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Décisions

CA Paris, Pôle 1 - ch. 10, 10 juillet 2025, n° 24/06389

PARIS

Arrêt

Autre

CA Paris n° 24/06389

10 juillet 2025

RÉPUBLIQUE FRAN'AISE

AU NOM DU PEUPLE FRAN'AIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 10

ARRÊT DU 10 JUILLET 2025

(n°344, 4 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 24/06389 - N° Portalis 35L7-V-B7I-CJGOD

Décision déférée à la Cour : Jugement du 06 Mars 2024-Juge de l'exécution de BOBIGNY- RG n° 23/06557

APPELANTS

Monsieur [E] [U] [Z] [B]

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représenté par Me Monique BOCCARA SOUTTER, avocat au barreau de PARIS, toque : C0649

S.C.I. [Adresse 3]

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Monique BOCCARA SOUTTER, avocat au barreau de PARIS, toque : C0649

INTIMÉE

Madame [O] [W] épouse [T]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Sandra OHANA de l'AARPI OHANA ZERHAT Cabinet d'Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : C1050

Ayant pour avocat plaidant : Maître [E] ARLAUD

Avocat au Barreau de Seine Saint Denis

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 juin 2025, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Bénédicte Pruvost, président, chargé du rapport et Madame Valérie Distinguin, conseiller.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Bénédicte Pruvost, président de chambre

Madame Emmanuelle Lebée, président de chambre honoraire

Madame Valérie Distinguin, conseiller

GREFFIER lors des débats : Monsieur Grégoire Grospellier

ARRÊT

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Bénédicte Pruvost, président et par Monsieur Grégoire Grospellier, greffier, présent lors de la mise à disposition.

Exposé du litige

Par arrêt du 19 mars 2019, définitif, la cour d'appel de Paris a, notamment, dit que Mme [O] [W], épouse [T], était propriétaire de 25 parts de la société civile immobilière [Adresse 3] cédées par M. [E] [B] le 1er juillet 2004 et était associée à la société, a fait injonction à la Sci [Adresse 3] de mettre à jour les statuts en ce sens, et ce dans le mois de la signification de l'arrêt, a condamné in solidum la Sci et M. [B] à verser à Mme [O] [W] la somme de 8 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel ainsi qu'aux dépens.

Déclarant agir en vertu de cet arrêt, Mme [W] a fait dresser à l'encontre de M. [B], le 16 mai 2023, un procès-verbal de saisie-attribution entre les mains du Crédit industriel et commercial, saisie dénoncée le 24 mai, fructueuse à hauteur de la somme de 3 696,09 euros, et, à l'encontre de la société civile immobilière, le 30 mai 2023, également entre les mains du Crédit industriel et commercial, saisie dénoncée le 30 mai et fructueuse.

Par acte du 19 juin 2023, M. [B] et la société civile immobilière, invoquant une créance de compensation d'un montant de 128 042 euros au titre du compte courant d'associée de Mme [W], ont assigné celle-ci devant le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Bobigny en contestation de ces saisies.

Par jugement en date du 6 mars 2024, le juge de l'exécution a, notamment, déclaré le juge de l'exécution compétent pour statuer sur la demande de compensation formulée par M. [B] et la société civile immobilière, déclaré leur action recevable, les en a déboutés et les a condamnés in solidum à verser à Mme [W] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Pour débouter M. [B] et la société civile immobilière de leur demande de compensation, le premier juge a pricipalement retenu, que si le principe de participation aux dettes de la société civile immobilière de ses associés et notamment de Mme [W] était certain, la somme dont elle serait redevable à ce titre n'était pas établie.

M. [B] et la société civile immobilière ont interjeté appel de cette décision par déclaration en date du 26 mars 2024.

Les conclusions récapitulatives de M. [B] et la société civile immobilière du [Adresse 3], en date du 26 mai 2025, tendent à voir la cour :

- confirmer le jugement en ce que le juge de l'exécution s'est déclaré compétent pour statuer sur la demande de compensation et en ce qu'il a déclaré leur action recevable ;

- infirmer le jugement pour le surplus ;

statuant à nouveau,

- déclarer nulles les saisies-attribution et ordonner leur mainlevée

- condamner Mme [W] à payer à chacun d'entre eux la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

à titre reconventionnel,

- débouter Mme [W] de ses demandes de dommages-intérêts et d'indemnités de procédure.

Les conclusions récapitulatives de Mme [W], en date du 3 juin 2025, tendent à voir la cour :

- confirmer le jugement attaqué sauf en ce qu'il a déclaré le juge de l'exécution compétent pour statuer sur la demande de compensation ;

- débouter les appelants de leurs demandes,

- les condamner à lui payer la somme de 8 000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive ;

- les condamner solidairement à lui payer la somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts au vu de son préjudice moral ;

en tout état de cause,

- les condamner solidairement à lui payer la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Pour plus ample exposé du litige, des prétentions et des moyens, il est fait renvoi aux écritures visées.

À l'audience du 12 juin 2025, la cour a invité les parties à soumettre avant le 18 juin, leurs observations éventuelles sur l'absence au dispositif des conclusions des appelants d'une demande tendant à voir écarter la pièce 10 de l'intimée et sur l'application de l'article 954 du code de procédure civile, avant le 18 juin ainsi qu'à prendre position sur la proposition de médiation le 19 juin au plus tard.

Les observations reçues des parties ne portent pas sur ce moyen, mais sur la validité du bordereau de communication.

La proposition de médiation n'a pas recueilli l'accord des deux parties.

Discussion

En l'absence de demande en ce sens présentée au dispositif de ses écritures, qui seul lie la cour, celle-ci, par application de l'article 954 du code de procédure civile, n'écartera pas la pièce n° 10 présentée par l'intimée.

Sur les pouvoirs du juge de l'exécution :

L'intimée soutient qu'il n'appartenait pas au premier juge d'apprécier la prétendue créance des appelants, qu'au surplus elle conteste.

Cependant, ainsi que l'a relevé à bon droit le premier juge, selon les dispositions de l'article L213-6, alinéa 1er, du code de l'organisation judiciaire, le juge de l'exécution connaît, de manière exclusive, des difficultés relatives aux titres exécutoires et des contestations qui s'élèvent à l'occasion de l'exécution forcée, même si elles portent sur le fond du droit, à moins qu'elles n'échappent à la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire.

Il dispose donc du pouvoir de statuer sur la compensation invoquée par le débiteur, dans le cadre de la contestation d'une mesure d'exécution, afin que des causes de celle-ci soit soustrait le montant de sa propre créance.

Sur la saisie-attribution du compte de M. [B] :

Comme le soulève à bon droit Mme [W], la demande de compensation concernant le solde débiteur du compte-courant d'associée de Mme [W] ne peut être opposée que par la société civile immobilière et non par M. [B]. Celui-ci n'opposant à la saisie aucun moyen propre, le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté M. [B] de ses demandes.

Sur la compensation :

à l'appui de sa demande de rejet de la demande formée à ce titre par la société civile immobilière, Mme [W] soutient, en substance, que la société civile immobilière ne produit pas d'écritures comptables justifiant de l'existence d'un compte-courant débiteur, que des bilans n'ont été produits qu'en janvier 2024 et que le bilan communiqué ne mentionne pas de compte courant d'associé.

Elle ajoute qu'elle n'a jamais été convoquée à aucune assemblée entre 2004 et 2022, que la convocation à l'assemblée de 2022 était tardive, ne respectant pas le délai de quinzaine, et ne comportait ni rapport de gestion ni bilan, qu'une nouvelle convocation a été délivrée le 25 janvier 2024 pour ratification des précédentes assemblées générales et ratification des comptes, que cette nouvelle convocation fait la preuve de la nullité des assemblées précédentes.

L'appelante évoque ensuite diverses irrégularités de ces comptes.

Cependant, comme le fait valoir utilement la société civile immobilière, outre que la dette de Mme [W] ne pouvait apparaître sur les bilans antérieurs à l'année 2022 puisque sa qualité d'associée n'étant pas définitivement reconnue, Mme [W] a été convoquée le 25 janvier 2024, par acte extra-judiciaire signifiée à sa personne le 25 janvier 2024, à une assemblée générale fixée le 19 février 2024, laquelle a, notamment, ratifié les précédentes assemblées générales et approuvé les comptes pour les années 2004 à 2022. Cette assemblée générale a approuvé le bilan faisant apparaître le compte courant d'associée de l'intimée comme débiteur à hauteur de la somme de 128 042 euros, somme dont l'intimée ne soutient pas s'être acquittée.

Cette assemblée ne faisant pas l'objet de contestation judiciaire, et la somme due par l'intimée en sa qualité d'associée étant supérieure aux causes de la saisie-attribution, il convient, en raison de la compensation entre les créances respectives des parties, d'ordonner la mainlevée de la saisie-attribution.

Sur les dommages-intérêts :

L'intimée sollicite des sommes à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive et pour préjudice moral.

La solution du litige conduit à rejeter ces demandes.

Sur les dépens et les frais irrépétibles :

M. [B] qui succombe doit être débouté de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Mme [W], succombant principalement en ses prétentions à l'égard de la société civile immobilière, devra supporter les dépens exposés en première instance et en appel et être condamnée à payer à la société civile immobilière une indemnité de procédure.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement sauf en ce qu'il a débouté la société civile immobilière [Adresse 3] de ses demandes et condamné celle-ci à payer à Mme [W] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens ;

Statuant à nouveau,

Ordonne la mainlevée de la saisie-attribution pratiquée le 23 mai 2023 entre les mains du Crédit industriel et commercial sur les comptes de la société civile immobilière du [Adresse 3] ;

Condamne Mme [W], épouse [T], à payer à la société civile immobilière du [Adresse 3] la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens exposés par celle-ci ;

Le greffier, Le Président,

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