de la décision à intervenir, aux frais du syndicat des copropriétaires du [Adresse 5], dans deux éditions, au choix de M. [S], à raison d'une publication toutes les deux semaines soit deux par mois et six sur la période de trois mois ;
- Condamner le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] à payer à M. [S] le droit proportionnel de recouvrement et d'encaissement de l'article A444-32 du Code de commerce (émolument n°129 du tableau 3-1 de l'annexe 4-7), qui serait mis à charge ; et
- Condamner le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] à payer à M. [S] la somme de 20.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.
Par conclusions récapitulatives déposées par RPVA le 10 mars 2025 auxquelles il convient de se reporter en ce qui concerne ses moyens, le syndicat des copropriétaires du [Adresse 4] représenté par le cabinet Habrial demande à la Cour de :
- Recevoir le Syndicat des copropriétaires du [Adresse 4] en sa constitution et en son appel incident et l'en dire bien fondé.
- Infirmer le jugement du Conseil de Prud'hommes de Paris du 15 avril 2022 en ce qu'il a dit que la rupture de la relation de travail entre le Syndicat des copropriétaires du [Adresse 4] et M. [S] était un licenciement sans cause réelle et sérieuse, et en ce qu'il l'a condamné à payer à M. [S] les sommes suivantes :
' 10 500 euros au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse,
' 5 323 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,
' 532 euros au titre des congés payés y afférents,
' 20 879 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement,
' 9 600 euros au titre de l'absence de logement décent,
' 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
' les dépens.
- Juger au contraire, et à titre principal, que la procédure de mise à la retraite initiée par le syndicat des copropriétaires du [Adresse 4] était bien fondée sur les plans légal et conventionnel.
- Débouter M. [S] de l'intégralité de ses demandes à l'encontre du syndicat des copropriétaires du [Adresse 4].
A titre subsidiaire :
- Débouter M. [S] de sa demande de nullité du licenciement en l'absence de toute discrimination liée à l'âge.
- Juger que l'indemnité versée à M. [S] au titre de la cessation de son contrat de travail pour cause de retraite couvre tout du moins quasi en intégralité l'indemnité conventionnelle de licenciement ; en conséquence, ordonner une compensation entre ces deux sommes.
- Réduire à de plus justes proportions l'indemnité accordée le cas échéant à M.[S] pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, soit à trois mois de salaire conformément aux ordonnances du 22 septembre 2017.
- Allouer à M. [S] une indemnité au titre de l'impossibilité d'utiliser la douche de son logement sur une période de 10 mois à hauteur de la somme maximum de 5 000 euros, et à titre infiniment subsidiaire, de 9 600 euros.
- Débouter M. [S] de toutes ses autres demandes, notamment celle de paiement d'une somme de 525 000 formulée au titre de la privation d'un logement décent pendant 31 ans, et ce faisant, confirmer le jugement prud'homal en ce qu'il a débouté monsieur [S] du surplus de ses demandes.
- Débouter M. [S] de sa demande d'indemnité au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, et à défaut, la Réduire à de plus justes proportions, et rejeter la demande de mise à la charge du concluant des frais de recouvrement de créance qui ne s'appliquent pas aux créances prud'hommales.
En tout état de cause :
- Condamner M.[S] à payer au syndicat des copropriétaires du [Adresse 4] une somme de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel dont le recouvrement sera poursuivi par la société 2H Avocats, en la personne de Maître Audrey Schwab, par application des dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 25 mars 2025 et l'audience de plaidoiries a été fixée au 7 avril 2025.
La Cour se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, à la décision déférée et aux dernières conclusions échangées en appel.
MOTIFS
Sur le licenciement
M. [S] soutient que :
- il a fait l'objet d'un licenciement pour motif personnel puisqu'il n'avait pas 70 ans ni à la date de la lettre du 27 août 2019 lui notifiant sa mise à la retraite, ni à la date du 1er septembre 2019 date de sa mise à la retraite effective,
- cette mise à la retraite d'office constituait une mesure discriminatoire emportant la nullité du licenciement puisque l'employeur n'ignorait pas la date de naissance de M. [S] et qu'il s'agissait d'une décision délibérée pour l'obliger à quitter les lieux le plus rapidement possible afin de louer la loge et de vendre la chambre du 6e étage
- le syndicat des copropriétaires du [Adresse 4] a tenté une régularisation par la lettre du 8 octobre 2019 mais elle n'a produit aucun effet juridique car le contrat de monsieur [S] a été rompu à la suite de la première décision de mise à la retraite d'office et que le syndicat des copropriétaires du [Adresse 4] ne pouvait se rétracter unilatéralement sans l'accord de monsieur [S], qui n'a jamais accepté de revenir sur la mesure de licenciement.
