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Décisions

CA Aix-en-Provence, retention administrative, 11 juillet 2025, n° 25/01354

AIX-EN-PROVENCE

Ordonnance

Autre

CA Aix-en-Provence n° 25/01354

11 juillet 2025

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

CHAMBRE 1-11, Rétention Administrative

ORDONNANCE

DU 11 JUILLET 2025

N° RG 25/01354 - N° Portalis DBVB-V-B7J-BO7SZ

Copie conforme

délivrée le 11 Juillet 2025 par courriel à :

- l'avocat

- le préfet

- le CRA

- le JLD/TJ

- le retenu

- le MP

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance rendue par le magistrat désigné pour le contrôle des mesures d'éloignement et de rétention de [Localité 6] en date du 10 Juillet 2025 à 11h55.

APPELANT

Monsieur [M] [Y]

né le 03 Juin 1994 à [Localité 5]

de nationalité Tunisienne

comparant en visio conférence en application de l'article L743-7 du CESEDA

Assisté de Maître Gaëlle LABBE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, commis d'office.

et de Monsieur [I] [K], interprète en langue arabe , inscrit sur la liste des experts de la cour d'appel d'Aix-en-Provence.

INTIMÉE

PREFECTURE DES BOUCHES DU RHONE

Avisée et non représentée

MINISTÈRE PUBLIC

Avisé, non représenté

******

DÉBATS

L'affaire a été débattue en audience publique le 11 Juillet 2025 devant Madame Carole DAUX-HARAND, Présidente de chambre à la cour d'appel déléguée par le premier président par ordonnance, assistée de Mme Carla D'AGOSTINO, Greffier,

ORDONNANCE

Par décision réputée contradictoire,

Prononcée par mise à disposition au greffe le 11 Juillet 2025 à 14h10,

Signée par Madame Carole DAUX-HARAND, Présidente de chambre et Mme Carla D'AGOSTINO, Greffier,

PROCÉDURE ET MOYENS

Vu les articles L 740-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) ;

Vu la condamnation prononcée par le Tribunal Correctionnel de Nice en date du 28 septembre 2023 ordonnant une interdiction temporaire du territoire français ;

Vu la décision de placement en rétention prise le 10 juin 2025 par la PREFECTURE DES BOUCHES DU RHONE notifiée le 11 juin 2025 à 11h50;

Vu l'ordonnance du 10 Juillet 2025 rendue par le magistrat désigné pour le contrôle des mesures d'éloignement et de rétention décidant le maintien de Monsieur [M] [Y] dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire ;

Vu l'appel interjeté le 10 Juillet 2025 à 16h08 par Monsieur [M] [Y] ;

Monsieur [M] [Y] a comparu et a été entendu en ses explications.

Ilcconfirme son identité, sa date et lieu de naissance.

Son avocat Maître Gaëlle LABBE a été régulièrement entendu.

Elle conclut à l'infirmation de l'ordonnance querellée

Elle fait valoir que la requête de prolongation est irrégulière puisqu'elle n'est pas accompagnée de toutes les pièces justificatives utiles et de la copie du registre actualisé.

Elle ajoute que son état de vulnérabilité des n'a pas été pris en considération par le préfet son état de santé étend incompatible avec la rétention.

Enfin elle indique disposer d'une adresse stable effective en France avec sa compagne de sorte qu'une assignation à résidence peut tout à fait être prononcée

Le représentant de la préfecture n'a pas comparu à l'audience.

MOTIFS DE LA DÉCISION

La recevabilité de l'appel contre l'ordonnance du magistrat désigné pour le contrôle des mesures d'éloignement et de rétention n'est pas contestée et les éléments du dossier ne font pas apparaître d'irrégularité.

1°) Sur l'irrecevabilité de la requête en prolongation

L'article R.742-1 du CESEDA dispose que le juge des libertés et de la détention est saisi aux fins de prolongation de la rétention par simple requête de l'autorité administrative, dans les conditions prévues au chapitre III, avant l'expiration, selon le cas, de la période de quarante-huit heures mentionnée à l'article L.742-1 ou de la période de prolongation ordonnée en application des articles L.742-4, L.742-5, L.742-6 ou L.742-7.

A cette fin et à peine d'irrecevabilité, selon l'article R.743-2 du même code, la requête est motivée, datée et signée, selon le cas, par l'étranger ou son représentant ou par l'autorité administrative qui a ordonné le placement en rétention, à savoir le préfet de département ou de police à [Localité 8] en application de l'article R.741-1. Dans ce cas la requête est accompagnée de toutes pièces justificatives utiles, notamment une copie du registre prévu à l'article L.744-2.

Ce dernier énonce qu'il est tenu, dans tous les lieux de rétention, un registre mentionnant l'état civil des personnes retenues, ainsi que les conditions de leur placement ou de leur maintien en rétention. Le registre mentionne également l'état civil des enfants mineurs accompagnant ces personnes ainsi que les conditions de leur accueil. L'autorité administrative tient à la disposition des personnes qui en font la demande les éléments d'information concernant les date et heure du début du placement de chaque étranger en rétention, le lieu exact de celle-ci ainsi que les date et heure des décisions de prolongation.

Selon les dispositions de l'article L. 743-9 du CESEDA le magistrat du siège du tribunal judiciaire, saisi aux fins de prolongation de la rétention, rappelle à l'étranger les droits qui lui sont reconnus et s'assure, d'après les mentions figurant au registre prévu à l'article L. 744-2 émargé par l'intéressé, que celui-ci a été, dans les meilleurs délais suivant la notification de la décision de placement en rétention, pleinement informé de ses droits et placé en état de les faire valoir à compter de son arrivée au lieu de rétention. Le juge tient compte des circonstances particulières liées notamment au placement en rétention simultané d'un nombre important d'étrangers pour l'appréciation des délais relatifs à la notification de la décision, à l'information des droits et à leur prise d'effet.

Il résulte de la combinaison de ces textes que le registre doit être mis à jour et que la non-production d'une copie actualisée, permettant un contrôle de l'effectivité de l'exercice des droits reconnus à l'étranger au cours de la mesure de rétention, constitue une fin de non-recevoir. Celle-ci doit être accueillie sans que celui qui l'invoque ait à justifier d'un grief dès lors que le juge ne peut s'assurer que l'étranger a été en mesure d'exercer les droits qui lui sont reconnus par les articles L. 744-4 et suivants du CESEDA.

Le paragraphe IV de l'annexe de l'arrêté du 6 mars 2018 portant autorisation du registre de rétention et d'un traitement automatisé de données à caractère personnel dénommé «logiciel de gestion individualisée des centres de rétention administrative» (LOGICRA) prévoit notamment que sont enregistrées dans les traitements au titre des données à caractère personnel concernant la fin de la rétention et l'éloignement les informations suivantes :

1° Demande de laissez-passer consulaire, consulat saisi, date de la demande d'identification ou de présentation consulaire, type de présentation, motif de non-présentation, date de I'entretien, moyen de transport utilisé, résultat de I'entretien, délivrance du laissez-passer consulaire, date de délivrance, date et fin de validité du laissez-passer consulaire;

2° Réservation du moyen de transport national et international: date prévisionnelle de départ, moyen de transport utilisé, pays de destination, demande de routing, escorte;

3° Fin de la rétention: date et motif de la fin de rétention.

En l'espèce l'appelant soulève le défaut d'actualisation du registre de rétention dans la mesure où les diligences consulaires n'y sont pas mentionnées.

Que cette affirmation est inexacte puisque sont mentionnées sur le registre de rétention la saisine du 18 juin, la relance du 9 juillet ainsi que la présentation physique le 3 juillet 2025 aux autorités tunisiennes , étant précisé que , contrairement à ce qui est soutenu, aucune obligation de mentionner les diligences consulaires n'est exigée par un texte à peine d'irrecevabilité

Que par ailleurs la décision de prolongation du juge des liberté et de la détention ainsi que la décision de la cour d'appel sont actées

Pour le surplus Monsieur [M] [Y] ne précise pas quelles sont les pièces utiles qui seraient manquantes

En conséquence il y aura lieu de rejeter cette fin de non recevoir.

2°) Sur la demande d'assignation à résidence

Selon l'article L743-13 du CESEDA le magistrat du siège du tribunal judiciaire ne peut ordonner l'assignation à résidence de l'étranger que lorsque celui-ci dispose de garanties de représentation effectives et qu'après remise a un service de police ou à une unité de gendarmerie de l'original du passeport et de tout document justificatif de son identité, en échange d'un récépissé valant justification de l'identité et sur lequel est portée la mention de la décision d'éloignement en instance d'exécution.

Lorsque l'étranger s'est préalablement soustrait à l'exécution d'une décision mentionnée à l'article L. 700-1, à l'exception de son 4°, l'assignation à résidence fait l'objet d'une motivation spéciale.

Toutefois la pérennité nécessairement associée à la stabilité de la résidence sur le territoire national, condition indispensable des garanties de représentation, apparaît incompatible avec les pièces fournies, aucune attestation d'hébergement n'étant produite

Par ailleurs ce dernier a été condamné pour des faits de vol avec violence par le tribunal correctionnel de Nice le 28 septembre 2023, un tel comportement constituant une menace pour l'ordre public.

Ce dernier a vu également sa demande d'asile rejetée par l'OFPRA le 25 janvier 2021 et a fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire le 6 mai 2021, décision qu'il n'a pas respectée

De plus il ne justifie pas d'un passeport en cours de validité

La demande d'assignation à résidence ne pourra donc qu'être rejetée.

3°) Sur l'état de vulnérabilité

Selon l'article 3 de la Convention Européenne de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés Fondamentales nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants.

En application de l'article L. 744-4 du CESEDA l'étranger placé en rétention est informé dans les meilleurs délais qu'il bénéficie, dans le lieu de rétention, du droit de demander l'assistance d'un interprète, d'un conseil et d'un médecin, et qu'il peut communiquer avec son consulat et toute personne de son choix. Ces informations lui sont communiquées dans une langue qu'il comprend.

L'article L741-4 du même code dispose que la décision de placement en rétention prend en compte l'état de vulnérabilité et tout handicap de l'étranger, le handicap moteur, cognitif, ou psychique et les besoins d'accompagnement de ce dernier étant pris en compte pour déterminer

les conditions de son placement en rétention.

En application de l'article R 744-14 de ce code, dans les conditions prévues aux articles R. 744-6 et R. 744-11, des locaux et des moyens matériels adaptés permettent au personnel de santé de donner des consultations et de dispenser des soins dans les centres et locaux de rétention.

En vertu de l'article R 744-18, pendant la durée de leur séjour en rétention, les étrangers sont hébergés et nourris à titre gratuit. Ils sont soignés gratuitement. S'ils en font la demande, ils sont examinés par un médecin de l'unité médicale du centre de rétention administrative, qui assure, le cas échéant, la prise en charge médicale durant la rétention administrative.

L'article 4 de l'arrêté du 17 décembre 2021 relatif à la prise en charge sanitaire des personnes retenues dans les centres de rétention administrative prévoit que chaque unité médicale du centre de rétention comprend des temps de : médecins, infirmiers, pharmaciens, psychologues, secrétaires médicaux. Elle peut comprendre également, en fonction de la capacité d'accueil du centre, de sa localisation, de la population accueillie, des problématiques médicales rencontrées, notamment des temps de : sages-femmes, chirurgiens-dentistes. L'accès à un psychiatre est assuré y compris en dehors des situations d'urgence.

Un accès aux soins est présumé s'il est établi que le centre de rétention dispose d'un service médical comprenant une permanence infirmière ; ainsi, s'il est avisé dès son arrivée au centre de la possibilité de demander à rencontrer un médecin, l'étranger concerné est réputé mis en mesure d'exercer ses droits. Il appartient à l'intéressé de prouver qu'il n'a pas été à même d'accéder au service médical ou à des soins appropriés (Civ 1ère, 12 mai 2010, n°09-12.877).

En l'espèce Monsieur [M] [Y] soutient que le préfet n'a pas tenu compte de sa vulnérabilité,indiquant avoir été victime d'une violente agression physique de la part de plusieurs retenus, cette agression lui ayant causé des séquelles sérieuses au niveau des oreilles

Il convient de relever que Monsieur [M] [Y] verse aux débats un certificat médical du docteur [C] du 17 avril 2025 certifiant que ce dernier nécessite la réalisation rapide d'examen O.R.L. difficilement réalisable en détention, certificat établi à la suite d'un compte rendu de consultation réalisée le 18 mars 2025

Il produit également un certificat médical du docteur [C] du 5 juin 2025 indiquant que le scanner des rochers ainsi que le suivi O.R.L. sera fait à la sortie

Aucun autre certificat ou pièce médicale n'est produit

Dès lors il résulte de ces pièces médicales qu'il n'est nullement indiqué que l'état de santé de l'appelant nécesiterait une prise en charge médicale en hospitalisation complète ou que son état de santé se dégraderait et que son maintien en rétention serait contre indiqué .

Il conviendra donc de rejeter ce moyen qui n'est pas établi

En conséquence, il y a lieu de confirmer l'ordonnance du 10 juillet 2025 rendue par le magistrat désigné pour le contrôle des mesures d'éloignement et de rétention décidant le maintien de Monsieur [M] [Y] dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement par décision Par décision réputée contradictoire en dernier ressort, après débats en audience publique,

Confirmons l'ordonnance du magistrat désigné pour le contrôle des mesures d'éloignement et de rétention en date du 10 Juillet 2025.

Les parties sont avisées qu'elles peuvent se pourvoir en cassation contre cette ordonnance dans un délai de 2 mois à compter de cette notification, le pourvoi devant être formé par déclaration au greffe de la Cour de cassation, signé par un avocat au conseil d'Etat ou de la Cour de cassation.

Le greffier Le président

Reçu et pris connaissance le :

Monsieur [M] [Y]

Assisté d'un interprète

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-11, Rétentions Administratives

[Adresse 7]

Téléphone : [XXXXXXXX02] - [XXXXXXXX03] - [XXXXXXXX01]

Courriel : [Courriel 4]

Aix-en-Provence, le 11 Juillet 2025

À

- PREFECTURE DES BOUCHES DU RHONE

- Monsieur le directeur du centre de rétention administrative de [Localité 6]

- Monsieur le procureur général

- Monsieur le greffier du Juge des libertés et de la détention de [Localité 6]

- Maître Gaëlle LABBE

NOTIFICATION D'UNE ORDONNANCE

J'ai l'honneur de vous notifier l'ordonnance ci-jointe rendue le 11 Juillet 2025, suite à l'appel interjeté par :

Monsieur [M] [Y]

né le 03 Juin 1994 à [Localité 5]

de nationalité Tunisienne

Je vous remercie de m'accuser réception du présent envoi.

Le greffier,

VOIE DE RECOURS

Nous prions Monsieur le directeur du centre de rétention administrative de bien vouloir indiquer au retenu qu'il peut se pourvoir en cassation contre cette ordonnance dans un délai de 2 mois à compter de cette notification, le pourvoi devant être formé par déclaration au greffe de la Cour de cassation.

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