CA Paris, Pôle 1 - ch. 3, 10 juillet 2025, n° 24/16945
PARIS
Arrêt
Autre
Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 1 - Chambre 3
ARRÊT DU 10 JUILLET 2025
(n° 292 , 7 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 24/16945 - N° Portalis 35L7-V-B7I-CKE5J
Décision déférée à la cour : ordonnance du 09 août 2024 -président du TJ de [Localité 8] - RG n° 24/52601
APPELANTE
S.A.R.L. SINERGIE, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 2]
[Localité 7]
Représentée par Me Caroline PIPARD de la SELEURL PIPARD, avocat au barreau de PARIS, toque : C0177
INTIMÉE
Société CDC HABITAT, RCS de [Localité 8] n°470801168, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 5]
[Localité 6]
Représentée par Me Isabelle PRUD'HOMME, avocat au barreau de PARIS, toque : D0510
Ayant pour avocat plaidant Me Christophe SOVRAN-CIBIN de la SELARL SOVRAN-CIBIN, avocat au barreau de VERSAILLES
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 27 mai 2025, en audience publique, rapport ayant été fait par Anne-Gaël BLANC, conseillère, conformément aux articles 804, 805 et 906 du CPC, les avocats ne s'y étant pas opposés.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Michel RISPE, président de chambre
Anne-Gaël BLANC, conseillère
Valérie GEORGET, conseillère
Greffier lors des débats : Caroline GAUTIER
ARRÊT :
- CONTRADICTOIRE
- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Michel RISPE, président de chambre et par Jeanne PAMBO, greffier, présent lors de la mise à disposition.
Par acte sous seing privé du 1er avril 2012, la société CDC Habitat, a donné à bail à la société Sinergie, des locaux à usage commercial dépendant d'un immeuble situé [Adresse 4] à [Adresse 9] [Localité 1], moyennant le paiement d'un loyer mensuel de 26 500 euros, hors taxes hors charges, pour une activité de 'sauna, soins esthétiques et corporels, salle de gymnastique et professions annexes'.
Un commandement de payer a été délivré au preneur, par acte de commissaire de justice du 18 janvier 2024, pour une somme de 12 804,70 euros en principal, au titre de l'arriéré locatif arrêté au 17 janvier 2024, échéance de janvier 2024 incluse.
Par acte du 4 avril 2024, la société CDC Habitat a assigné la société Sinergie devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Paris aux fins de :
constatation de l'acquisition de la clause résolutoire,
expulsion et condamnation au paiement de provisions à hauteur de 16 894,82 euros au titre de l'arriéré de loyers, taxes et charges arrêtés au 22 mars 2024, mois de mars 2024 inclus,
fixation de l'indemnité d'occupation due par la société Sinergie au montant mensuel du loyer majoré des taxes et charges à compter du 19 février 2024 et jusqu'à complète libération des lieux et remise des clefs,
condamnation au paiement de la somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
Par ordonnance réputée contradictoire du 9 août 2024, le juge des référés a :
constaté l'acquisition de la clause résolutoire et la résiliation de plein droit du bail liant les parties à la date du 19 février 2024,
ordonné l'expulsion de la société Sinergie et de tous occupants de son chef des locaux donnés à bail situés [Adresse 3] à [Localité 10] avec, le cas échéant, le concours d'un serrurier et de la force publique,
rappelé que le sort des meubles et objets mobiliers se trouvant sur place est régi par les dispositions des articles L.433-1 et R.433-1 du code des procédures civiles d'exécution,
condamné la société Sinergie à payer à la société CDC Habitat une indemnité d'occupation mensuelle à titre provisionnel, égale au montant du loyer contractuel, augmenté des charges et taxes, qui est due à compter du 19 février 2024 et jusqu'à libération effective des lieux et la remise des clés,
condamné la société Sinergie à payer, à titre de provision, à la société CDC Habitat la somme de 16 894,82 euros à valoir sur l'arriéré de loyers et charges et indemnités d'occupation dus, mois de mars 2024 inclus,
condamné la société Sinergie à payer à la société CDC Habitat une somme de 1 200 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
condamné la société Sinergie aux dépens.
Par déclaration du 2 octobre 2024, la société Sinergie a relevé appel de cette décision sous le numéro de RG 24/16945 en critiquant l'ensemble des chefs du dispositif.
Un autre appel a été formé à la même date sous le numéro 24/16958.
Par ordonnance du 20 mars 2025, ces deux appels ont été joints.
Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 20 décembre 2024, la société Sinergie demande à la cour de :
infirmer l'ordonnance rendue en ce qu'elle a :
'constaté l'acquisition de la clause résolutoire et la résiliation de plein droit du bail liant les parties à la date du 19 février 2024,
ordonné l'expulsion de la société Sinergie et de tous occupants de son chef des locaux donnés à bail situés [Adresse 3] à [Localité 10], avec le cas échéant le concours d'un serrurier et de la force publique,
rappelé que le sort des meubles et objets mobiliers se trouvant sur place est régi par les dispositions des articles L. 433-1 et R 433-1 du code de procédure civile d'exécution,
condamné la société Sinergie à payer à la société CDC Habitat une indemnité d'occupation mensuelle, à titre provisionnel, égale au montant du loyer contractuel, augmenté des charges et taxes, qui est due à compter du 19 février 2024 et jusqu'à la libération effective des lieux et la remise des clés,
condamné société Sinergie à payer, à titre de provision, à la société CDC Habitat la somme de 16.894,82 euros à valoir sur l'arriéré de loyers et charges et indemnités d'occupation dus, mois de mars 2024 inclus,
condamné la société Sinergie à payer la somme de 1.200 euros à la société CDC Habitat sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
condamné la société Sinergie aux dépens.'
rejeter les demandes de la société CDC Habitat,
juger recevable la société Sinergie en son appel ainsi qu'en toutes ses demandes reconventionnelles et l'en déclarer bien fondée,
en conséquence et statuant à nouveau :
ordonner la jonction des deux instances d'appel, enregistrées devant le pôle 1 chambre 3 (RG : 24/16945) et devant le pôle 1 chambre 8 (RG : 24/16958),
à titre principal :
prononcer la nullité du commandement de payer du 18 janvier 2024 pour inexécution de bonne foi du bail par la société CDC Habitat,
en conséquence :
condamner la société CDC Habitat à verser à la société Sinergie la somme provisionnelle de 40 010, 92 euros, correspondant aux loyers perçus pendant la durée des travaux, d'avril 2023 à février 2024,
condamner la société CDC Habitat à minorer le loyer et les charges mensuelles à hauteur de 50 % avec effet rétroactif au 1er février 2024, jusqu'à la reprise intégrale par la société CDC habitat des finitions au niveau de l'entrée du King sauna et la réinstallation à l'identique des plantations extérieures aux abords de son entrée,
condamner la société CDC Habitat à verser à la société Sinergie la somme provisionnelle de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour le préjudice économique, organisationnel et moral subi,
ordonner la compensation entre les condamnations prononcées à l'encontre de chacune des parties s'il y a lieu, avec effet rétroactif à la date du premier impayé de loyer fin 2023, tel que visé par le commandement de payer,
à titre subsidiaire :
constater la contestation sérieuse soulevée par la société Sinergie,
renvoyer les parties devant le juge du fond,
à titre très subsidiaire :
octroyer à la société Sinergie des délais de paiement aux fins d'apurement de la dette de loyer sur une période de deux ans, avec effet rétroactif à la date du premier loyer impayé en 2023, tel que visé par le commandement de payer, selon les modalités suivantes :
versement de la société Sinergie à la société CDC Habitat de 50 euros par mois jusqu'à l'accomplissement par la société CDC Habitat des finitions au niveau de l'entrée du King sauna et le remplacement de l'intégralité des plantes exotiques qui se trouvaient à l'extérieur près de l'entrée avant les travaux en façade,
à compter de l'accomplissement par la société CDC habitat des finitions au niveau de l'entrée du King sauna et du remplacement de l'intégralité des plantes exotiques susvisées, versement de la société Sinergie à la société CDC habitat d'une somme supplémentaire à définir sans qu'elle vienne pénaliser financièrement la reprise de l'activité du King sauna,
versement du solde de la dette le 24ème mois, sous réserve de l'accomplissement par la société CDC habitat des finitions au niveau de l'entrée du King sauna et du remplacement de l'intégralité des plantes exotiques susvisées,
les paiements s'imputeront d'abord sur le capital,
en tout état de cause :
condamner la société CDC Habitat à verser à la société Sinergie la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
condamner la société CDC Habitat aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Par ses dernières conclusions remises et notifiées le 18 février 2025, la société CDC Habitat demande à la cour de :
déclarer la société Sinergie entièrement mal fondée en son appel,
la débouter en conséquence de l'intégralité de ses prétentions,
réformer la décision entreprise quant au montant de la provision allouée à la société CDC habitat, et statuant à nouveau de ce chef :
condamner la société Sinergie à lui payer la somme provisionnelle de 58 447,92 euros représentant les loyers, charges et indemnités d'occupation dus à la date du 13 décembre 2024 (décembre 2024 inclus),
confirmer l'ordonnance déférée en toutes ses autres dispositions,
et y ajoutant, condamner la société Sinergie à payer à la société CDC habitat la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
condamner enfin l'appelante aux entiers dépens de première instance et d'appel avec application de l'article 699 du code de procédure civile.
La clôture a été ordonnée le 22 mai 2025.
Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties susvisées pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.
Sur ce,
Sur la jonction
La jonction entre les procédures enregistrées sous les numéros de RG 24/16945 et 24/16958 ayant déjà été ordonnée, la demande à ce titre est sans objet.
Sur l'acquisition de la clause résolutoire
Aux termes de l'article 835 du code de procédure civile, le président du tribunal judiciaire peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite ; dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, il peut accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.
L'article L.145-41 du code de commerce dispose que toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu'un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai.
Les juges saisis d'une demande présentée dans les formes et conditions prévues à l'article 1343-5 du code civil peuvent, en accordant des délais, suspendre la réalisation et les effets des clauses de résiliation, lorsque la résiliation n'est pas constatée ou prononcée par une décision de justice ayant acquis l'autorité de la chose jugée. La clause résolutoire ne joue pas, si le locataire se libère dans les conditions fixées par le juge.
En application de ces textes, il entre dans les pouvoirs du juge des référés, même en l'absence d'urgence, de constater la résiliation de plein droit d'un contrat de bail commercial en application d'une clause résolutoire lorsque celle-ci est mise en oeuvre régulièrement, en l'absence de toute contestation sérieuse de la validité de cette clause, et, par suite, d'ordonner l'expulsion de l'occupant, dont l'obligation de libérer les lieux n'est pas sérieusement contestable. En outre, le maintien de l'occupant dans les lieux sans droit ni titre par suite du constat de la résiliation du bail constitue un trouble manifestement illicite qu'il appartient au juge des référés de faire cesser.
Au cas présent, il est acquis que le commandement délivré reproduit la clause résolutoire du bail et rappelle les articles L.145-41 et L.145-17 du code de commerce et que les cause de celui-ci n'ont pas été réglées dans le délai d'un mois que sa délivrance faisait courir.
Pour obtenir l'infirmation de la décision et l'annulation du commandement, la société preneuse fait d'abord valoir que cet acte n'a pas été délivré de bonne foi dans la mesure où le bailleur a cherché à profiter des travaux en façade pour l'empêcher d'exploiter son établissement, la conduire à l'épuisement financier pour, in fine, constater l'acquisition de la clause résolutoire et récupérer les locaux.
Si, pour être régulier, le commandement de payer doit être délivré de bonne foi, il n'appartient pas au juge des référés d'annuler un acte de sorte que cette demande, qui excède ses pouvoirs, sera déclarée irrecevable.
Le moyen tiré de la délivrance déloyale du commandement doit en revanche être examiné au titre de la démonstration d'une éventuelle contestation sérieuse.
Or, la société Sinergie, qui en a la charge, ne démontre pas la mauvaise foi alléguée. En effet, ce commandement est intervenu après trois mensualités restées impayées et la société preneuse n'apporte aucun élément au soutien de ses affirmations selon lesquelles les travaux de ravalement engagés, dont elle ne conteste pas l'utilité, l'auraient été, en réalité, dans la seule perspective de la priver de ressources en limitant son activité pour obtenir par suite son expulsion.
La société Sinergie soutient ensuite implicitement qu'elle peut se prévaloir d'une exception d'inexécution puisque son bailleur a manqué à son obligation de délivrance en raison des travaux de ravalement qu'il a menés d'avril 2023 à février 2024 et qui ont empêché l'exploitation des locaux du fait d'un accès entravé au commerce et d'une absence de sortie de secours.
Cependant un locataire ne peut pas invoquer utilement une exception d'inexécution pour suspendre le paiement des loyers si le manquement invoqué n'a pas rendu les locaux loués impropres à l'usage auquel ils étaient destinés.
Dès lors, les développements du preneur sur la dégradation de l'aspect extérieur des lieux du fait des travaux, sont inopérants, cette dégradation n'étant pas de nature à les rendre impropres à leur destination.
Par ailleurs, le bailleur démontre suffisamment qu'il a pris en compte la position du commerce et son fonctionnement et qu'il s'est entretenu avec l'exploitant de sa coexistence avec les conditions du chantier. Il produit en outre un compte-rendu de réunion de chantier qui indique que le locataire n'a jamais formé de réclamation, que l'entrée principale est restée en activité et que le preneur a indiqué recevoir de la clientèle pendant les travaux.
Il démontre ensuite que la sortie de secours a été mise en conformité par ses soins alors que la précédente n'était pas réglementaire. Ensuite, la fermeture du sauna invoquée n'est pas suffisamment établie par les avis clients et les messages rédigés par une personne qui n'est pas le gérant. Enfin, même à supposer cette fermeture avérée, rien ne démontre qu'elle a été causée par les travaux de ravalement.
Il s'ensuit que les contestations invoquées ne présentent pas de caractère sérieux.
Il convient dès lors de confirmer la décision sur le constat de l'acquisition de la clause résolutoire le 19 février 2024 ainsi que des chefs subséquents concernant l'expulsion et la condamnation de la société preneuse au paiement d'une indemnité d'occupation à compter de cette date.
Sur les demandes de provision
Aux termes de l'article 835, alinéa 2, du code de procédure civile, le président du tribunal judiciaire peut, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, accorder une provision au créancier.
Une contestation sérieuse survient lorsque l'un des moyens de défense opposé aux prétentions du demandeur n'apparaît pas immédiatement vain et laisse subsister un doute sur le sens de la décision au fond qui pourrait éventuellement intervenir par la suite sur ce point si les parties entendaient saisir les juges du fond.
S'il appartient au demandeur à une provision d'établir l'existence de la créance qu'il invoque, c'est au défendeur de prouver que cette créance est sérieusement contestable.
- sur la demande principale de provision
En application de l'article 1709 du code civil, le locataire est tenu au paiement des loyers.
L'obligation de payer de la société Sinergie n'étant pas sérieusement contestable, il convient de confirmer la condamnation provisionnelle au titre de la dette locative mais ce sans qu'il y ait lieu à actualisation de celle-ci par infirmation de l'ordonnance, la société CDC Habitat disposant d'ores et déjà d'un titre exécutoire du fait de la condamnation confirmée au paiement d'une indemnité d'occupation.
- sur les demandes reconventionnelles de la société Sinergie
L'article 1724 du code civil prévoit que :
'Si, durant le bail, la chose louée a besoin de réparations urgentes et qui ne puissent être différées jusqu'à sa fin, le preneur doit les souffrir, quelque incommodité qu'elles lui causent, et quoiqu'il soit privé, pendant qu'elles se font, d'une partie de la chose louée.
Mais, si ces réparations durent plus de vingt et un jours, le prix du bail sera diminué à proportion du temps et de la partie de la chose louée dont il aura été privé.
Si les réparations sont de telle nature qu'elles rendent inhabitable ce qui est nécessaire au logement du preneur et de sa famille, celui-ci pourra faire résilier le bail'.
Ces dispositions n'étant pas d'ordre public, les parties peuvent y déroger et convenir d'une clause dite de souffrance aux termes de laquelle le preneur doit supporter les travaux quelle qu'en soit la durée.
Cependant, le bailleur ne peut, par une telle clause, s'exonérer de toute responsabilité du fait de l'exécution de travaux lorsqu'une gêne excessive et durable est causée au preneur.
Au cas présent, alors que l'article 8 du bail stipule que le preneur est tenu de souffrir les travaux qu'elles qu'en soient l'importance et la durée, ce dernier ne démontre pas suffisamment que la gêne occasionnée par les travaux de ravalement aurait présenté un caractère excessif et durable de sorte qu'il n'y a lieu à référé ni sur sa demande de remboursement et de réduction du loyer à ce titre ni sur sa demande d'indemnisation provisionnelle.
La décision sera complétée de ces chefs.
Sur la demande de délais de paiement
En application de l'article 1343-5, le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues.
Au cas présent, la société Sinergie ne verse aux débats aucune pièce sur sa situation financière. En outre, elle s'abstient de tout paiement depuis octobre 2023 et ne démontre pas sa capacité de remboursement même échelonné.
Dès lors, la situation respective des parties ne justifie pas l'octroi de délais de paiement à la société preneuse et il convient de rejeter sa demande à ce titre.
Sur les demandes accessoires
La décision sera confirmée sur les dépens et les frais irrépétibles de première instance.
La société Sinergie supportera également les dépens de l'appel avec possibilité de recouvrement direct par le conseil de l'intimée, qui en fait la demande, en application de l'article 699 du code de procédure civile.
