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Décisions

CA Toulouse, 3e ch., 10 juillet 2025, n° 24/03374

TOULOUSE

Arrêt

Autre

CA Toulouse n° 24/03374

10 juillet 2025

10/07/2025

ARRÊT N° 382/2025

N° RG 24/03374 - N° Portalis DBVI-V-B7I-QRCS

EV/KM

Décision déférée du 01 Octobre 2024

Juge de la mise en état de [Localité 8]

23/00861

MARFAING

S.A. GAN ASSURANCES

S.A.R.L. COMATRA

C/

S.A. CAMCA ASSURANCE

CONFIRMATION

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

3ème chambre

***

ARRÊT DU DIX JUILLET DEUX MILLE VINGT CINQ

***

APPELANTEES

S.A. GAN ASSURANCES RCS de Paris

[Adresse 5]

[Localité 4]

Représentée par Me Corine CABALET de la SELARL SELARL TERRACOL-CABALET AVOCATS, avocat au barreau de TOULOUSE

S.A.R.L. COMATRA RCS de [Localité 8]

[Adresse 7]

[Localité 1]

Représentée par Me Corine CABALET de la SELARL SELARL TERRACOL-CABALET AVOCATS, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMEE

S.A. CAMCA ASSURANCE Représentée par son mandataire COMPAGNIE EUROPEENNE DE GARANTIES ET CAUTIONS (CEGC) SA immatriculée au RCS de [Localité 9] sous le numéro 382 506 079, dont le siège social est [Adresse 3].

[Adresse 6]

[Localité 2]

Représentée par Me Jannick CHEZE de la SCP VINCENT-CHEZE, avocat postulant au barreau de TOULOUSE et par Me Arnaud JULIEN de la SELARL JH AVOCATS, avocat plaidant au barreau de MONTPELLIER

COMPOSITION DE LA COUR

Après audition du rapport, l'affaire a été débattue le 30 Avril 2025 en audience publique, devant la Cour composée de :

E. VET, conseiller faisant fonction de président

P. BALISTA, conseiller

S. GAUMET, conseiller

qui en ont délibéré.

Greffière, lors des débats : I. ANGER

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par E. VET, président, et par I. ANGER, greffière de chambre.

Par contrat de construction de maison individuelle du 11 décembre 2004, M. [K] [D] a confié à la SAS Sici Maisons d'en France, la construction d'une maison d'habitation .

La SA Camca Assurance était l'assureur dommages-ouvrage du maître de l'ouvrage.

La SAS Sici Maisons d'en France a confié les travaux de terrassement et gros 'uvre à la SARL Comatra, assurée auprès de la SA Gan Assurances.

M. [U], assuré auprès de la Maaf Assurances a réalisé les enduits extérieurs en qualité de sous-traitant.

Les travaux ont été réceptionnés le 23 avril 2007.

Le 20 février 2017, M. [D] a déclaré à son assureur dommages-ouvrage des désordres consistant en des fissures.

Par ordonnance de référé du 30 mai 2017, une expertise a été ordonnée.

Selon quittance subrogative dommages-ouvrage du 20 novembre 2017, la SA Camca Assurance a versé au maître de l'ouvrage la somme de 19'686,25 € au titre de la garantie dommages-ouvrage.

Par acte du 2 août 2023, la SA Camca Assurance a fait assigner la SARL Comatra et la SA Gan Assurances devant le tribunal judiciaire de Foix aux fins d'obtenir leur condamnation in solidum à lui verser la somme de 17'105,88 €.

Par conclusions d'incident du 22 mai 2024, les défenderesses ont saisi le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Foix afin de voir déclarer l'action de la SA

Camca Assurance irrecevable comme prescrite.

Par ordonnance du 1er octobre 2024, le juge de la mise en état a :

' rejeté la fin de non-recevoir soulevée par la SARL Comatra et la SA Gan Assurances ,

' condamné la SARL Comatra et la SA Gan Assurances aux dépens,

' condamné in solidum la SARL Comatra et la SA Gan Assurances à payer à la SA Camca Assurance 1000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

' renvoyé l'affaire à l'audience de mise en état du 19 novembre 2024,

' rappelé que l'ordonnance est assortie de l'exécution provisoire de plein droit.

Par déclaration du 11 octobre 2024, la SARL Comatra et la SA Gan Assurances ont formé appel de la décision.

Par dernières conclusions du 2 octobre 2024, la SARL Comatra et la SA Gan Assurances demandent à la cour de :

' réformer l'ordonnance du 1er octobre 2024 en ce qu'elle a :

- rejeté la fin de non-recevoir soulevée par la SA Gan Assurances et par la SARL Comatra,

- condamné la SA Gan Assurances et la SARL Comatra aux entiers dépens de la présente instance,

- condamné in solidum la SA Gan Assurances et la SARL Comatra à payer à la SA Camca Assurance la somme de 1000 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile,

Statuant à nouveau :

' dire et juger que l'assignation du 21 avril 2017 n'est pas interruptive du délai de forclusion ,

' déclarer irrecevable comme prescrite et forclose l'action de la société Camca à

l'encontre de la société Comatra et de la Compagnie Gan,

En conséquence:

' débouter la société Camca de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

' condamner la société Camca à payer à la société Comatra et à la Compagnie Gan la somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Corine Cabalet, avocat, sur son affirmation de droit.

Par dernières conclusions du 22 janvier 2025, la SA Camca Assurance demande à la cour de:

' confirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance du juge de la mise en état du Tribunal judiciaire de Foix en date du 1er octobre 2024,

' rejeter toutes les demandes des sociétés Gan Assurances et Comatra,

' condamner in solidum les sociétés Gan Assurances et Comatra à payer à la société Camca Assurance, la somme de 4 000 € au titre de l'article 700,

' condamner in solidum les sociétés Gan Assurances et Comatra aux entiers dépens.

La clôture de l'instruction est intervenue le 14 avril 2025.

La cour, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des demandes et moyens des parties, fera expressément référence la décision entreprise ainsi qu'aux dernières conclusions déposées.

MOTIFS

Les sociétés appelantes font valoir que :

' la Camca n'est pas signataire de la convention Crac de sorte que l'expert qu'elle a désigné n'est pas un expert unique et commun et ses conclusions sont inopposables aux assureurs de responsabilité, la compagnie Gan n'a pas participé aux opérations d'expertise amiable et le juge ne peut pas fonder sa décision exclusivement sur une expertise non judiciaire,

' la caducité a un effet rétroactif et en l'espèce la caducité prononcée pour la mesure d'expertise doit «rétroagir sur» l'assignation en référé-expertise notamment en raison des circonstances particulières qui ont conduit la compagnie Camca à assigner les appelantes, alors que l'assignation en référé avait pour but d'obtenir une expertise et pas seulement d'interrompre les délais alors que toute action basée sur le seul rapport amiable aurait été vaine car leur aurait été inopposable, en conséquence la caducité de la désignation de l'expert judiciaire doit priver l'assignation de son effet interactif de prescription dès lors que l'expertise judiciaire était inhérente à l'action en justice,

' l'inaction de la compagnie Camca dans le cadre de l'expertise judiciaire doit s'analyser comme un désistement d'instance.

L'intimée oppose qu'elle a fait assigner ses adversaires devant le juge des référés le 21 avril 2017 et obtenu la désignation d'un expert selon ordonnance du 30 mai 2017, décision devenue caduque à défaut de consignation des frais d'expertise, ce qui est insuffisant pour priver l'assignation elle-même de son effet interruptif, faisant courir un nouveau délai identique à celui qui avait été interrompu.

Sur ce

La SA Camca Assurance a versé à M. [D] 19'686,25 €, selon quittance subrogative du 20 novembre 2017.

Et selon l'article L 121-12 du code des assurances : «L'assureur qui a payé l'indemnité d'assurance est subrogé, jusqu'à concurrence de cette indemnité, dans les droits et actions de l'assuré contre les tiers qui, par leur fait, ont causé le dommage ayant donné lieu à la responsabilité de l'assureur.».

En application de l'article 1792-4-2 du Code civil : «Les actions en responsabilité dirigées contre un sous-traitant en raison de dommages affectant un ouvrage ou des éléments d'équipement d'un ouvrage mentionnés aux articles 1792 et 1792-2 se prescrivent par dix ans à compter de la réception des travaux et, pour les dommages affectant ceux des éléments d'équipement de l'ouvrage mentionnés à l'article 1792-3, par deux ans à compter de cette même réception. ».

Le délai de 10 ans applicable est un délai de forclusion.

Par ailleurs, il résulte des articles 2241 et 2242 du Code civil que la demande en justice, même en référé, interrompt la prescription et la forclusion jusqu'à l'extinction de l'instance.

Enfin, caducité d'une désignation d'expert en raison du non-paiement de la consignation prévue, qui n'atteint que la mesure d'expertise ordonnée et ne peut priver l'assignation introductive d'instance de son effet interruptif du délai de prescription.

En l'espèce, par assignation du 21 avril 2017, la SA Camca Assurance a fait assigner devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Foix son assuré, M. [D], la SARL Comatra et son assureur, la SA Gan Assurances et M. [U] avec son assureur, la SA Maaf Assurances, aux fins de voir ordonner une expertise.

Par ordonnance du 30 mai 2017, le juge des référés du tribunal de grande instance de Foix a fait droit à cette demande et prévu une consignation à la charge de la SA Camca Assurance qui n'a pas consigné.

L'absence de consignation par la SA Camca Assurance a entraîné la caducité des opérations d'expertise.

Cependant, la caducité d'une désignation d'expert pour absence de consignation, qui n'atteint que la mesure d'expertise ordonnée, ne peut priver l'assignation introductive d'instance de son effet interruptif du délai de prescription.

En conséquence, l'assignation en référé du 21 avril 2017 a parfaitement interrompu le délai de forclusion qui a produit ses effets jusqu'à l'ordonnance du 30 mai 2017.

Dès lors, conformément aux dispositions de l'article 2231 du Code civil à compter de cette date, un nouveau délai de 10 ans a commencé à courir, jusqu'au 30 mai 2027.

Ainsi, la présente instance ayant été initiée selon assignation du 2 août 2023, en condamnation des sociétés appelantes à verser à la SA Camca Assurance le montant acquitté à son assuré selon la quittance subrogative signée le 20 novembre 2017 aux termes de laquelle elle vient à ses droits, c'est à bon droit que le premier juge a rejeté la fin de non-recevoir tirée de la forclusion de l'action.

La décision déférée doit en conséquence être confirmée.

Les appelantes qui succombent garderont la charge des dépens d'appel.

L'équité commande de confirmer la décision déférée au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de faire droit à la demande présentée en appel à hauteur de 4000 €.

PAR CES MOTIFS:

La cour,

Statuant dans les limites de sa saisine:

Confirme la décision déférée,

Condamne in solidum la SA Gan Assurances et la SARL Comatra aux dépens,

Condamne in solidum la SA Gan Assurances et la SARL Comatra à verser à la SA Camca Assurance 4000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

I.ANGER E.VET

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