CA Versailles, ch. civ. 1-1, 8 juillet 2025, n° 21/06429
VERSAILLES
Arrêt
Autre
COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 28A
Chambre civile 1-1
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 08 JUILLET 2025
N° RG 21/06429 - N° Portalis DBV3-V-B7F-UZQ6
AFFAIRE :
[H], [E], [W] [A]
C/
[K] [S] veuve [A]
...
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 01 Juillet 2021, par le tibunal judiciaire de VERSAILLES
N° Chambre :
N° Section :
N° RG : 19/01162
modifié par Jugement rendu le 16 Septembre 2021
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
- Me PORCHEROT
- Me SEGONNE-MORAND
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE HUIT JUILLET DEUX MILLE VINGT CINQ,
La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Monsieur [H], [E], [W] [A]
né le [Date naissance 8] 1975 à [Localité 23]
de nationalité Française
[Adresse 3]
[Localité 13]
représenté par Me Sophie PORCHEROT de la SELARL REYNAUD AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 177 - N° du dossier 382900
Me Marie-Christine VINCENT - ALQUIE, Plaidant, avocat au barreau de BAYONNE, vestiaire : 40, substitué par Me Paul BLEIN de la SELARL ALQUIE AVOCATS, avocat au barreau de BAYONNE, vestiaire : 40
APPELANT
****************
Madame [K] [S] veuve [A]
née le [Date naissance 6] 1964 à [Localité 26]
de nationalité Française
[Adresse 4]
[Localité 19]
Madame [M], [R], [J], [L] [A]
née le [Date naissance 7] 1989 à [Localité 25]
de nationalité Française
[Adresse 4]
[Localité 19]
Madame [Y], [F], [B], [U] [A]
née le [Date naissance 2] 1992 à [Localité 25]
de nationalité Française
[Adresse 4]
[Localité 19]
représentées par Me Aurélie SEGONNE-MORAND de la SELARL LMC PARTENAIRES, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 220 - N° du dossier 19.07471, substituée par Me Carine LERENARD, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 548
INTIMEES
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 19 Mai 2025 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Raphaël TRARIEUX, Président de chambre, et Madame Pascale CARIOU, Conseillère, faisant fonction de Présidente, chargée du rapport,
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Pascale CARIOU, Conseillère, faisant fonction de Présidente,
Monsieur Raphaël TRARIEUX, Président de chambre
Madame Florence PERRET, Présidente de chambre,
Greffier, lors des débats : Madame Rosanna VALETTE,
FAITS ET PROCEDURE,
[X] [A], divorcé en premières noces de Mme [N] [V] puis en deuxièmes noces de Mme [I] [O] [G] [P], a épousé en troisièmes noces Mme [K] [S] le [Date mariage 9] 1988 sous le régime de la séparation de biens.
Il est décédé le [Date décès 5] 2011 à [Localité 24], laissant pour lui succéder :
- sa troisième épouse, Mme [S] veuve [A], bénéficiaire d'une donation entre époux consentie le 1er septembre 1989 et en vertu de l'article 757 du code civil, du quart en toute propriété des biens composant la succession,
- ses trois enfants :
- [H] [A], issu de sa première union,
- [M] et [Y] [A], issues de sa troisième union.
Par testament olographe du 28 mai 2004, [X] [A] a institué pour légataires de la quotité disponible ses deux filles, [M] et [Y].
Par acte d'huissier de justice du 15 mai 2012, M. [H] [A] a fait assigner Mme [K] [S], veuve [A] et Mmes [M] et [Y] [A] afin, notamment, de voir ordonner l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la succession de son père décédé le [Date décès 5] 2011.
Par jugement rendu le 16 décembre 2014, le tribunal de grande instance de Versailles a notamment :
- Révoqué partiellement la donation faite par le de cujus le 1er septembre 1989,
Vu le testament olographe postérieur :
- Dit que Mmes [M] et [Y] [A] bénéficient de la quotité disponible, soit un quart de la succession en pleine propriété,
- Dit que Mme [K] [S] bénéficie des 3/4 en usufruit pour les 3/4 restants,
- Dit que sur ces 3/4, les trois enfants du de cujus ont chacun un tiers en nue-propriété,
- Ordonné qu'il soit procédé aux opérations de compte, liquidation et partage de la succession de feu [X] [A],
- Désigné pour y procéder, dans le cadre des dispositions des articles 1364 t suivants du code de procédure civile, M. [Z], notaire à [Localité 27],
- Dit qu'il appartiendra aussi au notaire de déterminer les sommes versées par le de cujus à titre de primes en exécution des contrats d'assurance vie par lui souscrits en sorte que les parties ou le tribunal soient en mesure d'apprécier le cas échéant, le caractère manifestement exagéré ou non des primes versées eu égard aux facultés du défunt,
- Dit que 90% de la valeur de la maison de [Localité 19] sera compris dans la succession et que Mme [S] est redevable d'une indemnité d'occupation à compter du [Date décès 5] 2012,
- Ordonné une mesure d'expertise comptable confiée à M. [C] [D] avec pour mission, les parties préalablement convoquées et entendues en leurs dires, de :
* entendre tout sachant,
* Interroger tous organismes bancaires, financiers ou d'assurance afin de reconstituer les comptes du de cujus [X] [A] du jour de son décès et en remontant sur 10 ans en arrière, les comptes de Mme [K] [S] veuve [A] et de ses deux filles [M] et [Y] sur la même période et les comptes joints ayant existé entre les parties sur la même période est aussi tous comptes de dépôt et de titres,
* identifier les auteurs des retraits opérés sur ces comptes et déterminer leur utilisation et ce afin de permettre d'établir un état de l'actif et du passif de la succession,
* donner au tribunal tout élément de nature à lui permettre de déterminer s'il y a eu recel successoral ou don manuel au bénéfice de l'un ou l'autre des héritiers,
* ordonner la production dans le délai d'un mois de la notification de la décision, entre les mains de l'expert nommé par le Ministère de l'Economie et des Finances, Direction des Services Généraux de l'informatique, Centre Régional de l'informatique, cellule FICOBA des références de tous comptes de dépôt, de titres et d'épargne dont pourraient être détenteurs Mme [K] [S] et ses filles et ce, en remontant sur une période de 10 ans à compter du décès du de cujus,
- Désigné le magistrat chargé du contrôle des expertises pour surveiller les opérations,
- Rejeté toute autre demande,
- Ordonné l'exécution provisoire,
- Condamné les parties aux dépens de l'instance qui seront employés en frais privilégiés de partage et supportés par les copartageants dans la proportion de leur part dans l'indivision.
M. [H] [A] a interjeté appel de ce jugement.
Par arrêt rendu le 23 février 2017, la cour d'appel de Versailles a notamment :
- Infirmé le jugement entrepris en ce qu'il a :
* révoqué partiellement la donation faite par [X] [A] le 1er septembre 1989,
* dit qu'[M] et [Y] [A] bénéficient de la quotité disponible soit un quart de la succession,
* dit que Mme [S] bénéficie des 3/4 en usufruit,
* dit que pour les 3/4 restants les enfants de [X] [A] ont chacun un tiers en nue-propriété,
* dit que 90 % de la valeur de la maison de [Localité 19] sera comprise dans la succession et que Mme [S] redevable d'une indemnité d'occupation à compter du [Date décès 5] 2012,
Statuant à nouveau de ses chefs et y ajoutant :
- Fixé ainsi les droits de chacun des héritiers dans la succession de [X] [A] :
* Mme [K] [S] : 1/12 en pleine propriété,
* Mme [M] [A] : 4/12 en pleine propriété (1/4 correspondant sa part réservataire + 1/12),
* Mme [Y] [A] : 4/12 en pleine propriété (1/4 correspondant sa part réservataire + 1/12),
* M. [H] [A] : 1/4 en pleine propriété,
- Dit que seule la moitié de la valeur du bien immobilier situé à [Localité 19], [Adresse 4], correspondant à la part de [X] [A], sera incluse dans la masse active de la succession,
- Dit que Mme [S] doit rapporter à la succession la somme correspondant à 40 % de la valeur actuelle du bien après son état au jour de l'acquisition,
- Dit que Mme [S] n'est pas redevable envers l'indivision successorale d'une indemnité d'occupation sur le bien immobilier situé à [Localité 19],
- Dit qu'il entrera dans la mission du notaire désigné de déterminer le montant des droits d'habitation sur le bien susvisé et d'usage sur le mobilier le garnissant de Mme [S], après prise en considération de ses propres droits de 50 % sur le dit bien immobilier en se plaçant à la date du [Date décès 5] 2012,
- Dit qu'il sera procédé conformément aux dispositions de l'article 765 du Code civil, selon que la valeur desdits droits sera inférieure ou supérieure à ses droits successoraux, étant précisé que si celle-ci est supérieure Mme [S] ne sera pas tenue de récompenser la succession à raison de l'excédent,
- Confirmé le jugement ses autres dispositions non contraires,
Y ajoutant,
- Dit que l'intégralité du solde créditeur du compte [18] [XXXXXXXXXX01] - compte-courant et compte titre (pour 2 241,73 euros et 41 048,26 euros) - au jour du décès doit figurer à l'actif de la succession,
- Débouté M. [H] [A] de sa demande tendant à la réintégration du contrat d'assurance vie [14] à la succession,
- Autorisé M. [Z], notaire désigné pour procéder aux opérations de compte liquidation et partage à débloquer au profit de M. [H] [A] la somme de 120 000 euros à valoir sur ses droits successoraux, ce dans le mois suivant la signification du présent arrêt,
- Dit n'y avoir lieu à évocation du litige sur les faits de recel notamment.
Le rapport d'expertise a été déposé le 28 octobre 2016.
Le 21 février 2019, M. [H] [A] a signifié des conclusions de réinscription de l'affaire au rôle, affaire réinscrite sous le numéro RG 19/1162.
M. [Z], notaire, a dressé un procès-verbal de difficultés le 20 juin 2019. Le dossier a été réinscrit sous le numéro RG 19/4319.
Par ordonnance du 9 septembre 2019, les deux affaires ont été jointes sous le seul numéro RG 19/1162.
Par jugement contradictoire rendu le 1er juillet 2021, rectifié par jugement rectificatif du 16 septembre 2021, le tribunal judiciaire de Versailles a :
- Homologué les points d'accord des parties sur les valeurs de la masse active de la succession arrêtés par l'expert, M. [D] et le notaire liquidateur sauf à parfaire au jour le plus proche du partage, à savoir :
* La valorisation de l'immeuble de [Localité 19] à 590 000 euros, dont la moitié dépendant de la succession pour : 295 000,00 euros
* Le rapport à la succession à hauteur de 40% par Mme [K] [S] veuve [A] pour la valeur actuelle du bien soit : 236 000,00 euros,
- Homologué le projet d'état liquidatif concernant le rapport à l'actif de la succession de la totalité des titres [15],
- Dit que la demande de rapport à la succession de M. [H] [A] concernant ces titres [15] est sans objet,
- Dit que les soldes des comptes courants, placements et comptes financiers et titres joints au nom de M. et/ou Mme [A] au jour du décès tels qu'énumérés au PV de difficultés de Me [Z] du 20 juin 2019, à savoir :
* le compte [17] n°[XXXXXXXXXX011]
* le compte titres [17] n°[XXXXXXXXXX012]
* le compte [16] d'instruments financiers n°[XXXXXXXXXX010] doivent être rapportés par Mme [K] [S] veuve [A] en leur entier à l'actif de succession, sauf à parfaire au jour le plus proche du partage,
- Débouté M. [H] [A] de sa demande tendant à voir rapporter à l'actif de la succession par Mme [K] [S] veuve [A] la totalité des titres [22] et la totalité des titres [21],
- Dit que Mme [K] [S] veuve [A] a bénéficié d'un don manuel de la part de [X] [A] à hauteur de 15 244,90 euros,
- Dit qu'en conséquence Mme [K] [S] veuve [A] doit rapporter à la succession la somme de 15 244, 90 euros,
- Dit que la somme de 8 808,00 euros versée par [X] [A] à Mme [M] [A] constitue un présent d'usage et ne doit pas être rapportée à la succession,
- Dit que la somme de 4 899,00 euros versée par [X] [A] à Mme [Y] [A] constitue un présent d'usage et ne doit pas être rapportée à la succession,
- Débouté en conséquence M. [H] [A] de ses demandes tendant aux rapports à la succession des sommes de 8 808,00 euros versée par [X] [A] à Mme [M] [A] et de 4 899,00 euros versée par [X] [A] à Mme [Y] [A],
- Dit que les deux parts sociales de la SCI [20] détenues par Mme [K] [S] veuve [A] ne sont pas rapportables à la succession,
- Débouté M. [H] [A] de sa demande tendant à voir juger que les fruits et revenus échus et à venir perçus par la SCI à hauteur de 2% seront rapportés par Mme [S] à la succession depuis le jour du décès jusqu'à la date la plus proche du partage, et qu'ils produiront intérêt à compter de la décision à intervenir jusqu'à parfait règlement,
- Dit en conséquence que les fruits et revenus échus et à venir perçus par la SCI à hauteur de 2% ne seront pas rapportés par Mme [S] à la succession depuis le jour du décès jusqu'à la date la plus proche du partage, et qu'ils produiront intérêt à compter de la décision à intervenir jusqu'à parfait règlement,
- Dit que Mme [M] [A] et Mme [Y] [A] ont commis un recel successoral concernant l'acte de cession de 96% des parts sociales de la SCI [20] en date du 22 décembre 2010,
- Dit que Mme [K] [S] veuve [A] est complice du recel successoral concernant l'acte de cession de 96% des parts sociales de la SCI [20] en date du 22 décembre 2010,
- Dit que Mmes [M] et [Y] [A] devront rapporter à la succession de [X] [A] la valeur des 96 % des parts sociales, les fruits et revenus rapportés échus et à venir perçus par la SCI [20] à hauteur de 96% depuis le jour du décès jusqu'à la date la plus porche du partage outre les intérêts à compter du présent jugement,
- Dit que Mmes [M] [Y] [A] ne pourront prétendre à aucun droit sur cet actif rapporté,
- Débouté M. [H] [A] de sa demande tendant à voir juger que Mme [K] [S] veuve [A] et Mmes [M] et [Y] [A] ont commis un recel concernant le compte courant d'associés de la SCI [20],
- Rappelé que la somme de 120 000 euros accordée à M. [H] [A] à titre de provision devra être déduite de ses droits,
- Renvoyé les parties devant M. [Z], notaire, aux fins d'établir un nouvel acte de partage pour tenir compte des modifications apportées par le présent jugement,
- Condamné in solidum Mme [K] [S] veuve [A] et Mmes [M] et [Y] [A] à payer à M. [H] [A] la somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts,
- Condamné Mme [K] [S] veuve [A] et Mmes [M] et [Y] [A] à payer à M. [H] [A] la somme de 4 000 euros (objet du jugement rectificatif) sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- Condamné les parties aux dépens à proportion de leurs droits dans l'indivision successorale, comprenant les frais d'expertise, dépens qui seront employés en frais privilégiés de partage et pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile. Les dépens comprenant les frais d'expertise dont distraction au profit de (sic) avec application de l'article 699 du code de procédure civile,
- Ordonné l'exécution provisoire de la présente décision.
M. [H] [A] a interjeté appel de cette décision le 21 octobre 2021 à l'encontre de Mme [K] [S] veuve [A] et de Mmes [M] et [Y] [A].
Par ordonnance d'incident du 7 mars 2024, le conseiller de la mise en état a rejeté les demandes d'avance en capital formées par Mmes [M] et [Y] [A],
Par dernières conclusions notifiées au greffe le 26 janvier 2024, M. [H] [A] demande à la cour de :
- Le Déclarer recevable et bien fondé en son appel,
- Infirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Versailles le 1er juillet 2021 et le jugement rectificatif du 16 septembre 2021 en ce qu'ils ont :
* Débouté M. [H] [A] de sa demande de rapport à l'actif de la succession par Mme [S] de la totalité des titres [22] et [21],
* Débouté M. [H] [A] de voir juger que Mmes [S] et [A] ont commis un recel sur le compte courant d'associé de la SCI [28],
* S'est abstenu en son dispositif de tirer conséquences de la complicité de recel successoral de Mme [S] concernant l'acte de cession de 96% des parts de la SCI [28] en date du 22 décembre 2010,
* Condamné Mme [S] et Mmes [A] à régler à M. [H] [A] une somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
* Condamné les parties aux dépens en proportion de leurs droits dans l'indivision successorale comprenant les frais d'expertise et dépens,
Et statuant à nouveau :
- Juger recevable et bien fondée sa demande de rapport par Mme [S] de la totalité des titres [22] et [21] ;
- Juger que Mme [S] doit rapporter 164 actions [22] et 70 actions [21] à l'actif de la succession en leur intégralité à leur valeur au jour le plus proche du partage ;
- Juger recevable et bien fondée sa demande de voir juger que Mmes [S] et [A] ont commis un recel sur le compte courant d'associé de la SCI [20] ;
- Juger Mmes [S] et [A] coupable indivisiblement de recel du compte courant du de cujus dans la SCI [20] évalué à 307 478,96 euros sauf mémoire à la valeur au jour le plus proche du partage ;
- Juger que preuve est rapportée de la connaissance qu'avait chacune d'elles du recel commis par l'autre compte tenu de leur participation croisée à l'acte du 22 décembre 2010 ;
- Juger que le financement de l'immeuble par les seuls fonds propres de [X] [A] et porté en compte courant associé constitue bien une donation rapportable et réductible au profit de ses filles et son épouse associée et que la sanction prévue à l'article 778, alinéa 2, du code civil est applicable ;
- Juger qu'elles devront rapport indivisiblement du compte courant dans la SCI [20] et seront dépourvues de tous droits successoraux sur ce compte courant évalué au jour le plus proche du partage ;
- Juger que c'est à tort que le tribunal n'a pas tiré toutes conséquences du recel de Mme [S] alors qu'il a condamné au titre du recel [Y] et [M] [A] à rapporter à la succession la valeur des 96%des parts sociales SCI [20] et des fruits et revenus échus et à venir depuis le jour du décès perçus par la SCI [20] jusqu'à la date la plus proche du partage, outre les intérêts à compter du 1er juillet 2021et les a privées de toute part sur lesdits biens rapportés ;
- Juger que Mme [S] avait parfaitement connaissance du recel successoral commis par ses filles et qu'en conséquence elle ne peut prétendre à aucune part sur les valeurs recelées ;
En conséquence :
- Juger qu'elle sera condamnée indivisiblement pour recel de la cession des 96% de parts de la SCI [20] et privée de sa part dans le partage à intervenir sur les biens recelés ;
- Juger qu'il est équitable de condamner solidairement Mmes [S] et [A] à régler à M. [H] [A] une indemnité de 15 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Juger au visa de l'art 695 du code de procédure civile que Mmes [S] et [A] seront condamnées solidairement aux entiers dépens de la procédure en 1ère instance et appel, en ce compris les frais d'expertise [D] en leur entier, cette mesure d'instruction ayant été rendue nécessaire au vu du manque de transparence de Mmes [S] et [A] et de leurs manoeuvres frauduleuses en vue de fausser le partage,
Rajoutant,
- Juger que Mmes [S] et [A], auteurs du recel, seront tenues de payer le passif de la succession dans la proportion de leurs droits dans cette succession avant la réduction résultant du recel, en ce compris les droits et émoluments de succession ;
- Juger que le notaire liquidateur devra fixer la date de la jouissance divise au jour le plus proche du partage ;
- Juger qu'en cas de confirmation du recel successoral concernant l'acte de cession de 96% des parts sociales de la SCI [20] en date du 22 décembre 2010 par la Cour, Mmes [M] et [Y] [A] et Mme [S] devront régler à titre de dommages intérêts pour le manque à gagner subi par M. [A] par l'absence de location une somme de 9 600 euros par an à compter du 1er août 2020 jusqu'à parfait règlement avec intérêts de droit à compter de l'arrêt à intervenir ;
- Confirmer le jugement en ses autres dispositions non contraires ;
- Débouter les intimées de leur appel incident et de leurs demandes d'infirmation.
Par dernières conclusions notifiées au greffe le 25 juin 2024, Mme [S] et Mmes [M] et [Y] [A], intimées, demandent à la cour de :
Vu les articles 816 et suivants du code civil,
Vu l'article 778 du code civil,
Vu l'article 922 du code civil,
Vu l'article 1353 nouveau du code civil,
Vu la jurisprudence,
Vu le Jugement en date du 16 décembre 2014 du tribunal de grande instance de Versailles,
Vu l'Arrêt en date du 23 février 2017 de la cour d'appel de Versailles,
Vu le Rapport de M. L'expert [D],
Vu le Procès-Verbal de contestation de Me [Z] du 20 juin 2019,
- les recevoir en leurs écritures et les déclarer bien fondées,
- Infirmer jugement du tribunal judiciaire de Versailles du 1er juillet 2021, rectifié le 16 septembre 2021, en ce qu'il a :
* Dit que les soldes des comptes courants, placements et comptes financiers et titres joints au nom de M. et/ou Mme [A] au jour du décès tels qu'énumérés au PV de difficultés de M. [Z] du 20 juin 2019, à savoir :
- le compte [17] n°[XXXXXXXXXX011]
- le compte titres [17] n°[XXXXXXXXXX012]
- le compte [16] d'instruments financiers n°[XXXXXXXXXX010] doivent être rapportés par Mme [K] [S] veuve [A] en leur entier à l'actif de succession, sauf à parfaire au jour le plus proche du partage,
* Dit que Mme [K] [S] veuve [A] a bénéficié d'un don manuel de la part de [X] [A] à hauteur de 15 244,90 euros,
* Dit qu'en conséquence Mme [K] [S] veuve [A] doit rapporter à la succession la somme de 15 244, 90 euros,
* Dit que Mme [M] [A] et Mme [Y] [A] ont commis un recel successoral concernant l'acte de cession de 96% des parts sociales de la SCI [20] en date du 22 décembre 2010,
* Dit que Mme [K] [S] veuve [A] est complice du recel successoral concernant l'acte de cession de 96% des parts sociales de la SCI [20] en date du 22 décembre 2010,
* Dit que Mmes [M] et [Y] [A] devront rapporter à la succession de [X] [A] la valeur des 96 % des parts sociales, les fruits et revenus rapportés échus et à venir perçus par la SCI [20] à hauteur de 96% depuis le jour du décès jusqu'à la date la plus porche du partage outre les intérêts à compter du présent jugement,
* Dit que Mmes [M] [Y] [A] ne pourront prétendre à aucun droit sur cet actif rapporté,
* Condamné in solidum Mme [K] [S] veuve [A] et Mmes [M] et [Y] [A] à payer à M. [H] [A] la somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts,
* Condamné Mme [K] [S] veuve [A] et Mmes [M] et [Y] [A] à payer à M. [H] [A] la somme de 4 000 euros (objet du jugement rectificatif) sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Et statuant à nouveau :
- Dire que les soldes des comptes courants, placements et comptes financiers et titres joints au nom de M. et/ou Mme [A] au jour du décès tels qu'énumérés au PV de difficultés de M. [Z] du 20 juin 2019, à savoir :
- le compte [17] n°[XXXXXXXXXX011]
- le compte titres [17] n°[XXXXXXXXXX012]
- le compte [16] d'instruments financiers n°[XXXXXXXXXX010]
doivent être pris en compte pour moitié dans l'actif de succession,
- Dire que la somme de 15.224,90 euros reçue par Mme [K] [S] veuve [A] n'est pas un don manuel et ne doit pas ainsi être réunie à la masse successorale ;
- Dire qu'elles ne sont pas coupables de recel successoral et rejeter l'ensemble des prétentions et demandes de M. [H] [A] y afférent ;
- Rejeter la demande de dommages et intérêts, infondée et injustifiée, présentée par M. [H] [A] à hauteur de 5.000 euros ;
- Rejeter la demande d'article 700 présentée par M. [H] [A] et le condamner à leur régler la somme de 15 000 euros au titre des frais de première instance ;
Ajoutant :
- Déclarer irrecevable la demande nouvelle formulée par M. [H] [A] de dommages et intérêts « pour le manque à gagner subi par M. [A] par l'absence de location une somme de 9600 euros par an à compter du 1er août 2020 jusqu'à parfait règlement avec intérêts de droit à compter de l'arrêt à intervenir ».
A titre uniquement subsidiaire,
- Rejeter la demande formulée par M. [H] [A] de dommages et intérêts « pour le manque à gagner subi par M. [A] par l'absence de location une somme de 9600.00€ par an à compter du 1er août 2020 jusqu'à parfait règlement avec intérêts de droit à compter de l'arrêt à intervenir » ;
ET,
- Confirmer le jugement du tribunal judiciaire de Versailles en date du 1er juillet 2021, rectifié le 16 septembre 2021, en ce qu'il a :
* Homologué les points d'accord des parties sur les valeurs de la masse active de la succession arrêtés par l'expert, M. [D] et le notaire liquidateur sauf à parfaire au jour le plus proche du partage, à savoir :
- La valorisation de l'immeuble de [Localité 19] à 590 000 euros, dont la moitié dépendant de la succession pour : 295 000,00 euros
- Le rapport à la succession à hauteur de 40% par Mme [K] [S] veuve [A] pour la valeur actuelle du bien soit : 236 000,00 euros,
* Homologué le projet d'état liquidatif concernant le rapport à l'actif de la succession de la totalité des titres [15],
* Dit que la demande de rapport à la succession de M. [H] [A] concernant ces titres [15] est sans objet,
* Débouté M. [H] [A] de sa demande tendant à voir rapporter à l'actif de la succession par Mme [K] [S] veuve [A] la totalité des titres [22] et la totalité des titres [21],
* Dit que la somme de 8 808,00 euros versée par [X] [A] à Mme [M] [A] constitue un présent d'usage et ne doit pas être rapportée à la succession,
* Dit que la somme de 4 899,00 euros versée par [X] [A] à Mme [Y] [A] constitue un présent d'usage et ne doit pas être rapportée à la succession,
* Débouté en conséquence M. [H] [A] de ses demandes tendant aux rapports à la succession des sommes de 8 808,00 euros versée par [X] [A] à Mme [M] [A] et de 4 899,00 euros versée par [X] [A] à Mme [Y] [A],
* Dit que les deux parts sociales de la SCI [20] détenues par Mme [K] [S] veuve [A] ne sont pas rapportables à la succession,
* Débouté M. [H] [A] de sa demande tendant à voir juger que les fruits et revenus échus et à venir perçus par la SCI à hauteur de 2% seront rapportés par Mme [S] à la succession depuis le jour du décès jusqu'à la date la plus proche du partage, et qu'ils produiront intérêt à compter de la décision à intervenir jusqu'à parfait règlement,
* Dit en conséquence que les fruits et revenus échus et à venir perçus par la SCI à hauteur de 2% ne seront pas rapportés par Mme [S] à la succession depuis le jour du décès jusqu'à la date la plus proche du partage, et qu'ils produiront intérêt à compter de la décision à intervenir jusqu'à parfait règlement,
* Débouté M. [H] [A] de sa demande tendant à voir juger que Mme [K] [S] veuve [A] et Mmes [M] et [Y] [A] ont commis un recel concernant le compte courant d'associés de la SCI [20],
* Rappelé que la somme de 120 000 euros accordée à M. [H] [A] à titre de provision devra être déduite de ses droits,
* Renvoyé les parties devant Me [Z], notaire, aux fins d'établir un nouvel acte de partage pour tenir compte des modifications apportées par le présent jugement,
* Condamné les parties aux dépens à proportion de leurs droits dans l'indivision successorale aux frais d'expertise.
En tout état de cause :
- Rejeter l'ensemble des demandes, fins et prétentions formulées par M. [H] [A] ;
- Condamner M. [H] [A] à leur verser la somme de 15 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamner M. [H] [A] aux dépens, de première instance et d'appel, autres que les frais d'expertise, dont distraction au profit de Mme Segonne-Morand, avocat.
La clôture de l'instruction a été ordonnée le 10 avril 2025.
SUR CE, LA COUR,
Sur les limites de l'appel
Le jugement est contesté en ce qu'il a :
- Dit que les soldes des comptes courants, placements et comptes financiers et titres joints au nom de M. et/ou Mme [A] au jour du décès tels qu'énumérés au PV de difficultés de Me [Z] du 20 juin 2019, à savoir :
* le compte [17] n°[XXXXXXXXXX011]
* le compte titres [17] n°[XXXXXXXXXX012]
* le compte [16] d'instruments financiers n°[XXXXXXXXXX010] doivent être rapportés par Mme [K] [S] veuve [A] en leur entier à l'actif de succession, sauf à parfaire au jour le plus proche du partage,
- Débouté M. [H] [A] de sa demande tendant à voir rapporter à l'actif de la succession par Mme [K] [S] veuve [A] la totalité des titres [22] et la totalité des titres [21],
- Dit que Mme [K] [S] veuve [A] a bénéficié d'un don manuel de la part de [X] [A] à hauteur de 15 244,90 euros,
- Dit qu'en conséquence Mme [K] [S] veuve [A] doit rapporter à la succession la somme de 15 244, 90 euros,
- Dit que Mme [M] [A] et Mme [Y] [A] ont commis un recel successoral concernant l'acte de cession de 96% des parts sociales de la SCI [20] en date du 22 décembre 2010,
- Dit que Mme [K] [S] veuve [A] est complice du recel successoral concernant l'acte de cession de 96% des parts sociales de la SCI [20] en date du 22 décembre 2010,
- Dit que Mmes [M] et [Y] [A] devront rapporter à la succession de [X] [A] la valeur des 96 parts sociales, les fruits et revenus rapportés échus et à venir perçus par la SCI [20] à hauteur de 96% depuis le jour du décès jusqu'à la date la plus porche du partage outre les intérêts à compter du présent jugement,
- Dit que Mmes [M] [Y] [A] ne pourront prétendre à aucun droit sur cet actif rapporté,
- Débouté M. [H] [A] de sa demande tendant à voir juger que Mme [K] [S] veuve [A] et Mmes [M] et [Y] [A] ont commis un recel concernant le compte courant d'associés de la SCI [20],
- Condamné in solidum Mme [K] [S] veuve [A] et Mmes [M] et [Y] [A] à payer à M. [H] [A] la somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts,
- Condamné Mme [K] [S] veuve [A] et Mmes [M] et [Y] [A] à payer à M. [H] [A] la somme de 4 000 euros (objet du jugement rectificatif) sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Les autres dispositions du jugement, non querellées, sont dès lors irrévocables.
Sur le rapport à la succession des soldes des comptes joints
Pour dire que les soldes des comptes courants, placements et comptes financiers et titres joints au nom de M. et/ou Mme [A] au jour du décès , à savoir :
* le compte [17] n°[XXXXXXXXXX011]
* le compte titres [17] n°[XXXXXXXXXX012]
* le compte [16] d'instruments financiers n°[XXXXXXXXXX010]
devaient être rapportés par Mme [K] [S] veuve [A] en leur entier à l'actif de succession, le tribunal a retenu que cette dernière ne démontrait pas avoir alimenté ces comptes, initialement ouverts au seul nom de [X] [A], crédités de sommes issues d'opérations portant sur des biens propres du défunt puis transformés en compte joint. Le tribunal a donc considéré qu'il s'agissait de donations indirectes.
Moyens des parties
Mme [S] poursuit l'infirmation du jugement en soutenant que :
- le tribunal a inversé la charge de la preuve en indiquant qu'elle ne démontrait pas avoir alimenté les comptes joints ;
- elle a en réalité alimenté ces comptes indirectement en assumant seule la quasi totalité des dépenses du ménage sur ses propres deniers ;
- l'intention libérale de [X] [A] n'est pas démontrée, pas plus que son appauvrissement ;
- en tout état de cause, la moitié des soldes de ces comptes figure déjà à l'actif de la succession, et que si la donation indirecte était retenue, elle s'imputerait sur ses droits seulement à la hauteur de la moitié des sommes mais ne devraient en aucun cas être rapportées à la succession.
M. [H] [A] poursuit la confirmation du jugement en rappelant que des fonds provenant de la vente de biens propres de son père ont été déposés sur un compte individuel ouvert au seul nom de ce dernier avant d'être transformé en compte joint, que ces fonds ont été utilisés immédiatement pour l'acquisition d'un bien immobilier entre les deux époux pour moitié chacun, caractérisait l'intention libérale.
Appréciation de la cour
En application de l'article 843 du code civil, 'Tout héritier, même ayant accepté à concurrence de l'actif, venant à une succession, doit rapporter à ses cohéritiers tout ce qu'il a reçu du défunt, par donations entre vifs, directement ou indirectement ; il ne peut retenir les dons à lui faits par le défunt, à moins qu'ils ne lui aient été faits expressément hors part successorale'.
Par ailleurs, en application de l'article 758-6 du même code, 'Les libéralités reçues du défunt par le conjoint survivant s'imputent sur les droits de celui-ci dans la succession. Lorsque les libéralités ainsi reçues sont inférieures aux droits définis aux articles 757 et 757-1, le conjoint survivant peut en réclamer le complément, sans jamais recevoir une portion des biens supérieure à la quotité définie à l'article 1094-1".
Il n'y a de donation déguisée que si les trois éléments suivants sont réunis :
- l'intention libérale du donateur ;
- son dessaisissement et appauvrissement irrévocable ;
- l'enrichissement corrélatif du bénéficiaire de la donation.
L'intention libérale ne se présume pas, elle doit être prouvée. A cet égard, le tribunal retient que l'intention libérale, qui résulte de la transformation de comptes individuels en comptes joint, est corroborée par l'acquisition de l'immeuble de Fouqueux par les époux par moitié, au moyen des fonds déposés sur un compte joint provenant de la vente de biens propres du de cujus.
Cependant, concernant le cas particulier du financement de l'immeuble de [Localité 19] a été définitivement tranché par l'arrêt rendu par cette cour le 23 février 2017, lequel a effectivement retenu l'existence d'une donation déguisée compte tenu des circonstances particulières dans lesquelles est intervenue la transaction. Il est ainsi acquis que Mme [S] doit rapporter à la succession la somme correspondant à 40 % de la valeur actuelle du bien après son état au jour de l'acquisition,
C'est donc en vain que M. [H] [A] revient longuement sur ce point, les autres comptes joints n'ayant pas été alimentés par le produit de la vente de biens propres à [X] [A].
Au soutien de ses demandes, l'appelant fait par ailleurs référence à un arrêt de la Cour de cassation rendu le 19 janvier 2010 (Cass.comm., 19 janvier 2010, n°09-12-140).
Dans cette espèce, les héritiers contestaient la réintégration, à l'actif de la succession, de la totalité du solde des comptes joints telle que demandée par l'administration fiscale.
La Cour de cassation a censuré la cour d'appel qui avait fait droit à la réclamation des héritiers en retenant que (souligné par la cour) ' (...) Le défunt exerçait seul un activité rémunérée au sein du foyer, disposait d'un patrimoine propre et alimentait seul les comptes bancaires litigieux , la cour d'appel a privé sa décision de base légale'.
Cette solution ne peut pas être transposée à l'espèce dès lors que Mme [S] exerçait une activité professionnelle et assumait, au moyen de ses comptes personnels, la plus grande partie des dépenses de la famille.
Il peut être retenu que le couple avait adopté un mode de fonctionnement parfaitement légal selon lequel Mme [S] assumait les dépenses courantes et [X] [A] l'alimentation des comptes joints au titre de la contribution aux charges du mariage.
Par ailleurs, il sera rappelé que chaque co-titulaire d'un compte joint peut à tout moment en virer le solde sur un compte qui lui est propre. Dans ces conditions, à supposer que la transformation d'un compte individuel en compte joint puisse être considérée comme une libéralité, l'appauvrissement n'est pas irrévocable et ne répond donc pas aux critères de la donation déguisée.
Dès lors, le jugement sera infirmé en ce qu'il a dit que les soldes des comptes courants, placements et comptes financiers et titres joints au nom de M. et/ou Mme [A] au jour du décès (comptes [17] et compte [16]') devaient être rapportés par Mme [K] [S] veuve [A] en leur entier à l'actif de succession.
Il sera dit que seule la moitié du solde de ces comptes au jour du décès devront être intégrés à l'actif de la succession.
Sur le rapport à la succession des titres [22] et [21] par Mme [K] [S]
Pour débouter M. [H] [A] de sa demande tendant à voir rapporter à l'actif de la succession par Mme [K] [S] veuve [A] la totalité des titres [22] et [21], le tribunal a estimé que le requérant ne démontrait pas que ces titres, inscrits en compte au nom des deux époux, appartenaient au préalable à [X] [A] en son nom personnel.
Moyens des parties
M. [H] [A] poursuit l'infirmation du jugement en faisant valoir qu'à l'origine, ces titres 'au porteur' appartenaient à [X] [A] seul qui, ensuite, a demandé leur transformation en titres 'nominatif pur' au nom des deux époux le 31 août 2007.
Mme [K] [S] sollicite la confirmation du jugement en faisant valoir que M. [H] [A] ne démontre pas que les titres dont il demande le rapport à la succession étaient la propriété auparavant du de cujus.
Appréciation de la cour
Les éléments versés aux débats ne permettent pas d'établir que les titres litigieux, inscrits au nom des deux époux au jour du décès, aient été auparavant la propriété du seul de cujus.
En effet, M. [H] [A] entend démontrer que son père détenait seul, en son nom propre, des actions [22], en versant un extrait de compte sur lequel apparaissent d'abord des paiements de 'coupons' [22] et [21], puis le paiement de 'dividendes' [22] et [21].
Il explique ce changement de libellé (coupons puis dividendes) par la transformation des actions au porteur ( qui auraient donc donné lieu au paiement de coupons), détenues par le seul de cujus, en actions 'nominatif pur' détenues cette fois par les deux époux, donnant lieu au paiement de dividendes.
Il indique ainsi 'La mention coupon correspond à des titres au porteur et la mention dividendes correspond à de titres nominatifs dans les libellés de la banque'.
Ce raisonnement est erroné car le versement de 'coupons' correspond au paiement des intérêts des obligations souscrites et non au paiement des dividendes attachés à des actions, fussent-elles au porteur.
L'avis d'entrée d'actions [22] 'au nominatif pur', au 31 août 2007, au nom des deux époux ne démontre pas davantage que ces actions aient été auparavant détenues par [X] [A] seul.
Cet avis d'opéré indique seulement le passage de titres de 'nominatif administré' à 'nominatif pur' et pas un changement de nom du ou des détenteurs.
Dans ces conditions, le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté M. [H] [A] de sa demande tendant à voir rapporter à l'actif de la succession par Mme [K] [S] veuve [A] la totalité des titres [22] et la totalité des titres [21],
Sur le recel successoral portant sur la cession de 96 parts sociales de la SCI [20]
Pour dire que Mmes [M] et [Y] [A] avaient commis un recel successoral portant sur la cession des parts sociales de la SCI [20] et dire que Mme [S] était complice de ce recel, le tribunal a retenu qu'elles avaient voulu s'assurer un avantage à l'encontre d'un co-héritier en gardant sous silence l'existence d'une donation déguisée, en l'espèce la cession de 96 des 100 titres de la SCI.
Moyens des parties
Mmes [K], [M] et [Y] [A] poursuivent l'infirmation du jugement en faisant valoir pour l'essentiel que, profanes en la matière, elles ignoraient que la cession litigieuse pouvait être requalifiée en donation déguisée d'autant plus que M. [T], notaire ayant enregistré la cession des parts puis débuté les opérations de compte et liquidation de la succession, ne les avait pas alertées sur ce point. Elles ajoutent que cette cession était connue de M. [H] [A] dès l'ouverture de la succession, ce qui exclut toute tentative de dissimulation.
M. [H] [A] conclut à la confirmation du jugement en soulignant en substance que la déclaration de succession initiale de 2012 ne comportait pas la mention de la cession litigieuse et que ce n'est qu'après la délivrance de l'assignation que Mme [M] et [Y] [A] ont reconnu avoir été avantagées par la cession.
Appréciation de la cour
En application de l'article 778 du code civil, 'Sans préjudice de dommages et intérêts, l'héritier qui a recelé des biens ou des droits d'une succession ou dissimulé l'existence d'un cohéritier est réputé accepter purement et simplement la succession, nonobstant toute renonciation ou acceptation à concurrence de l'actif net, sans pouvoir prétendre à aucune part dans les biens ou les droits détournés ou recelés. Les droits revenant à l'héritier dissimulé et qui ont ou auraient pu augmenter ceux de l'auteur de la dissimulation sont réputés avoir été recelés par ce dernier.
Lorsque le recel a porté sur une donation rapportable ou réductible, l'héritier doit le rapport ou la réduction de cette donation sans pouvoir y prétendre à aucune part.
L'héritier receleur est tenu de rendre tous les fruits et revenus produits par les biens recelés dont il a eu la jouissance depuis l'ouverture de la succession'.
Pour retenir l'existence d'un recel il est nécessaire de démontrer non seulement que la cession des parts litigieuse est une donation déguisée, mais également qu'au moment des opérations de liquidation de la succession, et en tout cas avant l'assignation qui leur a été délivrée, Mmes [M] et [Y] [A] ont entendu la dissimuler.
En effet, une chose est de requalifier la cession onéreuse en donation rapportable à la succession, ce que les intimées ne contestent pas, une autre est de retenir le recel successoral qui suppose la volonté de son auteur de profiter d'un avantage au détriment d'un autre héritier.
Sauf à savoir que la cession était critiquable et pouvait être requalifiée en donation déguisée, ce qui n'est pas démontré, les cessionnaires n'avaient pas à porter à l'actif de la succession les parts ainsi acquises.
Si Mmes [M] et [Y] [A] ont reconnu devant les premiers juges que la cession litigieuse leur conférait un avantage sur leur demi-frère, et donc accepté le rapport à la succession de ces titres, cela ne démontre pas pour autant qu'au moment des opérations de liquidation engagées devant le notaire, elles aient eu la volonté de dissimuler cette cession en sachant qu'elle pouvait être requalifiée de donation déguisée.
C'est très pertinemment que les intimées font valoir que c'est le même notaire qui a reçu l'acte de création de la SCI, la cession des parts et ouvert les opérations de compte et liquidation de la succession. Elles affirment que le notaire ne les pas alertées sur les risques de requalification de la cession des titres en donation déguisée et la preuve contraire n'est pas rapportée.
Mme [M] et [Y] sont des profanes en la matière et leur mauvaise foi ne peut être supposée. Au contraire, leur bonne foi se présume et faute pour M. [H] [A] d'apporter la preuve que le notaire les aurait informées de la nécessité de rapporter les titres cédés à la succession, le recel ne saurait être retenu.
De plus, l'acte litigieux n'est nullement dissimulé puisque avant même la délivrance de l'assignation, il y a eu des échanges de courriels entre le conseil de M. [H] [A] et le notaire M. [T]. Le requérant en avait donc parfaitement connaissance.
Ainsi, au moment de la déclaration de succession se posait effectivement la question de savoir si oui ou non les parts de la SCI devaient être rapportés à la succession, mais le fait de répondre positivement à cette question, alors que ces titres ne figuraient pas dans la déclaration de succession préparée par le notaire en mai 2012, au demeurant non signée par les intimées, n'implique pas l'existence d'un recel successoral faute de rapporter la preuve de l'élément intentionnel et même de la dissimulation, cette cession étant connue de M. [H] [A] dès l'ouverture de la succession.
Il n'y a donc pas lieu de retenir l'existence d'un recel successoral et il convient d'infirmer le jugement sur ce point.
En revanche, le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné Mme [M] et [Y] [A] à rapporter les 96 parts de la SCI, ainsi que 96% des fruits perçus depuis l'ouverture de la succession (article 856 du code civil).
Sur le recel successoral du compte courant d'associé de la SCI [20]
Pour débouter M. [H] [A] de sa demande tendant à voir juger que Mme [K] [S] et ses deux filles ont commis un recel concernant le compte courant d'associés de la SCI [20], le tribunal a retenu que l'existence de ce compte courant d'associé a été mentionné dans la déclaration de succession établie le 12 avril 2013 par M. [T], notaire, avec la mention 'pour mémoire'.
Moyens des parties
M. [H] [A] poursuit l'infirmation du jugement en faisant valoir que la déclaration de succession qui fait mention du compte courant avec la mention 'pour mémoire' a été établie le 12 avril 2013, bien après la délivrance de l'assignation, à une date où le repentir n'était plus efficace. Il estime que c'est le projet de déclaration du 15 mai 2012 qui doit être pris en compte pour rechercher l'éventuel recel et que précisément, ce projet ne fait pas état du compte courant.
Mme [M], [Y] et [K] [A] poursuivent la confirmation du jugement en soulignant que lors de l'établissement de la déclaration de succession en avril 2013, le montant du compte courant n'était pas connu avec précision et que la mention 'pour mémoire' avait précisément pour but de contourner la difficulté et non de dissimuler l'existence de ce compte.
Appréciation de la cour
S'il est exact que le compte courant de la SCI [20] n'est pas mentionné dans la déclaration de succession préparée par le notaire en mai 2012, restée à l'état de projet, il n'est pas démontré que Mmes [M], [Y] et [K] [A] avaient connaissance de l'existence de ce compte.
Les intimées affirment que [X] [A] gérait seul la SCI et qu'elles ignoraient tout de la comptabilité de celle-ci.
C'est sans preuve que M. [H] [A] soutient qu'au contraire elles ont volontairement dissimulé l'existence de compte courant d'associé. C'est également en vain qu'il fait valoir que les intéressées ne démontrent pas que le notaire ne les aurait pas informées sur ce point.
La preuve d'un fait négatif étant impossible, ce moyen n'est pas opérant.
La déclaration définitive, celle qui a été adressée à l'administration fiscale en avril 2013, porte la mention d'un compte courant avec la mention 'pour mémoire'. Ceci signifie que le montant de ce compte n'était pas connu au moment où la déclaration a été souscrite, mais exclut nécessairement tout recel, l'élément matériel, si ce n'est n'est l'élément intentionnel, n'étant par définition pas rempli.
Les héritiers, par cette mention, déclarent qu'il existe un compte courant ayant vocation à être inscrit à l'actif de la succession mais dont le montant reste à déterminer, étant rappelé que la succession était suffisamment complexe pour nécessiter la désignation d'un expert judiciaire.
La preuve tant de la dissimulation que de l'élément intentionnel n'est donc pas rapportée.
Le jugement sera dès lors confirmé en ce qu'il a débouté M. [H] [A] de sa demande tendant à voir juger que Mme [K] [S] veuve [A] et Mmes [M] et [Y] [A] ont commis un recel concernant le compte courant d'associés de la SCI [20].
Sur le rapport à la succession par Mme [K] [S] veuve [A] d'un don manuel de 15 244,90 euros
Le tribunal a retenu que le rapport de M. [D] établissait que [X] [A] avait versé à Mme [K] [S] le 17 janvier 2001 la somme de 100 000 francs ( 15 244,90 euros), ce versement devant être qualifié de don manuel.
Moyens des parties
Mme [K] [A] poursuit l'infirmation du jugement en faisant valoir, comme en première instance, que ce versement correspond au remboursement des versements qu'elle a effectués sur le livret A de son mari entre 1987 et 1989. Elle ajoute qu'en tout état de cause, les donations reçues du défunt par le conjoint ne sont pas rapportables mais prises en compte dans le règlement de la succession, donc déduites de la part lui revenant.
M. [H] [A] sollicite la confirmation du jugement en s'appuyant sur les motifs du jugement. Il soutient que le rapport d'une libéralité reçue par le conjoint est rapportable par application combinée des articles 758-5 et 758-6 du code civil.
Appréciation de la cour
C'est par des motifs exacts, adoptés par la cour, tenant à l'absence de preuve que le versement litigieux correspondrait au remboursement d'une dette du défunt à son épouse, que le tribunal a estimé qu'il s'agissait d'un don manuel.
S'agissant du rapport de cette donation, il convient de rappeler qu'en application de l'article 758-6 du code civil, 'Les libéralités reçues du défunt par le conjoint survivant s'imputent sur les droits de celui-ci dans la succession. Lorsque les libéralités ainsi reçues sont inférieures aux droits définis aux articles 757 et 757-1, le conjoint survivant peut en réclamer le complément, sans jamais recevoir une portion des biens supérieure à la quotité définie à l'article 1094-1".
Les donations conjugales ne sont donc pas rapportables, mais le conjoint survivant voit sa part amputée des libéralités qu'il a reçues (rapport en moins prenant).
C'est donc à tort que le tribunal a ordonné le rapport à la succession de la somme de 15 244,90 euros.
Le jugement sera infirmé sur ce point mais il sera dit en revanche que cette somme s'imputera sur les droits revenant à Mme [S].
Sur la demande de dommages et intérêts par M. [H] [A]
Relevant que l'action judiciaire avait été nécessaire à M. [H] [A] pour faire valoir ses droits, le tribunal lui a accordé une somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts.
Bien que la cour ne retienne pas le recel successoral, il est indéniable que sans cette procédure judiciaire, M. [H] [A] aurait été lésé dans le partage de la succession de son père.
Le jugement sera dès lors confirmé en ce qu'il lui a accordé la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts, aucun élément ne justifiant de majorer l'indemnisation accordée par les premiers juges.
Sur les demandes accessoires
Le sens du présent arrêt commande de confirmer les dispositions du jugement relatives aux frais irrépétibles et aux dépens.
Chaque partie succombant partiellement, conservera la charge des dépens exposés en cause d'appel.
L'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile
PAR CES MOTIFS
Statuant par arrêt contradictoire, dans les limites de l'appel, par mise à disposition au greffe,
Infirme le jugement en ce qu'il a :
- Dit que les soldes des comptes courants, placements et comptes financiers et titres joints au nom de M. et/ou Mme [A] au jour du décès tels qu'énumérés au PV de difficultés de Me [Z] du 20 juin 2019, à savoir :
* le compte [17] n°[XXXXXXXXXX011]
* le compte titres [17] n°[XXXXXXXXXX012]
* le compte [16] d'instruments financiers n°[XXXXXXXXXX010] doivent être rapportés par Mme [K] [S] veuve [A] en leur entier à l'actif de succession, sauf à parfaire au jour le plus proche du partage,
- Dit que Mme [M] [A] et Mme [Y] [A] ont commis un recel successoral concernant l'acte de cession de 96 % des parts sociales de la SCI [20] en date du 22 décembre 2010,
- Dit que Mme [K] [S] veuve [A] est complice du recel successoral concernant l'acte de cession de 96% des parts sociales de la SCI [20] en date du 22 décembre 2010,
- Dit que Mmes [M] [Y] [A] ne pourront prétendre à aucun droit sur cet actif rapporté,
- Dit qu'en conséquence Mme [K] [S] veuve [A] doit rapporter à la succession la somme de 15 244, 90 euros,
Confirme le jugement en ce qu'il a :
- Débouté M. [H] [A] de sa demande tendant à voir rapporter à l'actif de la succession par Mme [K] [S] veuve [A] la totalité des titres [22] et la totalité des titres [21],
- Dit que Mmes [M] et [Y] [A] devront rapporter à la succession de [X] [A] la valeur de 96 % des parts sociales, les fruits et revenus rapportés échus et à venir perçus par la SCI [20] à hauteur de 96% depuis le jour du décès jusqu'à la date la plus porche du partage outre les intérêts à compter du présent jugement ;
- Débouté M. [H] [A] de sa demande tendant à voir juger que Mme [K] [S] veuve [A] et Mmes [M] et [Y] [A] ont commis un recel concernant le compte courant d'associés de la SCI [20] ;
- Dit que Mme [K] [S] veuve [A] a bénéficié d'un don manuel de la part de [X] [A] à hauteur de 15 244,90 euros ;
- Condamné in solidum Mme [K] [S] veuve [A] et Mmes [M] et [Y] [A] à payer à M. [H] [A] la somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts ;
- Condamné Mme [K] [S] veuve [A] et Mmes [M] et [Y] [A] à payer à M. [H] [A] la somme de 4 000 euros (objet du jugement rectificatif) sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- Condamné les parties aux dépens à proportion de leurs droits dans l'indivision successorale, comprenant les frais d'expertise, dépens qui seront employés en frais privilégiés de partage et pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile. Les dépens comprenant les frais d'expertise dont distraction au profit de (sic) avec application de l'article 699 du code de procédure civile,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Dit que la moitié du solde des comptes au jour du décès, sauf à parfaire au jour du partage :
- CIC n°[XXXXXXXXXX011] et n°[XXXXXXXXXX012]
- BNP n°[XXXXXXXXXX010]
devront être intégrés à l'actif de la succession ;
Dit que la somme de 15 244,90 reçue par Mme [S] s'imputera sur sa part successorale ;
Dit que chaque partie conservera la charge des dépens exposés en cause d'appel ;
Rejette les demandes présentées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Pascale CARIOU, Conseillère faisant fonction de Présidente et par Madame VALETTE, Greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Greffière, La Présidente,
DE
VERSAILLES
Code nac : 28A
Chambre civile 1-1
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 08 JUILLET 2025
N° RG 21/06429 - N° Portalis DBV3-V-B7F-UZQ6
AFFAIRE :
[H], [E], [W] [A]
C/
[K] [S] veuve [A]
...
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 01 Juillet 2021, par le tibunal judiciaire de VERSAILLES
N° Chambre :
N° Section :
N° RG : 19/01162
modifié par Jugement rendu le 16 Septembre 2021
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
- Me PORCHEROT
- Me SEGONNE-MORAND
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE HUIT JUILLET DEUX MILLE VINGT CINQ,
La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Monsieur [H], [E], [W] [A]
né le [Date naissance 8] 1975 à [Localité 23]
de nationalité Française
[Adresse 3]
[Localité 13]
représenté par Me Sophie PORCHEROT de la SELARL REYNAUD AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 177 - N° du dossier 382900
Me Marie-Christine VINCENT - ALQUIE, Plaidant, avocat au barreau de BAYONNE, vestiaire : 40, substitué par Me Paul BLEIN de la SELARL ALQUIE AVOCATS, avocat au barreau de BAYONNE, vestiaire : 40
APPELANT
****************
Madame [K] [S] veuve [A]
née le [Date naissance 6] 1964 à [Localité 26]
de nationalité Française
[Adresse 4]
[Localité 19]
Madame [M], [R], [J], [L] [A]
née le [Date naissance 7] 1989 à [Localité 25]
de nationalité Française
[Adresse 4]
[Localité 19]
Madame [Y], [F], [B], [U] [A]
née le [Date naissance 2] 1992 à [Localité 25]
de nationalité Française
[Adresse 4]
[Localité 19]
représentées par Me Aurélie SEGONNE-MORAND de la SELARL LMC PARTENAIRES, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 220 - N° du dossier 19.07471, substituée par Me Carine LERENARD, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 548
INTIMEES
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 19 Mai 2025 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Raphaël TRARIEUX, Président de chambre, et Madame Pascale CARIOU, Conseillère, faisant fonction de Présidente, chargée du rapport,
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Pascale CARIOU, Conseillère, faisant fonction de Présidente,
Monsieur Raphaël TRARIEUX, Président de chambre
Madame Florence PERRET, Présidente de chambre,
Greffier, lors des débats : Madame Rosanna VALETTE,
FAITS ET PROCEDURE,
[X] [A], divorcé en premières noces de Mme [N] [V] puis en deuxièmes noces de Mme [I] [O] [G] [P], a épousé en troisièmes noces Mme [K] [S] le [Date mariage 9] 1988 sous le régime de la séparation de biens.
Il est décédé le [Date décès 5] 2011 à [Localité 24], laissant pour lui succéder :
- sa troisième épouse, Mme [S] veuve [A], bénéficiaire d'une donation entre époux consentie le 1er septembre 1989 et en vertu de l'article 757 du code civil, du quart en toute propriété des biens composant la succession,
- ses trois enfants :
- [H] [A], issu de sa première union,
- [M] et [Y] [A], issues de sa troisième union.
Par testament olographe du 28 mai 2004, [X] [A] a institué pour légataires de la quotité disponible ses deux filles, [M] et [Y].
Par acte d'huissier de justice du 15 mai 2012, M. [H] [A] a fait assigner Mme [K] [S], veuve [A] et Mmes [M] et [Y] [A] afin, notamment, de voir ordonner l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la succession de son père décédé le [Date décès 5] 2011.
Par jugement rendu le 16 décembre 2014, le tribunal de grande instance de Versailles a notamment :
- Révoqué partiellement la donation faite par le de cujus le 1er septembre 1989,
Vu le testament olographe postérieur :
- Dit que Mmes [M] et [Y] [A] bénéficient de la quotité disponible, soit un quart de la succession en pleine propriété,
- Dit que Mme [K] [S] bénéficie des 3/4 en usufruit pour les 3/4 restants,
- Dit que sur ces 3/4, les trois enfants du de cujus ont chacun un tiers en nue-propriété,
- Ordonné qu'il soit procédé aux opérations de compte, liquidation et partage de la succession de feu [X] [A],
- Désigné pour y procéder, dans le cadre des dispositions des articles 1364 t suivants du code de procédure civile, M. [Z], notaire à [Localité 27],
- Dit qu'il appartiendra aussi au notaire de déterminer les sommes versées par le de cujus à titre de primes en exécution des contrats d'assurance vie par lui souscrits en sorte que les parties ou le tribunal soient en mesure d'apprécier le cas échéant, le caractère manifestement exagéré ou non des primes versées eu égard aux facultés du défunt,
- Dit que 90% de la valeur de la maison de [Localité 19] sera compris dans la succession et que Mme [S] est redevable d'une indemnité d'occupation à compter du [Date décès 5] 2012,
- Ordonné une mesure d'expertise comptable confiée à M. [C] [D] avec pour mission, les parties préalablement convoquées et entendues en leurs dires, de :
* entendre tout sachant,
* Interroger tous organismes bancaires, financiers ou d'assurance afin de reconstituer les comptes du de cujus [X] [A] du jour de son décès et en remontant sur 10 ans en arrière, les comptes de Mme [K] [S] veuve [A] et de ses deux filles [M] et [Y] sur la même période et les comptes joints ayant existé entre les parties sur la même période est aussi tous comptes de dépôt et de titres,
* identifier les auteurs des retraits opérés sur ces comptes et déterminer leur utilisation et ce afin de permettre d'établir un état de l'actif et du passif de la succession,
* donner au tribunal tout élément de nature à lui permettre de déterminer s'il y a eu recel successoral ou don manuel au bénéfice de l'un ou l'autre des héritiers,
* ordonner la production dans le délai d'un mois de la notification de la décision, entre les mains de l'expert nommé par le Ministère de l'Economie et des Finances, Direction des Services Généraux de l'informatique, Centre Régional de l'informatique, cellule FICOBA des références de tous comptes de dépôt, de titres et d'épargne dont pourraient être détenteurs Mme [K] [S] et ses filles et ce, en remontant sur une période de 10 ans à compter du décès du de cujus,
- Désigné le magistrat chargé du contrôle des expertises pour surveiller les opérations,
- Rejeté toute autre demande,
- Ordonné l'exécution provisoire,
- Condamné les parties aux dépens de l'instance qui seront employés en frais privilégiés de partage et supportés par les copartageants dans la proportion de leur part dans l'indivision.
M. [H] [A] a interjeté appel de ce jugement.
Par arrêt rendu le 23 février 2017, la cour d'appel de Versailles a notamment :
- Infirmé le jugement entrepris en ce qu'il a :
* révoqué partiellement la donation faite par [X] [A] le 1er septembre 1989,
* dit qu'[M] et [Y] [A] bénéficient de la quotité disponible soit un quart de la succession,
* dit que Mme [S] bénéficie des 3/4 en usufruit,
* dit que pour les 3/4 restants les enfants de [X] [A] ont chacun un tiers en nue-propriété,
* dit que 90 % de la valeur de la maison de [Localité 19] sera comprise dans la succession et que Mme [S] redevable d'une indemnité d'occupation à compter du [Date décès 5] 2012,
Statuant à nouveau de ses chefs et y ajoutant :
- Fixé ainsi les droits de chacun des héritiers dans la succession de [X] [A] :
* Mme [K] [S] : 1/12 en pleine propriété,
* Mme [M] [A] : 4/12 en pleine propriété (1/4 correspondant sa part réservataire + 1/12),
* Mme [Y] [A] : 4/12 en pleine propriété (1/4 correspondant sa part réservataire + 1/12),
* M. [H] [A] : 1/4 en pleine propriété,
- Dit que seule la moitié de la valeur du bien immobilier situé à [Localité 19], [Adresse 4], correspondant à la part de [X] [A], sera incluse dans la masse active de la succession,
- Dit que Mme [S] doit rapporter à la succession la somme correspondant à 40 % de la valeur actuelle du bien après son état au jour de l'acquisition,
- Dit que Mme [S] n'est pas redevable envers l'indivision successorale d'une indemnité d'occupation sur le bien immobilier situé à [Localité 19],
- Dit qu'il entrera dans la mission du notaire désigné de déterminer le montant des droits d'habitation sur le bien susvisé et d'usage sur le mobilier le garnissant de Mme [S], après prise en considération de ses propres droits de 50 % sur le dit bien immobilier en se plaçant à la date du [Date décès 5] 2012,
- Dit qu'il sera procédé conformément aux dispositions de l'article 765 du Code civil, selon que la valeur desdits droits sera inférieure ou supérieure à ses droits successoraux, étant précisé que si celle-ci est supérieure Mme [S] ne sera pas tenue de récompenser la succession à raison de l'excédent,
- Confirmé le jugement ses autres dispositions non contraires,
Y ajoutant,
- Dit que l'intégralité du solde créditeur du compte [18] [XXXXXXXXXX01] - compte-courant et compte titre (pour 2 241,73 euros et 41 048,26 euros) - au jour du décès doit figurer à l'actif de la succession,
- Débouté M. [H] [A] de sa demande tendant à la réintégration du contrat d'assurance vie [14] à la succession,
- Autorisé M. [Z], notaire désigné pour procéder aux opérations de compte liquidation et partage à débloquer au profit de M. [H] [A] la somme de 120 000 euros à valoir sur ses droits successoraux, ce dans le mois suivant la signification du présent arrêt,
- Dit n'y avoir lieu à évocation du litige sur les faits de recel notamment.
Le rapport d'expertise a été déposé le 28 octobre 2016.
Le 21 février 2019, M. [H] [A] a signifié des conclusions de réinscription de l'affaire au rôle, affaire réinscrite sous le numéro RG 19/1162.
M. [Z], notaire, a dressé un procès-verbal de difficultés le 20 juin 2019. Le dossier a été réinscrit sous le numéro RG 19/4319.
Par ordonnance du 9 septembre 2019, les deux affaires ont été jointes sous le seul numéro RG 19/1162.
Par jugement contradictoire rendu le 1er juillet 2021, rectifié par jugement rectificatif du 16 septembre 2021, le tribunal judiciaire de Versailles a :
- Homologué les points d'accord des parties sur les valeurs de la masse active de la succession arrêtés par l'expert, M. [D] et le notaire liquidateur sauf à parfaire au jour le plus proche du partage, à savoir :
* La valorisation de l'immeuble de [Localité 19] à 590 000 euros, dont la moitié dépendant de la succession pour : 295 000,00 euros
* Le rapport à la succession à hauteur de 40% par Mme [K] [S] veuve [A] pour la valeur actuelle du bien soit : 236 000,00 euros,
- Homologué le projet d'état liquidatif concernant le rapport à l'actif de la succession de la totalité des titres [15],
- Dit que la demande de rapport à la succession de M. [H] [A] concernant ces titres [15] est sans objet,
- Dit que les soldes des comptes courants, placements et comptes financiers et titres joints au nom de M. et/ou Mme [A] au jour du décès tels qu'énumérés au PV de difficultés de Me [Z] du 20 juin 2019, à savoir :
* le compte [17] n°[XXXXXXXXXX011]
* le compte titres [17] n°[XXXXXXXXXX012]
* le compte [16] d'instruments financiers n°[XXXXXXXXXX010] doivent être rapportés par Mme [K] [S] veuve [A] en leur entier à l'actif de succession, sauf à parfaire au jour le plus proche du partage,
- Débouté M. [H] [A] de sa demande tendant à voir rapporter à l'actif de la succession par Mme [K] [S] veuve [A] la totalité des titres [22] et la totalité des titres [21],
- Dit que Mme [K] [S] veuve [A] a bénéficié d'un don manuel de la part de [X] [A] à hauteur de 15 244,90 euros,
- Dit qu'en conséquence Mme [K] [S] veuve [A] doit rapporter à la succession la somme de 15 244, 90 euros,
- Dit que la somme de 8 808,00 euros versée par [X] [A] à Mme [M] [A] constitue un présent d'usage et ne doit pas être rapportée à la succession,
- Dit que la somme de 4 899,00 euros versée par [X] [A] à Mme [Y] [A] constitue un présent d'usage et ne doit pas être rapportée à la succession,
- Débouté en conséquence M. [H] [A] de ses demandes tendant aux rapports à la succession des sommes de 8 808,00 euros versée par [X] [A] à Mme [M] [A] et de 4 899,00 euros versée par [X] [A] à Mme [Y] [A],
- Dit que les deux parts sociales de la SCI [20] détenues par Mme [K] [S] veuve [A] ne sont pas rapportables à la succession,
- Débouté M. [H] [A] de sa demande tendant à voir juger que les fruits et revenus échus et à venir perçus par la SCI à hauteur de 2% seront rapportés par Mme [S] à la succession depuis le jour du décès jusqu'à la date la plus proche du partage, et qu'ils produiront intérêt à compter de la décision à intervenir jusqu'à parfait règlement,
- Dit en conséquence que les fruits et revenus échus et à venir perçus par la SCI à hauteur de 2% ne seront pas rapportés par Mme [S] à la succession depuis le jour du décès jusqu'à la date la plus proche du partage, et qu'ils produiront intérêt à compter de la décision à intervenir jusqu'à parfait règlement,
- Dit que Mme [M] [A] et Mme [Y] [A] ont commis un recel successoral concernant l'acte de cession de 96% des parts sociales de la SCI [20] en date du 22 décembre 2010,
- Dit que Mme [K] [S] veuve [A] est complice du recel successoral concernant l'acte de cession de 96% des parts sociales de la SCI [20] en date du 22 décembre 2010,
- Dit que Mmes [M] et [Y] [A] devront rapporter à la succession de [X] [A] la valeur des 96 % des parts sociales, les fruits et revenus rapportés échus et à venir perçus par la SCI [20] à hauteur de 96% depuis le jour du décès jusqu'à la date la plus porche du partage outre les intérêts à compter du présent jugement,
- Dit que Mmes [M] [Y] [A] ne pourront prétendre à aucun droit sur cet actif rapporté,
- Débouté M. [H] [A] de sa demande tendant à voir juger que Mme [K] [S] veuve [A] et Mmes [M] et [Y] [A] ont commis un recel concernant le compte courant d'associés de la SCI [20],
- Rappelé que la somme de 120 000 euros accordée à M. [H] [A] à titre de provision devra être déduite de ses droits,
- Renvoyé les parties devant M. [Z], notaire, aux fins d'établir un nouvel acte de partage pour tenir compte des modifications apportées par le présent jugement,
- Condamné in solidum Mme [K] [S] veuve [A] et Mmes [M] et [Y] [A] à payer à M. [H] [A] la somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts,
- Condamné Mme [K] [S] veuve [A] et Mmes [M] et [Y] [A] à payer à M. [H] [A] la somme de 4 000 euros (objet du jugement rectificatif) sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- Condamné les parties aux dépens à proportion de leurs droits dans l'indivision successorale, comprenant les frais d'expertise, dépens qui seront employés en frais privilégiés de partage et pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile. Les dépens comprenant les frais d'expertise dont distraction au profit de (sic) avec application de l'article 699 du code de procédure civile,
- Ordonné l'exécution provisoire de la présente décision.
M. [H] [A] a interjeté appel de cette décision le 21 octobre 2021 à l'encontre de Mme [K] [S] veuve [A] et de Mmes [M] et [Y] [A].
Par ordonnance d'incident du 7 mars 2024, le conseiller de la mise en état a rejeté les demandes d'avance en capital formées par Mmes [M] et [Y] [A],
Par dernières conclusions notifiées au greffe le 26 janvier 2024, M. [H] [A] demande à la cour de :
- Le Déclarer recevable et bien fondé en son appel,
- Infirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Versailles le 1er juillet 2021 et le jugement rectificatif du 16 septembre 2021 en ce qu'ils ont :
* Débouté M. [H] [A] de sa demande de rapport à l'actif de la succession par Mme [S] de la totalité des titres [22] et [21],
* Débouté M. [H] [A] de voir juger que Mmes [S] et [A] ont commis un recel sur le compte courant d'associé de la SCI [28],
* S'est abstenu en son dispositif de tirer conséquences de la complicité de recel successoral de Mme [S] concernant l'acte de cession de 96% des parts de la SCI [28] en date du 22 décembre 2010,
* Condamné Mme [S] et Mmes [A] à régler à M. [H] [A] une somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
* Condamné les parties aux dépens en proportion de leurs droits dans l'indivision successorale comprenant les frais d'expertise et dépens,
Et statuant à nouveau :
- Juger recevable et bien fondée sa demande de rapport par Mme [S] de la totalité des titres [22] et [21] ;
- Juger que Mme [S] doit rapporter 164 actions [22] et 70 actions [21] à l'actif de la succession en leur intégralité à leur valeur au jour le plus proche du partage ;
- Juger recevable et bien fondée sa demande de voir juger que Mmes [S] et [A] ont commis un recel sur le compte courant d'associé de la SCI [20] ;
- Juger Mmes [S] et [A] coupable indivisiblement de recel du compte courant du de cujus dans la SCI [20] évalué à 307 478,96 euros sauf mémoire à la valeur au jour le plus proche du partage ;
- Juger que preuve est rapportée de la connaissance qu'avait chacune d'elles du recel commis par l'autre compte tenu de leur participation croisée à l'acte du 22 décembre 2010 ;
- Juger que le financement de l'immeuble par les seuls fonds propres de [X] [A] et porté en compte courant associé constitue bien une donation rapportable et réductible au profit de ses filles et son épouse associée et que la sanction prévue à l'article 778, alinéa 2, du code civil est applicable ;
- Juger qu'elles devront rapport indivisiblement du compte courant dans la SCI [20] et seront dépourvues de tous droits successoraux sur ce compte courant évalué au jour le plus proche du partage ;
- Juger que c'est à tort que le tribunal n'a pas tiré toutes conséquences du recel de Mme [S] alors qu'il a condamné au titre du recel [Y] et [M] [A] à rapporter à la succession la valeur des 96%des parts sociales SCI [20] et des fruits et revenus échus et à venir depuis le jour du décès perçus par la SCI [20] jusqu'à la date la plus proche du partage, outre les intérêts à compter du 1er juillet 2021et les a privées de toute part sur lesdits biens rapportés ;
- Juger que Mme [S] avait parfaitement connaissance du recel successoral commis par ses filles et qu'en conséquence elle ne peut prétendre à aucune part sur les valeurs recelées ;
En conséquence :
- Juger qu'elle sera condamnée indivisiblement pour recel de la cession des 96% de parts de la SCI [20] et privée de sa part dans le partage à intervenir sur les biens recelés ;
- Juger qu'il est équitable de condamner solidairement Mmes [S] et [A] à régler à M. [H] [A] une indemnité de 15 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Juger au visa de l'art 695 du code de procédure civile que Mmes [S] et [A] seront condamnées solidairement aux entiers dépens de la procédure en 1ère instance et appel, en ce compris les frais d'expertise [D] en leur entier, cette mesure d'instruction ayant été rendue nécessaire au vu du manque de transparence de Mmes [S] et [A] et de leurs manoeuvres frauduleuses en vue de fausser le partage,
Rajoutant,
- Juger que Mmes [S] et [A], auteurs du recel, seront tenues de payer le passif de la succession dans la proportion de leurs droits dans cette succession avant la réduction résultant du recel, en ce compris les droits et émoluments de succession ;
- Juger que le notaire liquidateur devra fixer la date de la jouissance divise au jour le plus proche du partage ;
- Juger qu'en cas de confirmation du recel successoral concernant l'acte de cession de 96% des parts sociales de la SCI [20] en date du 22 décembre 2010 par la Cour, Mmes [M] et [Y] [A] et Mme [S] devront régler à titre de dommages intérêts pour le manque à gagner subi par M. [A] par l'absence de location une somme de 9 600 euros par an à compter du 1er août 2020 jusqu'à parfait règlement avec intérêts de droit à compter de l'arrêt à intervenir ;
- Confirmer le jugement en ses autres dispositions non contraires ;
- Débouter les intimées de leur appel incident et de leurs demandes d'infirmation.
Par dernières conclusions notifiées au greffe le 25 juin 2024, Mme [S] et Mmes [M] et [Y] [A], intimées, demandent à la cour de :
Vu les articles 816 et suivants du code civil,
Vu l'article 778 du code civil,
Vu l'article 922 du code civil,
Vu l'article 1353 nouveau du code civil,
Vu la jurisprudence,
Vu le Jugement en date du 16 décembre 2014 du tribunal de grande instance de Versailles,
Vu l'Arrêt en date du 23 février 2017 de la cour d'appel de Versailles,
Vu le Rapport de M. L'expert [D],
Vu le Procès-Verbal de contestation de Me [Z] du 20 juin 2019,
- les recevoir en leurs écritures et les déclarer bien fondées,
- Infirmer jugement du tribunal judiciaire de Versailles du 1er juillet 2021, rectifié le 16 septembre 2021, en ce qu'il a :
* Dit que les soldes des comptes courants, placements et comptes financiers et titres joints au nom de M. et/ou Mme [A] au jour du décès tels qu'énumérés au PV de difficultés de M. [Z] du 20 juin 2019, à savoir :
- le compte [17] n°[XXXXXXXXXX011]
- le compte titres [17] n°[XXXXXXXXXX012]
- le compte [16] d'instruments financiers n°[XXXXXXXXXX010] doivent être rapportés par Mme [K] [S] veuve [A] en leur entier à l'actif de succession, sauf à parfaire au jour le plus proche du partage,
* Dit que Mme [K] [S] veuve [A] a bénéficié d'un don manuel de la part de [X] [A] à hauteur de 15 244,90 euros,
* Dit qu'en conséquence Mme [K] [S] veuve [A] doit rapporter à la succession la somme de 15 244, 90 euros,
* Dit que Mme [M] [A] et Mme [Y] [A] ont commis un recel successoral concernant l'acte de cession de 96% des parts sociales de la SCI [20] en date du 22 décembre 2010,
* Dit que Mme [K] [S] veuve [A] est complice du recel successoral concernant l'acte de cession de 96% des parts sociales de la SCI [20] en date du 22 décembre 2010,
* Dit que Mmes [M] et [Y] [A] devront rapporter à la succession de [X] [A] la valeur des 96 % des parts sociales, les fruits et revenus rapportés échus et à venir perçus par la SCI [20] à hauteur de 96% depuis le jour du décès jusqu'à la date la plus porche du partage outre les intérêts à compter du présent jugement,
* Dit que Mmes [M] [Y] [A] ne pourront prétendre à aucun droit sur cet actif rapporté,
* Condamné in solidum Mme [K] [S] veuve [A] et Mmes [M] et [Y] [A] à payer à M. [H] [A] la somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts,
* Condamné Mme [K] [S] veuve [A] et Mmes [M] et [Y] [A] à payer à M. [H] [A] la somme de 4 000 euros (objet du jugement rectificatif) sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Et statuant à nouveau :
- Dire que les soldes des comptes courants, placements et comptes financiers et titres joints au nom de M. et/ou Mme [A] au jour du décès tels qu'énumérés au PV de difficultés de M. [Z] du 20 juin 2019, à savoir :
- le compte [17] n°[XXXXXXXXXX011]
- le compte titres [17] n°[XXXXXXXXXX012]
- le compte [16] d'instruments financiers n°[XXXXXXXXXX010]
doivent être pris en compte pour moitié dans l'actif de succession,
- Dire que la somme de 15.224,90 euros reçue par Mme [K] [S] veuve [A] n'est pas un don manuel et ne doit pas ainsi être réunie à la masse successorale ;
- Dire qu'elles ne sont pas coupables de recel successoral et rejeter l'ensemble des prétentions et demandes de M. [H] [A] y afférent ;
- Rejeter la demande de dommages et intérêts, infondée et injustifiée, présentée par M. [H] [A] à hauteur de 5.000 euros ;
- Rejeter la demande d'article 700 présentée par M. [H] [A] et le condamner à leur régler la somme de 15 000 euros au titre des frais de première instance ;
Ajoutant :
- Déclarer irrecevable la demande nouvelle formulée par M. [H] [A] de dommages et intérêts « pour le manque à gagner subi par M. [A] par l'absence de location une somme de 9600 euros par an à compter du 1er août 2020 jusqu'à parfait règlement avec intérêts de droit à compter de l'arrêt à intervenir ».
A titre uniquement subsidiaire,
- Rejeter la demande formulée par M. [H] [A] de dommages et intérêts « pour le manque à gagner subi par M. [A] par l'absence de location une somme de 9600.00€ par an à compter du 1er août 2020 jusqu'à parfait règlement avec intérêts de droit à compter de l'arrêt à intervenir » ;
ET,
- Confirmer le jugement du tribunal judiciaire de Versailles en date du 1er juillet 2021, rectifié le 16 septembre 2021, en ce qu'il a :
* Homologué les points d'accord des parties sur les valeurs de la masse active de la succession arrêtés par l'expert, M. [D] et le notaire liquidateur sauf à parfaire au jour le plus proche du partage, à savoir :
- La valorisation de l'immeuble de [Localité 19] à 590 000 euros, dont la moitié dépendant de la succession pour : 295 000,00 euros
- Le rapport à la succession à hauteur de 40% par Mme [K] [S] veuve [A] pour la valeur actuelle du bien soit : 236 000,00 euros,
* Homologué le projet d'état liquidatif concernant le rapport à l'actif de la succession de la totalité des titres [15],
* Dit que la demande de rapport à la succession de M. [H] [A] concernant ces titres [15] est sans objet,
* Débouté M. [H] [A] de sa demande tendant à voir rapporter à l'actif de la succession par Mme [K] [S] veuve [A] la totalité des titres [22] et la totalité des titres [21],
* Dit que la somme de 8 808,00 euros versée par [X] [A] à Mme [M] [A] constitue un présent d'usage et ne doit pas être rapportée à la succession,
* Dit que la somme de 4 899,00 euros versée par [X] [A] à Mme [Y] [A] constitue un présent d'usage et ne doit pas être rapportée à la succession,
* Débouté en conséquence M. [H] [A] de ses demandes tendant aux rapports à la succession des sommes de 8 808,00 euros versée par [X] [A] à Mme [M] [A] et de 4 899,00 euros versée par [X] [A] à Mme [Y] [A],
* Dit que les deux parts sociales de la SCI [20] détenues par Mme [K] [S] veuve [A] ne sont pas rapportables à la succession,
* Débouté M. [H] [A] de sa demande tendant à voir juger que les fruits et revenus échus et à venir perçus par la SCI à hauteur de 2% seront rapportés par Mme [S] à la succession depuis le jour du décès jusqu'à la date la plus proche du partage, et qu'ils produiront intérêt à compter de la décision à intervenir jusqu'à parfait règlement,
* Dit en conséquence que les fruits et revenus échus et à venir perçus par la SCI à hauteur de 2% ne seront pas rapportés par Mme [S] à la succession depuis le jour du décès jusqu'à la date la plus proche du partage, et qu'ils produiront intérêt à compter de la décision à intervenir jusqu'à parfait règlement,
* Débouté M. [H] [A] de sa demande tendant à voir juger que Mme [K] [S] veuve [A] et Mmes [M] et [Y] [A] ont commis un recel concernant le compte courant d'associés de la SCI [20],
* Rappelé que la somme de 120 000 euros accordée à M. [H] [A] à titre de provision devra être déduite de ses droits,
* Renvoyé les parties devant Me [Z], notaire, aux fins d'établir un nouvel acte de partage pour tenir compte des modifications apportées par le présent jugement,
* Condamné les parties aux dépens à proportion de leurs droits dans l'indivision successorale aux frais d'expertise.
En tout état de cause :
- Rejeter l'ensemble des demandes, fins et prétentions formulées par M. [H] [A] ;
- Condamner M. [H] [A] à leur verser la somme de 15 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamner M. [H] [A] aux dépens, de première instance et d'appel, autres que les frais d'expertise, dont distraction au profit de Mme Segonne-Morand, avocat.
La clôture de l'instruction a été ordonnée le 10 avril 2025.
SUR CE, LA COUR,
Sur les limites de l'appel
Le jugement est contesté en ce qu'il a :
- Dit que les soldes des comptes courants, placements et comptes financiers et titres joints au nom de M. et/ou Mme [A] au jour du décès tels qu'énumérés au PV de difficultés de Me [Z] du 20 juin 2019, à savoir :
* le compte [17] n°[XXXXXXXXXX011]
* le compte titres [17] n°[XXXXXXXXXX012]
* le compte [16] d'instruments financiers n°[XXXXXXXXXX010] doivent être rapportés par Mme [K] [S] veuve [A] en leur entier à l'actif de succession, sauf à parfaire au jour le plus proche du partage,
- Débouté M. [H] [A] de sa demande tendant à voir rapporter à l'actif de la succession par Mme [K] [S] veuve [A] la totalité des titres [22] et la totalité des titres [21],
- Dit que Mme [K] [S] veuve [A] a bénéficié d'un don manuel de la part de [X] [A] à hauteur de 15 244,90 euros,
- Dit qu'en conséquence Mme [K] [S] veuve [A] doit rapporter à la succession la somme de 15 244, 90 euros,
- Dit que Mme [M] [A] et Mme [Y] [A] ont commis un recel successoral concernant l'acte de cession de 96% des parts sociales de la SCI [20] en date du 22 décembre 2010,
- Dit que Mme [K] [S] veuve [A] est complice du recel successoral concernant l'acte de cession de 96% des parts sociales de la SCI [20] en date du 22 décembre 2010,
- Dit que Mmes [M] et [Y] [A] devront rapporter à la succession de [X] [A] la valeur des 96 parts sociales, les fruits et revenus rapportés échus et à venir perçus par la SCI [20] à hauteur de 96% depuis le jour du décès jusqu'à la date la plus porche du partage outre les intérêts à compter du présent jugement,
- Dit que Mmes [M] [Y] [A] ne pourront prétendre à aucun droit sur cet actif rapporté,
- Débouté M. [H] [A] de sa demande tendant à voir juger que Mme [K] [S] veuve [A] et Mmes [M] et [Y] [A] ont commis un recel concernant le compte courant d'associés de la SCI [20],
- Condamné in solidum Mme [K] [S] veuve [A] et Mmes [M] et [Y] [A] à payer à M. [H] [A] la somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts,
- Condamné Mme [K] [S] veuve [A] et Mmes [M] et [Y] [A] à payer à M. [H] [A] la somme de 4 000 euros (objet du jugement rectificatif) sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Les autres dispositions du jugement, non querellées, sont dès lors irrévocables.
Sur le rapport à la succession des soldes des comptes joints
Pour dire que les soldes des comptes courants, placements et comptes financiers et titres joints au nom de M. et/ou Mme [A] au jour du décès , à savoir :
* le compte [17] n°[XXXXXXXXXX011]
* le compte titres [17] n°[XXXXXXXXXX012]
* le compte [16] d'instruments financiers n°[XXXXXXXXXX010]
devaient être rapportés par Mme [K] [S] veuve [A] en leur entier à l'actif de succession, le tribunal a retenu que cette dernière ne démontrait pas avoir alimenté ces comptes, initialement ouverts au seul nom de [X] [A], crédités de sommes issues d'opérations portant sur des biens propres du défunt puis transformés en compte joint. Le tribunal a donc considéré qu'il s'agissait de donations indirectes.
Moyens des parties
Mme [S] poursuit l'infirmation du jugement en soutenant que :
- le tribunal a inversé la charge de la preuve en indiquant qu'elle ne démontrait pas avoir alimenté les comptes joints ;
- elle a en réalité alimenté ces comptes indirectement en assumant seule la quasi totalité des dépenses du ménage sur ses propres deniers ;
- l'intention libérale de [X] [A] n'est pas démontrée, pas plus que son appauvrissement ;
- en tout état de cause, la moitié des soldes de ces comptes figure déjà à l'actif de la succession, et que si la donation indirecte était retenue, elle s'imputerait sur ses droits seulement à la hauteur de la moitié des sommes mais ne devraient en aucun cas être rapportées à la succession.
M. [H] [A] poursuit la confirmation du jugement en rappelant que des fonds provenant de la vente de biens propres de son père ont été déposés sur un compte individuel ouvert au seul nom de ce dernier avant d'être transformé en compte joint, que ces fonds ont été utilisés immédiatement pour l'acquisition d'un bien immobilier entre les deux époux pour moitié chacun, caractérisait l'intention libérale.
Appréciation de la cour
En application de l'article 843 du code civil, 'Tout héritier, même ayant accepté à concurrence de l'actif, venant à une succession, doit rapporter à ses cohéritiers tout ce qu'il a reçu du défunt, par donations entre vifs, directement ou indirectement ; il ne peut retenir les dons à lui faits par le défunt, à moins qu'ils ne lui aient été faits expressément hors part successorale'.
Par ailleurs, en application de l'article 758-6 du même code, 'Les libéralités reçues du défunt par le conjoint survivant s'imputent sur les droits de celui-ci dans la succession. Lorsque les libéralités ainsi reçues sont inférieures aux droits définis aux articles 757 et 757-1, le conjoint survivant peut en réclamer le complément, sans jamais recevoir une portion des biens supérieure à la quotité définie à l'article 1094-1".
Il n'y a de donation déguisée que si les trois éléments suivants sont réunis :
- l'intention libérale du donateur ;
- son dessaisissement et appauvrissement irrévocable ;
- l'enrichissement corrélatif du bénéficiaire de la donation.
L'intention libérale ne se présume pas, elle doit être prouvée. A cet égard, le tribunal retient que l'intention libérale, qui résulte de la transformation de comptes individuels en comptes joint, est corroborée par l'acquisition de l'immeuble de Fouqueux par les époux par moitié, au moyen des fonds déposés sur un compte joint provenant de la vente de biens propres du de cujus.
Cependant, concernant le cas particulier du financement de l'immeuble de [Localité 19] a été définitivement tranché par l'arrêt rendu par cette cour le 23 février 2017, lequel a effectivement retenu l'existence d'une donation déguisée compte tenu des circonstances particulières dans lesquelles est intervenue la transaction. Il est ainsi acquis que Mme [S] doit rapporter à la succession la somme correspondant à 40 % de la valeur actuelle du bien après son état au jour de l'acquisition,
C'est donc en vain que M. [H] [A] revient longuement sur ce point, les autres comptes joints n'ayant pas été alimentés par le produit de la vente de biens propres à [X] [A].
Au soutien de ses demandes, l'appelant fait par ailleurs référence à un arrêt de la Cour de cassation rendu le 19 janvier 2010 (Cass.comm., 19 janvier 2010, n°09-12-140).
Dans cette espèce, les héritiers contestaient la réintégration, à l'actif de la succession, de la totalité du solde des comptes joints telle que demandée par l'administration fiscale.
La Cour de cassation a censuré la cour d'appel qui avait fait droit à la réclamation des héritiers en retenant que (souligné par la cour) ' (...) Le défunt exerçait seul un activité rémunérée au sein du foyer, disposait d'un patrimoine propre et alimentait seul les comptes bancaires litigieux , la cour d'appel a privé sa décision de base légale'.
Cette solution ne peut pas être transposée à l'espèce dès lors que Mme [S] exerçait une activité professionnelle et assumait, au moyen de ses comptes personnels, la plus grande partie des dépenses de la famille.
Il peut être retenu que le couple avait adopté un mode de fonctionnement parfaitement légal selon lequel Mme [S] assumait les dépenses courantes et [X] [A] l'alimentation des comptes joints au titre de la contribution aux charges du mariage.
Par ailleurs, il sera rappelé que chaque co-titulaire d'un compte joint peut à tout moment en virer le solde sur un compte qui lui est propre. Dans ces conditions, à supposer que la transformation d'un compte individuel en compte joint puisse être considérée comme une libéralité, l'appauvrissement n'est pas irrévocable et ne répond donc pas aux critères de la donation déguisée.
Dès lors, le jugement sera infirmé en ce qu'il a dit que les soldes des comptes courants, placements et comptes financiers et titres joints au nom de M. et/ou Mme [A] au jour du décès (comptes [17] et compte [16]') devaient être rapportés par Mme [K] [S] veuve [A] en leur entier à l'actif de succession.
Il sera dit que seule la moitié du solde de ces comptes au jour du décès devront être intégrés à l'actif de la succession.
Sur le rapport à la succession des titres [22] et [21] par Mme [K] [S]
Pour débouter M. [H] [A] de sa demande tendant à voir rapporter à l'actif de la succession par Mme [K] [S] veuve [A] la totalité des titres [22] et [21], le tribunal a estimé que le requérant ne démontrait pas que ces titres, inscrits en compte au nom des deux époux, appartenaient au préalable à [X] [A] en son nom personnel.
Moyens des parties
M. [H] [A] poursuit l'infirmation du jugement en faisant valoir qu'à l'origine, ces titres 'au porteur' appartenaient à [X] [A] seul qui, ensuite, a demandé leur transformation en titres 'nominatif pur' au nom des deux époux le 31 août 2007.
Mme [K] [S] sollicite la confirmation du jugement en faisant valoir que M. [H] [A] ne démontre pas que les titres dont il demande le rapport à la succession étaient la propriété auparavant du de cujus.
Appréciation de la cour
Les éléments versés aux débats ne permettent pas d'établir que les titres litigieux, inscrits au nom des deux époux au jour du décès, aient été auparavant la propriété du seul de cujus.
En effet, M. [H] [A] entend démontrer que son père détenait seul, en son nom propre, des actions [22], en versant un extrait de compte sur lequel apparaissent d'abord des paiements de 'coupons' [22] et [21], puis le paiement de 'dividendes' [22] et [21].
Il explique ce changement de libellé (coupons puis dividendes) par la transformation des actions au porteur ( qui auraient donc donné lieu au paiement de coupons), détenues par le seul de cujus, en actions 'nominatif pur' détenues cette fois par les deux époux, donnant lieu au paiement de dividendes.
Il indique ainsi 'La mention coupon correspond à des titres au porteur et la mention dividendes correspond à de titres nominatifs dans les libellés de la banque'.
Ce raisonnement est erroné car le versement de 'coupons' correspond au paiement des intérêts des obligations souscrites et non au paiement des dividendes attachés à des actions, fussent-elles au porteur.
L'avis d'entrée d'actions [22] 'au nominatif pur', au 31 août 2007, au nom des deux époux ne démontre pas davantage que ces actions aient été auparavant détenues par [X] [A] seul.
Cet avis d'opéré indique seulement le passage de titres de 'nominatif administré' à 'nominatif pur' et pas un changement de nom du ou des détenteurs.
Dans ces conditions, le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté M. [H] [A] de sa demande tendant à voir rapporter à l'actif de la succession par Mme [K] [S] veuve [A] la totalité des titres [22] et la totalité des titres [21],
Sur le recel successoral portant sur la cession de 96 parts sociales de la SCI [20]
Pour dire que Mmes [M] et [Y] [A] avaient commis un recel successoral portant sur la cession des parts sociales de la SCI [20] et dire que Mme [S] était complice de ce recel, le tribunal a retenu qu'elles avaient voulu s'assurer un avantage à l'encontre d'un co-héritier en gardant sous silence l'existence d'une donation déguisée, en l'espèce la cession de 96 des 100 titres de la SCI.
Moyens des parties
Mmes [K], [M] et [Y] [A] poursuivent l'infirmation du jugement en faisant valoir pour l'essentiel que, profanes en la matière, elles ignoraient que la cession litigieuse pouvait être requalifiée en donation déguisée d'autant plus que M. [T], notaire ayant enregistré la cession des parts puis débuté les opérations de compte et liquidation de la succession, ne les avait pas alertées sur ce point. Elles ajoutent que cette cession était connue de M. [H] [A] dès l'ouverture de la succession, ce qui exclut toute tentative de dissimulation.
M. [H] [A] conclut à la confirmation du jugement en soulignant en substance que la déclaration de succession initiale de 2012 ne comportait pas la mention de la cession litigieuse et que ce n'est qu'après la délivrance de l'assignation que Mme [M] et [Y] [A] ont reconnu avoir été avantagées par la cession.
Appréciation de la cour
En application de l'article 778 du code civil, 'Sans préjudice de dommages et intérêts, l'héritier qui a recelé des biens ou des droits d'une succession ou dissimulé l'existence d'un cohéritier est réputé accepter purement et simplement la succession, nonobstant toute renonciation ou acceptation à concurrence de l'actif net, sans pouvoir prétendre à aucune part dans les biens ou les droits détournés ou recelés. Les droits revenant à l'héritier dissimulé et qui ont ou auraient pu augmenter ceux de l'auteur de la dissimulation sont réputés avoir été recelés par ce dernier.
Lorsque le recel a porté sur une donation rapportable ou réductible, l'héritier doit le rapport ou la réduction de cette donation sans pouvoir y prétendre à aucune part.
L'héritier receleur est tenu de rendre tous les fruits et revenus produits par les biens recelés dont il a eu la jouissance depuis l'ouverture de la succession'.
Pour retenir l'existence d'un recel il est nécessaire de démontrer non seulement que la cession des parts litigieuse est une donation déguisée, mais également qu'au moment des opérations de liquidation de la succession, et en tout cas avant l'assignation qui leur a été délivrée, Mmes [M] et [Y] [A] ont entendu la dissimuler.
En effet, une chose est de requalifier la cession onéreuse en donation rapportable à la succession, ce que les intimées ne contestent pas, une autre est de retenir le recel successoral qui suppose la volonté de son auteur de profiter d'un avantage au détriment d'un autre héritier.
Sauf à savoir que la cession était critiquable et pouvait être requalifiée en donation déguisée, ce qui n'est pas démontré, les cessionnaires n'avaient pas à porter à l'actif de la succession les parts ainsi acquises.
Si Mmes [M] et [Y] [A] ont reconnu devant les premiers juges que la cession litigieuse leur conférait un avantage sur leur demi-frère, et donc accepté le rapport à la succession de ces titres, cela ne démontre pas pour autant qu'au moment des opérations de liquidation engagées devant le notaire, elles aient eu la volonté de dissimuler cette cession en sachant qu'elle pouvait être requalifiée de donation déguisée.
C'est très pertinemment que les intimées font valoir que c'est le même notaire qui a reçu l'acte de création de la SCI, la cession des parts et ouvert les opérations de compte et liquidation de la succession. Elles affirment que le notaire ne les pas alertées sur les risques de requalification de la cession des titres en donation déguisée et la preuve contraire n'est pas rapportée.
Mme [M] et [Y] sont des profanes en la matière et leur mauvaise foi ne peut être supposée. Au contraire, leur bonne foi se présume et faute pour M. [H] [A] d'apporter la preuve que le notaire les aurait informées de la nécessité de rapporter les titres cédés à la succession, le recel ne saurait être retenu.
De plus, l'acte litigieux n'est nullement dissimulé puisque avant même la délivrance de l'assignation, il y a eu des échanges de courriels entre le conseil de M. [H] [A] et le notaire M. [T]. Le requérant en avait donc parfaitement connaissance.
Ainsi, au moment de la déclaration de succession se posait effectivement la question de savoir si oui ou non les parts de la SCI devaient être rapportés à la succession, mais le fait de répondre positivement à cette question, alors que ces titres ne figuraient pas dans la déclaration de succession préparée par le notaire en mai 2012, au demeurant non signée par les intimées, n'implique pas l'existence d'un recel successoral faute de rapporter la preuve de l'élément intentionnel et même de la dissimulation, cette cession étant connue de M. [H] [A] dès l'ouverture de la succession.
Il n'y a donc pas lieu de retenir l'existence d'un recel successoral et il convient d'infirmer le jugement sur ce point.
En revanche, le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné Mme [M] et [Y] [A] à rapporter les 96 parts de la SCI, ainsi que 96% des fruits perçus depuis l'ouverture de la succession (article 856 du code civil).
Sur le recel successoral du compte courant d'associé de la SCI [20]
Pour débouter M. [H] [A] de sa demande tendant à voir juger que Mme [K] [S] et ses deux filles ont commis un recel concernant le compte courant d'associés de la SCI [20], le tribunal a retenu que l'existence de ce compte courant d'associé a été mentionné dans la déclaration de succession établie le 12 avril 2013 par M. [T], notaire, avec la mention 'pour mémoire'.
Moyens des parties
M. [H] [A] poursuit l'infirmation du jugement en faisant valoir que la déclaration de succession qui fait mention du compte courant avec la mention 'pour mémoire' a été établie le 12 avril 2013, bien après la délivrance de l'assignation, à une date où le repentir n'était plus efficace. Il estime que c'est le projet de déclaration du 15 mai 2012 qui doit être pris en compte pour rechercher l'éventuel recel et que précisément, ce projet ne fait pas état du compte courant.
Mme [M], [Y] et [K] [A] poursuivent la confirmation du jugement en soulignant que lors de l'établissement de la déclaration de succession en avril 2013, le montant du compte courant n'était pas connu avec précision et que la mention 'pour mémoire' avait précisément pour but de contourner la difficulté et non de dissimuler l'existence de ce compte.
Appréciation de la cour
S'il est exact que le compte courant de la SCI [20] n'est pas mentionné dans la déclaration de succession préparée par le notaire en mai 2012, restée à l'état de projet, il n'est pas démontré que Mmes [M], [Y] et [K] [A] avaient connaissance de l'existence de ce compte.
Les intimées affirment que [X] [A] gérait seul la SCI et qu'elles ignoraient tout de la comptabilité de celle-ci.
C'est sans preuve que M. [H] [A] soutient qu'au contraire elles ont volontairement dissimulé l'existence de compte courant d'associé. C'est également en vain qu'il fait valoir que les intéressées ne démontrent pas que le notaire ne les aurait pas informées sur ce point.
La preuve d'un fait négatif étant impossible, ce moyen n'est pas opérant.
La déclaration définitive, celle qui a été adressée à l'administration fiscale en avril 2013, porte la mention d'un compte courant avec la mention 'pour mémoire'. Ceci signifie que le montant de ce compte n'était pas connu au moment où la déclaration a été souscrite, mais exclut nécessairement tout recel, l'élément matériel, si ce n'est n'est l'élément intentionnel, n'étant par définition pas rempli.
Les héritiers, par cette mention, déclarent qu'il existe un compte courant ayant vocation à être inscrit à l'actif de la succession mais dont le montant reste à déterminer, étant rappelé que la succession était suffisamment complexe pour nécessiter la désignation d'un expert judiciaire.
La preuve tant de la dissimulation que de l'élément intentionnel n'est donc pas rapportée.
Le jugement sera dès lors confirmé en ce qu'il a débouté M. [H] [A] de sa demande tendant à voir juger que Mme [K] [S] veuve [A] et Mmes [M] et [Y] [A] ont commis un recel concernant le compte courant d'associés de la SCI [20].
Sur le rapport à la succession par Mme [K] [S] veuve [A] d'un don manuel de 15 244,90 euros
Le tribunal a retenu que le rapport de M. [D] établissait que [X] [A] avait versé à Mme [K] [S] le 17 janvier 2001 la somme de 100 000 francs ( 15 244,90 euros), ce versement devant être qualifié de don manuel.
Moyens des parties
Mme [K] [A] poursuit l'infirmation du jugement en faisant valoir, comme en première instance, que ce versement correspond au remboursement des versements qu'elle a effectués sur le livret A de son mari entre 1987 et 1989. Elle ajoute qu'en tout état de cause, les donations reçues du défunt par le conjoint ne sont pas rapportables mais prises en compte dans le règlement de la succession, donc déduites de la part lui revenant.
M. [H] [A] sollicite la confirmation du jugement en s'appuyant sur les motifs du jugement. Il soutient que le rapport d'une libéralité reçue par le conjoint est rapportable par application combinée des articles 758-5 et 758-6 du code civil.
Appréciation de la cour
C'est par des motifs exacts, adoptés par la cour, tenant à l'absence de preuve que le versement litigieux correspondrait au remboursement d'une dette du défunt à son épouse, que le tribunal a estimé qu'il s'agissait d'un don manuel.
S'agissant du rapport de cette donation, il convient de rappeler qu'en application de l'article 758-6 du code civil, 'Les libéralités reçues du défunt par le conjoint survivant s'imputent sur les droits de celui-ci dans la succession. Lorsque les libéralités ainsi reçues sont inférieures aux droits définis aux articles 757 et 757-1, le conjoint survivant peut en réclamer le complément, sans jamais recevoir une portion des biens supérieure à la quotité définie à l'article 1094-1".
Les donations conjugales ne sont donc pas rapportables, mais le conjoint survivant voit sa part amputée des libéralités qu'il a reçues (rapport en moins prenant).
C'est donc à tort que le tribunal a ordonné le rapport à la succession de la somme de 15 244,90 euros.
Le jugement sera infirmé sur ce point mais il sera dit en revanche que cette somme s'imputera sur les droits revenant à Mme [S].
Sur la demande de dommages et intérêts par M. [H] [A]
Relevant que l'action judiciaire avait été nécessaire à M. [H] [A] pour faire valoir ses droits, le tribunal lui a accordé une somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts.
Bien que la cour ne retienne pas le recel successoral, il est indéniable que sans cette procédure judiciaire, M. [H] [A] aurait été lésé dans le partage de la succession de son père.
Le jugement sera dès lors confirmé en ce qu'il lui a accordé la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts, aucun élément ne justifiant de majorer l'indemnisation accordée par les premiers juges.
Sur les demandes accessoires
Le sens du présent arrêt commande de confirmer les dispositions du jugement relatives aux frais irrépétibles et aux dépens.
Chaque partie succombant partiellement, conservera la charge des dépens exposés en cause d'appel.
L'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile
PAR CES MOTIFS
Statuant par arrêt contradictoire, dans les limites de l'appel, par mise à disposition au greffe,
Infirme le jugement en ce qu'il a :
- Dit que les soldes des comptes courants, placements et comptes financiers et titres joints au nom de M. et/ou Mme [A] au jour du décès tels qu'énumérés au PV de difficultés de Me [Z] du 20 juin 2019, à savoir :
* le compte [17] n°[XXXXXXXXXX011]
* le compte titres [17] n°[XXXXXXXXXX012]
* le compte [16] d'instruments financiers n°[XXXXXXXXXX010] doivent être rapportés par Mme [K] [S] veuve [A] en leur entier à l'actif de succession, sauf à parfaire au jour le plus proche du partage,
- Dit que Mme [M] [A] et Mme [Y] [A] ont commis un recel successoral concernant l'acte de cession de 96 % des parts sociales de la SCI [20] en date du 22 décembre 2010,
- Dit que Mme [K] [S] veuve [A] est complice du recel successoral concernant l'acte de cession de 96% des parts sociales de la SCI [20] en date du 22 décembre 2010,
- Dit que Mmes [M] [Y] [A] ne pourront prétendre à aucun droit sur cet actif rapporté,
- Dit qu'en conséquence Mme [K] [S] veuve [A] doit rapporter à la succession la somme de 15 244, 90 euros,
Confirme le jugement en ce qu'il a :
- Débouté M. [H] [A] de sa demande tendant à voir rapporter à l'actif de la succession par Mme [K] [S] veuve [A] la totalité des titres [22] et la totalité des titres [21],
- Dit que Mmes [M] et [Y] [A] devront rapporter à la succession de [X] [A] la valeur de 96 % des parts sociales, les fruits et revenus rapportés échus et à venir perçus par la SCI [20] à hauteur de 96% depuis le jour du décès jusqu'à la date la plus porche du partage outre les intérêts à compter du présent jugement ;
- Débouté M. [H] [A] de sa demande tendant à voir juger que Mme [K] [S] veuve [A] et Mmes [M] et [Y] [A] ont commis un recel concernant le compte courant d'associés de la SCI [20] ;
- Dit que Mme [K] [S] veuve [A] a bénéficié d'un don manuel de la part de [X] [A] à hauteur de 15 244,90 euros ;
- Condamné in solidum Mme [K] [S] veuve [A] et Mmes [M] et [Y] [A] à payer à M. [H] [A] la somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts ;
- Condamné Mme [K] [S] veuve [A] et Mmes [M] et [Y] [A] à payer à M. [H] [A] la somme de 4 000 euros (objet du jugement rectificatif) sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- Condamné les parties aux dépens à proportion de leurs droits dans l'indivision successorale, comprenant les frais d'expertise, dépens qui seront employés en frais privilégiés de partage et pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile. Les dépens comprenant les frais d'expertise dont distraction au profit de (sic) avec application de l'article 699 du code de procédure civile,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Dit que la moitié du solde des comptes au jour du décès, sauf à parfaire au jour du partage :
- CIC n°[XXXXXXXXXX011] et n°[XXXXXXXXXX012]
- BNP n°[XXXXXXXXXX010]
devront être intégrés à l'actif de la succession ;
Dit que la somme de 15 244,90 reçue par Mme [S] s'imputera sur sa part successorale ;
Dit que chaque partie conservera la charge des dépens exposés en cause d'appel ;
Rejette les demandes présentées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Pascale CARIOU, Conseillère faisant fonction de Présidente et par Madame VALETTE, Greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Greffière, La Présidente,