Le syndicat des copropriétaires du [Adresse 4] soutient que :
- il n'a jamais eu la volonté de licencier M.[S], seule une procédure de mise à la retraite ayant été envisagée,
- aucune discrimination liée à l'âge ne peut être déduite du fait que la procédure de mise à la retraite d'office a été initiée 21 jours trop tôt, ce qui résulte d'une maladresse administrative,
- cette erreur a été rectifiée dès le 8 octobre 2019 par une lettre qui l'a convoqué pour un nouvel entretien préalable aux fins de l'aviser d'une mise à la retraite en avril 2020 puisque le contrat de travail de M. [S] n'a pas été rompu au 1er septembre 2019 comme le démontre le fait que M. [S] ait continué à exercer au sein de la copropriété.
M. [S] est né le 27 septembre 1949, ce que son employeur devait savoir ou à tout le moins prendre le soin de vérifier avant de décider de le mettre à la retraite d'office.
Cette erreur ne peut être légitimement invoquée, par le syndicat des copropriétaires. Celui-ci n'a pas non plus respecté la convention collective prévoyant, 6 mois de préavis ainsi que le syndic va le reconnaître dans sa tentative de rectification du 24 octobre 2019, faisant débuter ce préavis à la date de présentation de cette lettre recommandée lui signifiant à nouveau sa date de mise à la retraite.
Cette méconnaissance que le syndic professionnel se doit de connaître démontre la volonté de libérer la loge occupé par M. [S] au plus vite.
Il sera observé que la première notification de mise à la retraite a été faite alors que le salarié n'avait pas atteint l'age permettant à l'employeur de le mettre d'office à la retraite. Cette mise à la retraite impossible s'analyse comme un licenciement.
Sur la discrimination
Par application de l'article L.1132-1 du code du travail, aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie par l'article 1er de la loi du 27 mai 2008, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L. 3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses m'urs, de son orientation sexuelle, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille ou en raison de son état de santé ou de son handicap.
L'article L 1134 - 1 du code du travail prévoit qu'en cas de litige relatif à l'application de ce texte, le salarié concerné présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte telle que définie par l'article 1er de la loi du 27 mai 2008 ; au vu de ces éléments, il incombe à l'employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.
Le juge forme sa conviction, après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles
M. [S] soutient que compte tenu du motifs de la lettre de licenciement celui-ci est fondé sur son âge.
Il établit des éléments laissant supposer l'existence d'une discrimination, il appartient donc à l'employeur de démontrer que l'âge est sans lien avec le licenciement.
Les différents courriers versés aux débats mentionnent l'âge du salarié. Il convient donc de constater que l'âge de M. [S] est la cause de ce licenciement, et que l'employeur n'a pas respecté les dispositions légales notamment en matière de préavis limitant le préavis de 6 mois à 13 jours.
L'information préalable faite par le syndic à différentes reprises, du fait que celui-ci sera mis à la retraite dès ses 70 ans, ne régularise pas la situation et n'accrédite pas l'erreur matérielle de date.
Dès lors le licenciement est nul pour discrimination fondée sur l'âge.
La seconde procédure n'a pu dès lors régulariser la situation.
M. [S] sollicite paiement de la somme de 53 232 euros pour licenciement nul, compte tenu des éléments versés aux débats il lui sera alloué la somme de 12 271 euros à ce titre, le jugement étant infirmé.
Sur l'indemnité conventionnelle de licenciement
M. [S] sollicite à ce titre la confirmation du jugement qui lui a alloué la somme de 20. 879 euros.
Le syndicat des copropriétaires ne conteste pas ce montant mais rappelle que M.[S] a bénéficié d'une indemnité de mise à la retraite d'un montant de 19 539,09 euros.
Il soutient à juste titre que cette indemnité en cas de requalification d'une mise à la retraite en licenciement ne peut se cumuler avec l'indemnité conventionnelle de licenciement. Il lui sera néanmoins dû la somme de 1 340 euros.
Sur l'irrégularité de la procédure
M. [S] soutient que le syndicat des copropriétaire n'a pas respecté la procédure. Aucune lettre de convocation à un entretien préalable n'est versée aux débats. La procédure n'a pas été respectée, il sera alloué à M. [S] la somme de 1 744 euros
Sur le logement décent
En application de l'article 20 de la convention collective nationale des gardiens
concierges et employés d'immeubles du 11 décembre 1979, un gardien employé d'immeuble relevant de la catégorie B ce qui est le cas en l'espèce, doit être logé au titre d'accessoire de son contrat de travail dans l'immeuble où il exerce ses fonctions ce qui implique l'attribution d'un logement de fonction.
Ce logement devra être au moins conforme aux normes relatives au logement décent.
Un logement décent doit notamment comprendre une installation sanitaire intérieure au logement comprenant un w-c, séparé de la cuisine et de la pièce où sont pris les repas, et un équipement pour la toilette corporelle, comportant une baignoire ou une douche, aménagé de manière à garantir l'intimité personnelle, alimenté en eau chaude et froide et muni d'une évacuation des eaux usées.
M. [S] soutient que le syndicat des copropriétaires du [Adresse 4] prétend que ce dernier n'a jamais eu le droit d'utiliser la chambre du 6ème étage, ce qui constitue un aveu que le logement de monsieur [S] était dépourvu de douche pendant 31 ans. Il demande réparation de son préjudice lié à l'occupation d'un logement non décent pendant plus de 30 ans.
Le syndicat des copropriétaires du [Adresse 4] soutient que la chambre du 6ème n'était pas mise à la disposition de monsieur [S] mais qu' il y a eu accès pendant 30 ans pour se laver, cet accès ayant cessé de fait au changement de destination du bien mis en vente à compter de juin 2019.Elle considère que l'impossibilité de M. [S] de se doucher n'a duré que 10 mois puisqu'une douche a été installée dans la loge le 13 mars 2020.
Les différentes pièces versées aux débats démontrent que M. [S] a eu l'usage d'une chambre de bonne située au 6ème étage de l'immeuble qui était dotée d'une douche. Cependant à compter du mois de juin 2019 cette chambre qui était considérée comme une partie commune de l'immeuble ainsi que cela résulte du courrier du cabinet Habral, en date du 18 juillet 2019 a été mise en vente. M. [S] a d'ailleurs fait constater par huissier qu'il ne pouvait plus y accéder, la serrure ayant été changée.
Lors de l'assemblée générale des copropriétaires du 25 juin 2019, il était voté une résolution de faire réaliser des travaux dans la loge du gardien afin notamment de l'équiper d'une douche.
Il a néanmoins fallu la saisine du Conseil des prud'hommes en sa formation des référé et l'ordonnance rendue en date du 26 décembre 2019 pour que les travaux débutent en février 2020.
Par constat d'huissier en date du 9 mars 2020 M. [S] faisait constater que du fait des travaux exécutés dans la loge, il n'avait plus accès à l'eau et n'avait plus d'espace pour cuisiner.
Ainsi que le reconnait le syndicat des copropriétaires, M. [S] a été privé pendant plus de 10 mois de l'accès à un logement décent.
Celui-ci sollicitant à titre subsidiaire la confirmation du jugement qui a évalué son préjudice à la somme de 9 600 euros sera confirmé.
Sur la demande d'indemnisation du fait de la privation de la chambre du 6ème étage
Il sera observé que l'écriture, notant une chambre du 6ème figurant sur l'exemplaire du contrat de travail produit par M. [S], mention qui ne figure pas sur l'exemplaire de l'employeur, est différente de l'écriture des autres mentions.
Ainsi la démonstration du fait que cette chambre soit un élément de sa rémunération n'est pas apportée.
Il sera débouté de cette demande,
Sur la demande de publication de la décision
La cour confirme le jugement qui a débouté M.[S] de cette demande par adoption des motifs.
Sur la charge des frais de recouvrement
La demande est fondée sur l'éventuelle application d'un droit proportionnel de recouvrement et d'encaissement, il n'y sera pas fait droit.
Le syndicat des copropriétaires succombant partiellement sera condamné au paiement de la somme de 1500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues par l'article 450 du code de procédure civile,
CONFIRME le jugement sur le montant du préavis octroyé et les congés payés afférents ainsi que sur les dommages et intérêts pour l'absence de logement décent ;
l'INFIRMANT sur le surplus ;
Y ajoutant,
REQUALIFIE la mise à la retraite en licenciement nul pour discrimination ;
CONDAMNE Syndicat des copropriétaires du [Adresse 4] représenté par le syndic le Cabinet Habrial à payer à M. [S] les sommes de :
- 12 271 euros à titre d'indemnité pour licenciement nul
- 1 340 euros à titre de solde d'indemnité conventionnelle de licenciement
- 1 744 euros à titre d'indemnité pour non respect de la procédure
Vu l'article 700 du code de procédure civile
CONDAMNE Syndicat des copropriétaires du [Adresse 4] représenté par le syndic le Cabinet Habrial à payer à M. [S] en cause d'appel la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
DEBOUTE les parties du surplus des demandes ;
LAISSE les dépens à la charge du Syndicat des copropriétaires du [Adresse 4] représenté par le syndic le Cabinet Habrial
LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE