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Décisions

CA Nîmes, 1re ch., 10 juillet 2025, n° 24/01302

NÎMES

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

X

Défendeur :

CA Consumer Finance (SA), Epilogue (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Defarge

Conseillers :

Mme Berger, Mme Gentilini

Avocats :

Me Benezech, Me Vignon, Me Boulaire, Me Goncalves

Juge des contentieux de la protection Lo…

6 février 2024

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Le 17 novembre 2016, M. [O] [V] a signé dans le cadre d'un démarchage à domicile, un bon de commande auprès la société Ilios Confort pour la vente et la pose d'une installation photovoltaïque et d'une pompe à chaleur.

Il a solidairement avec son épouse [P] née [V] financé cette opération au moyen d'un crédit affecté souscrit auprès de la société CA Consumer Finance (marque Sofinco), suivant offre préalable acceptée le 17 novembre 2016, d'un montant initial de 34 700 euros au taux annuel fixe de 3,838 %.

Par actes du 17 et 20 juin 2022, M. et Mme [V] ont assigné les sociétés Ilios Confort et CA Consumer Finance en nullité du contrat de vente principal et du contrat de crédit affecté, déchéance du prêteur de son droit à restitution et en indemnisation de leur préjudice moral devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Nîmes qui par jugement contradictoire du 6 février 2024 :

- a jugé leur action irrecevable,

- a dit que chacune des parties conservera la charge des dépens par elle engagés,

- les a déboutées de leurs demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

M. [O] [V] et son épouse [P] née [V] ont interjeté appel de ce jugement par déclaration du 11 avril 2024.

La société Ilios Confort a été placée en liquidation judiciaire et la société Epilogue, prise en la personne de Me [Z] [B] désignée en qualité de mandataire liquidateur.

Par ordonnance du 10 janvier 2025, la procédure a été clôturée le 19 mai 2025 et l'affaire fixée à l'audience du 02 juin 2025 à laquelle elle a été mise en délibéré au 10 juillet 2025.

EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS ET DES MOYENS

Au terme de leurs dernières conclusions régulièrement notifiées le 17 juillet 2024, les appelants demandent à la cour

- d'infirmer le jugement en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau

- de déclarer leurs demandes recevables et bien fondées,

- de prononcer la nullité du contrat de vente conclu entre eux et la société Ilios Confort et de dire qu'à défaut de reprise (de l'installation photovoltaïque) dans un délai déterminé, celle-ci leur demeurera acquise et qu'ils pourront alors en disposer librement,

- de mettre à la charge de la liquidation judiciaire de la société Ilios Confort le retrait de l'installation et la remise en état de l'immeuble,

- de prononcer la nullité du contrat de prêt affecté conclu entre eux et la société CA Consumer Finance,

- de juger que cette société a commis une faute dans le déblocage des fonds à leur préjudice devant entraîner la privation de sa créance de restitution,

- de la condamner à leur verser au titre des fautes commises les sommes de

- 34 700 euros correspondant au montant du capital emprunté, en raison de la privation de sa créance de restitution,

- 9 624,16 euros correspondant aux intérêts conventionnels et frais payés en exécution du prêt souscrit,

- 5 000 euros au titre du préjudice moral,

- 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

En tout état de cause

- de prononcer la déchéance de la société CA Consumer Finance de son droit aux intérêts contractuels,

- de la condamner à leur rembourser l'ensemble des intérêts versés au titre de l'exécution normale du contrat de prêt jusqu'à parfait paiement et lui enjoindre de produire un nouveau tableau d'amortissement expurgés desdits intérêts,

- de débouter les sociétés CA Consumer Finance et Ilios Confort de l'intégralité de leurs prétentions, fins et conclusions plus amples ou contraires aux présentes,

- de les condamner solidairement à supporter les entiers frais et dépens de l'instance.

Au terme de ses dernières conclusions régulièrement notifiées le 9 octobre 2024, la société CA Consumer Finance demande à la cour

- de confirmer le jugement en toutes ses dispositions,

Y ajoutant

A titre principal

- de débouter les appelants de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

- de les condamner solidairement à lui payer la somme de 34 700 euros (capital déduction à faire des règlements),

- de fixer au passif de la société Ilios Confort, prise en la personne de son mandataire liquidateur la somme de 6 292,96 euros au titre des intérêts perdus,

A titre subsidiaire

- de débouter les appelants de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

- de les condamner solidairement au paiement de la somme de 40 992,96 euros à titre de dommages et intérêts,

- de fixer au passif de la société Ilios Confort, prise en la personne de son mandataire liquidateur la somme de 40 992,96 euros au titre du capital et des intérêts perdus,

En tout état de cause

- de débouter les appelants de l'ensemble de leurs demandes, fins, moyens et conclusions,

- de les condamner solidairement à lui payer une somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- de les condamner aux entiers dépens.

La déclaration d'appel a été régulièrement signifiée à la société Epilogue, prise en la personne de Me [Z] [B], en sa qualité de mandataire liquidateur société Ilios Confort, par acte du 27 mai 2024.

Il est expressément fait renvoi aux dernières écritures des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens conformément aux dispositions des articles 455 et 954 du code de procédure civile.

MOTIVATION

* recevabilité de l'action en nullité du contrat principal de vente

Pour déclarer cette action irrecevable sur le fondement du droit de la consommation le premier juge a relevé que les défauts allégués du bon de commande étaient apparents dès la signature du contrat le 17 novembre 2016, et que dès cette date les demandeurs étaient en mesure de vérifier si les irrégularités dont ils se plaignaient avaient été commises.

Pour la déclarer irrecevable sur le fondement du dol il a fixé le point de départ de son délai de prescription au 16 juin 2017, 'en admettant qu'un délai de six mois soit nécessaire pour évaluer le rendement de l'installation'.

Les appelants soutiennent

- que le point de départ du délai de prescription d'une action personnelle et mobilière comme en l'espèce n'est pas fixé au jour des faits susceptibles de la fonder mais au jour où ils les ont connus ou auraient du les connaître ;

- qu'ils ont légitimement ignoré les faits leur permettant d'agir, leur attention n'ayant été attirée à cet égard que lorsqu'ils ont saisi un avocat;

- que la seule reproduction des dispositions applicables dans le contrat de vente ne caractérise pas une connaissance par le consommateur profane comme eux des irrégularités qui l'affectent ;

- que dès lors aucune prescription ne peut leur être opposée.

Ils soutiennent que le bon de commande est nul pour violation des dispositions impératives du code de la consommation et que l'ensemble des informations obligatoires prévues par le code de la consommation ne leur ayant pas été communiquées, il en ressort une omission dolosive dès lors qu'ils n'étaient pas pleinement renseignés sur les caractéristiques essentielles du matériel vendu et que s'agissant d'une installation complexe le vendeur devait leur communiquer l'ensemble des éléments de sa productivité afin de leur permettre d'avoir conscience le cas échéant de son défaut de rentabilité ce qu'il n'a pas fait.

L'intimée relève que les contrats de vente et de crédit ont été signés plus de 5 ans avant l'assignation.

Elle soutient que le bon de commande précise les caractéristiques essentielles de la centrale photovoltaïque vendue, que les modalités d'exécution de la prestation de service s'agissant du délai de raccordement ne pouvaient pas être mentionné, comme indépendantes de la volonté du vendeur, que le bordereau de rétractation respecte la loi et que l'erreur sur la rentabilité n'est pas constitutive d'un vice du consentement.

Elle soutient reconventionnellement que les appelants qui ont signé le bon de commande et pris connaissances de conditions générales de vente figurant au dos reproduisant les dispositions du code de la consommation rappelant les mentions obligatoires devant y figurer à peine de nullité, ont eu connaissance de toute éventuelle non-conformité à ce code dès la signature du contrat ; que non seulement ils n'ont pas fait usage de leur droit de rétractation mais ont signé l'attestation de fin de travaux sans formuler aucun grief ni réserve, ordonné le déblocage des fonds pour financer l'opération et remboursé régulièrement les mensualités de leur prêt ; qu'ils ont donc exécuté volontairement le contrat principal dont ils ne peuvent plus demander l'annulation, à supposer que leur action ne soit pas prescrite à cet égard.

Aux termes de l'article 2224 du code civil en vigueur depuis le 19 juin 2008 ici applicable, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

Le point de départ du délai de prescription doit ici être fixé pour chacune des actions en nullité exercées.

**recevabilité de l'action en nullité du contrat de vente pour violation du droit de la consommation

Selon l'article L111-1 du code de la consommation en vigueur du 01 juillet 2016 au 12 février 2020 ici applicable, avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel lui communique, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :

1° Les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné ;

2° Le prix du bien ou du service, en application des articles L. 112-1 à L. 112-4 ;

3° En l'absence d'exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s'engage à livrer le bien ou à exécuter le service ;

4° (...) ;

5°(...)

6° La possibilité de recourir à un médiateur de la consommation dans les conditions prévues au titre Ier du livre VI.

La liste et le contenu précis de ces informations sont fixés par décret en Conseil d'Etat.(...)

En l'espèce M. [O] [V] a signé le 17 novembre 2016 auprès de la Sarl Ilios Confort

- un bon de commande n°034684 portant sur

- un kit photovoltaïque autoconsommation soit 6 panneaux et 6 micro-onduleurs garantis 20 ans fabricant au prix de 10000 euros TTC dont 10% de TVA

- l'isolation des combles (50m²) au prix de 3 000 euros TTC dont 5,5% de TVA

- un gestionnaire d'énergie ComWatt Easy au prix de 6 500 euros TTC

- 14 micro-onduleurs (illisible) garantis fabricant 25 ans au prix de 11 700 euros TTC dont 10% de TVA

- 1 pompe à chaleur 3,4 kW en unité murale avec un groupe extérieur (PAC air/air ) garanti 5 ans au prix de 3 500 euros TTC dont 20% de TVA

soit au total 34 700 euros TTC.

- ainsi qu'un bon de commande n°034683 de 0 euros pour la prestation suivante :

- greffer deux panneaux des 6 (voir bon n° 034684) sur installation actuelle,

- remise de deux chèques de 7 500 euros chacun soit 15 000 euros en tout après installation du bon de commande n°34694 (sic) l'un à 90 jours et l'autre à 160 jours,

- reprise de garantie fabricants,

- faire un devis pour assurance (étanchéité).

Au bon de commande principal figure la case cochée par le client 'je reconnais avoir pris connaissance des conditions générales de vente figurant au verso de ce bon de commande, dont j'ai reçu un exemplaire'.

***sur l'absence alléguée des caractéristiques essentielles des biens ou du service vendus

Les mentions reprises ci-dessus du bon de commande décrivant

- un kit photovoltaïque autoconsommation soit 6 panneaux et 6 micro-onduleurs garantis 20 ans fabricant,

- un gestionnaire d'énergie ComWatt Easy,

- 14 micro-onduleurs (marque ' illisible) garantis fabricant 25 ans,

- 1 pompe à chaleur 3,4 kW en unité murale avec un groupe extérieur (PAC air/air ) garanti 5 ans,

ne peuvent être considérées comme conformes aux dispositions précitées, la marque des panneaux et des micro-onduleurs principaux ni celle du groupe extérieur n'y étant précisées et celle du micro-onduleur isolé étant illisible.

Le bon de commande encourt donc la nullité de ce chef.

***sur l'insuffisance alléguée des mentions relatives au prix

En revanche le bon de commande détaille le prix de chaque équipement de l'installation ainsi que le taux de TVA applicable et aucune nullité n'est encourue de ce chef.

***sur l'absence alléguée de date ou de délai auquel le professionnel s'engage à livrer le bien ou à exécuter le service

Les conditions générales de vente dont le client a reconnu avoir pris connaissance et reçu copie mentionnent Article 5 : 'Livraison-Délais : Les livraisons ne sont opérées qu'en fonction des disponibilités et dans l'ordre d'arrivée des commandes. Les délais de livrasions sont indiqués aussi exactement que possible mais sont fonction des possibilités d'approvisionnement du vendeur. Les dépassements de délai de livraion ne peuvent donner lieu à dommages et intérêt, ni à retenue ni à annulation des commandes en cours. Toutefois si six moi après la date indicative du délai de livraions et après une mise en demeure restant infructueuse de notre fournisseur le matériel n'est toujours pas livré la vente pourra alors être résolue à la demande de l'une ou l'autre des parties. (...)'.

Le bon de commande comporte une ligne 'Délai de livraison et d'installation : au plus tard 90 jours après la réalisation de la dernière condition suspensive (prêt, autorisations administratives).'

Contrairement à ce que soutiennent les appelants, ce délai indicatif, dont le point de départ ne dépendait pas de la seule volonté du vendeur suffit ici à considérer l'obligation à cet égard remplie.

Le bon de commande n'encourt donc pas la nullité de ce chef.

***sur le caractère erroné allégué des dispositions du code de la consommation reproduites dans les conditions générales de vente

Les appelants se contentent dans leurs écritures de relever que 'les conditions générales de vente du bon de commande ne sont pas conformes aux dispositins obligatoires en matière de démarchage à domicile et ne reprennent pas les articles issus de l'ordonnance du 10 février 2016 ou des textes applicables'

Mais ni l'article L111-1 ni l'article R111-1 du code de la consommation invoqués ne comportent l'obligation pour le vendeur de reproduite telle ou telle disposition de ce code.

Ce moyen est donc écarté.

***sur le non-respect des dispositions relatives au droit de rétractation

Les appelants soutiennent que les conditions générales de vente reproduisent à cet égard des articles erronés du code de la consommation, et que le bordereau de rétractation d'ailleurs intitulé 'annulation de la commande' mentionne de manière erronnée l'article L 121-21 du code de la consommation.

L'intimée réplique qu'en cas d'information erronée s'agissant du bon de commande, la sanction serait l'application d'un délai de 12 mois supplémentaire à l'expiration du délai initial de sorte que le grief est inopérant.

Le formulaire détachable figurant au bas des conditions générales de vente est ainsi rédigé : 'Si vous annulez la commande, vous pouvez utiliser le formulaire détachable ci-dessous :

Annulation de commande - code de la consommation ART L 121-23 à L 121-26 L'expédier au plus tard le quinzième jour à partir du jour de la commande ou, si ce délai expire normalement un samedi ou un dimanche ou un jour férié, le premier jour ouvrable suivant'.

Le bon de commande comporte aussi en page 1 la phrase : 'si vous annulez votre commande, vous pouvez utiliser le formulaire détachable qui se trouve au dos du présent document.

Art. L121-6 code de la consommation : Avant l'expiration du délai de réflextion prévu à l'article L.125-25 nul ne peut exiger ou obtenir du client directement ou indirectement à queqlue titre ni sous quelque forme que ce soit une contrepartie quelconque ni aucun engagement ni effectuer des prestations de services de quelque nature que ce soit ( voir au verso ainsi que les CGV)'

Selon les articles L221-5 et L221-20 du code de la consommation en vigueur du 01 juillet 2016 au 28 mai 2022 ici applicables, préalablement à la conclusion d'un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :

1° Les informations prévues aux articles L. 111-1 et L. 111-2 ;

2° Lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d'exercice de ce droit ainsi que le formulaire type de rétractation, dont les conditions de présentation et les mentions qu'il contient sont fixées par décret en Conseil d'Etat(...).

Lorsque les informations relatives au droit de rétractation n'ont pas été fournies au consommateur dans les conditions prévues au 2° de l'article L. 221-5, le délai de rétractation est prolongé de douze mois à compter de l'expiration du délai de rétractation initial, déterminé conformément à l'article L. 221-18.

Toutefois, lorsque la fourniture de ces informations intervient pendant cette prolongation, le délai de rétractation expire au terme d'une période de quatorze jours à compter du jour où le consommateur a reçu ces informations.

Il en résulte, comme le soutient l'intimée, que même si la référence dans le formulaire détachable aux articles L 121-23 à L 121-26 du code de la consommation, abrogés au 1er juillet 2016, était erronée, la sanction de ce manquement n'est pas de nature à entraîner la nullité du contrat mais seulement la prolongation de 12 mois du délai de rétractation du client.

Ce moyen de nullité est donc écarté.

Le bon de commande litigieux encourt donc la nullité pour défaut de mention des caractéristiques essentielles des biens et prestations vendus.

**confirmation de la nullité par les appelants

L'intimée soutient que non seulement les appelants n'ont pas fait usage de leur droit de rétractation mais ont au contraire signé une attestation de fin de travaux sans formuler aucun grief ni réserve, ordonné le déblocage des fonds pour financer l'opération et remboursé régulièrement les mensualités de leur prêt ; qu'ils ont donc exécuté volontairement le contrat principal dont ils ne peuvent plus demander l'annulation.

Les appelants soutiennent que les nullités encourues sont d'ordre public et non seulement relatives et comme telles insusceptibles d'être confirmées ; que si la cour considérait que tel était le cas, l'absence d'opposition à l'installation ou encore l'absence d'exercice de leur droit de rétractation, ni le fait qu'ils se soient acquittés de bonne foi des mensualités qui leur incombaient au titre du contrat de crédit ne caractérisent de leur part une volonté ferme et éclairée de couvrir les vices dont le contrat était affecté.

Si la Cour de cassation juge désormais que la reproduction même lisible des dispositions du code de la consommation prescrivant le formalisme applicable à un contrat conclu hors établissmeent ne permet pas au consommateur d'avoir une connaissance effective du vie résultant de l'inobservation de ces dispositions et de caractériser la conformation tacite du contrat, c'est en l'absence de circonstances qu'il appartient au juge de relever, permettant de justifier une telle connaissance.

Elle a ainsi validé la possibilité d'une confirmation de la nullité, qui est donc relative, du contrat de vente, pour violation des dispositions du code de la consommation prescrivant le formalisme applicable à un contrat conclu hors établissement.

La seule nullité retenue du bon de commande tient ici au défaut de précision des caractéristiques essentielles et techniques du matériel vendu objet de l'installation photovoltaïque litigieuse.

La société intimée verse seulement aux débats la copie de l'attestation de livraison 'du Kit PV Autoconso + Isolation des combles + gestionnaire d'energie + onduleurs + PAC air/air' signée le 16 décembre 2016 à l'exception de toute facture nécessairement émise par la société Ilios Confort détaillant plus précisément le matériel installé, sa puissance, sa ou ses marques.

Ce seul document ne suffit pas à démontrer la volonté des acquéreurs de couvrir en connaissance de cause la nullité dont le contrat est affecté.

Mais le défaut de précision relativement aux caractéristiques essentielles des biens objet du contrat était apparent dès le jour de la signature du contrat le 17 novembre 2016 de sorte que le délai de prescription de l'action en nullité du contrat à cet égard a couru à compter de cette date et que l'action exercée sur ce fondement est prescrite depuis le 17 novembre 2021.

Le jugement est donc confirmé de ce chef.

**recevabilité de l'action en nullité du contrat de vente pour dol

En jugeant qu' 'en admettant qu'un délai de six mois soit nécessaire pour évaluer le rendement de l'installation' le point de départ du délai de prescription de l'action en nullité du contrat de vente pour dol devait être fixé au 16 juin 2017 de sorte que l'action engagée les 17 et 20 juin 2022 était irrecevable, le premier juge a admis que le rendement de l'installation avait fait partie du champ contractuel.

L'intimée soutient que le dol ne se confond pas avec l'erreur, et qu'en tout état de cause seule l'erreur sur les qualités substantielles est susceptible de vicier le consentement ; que l'erreur sur la rentabilité n'est pas constitutive d'un vice du consentement et qu'aucune manoeuvre dolosive n'est ici établie.

Les appelants soutiennent que leur consentement a été vicié du fait

- qu'ils n'ont pas été pleinement renseignés sur les caractéristiques globales de l'installation (marque, modèles des panneaux, marques, modèles, nature de l'onduleur ou des micro-onduleurs)

- de l'imprécision du bon de commande quant aux délais et modalités d'exécution du contrat

- du manque de renseignement quant aux modalités de financement

- du caractère erroné des informations relatives au droit de rétractation

ce qui constitue autant de réticences dolosives de la part du vendeur.

Ils soutiennent ensuite que s'agissant d'une installation complexe le vendeur devait leur communiquer l'ensemble des éléments de productivité de l'installation afin de leur permettre d'avoir conscience le cas échéant du défaut de rentabilité de l'achat et de prendre ainsi sa décision en toute connaissance de cause ; que l'absence de simulation versée aux débats démontre qu'aucune étude de rentabilité n'a été effectuée par le commercial et aucune information délivrée quant au rendement attendu de leur installation ; que s'il était considéré que l'autofinancement n'était ( pas ) prévu au bon de commande, le vendeur devait leur donner les éléments d'information suffisants pour leur permettre d'apprécier la pertinence de leur achat, obligation qui n'est pas remplie en l'absence d'étude de faisabilité du projet ; que les performances promises ne sont pas atteintes puisque si leur installation permet des gains estimés à 2 129,58 euros par an soit 177,47 euros par mois, les échéances de leur crédit étaient de 461,71 euros assurance comprise de sorte qu'ils accusent une perte financière colossale et n'auraient jamais contracté s'ils avaient été réellement informés de la productivité attendue de leur installation.

Ils soutiennent encore que les conditions générales de vente relatives au fait que le contrat ne deviendra définitif que sous réserve de l'ensemble des accords administratifs et financiers ne leur ont permis d'apprendre le caractère définitif de celui-ci et les modalités de son financement qu'après écoulement de leur droit de rétractation

Aux termes des articles 1130 et suivants du code civil résultant de l'Ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 ici applicables, l'erreur, le dol et la violence vicient le consentement lorsqu'ils sont de telle nature que, sans eux, l'une des parties n'aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions substantiellement différentes.

Leur caractère déterminant s'apprécie eu égard aux personnes et aux circonstances dans lesquelles le consentement a été donné.

Les vices du consentement sont une cause de nullité relative du contrat.

L'erreur de droit ou de fait, à moins qu'elle ne soit inexcusable, est une cause de nullité du contrat lorsqu'elle porte sur les qualités essentielles de la prestation due ou sur celles du cocontractant.

Les qualités essentielles de la prestation sont celles qui ont été expressément ou tacitement convenues et en considération desquelles les parties ont contracté.

L'erreur est une cause de nullité qu'elle porte sur la prestation de l'une ou de l'autre partie.

L'erreur sur un simple motif, étranger aux qualités essentielles de la prestation due ou du cocontractant, n'est pas une cause de nullité, à moins que les parties n'en aient fait expressément un élément déterminant de leur consentement.

Le dol est le fait pour un contractant d'obtenir le consentement de l'autre par des man'uvres ou des mensonges.

Constitue également un dol la dissimulation intentionnelle par l'un des contractants d'une information dont il sait le caractère déterminant pour l'autre partie.

Il incombe aux appelants qui excipent ici d'un dol d'en démontrer l'existence.

Ce dol résulterait selon eux de la dissimulation intentionnelle par le vendeur d'une information relative au rendement ou à la rentabilité de l'installation photovoltaïque (les deux termes sont alternativement et indistinctement employés) dont il aurait su le caractère déterminant pour eux.

Toutefois, ils ne versent aux débats aucune pièce antérieure ou même concomittante à la signature du bon de commande susceptible de permettre à la cour de déterminer si la rentabilité ou même le rendement de l'installation commandée aurait eu ce caractère déterminant.

Le bon de commande signé le 17 novembre 2016 mentionne seulement 'autoconsommation' et la puissance (3,4 kW) de la pompe à chaleur commandée.

Le second bon de commande signé le même jour fait référence à une 'installation actuelle' sur laquelle 2 panneaux sur les 6 commandés devaient être greffés, et de la 'reprise des garanties fabricants' ce qui laisse supposer que l'installation commandée est venue en complément d'une installation de même nature équipant déjà le bâtiment.

L'offre de contrat de crédit affecté du 17 novembre 2016 mentionne de même 'photovoltaïque Autoconso' à l'exception d'aucune autre précision.

Les appelants qui échouent à démontrer que la rentabilité de l'installation commandée était entrée dans le champ contractuel ne peuvent exciper d'aucun dol du vendeur à cet égard.

Leur action sur ce fondement est donc également prescrite, le délai de prescription ayant commencé à courir non pas après un délai arbitrairement défini par le juge après la date de livraison des travaux, mais au jour de la conclusion du contrat.

Le jugement est donc confirmé par substitution de motifs sur ce point.

* demande de nullité du contrat de crédit affecté

La prescription de l'action en nullité du contrat principal de vente étant confirmée, aucune nullité subséquente du crédit de contrat affecté en application de l'article L312-55 du code de la consommation n'est encourue et cette demande est rejetée, par réparation de l'omission de statuer du premier juge sur ce point.

* responsabilité de la banque pour faute dans le déblocage des fonds

Les appelants soutiennent que les irrégularités présentées par le bon de commande auraient dû conduire l'intimée à ne pas se libérer des fonds entre les mains du vendeur avant de s'être assurée que ses clients étaient parfaitement informés de l'absence de validité du contrat principal ; qu'elle a ainsi manqué à son devoir d'obligation, de conseil et de mise en garde.

L'intimée excipe de son devoir de non-immixtion dans les affaires de ses clients ; elle soutient qu'il ne lui incombait pas de s'assurer de la conformité du bon de commande au code de la consommation, et que la signature par l'emprunteur de l'attestation de fin de travaux et sa demande de paiement ont manifesté son intention de couvrir une éventuelle nullité à cet égard.

C'est à juste titre qu'elle souligne que les appelants ne démontrent pas qu'elle a eu connaissance du bon de commande litigieux avant la souscription par eux de l'offre de crédit, les mentions de celle-ci relatives au bien financé étant directement remplies par l'intermédiaire/vendeur et s'y incorporant.

Elle verse aux débats l'attestation de travaux signée le 16 décembre 2016 par M. [V] qui ne conteste avoir signé ni le contrat de crédit ni cette attestation.

Enfin les appelants ne versent pas aux débats la facture qui a nécessairement dû leur être remise par la société Ilios Confort à la date de signature de cette attestation, qui aurait permis à la cour de vérifier quelles caractéristiques essentielles des biens acquis et installés y figuraient, et de les comparer avec celles figurant au bon de commande.

Aucun manquement de la banque à son obligation d'information et de conseil n'est donc établie.

Quant à l'obligation de mise en garde, elle concerne non l'acquisition litigieuse elle-même, mais les capacités d'endettement des emprunteurs, dont eux-mêmes ne soutiennent pas qu'elles auraient été surévaluées, ce alors qu'aucun incident de paiement n'a été signalé et que la somme empruntée est à ce jour totalement remboursée.

Les appelants sont donc déboutés de leur demande à ce titre, par réparation de l'omission de statuer du premier juge sur ce point également.

**demande de déchéance de la banque de son droit aux intérêts contractuels

Les appelants soutiennent que le contrat de crédit affecté souscrit ne stipule pas l'objet exact du financement en se contentant d'indiquer 'Photovoltaïque Autoconso + micro onduleurs + PAC Air/Air + isolation des combles', en violation des articles L311-11 et L311-18 devenu L312-2 du code de la consommation. Ils soutiennent encore que l'intimée ne rapporte pas la preuve que l'intermédiaire ici intervenu (la société Ilios Confort ) était immatriculé sur le registre unique prévu à l'article L512-1 du code des assurances, ni de sa formation.

L'intimée soulève à titre principal la fin-de non-recevoir tirée du caractère nouveau en appel de ces demandes.

Aux termes de l'article 564 du code de procédure civile, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.

La lecture de l'exposé du litige du jugement attaqué laisse supposer qu'en première instance M. et Mme [V] n'avaient formé aucune demande de déchéance du prêteur de son droit aux intérêts contractuels. Mais la lecture de ses derniers motifs permet de vérifier qu'ils avaient formé une telle demande à titre subsidiaire, que le premier juge a déclaré prescrite alors que l'exposé du litige ne permet pas de vérifier que cette fin de non-recevoir avait été soulevée par la défenderesse.

La demande est donc recevable comme n'étant pas nouvelle en cause d'appel comme soutenu, étant noté que l'intimée ne soulève pas en cause d'appel la fin de non-recevoir tirée de la prescription de cette demande distincte de celle de la nullité des contrats.

L'intimée soutient à titre subsidiaire n'avoir manqué à aucune de ses obligations précontractuelles de sorte qu'elle n'encourrait pas la déchéance de son droit aux intérêts.

Selon l'article L341-1 du code de la consommation en vigueur du 01 juillet 2016 au 19 juillet 2019 ici applicable le prêteur qui accorde un crédit sans communiquer à l'emprunteur les informations précontractuelles dans les conditions fixées par l'article L. 312-12 est déchu du droit aux intérêts.

L'article L312-12 du même code en vigueur du 01 juillet 2016 au 01 avril 2018 ici applicable disposait :

Préalablement à la conclusion du contrat de crédit, le prêteur ou l'intermédiaire de crédit donne à l'emprunteur, sous forme d'une fiche d'informations, par écrit ou sur un autre support durable, les informations nécessaires à la comparaison de différentes offres et permettant à l'emprunteur, compte tenu de ses préférences, d'appréhender clairement l'étendue de son engagement.

La liste et le contenu des informations devant figurer dans la fiche d'informations à fournir pour chaque offre de crédit ainsi que les conditions de sa présentation sont fixés par décret en Conseil d'Etat.

Cette fiche comporte, en caractères lisibles, la mention indiquée à l'article L. 312-5.

Lorsque le consommateur sollicite la conclusion d'un contrat de crédit sur le lieu de vente, le prêteur veille à ce que la fiche d'informations mentionnée au premier alinéa lui soit remise sur le lieu de vente.

Lorsque le prêteur offre à l'emprunteur ou exige de lui la souscription d'une assurance, le prêteur ou l'intermédiaire de crédit informe l'emprunteur du coût de l'assurance en portant à sa connaissance les éléments mentionnés à l'article L. 312-7.

Les articles L312-5 et L312-7 du même code en vigueur depuis le 01 juillet 2016 disposent :

Toute publicité, à l'exception des publicités radiodiffusées, contient, quel que soit le support utilisé, la mention suivante : "Un crédit vous engage et doit être remboursé. Vérifiez vos capacités de remboursement avant de vous engager "

et

'Lorsqu'un prêteur propose habituellement des contrats de crédit assortis d'une proposition d'assurance ayant pour objet la garantie de remboursement du crédit, toute publicité mentionnée au premier alinéa de l'article L. 312-6 diffusée pour son compte sur ces contrats mentionne le coût de l'assurance, à l'aide de l'exemple représentatif mentionné au même alinéa.

Ce coût est exprimé :

1° A l'exclusion de tout autre taux, en taux annuel effectif de l'assurance, qui permette la comparaison par l'emprunteur de ce taux avec le taux annuel effectif global du crédit ;

2° En montant total dû en euros par l'emprunteur au titre de l'assurance sur la durée totale du prêt

3° En euros par mois. Il est précisé si ce montant s'ajoute ou non à l'échéance de remboursement du crédit.'

En l'espèce l'offre de contrat de crédit affecté du 17 novembre 2016 ne comporte pas la mention 'Un crédit vous engage et doit être remboursé. Vérifiez vos capacités de remboursement avant de vous engager'.

S'agissant de l'assurance souscrite, elle ne comporte pas l'expression de son coût en taux annuel effectif mais seulement la mention :

'Frais liés à l'exécution du contrat de crédit :

.coût de l'assurance facultative proposée par le prêteur exprimé en euros et par mois pour l'emprunteur : 34,70 euros

.coût de l'assurance facultative proposée par le prêteur exprimé en euros et par mois pour le co-emprunteur : 34,70 euros'

et le montant des échéances mensuelles avec assurance(s) choisie(s).

La CA Consumer Finance encourt donc la déchéance de son droit aux intérêts contractuels et le jugement est infirmé de ce chef, par réparation de l'omission de statuer du premier juge sur ce point.

Elle est donc condamnée à rembourser aux appelants l'ensemble des intérêts versés au titre de l'exécution normale du contrat de prêt jusqu'à parfait paiement.

Le tableau d'amortissement qu'elle produit permet de déterminer le montant de ces intérêts, qui s'est élevé à la somme de 6 292,96 euros qu'elle est donc condamnée à leur rembourser sans qu'il soit besoin de lui enjoindre avant-dire-droit sur ce point de produire un nouveau tableau d'amortissement expurgé de ces intérêts.

* dépens et article 700

La CA Consumer Finance qui succombe même partiellement est condamnée à supporter les dépens de l'instance d'appel.

L'équité ne commande pas de faire ici application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement en ce qu'il a

- déclaré irrecevable l'action de M. [O] [V] et Mme [P] [V]

- en nullité du contrat principal de vente

- pour violation du code de la consommation

- pour dol

- en nullité subséquente du contrat de crédit affecté

- en responsabilité du prêteur pour manquement à son obligation d'information et de conseil

- dit que chacune des parties conservera la charge des dépens par elle engagés

- débouté les parties de leurs demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

Réparant son omission de statuer

Déclare recevable la demande de déchéance de la société CA Consumer Finance de son droit aux intérêts afférents au prêt n° 81577613483 souscrit le 17 novembre 2016 par M. [O] et Mme [P] [V], d'un montant de 34 700 euros, affecté au financement de l'achat et de la poste d'une installation photovoltaïque vendue par la société Ilios Confort,

Condamne la CA Consumer Finance à rembourser à M. [O] [V] et Mme [P] [V] la somme de 6 292,96 euros au titre du montant total des intérêts versés au titre de l'exécution normale du contrat de prêt jusqu'à parfait paiement

Y ajoutant,

Condamne la société CA Consumer Finance aux dépens de la présente instance

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Arrêt signé par la présidente et par la greffière.

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