Elle sera en outre condamnée au paiement de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Dit la demande de jonction sans objet ;
Déclare irrecevable la demande d'annulation du commandement ;
Confirme l'ordonnance entreprise en ses dispositions soumises à la cour ;
Y ajoutant,
Dit n'y a voir lieu à référé sur la demande d'actualisation de la dette locative ;
Dit n'y avoir lieu à référé sur les demandes reconventionnelles de la société Sinergie ;
Condamne la société Sinergie aux dépens de l'appel avec application de l'article 699 du code de procédure civile ;
Condamne la société Sinergie à payer à la société CDC Habitat la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 1 - Chambre 3
ARRÊT DU 10 JUILLET 2025
(n° 292 , 7 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 24/16945 - N° Portalis 35L7-V-B7I-CKE5J
Décision déférée à la cour : ordonnance du 09 août 2024 -président du TJ de [Localité 8] - RG n° 24/52601
APPELANTE
S.A.R.L. SINERGIE, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 2]
[Localité 7]
Représentée par Me Caroline PIPARD de la SELEURL PIPARD, avocat au barreau de PARIS, toque : C0177
INTIMÉE
Société CDC HABITAT, RCS de [Localité 8] n°470801168, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 5]
[Localité 6]
Représentée par Me Isabelle PRUD'HOMME, avocat au barreau de PARIS, toque : D0510
Ayant pour avocat plaidant Me Christophe SOVRAN-CIBIN de la SELARL SOVRAN-CIBIN, avocat au barreau de VERSAILLES
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 27 mai 2025, en audience publique, rapport ayant été fait par Anne-Gaël BLANC, conseillère, conformément aux articles 804, 805 et 906 du CPC, les avocats ne s'y étant pas opposés.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Michel RISPE, président de chambre
Anne-Gaël BLANC, conseillère
Valérie GEORGET, conseillère
Greffier lors des débats : Caroline GAUTIER
ARRÊT :
- CONTRADICTOIRE
- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Michel RISPE, président de chambre et par Jeanne PAMBO, greffier, présent lors de la mise à disposition.
Par acte sous seing privé du 1er avril 2012, la société CDC Habitat, a donné à bail à la société Sinergie, des locaux à usage commercial dépendant d'un immeuble situé [Adresse 4] à [Adresse 9] [Localité 1], moyennant le paiement d'un loyer mensuel de 26 500 euros, hors taxes hors charges, pour une activité de 'sauna, soins esthétiques et corporels, salle de gymnastique et professions annexes'.
Un commandement de payer a été délivré au preneur, par acte de commissaire de justice du 18 janvier 2024, pour une somme de 12 804,70 euros en principal, au titre de l'arriéré locatif arrêté au 17 janvier 2024, échéance de janvier 2024 incluse.
Par acte du 4 avril 2024, la société CDC Habitat a assigné la société Sinergie devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Paris aux fins de :
constatation de l'acquisition de la clause résolutoire,
expulsion et condamnation au paiement de provisions à hauteur de 16 894,82 euros au titre de l'arriéré de loyers, taxes et charges arrêtés au 22 mars 2024, mois de mars 2024 inclus,
fixation de l'indemnité d'occupation due par la société Sinergie au montant mensuel du loyer majoré des taxes et charges à compter du 19 février 2024 et jusqu'à complète libération des lieux et remise des clefs,
condamnation au paiement de la somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
Par ordonnance réputée contradictoire du 9 août 2024, le juge des référés a :
constaté l'acquisition de la clause résolutoire et la résiliation de plein droit du bail liant les parties à la date du 19 février 2024,
ordonné l'expulsion de la société Sinergie et de tous occupants de son chef des locaux donnés à bail situés [Adresse 3] à [Localité 10] avec, le cas échéant, le concours d'un serrurier et de la force publique,
rappelé que le sort des meubles et objets mobiliers se trouvant sur place est régi par les dispositions des articles L.433-1 et R.433-1 du code des procédures civiles d'exécution,
condamné la société Sinergie à payer à la société CDC Habitat une indemnité d'occupation mensuelle à titre provisionnel, égale au montant du loyer contractuel, augmenté des charges et taxes, qui est due à compter du 19 février 2024 et jusqu'à libération effective des lieux et la remise des clés,
condamné la société Sinergie à payer, à titre de provision, à la société CDC Habitat la somme de 16 894,82 euros à valoir sur l'arriéré de loyers et charges et indemnités d'occupation dus, mois de mars 2024 inclus,
condamné la société Sinergie à payer à la société CDC Habitat une somme de 1 200 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
condamné la société Sinergie aux dépens.
Par déclaration du 2 octobre 2024, la société Sinergie a relevé appel de cette décision sous le numéro de RG 24/16945 en critiquant l'ensemble des chefs du dispositif.
Un autre appel a été formé à la même date sous le numéro 24/16958.
Par ordonnance du 20 mars 2025, ces deux appels ont été joints.
Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 20 décembre 2024, la société Sinergie demande à la cour de :
infirmer l'ordonnance rendue en ce qu'elle a :
'constaté l'acquisition de la clause résolutoire et la résiliation de plein droit du bail liant les parties à la date du 19 février 2024,
ordonné l'expulsion de la société Sinergie et de tous occupants de son chef des locaux donnés à bail situés [Adresse 3] à [Localité 10], avec le cas échéant le concours d'un serrurier et de la force publique,
rappelé que le sort des meubles et objets mobiliers se trouvant sur place est régi par les dispositions des articles L. 433-1 et R 433-1 du code de procédure civile d'exécution,
condamné la société Sinergie à payer à la société CDC Habitat une indemnité d'occupation mensuelle, à titre provisionnel, égale au montant du loyer contractuel, augmenté des charges et taxes, qui est due à compter du 19 février 2024 et jusqu'à la libération effective des lieux et la remise des clés,
condamné société Sinergie à payer, à titre de provision, à la société CDC Habitat la somme de 16.894,82 euros à valoir sur l'arriéré de loyers et charges et indemnités d'occupation dus, mois de mars 2024 inclus,
condamné la société Sinergie à payer la somme de 1.200 euros à la société CDC Habitat sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
condamné la société Sinergie aux dépens.'
rejeter les demandes de la société CDC Habitat,
juger recevable la société Sinergie en son appel ainsi qu'en toutes ses demandes reconventionnelles et l'en déclarer bien fondée,
en conséquence et statuant à nouveau :
ordonner la jonction des deux instances d'appel, enregistrées devant le pôle 1 chambre 3 (RG : 24/16945) et devant le pôle 1 chambre 8 (RG : 24/16958),
à titre principal :
prononcer la nullité du commandement de payer du 18 janvier 2024 pour inexécution de bonne foi du bail par la société CDC Habitat,
en conséquence :
condamner la société CDC Habitat à verser à la société Sinergie la somme provisionnelle de 40 010, 92 euros, correspondant aux loyers perçus pendant la durée des travaux, d'avril 2023 à février 2024,
condamner la société CDC Habitat à minorer le loyer et les charges mensuelles à hauteur de 50 % avec effet rétroactif au 1er février 2024, jusqu'à la reprise intégrale par la société CDC habitat des finitions au niveau de l'entrée du King sauna et la réinstallation à l'identique des plantations extérieures aux abords de son entrée,
condamner la société CDC Habitat à verser à la société Sinergie la somme provisionnelle de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour le préjudice économique, organisationnel et moral subi,
ordonner la compensation entre les condamnations prononcées à l'encontre de chacune des parties s'il y a lieu, avec effet rétroactif à la date du premier impayé de loyer fin 2023, tel que visé par le commandement de payer,
à titre subsidiaire :
constater la contestation sérieuse soulevée par la société Sinergie,
renvoyer les parties devant le juge du fond,
à titre très subsidiaire :
octroyer à la société Sinergie des délais de paiement aux fins d'apurement de la dette de loyer sur une période de deux ans, avec effet rétroactif à la date du premier loyer impayé en 2023, tel que visé par le commandement de payer, selon les modalités suivantes :
versement de la société Sinergie à la société CDC Habitat de 50 euros par mois jusqu'à l'accomplissement par la société CDC Habitat des finitions au niveau de l'entrée du King sauna et le remplacement de l'intégralité des plantes exotiques qui se trouvaient à l'extérieur près de l'entrée avant les travaux en façade,
à compter de l'accomplissement par la société CDC habitat des finitions au niveau de l'entrée du King sauna et du remplacement de l'intégralité des plantes exotiques susvisées, versement de la société Sinergie à la société CDC habitat d'une somme supplémentaire à définir sans qu'elle vienne pénaliser financièrement la reprise de l'activité du King sauna,
versement du solde de la dette le 24ème mois, sous réserve de l'accomplissement par la société CDC habitat des finitions au niveau de l'entrée du King sauna et du remplacement de l'intégralité des plantes exotiques susvisées,
les paiements s'imputeront d'abord sur le capital,
en tout état de cause :
condamner la société CDC Habitat à verser à la société Sinergie la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
condamner la société CDC Habitat aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Par ses dernières conclusions remises et notifiées le 18 février 2025, la société CDC Habitat demande à la cour de :
déclarer la société Sinergie entièrement mal fondée en son appel,
la débouter en conséquence de l'intégralité de ses prétentions,
réformer la décision entreprise quant au montant de la provision allouée à la société CDC habitat, et statuant à nouveau de ce chef :
condamner la société Sinergie à lui payer la somme provisionnelle de 58 447,92 euros représentant les loyers, charges et indemnités d'occupation dus à la date du 13 décembre 2024 (décembre 2024 inclus),
confirmer l'ordonnance déférée en toutes ses autres dispositions,
et y ajoutant, condamner la société Sinergie à payer à la société CDC habitat la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
condamner enfin l'appelante aux entiers dépens de première instance et d'appel avec application de l'article 699 du code de procédure civile.
La clôture a été ordonnée le 22 mai 2025.
Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties susvisées pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.
Sur ce,
Sur la jonction
La jonction entre les procédures enregistrées sous les numéros de RG 24/16945 et 24/16958 ayant déjà été ordonnée, la demande à ce titre est sans objet.
Sur l'acquisition de la clause résolutoire
Aux termes de l'article 835 du code de procédure civile, le président du tribunal judiciaire peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite ; dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, il peut accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.
L'article L.145-41 du code de commerce dispose que toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu'un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai.
Les juges saisis d'une demande présentée dans les formes et conditions prévues à l'article 1343-5 du code civil peuvent, en accordant des délais, suspendre la réalisation et les effets des clauses de résiliation, lorsque la résiliation n'est pas constatée ou prononcée par une décision de justice ayant acquis l'autorité de la chose jugée. La clause résolutoire ne joue pas, si le locataire se libère dans les conditions fixées par le juge.
En application de ces textes, il entre dans les pouvoirs du juge des référés, même en l'absence d'urgence, de constater la résiliation de plein droit d'un contrat de bail commercial en application d'une clause résolutoire lorsque celle-ci est mise en oeuvre régulièrement, en l'absence de toute contestation sérieuse de la validité de cette clause, et, par suite, d'ordonner l'expulsion de l'occupant, dont l'obligation de libérer les lieux n'est pas sérieusement contestable. En outre, le maintien de l'occupant dans les lieux sans droit ni titre par suite du constat de la résiliation du bail constitue un trouble manifestement illicite qu'il appartient au juge des référés de faire cesser.
Au cas présent, il est acquis que le commandement délivré reproduit la clause résolutoire du bail et rappelle les articles L.145-41 et L.145-17 du code de commerce et que les cause de celui-ci n'ont pas été réglées dans le délai d'un mois que sa délivrance faisait courir.
Pour obtenir l'infirmation de la décision et l'annulation du commandement, la société preneuse fait d'abord valoir que cet acte n'a pas été délivré de bonne foi dans la mesure où le bailleur a cherché à profiter des travaux en façade pour l'empêcher d'exploiter son établissement, la conduire à l'épuisement financier pour, in fine, constater l'acquisition de la clause résolutoire et récupérer les locaux.
Si, pour être régulier, le commandement de payer doit être délivré de bonne foi, il n'appartient pas au juge des référés d'annuler un acte de sorte que cette demande, qui excède ses pouvoirs, sera déclarée irrecevable.
Le moyen tiré de la délivrance déloyale du commandement doit en revanche être examiné au titre de la démonstration d'une éventuelle contestation sérieuse.
Or, la société Sinergie, qui en a la charge, ne démontre pas la mauvaise foi alléguée. En effet, ce commandement est intervenu après trois mensualités restées impayées et la société preneuse n'apporte aucun élément au soutien de ses affirmations selon lesquelles les travaux de ravalement engagés, dont elle ne conteste pas l'utilité, l'auraient été, en réalité, dans la seule perspective de la priver de ressources en limitant son activité pour obtenir par suite son expulsion.
La société Sinergie soutient ensuite implicitement qu'elle peut se prévaloir d'une exception d'inexécution puisque son bailleur a manqué à son obligation de délivrance en raison des travaux de ravalement qu'il a menés d'avril 2023 à février 2024 et qui ont empêché l'exploitation des locaux du fait d'un accès entravé au commerce et d'une absence de sortie de secours.
Cependant un locataire ne peut pas invoquer utilement une exception d'inexécution pour suspendre le paiement des loyers si le manquement invoqué n'a pas rendu les locaux loués impropres à l'usage auquel ils étaient destinés.
Dès lors, les développements du preneur sur la dégradation de l'aspect extérieur des lieux du fait des travaux, sont inopérants, cette dégradation n'étant pas de nature à les rendre impropres à leur destination.
Par ailleurs, le bailleur démontre suffisamment qu'il a pris en compte la position du commerce et son fonctionnement et qu'il s'est entretenu avec l'exploitant de sa coexistence avec les conditions du chantier. Il produit en outre un compte-rendu de réunion de chantier qui indique que le locataire n'a jamais formé de réclamation, que l'entrée principale est restée en activité et que le preneur a indiqué recevoir de la clientèle pendant les travaux.
Il démontre ensuite que la sortie de secours a été mise en conformité par ses soins alors que la précédente n'était pas réglementaire. Ensuite, la fermeture du sauna invoquée n'est pas suffisamment établie par les avis clients et les messages rédigés par une personne qui n'est pas le gérant. Enfin, même à supposer cette fermeture avérée, rien ne démontre qu'elle a été causée par les travaux de ravalement.
Il s'ensuit que les contestations invoquées ne présentent pas de caractère sérieux.
Il convient dès lors de confirmer la décision sur le constat de l'acquisition de la clause résolutoire le 19 février 2024 ainsi que des chefs subséquents concernant l'expulsion et la condamnation de la société preneuse au paiement d'une indemnité d'occupation à compter de cette date.
Sur les demandes de provision
Aux termes de l'article 835, alinéa 2, du code de procédure civile, le président du tribunal judiciaire peut, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, accorder une provision au créancier.
Une contestation sérieuse survient lorsque l'un des moyens de défense opposé aux prétentions du demandeur n'apparaît pas immédiatement vain et laisse subsister un doute sur le sens de la décision au fond qui pourrait éventuellement intervenir par la suite sur ce point si les parties entendaient saisir les juges du fond.
S'il appartient au demandeur à une provision d'établir l'existence de la créance qu'il invoque, c'est au défendeur de prouver que cette créance est sérieusement contestable.
- sur la demande principale de provision
En application de l'article 1709 du code civil, le locataire est tenu au paiement des loyers.
L'obligation de payer de la société Sinergie n'étant pas sérieusement contestable, il convient de confirmer la condamnation provisionnelle au titre de la dette locative mais ce sans qu'il y ait lieu à actualisation de celle-ci par infirmation de l'ordonnance, la société CDC Habitat disposant d'ores et déjà d'un titre exécutoire du fait de la condamnation confirmée au paiement d'une indemnité d'occupation.
- sur les demandes reconventionnelles de la société Sinergie
L'article 1724 du code civil prévoit que :
'Si, durant le bail, la chose louée a besoin de réparations urgentes et qui ne puissent être différées jusqu'à sa fin, le preneur doit les souffrir, quelque incommodité qu'elles lui causent, et quoiqu'il soit privé, pendant qu'elles se font, d'une partie de la chose louée.
Mais, si ces réparations durent plus de vingt et un jours, le prix du bail sera diminué à proportion du temps et de la partie de la chose louée dont il aura été privé.
Si les réparations sont de telle nature qu'elles rendent inhabitable ce qui est nécessaire au logement du preneur et de sa famille, celui-ci pourra faire résilier le bail'.
Ces dispositions n'étant pas d'ordre public, les parties peuvent y déroger et convenir d'une clause dite de souffrance aux termes de laquelle le preneur doit supporter les travaux quelle qu'en soit la durée.
Cependant, le bailleur ne peut, par une telle clause, s'exonérer de toute responsabilité du fait de l'exécution de travaux lorsqu'une gêne excessive et durable est causée au preneur.
Au cas présent, alors que l'article 8 du bail stipule que le preneur est tenu de souffrir les travaux qu'elles qu'en soient l'importance et la durée, ce dernier ne démontre pas suffisamment que la gêne occasionnée par les travaux de ravalement aurait présenté un caractère excessif et durable de sorte qu'il n'y a lieu à référé ni sur sa demande de remboursement et de réduction du loyer à ce titre ni sur sa demande d'indemnisation provisionnelle.
La décision sera complétée de ces chefs.
Sur la demande de délais de paiement
En application de l'article 1343-5, le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues.
Au cas présent, la société Sinergie ne verse aux débats aucune pièce sur sa situation financière. En outre, elle s'abstient de tout paiement depuis octobre 2023 et ne démontre pas sa capacité de remboursement même échelonné.
Dès lors, la situation respective des parties ne justifie pas l'octroi de délais de paiement à la société preneuse et il convient de rejeter sa demande à ce titre.
Sur les demandes accessoires
La décision sera confirmée sur les dépens et les frais irrépétibles de première instance.
La société Sinergie supportera également les dépens de l'appel avec possibilité de recouvrement direct par le conseil de l'intimée, qui en fait la demande, en application de l'article 699 du code de procédure civile.
Elle sera en outre condamnée au paiement de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Dit la demande de jonction sans objet ;
Déclare irrecevable la demande d'annulation du commandement ;
Confirme l'ordonnance entreprise en ses dispositions soumises à la cour ;
Y ajoutant,
Dit n'y a voir lieu à référé sur la demande d'actualisation de la dette locative ;
Dit n'y avoir lieu à référé sur les demandes reconventionnelles de la société Sinergie ;
Condamne la société Sinergie aux dépens de l'appel avec application de l'article 699 du code de procédure civile ;
Condamne la société Sinergie à payer à la société CDC Habitat la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT