ADLC, 11 juin 2025, n° 25-D-03
AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE
relative à des pratiques mises en œuvre dans les secteurs de l’ingénierie et du conseil en technologies, ainsi que des services informatiques
Vu les demandes des sociétés Randstad N.V., Randstad France SAS, Ausy SAS et ses filiales reçues par le rapporteur général le 7 février 2018, tendant à obtenir le bénéfice des dispositions du IV de l’article L. 464-2 du code de commerce ;
Vu l’avis conditionnel de clémence n° 18-AC-05 du 18 juillet 2018 concernant les sociétés Randstad N.V., Randstad France SAS, Ausy SAS et ses filiales ;
Vu la décision n° 18-SO-14 du 18 juillet 2018, enregistrée sous le numéro 18/0135 F, par laquelle l’Autorité de la concurrence s’est saisie d’office des pratiques mises en œuvre dans les secteurs de l’ingénierie et du conseil en technologies, ainsi que des services informatiques ;
Vu la décision du 15 juin 2023 par laquelle la rapporteure générale adjointe a procédé à la disjonction de l’instruction d’une partie du dossier n° 18/0135 F et à l’ouverture d’un nouveau dossier, enregistré sous le numéro 23/0034 F ;
Vu le Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, et notamment son article 101; Vu le livre IV du code de commerce, et notamment son article L. 420-1 ;
Vu les observations présentées par les sociétés Randstad N.V., Randstad France SAS, Randstad Digital France SAS, Alten SA, Bertrandt SAS, Bertrandt France SAS, Bertrandt AG, Assystem SA, Expleo France SAS, Expleo Group SAS, Atos France SAS et Atos SE et le commissaire du Gouvernement ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Les rapporteurs, les représentants du service économique, la rapporteure générale adjointe, les représentants des sociétés Randstad N.V., Randstad France SAS, Randstad Digital France SAS, Alten SA, Bertrandt SAS, Bertrandt France SAS, Bertrandt AG, Assystem SA, Expleo France SAS, Expleo Group SAS, Atos France SAS et Atos SE et le commissaire du Gouvernement entendus lors de la séance de l’Autorité de la concurrence du 16 octobre 2024 ;
Adopte la décision suivante :
* version publique
Résumé1
Aux termes de la présente décision, l’Autorité de la concurrence (ci-après « l’Autorité ») sanctionne plusieurs entreprises actives dans les secteurs de l’ingénierie, du conseil en technologie et des services informatiques pour des pratiques de non-débauchage visant à s’interdire de solliciter et d’embaucher leur personnel respectif.
Ces pratiques ont été révélées à l’Autorité par une demande de clémence présentée au mois d’avril 2018 par la société Ausy, devenue Randstad Digital, qui a bénéficié d’une exonération totale de sanction. La procédure de clémence permet en effet aux entreprises ayant participé à une entente d’en dévoiler l’existence et d’obtenir, sous certaines conditions, le bénéfice d’une exonération totale ou partielle de sanction pécuniaire conformément au IV de l’article L. 464-2 du code de commerce.
Les opérations de visite et saisie réalisées en novembre 2018 ont permis de réunir de nombreuses preuves qui ont complété les éléments apportés par le demandeur de clémence.
Deux ententes bilatérales sont en l’espèce sanctionnées par l’Autorité :
-la première, entre le demandeur de clémence et la société Alten, porte sur un accord de non-débauchage prenant la forme d’un gentlemen’s agreement visant à s’interdire de solliciter et d’embaucher leur personnel respectif. Cet accord présente un caractère général et concerne un certain type de salariés cadres des entreprises sanctionnées, les « business managers » (grief n° 1) ;
-la seconde a également pris la forme d’un gentlemen’s agreement général sur le non-débauchage entre les sociétés Expleo et Bertrandt, en dehors de tout contrat de partenariat entre les entreprises sanctionnées (grief n° 2).
Par ces pratiques, les parties ont renoncé à recruter leur personnel respectif, lequel constitue un paramètre de concurrence essentiel entre elles, compte tenu du caractère stratégique des ressources humaines dans les secteurs concernés. De telles pratiques ont pour objet une répartition des sources d’approvisionnement et constituent, à ce titre, des ententes expressément interdites par les dispositions du c) de l’article 101, paragraphe 1, du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne et de l’article L. 420-1, 4° du code de commerce.
Aux termes du grief n° 2, les services d’instruction reprochaient également à Bertrandt et Expleo une entente anticoncurrentielle sous la forme de clauses de non-sollicitation de personnel insérées dans des contrats de partenariat.
L’Autorité a estimé qu’elle ne pouvait pas mener, au cas d’espèce, une analyse des clauses litigieuses au titre des restrictions accessoires. Elle a, en conséquence, analysé leur objet et considéré, compte tenu de leur teneur et des objectifs poursuivis, ainsi que du contexte juridique et économique dans lequel elles s’inscrivaient, qu’elles ne pouvaient être qualifiées, en l’espèce, de restrictions ayant un objet anticoncurrentiel. L’Autorité a en outre estimé que les pièces au dossier ne lui permettaient pas d’établir que les pratiques avaient entraîné des effets anticoncurrentiels.
Dans leur notification de griefs, les services d’instruction reprochaient par ailleurs à Ausy et Atos d’avoir mis en œuvre une entente anticoncurrentielle sous la forme, d’une part, de clauses de non-sollicitation de personnel insérées dans des contrats de partenariat et, d’autre part, d’un « pacte de non-agression » visant à ne pas se faire concurrence pour le recrutement de leurs ingénieurs consultants respectifs (grief n° 3).
L’analyse des éléments du dossier n’a toutefois pas permis d’établir l’existence du pacte de non-agression en question. S’agissant des clauses de non-sollicitation de personnel soumises à son analyse, et en l’absence d’éléments lui permettant de mener cette analyse au titre des restrictions accessoires, l’Autorité a estimé qu’elles n’avaient pas en l’espèce un objet anticoncurrentiel. Elle a considéré, par ailleurs, que les pièces au dossier ne lui permettaient pas d’établir que les pratiques avaient entraîné des effets anticoncurrentiels.
Les sociétés Atos et Ausy sont donc mises hors de cause au titre du grief n° 3.
L’Autorité, après avoir examiné l’ensemble des faits du dossier, a estimé qu’il y avait lieu de prononcer des sanctions pécuniaires d’un montant total de 29,5 millions d’euros à l’encontre des entreprises mises en cause. De surcroît, l’Autorité leur a enjoint de publier un résumé de la présente décision sur le réseau social LinkedIn ainsi que dans une édition électronique et papier du journal Le Monde Informatique.
I.-Constatations
1.-Seront successivement présentés la procédure (A), le secteur (B), les entreprises concernées (C), ainsi que le contexte économique et juridique dans lesquels les pratiques constatées (D) s’inscrivent et les griefs notifiés (E).
A.-LA PROCÉDURE
2.-Par procès-verbaux des 7 février, 20 février et 5 avril 2018, le rapporteur général adjoint de l’Autorité de la concurrence (ci-après « l’Autorité ») a reçu une demande de clémence (ci-après « la demande de clémence ») de la part des sociétés Randstad N.V., Randstad France SAS, Ausy SAS et ses filiales (ci-après « les sociétés demandeuses de clémence » ou « le demandeur de clémence »), concernant des pratiques mises en œuvre dans les secteurs de l’ingénierie et du conseil en technologies, ainsi que des services informatiques, sur le territoire français et possiblement dans d’autres États de l’Union européenne (ci-après « l’Union »)2.
3.-Quatre types de pratiques ont été dénoncées par la demande de clémence, parmi lesquelles des accords de non-débauchage entre concurrents3. À cet égard, le demandeur de clémence a indiqué à l’Autorité qu’afin d’empêcher des débauchages de personnel, des accords de « non-agression » ont été conclus, sans formalisation particulière, entre les entreprises des secteurs de l’ingénierie et du conseil en technologies, ainsi que des services informatiques, dans le but de limiter l’intense rotation de personnel entre elles4.
4.-Par avis de clémence n° 18-AC-05 du 18 juillet 2018, l’Autorité a accordé aux sociétés concernées le bénéfice conditionnel d’une exonération totale des sanctions éventuellement encourues en France.
5.-Par décision n° 18-SO-14 du 18 juillet 2018, enregistrée sous le numéro 18/0135 F, l’Autorité s’est saisie d’office de pratiques mises en œuvre dans les secteurs de l’ingénierie et du conseil en technologies, ainsi que des services informatiques5.
6.-Le 8 novembre 2018, les services d’instruction de l’Autorité ont procédé à des opérations de visite et saisie dans les locaux de plusieurs entreprises actives dans les secteurs de l’ingénierie et du conseil en technologies, ainsi que des services informatiques, sur le territoire français6. Ces mesures d’instruction ont conduit à de nombreux recours7. Par ailleurs, une décision de sanction pour obstruction à l’instruction a été prononcée par l’Autorité, laquelle a également fait l’objet d’un recours8.
7.-Par décision du 15 juin 2023, la rapporteure générale adjointe de l’Autorité a procédé à la disjonction de l’instruction du dossier en deux affaires, avec l’ouverture d’un nouveau numéro d’enregistrement (n° 23/0034 F), afin de ne conserver sous le numéro de dossier 18/0135 F que les pratiques relatives aux accords de non-débauchage.
8.-Le 20 novembre 2023, les services d’instruction ont adressé aux sociétés Randstad N.V., Randstad France SAS, Randstad Digital France SAS, Alten SA, Bertrandt SAS, Bertrandt France SAS, Bertrandt AG, Assystem SA, Expleo France SAS, Expleo Group SAS, Atos France SAS et Atos SE une notification de griefs portant sur des pratiques prohibées par l’article 101 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (ci-après « TFUE ») et l’article L. 420-1 du code de commerce.
9.-En application de l’article L. 463-3 du code de commerce, le rapporteur général de l’Autorité a informé les parties et le commissaire du Gouvernement de sa décision de faire examiner l’affaire par l’Autorité sans établissement préalable d’un rapport9.
B.-LES SECTEURS D’ACTIVITÉ
10.-Les pratiques constatées ont été mises en œuvre par des entreprises actives dans les secteurs de l’ingénierie et du conseil en technologies (1), ainsi que des services informatiques (ci-après, ensemble, « les secteurs concernés ») (2).
1.-LE SECTEUR DE L’INGENIERIE ET DU CONSEIL EN TECHNOLOGIES
11.-Le secteur de l’ingénierie et du conseil en technologies rassemble les entreprises fournissant des prestations intellectuelles dans tous les domaines de l’économie comportant des processus de production complexes (industrie, énergie, BTP ou services collectifs). Ce secteur compte à la fois des filiales d’ingénierie de grands groupes industriels (Thales Services, Alstom Power Systems, etc.) et des entreprises spécialisées. Parmi ces dernières, différents profils se distinguent : les spécialistes du conseil en technologies, de l’ingénierie de la construction ou des transports, des acteurs intervenant dans l’ingénierie de grands projets industriels ou encore des cabinets pluridisciplinaires.
12.-Deux grands types d’activité sont distingués10 :
-l’ingénierie de la construction (bâtiments, infrastructures et géotechnique) ;
-le conseil en technologies (« SCT » pour « Sociétés de conseil en technologies », ou « ICT » pour « Ingénierie et conseil en technologies »). Les sociétés intervenant sur ce segment sont spécialisées dans la conception et la réalisation de produits, de solutions digitales ou d’unités industrielles dans les domaines de l’énergie, la chimie, l’aéronautique, l’automobile, la pharmacie ou encore la métallurgie. Ces services recouvrent l’ensemble du cycle de vie de projets (recherche et développement, ingénierie et processus, réalisation, exploitation et maintenance)11.
13.-Les clients de ces entreprises sont essentiellement les industriels, les maîtres d’ouvrage du bâtiment, les groupes de services collectifs, l’État et les collectivités locales12.
14.-Le secteur comptait environ 300 000 employés en 201913.
2.-LE SECTEUR DES SERVICES INFORMATIQUES
15.-Le secteur des services informatiques14 comprend l’édition de logiciels, les matériels informatiques et les services numériques. Ces derniers incluent le conseil, l'ingénierie et l’intégration des systèmes informatiques, l’infogérance, le développement, la maintenance, l’assistance et la formation15.
16.-Les entreprises actives dans ce secteur sont généralement appelées « ESN » pour « entreprises de services du numérique » ou « SS2I » pour « sociétés de services en ingénierie informatique ».
17.-Les ESN s’adressent à des clients de taille et de secteurs variés : l’industrie, les télécoms, le commerce et la distribution, l’énergie, les banques et les assurances, ainsi que le secteur public16.
18.-En 2021, les ESN employaient 438 518 salariés17.
C.-LES ENTITÉS CONCERNÉES
1.-LES DONNEES GENERALES
19.-Les secteurs concernés comptent aujourd’hui de très nombreuses entreprises.
20.-En ce qui concerne les ESN, l’étude Xerfi de 2022 portant sur les services numériques18 indique que le secteur comptait plus de 30 000 entreprises en 202019 mais que son activité était relativement concentrée sur les plus grandes d’entre elles.

Source : Étude Xerfi20
21.-S’agissant des SCT, Xerfi dénombre plus de 23 000 établissements actifs dans le secteur de l'ingénierie et des études techniques en 201921, dont la plupart sont de très petites entreprises22.

Source : Étude Xerfi23
2.-LES ENTITES CONCERNEES
a)-Le demandeur de clémence : le groupe Ausy/Randstad
22.-Le groupe Ausy, devenu Randstad Digital SAS depuis le 31 août 2023 (ci-après « Ausy/Randstad »), a été fondé en France en 1989 avant d’être racheté à 100 % par le groupe d’intérim et de ressources humaines Randstad (Randstad France SAS, filiale à 100 % de Randstad N.V.24) en 2017. Il est présent dans dix États à travers le monde et dispose, en France, de 21 agences et de 6 000 experts techniques et ingénieurs25. Son chiffre d’affaires en France en 2020 était de 242,5 millions d’euros26.
23.-Ausy/Randstad se présente comme étant spécialisé dans l’offre de prestations de conseil et d’ingénierie en hautes technologies en France et à l’international. Ses prestations s’articulent autour de trois métiers : le conseil (notamment le conseil en matière de stratégie et transformation digitale, d’architecture d'entreprise et de cybersécurité), l’ingénierie (Internet des objets, systèmes embarqués, etc.) et l’expertise digitale27. Son offre s’adresse à une large variété de secteurs d’activités : le transport, les industries de la santé, l’énergie, les services financiers, l’aérospatial et la défense, l’automobile, l’industrie, l’assurance, etc. Le groupe compte parmi ses principaux clients : Thales, EDF, Airbus, Telefonica, Proximus, Deutsche Bahn, BMW, Safran, Orange ou encore BNP28.
24.-Le demandeur de clémence a indiqué que le secteur des ESN est très fragmenté et se caractérise par un nombre important d’acteurs de taille différente. Ses principaux concurrents seraient, selon lui, Cap Gemini, Atos, Sopra Steria, Accenture, CGI, Inetum, Devoteam, Open, Alten, SII, Akkodis, Segula, Scalian, et Astek29.
25.-Entre 2006 et le mois de janvier 2017, la société Alten SA a détenu entre 4,99 % et 9,90 % du capital d’Ausy SA30. Jusqu’au 30 mai 2022, le groupe était, notamment, composé de la société mère, Ausy SAS31, ainsi que de neuf filiales et sous-filiales.
b)-Les autres entités concernées
Le groupe Alten
26.-Le groupe Alten (ci-après « Alten ») est de dimension mondiale, comptant 42 300 collaborateurs (dont environ 12 000 en France). Il est actif dans les domaines de l’ingénierie et du conseil en technologie (75 % de son chiffre d’affaires), ainsi que des services informatiques32. Alten a réalisé un chiffre d’affaires de 2,9 milliards d’euros en 2021, dont 64,7 % à l’international33.
27.-Alten compte environ 6 500 clients internationaux actifs dans les secteurs de l’aéronautique, l’automobile, les télécoms, etc. En France, ses principaux concurrents sont Capgemini, Sopra Steria, Atos, CGI, Inetum, Modis, IBM, Ausy/Randstad, Accenture, Neurones, Open, Wavestone, Umanis, et DXC Technology34.
28.-En France, Alten est composé, notamment, de la société Alten SA, société mère, ainsi que des sociétés Alten Sud Ouest SAS et Alten Systèmes d’information et réseaux SAS35.
Le groupe Atos
29.-Le groupe Atos (ci-après « Atos ») est une ESN française, créée en 1997. Elle figure parmi les plus importantes ESN au niveau mondial, avec un chiffre d'affaires annuel de près de 11 milliards d'euros en 2020 et environ 112 000 employés répartis dans 71 pays. Le groupe se présente comme leader européen des services d’informatique en nuage (cloud), de la cybersécurité et des supercalculateurs36.
30.-Atos intervient, notamment, dans les secteurs des services financiers et des assurances, de la santé et des sciences de la vie, de l’industrie manufacturière, du secteur public et de la défense, des ressources et des services, ainsi que des télécommunications et des médias37.
31.-Atos est, notamment, composé des sociétés Atos SE (France, société mère) et de 17 filiales en France dont Atos France SAS et Atos Management France SAS. Atos SE détient 100 % du capital de toutes ses filiales françaises38.
Le groupe Bertrandt
32.-Le groupe Bertrandt (ci-après « Bertrandt ») est d’origine allemande et intervient à l’échelle internationale. Il offre des services de conseil en ingénierie, en technologies et en informatique, notamment dans les secteurs de l’automobile, des machines agricoles, de l’aéronautique et du médical39.
33.-Bertrandt est présent sur 50 sites dans le monde et emploie actuellement 12 000 collaborateurs. Son chiffre d’affaires était de [70-90] millions d’euros en 202040.
34.-En France, Bertrandt indique compter parmi ses clients : Renault et [Confidentiel] dans le secteur de l’automobile, ainsi qu’Airbus, [Confidentiel] dans l’aéronautique et la « defence & space ». Ses principaux concurrents sont Akka, Alten, Segula, Capgemini et le groupe Expleo (anciennement Assystem Technologies)41.
35.-Bertrandt est, notamment, composé de la société Bertrandt AG42, qui détient 100 % de Bertrandt France SAS, qui détient elle-même 100 % de Bertrandt SAS43. Les deux dernières sociétés sont actives en France, l’essentiel des activités étant réalisé par Bertrandt SAS44.
Le groupe Expleo
36.-Le groupe Expleo (anciennement Assystem Technologies45) (ci-après le « Groupe Expleo ») intervient à l’échelle internationale. Il fournit des prestations d’assistance, de conseil et d’ingénierie à un large éventail d’acteurs industriels. Anciennement détenu par Assystem SA, le groupe est passé sous le contrôle exclusif du fonds Ardian depuis le mois de septembre 201746. Le Groupe Expleo réalisait un chiffre d’affaires de 908 millions d’euros en 202047.
37.-En France, le Groupe Expleo est, notamment, composé des sociétés Expleo group SAS, Expleo Services SAS, Expleo SAS et Expleo France SAS48.
38.-Les principaux clients du Groupe Expleo en France et en Europe sont [Confidentiel]. En France, ses principaux concurrents sont Alten et Altran49.
D.-LES PRATIQUES CONSTATÉES
39.-Les éléments du dossier attestent de l’existence, d’une part, d’accords de non-débauchage non formalisés, dits « gentlemen’s agreements », entre concurrents, et, d’autre part de clauses contractuelles de non-sollicitation de personnel, limitées à une catégorie précise de collaborateurs en lien avec l’exécution d’un contrat, dans l’objectif allégué de limiter l’importante rotation du personnel existant dans les secteurs de l’ingénierie, du conseil en technologies ainsi que des services informatiques50.
40.-Préalablement à la présentation de ces pratiques (2), sera évoqué le contexte général dans lequel elles sont intervenues (1).
1.-LE CONTEXTE GENERAL DES PRATIQUES
a)-Des ressources humaines rares, stratégiques et disputées
41.-Tant le secteur de l’ingénierie et du conseil en technologie que celui des services informatiques se caractérisent, d’une part, par l’importance stratégique des ressources humaines (ci-après « RH »), au cœur des prestations offertes par les entreprises actives sur ces secteurs, et d’autre part, par leur rareté.
42.-L’étude Xerfi de 2022 portant sur les services d’ingénierie, d’études et de conseils techniques dont font partie les SCT, précise à cet égard le rôle essentiel des RH dans un secteur marqué par une rotation de personnel (ou « turnover ») importante :
« [l]a gestion des ressources humaines est, déjà en temps normal, particulièrement importante pour les ingénieristes. La nature intellectuelle des prestations fait en effet reposer la qualité des interventions sur les compétences des salariés. Les opérateurs présentent en outre traditionnellement d’importants besoins d’embauche, en raison d’un taux de turn-over élevé, alimenté par un modèle pyramidal fonctionnant via une armée de jeunes diplômés encadrée par quelques associés. »51
43.-De même, pour ce qui concerne les services informatiques, l’étude Xerfi de 2022 relative aux services numériques (ci-après l’« Étude Xerfi ESN 2022 ») évoque l’importance de la rotation du personnel et le manque de main-d’œuvre pour faire face aux besoins de leurs clients52.
44.-Cette importance stratégique des RH et leur rareté est confirmée par les acteurs du secteur.
45.-M. X, directeur général de Bertrandt SAS, souligne ainsi la forte concurrence sur les RH et précise que « [c]’est souvent les collaborateurs qui sont dans les démarches de bouger d’une entreprise à une autre en fonction des évolutions des marchés. Après l’acquisition d’un projet, il est possible d’avoir des mouvements de collaborateurs qui seraient intéressés par un projet lorsqu’un projet est porteur d’image donc c’est motivant pour les collaborateurs. Bien évidemment, les départs massifs sont problématiques. (…) La politique RH essaie de retenir au mieux les collaborateurs. On sait que nos collaborateurs sont notre savoir- faire »53.
b)-Un contexte marqué par des mouvements de personnel importants
46.-Les acteurs interrogés au cours de l’instruction confirment également l’importance des mouvements de personnel dans leur métier qui engendre de nombreuses problématiques dans l’exécution des projets.
47.-M. Y (Directeur général d’Estella Mobility, anciennement directeur opérationnel pour Ausy SAS, dans le secteur aérospatial et défense) souligne, sur ce point, la facilité pour les consultants et ingénieurs du secteur de changer d’entreprise, ce qui entraîne, selon lui, des tensions au niveau du recrutement. Il explique ce taux de rotation important de la manière suivante : « [l]es sources de recrutements sont multiples : Cooptation, job boards [plateformes de recrutement], APEC, etc. Les consultants et ingénieurs sont vite à l’écoute du marché ; si insatisfaction, on perd vite les employés. S’ils mettent leur nom sur un job board : ils touchent une vingtaine d’offre en quelques jours. C’était déjà le cas en 2018 mais ça va crescendo, c’est de plus en plus compliqué, j’ai jamais vu ça »54.
48.-Dans ce contexte, la mise en place de politiques visant à fidéliser les RH et à limiter ainsi leur perte d’expertise constitue une préoccupation importante des acteurs.
49.-M. X, directeur général de Bertrandt SAS, indique en ce sens : « [o]ui, la compétence a une valeur importante (…). Il y a trop de turnover sur le marché. La particularité de Bertrandt est d’avoir un des turnovers les moins élevé sur le marché. L’ADN de l’entreprise est de fidéliser les collaborateurs. Il y a un turnover important sur les métiers en tension. »55
50.-Ce taux de rotation important est de nature à poser des difficultés non seulement en matière de gestion des RH mais également en matière d’organisation. M. Y (Directeur général d’Estella Mobility, anciennement directeur opérationnel pour Ausy SAS, dans le secteur de l’aérospatial et de la défense) indique à cet égard : « [l]es mouvements démultipliés causent de nombreux problèmes : le temps de formation est long, et coûteux; quelqu’un qui part au bout de six mois c’est catastrophique. On observe également, surtout récemment, une forte inflation salariale, c’est phénoménal. »56
51.-M. Z, Directeur juridique et conformité et M. A, Office manager labor and social law pour le groupe Segula Technologies, SCT active dans le secteur automobile, relèvent, dans le même sens, que ces mouvements de salariés entraînent des difficultés dans l’exécution des contrats et engagements pris avec les clients finaux en termes de désorganisations, de délais ou de coûts. Or, selon eux, « quand les ressources ne sont pas les mêmes sur la durée du projet, la qualité du rendu peut-être affectée. »57
c)-Le recours aux partenariats sous la forme de groupements momentanés d’entreprises ou de sous-traitance
52.-Afin de faire face à la pénurie de main-d’œuvre et répondre aux demandes souvent complexes des clients finaux, les entreprises des secteurs concernés s’engagent dans des partenariats ponctuels entre elles sous la forme de groupements momentanés d’entreprises (ci-après « GME ») ou de sous-traitance.
53.-Les sociétés demandeuses de clémence ont expliqué à cet égard que les spécificités de certains projets d’envergure (complexité, besoin d’expertises différentes et de savoir-faire très ciblés, demande du client pour un regroupement de ses prestataires, etc.) nécessitaient le recours à de tels partenariats entre concurrents.
54.-Pour satisfaire les exigences des clients, Ausy/Randstad pouvait ainsi avoir recours à des partenariats avec des entreprises concurrentes fondés sur des complémentarités techniques, géographiques ou capacitaires58.
55.-Dans une étude de 2021, Xerfi dresse un constat similaire, relevant un accroissement en France du recours à la sous-traitance59. L’organisme évalue le « poids » des consommations intermédiaires (ou achats de prestations, dont sous-traitance) dans les entreprises de conseil en technologies entre 37,6 et 39 % de leur chiffre d’affaires entre 2013 et 201960.
d)-Les différents moyens utilisés par les entreprises pour limiter les mouvements de personnel
56.-Afin de répondre aux difficultés liées à la rareté des ressources humaines et à l’important taux de rotation du personnel, les SCT et ESN mettent en place des politiques RH visant à fidéliser leur personnel (i). Elles utilisent également différents leviers juridiques, comme des clauses contractuelles en vue de limiter les mouvements de personnel (ii).
Les politiques RH visant à fidéliser les employés
57.-Les acteurs du marché disposent de différents leviers pour répondre à cette forte rotation du personnel et cette crainte de déperdition d’expertise. Cela passe tant par une amélioration des conditions matérielles de travail (salaire, formation, flexibilité, télétravail) que par une attention accordée au cadre et à la qualité de vie au travail.
58.-L’Étude Xerfi ESN 202261 met ainsi en avant la place accordée à la formation qui permet de répondre aux attentes de montée en compétences des salariés et souligne l’importance pour les entreprises de soigner la qualité de vie au travail de leurs salariés.
59.-Les acteurs interrogés au cours de l’instruction ont également fait état d’outils comme les augmentations salariales, les parcours de carrière et l’aide aux projets de mobilité62 ou encore les programmes de mesure de la qualité de vie au travail, comme la labélisation « great place to work »63, afin de fidéliser leurs collaborateurs.
Les moyens juridiques utilisés pour se prémunir contre la concurrence déloyale ou la désorganisation en cas de partenariats ou sous-traitance
60.-Afin de limiter les mouvements de personnel, les entreprises des secteurs concernés ont également recours à des outils juridiques comme les clauses de non-concurrence insérées dans les contrats de travail de leurs employés afin de limiter leur possibilité de rejoindre une entreprise concurrente ou encore les clauses de non-sollicitation insérées directement dans les contrats de sous-traitance ou de partenariat afin de limiter les possibilités de débauchage de personnel directement entre entreprises concurrentes.
61.-La validité juridique de ces clauses est encadrée par une abondante jurisprudence.
Les clauses de non-concurrence opposables aux salariés
62.-La clause de non-concurrence figurant dans un contrat de travail interdit à un salarié, après son départ de l’entreprise, l’exercice d’une activité susceptible de porter préjudice à son ancien employeur, que ce soit dans le cadre d’un engagement chez un concurrent ou dans le cadre d’une activité exercée pour son propre compte.
63.-La jurisprudence soumet la validité des clauses de non-concurrence au respect des droits et libertés des salariés consacrés par le code du travail. Ainsi, pour être licite, la clause doit, à peine de nullité, être indispensable à la protection des intérêts légitimes de l’entreprise64, être limitée dans le temps et dans l’espace65, prendre en compte les spécificités de l’emploi du salarié66 et comporter l’obligation pour l’employeur de verser au salarié une contrepartie financière67.
64.-S’agissant des secteurs concernés par la présente affaire, certains responsables de SCT et ESN ont indiqué que les clauses de non-concurrence étaient peu utilisées, notamment en raison de leur mise en œuvre difficile et de leurs coûts élevés68.
Les clauses de non-sollicitation de personnel
65.-Les clauses de non-sollicitation de personnel conclues entre entreprises imposent l’obligation de ne pas solliciter, embaucher ou faire travailler, des collaborateurs, salariés ou prestataires de l’autre partie pendant une période déterminée. Ces clauses sont généralement stipulées entre un prestataire et son client en cas de sous-traitance mais également entre concurrents à l’occasion d’un partenariat pour le compte d’un client. Elles peuvent également être prévues dans le contexte d’une cession d’entreprise ou d’activité69.
66.-L’obligation peut être unilatérale (notamment dans le cas d’une relation verticale de type client-fournisseur et de sous-traitance) ou réciproque. Il apparaît que dans les relations de cotraitance, ces clauses sont généralement réciproques70.
67.-Sans que cela préjuge de la licéité de telles clauses, comme cela est exposé infra aux paragraphes 71 à 73, leur usage est relativement répandu dans les secteurs concernés. Le syndicat professionnel Numeum, qui regroupe plus de 2 300 ESN, éditeurs de logiciels, plateformes et sociétés de conseil en technologies, met ainsi à disposition de ses adhérents, au travers de guides contractuels, des clauses-types de non-sollicitation71.
68.-L’instruction a révélé que, dans les secteurs concernés, les clauses de non-sollicitation de personnel sont relativement fréquentes dans le cadre de relations de partenariat ou de sous- traitance. Selon les acteurs économiques interrogés, il s’agirait, par ces clauses, de sécuriser les projets en cours de réalisation72 et ce, dans l’intérêt et à la demande des clients73.
69.-La portée de ces clauses peut varier selon qu’elles se limitent à interdire la sollicitation du travailleur par l’employeur potentiel74 ou, s’étendent à toute possibilité d’embauche ou de recrutement d’un travailleur, y compris lorsque celui-ci prend lui-même l’initiative de postuler chez l’autre employeur75.
70.-Ces clauses peuvent prévoir une indemnisation en cas de non-respect de l’obligation de non- sollicitation, ainsi qu’une exception liée à la condition de l’obtention de l’accord préalable de l’autre partie pour pouvoir solliciter, embaucher ou recruter le travailleur et ainsi éviter le paiement de l’indemnisation.
71.-Si elles ne sont pas interdites en soi, le juge judiciaire considère néanmoins que ces clauses restreignent la liberté du travail et d’entreprendre et qu’elles sont, partant, d’interprétation stricte. La Cour de cassation a précisé à cet égard « qu’une stipulation contractuelle qui porte atteinte aux principes de liberté du travail et de liberté d’entreprendre n‘est licite que si elle est proportionnée aux intérêts légitimes à protéger compte tenu de l’objet du contrat »76. Dans le contentieux associé, le juge s’attache ainsi à vérifier précisément leur application par rapport à leur teneur77.
72.-La Cour de cassation a affirmé l’autonomie d’une telle clause par rapport à la clause de non-concurrence conclue entre employeur et salarié. Elle a ainsi estimé que la clause de non- sollicitation n’était ni une variante, ni une précision de la clause de non-concurrence78.
73.-Par ailleurs, la Cour de cassation a jugé que la clause de non-sollicitation n’est licite qu’à condition d’être proportionnée aux intérêts légitimes à protéger, compte tenu de l’objet du contrat. Cet examen peut varier selon les relations économiques entre les deux parties. Ainsi, dans un arrêt du 27 mai 2021, la Cour de cassation a jugé « [qu’e]n se déterminant ainsi, alors que, conclue entre entreprises concurrentes, la clause litigieuse portait atteinte à la liberté du travail des personnes qui étaient contractuellement liées à ces entreprises ainsi qu'à la liberté d'entreprendre de ces dernières », la cour d'appel aurait dû rechercher « si ces atteintes étaient proportionnées aux intérêts légitimes que la clause était censée protéger »79.
74.-Les clauses de non-sollicitation de personnel se distinguent par ailleurs des accords de non- débauchage, tels que ceux décrits aux paragraphes 79 à 125 (grief n° 1), 147 à 217 (grief n° 2) par lesquels des employeurs (i) s’engagent à ne pas embaucher activement ou passivement des employés d'autres parties à l'accord, également qualifiés d’accord de non- embauche ou (ii) acceptent seulement de ne pas approcher activement les employés d'un autre employeur avec une opportunité d'emploi, également qualifiés d’accords de non- sollicitation. Ces accords peuvent être sectoriels ou n'impliquer que quelques parties, n'engager qu'une seule partie ou être réciproques80.
Les actions en concurrence déloyale entre entreprises
75.-L’action en concurrence déloyale permet de sanctionner, sur le fondement du droit commun de la responsabilité civile extracontractuelle, les actes de désorganisation, de parasitisme81 et de dénigrement, afin d’obtenir réparation du préjudice subi.
76.-La Cour de cassation considère que si l’embauche, dans des conditions régulières, d’anciens salariés d’une entreprise concurrente n’est pas en elle-même fautive, elle le devient lorsqu’elle intervient dans des conditions déloyales et entraîne une désorganisation de cette entreprise82.
77.-Il ressort du dossier d’instruction que dans les secteurs concernés, de telles actions en concurrence déloyale sont souvent perçues comme longues et coûteuses et ne dépassent généralement pas le stade précontentieux de la mise en demeure83.
2.-LES ACCORDS ET PRATIQUES DE NON-DEBAUCHAGE ENTRE CONCURRENTS
78.-Seront successivement présentés :
-le gentlemen’s agreement de non-débauchage entre Ausy/Randstad et Alten (a) ;
-les clauses de non-sollicitation de personnel dans les contrats de partenariat et/ou de sous-traitance et le gentlemen’s agreement de non-débauchage sur les ressources humaines entre le Groupe Expleo et Bertrandt dans le secteur automobile (b) ;
-les clauses de non-sollicitation de personnel dans les contrats de partenariat et/ou de sous-traitance entre Ausy/Randstad et Atos dans les secteurs de l’aéronautique, l’aérospatial et la défense, à Toulouse (c).
a)-Le gentlemen’s agreement entre Ausy/Randstad et Alten
Les rapports de concurrence entre Ausy/Randstad et Alten
79.-Il ressort des éléments du dossier qu’Ausy/Randstad et Alten sont en concurrence tant pour la fourniture de prestations de services d’assistance, de conseil et d’ingénierie que pour l’embauche et l’emploi de ressources humaines dans leurs secteurs d’activité84.
80.-Selon Alten, les rapports de concurrence sont toutefois limités dans le secteur de l’ingénierie et du conseil en technologies en ce qui concerne la fourniture de prestations de services, qui représente un peu plus de 75 % de l’activité d’Alten mais uniquement 6 % de celle d’Ausy/Randstad85.
L’existence d’un gentlemen’s agreement entre Ausy/Randstad et Alten
81.-L’existence d’un gentlemen’s agreement entre Ausy/Randstad et Alten visant à ne pas se faire concurrence sur le recrutement de commerciaux et managers (dits « business managers ») ressort tant de la demande de clémence86 que des différents échanges intervenus entre les parties au cours des années 2007 à 2016.
82.-Les différents éléments au dossier sont présentés ci-après.
Les déclarations des sociétés demandeuses de clémence
83.-Selon les sociétés demandeuses de clémence, la conclusion d’un gentlemen’s agreement en matière de non-débauchage entre Ausy/Randstad et Alten remonte à 2004. Cet accord a été appliqué jusqu’à la date du dépôt de la clémence, le 5 avril 201887.
84.-La demande de clémence précise le contexte général dans lequel l’accord en question s’est formé, qui est marqué par une forte rotation de personnel entre entreprises concurrentes. Elle souligne que, dans certaines circonstances, des accords non formalisés de non-agression peuvent être conclus entre entreprises concurrentes pour ne pas débaucher leurs collaborateurs respectifs. Tel peut être le cas lorsqu’un fournisseur constate le débauchage de plusieurs de ses salariés par un concurrent. De tels accords réciproques entre entreprises concurrentes peuvent également être conclus lorsqu’un manager rejoint une nouvelle équipe, prenant alors la forme d’un engagement moral avec son entreprise d’origine de ne pas débaucher ses équipes. Les sociétés demandeuses de clémence ont indiqué qu’un accord de ce type a été conclu entre Alten et Ausy/Randstad dès 2004 lorsque deux ex-salariés d’Ausy/Randstad ont rejoint l’entreprise et qu’Alten leur a demandé de ne pas débaucher massivement leurs anciennes équipes. Ces derniers auraient alors accepté, sous réserve de la réciprocité de l’accord. Les sociétés demandeuses de clémence ont spécifié que cet accord était informel et n’avait pas fait l’objet d’un contrat écrit. Des échanges de courriels lors de tentatives de recrutements de cadres ou managers attestent néanmoins de l’existence de cet accord88.
85.-En réponse à un questionnaire adressé par les rapporteurs, les sociétés demandeuses de clémence ont précisé que l’accord en question s’est formé lors du départ pour Ausy/Randstad de M. D et M. E qui occupaient tous deux des postes de directeurs généraux au sein d’Alten. Les deux directeurs ont rejoint les effectifs d’Ausy/Randstad à quelques jours d’intervalle en octobre 2004 et y sont restés jusqu’en 202089.
86.-Dans une attestation communiquée par les sociétés demandeuses de clémence, M. D (DG France Adjoint Groupe, Ausy SAS) et M. E (Directeur général, Ausy SAS) ont confirmé ces éléments, notamment le caractère réciproque de l’engagement pris par les parties, et indiqué qu’il limitait les recrutements réciproques dès lors qu’ils ne pouvaient avoir lieu qu’après accord de l’autre partie90.
87.-D’après les déclarations des sociétés demandeuses de clémence, cet accord n’aurait pas concerné les consultants mais principalement les managers, les commerciaux et les directeurs de projets ou salariés occupant des fonctions techniques91.
88.-L’accord litigieux aurait été en vigueur entre 2004 et jusqu’en 2016 ou 201892. Sur ce point, les sociétés demandeuses de clémence ont précisé, en réponse à un questionnaire datant de 2022, que cet accord était de moins en moins respecté pendant la période précédant le dépôt de la demande de clémence d’Ausy/Randstad en avril 2018. Elles ont également indiqué que les opérations de visite et saisie ainsi que les consignes strictes du management auprès des salariés de cesser tout échange d’informations avec des concurrents, ainsi que le départ des dirigeants d’Ausy/Randstad, anciens salariés d’Alten, ont définitivement mis fin à tout potentiel accord93.
89.-Enfin, les sociétés demandeuses de clémence ont souligné, dans leur réponse à ce même questionnaire, que selon les données dont elles disposent sur les 24 derniers mois, soit entre mai 2020 et mai 2022, des mouvements importants de salariés ont été constatés entre Ausy/Randstad et Alten94.
Les pièces figurant au dossier
90.-Les pièces figurant au dossier confirment les déclarations du demandeur de clémence et l’existence de l’accord en cause sur une période comprise entre 2007 et 2016, cet accord visant à ce que les parties ne procèdent pas à des pratiques de débauchage respectives de leur personnel, tout particulièrement les commerciaux et managers.
91.-Les différentes pièces au dossier sont présentées ci-dessous par ordre chronologique.
-2007
92.-Le 16 novembre 2007, Mme F (Chargée de recrutement Senior, Ausy SAS) demande par courriel à M. E (Directeur général, Ausy SAS) : « [p]eut-on contacter un commercial, chez
Alten depuis février 2007, qui nous a envoyé une candidature spontanée ? ». M. E (Directeur général, Ausy SAS) répond le même jour : « non, je ne préfère pas »95.
-2008
93.-Le 3 avril 2008, dans un échange de courriels interne à Ausy/Randstad, Mme G (Responsable recrutement manager, Ausy SAS) adresse un courriel à M. D (DG France Adjoint Groupe, Ausy SAS) et M. E (Directeur général, Ausy SAS) en indiquant : « CQs [quelques] CVS commerciaux Alten sortent sur Monster. Peut-on avancer avec leur profil (je sais que nous ne devons pas le faire / chasse mais là, ils sont sur un jobboard !!!) »96.
94.-La réponse qui lui est donnée par M. E (Directeur général, Ausy SAS) est la suivante : « [i]l y a une non-agression réciproque et tacite, je préfère que l'on ne les contacte pas (sauf, bien sûr, s'ils ont déjà quitté Alten) »97.
-2009
95.-Les sociétés demandeuses de clémence ont déclaré qu’au mois de juillet 2009, une salariée d’Alten récemment recrutée avait contacté une salariée d’Ausy/Randstad grâce à la plateforme Viadeo. Une fois mise au courant, la direction avait alors rappelé à l’ordre la recruteuse en mettant en copie la direction d’Alten98.
96.-En effet, le 22 juillet 2009, à suite de la prise de contact d’un salarié d’Ausy/Randstad par Mme H (Chargée du recrutement BM, Alten SA), M. E (Directeur général, Ausy SAS) lui adresse un courriel, avec M. I (PDG, Alten SA) en copie, lui indiquant, au sujet du gentlemen’s agreement entre Ausy et Alten : « [u]n petit mot pour vous dire que nous avons, Alten et Ausy, un gentleman agreement pour ne pas se "chasser" mutuellement les équipes managériales. Merci donc de bien vouloir ne plus tenter ce genre d'approche à l'encontre des managers Ausy. Je vous engage à vous rapprocher de I pour plus d'informations si nécessaire »99.
97.-Le 23 juillet 2009, Mme H (Chargée du recrutement BM, Alten SA), répond à M. E (Directeur général, Ausy SAS) en ces termes : « [s]uite à l'envoi de votre mail, veuillez m'excuser pour ces chasses qui, effectivement n’ont pas lieu d’être. Arrivée chez Alten en 2008, je n’étais pas au courant, je ne donnerai donc pas suite à ces actions. »100
98.-Ce courriel est transféré en interne pour information par M. E (Directeur général, Ausy SAS) à Mme G (Responsable recrutement manager, Ausy SAS)101.
-2011
99.-Les éléments figurant au dossier permettent d’établir qu’Ausy respectait son engagement vis-à-vis d’Alten et que les cadres d’Ausy, informés de l’accord, se plaignaient de recrutements de leurs salariés par Alten auprès de leur direction102.
100.-Ainsi, le 24 août 2011, dans un échange de courriels interne à Ausy au sujet de l’accord en cause, il est indiqué : « [p]our ma recherche de managers, tu m’avais dit que nous avions un "gentleman agreement" avec Alten sur la non sollicitation de nos managers respectifs, ce que nous avons respecté sur l’ouest jusqu'à présent. Or il semblerait que J ait été recrutée par Alten Rennes (Info restant encore à confirmer pour être sûr à 100%). Qu'en est-il ? »103.
-2012
101.-En 2012, plusieurs éléments au dossier témoignent de tentatives d’embauches par Alten de salariés de chez Ausy, dont celle de M. K, à l’occasion desquelles l’existence d’un accord de non débauchage réciproque entre ces deux entreprises est rappelée.
a.-Le cas de M. K
102.-Les sociétés demandeuses de clémence ont indiqué qu’au mois de mai 2012, alors qu’un cadre d’Alten remettait en cause la validité de l’accord lors de candidatures spontanées, la direction d’Ausy/Randstad s’est plainte de cela auprès de la direction d’Alten104.
103.-Ainsi, le 3 mai 2012, dans un échange de courriels interne au groupe Alten, M. L (Directeur de département, Alten Sud-Ouest SAS) sollicite M. M (Responsable du recrutement chez Alten SA 105) et M. N (Directeur des opérations, Alten Sud-Ouest SAS), avec Mme O en copie (Responsable recrutement BM, Alten SA), pour savoir comment agir sur un recrutement d’un salarié d’Ausy/Randstad, M. K, compte tenu d’un message reçu d’Ausy/Randstad faisant état d’un accord de non-débauchage : « [n]ous avons K (IA [Ingénieur d’affaire] évolutif RA [Responsable d’activité] Ausy) dans le process de recrutement. Je dois le signer vendredi pour un poste de RA. P (DRH Ausy) vient de me contacter pour me demander de stopper le process en respect d’un accord signé entre E (DG Ausy) et I. Que fait-on ? »106.
104.-M. N (Directeur des opérations, Alten Sud-Ouest SAS) répond : « L, [(Directeur de département, Alten Sud-Ouest SAS)] merci de ne pas échanger avec Ausy et de les renvoyer vers M [(Responsable du recrutement chez Alten SA)] »107. M. Q (Directeur général délégué, Alten SA), à qui le message interne est transféré, ajoute : « [e]st-ce ce candidat qui a donné ton nom à AUSY ? »108.
105.-En retour, le salarié à l’origine du recrutement chez Alten Sud-Ouest SAS, M. L (Directeur de département, Alten Sud-Ouest SAS), précise à M. Q (Directeur général délégué, Alten SA), M. N (Directeur des opérations, Alten Sud-Ouest SAS) et M. M (Responsable du recrutement chez Alten SA109)110 :
« Je lui ai laissé un message aujourd’hui. J’attends de l’avoir pour confirmer que c’est bien lui qui a donné mon nom à Ausy. Mais à mon avis ça ne pas être quelqu’un d’autre. Idem pour celui de R qu’il a rencontré dans le process et que P a mentionné lors de son appel de ce matin.
N [M. N (Directeur des opérations, Alten Sud-Ouest SAS)], bien reçu sur le fait de ne pas échanger avec Ausy. Suite à un point avec M :
--je vois le candidat demain,
--sois il signe dans la foulée et nous lançons le process,
--soit il n’est pas sur ou nous avons un doute et nous laissons tomber ».
106.-M. L (Directeur de département, Alten Sud-Ouest SAS) ajoute dans un courriel postérieur adressé aux mêmes protagonistes le 3 mai 2012 : « [j]e viens d’avoir K au téléphone : Après notre dernier entretien, il a communiqué sur le fait qu’il avançait avec nous et qu’il souhaitait nous rejoindre. (…) Ausy met la pression pour le garder. P est passé le voir hier. Il a donné les noms de R et L. Il vient nous voir demain pour signer (…) »111.
107.-Cette tentative d’embauche d’un salarié de chez Ausy/Randstad par Alten fait également l’objet d’échanges de courriels internes à Ausy/Randstad.
108.-Ainsi, dans un premier courriel daté du 9 mai 2012, M. S (Directeur international, Ausy SAS) alerte M. P (DRH opérationnel, Ausy SAS) de la situation en ces termes : « K a eu une proposition d'ALTEN Toulouse pour un poste de manager en concurrence directe sur les comptes AUSY. Peux-tu faire en sorte que l’accord de non débauchage de managers entre nos 2 Sociétés soit respecté ? »112.
109.-Le lendemain, il lui répond avec M. E (Directeur général, Ausy SAS) en copie : « [j]’ai eu M [Alten] à ce propos vendredi dernier. Il m’a dit qu’il regarderait si il devait bloquer ou pas ce recrutement. Si les toulousains lui disent que c’est K qui a fait le premier pas, il ne bloquera pas. Et de fait il n’a pas bloqué. Ce qui ne m’étonne pas vu la teneur de notre conversation téléphonique, M étant peu ouvert sur cette discussion et remettant en question l’existence d’un accord, pour évoquer un "gentleman agreement" purement oral, et ne devant pas s’appliquer si le manager est en recherche active »113.
110.-Le même jour, M. E (Directeur général, Ausy SAS) écrit à M. I (PDG, Alten SA) : « [j]e te transmets ci-dessous le mail de l'un de nos managers, concernant l'accord de non débauchage réciproque que nous avons toujours eu entre nos deux sociétés. Je suis ennuyé par cette affaire parce que dans le même temps je demande toujours à notre cellule de recrutement managers d'écarter les candidats Alten et qu'il me semble bien que nous fassions perdurer cette pratique réciproque. Peux-tu dire un mot à M à ce sujet ? »114.
111.-Le 31 mai 2012, dans un courriel adressé à M. M (Responsable du recrutement chez Alten SA115) ainsi qu’en copie à M. I (PDG, Alten SA) et M. E (Directeur général, Ausy SAS),
M. P (DRH opérationnel, Ausy SAS), écrit116 :
« Je fais suite à notre conversation téléphonique il y a quelques jours pour te confirmer que notre manager toulousain K nous a présenté sa démission et nous a indiqué avoir signé chez Alten.
Que faire aujourd’hui sur le cas de K ?
E a revalidé avec I l’accord entre nos deux entreprises qui concerne le "non-débauchage" mutuel de managers. J’ai compris pour ma part que K serait bien quoi qu’il arrive le dernier cas que nous aurons à traiter ».
b.-Les autres cas
112.-En parallèle, à la même période au mois de mai 2012, Mme O (Responsable recrutement BM, Alten SA), en copie des échanges sur le cas de M. K, adresse en interne à M. M (Responsable du recrutement chez Alten SA117) le courriel suivant : « [p]our compléter le sujet, nous avons également fait une propal sur un poste de Manager Amélioration de la Performance (DDPS) à un salarié Ausy. Il accepte les termes du contrat et vient signer mercredi prochain. J’ai insisté pour qu’il reste absolument opaque auprès d’Ausy sur la société qu’il va rejoindre. Il souhaite vraiment quitter Ausy et a bien compris son intérêt à rester discret »118. M. L (Directeur de département, Alten Sud-Ouest SAS), M. Q (Directeur général délégué, Alten SA) et M. N (Directeur des opérations, Alten Sud-Ouest SAS) sont en copie de ce message.
113.-Au mois de juin 2012, M. P (DRH opérationnel, Ausy SAS) écrit en interne un courriel, relatant les éléments suivants : « [j]’ai eu quelques retours aujourd’hui suite au départ de T hier. Elle rejoint effectivement le pôle télécom d’Alten. D’autre part, U a rejoint Alten ASD et prospecte visiblement notamment Morpho [Morpho Consulting] »119.
114.-Ce courriel est transféré par M. E (Directeur général, Ausy SAS) à M. I (PDG, Alten SA) le 4 juin 2012, avec comme message : « [r]ecrutement managers : ça fait 3 en quelques semaines.... Je te propose d’en reparler Mardi 12 lors de notre déjeuner parce que les managers Ausy ne comprennent plus : d’un côté je leur interdis de recruter des managers Alten, de l’autre Alten ne se prive pas de débaucher des managers Ausy. M ne joue visiblement pas le jeu »120.
-2013
115.-Au mois de mai 2013, dans un courriel adressé à M. M (Responsable du recrutement chez Alten SA121), M. P (DRH opérationnel, Ausy SAS) écrit122 :
« Je viens d’apprendre par l’un de nos managers qu’Alten l’a contacté sur un réseau social pour lui proposer un poste sur Sophia.
J’en suis réellement étonné puisque suite à notre dernière conversation téléphonique, il m’avait semblé que E avait pu échanger à nouveau avec I sur ce sujet et qu’il était acquis entre nous que nous ne pratiquerions pas d’approche de nos managers respectifs. J’imagine que le chargé de recrutement Managers qui a contacté notre salarié n’était pas au courant de ce deal. Ceci est tout de même vraiment regrettable après les trois recrutements que vous avez faits l’an passé parmi nos managers. Peux-tu me confirmer que cette erreur restera bien un acte isolé ? ».
116.-Ce message est transféré par M. E (Directeur général, Ausy SAS) à M. I (PDG, Alten SA) pour information123.
-2016
117.-Les sociétés demandeuses de clémence ont indiqué qu’au mois de septembre 2016, Ausy/Randstad avait rappelé le principe de l’accord à Alten en insistant sur le fait qu’Ausy appliquait toujours l’accord124.
118.-Plusieurs pièces du dossier datées de 2016 relatives à l’existence de l’accord en cause confirment les déclarations des sociétés demandeuses de clémence.
119.-Sont présentés ci-après les différents échanges intervenus à l’occasion des candidatures auprès d’Alten de M. Y et M. V de chez Ausy/Randstad.
a.-Le cas de M. Y
120.-Au mois de mars 2016, M. Y (Directeur des opérations, Ausy SAS jusqu’en août 2019) a échangé avec Mme W, prestataire indépendant en recrutement125, dans le cadre d’une candidature pour Alten. Dans une note sur cette rencontre et son profil, dont l’objet est
« [c]andidat Y : DO Toulouse: pour Avis », il est écrit : « [q]uestion : quid du pacte de non- agression Alten/ausy »126.
121.-En ce qui concerne l’existence d’un possible accord entre Ausy/Randstad et Alten ayant pu avoir une incidence sur sa situation professionnelle, M. Y, devenu par la suite directeur général d’une SCT spécialisée dans la R&D pour des clients du secteur des transports et des mobilités, a déclaré127 :
« Concernant mes démarches de candidature auprès d’Alten, une offre d’emploi m’a été présentée par un cabinet de recrutement : l’opportunité de travailler chez Alten pour un poste aux USA, en 2016. J’ai rencontré Mme W qui était RH. J’avais aussi rencontré un autre cadre d’Alten, M. M, à Paris. Je savais qu’il existait un pacte de non-agression entre Alten et Ausy concernant les managers. J’en avais entendu parler, lors d’échanges informels, de l’ordre de la rumeur. On était tous en courant mais sans savoir d’où ça venait.
Il faut savoir qu’il y a eu des échanges Ausy-Alten, des mouvements de capital qui ont pu participer de la mise en place d’un tel accord.
Je ne sais pas si ce pacte a pu jouer sur mon embauche par Alten. On a pas franchi beaucoup d’étapes du processus de recrutement. Je dois dire qu’il n’y pas eu d’"accroche" forte entre les deux parties, c’est mon ressenti.
Sur ce fameux pacte, je ne suis pas sûr qu’il ait duré très longtemps entre Alten et Ausy. Je ne crois qu’il n’a duré qu’un temps. »
b.-Le cas de V
122.-Le 26 septembre 2016, M. D (DG Adjoint Groupe et DG France, Ausy SAS) écrit à M. Q (Directeur général délégué, Alten SA) au sujet de la démarche de recrutement par Alten d’un de ses directeurs, M. V128 :
« J’ai découvert la semaine dernière que N, I et toi avaient rencontré un de mes Directeurs pour le débaucher, en sachant que ce n'est pas le premier en 2016.
Je suis extrêmement surpris de cette démarche car elle est contraire aux accords de non- agression que nous avons passé depuis des années avec I. Aucune démarche de débauchage doit être entreprise envers l'autre et aucun manager doit être vu sans en avertir préalablement l’autre.
Nous nous sommes toujours tenus à cet accord.
J’entendais de plus I à la radio ce WE, promouvoir l'éthique d’ALTEN et le fait de ne jamais débaucher chez ses concurrents.
Je te remercie donc de cesser cette démarche en particulier et tout autre à l’avenir visant AUSY ».
123.-Ce courriel est ensuite transféré en interne chez Ausy/Randstad par M. D (DG France Adjoint Groupe, Ausy SAS) à M. E (Directeur général, Ausy SAS)129.
124.-Transférant également ce courriel en interne chez Alten à M. I (PDG, Alten SA) et M. M (Responsable du recrutement chez Alten SA130), M. Q (Directeur général délégué, Alten SA) écrit131 :
« Il doit s'agir de V et il en a rajouté.
I ne l’a que croisé, sa porte était ouverte et je le lui ai présenté en sortant de mon bureau.
On parlera ensemble de ce que je réponds à D, mais à mon sens leur passage chez Randstadt annule de fait tout agrément particulier avec Ausy ».
125.-Interrogé au sujet de ce dernier courriel dans le cadre d’un questionnaire, Alten a répondu :
« M. Q n’a manifestement fait aucun retour à M. D sur ce sujet. Comme le précise M. D, Alten débauche des salariés d’Ausy (ainsi que ceux des autres acteurs du secteur). A titre d’information, Alten précise que, depuis 2015, elle a engagé près de 500 process de recrutements avec des personnes originaires d’Ausy, et en a embauché 52 d’entre elles »132.
b)-Les clauses de non-sollicitation de personnel et le gentlemen’s agreement entre Bertrandt et le Groupe Expleo dans le secteur automobile
126.-Il ressort du dossier d’instruction que des contrats de partenariat conclus entre le Groupe Expleo et Bertrandt SAS pour le compte du client Renault SA, entre 2011 et 2020, contiennent des clauses de non-sollicitation de personnel.
127.-Par ailleurs, les éléments du dossier attestent que les deux entreprises ont mis en place un gentlemen’s agreement de non-débauchage portant sur les ressources humaines impliquées dans la réalisation de prestations commerciales dans le secteur automobile entre les mois de février et septembre 2018.
128.-L’objectif de ces accords était de limiter voire d’empêcher les mouvements de personnel entre les deux entreprises. Leur mise en œuvre a donné lieu, entre les entreprises concernées, à des échanges d’informations sur les mouvements de personnel en cours ou en projets. Dans certains cas, les embauches prévues par l’une ou l’autre partie, au sein du personnel de son concurrent, ont fait l’objet de « veto» exprimés et/ou ont été empêchées par Bertrandt ou le Groupe Expleo.
Les rapports de concurrence et de partenariats entre Bertrandt et le Groupe Expleo
129.-Les groupes Bertrandt et le Groupe Expleo sont engagés dans des relations de concurrence et de partenariats (groupements, sous-traitance) pour proposer des services d’assistance, de conseil et d’ingénierie auprès de clients finaux actifs dans le secteur de l’automobile, notamment Renault133.
130.-Dans un courriel du 9 janvier 2012, M. 1 (Marketing & Sales Director, Assystem France [actuellement Expleo France]) présentait le fonctionnement de ses partenariats avec ses concurrents, dont Bertrandt, aux fins d’une candidature à un appel d’offres du client automobile [Confidentiel]134 et indiquait notamment :
« Assystem [actuellement Expleo] dispose de manière autonome des compétences structurantes et capacitaires pour assurer la maitrise d’œuvre industrielle des projets confiés par ses clients.
L’utilisation de rang 2 se fait pour capter des compétences spécifiques à acquérir, accélérer un processus de recouvrement ou écrêter un pic de charge non récurrent ni stratégique. Les partenariats constitués avec des tiers ont pour but la réalisation d’un projet spécifique nécessitant la double compétence, dans tous les cas ces partenariats doivent permettre la libre conccurence.
Pour exemple nous avons un partenariat avec Bertrandt, [Confidentiel] » (soulignements ajoutés).
131.-Interrogés sur leur rapport de concurrence, notamment dans le secteur automobile, Bertrandt et le Groupe Expleo ont indiqué qu’ils sont bien concurrents dans le secteur automobile, Renault étant le seul client qu’ils ont en commun. Ils ont tous deux précisé que c’est en raison de leur complémentarité qu’ils ont pu répondre conjointement à des appels d’offres de ce client, le groupe Expleo précisant toutefois qu’au cas par cas, des offres individuelles pouvaient par ailleurs être présentées135.
Les clauses de non-sollicitation de personnel contenues dans les conventions de groupement d’entreprises et de sous-traitance
132.-Entre 2011 et 2020, le Groupe Expleo et Bertrandt ont passé des contrats de collaboration pour le compte du client Renault.
133.-Les déclarations de Bertrandt au cours de l’instruction s’agissant de l’existence de partenariats avec le Groupe Expleo, insistent sur la complémentarité des savoir-faire des deux entreprises pour les besoins de Renault tout en relevant les difficultés inhérentes à la mise en place d’un partenariat avec un concurrent. Bertrandt indique notamment :
« Assystem [actuellement Expleo] est un très gros concurrent. C’était la nature des marchés. Le premier marché de 2011, Vie Série, est un gros projet pour lequel le client a lancé un appel d’offre sur de la gestion Vie série136. C’est une gestion complexe et spécialisée. Il y avait des savoir-faire que nous n’avions pas et vice versa et pour pouvoir couvrir la demande du client on a regardé si on avait une complémentarité pour présenter une offre au client. (…). Créer des partenariats avec des entreprises, ce n’est pas facile. Il faut que les opérationnels apprennent à travailler ensemble car ils se voient comme des concurrents et il faut leur demander de collaborer pour délivrer un projet au client. (…) On a fait deux contrats après. Le contrat [Confidentiel] pour le développement d’un véhicule complet. On avait une partie développement produit et une partie industrialisation. (…) Ensuite le contrat [Confidentiel], (…) On a finalisé nos projets en 2020 car il n’y avait plus beaucoup d’activité. (…) Il n’y a plus de partenariats avec Expleo pour le compte de Renault, ni groupement ni sous-traitance depuis (…) 2020. »137
134.-Certains de ces contrats prévoyaient des clauses de non-sollicitation de personnel, ainsi que Bertrandt l’a expliqué lors de l’instruction : « [d]ans le cadre de l’exécution et sur la durée des projets exécutés en partenariat, nous avons convenu d’un accord de non-sollicitation de nos ressources pour certains contrats, afin de minimiser les risques dans la réalisation des projets. L’objectif était de limiter les impacts organisationnels sur les projets, d’en assurer la pérennité d’exécution et préserver la bonne relation vis-à-vis du client final, notamment concernant le respect d’engagement de confidentialité »138 (soulignement ajouté).
135.-Trois projets sont détaillés ci-après et leurs clauses de non-sollicitation présentées. Un quatrième projet139, le contrat « [Confidentiel] » de 2017, ne contient pas de clause de ce type, mais du personnel affecté sur ce contrat a néanmoins été concerné par les pratiques de non-sollicitation en cause (voir, sur ce point, les paragraphes 151, 172 et suivants).
Le projet « [Confidentiel] » (2011-2015)
136.-Dans le cadre du projet « [Confidentiel] » qui s’est déroulé entre 2011 et 2015, Bertrandt SAS et Assystem France SAS [actuellement Expleo France] ont conclu plusieurs conventions de groupement momentané d’entreprises par le biais desquelles elles ont soumis des offres communes pour le client final Renault. En vertu de ces conventions, elles ont réparti l’exécution du marché en tant que cotraitants. Plusieurs conventions ont ainsi été transmises par Bertrandt SAS au cours de l’instruction :
-un premier contrat « [Confidentiel] » pour la gestion et le pilotage des [Confidentiel] de Renault : « convention définitive de groupement momentané d’entreprise (sans personnalité morale) »140, daté du 20 janvier 2012 (entré en vigueur rétroactivement entre le 2 mai 2011 et le 23 décembre 2011). Cette convention n’a pas été renouvelée tacitement141 ;
-une nouvelle convention pour exécuter un nouveau marché [Confidentiel] sur la période du 1er janvier au 21 décembre 2012 (« convention définitive de groupement momentané d’entreprise (sans personnalité morale) »142, datée du 19 décembre 2012143) ;
-la convention GME – [Confidentiel] (« convention de groupement momentané d’entreprise (sans personnalité morale) » 144 datée du 19 février 2013 pour la période du 1er janvier au 20 décembre 2013)145. Cette convention a fait l’objet de quatre avenants successifs prolongeant sa durée jusqu’au 30 juin 2015146.
137.-Ces conventions contenaient chacune une clause de non-sollicitation de personnel.
138.-Ainsi, le premier contrat « [Confidentiel] » pour la gestion et le pilotage des [Confidentiel] de Renault contient un article 11.4 rédigé comme suit :
« Chacun des membres renonce à engager ou à faire travailler par personne interposée, tout collaborateur de l'autre membre ayant participé à l'Offre commune ou ayant réalisé des Prestations dans le cadre du Projet, même si la sollicitation initiale est formulée par ce collaborateur. La présente interdiction s'applique pendant toute la durée du présent protocole et pendant l'année qui suivra sa cessation, pour quelque cause qu'elle survienne. Sauf dérogation expresse et préalable des membres, si l'un des membres ne respecte pas les stipulations ci-dessus, il s'engage à indemniser l'autre membre des dommages résultant, notamment mais non seulement, de la perte de savoir-faire, des engagements déjà pris pour son compte, des dépenses de sélection et de recrutement, des frais de formation, en lui versant immédiatement une somme forfaitaire égale à cinquante mille (50 000) Euros. »147
139.-La convention pour exécuter un nouveau marché [Confidentiel] signée entre Assystem France SAS [actuellement Expleo France] et Bertrandt SAS le 19 décembre 2012 ainsi que la convention GME – [Confidentiel] du 19 février 2013 prévoient également à l’article 11.4 :
« Chacun des membres renonce à engager ou à faire travailler par personne interposée, tout collaborateur de l’autre membre ayant participé aux offres/grilles de décomposition commune des prix ou ayant réalisé des Prestations dans le cadre du Marché, même si la sollicitation initiale est formulée par ce collaborateur. La présente interdiction s’applique pendant toute la durée du présent protocole et pendant l’année qui suivra sa cessation, pour quelque cause qu’elle survienne.
Sauf dérogation expresse et préalable des membres, si l’un des membres ne respecte pas les stipulations ci-dessus, il s’engage à indemniser l’autre membre des dommages résultant, notamment mais non seulement, de la perte de savoir-faire, des engagements déjà pris pour son compte, des dépenses de sélection et de recrutement, des frais de formation, en lui versant immédiatement une somme forfaitaire égale à cinquante mille (50 000) Euros »148.
Le projet « [Confidentiel] » (2014-2015)
140.-Un marché relatif au projet « [Confidentiel] » a été attribué conjointement à Bertrandt SAS et Assystem France SAS [actuellement Expleo France] le 24 mars 2014 par Renault.
141.-Bertrandt explique à ce sujet qu’en 2014, dans le cadre de l’appel d’offre de ce projet, un groupement momentané d’entreprises a été mis en place et précise que « Bertrandt avait la responsabilité du développement produit et Assystem [actuellement Expleo] des process d’industrialisation (cf [Confidentiel] signée.) Dans le cadre de la réalisation de ce marché global, les 2 entreprises se sont sous-traitées une part d’activité, toujours dans l’objectif de la complémentarité des compétences, savoir-faire nécessaires pour l’exécution des différents lots du projet. Des contrats de sous-traitance ont cadré les périmètres concernés »149.
142.-Bertrandt a transmis plusieurs conventions concernant ce projet, parmi lesquelles :
-le « protocole d’accord préliminaire de groupement momentané d’entreprises » du 17 janvier 2014 entre Assystem [actuellement Expleo] et Bertrandt, en vue de préparer une offre commune à Renault « pour la réalisation des prestations des études de développement et d'industrialisation du projet [Confidentiel] », et envisageant de la sous-traitance croisée150 ;
-la « [c]onvention de groupement momentané d'entreprises » du 19 octobre 2015 (entrée rétroactivement en vigueur le 24 mars 2014) entre Assystem France SAS (actuellement Expleo France) et Bertrandt SAS qui contient une clause de non- sollicitation (article 12) rédigée de la façon suivante : « [n]on sollicitation : A compter de la date de signature de la Convention et jusqu'à une (1) année après la cessation de celle-ci, chacune des Parties renonce à engager ou à faire travailler en connaissance de cause par personne interposée, tout collaborateur de l'autre Partie intervenue dans la réalisation des Prestations, même si la sollicitation initiale est formulée par le collaborateur. »151 ;
-le « [c]ontrat de sous-traitance dans le cadre du projet [Confidentiel] du 19/10/2015 ([Confidentiel]) » du 19 octobre 2015 (entré rétroactivement en vigueur le 24 février 2014) entre Bertrandt SAS (client) et Assystem France SAS (actuellement Expleo France) (fournisseur) prévoyant une clause de non-sollicitation (article 9 des conditions générales de services) rédigée de la manière suivante : « [l]e Client renonce à engager ou à faire travailler par personne interposée, tout collaborateur de la Société, même si la sollicitation initiale est formulée par le collaborateur. Sauf dérogation exprès et préalable de la Société, dans le cas où le Client ne respecterait pas les stipulations ci-dessus, il s’engage à indemniser la Société des dommages résultant, notamment mais non seulement, de la perte de savoir-faire, des engagements déjà pris pour son compte, des dépenses de sélection et de recrutement, des frais de formation, en lui versant immédiatement une somme forfaitaire égale à cinquante mille (50 000) Euros. »152 ;
-le « [c]ontrat de sous-traitance dans le cadre du projet [Confidentiel] du 19/10/2015 ([Confidentiel]) » du 19 octobre 2015 (entré rétroactivement en vigueur le 24 février 2014) entre Bertrandt SAS (fournisseur) et Assystem France SAS (actuellement Expleo France) (client) qui contient une clause de non-sollicitation identique à la précédente (article 9 des conditions générales de services)153.
143.-Le projet [Confidentiel] et l’ensemble des contrats afférents ont pris fin le 22 décembre 2016154.
Le contrat « [Confidentiel] » (2019)
144.-En 2019, Expleo France a conclu un marché avec Renault dans le cadre du projet
« [Confidentiel] ». Expleo France SAS a sous-traité la réalisation de certaines prestations à Bertrandt SAS dans le cadre d’un contrat de sous-traitance du 20 mars 2019 (rétroactif à la date du 1er janvier 2018)155. Ce contrat a pris fin par anticipation le 31 mars 2020156.
145.-Ce contrat contient la clause de non-sollicitation suivante (article 16) :
« Sauf accord exprès et préalable entre les Parties, chaque Partie renonce à engager ou à faire travailler, par personne interposée, tout collaborateur de l'autre Partie, même si la sollicitation initiale est formulée par le collaborateur. En cas de non-respect des stipulations ci-dessus, la Partie fautive devra indemniser l'autre Partie des dommages résultant, notamment mais non seulement, de la perte de savoir-faire, des engagements déjà pris pour son compte, des dépenses de sélection et de recrutement, des frais de formation, en lui versant immédiatement une somme pouvant aller jusqu'à soixante-dix mille (70 000) Euros. Les Parties fixent d'un commun accord la date d'entrée en vigueur de cette clause à la date de signature du contrat. Cette clause reste en vigueur pour toute la durée du contrat et expire 12 mois après la fin prévue du contrat. Cette clause n'est applicable que pour l'objet cité dans le présent contrat et ne peut avoir pour effet de s'appliquer à toutes les relations commerciales ou contractuelles entre les Parties »157.
146.-Bertrandt et Expleo ont indiqué qu’aucune indemnisation n’a été versée en application des clauses de non-sollicitation de personnel précitées158.
Les éléments du dossier concernant le gentlemen’s agreement sur le recrutement entre le Groupe Expleo et Bertrandt
147.-Plusieurs éléments du dossier attestent de l’existence de l’accord en cause entre le Groupe Expleo et Bertrandt entre le 6 février et le 21 septembre 2018.
148.-Sont présentés ci-après les courriels internes au Groupe Expleo, d’une part, et Bertrandt, d’autre part, rappelant l’existence d’un gentlemen’s agreement sur les ressources humaines ainsi que les différents échanges intervenus entre ces deux parties à ce sujet.
Le rappel en interne de l’existence d’un « gentlemen’s agreement » sur RH
-Les courriels internes chez Assystem France SAS (actuellement Expleo France) du 6 février 2018 et du 5 mars 2018
149.-Dans un courriel interne du 6 février 2018 intitulé « RE : accords Bertrandt »,
M. 2 (Directeur Business Unit Auto France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) indique à quatre collègues de chez Assystem France SAS [actuellement Expleo France], notamment M. 3 (Directeur des opérations Auto France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) et M. 4 (Ingénieur, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]), en réponse à leurs questions demandant un état des lieux sur les accords et relations avec Bertrandt159 :
« Les accords avec Bertrandt peuvent se résumer comme suit pour ce qui est d’actualité (M et 5 qui connaissent bien le sujet pourront compléter si nécessaire)
Accord croisé pour se présenter à deux chez Renault sur 2 WP et un gentleman agreement sur le recrutement (…) Gentleman agreement
Bertrandt et Assystem [actuellement Expleo] respectent la législation du travail et gèrent en bonne intelligence les recrutements de l’un chez l’autre en essayant de les limiter au strict incontournable et en s’avertissant mutuellement lorsque nous déclenchons une embauche. (…) » (soulignements ajoutés).
150.-Dans un courriel du 5 mars 2018 interne à Assystem [actuellement Expleo], intitulé
« Collaboration-avec-Bertrand---Minutes-entrevue-ce-jour-avec-X-et-6 »,
M. 2 (Directeur Business Unit Auto France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) transmet un résumé des sujets abordés lors de l’entrevue entre M. X (Directeur général, Bertrandt SAS), et M. 6 (Directeur général, Bertrandt SAS) à divers interlocuteurs d’Assystem [actuellement Expleo], notamment M. 7, (Vice-Président Ile-de-France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]), M. 8 (Vice-Président Business Unit Auto, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) et M. 3 (Directeur des opérations Auto France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France])160 :
« Rencontre avec X et 6 de Bertrandt ce jour Résumé synthétique
Urgence pour garder le gentleman agreement en vie
[Confidentiel]: monter réunion Assystem T / Bertrandt pour statuer sur reconduction partenariat sur la base de 10-15 FTE [Equivalent temps plein] pour Bertrandt sur les 5 usines 5 tu prends ?
[Confidentiel] : statuer sur place laissée à Bertrandt sur pilotage du WP [Lot de travaux]
par Bertrandt en Roumanie 2/9/8/10 » (soulignement ajouté).
-Le courriel interne chez Bertrandt du 9 mars 2018
151.-Dans un courriel du 9 mars 2018 intitulé « RAPPEL DU CADRE GENTLEMAN AGREEMENT AVEC ASSYSTEM [actuellement Expleo] », adressé par Mme 11 (assistante du Directeur général, Bertrandt SAS), à quatre adresses de type « liste de diffusion »161, internes à Bertrandt, l’existence et le contenu du « gentleman agreement » sont rappelés162 :
« Concernant les sollicitations par nos concurrents, nous vous rappelons que nous avons des accords avec la société Assystem [actuellement Expleo] qui nous lient sur certains projets en collaboration. Nous avons également un gentleman’s agreement toujours en vigueur entre nos 2 sociétés.
Je rappelle le cadre de ces accords :
--[Confidentiel]: Assystem [actuellement Expleo] est en Rang 1 et Bertrandt en Rang 2. Pour 2018 nous avons convenu que Bertrandt reprenne une part de marché significative (minimum 15 ETP) conformément à notre position décidée en atelier Comex de janvier. Une séance de travail sera organisée dans les prochains jours avec les interlocuteurs des 2 sociétés.
--Projet [Confidentiel] : Bertrandt est en Rang 1 et Assystem [actuellement Expleo] en rang 2 avec une volonté de continuer notre partenariat sur les années futures ; les conditions sont en cours de discussion.
Le « gentlemen’s agreement » porte sur la non sollicitation des ressources entre les 2 sociétés, tant pour les effectifs en propre que les Rangs 2 et intérimaires.
A chaque fois que vous avez l’information d’une sollicitation de nos ressources, je vous demande de bien vouloir m’en informer pour que je puisse stopper les actions d’agressions des opérationnels.
Il me faut le nom des personnes approchées et si possible le nom des personnes qui sollicitent nos ressources.
Merci d’avance pour votre prise en compte et le respect de nos engagements » (soulignements ajoutés).
Les échanges d’informations et les vétos posés concernant l’embauche des ressources humaines
152.-Au cours de l’année 2018, le Groupe Expleo a plusieurs fois mis son « véto » à l’embauche de ses ressources humaines, par Bertrandt. Ces vétos ont été parfois suivis d’effets, selon les employés concernés.
-Les cas de M. 12 et M. 13
153.-Par un courriel du 26 février 2018 intitulé « Profils RA : Confidentiel », M. 14 (Directeur de département, Bertrandt SAS) écrit en interne à plusieurs responsables RH, en mettant en copie M. 6 (Directeur général, Bertrandt SAS) et Mme 15 (Directrice générale, Bertrandt SAS)163 :
« Je vous transmets ci-joint 3 CV profil RA.
12 et 16 en poste et ne démissionneront pas sans une proposition externe à Assystem [actuellement Expleo] et 13 qui lui va démissionner ces prochaines semaines (prisé chez les concurrents).
Est-il possible que vous organisiez un RDV avec eux afin de me donner un avis RH.
Je n’ai de comparaison que les RA actuellement dans mes équipes cela vous permettra aussi de benchmarker la concurrence sur ces types de poste.
6 souhaite également les rencontrer donc essayer de mettre les RDV le même jour si possible. »
154.-Par un courriel du 26 mars 2018 intitulé « Rendez-vous Frederic », Mme 17 (Assistante de 6, Directeur général de Bertrandt SAS) écrit aux services généraux de Bertrandt pour préciser les modalités du rendez-vous de M. 6 (Directeur général, Bertrandt SAS) avec
M. 12 et M. 13164.
155.-Par un courriel du 16 avril 2018 intitulé « Demande d’embauche », Mme 17 (Assistante de 6, Directeur général de Bertrandt SAS), écrit à Mme 18 (Responsable recrutement, Bertrandt SAS) avec M. 14 (Directeur de département, Bertrandt SAS) en copie pour établir les modalités d’embauche de M. 12 et précise :
« Pour faire suite à notre échange de ce jour, je te fais suivre en annexe le CV de M. 12 afin de préparer sa demande d’embauche.
Comme évoqué ensemble, 14 te communiquera les éléments complémentaires lors de votre point téléphonique de cet après-midi. J’ai bien noté que tu l’appelleras à 15h30.
14 souhaite attirer notre attention sur la nécessité que nous restions discrètes au sujet de cette embauche »165 (soulignement ajouté).
156.-Le 19 avril 2018, Bertrandt SAS formalise une proposition d’embauche et un contrat de travail à durée indéterminée à l’attention de M. 12166. Le lendemain, ce dernier accepte cette proposition167.
157.-Par un courriel du même jour (20 avril 2018) intitulé « RE: Confidentiel »,
M. 6 (Directeur général, Bertrandt SAS) indique à Mme 19 (Responsable RH, Bertrandt SAS)168 : « [p]our ton information, j’ai communiqué auprès d’Assystem [actuellement Expleo] sur la candidature de M. 12 ainsi que celle de M. 13 ce mercredi » (soulignement ajouté).
158.-Mme 19 (Responsable RH, Bertrandt SAS) répond169 : « [m]erci pour l’info. Je vous confirme l’acceptation de notre proposition d’engagement par 12 ce jour même. »
159.-M. 12 présentera sa démission de son poste de chef de projet chez le Groupe Expleo par courrier du 20 avril 2018170.
160.-Par un courriel du 25 avril 2018 intitulé « Gentleman Agreement », M. 2 (Directeur Business Unit Auto France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]), indique à M. 6 (Directeur général, Bertrandt SAS) et M. X (Directeur général, Bertrandt SAS), avec en copie M. 8 (Vice-Président Business Unit Auto, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) poser son veto à la sollicitation de M. 12171 :
« Je confirme ci-joint que nous mettons notre veto à la sollicitation de 12 par Bertrandt et
[nous] demandons de respecter nos accords de non sollicitation réciproque
En l’attente de la confirmation par vos soins que vous mettez bien un terme aux discussions en cours avec 12 » (soulignement ajouté).
161.-Ce courriel fait l’objet d’un transfert en interne au sein du Groupe Expleo. Ainsi,
M. 2 (Directeur Business Unit Auto France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) informe le 25 avril 2018 ses collègues, M. 7 (Vice-Président Ile-de-France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) et M. 3 (Directeur des opérations Auto France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) de sa décision de veto au sujet de la sollicitation de M. 12172 :
« J’ai opposé notre veto à la sollicitation de 12 par Bertrandt
Par principe, quel que soit l’état de la relation avec l’individu, nous ne pouvons tolérer qu’un N3 soit sollicité par Bertrandt, surtout à notre insu, c’est le sens de ce veto
Il faudrait que nous utilisions cela et bien entendu des leviers plus positifs pour sécuriser 12 au sein d’Assystem [actuellement Expleo]
Je vous propose que nous fassions circuler plus systématiquement ce type d’information, dans les deux sens, de façon à ce que nous soyons tous informés au même niveau le plus rapidement possible pour être le plus efficaces possible dans la rétention de nos collaborateurs et dans les actions envers les confrères quand nécessaire » (soulignement ajouté).
162.-Par un courriel du 4 mai 2018 intitulé « TR : Collab à risque. Alerte donnée par Bertrand ce jour. », M. 7 (Vice-Président Ile-de-France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) indique à Mme 20 (Responsable RH, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]), M. 3 (Directeur des opérations Auto France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]), M. 21 (Cadre technique Auto, Assystem France SAS [actuellement Expleo France])173 :
« J’ai mis en place un canal d’alerte mutuel avec Bertrand sur les embauches. Voici les collab qui sont sur le marché.
Merci, sans dévoiler les sources, de vous assurer du bon suivi de ces collab et faire en sorte de ne pas les perdre (sauf si vous estimez le contraire)
22, merci de m’alerter en cas de cv Bertrandt en process chez nous » (soulignements ajoutés, caractères gras dans le texte original).
163.-Le même jour (4 mai 2018), M. 7 (Vice-Président Ile-de-France, Assystem France SAS [actuellement-Expleo-France])-indique,-en-transférant-le-précédent-courriel-à
M. 8 (Vice-Président Business Unit Auto, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) et M. 23 (membre du directoire, Assystem Technologies Groupe)174 :
« Je mets en place ma relation avec 14 [Directeur de département, Bertrandt SAS] pour tacher de m’assurer d’un équilibre et d’une transparence entre nos organisation. Il m’a envoyé aujourd’hui les dossiers de collab en recherche chez eux
Pour 12, il m’a dit qu’on l’avait autorisé à le recruter ».
164.-Le 18 mai 2018, M. 6 (Directeur général, Bertrandt SAS) rappelle à
M. 2 (Directeur Business Unit Auto France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]), en réponse à son courriel précité du 25 avril 2018 (voir, ci-dessus, le paragraphe 160), la teneur de l’accord existant entre le Groupe Expleo et Bertrand. M. X (Directeur général, Bertrandt SAS) et M. 8 (Vice-Président Business Unit Auto, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) sont en copie de cet échange175 :
« J’ai bien pris acte de ton mail concernant M. 12, ce à quoi je peux rajouter M. 13, puisque nous avons eu une conversation à ce sujet.
Concernant ces deux candidats, conformément à nos accords et pour faire suite à leurs candidatures, j’ai veillé à avoir une communication auprès de toi le 18 avril dernier.
Je précise par ailleurs qu’à cette date, aucune personne n’était embauchée et que vous aviez toutes possibilités d’agir.
A ce jour, d’ailleurs nous n’avons pas transformé toutes ces candidatures.
Je précise, 2, que cette communication s’est faite, à l’inverse de vos pratiques depuis un an, qui a eu pour résultat au moins l’embauche de 4 de nos collaborateurs chez Assystem [actuellement Expleo] (24, 25, Mme 26, 27).
De notre côté, fort des accords que nous avons et de notre éthique, nous continuerons à vous avertir de toutes démarches de collaborateurs Assystem [actuellement Expleo] vers Bertrandt et nous nous engageons à ne mener aucune action d’approche directe d’un collaborateur de votre entreprise.
Par ailleurs, je peux souligner que nous n’avons pas transformé certaines candidatures de collaborateurs Assystem [actuellement Expleo] partis à la concurrence qui servira, au final, à contrer des projets que nous avons en commun (28 et 29 partis chez nos concurrents) » (soulignements ajoutés).
165.-Le 22 mai 2018, M. 2 (Directeur Business Unit Auto France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) répond à M. 6 (Directeur général, Bertrandt SAS), M. 8 (Vice-Président Business Unit Auto, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) et M. X (Directeur général, Bertrandt SAS)176 en ajoutant des précisions sur le champ d’application du « gentleman agreement », tout en sollicitant ses interlocuteurs en vue de réfléchir à de nouvelles règles de mise en œuvre de cet accord :
« Sans esprit de polémique, je voudrais ajouter dans le débat que le simple fait de solliciter nos collaborateurs ou S/T [sous-traitants], pour une interview dans vos locaux pour envisager le futur, constitue une infraction à notre accord (Cas de M. 30 par exemple).
J’en retiens que nous sommes tous d’accord pour faire vivre notre gentleman agreement, ce qui est une bonne base, mais qu’il subsiste des difficultés dans son application.
Pour en avoir discuté brièvement avec X la semaine dernière, je propose de nous rencontrer à 4 avant les départs en congés d’été, pour réaffirmer notre bonne volonté et pour réfléchir à quelques bonnes pratiques innovantes pour revitaliser cet accord et éviter le plus possible les défaillances » (soulignements ajoutés).
166.-Dans un courriel du 22 mai 2018 intitulé « Date démarrage 12 », Mme 19 (Responsable RH, Bertrandt SAS) indique au service paie de Bertrandt que la date de début de contrat de
M. 12 a été décalée de deux semaines177.
167.-Dans une lettre recommandée avec accusé réception du 25 juin 2018 mentionnant en objet
« débauchage de salariés Assystem [actuellement Expleo] », M. 8 (Vice-Président Business Unit Auto, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) indique à M. 6 (Directeur général, Bertrandt SAS) et M. X (Directeur général, Bertrandt SAS) qu’Assystem (actuellement Expleo) n’hésitera pas à faire valoir ses droits en cas de recrutement de M. 12 et de débauchage persistant178 :
« Par la présente, nous souhaitons attirer votre attention sur un phénomène récurrent que nous ne pouvons plus tolérer, concernant le débauchage de nos salariés parmi lesquels
M. 12 lequel travaillait sur le périmètre Commandes, Commandes Externes et Traverses pour notre client Renault Direction DEA-P, Service PEE.
Si nous constatations que notre ancien collaborateur 12 était positionné par votre société sur le même périmètre et/ou si vous persistiez à débaucher des collaborateurs de notre société pour les positionner sur des périmètres identiques, nous n’hésiterions pas à prendre les mesures qui s’imposeraient pour faire valoir nos droits afin d’obtenir réparation du préjudice subi (…) ».
168.-Interrogée sur le cas de M. 12 lors de l’instruction, Expleo a indiqué qu’un véto concernant l’embauche de ce dernier par Bertrandt avait bien été posé le 24 avril 2018 mais que Bertrandt avait néanmoins recruté la personne en cause. Elle précise : « Bertrandt a accusé réception du véto le 18/05/2018. Néanmoins, Assystem Technologies [actuellement Expleo] a envoyé une lettre le 25/06/2018 à Bertrandt de mise en demeure d’arrêter de débaucher leurs salariés, suite au débauchage notamment de M. 12 »179.
169.-Bertrandt a quant à elle expliqué : « [n]ous avons informé la société tiers du recrutement de
M. 12 sans qu’il y ait pour autant un agrément »180.
170.-Pour ce qui concerne M. 13, Bertrandt a indiqué : « M. 13 : information faite auprès d’Assystem [actuellement Expleo]. Le candidat a fait un autre choix – de recrutement chez Bertrandt »181.
171.-Également interrogée sur le cas de M. 13, Expleo a indiqué : « Assystem Technologies [actuellement Expleo] a mis son véto par téléphone en mai 2018, qui a été accepté par Bertrandt le 18/05/2018. Il a toutefois quitté Assystem Technologies [actuellement Expleo] en mai 2018 et a été recruté par LGM Digital (une entreprise de conseil dans l’information technique et l’ingénierie télécom) à partir du mois d’octobre 2018 »182.
-Les refus de Bertrandt de recruter M. 29, M. 28 et M. 31 de chez Assystem (actuellement Expleo)
172.-Par courriel du 9 mars 2018 intitulé « TR: RAPPEL DU CADRE GENTLEMAN AGREEMENT AVEC ASSYSTEM [actuellement Expleo] », M. 14 (Directeur de département, Bertrandt SAS) indique en interne à M. X (Directeur général, Bertrandt SAS),
M. 6 (Directeur général, Bertrandt SAS) et M. 32 (Directeur de Département, Bertrandt SAS)183 :
« Comme échangé au téléphone il faut que nous évitions que cet accord bénéficie à Alten et Altran ce qui est le cas pour le moment.
J’ai prévenu Assystem [actuellement Expleo] sur 2 profils ces 2 dernières semaines 28 référent [Confidentiel] et 29 PFE, nous n’avons pas avancé avec eux et cette semaine ils ont quand même démissionné lundi et mardi pour Alten et Altran.
Hier je les ai prévenu pour 33 DEAMM et 31 PFE (ne pas communiquer officiellement pour le moment sur ces 2 personnes on va attendre qu’ils démissionnent).
Pour les 2 premiers tu peux leur dire à force nous aurons assez d’arguments.
Le nouveau patron de l’auto Assystem [actuellement Expleo] a stipulé qu’il ne fallait quasi plus augmenter les salaires et baisser les salaires d’embauche ce qui crée de la frustration dans les équipes (les augmentations ont été données sem dernière déjà 7 démissions en 1 sem et pas fini)
Pour la [Confidentiel] on attend la réunion mais que tu saches en amont ce qu’ils veulent faire sur les 15 ETP (…)
--Ils ont contacté RSA pour intégrer 5 PFE [ Product family engineer] en capacitaire chez 34 et 35 au WP VS [véhicules de société]
--3 postes architectes DEVA VSF [Division de Renault chargée de développement] ou Assystem [actuellement Expleo] a actuellement 3 etud integral avec mauvaise renta et activité VS VU [véhicules utilitaires] qui va décroitre et préfère privilégier la croissance chez 36 DEVA
--2 postes à Batilly et 2 à Douai pour compenser les démissions qu’ils ont
Ils vont pas tarder à recevoir la dem d’un pilote DEVB [Division de Renault chargée de développement] à Douai on aura surement le besoin » (soulignements ajoutés).
173.-Au sujet de M. 28 et M. 29, le Groupe Expleo a indiqué lors de l’instruction : « Bertrandt a informé Expleo avoir bloqué la candidature de M. 28 (en mars et en mai 2018). M. 28 est toujours employé par Expleo », et : « Bertrandt a informé Expleo avoir bloqué la candidature de M. 29 (en mars et en mai 2018). M. 29 a été recruté par un autre concurrent en 2019 (Akka Technologies) »184.
174.-Enfin, concernant M. 31, le Groupe Expleo a expliqué : « Bertrandt se serait interdit de recruter M. 31 en mars 2018. M. 31 est toujours employé par Expleo »185.
-Le cas de Mme 26 et les discussions entre Assystem (actuellement Expleo) et Bertrandt sur l’application du « gentleman’s agreement »
175.-Dans un courriel du 29 mars 2018 intitulé « Recrutements collaborateurs Bertrandt », M. X (Directeur général, Bertrandt SAS) écrit à M. 2 (Directeur Business Unit Auto France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]), avec en copie M. 6 (Directeur général, Bertrandt SAS) au sujet du recrutement de Mme 26 (Leader recrutement BU Ile-de-de- France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France])186 :
« J’apprends, ce jour, que vous allez recruter Mme 26, une de nos chargées de recrutement. Je constate de la part d’Assystem [actuellement Expleo] une volonté de bafouer notre accord de gentleman’s agreement, malgré les derniers rappels et nos derniers échanges. Je trouve ça réellement dommage que ton service RH ne respecte pas les engagements. De mon côté, le 9 mars, j’ai écrit et fait un rappel à tout le management de bertrandt sur le cadre de notre accord et je crains de ne pas pouvoir tenir les équipes bien longtemps.
Ces dernières semaines, j’ai bloqué un certain nombre de démarches pour respecter notre accord, notamment pour les 2 personnes suivantes qui souhaitent quitter votre société.
28
et 29
D’autre part, 14 a communiqué à votre responsable électronique une liste de personne qui seraient sur le départ de chez Assystem [actuellement Expleo] et s’est interdit de les recruter. La réciproque n’est apriori qu’une chimère.
M. 31
37
Nous perdons à tous les coups et surtout Bertrandt » (soulignements ajoutés).
176.-Le 4 avril 2018, M. 2 (Directeur Business Unit Auto France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) transfère ce message en interne à M. 8 (Vice-Président Business Unit Auto, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) et M. 7 (Vice- Président Ile-de-France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) en indiquant187 :
« Il faut repasser le message concernant le gentlman agreement avec Bertrandt.
J’ai vérifié auprès de 22, elle avait demandé l’accord à 38 qui lui avait donné son aval Cela fait au moins 3 ou 4 brèches successives dans l’accord de notre fait.
Je rappelle X pour éteindre un peu l’incendie, mais je commence à être à court d’argument, entre quelques "habiletés" de notre part et nos process en boucle ouverte cela devient compliqué.
Je crois qu’on aurait plus à perdre qu’à gagner dans une guerre des embauches » (soulignements ajoutés).
177.-Le même jour, en réponse, M. 8 (Vice-Président Business Unit Auto, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) indique à M. 2 (Directeur Business Unit Auto France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) et M. 7 (Vice-Président Ile-de-France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France])188 :
« Je confirme et je partage.
Comment 38 a-t-il pu donner son aval…. ?
Il sait que nous gérons Bertrandt en direct, je suis surpris. (…) »
178.-Au sujet de Mme 26, Bertrandt a indiqué que « [n]ous avons appris ultérieurement qu'Assystem [actuellement Expleo] avait recruté Mme 26 (…). Il n'y a eu aucune information
/ discussion au préalable »189. Le Groupe Expleo a transmis un tableau explicitant les cas d’échanges d’informations entre les entreprises sur des candidatures, les décisions prises et l’issue en terme de changement d’employeur ou non, avec les dates associées, et indiqué que
« Mme 26 a été recrutée par Assystem Technologies [actuellement Expleo] en mars/avril 2018 sans avoir sollicité l’accord de Bertrandt » 190.
-Le cas de M. 39 et le rappel du « gentleman agreement » en interne chez Assystem (actuellement Expleo) en avril 2018
179.-Dans un courriel du 19 avril 2018 intitulé « RE: Retours M. 39 suite à QT », Mme 40 (Chargée de Recrutement BU Ile-de-France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) écrit à M. 41 (Directeur Auto, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]), avec en copie Mme 22 (Responsable recrutement BU Ile-de-France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) pour lui indiquer s’être renseignée sur un candidat travaillant chez Bertrandt et lui proposer de commencer les entretiens191 :
« Pour info je me suis renseignée, 5 a eu des retours positifs sur ce candidat qui travaille actuellement chez BERTRANDT.
En accord avec ce que l’on s’est dit hier soir et au regard des retours positifs, je vais lancer l’entretien avec Imed et Fabrice. »
180.-À la suite de ce courriel, M. 41 (Directeur Auto, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) écrit à M. 2 (Directeur Business Unit Auto France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) avec en copie, Mme 22, (Responsable recrutement BU Ile- de-France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) pour lui transmettre le dossier de M. 39 en vue d’engager les entretiens192.
181.-Le 20 avril 2018, M. 2 (Directeur Business Unit Auto France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) répond en interne à cinq collaborateurs de chez Assystem (actuellement Expleo) (Mme 22 (Responsable recrutement BU Ile-de-France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]), Mme 40 (Chargée de Recrutement BU Ile-de- France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) et M. 41 (Directeur Auto, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) avec, en copie, M. 8 (Vice-Président Business Unit Auto, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) et
M. 7 (Vice-Président Ile-de-France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) pour leur rappeler l’existence du « gentleman agreement » 193 :
« Nous avons un gentleman agreement clair avec Bertrandt : on ne sollicite pas leur ressource que ce soit leurs employés ou leurs fournisseurs
Donc pas d’entretien avec ces personnels sans que nous ayons eu l’opportunité de vérifier avec Bertrandt la possibilité de trouver un compromis avec la compréhension claire en interne que si Bertrandt refuse nous n’engageons aucune démarche.
Jusqu’à présent j’ai la responsabilité de faire le lien avec Bertrandt dans les deux sens. Ce sujet a été évoqué de multiples fois pendant la weekly du lundi, charge aux DOP de relayer le message.
Je suis étonné de voir que des échanges concernant l’approche de personnels Bertrandt aient lieu sans que j’en soit averti.
Pour votre information Bertrandt a le sentiment que nous ne respections pas les accords (recrutement récent d’une de leur chargée de recrutement et de Monsieur 24)
Concernant M. 5 on arrête donc toute démarche tant que je ne reviens pas vers vous » (soulignements ajoutés).
182.-Le jour même (20 avril 2018), Mme 22 (Responsable recrutement BU Ile-de- France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) réagit auprès de son collègue, M. 3 (Directeur des opérations Auto France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) en ces termes194 : « [j]e ne comprends pas ce type de mail quand on apprends que des collabs Assystem [actuellement Expleo] sont recrutés par Bertrandt ».
183.-En parallèle, dans un courriel du 20 avril 2018, M. 2 (Directeur Business Unit Auto France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) transfère une suite de courriels à M. 8 (Vice-Président Business Unit Auto, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) sous le titre : « TR : RAPPEL DU CADRE GENTLEMAN'S AGREEMENT AVEC ASSYSTEM [actuellement Expleo]», en indiquant195 : « [p]our info ce que X diffuse en interne pour respect gentleman agreement ». Parmi les courriels transférés figure un courriel du 17 avril 2018 dans lequel M. X (Directeur général, Bertrandt SAS) indique à M. 2 (Directeur Business Unit Auto France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France])196 :
« Comme convenu, tu trouveras ci-dessous la communication faite auprès des managers et services RH de ma part. Je te livre le message tel qu’il a été envoyé et je te demande bien évidemment de ne pas le diffuser. »
184.-Le message interne à Bertrandt ainsi rapporté à Assystem (actuellement Expleo) est le courriel en date du 9 mars 2018 précité (voir, ci-dessus, le paragraphe 151), intitulé
« RAPPEL DU CADRE GENTLEMAN'S AGREEMENT AVEC ASSYSTEM [actuellement
Expleo]» et adressé par Mme 11 (assistante du Directeur général, Bertrandt SAS) à quatre adresses de type « liste de diffusion » internes à Bertrandt.
-Les cas de M. 42 et M. 43 et le nouveau rappel du « gentleman agreement » en interne chez Bertrandt
185.-Dans un courriel du 11 juillet 2018 intitulé « TR : Collaborateurs Bertrandt »,
M. 14 (Directeur de département, Bertrandt SAS) donne des informations à ses correspondants d’Assystem (actuellement Expleo), M. 21 (Cadre technique Auto, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) et M. 7 (Vice-Président Ile-de-France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) sur deux personnes travaillant chez Bertrandt197 :
« Suite à notre appel d’hier ou tu as sourcé deux profils Bertandt 42 et 43.
Pour 42 il est en poste chez nous pas en processus de départ mais semble avoir des souhaits de changer d’activité mais pas sûr d’être en mesure de lui proposer quelque chose qui correspond à ses attentes donc n’hésite pas à le contacter et nous accepterons de vous le libérer si il décide de vous rejoindre.
Pour 43 nous le voyons demain je te tiens au courant.
De mon côté je fais te faire une synthèse mais une quinzaine de profils sourcés ou reçus de salariés Assytem [actuellement Expleo] (nous n’avons pris aucun contact pour le moment), j’avais transmis l’info à 7 par texto semaine dernière. »
186.-Par ailleurs, le même jour (11 juillet 2018), dans un courriel interne à Assystem (actuellement Expleo) et intitulé « TR : RAPPEL DU CADRE GENTLEMAN'S AGREEMENT AVEC ASSYSTEM [actuellement Expleo]», M. 8 (Vice-Président Business Unit Auto, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]), confirme à M. 7 (Vice- Président Ile-de-France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) et M. 2 (Directeur Business Unit Auto France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) que le rappel des règles du « gentlemen’s agreement » a bien été fait par Bertrandt et lui demande de s’assurer que la même communication soit bien faite en interne par Assystem (actuellement Expleo)198 :
« Nous avons eu l'échange avec Bertrandt.
Les règles sont claires et ont été rappelées de leur côté (voir mails ci-dessous)
Je souhaite que la même communication soit faite chez nous pour nous assurer de la symétricité des instructions.
Pourrais tu stp le faire ? ».
187.-Ce courriel transférait à ses destinataires une série de trois autres courriels (les « mails ci-dessous ») évoquant le cadre découlant du « gentlemen’s agreement » :
-un courriel du 10 juillet 2018 envoyé par M. X (Directeur général, Bertrandt SAS) à
M. 8 (Vice-Président Business Unit Auto, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) et M. 2 (Directeur Business Unit Auto France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]), avec en copie M. 6 (Directeur général, Bertrandt SAS). Il est intitulé « TR : RAPPEL DU CADRE GENTLEMAN'S AGREEMENT
AVEC ASSYSTEM [actuellement Expleo]» 199:
« Pour faire suite à nos échanges de la semaine dernière, je vous informe d’une communication interne ayant pour objet le respect de nos accords.
Les messages destinés à nos managers et RRHs ont été renouvelés 2 fois depuis le début d’année.
6 et moi sommes totalement investis à faire respecter nos engagements.
Vous trouverez ci-dessous l’historique de notre communication interne. Je vous remercie de bien vouloir assurer la réciproque vis-à-vis de votre organisation » ;
-un courriel du 10 juillet 2018 intitulé « RE : RAPPEL DU CADRE GENTLEMAN'S AGREEMENT-AVEC-ASSYSTEM-[actuellement-Expleo] »-dans-lequel
M. X (Directeur général, Bertrandt SAS) adresse un courriel à trois adresses internes de type « liste de diffusion » indiquant clairement les objectifs de l’accord 200 :
« Pour faire suite à notre communication dans le compte rendu CDG du 09 juillet 2018, nous vous rappelons le cadre à faire respecter par vos équipes concernant les accords Bertrandt/Assystem Technologies [actuellement Expleo]. Depuis quelques semaines nous constatons une vague de postulants venant de chez notre partenaire Assystem technologies [actuellement Expleo] et une instabilité de leurs équipes. Nous ne devons pas profiter de cette fragilité pour solliciter leur collaborateurs de près ou de loin. Nos 2 sociétés ont un intérêt commun à limiter le turn-over et la surenchère des salaires, déjà subis par les actions des autres concurrents et de nos clients.
Merci encore une fois de bien vouloir respecter le cadre suivant :
Le « gentlemen’s agreement » porte sur la non sollicitation des ressources entre les 2 sociétés, tant pour les effectifs en propre que les Rangs 2 et intérimaires.
A chaque fois que vous avez l’information d’une sollicitation de nos ressources, je vous demande de bien vouloir m’en informer pour que je puisse stopper les actions d’agressions des opérationnels.
Il me faut le nom des personnes approchées et si possible le nom des personnes qui sollicitent nos ressources » (caractères gras dans le texte original) ;
-le courriel précédemment cité du 9 mars 2018 intitulé « RAPPEL DU CADRE GENTLEMAN'S AGREEMENT AVEC ASSYSTEM [actuellement Expleo] », adressé par Mme 11 (Assistante du Directeur général, Bertrandt SAS) à quatre adresses de type « liste de diffusion » internes à Bertrandt (voir, ci-dessus, paragraphe 151).
188.-Le 13 juillet 2018, M. 7 (Vice-Président Ile-de-France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) répond au courriel précité (voir le paragraphe 186) de M. 8 (Vice-Président Business Unit Auto, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) 201 : « [L]a chargé de recrutement que nous avons recrutée chez Bertrandt nous confirme qu’aucun message n’a été passé en interne aux CDR [Chargé de recrutement] Bertrandt. A mon humble avis, Ils nous baladent et poursuivent la sape.
JE mise sur encore 3-4 recrutements structurant sur S2. »
189.-M. 8 (Vice-Président Business Unit Auto, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) répond le même jour (13 juillet 2018), en ajoutant M. 2 (Directeur Business Unit Auto France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) en copie202 :
« Le mail en question m'a été lu par un N2 Bertrandt, qui l'avait reçu, suite à notre dernière rencontré qui a permis une réelle prise de conscience de leurs dysfonctionnements (dixit les intéressés eux-mêmes).
Donc j'y crois
Que les CDR n'aient pas encore eu le mail ne m'étonne pas, c'est à la main de la hiérarchie de le redescendre, et si c'est fait avec la même célérité que chez nous.....
Si nous ne faisons rien, dis le moi, je me retirerai personnellement de ce sujet, et en informerai en retour X et Strady car je ne leur mentirai pas.
Je ne suis pas un pantin désarticulé dans la relation. Merci de me tenir informé ».
-Le courriel du 24 juillet 2018
190.-Différents échanges entre Bertrandt et Assystem (actuellement Expleo) sont retracés ci-après, en relation avec un courriel du 24 juillet 2018 intitulé « RE : RAPPEL DU CADRE GENTLEMAN'S AGREEMENT AVEC ASSYSTEM [actuellement Expleo]» dans lequel
M. X (Directeur général, Bertrandt SAS) informe M. 8 (Vice-Président Business Unit Auto, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) et M. 2 (Directeur Business Unit Auto France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]), avec en copie M. 6 (Directeur général, Bertrandt SAS)203, au sujet de candidatures de plusieurs collaborateurs Assystem (actuellement Expleo) chez Bertrandt :
« Conformément à nos accords de bonne conduite, je vous informe de la candidature de 3 collaborateurs Assystem [actuellement Expleo] en relation à des annonces Job-board Bertrandt.
Monsieur 44
Monsieur 45
Monsieur 46
Ces 3 collaborateurs ont été rencontrés par nos services RHs et identifiés étant de la société Assystem [actuellement Expleo]. A priori, ces collaborateurs sont dans une démarche active de recherche de nouvel emploi et ont déjà rencontrés d’autres sociétés concurrentes.
Le processus de sélection est stoppé depuis l’identification d’appartenance à la société Assystem [actuellement Expleo]. Je vous serais grès de bien vouloir m’informer de votre position quant à la possibilité de pouvoir leur faire une offre ou pas. CF mail d’accord de Bertrandt concernant des propositions de recrutement d’Assystem [actuellement Expleo] vis-à-vis de collaborateurs Bertrandt.
Sans réponse de votre part, nous considérerons qu’il n’y a pas d’opposition. Dans le cas contraire, je vous demande de bien vouloir nous retourner une réponse expresse, afin de nous expliciter votre position et clore les dossiers.
Merci de bien vouloir prendre en compte cette requête et la gérer de la manière la plus responsable possible dans l’intérêt des collaborateurs concernés et de nos entreprises » (soulignements ajoutés).
191.-Ce courriel intègre deux des précédents courriels internes à Bertrandt précités (voir, ci-dessus, le paragraphe 187). Il est transféré le même jour par M. 8 (Executive Vice- Président Automotive & Transportation, Assystem France [actuellement Expleo France]) :
-en interne chez Assystem (actuellement Expleo) à M. 3 (Directeur des opérations Auto France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]), en indiquant :
« [e]n complément de l’échange d’hier (j’ai demandé à 7 notre position).Notons leur mail interne du 10 Juillet 2018 10:57. J’ai entendu parlé de 42 et 43 que nous avons approché, qu’en est-il ? »204 ;
-à M. 7 (Vice-Président Ile-de-France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) avec M. 2 (Directeur Business Unit Auto France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) en copie en précisant : « [m]erci de nous positionner sur ces 3 cas, rapidement. BSAS montre vouloir jouer le jeu, dans l’absence de preuve du contraire, je propose de jouer le jeu. » 205
192.-Le même jour (24 juillet 2018), M. 2 (Directeur Business Unit Auto France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) répond à M. 8 (Vice-Président Business Unit Auto, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) en ces termes206 :
« Selon moi, nous dysfonctionnons, sauf erreur de ma part nous n’avons pas été tenus au courant de l’approche par Assystem [actuellement Expleo] de MM 42 et 43.
T’étais au courant ?
Soit on gère en équipe, soit il se débrouille et il va se faire dépoiler par 14/Bertrandt Sous-jacent aussi notre capacité de rétention ».
193.-Le 24 juillet 2018, également, en parallèle, M. 8 (Vice-Président Business Unit Auto, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) interroge M. 7 (Vice-Président Ile-de- France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France])207 :
« En complément de mon mail de cet après-midi, j’apprécierai de savoir quelle activité de recrutement nous est "opposée" par Bertrandt quand elle l’est, (mail joint), cela m’aidera.
Merci outre ta position sur leur demande ci-dessous de me forwarder le mail interne qui symétrise les intentions stp, comme convenu. ».
194.-Le 25 juillet, M. 7 (Vice-Président Ile-de-France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) transfère ce courriel à cinq collègues d’Assystem [actuellement Expleo], dont M. 3 (Directeur des opérations Auto France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) et M. 41 (Directeur Auto, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]), rappelant entre autres l’importance du respect de l’accord208 :
« 8 est monté au créneau pour exiger de Bertrandt que le gentlemen agreement soit respecté. Je vous demande par conséquent de veiller au respect de l’accord. Si des candidatures Bertrandt se présentent, merci de nous le remonter (8 et moi) afin que nous respections nos accords.
En attendant, merci de me donner vos préco sur les 2 profils ci-dessous autre que 46 (puisqu’il est hors de question qu’ils le recrutent, et qu’il m’a confirmé s’inscrire avec nous dans la durée). »
195.-Toujours le 25 juillet 2018, M. 41 (Directeur Auto, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) répond à M. 7 (Vice-Président Ile-de-France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) en indiquant209 :
« Les 2 collaborateurs cités dans le mail ci-dessous (MM. 44 et 45) ne sont pas de mon périmètre.
Par contre, 2 collaborateurs Bertrandt nous ont approchés pour intégrer Assystem
[actuellement Expleo] :
Il s’agit de Mme 47 (habilitable) et M. 48 (habilitable). Ces 2 personnes travaillent sur le WP incidentologie que Bertrandt a gagné aux dépends d’Assystem [actuellement Expleo] fin 2016 (ce périmètre était dans notre centre de services antérieurement). Pour mettre en œuvre ce WP, Bertrandt a embauché Mme 47 et M. 48, qui étaient alors sous-traitants d’Assystem [actuellement Expleo].
Nous connaissant, et n’étant pas satisfaits du management de ce WP par Bertrandt, ces deux collaborateurs veulent revenir vers Assystem [actuellement Expleo].
Ils n’interviennent donc pas dans notre centre de services.
J’ai tout gelé suite aux consignes données. A minima, le profil de Mme 47 serait le plus intéressant à intégrer.
Merci de ton retour sur la suite à donner. ».
196.-Le 26 juillet 2018, M. 7 (Vice-Président Ile-de-France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) transfère ce courriel à M. 8 (Vice-Président Business Unit Auto, Assystem France SAS [actuellement Expleo France])210 :
« Je préconise qu’on les récupère compte tenu du contexte. Pour faire propre, demande leur le feu vert en leur rappelant le contexte de debauchage de nos sous traitants OK ? ».
197.-En réponse, le même jour, M. 8 (Vice-Président Business Unit Auto, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) indique à M. 2 (Directeur Business Unit Auto France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) et M. 7 (Vice-Président Ile-de-France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) : « [l]a position est "non" dans les 2 sens. Merci à 2 d'en informer Bertrandt concernant les 3 personnes pour lesquelles la question est posée »211.
198.-Par courriel du 27 juillet 2018, M. 2 (Directeur Business Unit Auto France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) répond à M. X (Directeur général, Bertrandt SAS) et
M. 6 (Directeur général, Bertrandt SAS), avec en copie M. 8 (Vice-Président Business Unit Auto, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) – toujours à propos du courriel de Bertrandt du 24 juillet précité (voir, ci-dessus, le paragraphe 190)212 :
« Nous avons étudié l’ensemble des cas Assystem [actuellement Expleo] et Bertrandt, notre conclusion est la suivante.
--Assystem [actuellement Expleo] a bloqué toute démarche auprès de MM 42 et 43.
--Nous demandons à BSAS de stopper toute démarche envers MMM 44, 45 et 46
L’objectif essentiel de notre Gentleman agreement n’étant pas d’échanger des collaborateurs mais de les garder dans nos entreprises respectives
Je vous confirme que nous avons envoyé en interne un rappel aux personnes susceptibles d’approcher les collaborateurs aux fins de recrutement, de la teneur de note gentleman agreement
De façon préventive, n’y voyez aucune suspicion, mais seulement une soumission à votre attention, nous vous alertons sur le fait que concernant le WP Commandes et Traverses, qui vient de vous être affecté, nous tenons absolument à conserver nos ressources travaillant sur ces sujets car nous avons besoin d’eux sur d’autres activités. Nous avons également averti Renault de que nous avons besoin de ces compétences en interne Assystem Technologies [actuellement Expleo] » (soulignements ajoutés).
199.-Le 24 août 2018, dans un courriel interne à Assystem [actuellement Expleo] intitulé
« Demande de CT – 49 – N°4503 », Mme 26 (Leader recrutement BU Ile-de-de-France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) adresse une demande à M. 7 (Vice- Président Ile-de-France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) formulée ainsi 213 :
« Je t’envoie ci-joint la demande CT pour Monsieur 49.
C’est un dossier spécifique car c’est une cooptation d’une personne qui est actuellement au sein de Bertrandt.
Je joins à ce mail l’historique de comment s’est faite cette cooptation. Cf mail de Monsieur 50.
De plus, je te transmets les validations de 51, 52 et 53. Peux-tu me faire un retour selon cette demande ? »
200.-Le jour même, M. 7 (Vice-Président Ile-de-France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) lui répond : « [c]ompte tenu de notre pacte de non-agression avec Bertrandt, la demande est instruite par 8. Merci de tout mettre en stand-by jusqu’à nouvel ordre »214.
201.-Le même jour, M. 51 (Responsable activité EE PWT&Systems, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) répond à M. 53 (Directeur de Business unit, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) indiquant215 :
« C'est 54, expert Validation, qui l'a rencontré.
Il l'a vu pour le remplacement d'un démissionnaire sur les activités HiL [Matériel dans la boucle] du CS Validation [Centre de service validations] de [Confidentiel].
Un potentiel intéressant et des compétences qui pourront être utilisées dans d'autres activités de validation.
C'est ok pour moi. »
202.-M. 53 (Directeur de Business unit, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) confirme le même jour (24 août 2018) être également d’accord216.
203.-Dans un courriel du mardi 4 septembre 2018 intitulé « TR : Etat des départs et ou demande de départ sur WP DEAP [Direction d’ingénierie dédiée à la production] perdu. »,
M. 2 (Directeur Business Unit Auto France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]), écrit à M. X (Directeur général, Bertrandt SAS)217 :
« Suite à nos essais infructueux d'échanger par téléphone, je joins ci-dessous les éléments que je souhaite discuter avec toi.
Nous constatons plusieurs sollicitations par BSAS de nos collaborateurs directs ou en S/T
45-CDI Asssytem/ LI Commandes sous volant en cours d'embauche par Bertrandt
55-S/T Leader projet. Instrumentation DEAP B en cours de d'embauche par Bertrandt
56-S/T sur le projet DEAP, a eu une proposition de Bertrandt Nous avons également des suspicions sur d'autres profils
57-CDI Assystem/LI aurait une proposition de la part de BSAS
58-BERTRANDT communique qu'elle fait partie des effectifs de BERTRANDT alors qu'elle est une de nos S/T
Peux-tu regarder ces cas et me faire un retour, je ne m'interdis pas "de neutraliser" notre accord sur les prochaines démarches pro-actives des collaborateurs Bertrandt envers nous. ».
204.-Le lendemain, le 5 septembre 2018, M. 2 (Directeur Business Unit Auto France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) complète son courriel en indiquant à M. 6 (Directeur général, Bertrandt SAS), avec M. X (Directeur général, Bertrandt SAS) en copie218 :
« J'ai echange avec X ce matin au sujet de sollicitations de nos collaborateurs par Bertrandt et il m'a demande de te copier
Peux-tu verifier ce qu'il en est pour 55, 56, Feri Foucal et El-Mallahi X m'a indique qu'il avait bloque l'embauche de 45 en Juillet
J'apprecierais une reponse ecrite de votre part sur l'ensemble des noms cites le plus tot possible. »
205.-Le même jour, dans un courriel intitulé « RE : sollicitations personnels Assystem [actuellement Expleo] », M. 2 (Directeur Business Unit Auto France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) écrit à M. 6 (Directeur général, Bertrandt SAS) et M. X (Directeur général, Bertrandt SAS) au sujet de M. 49219 :
« L’actualité bouge vite, j’ai reçu le signalement que Monsieur 49 de chez vous nous a approché.
Notre service recrutement a suivi les consignes et tout stoppé.
Pouvez-vous vérifier et nous faire savoir si vous pouvez-envisager une levée d’écrou pour ce collaborateur ? »
206.-Le 7 septembre 2018, dans un courriel également intitulé « RE : sollicitations personnels Assystem [actuellement Expleo] », M. 2 (Directeur Business Unit Auto France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) écrit à M. 6 et M. X (Directeurs généraux, Bertrandt SAS), avec en copie M. 8 (Vice-Président Business Unit Auto, Assystem France SAS [actuellement Expleo France])220 :
« Nous sommes proches de la crise diplomatique, merci de me faire savoir en urgence le statut d'un éventuel recrutement par vos soins ou un de sous traitant d'un de nos employés : Monsieur 59. »
207.-Le même jour, dans un courriel intitulé « Re : formulaire de démission 59 »,
M. 51 (Responsable activité EE PWT&Systems, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) écrit à M. 2 (Directeur Business Unit Auto France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) et M. 53 (Directeur de Business unit, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]), avec en copie Mme 52 (Responsable RH, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) et M. 7 (Vice-Président Ile-de-France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) pour lui demander s’il est possible d’avancer au sujet du recrutement de M. 49 221 :
« Bertrandt de son côté avance sur le recrutement de nos gars, ici 59. Cela avait-il été vu avec eux Pouvons-nous avancer avec M. 49 en contrepartie ? En espérant qu’il n’est pas trop tard ».
208.-Le 7 septembre 2018, dans un courrier intitulé « RE : Demande de CT - 49 - N°4503 »,
M. 53 (Directeur de Business Unit, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) indique à cinq correspondants de chez Assystem [actuellement Expleo] donner son accord pour le recrutement de M. 49222 :
« Bonjour
Ok pour recrutement de M. 49
Vu avec 8 et Bertrandt. Il faut aller vite avant qu’on le perde ».
-La remise en cause du « gentleman agreement »
209.-Le 12 septembre 2018, M. 6 (Directeur général, Bertrandt SAS) écrit à M. 2 (Directeur Business Unit Auto France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) et M. 8 (Vice-Président Business Unit Auto, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) en réponse aux courriels d’Assystem (actuellement Expleo) et notamment le dernier intitulé :
« Re : Sollicitations personnels Assystem [actuellement Expleo]», ayant évoqué une « crise diplomatique », avec en copie M. X (Directeur général, Bertrandt SAS) et Mme 15 (Directrice générale, Bertrandt SAS)223 :
« Je reviens vers toi concernant les noms que tu m’as communiqués et ce que tu indiques comme étant les sollicitations de Bertrandt.
Concernant Mme 57, je peux affirmer qu’à ce jour, nous n’avons aucune action en cours dans l’objectif d’embaucher cette personne et à ma connaissance, personne ne l’a rencontrée chez nous (cf. recrutement Bertrandt).
M. 45 : je confirme que Bertrandt a stoppé toute embauche conformément à ce que t’a indiqué X.
Pour M. 55, nous n’avons aucune action d’embauche en cours le concernant. Néanmoins, je peux te dire que son profil nous a été présenté par 2 entreprises : [Confidentiel].
Concernant M. 56, il est référencé Alinda Technologies et il n’est pas mentionné qu’il est chez Assystem [actuellement Expleo].
Mme 58 : nous n’avons pas embauché ce profil.
Par contre, j’apprends qu’elle est aujourd’hui chez nous en sous-traitance comme elle l’était chez vous. Concernant cette personne, Assystem [actuellement Expleo] a averti Atriem de la fin de sa mission à fin septembre.
Concernant M. 59 qui, lui, a été embauché par Bertrandt en apportant la précision que nous avions échangé en amont et obtenu l’autorisation de M. 21.
Concernant 49, je suis au regret de vous demander de vous abstenir d’embaucher ce collaborateur car vous devez certainement le savoir, il est sur un projet majeur et son profil fait partie de nos difficultés de recrutement.
Par ailleurs dans l’enquête que j’ai menée, je me permets de signaler la candidature de
M. 60 dans l’attente d’un retour de votre part.
Je constate que nos services RH ont bien des difficultés à préserver nos accords.
Souhaitant apaiser cette situation, je réitère notre engagement à assurer l’entière transparence des candidatures qui se présentent à nous et de ne pas embaucher de collaborateurs Assystem [actuellement Expleo] sans information ni accord préalables. »
210.-Le 18 septembre 2018, M. X (Directeur général, Bertrandt SAS) adresse un courriel à M. 6 (Directeur général, Bertrandt SAS) et M. 2 (Directeur Business Unit Auto France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]), avec en copie M. 8 (Vice-Président Business Unit Auto, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) et Mme 15 (Directrice générale, Bertrandt SAS) au sujet du recrutement de M. 49224 :
« J’apprends qu’Assystem [actuellement Expleo] a fait une proposition d’embauche à notre collaborateur 49, malgré le véto ordonné par 6 le 12 septembre. Votre recruteuse Mme 26 (Ex-Bertrandt), nous a informé hier matin qu’elle avait reçu l’ordre de son responsable pour faire une offre de recrutement. Pour information, Madame 26 avait déjà recruté ce collaborateur lorsqu’elle était chez Bertrandt. Je vous laisse imaginer notre pensée.
Il est urgent de mettre de la cohérence entre les engagements et les actes. Je réitère notre position concernant 49 et nous nous opposons à votre démarche de recrutement.
Merci de bien vouloir en prendre acte dans les plus brefs délais. »
211.-Le 21 septembre 2018, M. 2 (Directeur Business Unit Auto France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) écrit un courriel intitulé « BSAS – CRITIQUE » à ses collègues M. 8 (Vice-Président Business Unit Auto, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) et M. 7 (Vice-Président Ile-de-France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France])225 :
« Information de l’instant, encore une nouvelle approche de la part de BSAS d’une de nos collaboratrice
Communication de 61 "62 (RT plateau DEAP, personne identifiée comme très haut potentiel chez nous) a fait un entretien chez Bertrandt"
Nous ne sommes plus dans le cadre d’un gentleman agreement, il faut traiter avec plus d’énergie, merci de me faire savoir vos réflexions
Récapitulatif des agressions mutuelles depuis le retour des congés BSAS vs Assystem
[actuellement Expleo] 7 à 1 ! »
212.-En réponse à ce courriel, M. 8 (Vice-Président Business Unit Auto, Assystem France SAS [actuellement-Expleo-France])-écrit-le-24-septembre-2018-à-ses-collègues,
M. 2 (Directeur Business Unit Auto France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) et M. 7 (Vice-Président Ile-de-France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France])226 :
« Il faut appeler X et lui dire que ce genre d’attitude c’est la déclaration de guerre. Donc dans le désordre :
--On va faire la même chose,
--On va en parler au client, et au bon niveau,
--On leur met un avocat dessus : il faut d’ailleurs faire une lettre d’avocat, par un avocat.
- ….
Je souhaite que ce sujet devienne une priorité, il en va aussi de notre crédibilité interne. 2, harcèle stp X ce matin jusqu’à l’avoir et lui expliquer ou nous en sommes. »
213.-Le même jour, M. 2 (Directeur Business Unit Auto France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) répond à M. 8 (Vice-Président Business Unit Auto, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) et M. 7 (Vice-Président Ile-de-France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) en les informant avoir mis en garde M. X (Directeur général, Bertrandt SAS) 227 :
« J’ai eu X,
Je lui ai signalé que
-nous considérons qu’ils ont rompu l’accord plusieurs fois, de fait, malgré leurs ce qu’ils ont pu faire pour l’éviter, c’est arrivé
-nous constations 8 agressions pendant le seul mois de Septembre
-nous nous sentions désormais libre d’engagement
-nous en parlerions au client au niveau adéquat
-nous étudions une action juridique
Réaction très calme de sa part, sur l’instant, il argumente sur ce qu’ils ont fait en prévention, pas sur les (non) résultats
Ne cherche pas à s’excuser et dit simplement que c’est dommage de rompre
Il signale qu’il a eu des retours clients, mentionnant que nous nous étions plaint, ce que j’avais fait de façon diffuse auprès d’APO, mais n’ai pas reconnu, le laissant se demander d’où cela venait
Je lui demande de nous rappeler formellement et rapidement (probablement 8, s’il le fait), s’il veut une dernière conciliation
Nous verrons bien comment il réagi[t] ».
214.-Un peu plus tard, le même jour (24 septembre 2018, 19h05), M. 8 (Vice-Président Business Unit Auto, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) indique à ses collègues M. 7 (Vice-Président Ile-de-France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) et M. 2 (Directeur Business Unit Auto France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France])228 :
« Il vient de m’appeler.
J’ai convenu de le voir, calé ce vendredi midi. Néanmoins, on fait comme on a dit.
7 lance les avocats et prépare le courrier ad hoc, à envoyer peut-être directement en Allemagne (ce sera plus fort encore),
On instrumente nos équipes de recrutement pour déstabiliser.
Il sera plus facile d’arrêter ces actions que de les démarrer, une fois morts…
Pas de retenue svp, pas d’états d’âme, il s’agit avant tout du moral de nos équipes et de comment elles nous regardent. ».
215.-Le 25 septembre 2018, M. 2 (Directeur Business Unit Auto France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) répond à M. 7 (Vice-Président Ile-de-France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) et M. 8 (Global Account Manager Compte Renault, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) ainsi229 : « OK je suis en meeting avec 63, 64, 65, 66 sur [Confidentiel]. Beaucoup de réticence à aller à la guerre. Il faut communiquer aux équipes svp ».
216.-M. 7 (Vice-Président Ile-de-France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) réagit peu après et préconise a contrario de ne pas communiquer aux équipes sur la situation230 :
« Vigilance sur la communication. En effet, la derniere fois, 14 était au courant dans la foulée. Les équipes se parlent et si 14 apprend ces discussions, nous allons souffrir. Pour moi, nous ne devons pas communiquer ».
217.-M. 2 (Directeur Business Unit Auto France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) est plus nuancé sur la question de la communication. Le 26 septembre 2018 il répond de la manière suivante231 :
« Il faut être prudents sur ce que l’on dit et à qui, mais certains doivent être au courant et actifs dans la stratégie
Exemple :
on se pose la question de savoir si on va seul sur la RFQ [Confidentiel] (actuellement nous sommes rang 2 derrière BSAS)
nous sommes peu crédibles sur la [Confidentiel]sur les cas complexes, actuellement réalisés par BSAS, on pourrait aller taper quelques bons profils chez eux mais aujourd’hui tous sont sur le respect de l’accord…..
BSAS, que ce soit avec ou sans accord du Top Mgt eux font leur marché
Si on déclare la guerre sans troupes, on a peu de chance de gagner, je ne pense pas que les seules équipes de recrutement puissent chasser les bons profils ».
Les déclarations de la société Bertrandt concernant le gentlemen’s agreement
218.-Au sujet du « gentleman agreement », il s’agirait, selon M. X (Directeur général, Bertrandt SAS), avant tout d’un « abus de langage » pour se référer aux clauses de non-sollicitation prévues dans les contrats entre Bertrandt et le Groupe Expleo232. Il précise à cet égard que ce terme « faisait référence à nos clauses de non-sollicitation dans nos contrats avec Expleo, parce que les enjeux étaient forts. L’ensemble des contrats portait sur [Confidentiel] collaborateurs et on voulait s’assurer qu’il n’y ait pas de tentative de nos opérationnels de recruter les collaborateurs sur ces projets-là. C’était pour limiter les motivations d’opération de sollicitation. C’est l’objet des clauses. Entre ce qu’on écrit dans les contrats et ce que font les opérationnels, il peut y avoir des agissements non conformes à nos accords car les opérationnels ne connaissent pas les contrats. (…) »233 (soulignement ajouté). Mme 15 (Directrice générale, Bertrandt SAS) indique dans le même sens qu’il n’y avait pas d’accord distinct234.
219.-En ce qui concerne la durée de mise en œuvre des clauses de non-sollicitation et du
« gentleman agreement », M. X (Directeur général, Bertrandt SAS) précise que
« [g]lobalement, cela dure jusqu’à la fin des contrats. Les clauses de non-sollicitation courent jusqu’à mars 2020. Donc ce qu’on désigne par la préoccupation du "gentleman agreement" couvre la durée des contrats »235. Au-delà de novembre 2018, c’est-à-dire postérieurement aux opérations de visite et saisie, les personnes interrogées soulignent que les clauses courraient jusqu’en 2020 et indiquent que Bertrandt n’a plus entretenu de relations avec le Groupe Expleo après cette année236.
220.-En ce qui concerne la mise en œuvre des clauses de non-sollicitation et du « gentleman agreement », M. X (Directeur général, Bertrandt SAS) a pu déclarer qu’aucun veto n’avait été émis237. Il reconnaît toutefois, au sujet de la tentative de recrutement par Assystem [actuellement Expleo] de M. 49 de chez Bertrandt (voir, ci-dessus, le paragraphe 210) qu’il s’agissait « bien [d’]un véto sur le recrutement oui. C’est l’intention » 238 ou encore qu’il est
« arrivé de donner des feux verts, de dire c’est ok à la société Assystem [actuellement Expleo] pour embaucher mon salarié. »239
221.-Il ressort en outre des déclarations de Bertrandt que, s’agissant des décisions prises (information et agrément ou véto) concernant neuf employés, Bertrandt a bien informé le Groupe Expleo de son intention de ne pas vouloir embaucher certaines personnes, dont notamment Mme 37 et M. 31 qui seraient sur le point de quitter le Groupe Expleo240. De la même manière, le Groupe Expleo rappelle avoir exprimé auprès de Bertrandt une opposition à une possible embauche de M. 12 et que Bertrandt n’a toutefois pas remis en cause son recrutement241.
222.-Interrogé par les services d’instruction au sujet de difficultés d’application des clauses de non-sollicitation et du « gentleman agreement », notamment pendant la « crise diplomatique » à l’été et à la rentrée 2018, due à un manque de ressources, M. X (Directeur général, Bertrandt SAS) a confirmé que dans ce contexte particulier, « [i]l y a eu plusieurs sollicitations de part et d’autre. On s’est dit qu’on n’allait pas passer notre temps à régler ces problèmes-là. Donc on a essayé de rappeler l’accord dans le cadre de nos contrats. On s’est dit que cela n’avait pas de sens de s’alerter en dehors des contrats car ça fait partie de la vie des collaborateurs de partir. On était sur des sollicitations. On disait à nos managers de ne pas "chasser" des ressources employées sur nos projets en commun »242. Il ajoute également que « oui, cette crise diplomatique a créé de la tension »243.
223.-En dernier lieu, s’agissant de la connaissance par les salariés des clauses de non-sollicitation, du « gentleman agreement » et du contrôle opéré par les entreprises, Bertrandt indique que les consultants n’étaient pas au courant dès lors qu’il n’y avait pas de communication sur le sujet. Les managers et chefs de projets étaient toutefois informés de l’existence de clauses de non-sollicitation et « les collaborateurs pouvaient en entendre parler » 244.
Les déclarations du Groupe Expleo concernant le « gentleman agreement »
224.-Interrogée dans le cadre de l’instruction sur l’existence, le contenu et la portée du
« gentleman agreement », le Groupe Expleo a confirmé qu’il « n’a pas été formalisé par écrit » et, s’agissant de sa durée, que, « les échanges internes concernant ce "gentleman agreement" se sont concentrés entre mars et septembre de l’année 2018 »245. Expleo ajoute que « [l]e dernier contrat de partenariat entre le Groupe Expleo et Bertrandt ayant pris fin le 31 décembre 2018 (contrat [Confidentiel]), ce gentleman agreement n’existe plus » et qu’il y a, en tout état de cause, été mis un terme avec les opérations de visite et saisie de l’Autorité au mois de novembre 2018 246.
225.-Il ressort, en outre, des déclarations du Groupe Expleo que l’accord en cause était réciproque, concernait « les effectifs en propre ainsi que les Rangs 2 et intérimaires mais non les sous- traitants »247 et était limité à la France. Expleo précise également que « (…)[d]ans la mesure où, à la meilleure connaissance d’Expleo, il n’existe pas d’accord formalisé, mais bien uniquement un "gentleman agreement", tel qu’il est désigné dans les correspondances entre Expleo et Bertrandt, il n’existe pas de règles précises de fonctionnement. »248
226.-Il a également été indiqué que « la motivation de ce "gentlemen agreement" est la protection respective d’Expleo et de Bertrandt contre des pratiques de concurrence déloyale »249 dans un contexte marqué par une intense rotation de personnel entre les entreprises concurrentes et clients finaux. Expleo ajoute que « [d]ans ce contexte, les entreprises ont intérêt à insérer dans leurs contrats de partenariats une clause de non-sollicitation de personnel entre le primo contractant et le sous-traitant. Ces clauses contractuelles visent à prévenir la perte de salariés et la perturbation forte que cela implique sur le fonctionnement des entreprises, sur l’exécution des projets, et in fine, sur la satisfaction du client final. » 250
227.-En ce qui concerne sa mise en œuvre, le Groupe Expleo expose que cet accord n’a donné lieu à aucune indemnisation au motif que « [c]eci découle directement de la nature du "gentlemen agreement", qui n’est ni formalisé, ni engageant pour l’une ou l’autre des parties »251.
228.-Au sujet des clauses de non-sollicitation insérées dans plusieurs contrats conclus avec Bertrandt, le Groupe Expleo estime qu’elles sont « légales dès lors qu’elles sont proportionnées au contrat conclu »252 et qu’elles poursuivent la même finalité que le
« gentleman agreement (…) qui consiste à éviter des débauchages massifs de personnel, et ainsi prévenir les actions contentieuses pour concurrence déloyale »253.
c)-Les pratiques relatives aux ressources humaines mises en œuvre par Ausy/Randstad et Atos dans les secteurs de l’aéronautique, l’aérospatial et la défense
229.-Il ressort des éléments du dossier qu’Ausy/Randstad et Atos ont inséré des clauses de non-sollicitation de personnel dans certains de leurs contrats de partenariat dans les secteurs de l’aéronautique, l’aérospatial et la défense. La mise en œuvre de ces clauses a pu donner lieu à des échanges de courriels entre les deux sociétés.
Les relations de concurrence et de partenariat entre Atos et Ausy/Randstad
230.-Atos et Ausy/Randstad sont concurrentes tant sur les marchés amont de l’emploi de ressources humaines que sur les marchés aval de prestations d’assistance, de conseil et d’ingénierie. Les deux entreprises sont également partenaires dans le cadre d’appels d’offres lancés dans les secteurs de l’aéronautique, l’aérospatial et la défense, notamment à Toulouse pour le compte d’Airbus, du Centre national d’études spatiales (ci-après : « CNES »), de la [Confidentiel] ([Confidentiel]) et de [Confidentiel].254
Les contrats de sous-traitance et/ou de partenariat conclus entre Atos et Ausy/Randstad et leurs clauses de non-sollicitation de personnel
231.-Depuis 2013, Atos et Ausy/Randstad ont conclu des partenariats pour le compte de clients finals dans les secteurs de l’aéronautique, l’aérospatial et de la défense. Les sociétés demandeuses de clémence ont fourni une liste des contrats de partenariat conclus avec Atos, contenant des clauses de non-sollicitation de personnel.
Les contrats signés pour le client Airbus (2014-2021)
-Le contrat « [Confidentiel] » (2014-2016)
232.-En 2014, Airbus (division « EYYW » [ancienne dénomination de la division d’Airbus SAS dédiée à l’aviation civile]), a attribué des marchés relatifs à la recherche et la technologie ([Confidentiel]) à Ausy/Randstad255 en rang 1, avec Atos en rang 2.
233.-Dans ce cadre, Ausy/Randstad a conclu deux contrats de sous-traitance avec Atos Intégration SAS :
-un premier « contrat [Confidentiel] », signé le 2 décembre 2014 et couvrant l’année 2015, comportait la clause de non-sollicitation de personnel rédigée de la manière suivante (article 17)256 :
« Chacune des Partie renonce, sauf accord écrit préalable de l'autre Partie, à faire directement ou indirectement, des offres d'engagement à un collaborateur de l'autre Partie ou du Client Final ayant participé à l’exécution du Contrat ou à le prendre à son service, sous quelque statut que ce soit, même si la sollicitation initiale est formulée par le collaborateur. Cette renonciation reste valable pendant une période de douze (12) mois à compter de la fin de l’intervention du collaborateur chez Ausy ou chez le Client final. Dans le cas où l'une des Parties ne respecterait pas cet engagement, elle s'engage à dédommager l'autre Partie en lui versant une indemnité égale aux appointements bruts que le collaborateur aura perçus pendant les douze
(12) mois précédant son départ. L'application de la présente clause sera écartée dans les cas suivants : - embauche de collaborateurs d’une Parties licenciés pour des raisons économiques - dépôt de bilan de l'une des Parties si l'administrateur judiciaire n'opte pas pour la poursuite du contrat »257 ; et,
-un second « contrat [Confidentiel] », signé le 31 décembre 2015 et couvrant l’année 2016, Atos Intégration SAS agissant en tant que sous-traitant pour Ausy/Randstad. Ce contrat prévoyait la clause de non-sollicitation de personnel suivante (article 17)258 : « Chacune des Parties renonce, sauf accord écrit préalable de l'autre Partie, à faire directement ou indirectement, des offres d'engagement à un collaborateur de l'autre Partie ou du Client Final ayant participé à l'exécution du Contrat ou à le prendre à son service, sous quelque statut que ce soit, même si la sollicitation initiale est formulée par le collaborateur. Cette renonciation reste valable pendant une période de douze (12) mois à compter de la fin de l'intervention du collaborateur chez Ausy ou chez le Client final. Dans le cas où l'une des Parties ne respecterait pas cet engagement, elle s'engage à dédommager l'autre Partie en lui versant une indemnité égale aux appointements bruts que le collaborateur aura perçus pendant les douze (12) mois précédant son départ. L'application de la présente clause sera écartée dans les cas suivants : - embauche de collaborateurs d'une des Parties licenciés pour des raisons économiques - dépôt de bilan de l'une des Parties si l'administrateur judiciaire n'opte pas pour la poursuite du contrat ».
-Les projets « [Confidentiel] » et « [Confidentiel] » (2015-2016)
234.-Le projet « [Confidentiel] » et le projet « [Confidentiel] » ont été attribués en rang 1 à Ausy/Randstad, avec en rang 2 Atos parmi d’autres259. Le 2 février 2015, les parties ont formalisé une relation de sous-traitance d’Atos Intégration SAS pour Ausy/Randstad dans un contrat en vigueur du 1er mars 2015 au 31 décembre 2016.
235.-Ce contrat prévoyait une clause de « [n]on-sollicitation de personnel » rédigée de la façon suivante (article 19)260 :
« Les Parties s’interdisent d’embaucher, faire embaucher, ou faire travailler, directement ou indirectement, sans accord préalable écrit de l’autre Partie, toute personne ayant participé à la réalisation des travaux demandés pendant toute la durée du Contrat et un (1) an après à compter de la cessation des relations contractuelles définies par les présentes. En cas de violation des dispositions du présent article, la Partie responsable est tenue de payer à l’autre Partie, une somme forfaitaire égale à douze (12) mois de rémunération mensuelle brute la plus élevée de la personne en cause. L’application de la présente clause sera écartée dans les cas suivants : - Embauche de collaborateurs d’AUSY licenciés pour des raisons économiques - Dépôt de bilan de l’une des Parties si l’administrateur judiciaire n’opte pas pour la poursuite du contrat ».
-Le contrat « [Confidentiel] » pour Airbus Defence & Space (2016-2021)
236.-Ausy/Randstad a conclu un marché « [Confidentiel] » avec Airbus Defence & Space pour une période courant du 1er octobre 2016 au 31 décembre 2021261. Pour l’exécution de ce marché, le 12 décembre 2016, Ausy SA a sous-traité à Atos Intégration SAS l’exécution de certaines prestations de service par un contrat en vigueur du 1er janvier 2017 au 31 décembre 2021262.
237.-Ce contrat de sous-traitance prévoyait une clause de non-sollicitation de personnel (article 20) formulée comme suit263 :
« Chaque Partie renonce, sauf accord écrit préalable, à faire directement ou indirectement, des offres d'engagement à un collaborateur de l'autre Partie ayant participé à l'exécution du Contrat ou à le prendre à son service, sous quelque statut que ce soit, même si la sollicitation initiale est formulée par le collaborateur. Cette renonciation est valable pendant une période de vingt-quatre (24) mois à compter de la fin de l'intervention du collaborateur dans le cadre de l'exécution du présent contrat. Dans le cas où l'une des parties ne respecterait pas cet engagement, elle s'engage à dédommager l'autre partie en lui versant une indemnité égale aux appointements bruts que le collaborateur aura perçus pendant vingt-quatre (24) mois précédent son départ ».
Les contrats signés pour le client CNES – contrats « [Confidentiel] » (2016-2022)
238.-Ausy/Randstad et Atos sont engagés depuis 2016 dans une relation de sous-traitance pour le client final CNES au titre de laquelle Atos sous-traite des prestations à Ausy/Randstad. Atos a indiqué que « [l]'ensemble des relations entre ATOS et le CNES sont régies par le Contrat Cadre [Confidentiel] », et que « [l]'Accord Cadre [Confidentiel] signé avec le client final CNES le 08/01/2017 regroupe les activités dans le domaine de l'informatique spatiale pour des prestations de développement, d'exploitation et de maintenance des moyens sol à forte composante en logiciels spécifiques du secteur spatial pour le CNES. AUSY est sous-traitant d'ATOS au bénéfice du client final CNES depuis le 1er janvier 2017, sous-traitance agréée par le client CNES. AUSY répond avec ATOS, et uniquement à la demande d'ATOS, aux consultations émises par le client final CNES, en tant que partenaire sous-traitant d'ATOS. Les modalités de réponse aux consultations du client final ainsi que de réalisation des prestations par AUSY en cas de gain de la consultation sont définies au contrat de sous- traitance signé entre ATOS et AUSY et entré en vigueur le 1e janvier 2017 »264.
239.-Atos Intégration SAS et Ausy/Randstad ont, dans un premier temps, conclu le 4 juillet 2016 un « protocole préalable de sous-traitance », par lequel Ausy/Randstad est sous-traitant d’Atos, pour la période allant du 4 juillet 2016 au 1er janvier 2017. L’article 9 dudit contrat, intitulé « non-sollicitation de personnel », stipule que « [c]hacune des parties renonce, sauf accord écrit préalable de l'autre Partie, à faire directement ou indirectement des offres d'engagement à un collaborateur de l'autre Partie intervenant au titre du présent Protocole ou Convention, ou à le prendre à son service, sous quelque statut que ce soit. Cette renonciation reste valable pendant une période de douze (12) mois à compter de l'expiration pour quelque cause que ce soit du Protocole. Dans le cas où l'une des parties ne respecterait pas cet engagement, elle s'engage à dédommager l'autre Partie en lui versant une indemnité égale au salaire brut perçu par le collaborateur débauché pendant les six (6) mois précédent son départ. »265
240.-Dans un second temps, Atos Intégration SAS et Ausy/Randstad ont conclu au mois de juillet 2017 un « contrat de sous-traitance », par lequel Ausy/Randstad est sous-traitant d’Atos, pour une entrée en vigueur rétroactive au 1er janvier 2017 et jusqu’au 31 décembre 2022. L’article 18.2.2 du contrat, intitulé « non-sollicitation de personnel », stipule que « [c]hacune des Parties renonce, sauf accord écrit préalable de l'autre Partie, à faire directement ou indirectement des offres d'engagement à un collaborateur de l'autre Partie intervenant au titre du présent Contrat, ou à le prendre à son service, sous quelque statut que ce soit. Cette renonciation reste valable pendant une période de douze (12) mois à compter de l’expiration pour quelque cause que ce soit du Contrat. Dans le cas où l'une des Parties ne respecterait pas cet engagement, elle s'engage à dédommager l'autre Partie en lui versant une indemnité égale au salaire brut perçus par le collaborateur débauché pendant les six (6) mois précédent son départ. L'application de la présente clause sera écartée dans les cas suivants : - embauche de collaborateur(s) de l'autre Partie licencié(s) pour des raisons économiques ; - dépôt de bilan de l'une des Parties si l'administrateur judiciaire n'opte pas pour la poursuite du contrat »266.
L’application des clauses de non-sollicitation concernées
241.-Les contrats conclus en l’espèce entre Ausy/Randstad et Atos ont tous concerné deux clients, Airbus et le CNES, et ont porté sur la période allant de 2014 à 2021 pour le premier et sur la période allant de 2016 à 2022 pour le second. Dans ce cadre, le 13 février 2017,
M. 67 (Business unit Director, Ausy SAS) écrit à M. 68 (Responsable d’agence, Atos TS Toulouse, Atos Integration SAS) et Mme 69 (Directrice de projet, Atos Integration SAS), avec en copie ses trois collègues de chez Ausy/Randstad, à savoir M. Y (Directeur des opérations), Mme 70 (Business Unit Director, Ausy SAS) et Mme 71 (Coordinateur RH), ce qui suit267 :
« [s]uite à nos derniers échanges, voilà ce que nous vous proposons : nous nous engageons, à Toulouse, à vous contacter avant d’appeler, dans le cadre d’un recrutement, des consultants salariés d’ATOS ayant déjà travaillé pour un des comptes du groupe AIRBUS ou pour le CNES, périmètres sur lesquels nous avons établi des partenariats forts de coopération. A l’issu de ce contact, nous envisagerons, ensemble, l’opportunité de recevoir le consultant, ou pas. Nous attendons évidemment de votre part une réciprocité sur les mêmes conditions. Nous avons validé ce dispositif avec tout l’établissement de Toulouse, et en premier lieu son Directeur, Y.
En ce qui concerne le cas particulier de 72, nous reviendrons très prochainement vers vous » (soulignements ajoutés).
242.-Le 20 février 2017, Mme 69 (Directrice de projet, Atos Intégration SAS) adresse un courriel à M. 67 (Business Unit Director, Ausy SAS) et M. 68 (Responsable d’agence, Atos TS Toulouse, Atos Integration SAS), avec en copie M. Y (Directeur des opérations, Ausy SAS), Mme 70 (Business Unit Director, Ausy SAS), Mme 71 (Coordinateur RH, Ausy SAS) et
M. 73 (Directeur de département, Atos Management France SAS), pour les informer que cette proposition leur convient268.
243.-Interrogées par les services d’instruction sur les clauses de non-sollicitation contenues dans les contrats de partenariat entre Ausy/Randstad et Atos, les sociétés demandeuses de clémence ont déclaré que le champ personnel était limité aux salariés concernés par le projet. La durée était également limitée dans le temps et prenait en compte le temps de formation et de recrutement de nouveaux salariés qualifiés en cas de départs. Elles ont également précisé que ces clauses s’appliquaient même lorsque les salariés étaient à l’initiative d’une candidature, et ce en vue de prévenir leur contournement par l’une ou l’autre des parties. Les sociétés demandeuses de clémence indiquent à cet égard que sans cette précision, il aurait été très aisé pour les parties de « déguiser » un débauchage en candidature spontanée d’un salarié. Elles ajoutent que l’indemnité prévue visait à indemniser la partie qui subit les départs de salariés des coûts liés au recrutement et à la formation de remplaçants ou à la perte de chiffre d’affaires. Cette indemnité n’aurait toutefois pas été mise en œuvre269.
244.-En outre, elles rappellent que ces clauses de non-sollicitation visaient à protéger chacune des parties contre la désorganisation de l’entreprise qui pourrait résulter d’un débauchage déloyal de ses salariés par l’autre partie, débauchage d’autant plus facilité par la proximité des équipes amenées à se rencontrer lors de projets communs. Pour ne pas mettre en péril la réalisation de ces projets, qui requièrent souvent des compétences complémentaires pointues et recherchées, et permettre une collaboration stable entre Ausy/Randstad et ses partenaires, les clauses de non-sollicitation seraient ainsi indispensables. Les sociétés demandeuses de clémence précisent toutefois qu’il arrive régulièrement que ces clauses ne soient pas respectées ou, en tout état de cause, que les salariés décident de postuler chez d’autres concurrents270.
245.-D’après les éléments au dossier, les différentes clauses de non-sollicitation conclues entre les entreprises mises en cause ont été mises en œuvre dans le cadre du recrutement de sept collaborateurs : un en 2016, quatre en 2017 et deux en 2018.
Le cas de M. 74
246.-Dans un courriel daté du 25 février 2016 intitulé « [AUSY] 74 », Mme 70 (Business Unit Director, Ausy SAS), écrit à M. 75 (Ingénieur d’études et développement, Atos Integration SAS) et à M. 76 (Ingénieur de conception, Atos Integration SAS), avec en copie M. 77 (Senior Contract and Delivery Manager, Ausy SAS) pour leur demander leur accord pour intégrer M. 74 dans leurs effectifs271. Le message est rédigé comme suit :
« [c]omme évoqué à plusieurs reprises, nous souhaiterions intégrer Monsieur 74 dans nos effectifs.
Conformément au contrat qui lie nos deux sociétés, nous avons besoin de votre accord pour lui remettre un contrat.
Pouvez-vous nous confirmer ou infirmer votre accord sur ce sujet ? ».
247.-Dans un courriel en réponse du 1er mars 2016, M. 78 (Chef de projet, Atos Intégration SAS) indique à Mme 70 (Business Unit Director, Ausy SAS), avec en copie M. 75 (Ingénieur d’études et développement, Atos Integration SAS), M. 77 (Senior Contract and Delivery Manager, Ausy SAS) et M. 68 (Responsable d’agence, Atos TS Toulouse, Atos Integration SAS)272, ce qui suit :
« [p]our rappel, nous avons déjà une très forte décroissance de revenu sur l'activité entre 2015 et 2016. Le transfert de Monsieur 74 réduira notre revenu d'autant plus.
Nous avons aujourd'hui en 2016, 2 personnes à un TJM de 405€ et 3 personnes à un TJM de 356€ ; Notre tarif était basé sur le calcul d'un mix-profil de 375€. Il ne peut être acceptable pour Atos de réduire la marge sur cette prestation.
La condition préalable à la libération de Monsieur 74 afin qu'il rejoigne vos effectifs est d'augmenter le TJM sur le reste de la prestation à 375€, à compter du prochain bon de commande d'Avril.
Dès confirmation de l'acceptation de cet accord, je pourrais vous faire parvenir un document officiel ».
248.-Dans un courriel en réponse du 7 mars 2016, Mme 70 (Business Unit Director, Ausy SAS) indique à M. 78 (Chef de projet, Atos Integration SAS) (avec les mêmes interlocuteurs d’Atos en copie) accepter d’augmenter le taux journalier moyen au prix proposé pour une période donnée en contrepartie de l’accord d’Atos pour embaucher M. 74273.
249.-Dans un courriel en réponse du 10 mars 2016, M. 78 (Chef de projet, Atos Integration SAS) indique à Mme 70 (Business Unit Director, Ausy SAS) (avec les mêmes correspondants d’Atos en copie) qu’il accepte de lever la clause de non-sollicitation pour M. 74 sous réserve que ce dernier effectue son préavis légal de trois mois274.
250.-Mme 70 d’Ausy (Business Unit director) précise toutefois à ses correspondants d’Atos, le même jour (10 mars 2016) que « la réévaluation des tarifs sur l'ATSU [Projet pour Airbus lié à [Confidentiel] ] ne sera effective qu'à la date d'entrée de 74 dans nos effectifs »275.
251.-Enfin, au sujet du cas de M. 74, les sociétés demandeuses de clémence ont déclaré qu’avant de rejoindre Ausy/Randstad, le 13 juin 2016, ce dernier était salarié d’Atos et effectuait une mission dans le cadre de la sous-traitance mise en place entre Ausy/Randstad, donneur d’ordre, et Atos, sous-traitant, chez Airbus. Ainsi, M. 74 rentrait dans le champ d’application de la clause de non-sollicitation dans le cadre du contrat [Confidentiel]. Son embauche a donc fait l’objet d’une information préalable d’Atos par Ausy/Randstad avant d’être acceptée par cette dernière sous réserve du respect de la période de préavis276.
Le cas de M. 79
252.-Dans un courriel du 18 octobre 2016, Mme 70 (Business Unit director) indique à
M. 78 (Chef de projet, Atos Integration SAS) :
« 79 a exprimé le souhait d’intégrer Ausy pour intervenir sur des activités en hors Airbus. Pour ce faire, conformément à nos accords, je vous demande l’autorisation de proposer un contrat de travail à 79 »277.
253.-Par courriel du 4 novembre 2016, Mme 70 (Business Directeur, Ausy SAS) relance
M. 78 (Chef de projet, Atos Integration SAS) en lui demandant : « [a]vez-vous pu rencontrer 79 ? »278.
254.-M. 78 (Chef de projet, Atos Integration SAS) répond le 14 novembre 2016 en indiquant :
« [n]ous donnons notre accord pour lever la clause de non sollicitation pour 79 »279.
255.-Au sujet de M. 79, les sociétés demandeuses de clémence ont indiqué qu’avant son embauche par Ausy le 20 février 2017, M. 79 était en mission chez Airbus pour Atos et entrait donc dans le champ d’application de la clause de non-sollicitation du contrat [Confidentiel] de 2015 entre Ausy et Atos280.
Le cas de M. 72
256.-Dans un courriel du 25 janvier 2017 intitulé « 72 », Mme 80 (Business manager, Ausy SAS) écrit à M. 67 (Business unit Director, Ausy SAS) et à M. 81 (Senior business unit manager, Ausy SAS) pour l’informer que « 72 chez ATOS a vu son manager, M. 68. Il a indiqué qu’il mettrait son VETO à un débauchage de notre part. Nous en reparlons » 281.
257.-Dans un courriel du 31 janvier 2017 intitulé « Pour information », M. 72, salarié d’Atos, écrit ce qui suit à Mme 80 (Business manager, Ausy SAS)282 :
« [j]e viens de voir 75 ([email protected]) qui est mon directeur de projet et qui était en charge des contrats Ausy/Atos pour les prestations chez Airbus. C'est lui qui recevait les demandes Ausy d'embauche de personnel Atos. Ca a été le cas pour 74 et plus récemment pour un certain 79 (dont je ne connais pas le nom de famille). Il vient de me dire qu'il n'est absolument pas au courant de votre demande me concernant (qui a dû atterrir ailleurs et arriver chez 68 malheureusement), et c'est bien dommage parce 75 aurait fait en sorte qu'il n'y ait pas de problème. Il n'est peut-être pas trop tard pour lui faire une demande formelle.
Par ailleurs selon 75, le contrat Ausy / Atos qui couvrait mes activités ("[Confidentiel] Atos 2.0"), n'inclut pas de clause qui vous imposerait de demander l'accord d'Atos pour une embauche ».
258.-Ce courriel est transféré le même jour par Mme 80 (Business manager, Ausy SAS) à M. 67 (Business unit Director, Ausy SAS), avec en copie Mme 70 (Business Unit Director, Ausy SAS)283.
259.-Le même jour, Mme 70 (Business Unit Director, Ausy SAS) intervient pour indiquer284 :
« [c]ela n’est pas aussi simple que la vision de 72. Nous avons plusieurs partenariat en cours avec ATOS dont un sur le CNES.
Hors 72 est en place au CNES actuellement d’après vos infos.
Effectivement le contrat [Confidentiel] n’est pas aussi formel que les autres mais les contrats
[Confidentiel] englobe les activités EYY (dont [Confidentiel])+ le contrat CNES. On est donc bien en plein dans les clauses de non débauchages.
Par ailleurs, la discussion est toujours en cours de négociation. »
260.-Dans un courriel du 9 février 2017 intitulé « Pacte de non "agression" :-) », Mme 69 (Directrice de projet, Atos Integration SAS) relance M. 67 (Business unit Director, Ausy SAS), avec M. 68 (Responsable d’agence, Atos TS Toulouse, Atos Integration SAS) en copie, pour obtenir un retour de sa part au sujet de « l’embauche de ressources entre nos deux sociétés » et plus particulièrement sur le cas de M. 72285.
261.-Par un courriel du 13 février 2017, M. 67 (Business unit Director, Ausy SAS) indique à Mme 70 (Business Unit Director, Ausy SAS)286 : « [i]l faut qu’on statue. J’ai relancé 98 et 99 Vendredi, mais je n’ai pas eu de réponse ».
262.-Dans un courriel du 8 juin 2017 intitulé « [AUSY] 72 », Mme 70, (Business Unit Director, Ausy SAS), écrit à M. 68 (Responsable d’agence, Atos TS Toulouse, Atos Integration SAS), avec en copie, M. 67 (Business unit Director, Ausy SAS)287 : « [n]ous souhaiterions faire une proposition d’embauche à 72. Pouvez-vous me donner votre accord ? ».
263.-Le lendemain, M. 68 (Responsable d’agence, Atos TS Toulouse, Atos Integration SAS) répond288 : « [v]ous me le prenez 6 mois en presta et ensuite ok pour l’engager ».
264.-Le 14 juin 2017, Mme 70 (Business Unit Director, Ausy SAS) répond289 : « OK pour 6 mois de prestation à 405€ (cf. TJM dernier contrat). A partir du 3 juillet, c’est bon pour vous ? ».
265.-Le 20 juin 2017, M. 68 (Responsable d’agence, Atos TS Toulouse, Atos Integration SAS) et Mme 70 (Business Unit director) échangent à nouveau plusieurs courriels relativement aux modalités d’embauche de M. 72, telles que la date d’affectation ou le tarif journalier moyen, pour faire sortir M. 72 de son projet actuel290.
266.-Après d’autres échanges, M. 68 (Responsable d’agence, Atos TS Toulouse, Atos Integration SAS) écrit, le 24 juillet 2017, à ses correspondants de chez Ausy/Randstad : « [b]onjour, Allez y, je ne peux pas vous le réaffect[er], donc faites un process normal »291.
267.-Le même jour, Mme 70 (Business Unit director) s’adresse à ses collègues d’Ausy/Randstad 292 : « 80, 81, Pouvez-vous recontacter 72 pour lui faire une remise de contrat ASAP ? ». Un dernier échange s’ensuit pour acquiescer et pour indiquer que M. 72 sera « signé sur Airbus »293.
268.-En ce qui concerne le cas de M. 72, les sociétés demandeuses de clémence ont indiqué qu’il avait souhaité postuler chez Ausy au mois de janvier 2017 alors qu’il était consultant chez Atos. Ce dernier avait précédemment réalisé diverses missions : pour Airbus EADS depuis le 1er janvier 2015 et ce jusqu’au 1er mars 2016 sous le contrat [Confidentiel] ATOS 2.0 puis en tant que consultant dans le domaine spatial pour le CNES. Informé des clauses de non- sollicitation prévues dans les contrats de partenariats, M. 72 estimait ne pas pouvoir être recruté par Ausy/Randstad sans l’accord d’Atos. Il aurait ainsi sollicité son manager M. 68 (Responsable d’agence, Atos TS Toulouse, Atos Integration SAS) pour obtenir son accord mais ce dernier aurait mis son veto à ce potentiel recrutement compte tenu du fait que M. 72 entrait dans le champ d’application de la clause de non-sollicitation du contrat entre Ausy/Randstad et Atos.
269.-En outre, les sociétés demandeuses de clémence soulignent qu’au mois de juin 2017, Ausy a réitéré sa volonté d’embaucher M. 72. Ce dernier est finalement entré chez Ausy/Randstad le 16 octobre 2017 et a été affecté au client Airbus sur la partie [Confidentiel].
270.-Également interrogé au sujet de M. 72 pendant l’instruction, Atos a déclaré ne détenir aucune information concernant cette personne294.
271.-En revanche, Mme 69 (anciennement Directrice de projet, Atos Intégration SAS) a confirmé dans ses déclarations l’existence d’un pacte de « non-agression » conclu avec Ausy/Randstad et en a précisé le contenu et la portée : « [e]n ce qui concerne M. 72, l’accord de non-agression c’est juste de s’appeler, de se tenir au courant, est-ce qu’on peut le recevoir pour une proposition d’embauche ? Certes il est lié à la conclusion du pacte de non-agression mais c’est Monsieur 68 d’Atos qui règle le cas et dans ces échanges discute les conditions d’embauches et trouve un arrangement tarifaire suite à ça »295.
Le cas de M. 82
272.-Le 20 avril 2017, Mme 83 (Chargée de recrutement senior, Ausy SAS) contacte Mme 70 (Business Unit Director, Ausy SAS) afin de se renseigner sur un candidat qu’elle souhaiterait contacter : « [b]onjour 70, j’ai trouvé ce CV sur l’APEC, qui m’intéresse, mais le candidat est chez Atos, sais-tu si je peux le contacté ? »296.
273.-En réponse du même jour, Mme 70 (Business Unit Director, Ausy SAS) indique à Mme 83 (Chargée de recrutement senior, Ausy SAS) et à M. 67 (Business unit Director, Ausy SAS) que ce dernier doit informer Atos avant toute prise de contact avec le salarié297.
274.-Dans un courriel en date du 27 avril 2017 intitulé « Candidat », M. 67 (Business unit Director, Ausy SAS), écrit à ses correspondants de chez Atos, Mme 69 (Directrice de projet, Atos Integration SAS) et M. 68 (Responsable d’agence, Atos TS Toulouse, Atos Integration SAS) pour leur demander leur autorisation pour rencontrer M. 82298.
275.-Le 27 avril 2017, M. 67 (Business unit Director, Ausy SAS) confirme par courriel à Mme 83 (Chargée de recrutement senior, Ausy SAS), avec en copie Mme 70 (Business Unit Director, Ausy SAS) et Mme 71 (Coordinatrice RH Sud-ouest, Ausy SAS), ce qui suit :
« [j]’ai informé Atos. On attend le retour avant de le contacter »299.
276.-En réponse du 2 mai 2017, Mme 69 (Directrice de projet, Atos Integration SAS) écrit à
M. 67 (Business unit Director, Ausy SAS) et à M. 68 (Responsable d’agence, Atos TS Toulouse, Atos Integration SAS) qu’elle accepte qu’Ausy prenne contacte avec M. 82300.
277.-M. 67 (Business unit Director, Ausy SAS) répond : « OK merci Je vous tiendrai au courant »301. En parallèle, il transfère cette réponse en interne à Mme 83 (Chargée de recrutement senior, Ausy SAS), avec en copie Mme 70 (Business Unit Director, Ausy SAS),
M. Y (Directeur des opérations, Ausy SAS) et Mme 71 (Coordinatrice RH Sud-ouest, Ausy SAS), en indiquant : « ATOS nous autorise à rencontrer 82. Tenez-moi au courant de la suite. MERCI »302.
278.-Le même jour (2 mai 2017), Mme 83 (Chargée de recrutement senior, Ausy SAS) informe ces mêmes correspondants de chez Ausy SAS qu’elle a contacté M. 82 pour fixer un entretien303.
279.-Lors de l’instruction, interrogée au sujet de M. 82, Mme 69 (anciennement Directrice de projet, Atos Integration SAS) a déclaré304 : « [c]oncernant M. 82, c’est aussi un cas d’application harmonieuse du pacte, dans le même sens car là aussi c’est Ausy qui embauche, j’ai dit oui à son embauche ».
280.-Concernant le cas de M. 82, les sociétés demandeuses de clémence ont confirmé qu’Ausy/Randstad avait souhaité le recruter au mois d’avril 2017 alors qu’il était encore en poste chez Atos. Elles indiquent que le lancement du processus de recrutement avait préalablement nécessité l’accord d’Atos dans la mesure où M. 82 entrait a priori dans le champ d’application de la clause de non-sollicitation de l’accord-cadre entre Ausy/Randstad et Atos de 2013. Ce recrutement n’a finalement pas abouti et M. 82 serait resté chez Atos jusqu’en 2017305.
Le cas de Mme 84
281.-Dans un courriel du 23 janvier 2017 intitulé « Envoi électronique – 84-o.pdf », Mme 85 (Business departement director, Ausy SAS), indique à M. 67 (Business unit Director, Ausy SAS) la présence d’une candidate de chez Atos au sein de leur processus de recrutement306 que : « [c]ette candidate ATOS est dans le parcours de recrutement – je te tiens au courant apres le RH2. »
282.-Dans un courriel du 28 février 2017 intitulé « TR : Dossier de compétence » transmettant des éléments de candidature de Mme 84 pour un emploi chez Ausy/Randstad, Mme 85 (Business departement director, Ausy SAS) demande à M. 67 (Business unit Director, Ausy SAS)307, ce qui suit :
« 67, candidate ATOS dans le parcours ED (RH2 validé). Rentre-t-elle dans le cadre de l’exclusion ? »
283.-En réponse du 1er mars 2017, M. 67 (Business unit Director, Ausy SAS) indique (avec ajout de Mme 71 - coordinateur RH, Ausy SAS - en destinataire et de Mme 70 - Business Unit Director, Ausy SAS- et M. Y - Directeur des opérations, Ausy SAS - en copie) ce qui suit308 :
« 85 et 71,
L’engagement que nous avons pris vis-à-vis d’ATOS est le suivant (mail envoyé le 13/02/2017) :
(…) [N]ous nous engageons, à Toulouse, à vous contacter avant d’appeler, dans le cadre d’un recrutement, des consultants salariés d’ATOS ayant déjà travaillé pour un des comptes du groupe AIRBUS ou pour le CNES, périmètres sur lesquels nous avons établi des partenariats forts de coopération. A l’issu de ce contact, nous envisagerons, ensemble, l’opportunité de recevoir le consultant, ou pas. Nous attendons évidemment de votre part une réciprocité sur les mêmes conditions. Nous avons validé ce dispositif avec tout l’établissement de Toulouse, et en premier lieu son Directeur, Y. »
Au vue de son dossier, j’ai l’impression que 84 a travaillé pour le CNES en 2016 et 2015, et pour AIRBUS Civil de 2011 à 2014.
Donc, OUI, elle est dans ce cadre.
Par contre, à quand remonte le premier contact ? Est-il antérieur au 13/02/2017 ?
Et question subsidiaire à 71 : est ce qu’on a d’autres candidats en process de recrutement qui vient d’ATOS ? » (soulignements ajoutés).
284.-Dans un courriel du même jour, Mme 70 (Business Unit Director, Ausy SAS) indique à ses collègues, M. 67 (Business unit Director, Ausy SAS) et M. Y (Directeur des opérations, Ausy SAS), ce qui suit309 :
« [p]our info, de mon coté, ce dossier ne rentre pas dans la clause de non débauchage de façon purement contractuel. »
285.-Quelques heures plus tard, dans un autre courriel, Mme 85 (Business departement director, Ausy SAS) demande des précisions sur Mme 84 à ses collègues de chez Ausy/Randstad :
M. 67 (Business unit Director, Ausy SAS), M. Y (Directeur des opérations, Ausy SAS), Mme 70 (Business Unit Director, Ausy SAS) et Mme 71 (coordinateur RH, Ausy SAS)310 :
« 84 était déjà dans le process en Janvier, donc antérieurement au mail.
Elle a travaillé pour Airbus civil, mais pas pour le cnes, et uniquement sur des projets au forfait chez ATOS.
Donc quid du statut ? fait-on la remise de contrat ? ».
286.-Dans un courriel du 8 mars 2017 intitulé « 84 », Mme 69 (Directrice de projet, Atos Integration SAS) donne son accord à Ausy/Randstad pour donner suite au recrutement de Mme 84. Ainsi, elle écrit à M. 67 (Business unit Director, Ausy SAS) en ces termes : « 67, Ok pour que vous avanciez sur le sujet avec elle. »311. M. 67 (Business unit Director, Ausy SAS) transfère ce courriel en interne le 9 mars 2017312.
287.-Le 15 mars 2017, en réponse au précédent courriel de Mme 69 (Directrice de projet, Atos Integration SAS), M. 67 (Business unit Director, Ausy SAS) l’informe que Mme 84 a rejoint Ausy/Randstad313. Un courriel du même jour intitulé « RECRUTEMENT - Signature contrat de travail », signé de Mme 71 (coordinateur RH, Ausy SAS) à une trentaine de collègues d’Ausy/Randstad, confirme son recrutement et précise sa date d’entrée le 13 juin 2017314.
288.-Les sociétés demandeuses de clémence mettent en évidence que bien qu’il n’est pas totalement évident que Mme 84 ait été concernée par ces clauses de non-sollicitation, Ausy/Randstad a, en tout état de cause, sollicité l’accord préalable d’Atos avant de procéder à son embauche. Elles ajoutent que Mme 84 était consultant chez Atos depuis septembre 2011 et avait réalisé une mission pour Airbus, avant d’entrer chez Ausy/Randstad le 15 mars 2017315.
Le cas de M. 86
289.-Dans un courriel du 12 janvier 2018 intitulé « Débauchage par ATOS », M. 67 (Business unit Director, Ausy SAS), écrit à ses interlocuteurs de chez Atos, M. 68 (Responsable d’agence, Atos TS Toulouse, Atos Integration SAS) et Mme 69 (Directrice de projet, Atos Integration SAS), pour les informer du départ d’un de leurs salariés chez Atos316 :
« [n]ous commençons mal l’année : nous venons d’apprendre qu’un de nos salariés (86) qui a donné sa démission fin d’année dernière et rejoint ATOS. Est-ce que vous pouvez vérifier la véracité de cette information? Si c’est le cas, il s’agit d’une violation de nos accords ? »
290.-En réponse du même jour, M. 68 (Responsable d’agence, Atos TS Toulouse, Atos Integration SAS) leur précise, avec en copie M. 81 (Business unit director, Ausy SAS) et
M. Y (Directeur des opérations, Ausy SAS), qu’il ne s’agit pas ici d’un débauchage 317 :
« puisque c’est le collaborateur qui nous a contacté suite à une annonce que l’on avait. Nous n’avons eu aucune action vers aucun employé ausy à fin de les recruter ».
291.-M. 67 (Business unit Director, Ausy SAS) répond à ce courrier en rappelant le cadre de l’accord entre Ausy/Randstad et Atos mentionné dans le courriel du 13 février 2017 (voir, ci-dessus, le paragraphe 241) 318 :
« Je rappelle l’objet de nos accords tracés dans un mail du 13/02/2017 :
"Nous (AUSY) nous engageons, à Toulouse, à vous contacter avant d’appeler, dans le cadre d’un recrutement, des consultants salariés d’ATOS ayant déjà travaillé pour un des comptes du groupe AIRBUS ou pour le CNES, périmètres sur lesquels nous avons établi des partenariats forts de coopération. A l’issu de ce contact, nous envisagerons, ensemble, l’opportunité de recevoir le consultant, ou pas. Nous attendons évidemment de votre part une réciprocité sur les mêmes conditions. Nous avons validé ce dispositif avec tout l’établissement de Toulouse, et en premier lieu son Directeur, Y."
Le consultant en question travaille chez nous sur un projet AIRBUS : il rentre totalement dans l’objet de notre accord, même si vous ne l’avez pas contacté directement ».
292.-En parallèle, le même jour, M. Y (Directeur des opérations, Ausy SAS), écrit à M. 87 (Directeur de département, Atos Management France) ce qui suit319 : « [v]oir ci-dessous… Si le cas est avéré, on va avoir un sujet à traiter ensemble ! ».
293.-M. 87 (Directeur de département, Atos Management France) lui répond320 :
« Je lis ci-dessous qu’il est fait mention "d’accord" entre nos sociétés.
A quel accord faisons-nous référence, quels sont les modalités de cet accord ? Pour ce qui est de la personne nommée je me renseigne. ».
294.-M. Y (Directeur des opérations, Ausy SAS) écrit alors à M. 67 (Business unit Director, Ausy SAS), toujours le 12 janvier 2018, lui demandant321 : « [u]ne copie des accords ? as-tu ? ».
295.-Par un courriel distinct du même jour intitulé « Pacte de non "agression Ausy – Atos »,
M. 67 (Business unit Director, Ausy SAS) répond à M. Y (Directeur des opérations, Ausy SAS)322 :
« En ce qui concerne l’accord entre ATOS et AUSY sur le recrutement, il s’agit d’un gentleman agreement tracé dans le mail ci-dessous [mail du 13 février 2017 intitulé « Pacte de non "agression" :-) » échangé entre les représentants d’Ausy et d’Atos, voir supra le paragraphe 260].
Le cas potentiel que nous avons remonté ce matin concerne un consultant qui travaille actuellement pour AIRBUS. Donc, il entre complètement dans l’objet de l’accord ».
296.-Le 23 janvier 2018, M. 81 (Business unit director, Ausy SAS) renvoie à M. 67 (Business unit Director, Ausy SAS) le courriel du 12 janvier 2018 que ce dernier a envoyé à Atos (voir, ci-dessus, le paragraphe 289), avec en copie Mme 88 (Coordinatrice ressources humaines, Ausy SAS) et Mme 89 (Ingénieur premier échelon, Ausy SAS), en demandant des nouvelles au sujet du recrutement de M. 86323.
297.-Le 24 janvier 2018, M. 67 (Business unit Director, Ausy SAS) répond par la négative324 :
« [n]on Mais je pense que ce doit être Y qui doit reprendre ce sujet avec le patron d'Atos Toulouse ».
298.-Dans un courriel du 1er février 2018 intitulé « TR : débauchage par Atos », M. Y (Directeur des opérations, Ausy SAS), écrit à M. 87 (Directeur de département, Atos Management France)325 :
« Je reviens vers vous sur notre soucis de débauchage, voici les éléments ci-dessous.
Par conséquent, cet accord n’a pas été respecté et je vous propose un échange téléphonique pour en discuter. ».
299.-Les « éléments ci-dessous » sont les deux courriels de M. 67 (Business unit Director, Ausy SAS) du 12 janvier 2018 (voir, ci-dessus, le paragraphe 289) et le courriel de
M. 68 (Responsable d’agence, Atos TS Toulouse, Atos Integration SAS) du même jour (voir, ci-dessus, le paragraphe 290).
300.-Interrogée au sujet de M. 86, Mme 69 (Directrice de projet, Atos Integration SAS) a déclaré326 : « [e]n ce qui concerne le rappel de l’accord après l’incident concernant 86, il est question d’un gentleman agreement et ce terme illustre bien la teneur et la forme de l’accord entre Ausy et Atos : une règle de bonne conduite. Monsieur 87 a découvert l’existence de l’accord à ce moment-là, sachant qu’il a repris les fonctions antérieurement exercées par M. 73 (…) ».
301.-Il ressort des déclarations des sociétés demandeuses de clémence que M. 86 a démissionné d’Ausy/Randstad par courrier du 3 janvier 2018 et quitté les effectifs de l’entreprise le 30 mars 2018 pour être affecté par Atos sur un projet d’Airbus327. Les sociétés demandeuses de clémence ont également précisé qu’Ausy/Randstad n’a pas donné son accord, ni formulé de veto sur ce recrutement par Atos328.
Le cas de M. 90
302.-Dans un courriel intitulé « PA rattrapage 90 » en date du 21 février 2018, M. 91 (BU Director, Ausy SAS), évoque à trois collègues de chez Ausy/Randstad, dont M. Y (Directeur des opérations, Ausy SAS) la situation de M. 90 et les pistes envisagées pour qu’il ne démissionne pas329.
303.-Le même jour, le 21 février 2018, M. 91 (BU Director, Ausy SAS) relance M. Y (Directeur des opérations, Ausy SAS) au sujet de M. 90330 :
« Peux-tu nous donner ton feu vert ou préconisations sur le cas de 90 stp ? J’aimerais lui faire un retour au plus vite pour avoir une chance de le rattraper. »
304.-Le même jour, M. Y (Directeur des opérations, Ausy SAS) valide la proposition de revalorisation salariale faite par M. 91 (BU Director, Ausy SAS)331. Par un courriel du
9 mars 2018 intitulé « 90 », M. 68 (Responsable d’agence, Atos TS Toulouse, Atos Integration SAS) écrit à M. 67 (Business unit Director, Ausy SAS), avec Mme 69 (Directrice de projet, Atos Integration SAS) en copie, pour l’informer de son intérêt pour le profil de
M. 90332 : « [o]n a reçu le CV de 90 qui nous intéresse peut-on parler avec lui, merci ».
305.-Le même jour, M. 67 (Business unit Director, Ausy SAS) l’informe333 en ces termes de la situation concernant M. 90 :
« Nous savions que 90 était en risque chez nous et nous avons fait en sorte de lui proposer une autre mission ; ce qu’il a accepté.
Si vous le recevez, cela le mettra à nouveau en risque chez nous. Ce serait bien que vous ne le receviez pas » (soulignement ajouté).
306.-Le 10 mars 2018, M. 68 (Responsable d’agence, Atos TS Toulouse, Atos Integration SAS) répond à M. 67 (Business unit Director, Ausy SAS), avec en copie Mme 69 (Directrice de projet, Atos Integration SAS), M. Y (Directeur des opérations, Ausy SAS), M. 91 (BU Director, Ausy SAS) et Mme 92 (Senior business unit manager, Ausy SAS), en indiquant334 :
« [j]e pense qu’il a été vu par les opérations car son dossier m’est revenu ».
307.-Par un courriel du 5 mars 2018 intitulé « [AUSY] URGENT-Demande Arbitrage Projet AIRBUS », Mme 92 (Senior business unit manager, Ausy SAS), indique à divers destinataires de chez Ausy, dont M. 67 (Business unit Director, Ausy SAS), M. Y (Directeur des opérations, Ausy SAS) et M. 91 (BU Director, Ausy SAS) ce qui suit335 :
« J’ai présenté la semaine dernière 90 et 93 (deux ressources (…) ayant émis un fort souhait de quitter ce projet) sur deux opportunités au sein d’AIRBUS Civil département IAM (ZIOIC) [Division d’airbus dédiée].
J’ai un GO technique pour les deux ressources :
·-90 était démissionnaire et a décidé de rester suite à cette opportunité
·-93 a exprimé clairement son souhait d’aller sur ce même projet Le litige porte sur la date de disponibilité de 93 ».
308.-Par un courriel du 15 mars 2018 intitulé « Signature - 90 (GM8) chez EADS AIRBUS I le 19/03/2018 », Mme 92 (Senior Business Unit manager, Ausy SAS), indique à divers destinataires derrière une liste de diffusion (adresse « [email protected] »), dont M. 67 (Business unit Director, Ausy SAS), ce qui suit336 :
« 92 de l'agence RM2 a le plaisir de vous annoncer la signature en AT[Assistance technique] (OK technique et achat) de 90 de l'agence [Confidentiel] chez EADS AIRBUS I pour un démarrage le 19/03/2018 ».
309.-Ce courriel mentionne une « date de fin prévisionnelle de la mission 31/12/2018 ».
310.-Par la suite, dans un courriel du 29 mars 2018 intitulé « 90 – recrutement », Mme 94 (Recruitment Partner Toulouse, Direction des Ressources Humaines, Atos Management France) écrit à M. 67 (Business unit Director, Ausy SAS) [avec deux correspondants d’Atos en copie dont M. 68 (Responsable d’agence, Atos TS Toulouse, Atos Integration SAS)] ce qui suit337 :
« Je vous écris suite à vos précédents échanges avec 68 au sujet du recrutement potentiel de
90. En effet, nous sommes dans l’attente d’un retour, si possible favorable, de votre part avant de lancer le processus de recrutement avec ce candidat. »
311.-M. 67 (Business unit Director, Ausy SAS), par un courriel du même jour (29 mars 2018), renouvelle en ces termes son refus concernant la poursuite du processus de recrutement de
M. 90 par Atos, tout en indiquant que ce collaborateur a été affecté à une nouvelle mission 338 :
« Je croyais avoir été clair avec 68, nous avons fait des efforts auprès de notre consultant et nous avons répondu à ses attentes. Il est maintenant sur une nouvelle mission et dans un autre état d’esprit.
Donc, nous ne souhaitons pas que vous lui fassiez une proposition ».
312.-Le lendemain (30 mars 2018), M. 68 (Responsable d’agence, Atos TS Toulouse, Atos Integration SAS) adresse un courriel à M. 67 (Business unit Director, Ausy SAS), avec en copie notamment M. Y (Directeur des opérations, Ausy SAS) et Mme 92 (Senior Business Unit manager, Ausy SAS), précisant ce qui suit339 : « [l]a dernière fois que l’on s’est eu tu m’as dit que tu me rappellerais d’où le mail de 94. Maintenant c’est clair donc pas de soucis ».
313.-En ce qui concerne M. 90, les sociétés demandeuses de clémence ont indiqué qu’Atos a contacté Ausy/Randstad après avoir reçu le CV de M. 90 pour lui demander s’il était possible de le recevoir en entretien. Ausy/Randstad a refusé cette embauche et M. 90 est donc resté chez Ausy/Randstad jusqu’au 22 octobre 2021. Au moment de cette sollicitation, il travaillait, selon les sociétés demandeuses de clémence, pour un projet pour le client Orange, avec lequel Atos n’avait pas de contrat sous-traitance ou de partenariat. Elles précisent également qu’il a été affecté par la suite au client Airbus340 tout en indiquant que lors des échanges entre les parties au sujet de ce recrutement, il est également possible que ce collaborateur ait achevé sa mission pour le client Orange341. Elles renvoient à ce sujet au courriel précité de M. 67 du 29 mars 2018 indiquant qu’Atos a répondu aux demandes de
M. 90 en l’affectant à une nouvelle mission, pour le compte du client Airbus.
314.-Également interrogée au sujet de ce profil, Mme 69 (Directrice de projet, Atos Integration SAS) a déclaré : « [e]n ce qui concerne M. 90, ce profil intéressait M. 68 d’Atos côté Airbus, je suis juste en copie. Je constate une sorte de véto a priori, de la part d’Ausy, pour l’embauche de ce consultant par Atos. Mais je suis juste en copie, c’était géré par 68 »342.
E.-LES GRIEFS NOTIFIÉS
315.-Le 17 septembre 2024, les services d’instruction ont notifié les griefs suivants :
1.-GRIEF N° 1
« Il est fait grief :
-à la société Randstad Digital France SAS (RCS Nanterre 352 905 707), anciennement Ausy SAS, en tant qu’auteure, d’une part ;
-à la société Alten SA (RCS Nanterre 348 607 417), en tant qu’auteure, d’autre part ;
d’avoir, entre le 16 novembre 2007 et le 26 septembre 2016, conclu et mis en œuvre sur les marchés des ressources humaines dans les secteurs de l’ingénierie et du conseil en technologies, ainsi que des services informatiques, un accord de « non-agression » ou de
« non-débauchage » (dit « gentlemen’s agreement »), visant à ne pas se faire concurrence pour le recrutement de leur personnel respectif, plus particulièrement les commerciaux et managers. Les entreprises concernées se sont ainsi engagées réciproquement à ne pas solliciter, embaucher ou recruter leur personnel respectif, sans l’accord préalable de l’autre entreprise.
La pratique en cause, mise en œuvre sur les marchés amont des ressources humaines dans les secteurs concernés, a eu pour objet et pour effet une répartition des sources d’approvisionnement. Elle a également eu pour objet et pour effet une répartition de marché sur les marchés aval des services d’ingénierie et de conseil en technologies ainsi que des services informatiques.
Une telle pratique est constitutive d’une entente anticoncurrentielle prohibée par les articles
L. 420-1 du code de commerce et 101, paragraphe 1, TFUE ».
2.-GRIEF N° 2
« Il est fait grief :
-à la société Bertrandt SAS (RCS Versailles 422 868 851), en tant qu’auteure, et aux sociétés Bertrandt France SAS (RCS Versailles 329 186 704) et Bertrandt AG (enregistrée à Stuttgart en Allemagne sous le numéro HRB 245259), en tant que sociétés-mères de la société Bertrandt SAS, d’une part ;
-à la société Expleo France SAS (RCS Versailles 404 271 470, anciennement Assystem France SAS [actuellement Expleo France]), en tant qu’auteure, et aux sociétés Assystem SA (du 20 mai 2011 au 27 septembre 2017 RCS Versailles 412 076 937) et Expleo Group SAS (à compter du 28 septembre 2017, RCS Versailles 831 178 785), en tant que sociétés-mères successives de la société Expleo France SAS, d’autre part ;
d’avoir, entre le 2 mai 2011 et le 31 mars 2021, conclu et mis en œuvre sur les marchés des ressources humaines dans les secteurs de l’ingénierie et du conseil en technologies, ainsi que des services informatiques intéressant le domaine automobile, un accord visant à ne pas se faire concurrence pour le recrutement de leur personnel respectif. Les entreprises concernées se sont ainsi engagées réciproquement à ne pas solliciter, embaucher ou recruter leur personnel respectif, sans l’accord préalable de l’autre entreprise.
Cet accord est constitué des pratiques suivantes :
-l’insertion de clauses de non-sollicitation du personnel étendues et réciproques au sein des contrats ci-après :
-La convention de groupement « [Confidentiel] » datée du 20 janvier 2012 et exécutée entre le 2 mai 2011 et le 23 décembre 2012, en ce qui concerne la clause de non-sollicitation du personnel ;
-La convention de groupement « [Confidentiel] » datée du 19 décembre 2012 et exécutée entre le 1er janvier 2012 et le 21 décembre 2013, en ce qui concerne la clause de non-sollicitation du personnel ;
-La convention de groupement « [Confidentiel] » datée du 19 février 2013 et exécutée entre le 1er janvier 2013 et le 30 juin 2016 en ce qui concerne la clause de non-sollicitation du personnel ;
-La convention de groupement « [Confidentiel] » du 19 octobre 2015 et exécutée entre le 24 mars 2014 et le 22 décembre 2017, en ce qui concerne la clause de non-sollicitation du personnel ;
-La convention de sous-traitance « [Confidentiel] » du 19 octobre 2015 et exécutée entre le 24 février 2014 et le 22 décembre 2016, en ce qui concerne la clause de non-sollicitation du personnel ;
-Le « contrat de sous-traitance dans le cadre du projet [Confidentiel]» du 19 octobre 2015 et exécuté entre le 24 février 2014 et le 22 décembre 2016, en ce qui concerne la clause de non-sollicitation du personnel ;
-La convention de sous-traitance du projet « [Confidentiel] » du 20 mars 2019 et exécutée entre le 1er janvier 2018 et le 31 mars 2021, en ce qui concerne la clause de non-sollicitation du personnel ;
-la mise en place d’un « gentlemen agreement » sur le recrutement entre le 6 février 2018 et le 31 mars 2021.
La pratique en cause, mise en œuvre sur les marchés amont des ressources humaines dans les secteurs concernés, a eu pour objet et pour effet une répartition des sources d’approvisionnement. Elle a également eu pour objet et pour effet une répartition de marché sur les marchés aval des services d’ingénierie et de conseil en technologies ainsi que des services informatiques intéressant le domaine automobile.
Une telle pratique est constitutive d’une entente anticoncurrentielle prohibée par les articles
L. 420-1 du code de commerce et 101, paragraphe 1, TFUE ».
3.-GRIEF N° 3
« Il est fait grief :
-à la société Randstad Digital France SAS (RCS Nanterre 352 905 707), anciennement Ausy SAS, en tant qu’auteure et aux sociétés Randstad France SAS (RCS Bobigny 350 988 051) et Randstad NV (enregistrée aux Pays-Bas sous le numéro CCI 33216172), en tant que sociétés-mères de la société Randstad Digital France SAS, à compter du 31 janvier 2017, d’une part,
-à la société Atos France SAS (RCS Pontoise 408 024 719), en tant qu’auteure, et à la société Atos SE (RCS Pontoise 323 623 603), en tant que société-mère de la société Atos France SAS, d’autre part,
d’avoir, à compter du 2 janvier 2015 et jusqu’à ce jour, conclu et mis en œuvre sur les marchés des ressources humaines dans les secteurs de l’ingénierie et du conseil en technologies, ainsi que des services informatiques intéressant les domaines de l’aéronautique, l’aérospatial et la défense à Toulouse, un accord visant à ne pas se faire concurrence pour le recrutement de leur personnel respectif. Les entreprises concernées se sont ainsi engagées réciproquement à ne pas solliciter, embaucher ou recruter leur personnel respectif, sans l’accord préalable de l’autre entreprise.
Cet accord est constitué des pratiques suivantes :
-l’insertion de clauses de non-sollicitation du personnel étendues et réciproques au sein des contrats ci-après :
-le contrat de sous-traitance « [Confidentiel] » d’Atos pour Ausy signé le 2 décembre 2014 et exécuté du 2 janvier 2015 au 31 décembre 2015 pour le compte du client Airbus ;
-Le contrat de sous-traitance « [Confidentiel] » d’Atos pour Ausy signé le 31 décembre 2015 et exécuté du 1er janvier 2016 au 31 mars 2016 pour le compte du client Airbus ;
-Le contrat de sous-traitance « [Confidentiel] » d’Atos pour Ausy signé le 2 février 2015 et exécuté du 1er mars 2015 au 31 décembre 2017, en ce qui concerne la clause de non-sollicitation du personnel, pour le compte du client Airbus ;
-Le contrat de sous-traitance « [Confidentiel] » d’Atos pour Ausy signé le 12 décembre 2016 et exécuté du 1er janvier 2017 au 31 décembre 2021 pour le compte du client Airbus Defence ;
-Les contrats de sous-traitance d’Ausy pour Atos signés pour le compte du client CNES (projets « [Confidentiel] » et « [Confidentiel] ») pour des durées d’exécution du 4 juillet 2016 et jusqu’à ce jour, en qui concerne la clause de non- sollicitation du personnel.
-la conclusion d’un « pacte de non-agression » depuis le mois de février 2017 et jusqu’à ce jour s’agissant de leur personnel ayant travaillé à Toulouse pour des projets ou contrats intéressant les clients finals Airbus et CNES.
La pratique en cause, mise en œuvre sur les marchés amont des ressources humaines dans les secteurs concernés, a eu pour objet et pour effet une répartition des sources d’approvisionnement. Elle a également eu pour objet et pour effet une répartition de marché sur les marchés aval des services d’ingénierie et de conseil en technologies ainsi que des services informatiques intéressant les domaines de l’aéronautique, l’aérospatial et la défense à Toulouse.
Une telle pratique est constitutive d’une entente anticoncurrentielle prohibée par les articles
L. 420-1 du code de commerce et 101, paragraphe 1, TFUE ».
II.-Discussion
A.-SUR LA PROCÉDURE
1.-SUR LE CHOIX DE RECOURIR A LA PROCEDURE SANS ETABLISSEMENT PREALABLE D’UN RAPPORT
a)-Rappel des principes applicables
316.-Le 1er alinéa de l’article L. 463-3 du code de commerce prévoit que « [l]e rapporteur général de l'Autorité de la concurrence peut décider que l'affaire sera examinée par l'Autorité sans établissement préalable d'un rapport. Il en informe les parties et le commissaire du Gouvernement préalablement à la notification des griefs. »
317.-Cette procédure à un seul tour de contradictoire écrit a été créée par la loi dite DDADUE du 3 décembre 2020343. Elle remplace la procédure dite « simplifiée » précédemment régie par l’article L. 463-3 du code de commerce, qui a été supprimée. L’Autorité, dans sa pratique décisionnelle récente344, a rappelé que la loi DDADUE a fait de la procédure à un tour de contradictoire écrit la procédure de droit commun, la procédure, plus lourde à deux tours de contradictoire écrits devenant l’exception. L’objectif du législateur était, ce faisant, de permettre au rapporteur général d’accélérer les délais de traitement des dossiers. Cet objectif, permettant d’étendre en France le champ d’application de la procédure à un tour de contradictoire écrit qui constitue la règle commune parmi les autorités de concurrence européennes, a d’ailleurs été souligné par les travaux préparatoires à l’adoption de la loi DDADUE345 et par la doctrine346.
318.-S’agissant plus particulièrement de la décision du rapporteur général selon laquelle l’examen de l’affaire se ferait sans établissement préalable d’un rapport, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence de la cour d’appel de Paris, « l’article L. 463-3 du code de commerce n’énonce aucune condition à laquelle serait soumise la décision du rapporteur général de ce qu’une affaire sera examinée par l’Autorité sans faire l’objet d’un rapport. Ce pouvoir d’administration des procédures relève donc de la seule appréciation du rapporteur général »347.
319.-Selon la cour d’appel de Paris, le recours à cette procédure n’est pas de nature à porter atteinte aux droits de la défense des parties dès l’instant où « le respect du principe du contradictoire est assuré, à l’occasion des observations en réponse à la notification des griefs d’une part, lors de la séance, d’autre part, offrant à chaque partie la possibilité raisonnable de présenter sa cause, y compris devant la Cour »348.
320.-Cette solution a récemment été réitérée dans l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 27 mars 2025 : « [a]insi, les entreprises mises en cause ont la possibilité au cours d’une procédure simplifiée de formuler des observations en réponse à la notification des griefs et de présenter leur défense lors de la séance. »349
b)-Application au cas d’espèce
Arguments des parties
321.-Plusieurs mises en cause contestent le choix du rapporteur général d’avoir décidé de recourir à la procédure sans établissement préalable d’un rapport, prévue par l’article L. 463-3 du code de commerce.
322.-Selon Alten, le choix d’une telle procédure n’est pas approprié au regard de l’absence d’analyse approfondie des services d’instruction concernant le grief n° 1, notamment quant à la réalité des mouvements des business managers entre Alten et Ausy au cours de la période du grief notifiée.
323.-Expleo soutient par ailleurs que cette procédure nuit au principe du contradictoire et porte atteinte à leurs droits à la défense, d’autant plus au regard du caractère inédit de la pratique reprochée qui constituerait « une première juridique »350.
Réponse de l’Autorité
324.-En premier lieu, au regard de la jurisprudence mentionnée ci-dessus, il est établi que les entreprises mises en cause ont été en mesure de faire valoir leurs observations en réponse à la notification de griefs.
325.-En deuxième lieu, s’agissant du caractère lacunaire et inabouti allégué de l’instruction, l'ensemble des critiques formulées par Alten repose sur une divergence d'interprétation d'éléments de preuve ou d'analyse des données du dossier, qui relève de l'appréciation des questions de fond, ultérieurement traitées dans cette décision.
326.-À cet égard, la cour d’appel de Paris relève que « le défaut de pertinence des paramètres retenus ou les erreurs d’interprétation, ou de citation [des services d’instruction], qui pourraient être relevées, ou encore le défaut d’examen [par les services d’instruction] des éléments de défense invoqués relèvent de l’examen du fond de l’analyse de l’Autorité »351.
327.-En dernier lieu, comme relevé notamment aux paragraphes 516 et suivants, il ne saurait être soutenu que la pratique en cause constituerait une « première juridique », comme le prétend Expleo. En outre, le principe du contradictoire a bien été respecté dans la mesure où le Groupe Expleo s’est saisie de la possibilité de répliquer à l’argumentaire présenté dans la notification des griefs dans ses observations du 22 mars 2024 et a été entendue lors de la séance.
328.-En tout état de cause, même si la question avait été nouvelle, quod non, ni le texte ni l’esprit de l’article L. 463-3 du code de commerce n’interdisent le recours à la procédure à un tour de contradictoire écrit pour des pratiques supposées inédites ou ne réservent cette procédure à des questions préalablement traitées.
329.-Ainsi, au regard de ces éléments et de la jurisprudence évoquée ci-dessus, l’ensemble des arguments des parties tendant à contester la décision du rapporteur général de recourir à la procédure à un tour de contradictoire écrit doivent être écartés.
2.-SUR L’IMPARTIALITE ET LA LOYAUTE DE L’INSTRUCTION
2.1.-Sur l’impartialité de l’instruction dans l’interprétation des pièces
a)-Rappel des principes applicables
330.-Selon une jurisprudence constante de la cour d’appel de Paris, « l'appréciation de la partialité de l'instruction ne saurait résulter de la seule circonstance alléguée (…) que le rapporteur n'aurait pas tenu compte, dans sa notification de griefs, d'éléments qui, selon les parties, viendraient au soutien de leur défense. Que ces dernières ont été mises en mesure d'en faire état dans la discussion sur le bien-fondé des griefs et de répondre aux accusations qui étaient portées contre elles en présentant toutes les observations et toutes les pièces qui leur apparaissaient utiles à leur défense; Que, sous couvert d'un grief non fondé de partialité fait au rapporteur, la requérante, qui prétend caractériser une telle partialité en renvoyant à ses développements sur le fond, discute, en réalité, la pertinence du raisonnement suivi par l'Autorité pour décider que les pratiques dénoncées étaient caractérisées et lui étaient imputables, ce qui constitue précisément le fond du débat »352.
331.-De surcroît, la cour d’appel de Paris a rappelé à plusieurs reprises que dès lors que les entreprises mises en cause ont pu exercer toutes les prérogatives qui leur sont reconnues dans le cadre de la procédure contradictoire, « il ne peut être reproché aux rapporteurs d'avoir retenu les éléments "à charge" des entreprises et écarté les éléments que celles-ci invoquaient à leur décharge, dès lors qu'ils ont pour fonction d'instruire et de décrire dans la notification de griefs, puis dans le rapport, ce qui à leurs yeux doit conduire à la qualification et à la sanction de pratiques anticoncurrentielles, l'Autorité ayant en charge d'examiner le bien-fondé des éléments ainsi retenus. À ce titre, seule la déloyauté dans l'interprétation ou la présentation des pièces, ou encore dans la façon d'interroger les
personnes en cause ou les tiers, peut conduire à constater une atteinte aux droits de la défense des parties »353.
b)-Application au cas d’espèce
Arguments des parties
332.-Le Groupe Expleo soutient que les services d’instruction ont présenté et interprété de manière déloyale certaines pièces de la notification de griefs. Ainsi, ils n’auraient pas cherché à comprendre le contexte, les raisons et justifications des clauses de non-sollicitation ainsi que du gentlemen’s agreement entre le Groupe Expleo et Bertrandt dans le cadre de partenariats pour répondre aux besoins spécifiques de leur client commun Renault.
333.-Par ailleurs, les services d’instruction assimileraient certaines pièces du dossier qui concernent le gentlemen’s agreement à la clause de non-sollicitation insérée dans le contrat relatif au Projet [Confidentiel]. Ils auraient également reporté des citations tronquées de certains documents, dénaturant de fait leur contenu.
334.-Enfin, le Groupe Expleo soutient que les services d’instruction n’ont pas fourni d’analyse économique permettant d’évaluer les effets anticoncurrentiels des pratiques concernées354.
Réponse de l’Autorité
335.-S’agissant du caractère partial, expéditif et lacunaire allégué de l’instruction, l'ensemble des critiques formulées par le Groupe Expleo repose sur une divergence d'interprétation d'éléments de preuve ou d'analyse des données du dossier. Ces arguments, qui relèvent de l'appréciation des questions de fond, comme rappelé supra, seront ultérieurement traités (voir les paragraphes 537 à 544).
336.-En outre, comme l’a précisé la Cour de justice de l’Union européenne (ci-après « Cour de justice »), en matière d’infraction par objet, il n’est en aucune manière nécessaire d’examiner et à plus forte raison de démontrer les effets de ce comportement sur la concurrence, qu’ils soient réels ou potentiels et négatifs ou positifs355.
337.-En l’espèce, les pratiques du Groupe Expleo sanctionnées au terme de la présente décision constituent, comme il sera démontré ci-après, des restrictions de concurrence par objet. L’argument de cette dernière tendant à contester l’absence d’analyse des effets de la pratique sera donc écarté.
338.-Il résulte de ce qui précède que le principe d’impartialité n’a pas été méconnu au cours de l’instruction, contrairement à ce que prétend le Groupe Expleo.
2.2.-Sur l’absence d’audition de certains salariés
a)-Rappel des principes applicables
339.-Il ressort des dispositions du chapitre III du titre VI du livre IV du code de commerce et de la pratique décisionnelle de l’Autorité que le rapporteur procède aux auditions qu’il estime nécessaires et qu’il n’est pas obligé d’entendre les parties mises en cause lors de son instruction, dès lors que les représentants des entreprises sont en mesure de présenter des observations écrites sur la notification de griefs et de les développer oralement lors de la séance de l’Autorité356.
340.-Par ailleurs, selon une jurisprudence constante de la cour d’appel de Paris, notamment dans l’arrêt Le Goff Confort : « l'audition de personnes intéressées constitue une faculté laissée à l'appréciation du rapporteur ou du Conseil, eu égard au contenu du dossier ; Que, de surcroît, le fait que les dirigeants d'une entreprise n'aient pas été entendus au cours de l'enquête et de l'instruction est, en l'absence d'obligation légale en la matière, sans incidence sur la régularité de la procédure, dès lors qu'à compter de la notification de griefs et lors des différentes phases de la procédure, l'entreprise a été en mesure, comme cela a été le cas en l'espèce pour la requérante, de faire valoir ses observations en temps utile »357.
341.-Dans le même sens, cette même cour a récemment rappelé que « [l]e rapporteur, qui dispose d’un large pouvoir d’appréciation quant à la conduite de ses investigations, n’est pas tenu de procéder à des auditions s’il s’estime suffisamment informé pour déterminer les griefs susceptibles d’être notifiés. »358
342.-Enfin, la Cour de cassation a confirmé que le rapporteur « n’est pas tenu de procéder à des auditions s'il s'estime suffisamment informé pour déterminer les griefs susceptibles d'être notifiés » et que « l’absence d'audition des dirigeants de certaines entreprises, au stade de l’enquête et de l’instruction, est sans incidence sur la régularité de la procédure dès lors qu'à compter de la notification des griefs et lors des différentes phases de la procédure, lesdites entreprises ont été mises en mesure de faire valoir leurs droits »359.
b)-Application au cas d’espèce
Argument des parties
343.-Alten reproche aux services d’instruction de ne pas avoir procédé à l’audition d’Alten SA et notamment de M. M, son responsable du recrutement des business managers en poste pendant la période du grief notifié, alors qu’une telle audition aurait permis de comprendre le modèle de recrutement des business managers chez Alten. Selon Alten, ces irrégularités dans la conduite des auditions auraient porté atteinte au respect du principe du contradictoire.
Réponse de l’Autorité
344.-Tout d’abord, s’agissant de l’obligation d’auditionner les parties mises en cause lors de l’instruction, et comme rappelé par la jurisprudence précitée, les rapporteurs disposent d’un pouvoir d’appréciation quant à la conduite de leurs investigations. Ils sont donc libres de choisir les personnes à auditionner au sein d’une entreprise mais également les modalités de ces recueils d’informations360.
345.-Les rapporteurs ont donc pu, au cas présent, considérer que l’audition des cadres d’Alten était plus opportune qu’une audition de M. M. Ainsi, contrairement ce que prétend Alten, les rapporteurs ont recueilli à Toulouse au mois de juin 2022361 les déclarations de certains de ses cadres impliqués dans la pratique reprochée, à savoir M. R et M. 95, respectivement directeur de la stratégie commerciale pour le compte Airbus et directeur de département.
346.-Enfin, Alten décrit et défend bien dans le cadre de ses observations écrites le « modèle de recrutement des Business Managers » mis en place par Alten et M. M362. Le principe du contradictoire sur ce point a donc bien été respecté en l’espèce.
347.-Les moyens des parties seront donc écartés.
3.-SUR LES PRETENDUES IMPRECISIONS ET ABSENCE DE CLARTE DES GRIEFS
a)-Rappel des principes applicables
348.-Il résulte d’une jurisprudence constante que la notification des griefs détermine l’étendue de l’intervention de l’Autorité et permet aux entreprises d’exercer leurs droits de la défense dans le cadre du débat contradictoire, de sorte que « la notification des griefs doit informer précisément les entreprises poursuivies des pratiques reprochées »363.
349.-Ainsi, selon la jurisprudence de la cour d’appel de Paris, « [l]e respect des principes fondamentaux de la procédure, que sont le respect du contradictoire, des droits de la défense et du droit à un procès équitable, impose que les faits soient formulés de manière suffisamment précise et les pratiques incriminées étayées d'éléments de preuve suffisants pour que les parties puissent préparer utilement leur défense »364. Les juges ont encore précisé que la notification de griefs doit « contenir un exposé des griefs libellé dans des termes suffisamment clairs, fussent-ils sommaires, pour permettre aux intéressés de prendre effectivement connaissance des comportements qui leur sont reprochés »365.
350.-Pour ce faire notamment, la notification de griefs doit « informer les parties des pratiques reprochées, de leur qualification juridique au regard du droit applicable - national ou [de l’Union] - et des personnes auxquelles sont imputées ces pratiques, afin de les mettre en mesure de contester utilement, au cours de la procédure contradictoire, soit la réalité des faits, soit leur qualification, soit leur imputation »366.
351.-Comme récemment rappelé par la cour d’appel de Paris, le respect de ces exigences de clarté et de précision s’apprécie au regard non seulement de la formulation finale du grief figurant dans la conclusion, mais aussi de sa motivation présente dans le corps même de la notification de griefs367.
b)-Application au cas d’espèce
Arguments des parties
352.-Bertrandt soutient que les griefs notifiés sont confus, peu clairs et imprécis, ce qui l’empêcherait de se défendre utilement. Elle considère en particulier que la notification de griefs comporte uniquement des développements portant sur les clauses de non-sollicitation alors même que Bertrandt est mise en cause au titre de deux pratiques distinctes, l’une tenant à l’existence d’un gentlemen’s agreement sur le recrutement conclu avec le Groupe Expleo et l’autre relative aux clauses de non-sollicitation contenues dans des conventions de groupement d’entreprises et de sous-traitance.
353.-Bertrandt soutient également que les services d’instruction n’ont pas démontré l’existence et la durée du gentlemen’s agreement allégué indépendamment des clauses de non- sollicitation. Elle ajoute que le raisonnement des services d’instruction serait contradictoire en ce qu’il retient que le gentlemen’s agreement a une existence propre sur une durée comprise entre les mois de février et septembre 2018, pour ensuite affirmer qu’il a une durée identique à celle des clauses de non-sollicitation368.
Réponse de l’Autorité
354.-En l’espèce, aux termes du grief n° 2, il est reproché à Bertrandt d’avoir mis en œuvre une entente anticoncurrentielle prohibée par les articles 101, paragraphe 1, du TFUE et L. 420-1 du code de commerce, qui consiste en un accord conclu avec le Groupe Expleo visant à ne pas se faire concurrence pour le recrutement de leur personnel respectif. Cet accord est constitué, selon la notification de griefs, de deux types de pratiques distinctes : d’une part, des clauses de non-sollicitation de personnel insérées dans des contrats de partenariat et, d’autre part, un gentlemen’s agreement.
355.-Contrairement à ce que soutient Bertrandt, la notification de griefs comporte de nombreux développements consacrés à la description des pratiques en cause, en distinguant au sein de paragraphes séparés, les clauses de non-sollicitation (voir notamment les paragraphes 172 à 184 de la notification de griefs) et le gentlemen’s agreement (voir notamment les paragraphes 185 à 187 de la notification de griefs). De même, au stade de la qualification juridique des pratiques, la notification de griefs procède successivement à l’analyse des clauses de non-sollicitation et du gentlemen’s agreement (voir les paragraphes 519 à 531 de la notification de griefs).
356.-La notification de griefs est donc suffisamment motivée et étayée par les éléments du dossier pour permettre à Bertrandt de répondre précisément au grief, possibilité dont elle a au demeurant amplement usé tant dans ses observations écrites369 qu’en séance.
357.-S’agissant de l’existence même du gentlemen’s agreement et de sa durée, les arguments soulevés par Bertrandt relèvent de l'appréciation des questions de fond, respectivement traitées ci-dessous aux paragraphes 549 à 562 et 634 à 638.
358.-En conséquence, Bertrandt n’est pas fondé à soutenir que le grief notifié manquerait de clarté et ne lui aurait pas permis de se défendre utilement.
4.-SUR LES CONSEQUENCES DE LA DECISION DE DISJONCTION DE L’INSTRUCTION
a)-Rappel des principes applicables
359.-Aux termes de l’article R. 463-3 du code de commerce, « [l]e rapporteur général ou un rapporteur général adjoint peut, à son initiative ou à la demande des parties ou du commissaire du Gouvernement, procéder à la disjonction de l’instruction d’une saisine en plusieurs affaires ».
360.-Selon une jurisprudence constante de la cour d’appel de Paris, les décisions prises sur le fondement de l’article R. 463-3 du code de commerce telles que les décisions de jonction370 ou de disjonction371 n’ont pas à être motivées et sont insusceptibles de recours. À cet égard, la cour d’appel souligne qu’une décision de disjonction « constitue une mesure d’administration sans incidence sur la nature des faits dénoncés »372.
b)-Application au cas d’espèce
Arguments des parties
361.-Le Groupe Expleo soutient que la décision de disjonction de l’instruction prise par la rapporteure générale adjointe sur le fondement de l’article R. 463-3 du code de commerce, procède d’une violation manifeste des droits de la défense.
362.-Sur le fond, le Groupe Expleo considère que les clauses de non-sollicitation et le gentlemen’s agreement devraient être analysés comme étant l’accessoire nécessaire de partenariats légitimes avec Bertrandt pour leur client commun Renault. Or, avec l’adoption de la décision de disjonction, les services d’instruction auraient retiré arbitrairement du débat l’examen de la légalité des contrats principaux et du caractère accessoire des clauses de non-sollicitation.
363.-Sur le montant d’une éventuelle sanction, le Groupe Expleo soutient qu’une éventuelle notification des griefs ultérieure conduirait les services d'instruction, pour le calcul du montant de la sanction, à se fonder sur les mêmes montants que ceux pris en compte dans la présente affaire. Il en résulterait, en cas de condamnation, un risque de se voir infliger plusieurs sanctions fondées sur le même montant de la valeur des ventes, ce qui démultiplierait le montant total de la sanction pour des pratiques indissociables.
364.-Pour l’ensemble de ces raisons, le Groupe Expleo demande à ce que les projets avec Bertrandt pour leur client Renault, ayant servi de base aux clauses de non-sollicitation et au gentlemen’s agreement, soient réputés licites373.
Réponse de l’Autorité
365.-En premier lieu, le Groupe Expleo ne démontre pas concrètement en quoi la décision de disjonction litigieuse aurait eu pour conséquence de la priver arbitrairement de la possibilité de soutenir la licéité et la validité des clauses de non-sollicitation, ainsi que du gentlemen’s agreement en tant qu’accessoires aux contrats principaux et/ou projets de partenariat avec Bertrandt. Le Groupe Expleo a au demeurant développé de nombreux arguments à ce sujet auxquels l’Autorité répond au titre des questions de fond traitées aux paragraphes 563 à 565 et 567 à 633.
366.-Le Groupe Expleo ne saurait en conséquence utilement prétendre que la décision de disjonction intervenue le 15 juin 2023 préjudicierait à ses droits de la défense alors même qu’elle a pu s’expliquer tout au long de la procédure sur les faits qui lui étaient reprochés.
367.-En second lieu, l’argument du Groupe Expleo tendant à soutenir que la décision de disjonction augmenterait artificiellement le montant total d’éventuelles sanctions pécuniaires, revient à invoquer une violation du principe non bis in idem.
368.-D’application générale en matière de sanctions, le principe non bis in idem est consacré notamment par l’article 4 du protocole n° 7 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (ci-après « CSEDH »), et reconnu au niveau de l’Union en tant que principe général du droit au rang de droit fondamental de l’Union, conformément à l’article 50 de la Charte des droits fondamentaux.
369.-Selon la jurisprudence des juridictions de l’Union, l’application du principe non bis in idem requiert l’existence d’une décision préalable statuant sur un comportement, non susceptible de recours, et est soumise à une triple condition d’identité des faits, d’unité de contrevenant et d’unité de l’intérêt juridique protégé374. Ces principes ont été constamment repris par la jurisprudence française375.
370.-Or en l’espèce, le Groupe Expleo ne ne fait, à ce stade, l’objet d’aucune décision dans le cadre du dossier disjoint, qui concerne de surcroît des pratiques distinctes. La prétendue violation du principe non bis in idem ne peut donc être alléguée.
371.-Il résulte de l’ensemble de ces développements que les arguments du Groupe Expleo relatifs à la décision de disjonction du 15 juin 2023 seront écartés.
B.-SUR L’APPLICABILITÉ DU DROIT DE L’UNION
372.-Selon la jurisprudence de la Cour de justice et la communication de la Commission européenne (ci-après « Commission ») portant lignes directrices relatives à la notion d’affectation du commerce figurant aux articles 101 et 102 du TFUE376, trois éléments doivent être réunis pour que des pratiques soient susceptibles d’affecter sensiblement le commerce entre États membres de l’Union : (i) l’existence d’un courant d’échanges entre États membres portant sur les produits en cause, (ii) l’existence de pratiques susceptibles d’affecter ces échanges et, enfin, (iii) le caractère sensible de cette affectation377.
373.-La circonstance que des ententes ou abus de position dominante ne soient commis que sur le territoire d’un seul État membre ne fait pas obstacle à ce que les deux premières conditions soient remplies378. À cet égard, la Cour de cassation a jugé, dans un arrêt du 31 janvier 2012, que les termes « susceptibles d’affecter » énoncés par les articles 101 et 102 du TFUE
« supposent que l’accord ou la pratique abusive en cause permette, sur la base d’un ensemble d’éléments objectifs de droit ou de fait, d’envisager avec un degré de probabilité suffisant qu’il puisse exercer une influence directe ou indirecte, actuelle ou potentielle, sur les courants d’échanges entre États membres, sans que soit exigée la constatation d’un effet réalisé sur le commerce intracommunautaire »379.
374.-S’agissant du troisième élément, la Cour de cassation a jugé, dans ce même arrêt que « le caractère sensible de l’affectation directe ou indirecte, potentielle ou actuelle, du commerce intracommunautaire résulte d’un ensemble de critères, parmi lesquels la nature des pratiques, la nature des produits concernés et la position de marché des entreprises en cause »380.
375.-Le paragraphe 52 des lignes directrices précitées se réfère à deux seuils cumulatifs en deçà desquels un accord est présumé, du point de vue de la Commission, ne pas affecter sensiblement le commerce entre États membres :
-la part de marché totale des parties sur le marché intérieur de l’Union affecté par l’accord n’excède pas 5 % ;
dans le cas d’accords horizontaux, le chiffre d’affaires annuel moyen réalisé dans l’Union par les entreprises en cause avec les produits concernés par l’accord n’excède pas 40 millions d’euros.
376.-En l’espèce, les pratiques concernées sont des accords horizontaux de non-débauchage de personnel, de dimension nationale, mis en œuvre dans les secteurs de l’ingénierie et du conseil en technologie ainsi que des services informatiques. Ces accords ont été conclus par des entreprises implantées sur tout le territoire national et ne contiennent par ailleurs aucune limitation géographique s’agissant de l’origine des ressources humaines concernées. De plus, ces accords intéressent des projets réalisés pour le compte de clients finaux d’envergure internationale et concernent les possibilités d’emploi de travailleurs qualifiés susceptibles d’être particulièrement mobiles à l’international.
377.-Les pratiques sont, par ailleurs, le fait d’opérateurs d’envergure internationale qui disposent pour la plupart d’implantations dans le monde entier et réalisent des chiffres d’affaires supérieurs à 40 millions d’euros.
378.-Il résulte de ce qui précède que les pratiques analysées sont susceptibles d’avoir affecté sensiblement le commerce entre États membres. Elles doivent, en conséquence, être examinées tant au regard des dispositions du droit national, notamment de l’article L. 420-1 du code de commerce, qu’au regard du droit de l’Union, et notamment de l’article 101 du TFUE. Ce point n’est pas contesté par les entreprises mises en cause.
C.-SUR LE MARCHÉ PERTINENT
1.-LES PRINCIPES APPLICABLES
379.-Afin de définir le marché de produits ou de services, il convient de rechercher si les produits ou les services en cause sont considérés par les acheteurs « comme interchangeables ou substituables en raison de leurs caractéristiques, de leur prix et de leur usage »381.
380.-Dans le même sens, la Commission a rappelé, dans sa communication du 22 février 2024 sur la définition du marché en cause382, que le marché de produits « comprend tous les produits que les clients considèrent comme interchangeables ou substituables à celui ou ceux de la ou des entreprises concernées, en raison de leurs caractéristiques, de leur prix et de l’usage auquel ils sont destinés, compte tenu des conditions de concurrence et de la structure de la demande et de l’offre sur le marché »383.
381.-Le marché géographique, quant à lui, comprend « le territoire sur lequel les entreprises concernées offrent ou demandent des produits en cause, sur lequel les conditions de concurrence sont suffisamment homogènes pour que les effets du comportement ou de la concentration faisant l’objet de l’enquête puissent être appréciés et qui peut être distingué des autres territoires en particulier en raison des conditions de concurrence sensiblement différentes de celles prévalant sur ces territoires »384.
382.-Il ressort de la jurisprudence que l’obligation d’opérer une délimitation du marché en cause dans une décision adoptée en application de l’article 101 du TFUE s’impose uniquement lorsque, sans une telle délimitation, il n’est pas possible de déterminer si l’accord, la décision d’association d’entreprises ou la pratique concertée en cause est susceptible d’affecter le commerce entre les États membres et a pour objet ou pour effet d’empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence à l’intérieur du marché commun385.
383.-De même, en droit interne, lorsque les pratiques en cause sont examinées au titre de la prohibition des ententes, comme c’est le cas en l’espèce, il n’est pas nécessaire de définir les marchés avec précision dès lors que les secteurs ont été suffisamment identifiés pour qualifier les pratiques observées et permettre de les imputer aux opérateurs qui les ont mises en œuvre386.
2.-APPLICATION AU CAS D’ESPECE
384.-Les services d’instruction ont retenu, dans la notification de griefs, que les pratiques en cause avaient été mises en œuvre sur les marchés aval de l’ingénierie et du conseil en technologie, d’une part, et sur le marché des services informatiques, d’autre part, ainsi que sur le marché amont du recrutement des ressources humaines en vue de la fourniture de ces services.
385.-En ce qui concerne les marchés aval de l’ingénierie et du conseil en technologie ainsi que des services informatiques, la notification de griefs rappelle que la pratique décisionnelle, y compris la plus récente387, retient que les secteurs en cause constituent deux marchés distincts.
386.-Certaines mises en causes contestent cette délimitation de marché. Le Groupe Expleo soutient ainsi que les marchés aval des services d’ingénierie et de conseil en technologies et des services informatiques convergent pour ne former qu’un seul marché388. Elle ajoute que ce marché ne peut être segmenté par secteur d’intervention dans la mesure où une majorité des acteurs du marché seraient actifs sur un ensemble de secteurs distincts389.
387.-S’agissant du marché amont du recrutement des ressources humaines, les services d’instruction ont retenu un marché unique pour la fourniture de services d’ingénierie et du conseil en technologie et pour les services informatiques.
388.-La notification de griefs souligne à cet égard l’importance du capital humain en tant que paramètre de concurrence pour les prestations fournies par les sociétés de conseil390, en particulier le savoir-faire des équipes, ainsi que la qualité des « ressources » et
« consultants »391.
389.-Si les services d’instruction envisagent à ce titre différentes sous-segmentations possibles, ils estiment cependant qu’il n’est pas nécessaire de procéder à une définition plus fine des marchés en cause.
390.-Certaines parties contestent la définition du marché telle que retenue par les services d’instruction.
391.-Selon le Groupe Expleo, tant la dimension matérielle que géographique du marché amont des ressources humaines est plus large que celle appréhendée par les services d’instruction, dans la mesure où les entreprises opérant dans ces secteurs ne seraient pas les seules entreprises à rechercher les compétences et expertises des profils de consultants qui opèrent chez le Groupe Expleo392. En outre, les entreprises susceptibles d’embaucher des collaborateurs ne seraient pas seulement localisées en France, mais également à l’étranger.
392.-Alten partage l’analyse du Groupe Expleo en énonçant que les business managers sont recrutés parmi l’ensemble des ingénieurs en France, quel que soit le secteur393.
393.-Comme cela est exposé ci-après, ces critiques n’emportant, d’une part, aucune conséquence sur la qualification des pratiques, et la définition des marchés étant, d’autre part, suffisamment précise pour qualifier les pratiques en cause et permettre de les imputer aux opérateurs qui les ont mises en œuvre, elles seront écartées.
a)-Le marché amont du recrutement en ressources humaines pour les services d’ingénierie et du conseil en technologie, ainsi que des services informatiques
394.-S’agissant de l’existence d’un marché du « travail », la pratique décisionnelle française394 et européenne395 retient une segmentation en fonction du niveau de qualification des personnes concernées, distinguant un marché des ouvriers et employés et un marché des cadres et des professions intermédiaires. Par ailleurs, une sous-segmentation en fonction du secteur d’activité a été envisagée. Ainsi, pour les cadres et professions intermédiaires, une segmentation a été envisagée entre les secteurs suivants : technologies de l’information et de la communication, ingénierie/technique, financier/juridique, médical/scientifique396.
395.-Il convient de souligner qu’un marché pertinent tel que le marché du travail se distingue d’un marché de produits classique dans la mesure où les ressources humaines sont moins susceptibles d’être interchangeables ou substituables entre elles que les biens matériels ou de consommation courante. Les marchés du travail se caractérisent notamment par l’importance du phénomène d’appariement (matching), qui repose sur la rencontre entre les préférences des deux parties du marché (offre et demande). En effet, les employeurs recherchent des travailleurs qualifiés, mais ceux-ci doivent aussi posséder des compétences et une personnalité correspondant à leurs besoins ainsi qu’à la culture de l’entreprise. De la même manière, les employés recherchent un emploi adapté à leurs compétences et leurs ambitions professionnelles ou leurs choix de vie auprès d’un employeur proposant des conditions de travail compatibles avec leurs attentes397.
396.-Par ailleurs, au sein du marché du travail, il est possible d’envisager différentes segmentations alternatives ou complémentaires selon les secteurs d’activité, les fonctions, métiers et spécialités exercés ou recherchés parmi les ressources humaines, les étapes des processus de production industrielle concernés et les services associés, les diplômes détenus par les travailleurs, l’expérience professionnelle.
397.-Au cas d’espèce, les prestations fournies par les sociétés des secteurs concernés consistent à vendre à des clients finaux des prestations techniques directement en lien avec le savoir-faire de leurs équipes. Les sociétés actives dans les secteurs de l’ingénierie et du conseil en technologies ainsi que des services informatiques expriment une demande pour un certain type de main-d’œuvre qualifiée et spécialisée, composé essentiellement d’ingénieurs, afin de satisfaire leurs besoins en main-d’œuvre.
398.-La main-d’œuvre est composée de l’ensemble des travailleurs dont les qualifications et les compétences spécifiques sont rares et recherchées par les sociétés de conseil pour répondre aux besoins de leurs clients finaux.
399.-Tant le secteur de l’ingénierie et du conseil en technologie que celui des services informatiques se caractérisent par l’importance stratégique et la rareté des ressources humaines (voir, en ce sens, paragraphes 41 et suivants).
400.-À ce titre, les cabinets de conseil se font concurrence pour le recrutement de main-d’œuvre qualifiée et spécialisée (voir paragraphes 57 et suivants).
401.-Ces constats sont confirmés par les parties, Mme 69 (ancienne directrice de projet, Atos Integration SAS) déclarant à cet égard qu’il existe « une tension sur les ressources qui sont très rares dans la profession. C’est toujours un peu tendu, difficile de recruter »398.
402.-Par ailleurs, il a pu être constaté une tendance à la convergence entre ces deux secteurs. De nombreuses entreprises actives dans le secteur de l’ingénierie et du conseil en technologie proposent des prestations dans le secteur des services en informatiques et inversement399.
403.-S’agissant du secteur de l’ingénierie et du conseil en technologies, la nécessité de proposer des offres globales a coïncidé avec l’émergence de nouveaux enjeux technologiques (intelligence artificielle, internet des objets, etc.), laquelle a conduit les industriels à devoir faire face à des besoins plus larges d’accompagnement. À cet égard, les services d’instruction ont relevé que la Commission400 a envisagé la définition d’un marché de
« l’ingénierie digitale » (digital engineering), pouvant illustrer cette convergence.
404.-Il est ainsi possible de relever une tendance de la part de ces acteurs à la diversification de leurs offres de services, avec pour objectif de devenir des prestataires de services globaux proposant des offres intégrées, incluant à la fois des prestations d’ingénierie industrielle et la mise à disposition de solutions et outils numériques.
405.-Eu égard à ces éléments, il convient de retenir une définition du marché de service amont du recrutement des ressources humaines commun aux services d’ingénierie et de conseil en technologie, ainsi qu’aux services informatiques.
406.-S’agissant de pratiques d’ententes, cette définition est suffisamment précise pour permettre de qualifier les pratiques en cause et de les imputer aux entreprises, sans qu’il soit besoin de retenir une sous-segmentation plus précise ou a contrario, comme le soutiennent les parties, une définition de marché plus large.
407.-En ce qui concerne la dimension géographique du marché, compte tenu notamment de la portée indifférenciée sur le plan géographique des pratiques examinées, la délimitation retenue au cas d’espèce est nationale. Une dimension infranationale, en fonction par exemple du type de client, aurait pu être envisagée. Toutefois, s’agissant de pratiques d’ententes, cette définition est suffisamment précise pour permettre de qualifier les pratiques en cause et de les imputer aux entreprises, sans qu’il soit besoin de retenir une sous-segmentation plus précise ou a contrario, comme le soutiennent les parties, une définition de marché plus large.
408.-Pour les besoins de la présente décision, le marché retenu sera donc de dimension nationale.
b)-Les marchés avals de l’ingénierie et du conseil en technologie, ainsi que des services informatiques
Le marché aval de l’ingénierie et du conseil en technologie
409.-Le marché de l’ingénierie et du conseil en technologie, correspond à l’ensemble des opérations de conception et d’assistance à la réalisation d’équipements à dominante industrielle dans de nombreux domaines tels que l’industrie, l’énergie, le transport, l’environnement, le BTP et les services publics401.
410.-Les autorités de concurrence tant française402 qu’européenne403 ont envisagé plusieurs segmentations de ce marché sans trancher définitivement la question.
411.-Elles ont, ainsi, envisagé de retenir un marché plus étroit du conseil en technologies, excluant de son périmètre les entreprises d’ingénierie en BTP et les sociétés proposant uniquement des conseils en système d’information404. Elles ont également segmenté le marché en fonction des secteurs d’intervention, en distinguant les secteurs de l’aéronautique, de la défense, des télécommunications, etc. comme autant de marchés pertinents405.
412.-Pour les besoins de la présente décision, le marché retenu est celui du marché aval de l’ingénierie et du conseil en technologie.
413.-La délimitation exacte des marchés de l’ingénierie et du conseil en technologie peut toutefois être laissée ouverte dans la mesure où les conclusions de l’analyse concurrentielle demeurent inchangées quelle que soit l’hypothèse retenue.
414.-S’agissant de la dimension géographique du marché, la pratique décisionnelle a généralement considéré qu’il était de dimension nationale406. Néanmoins, elle a également envisagé que ces marchés puissent être de dimension infranationale selon le type de clientèle et les missions concernées407.
415.-En l’espèce, la dimension géographique précise des marchés de l’ingénierie et du conseil en technologie peut être laissée ouverte, les conclusions de l’analyse concurrentielle demeurant inchangées quelles que soient les segmentations retenues.
Le marché aval des services informatiques
416.-Les pratiques décisionnelles française408 et européenne409 ont identifié, au sein du marché des services informatiques, sept catégories fonctionnelles de services410. L’Autorité a également déjà envisagé différentes segmentations alternatives selon le type de clientèle, les types de système d’information et de communication et le secteur d’activité411.
417.-Pour les besoins de la présente décision, le marché retenu est celui des services informatiques, sans qu’il soit nécessaire de se prononcer sur une délimitation plus fine de ce marché.
418.-S’agissant de la dimension géographique, les autorités de concurrence ont, à plusieurs reprises, retenue que les marchés des services informatiques étaient de dimension nationale.
419.-La dimension géographique retenue dans la présente décision est nationale.
D.-SUR LE BIEN-FONDÉ DES GRIEFS
1.-LES PRINCIPES APPLICABLES
a)-Sur l’accord de volontés
420.-L’article 101, paragraphe 1, du TFUE interdit comme étant incompatibles avec le marché intérieur tous accords entre entreprises, toutes décisions d’associations d’entreprises et toutes pratiques concertées susceptibles d’affecter le commerce entre États membres et qui ont pour objet ou pour effet d’empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence à l’intérieur du marché intérieur.
421.-L’article L. 420-1 du code de commerce prohibe les actions concertées, conventions, ententes expresses ou tacites entre les entreprises lorsqu’elles ont pour objet ou peuvent avoir pour effet d’empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence sur un marché.
422.-L’existence d’un accord est établie dès lors que les entreprises ont exprimé leur volonté commune de se comporter sur le marché d’une manière déterminée412.
423.-La jurisprudence européenne et nationale a admis une grande liberté des autorités de concurrence dans le choix des formules retenues pour qualifier une entente.
424.-Ainsi, dans son arrêt Asnef-Equifax du 23 novembre 2006, la Cour de justice a rappelé que si l’article 101, paragraphe 1, du TFUE « distingue la notion de « pratique concertée » de celle d’« accords entre entreprises » ou de « décisions d’associations d’entreprises », c’est dans le dessein d’appréhender, sous les interdictions de cette disposition, différentes formes de coordination et de collusion entre entreprises »413.
425.-De même, en droit national, la cour d’appel de Paris a admis que, pour qualifier les pratiques, les autorités de concurrence peuvent se référer aux différentes notions d’accords et de pratiques concertées414.
426.-S’agissant du standard de preuve général applicable en matière d’ententes horizontales, il ressort de la jurisprudence de la Cour de justice que « [l]’interdiction de participer à des pratiques et à des accords anticoncurrentiels ainsi que les sanctions que les contrevenants peuvent encourir étant notoires, il est usuel que les activités que ces pratiques et ces accords comportent se déroulent de manière clandestine, que les réunions se tiennent secrètement, le plus souvent dans un pays tiers, et que la documentation y afférente soit réduite au minimum. Même si la Commission découvre des pièces attestant de manière explicite une prise de contact illégitime entre des opérateurs, telles que les comptes rendus d’une réunion, celles-ci ne seront normalement que fragmentaires et éparses, de sorte qu’il se révèle souvent nécessaire de reconstituer certains détails par des déductions. Dans la plupart des cas, l’existence d’une pratique ou d’un accord anticoncurrentiel doit être inférée d’un certain nombre de coïncidences et d’indices qui, considérés ensemble, peuvent constituer, en l’absence d’une autre explication cohérente, la preuve d’une violation des règles de la concurrence »415.
427.-Par ailleurs, si les autorités de concurrence doivent faire état de preuves précises et concordantes pour établir l’existence d’une infraction, chacune des preuves ne doit pas nécessairement répondre à ces critères par rapport à chaque élément de l’infraction. En effet, les indices ne doivent pas être appréciés isolément, mais dans leur ensemble416.
428.-Il convient également de relever que rien n’interdit aux autorités de concurrence de se fonder sur une seule pièce et non sur un faisceau d’indices dès lors que la valeur probante de cette pièce n’est pas douteuse, et que cette dernière atteste de manière certaine de l’existence de l’infraction417.
429.-La preuve des accords et pratiques concertées peut donc résulter soit de preuves se suffisant à elles-mêmes, soit d’un faisceau d’indices constitué par le rapprochement de divers éléments recueillis en cours d’instruction, qui peuvent être tirés d’un ou plusieurs documents ou déclarations et qui, pris isolément, peuvent ne pas avoir un caractère probant418. Les juridictions nationales ont confirmé la valeur probatoire d’un faisceau d’indices graves, précis et concordants419.
430.-S’agissant du standard de preuve applicable aux éléments documentaires, la cour d’appel de Paris a indiqué, à plusieurs reprises, et notamment dans l’arrêt Beauté Prestige International du 26 janvier 2012 : « quant à la valeur probante des différents éléments de preuve, le seul critère pertinent pour apprécier les preuves produites réside dans leur crédibilité ; que selon les règles générales en matière de preuve, la crédibilité et partant la valeur probante d’un document dépend de son origine, des circonstances de son élaboration, de son destinataire et de son contenu ». À cet égard, une grande importance doit être apportée à la circonstance qu’un document a été établi en liaison immédiate avec les faits ou par un témoin direct de ces faits420. Il en est de même pour les documents qui ont été établis sans qu’il puisse être pensé qu’ils seraient ultérieurement portés à la connaissance de tiers421.
431.-S’agissant ensuite du standard de preuve applicable aux déclarations, il ressort de la jurisprudence de l’Union qu’aucune « disposition ni aucun principe général du droit [de l’Union] n’interdit à la Commission de se prévaloir, à l’encontre d’une entreprise, des déclarations d’autres entreprises incriminées. Si tel n’était pas le cas, la charge de la preuve de comportements contraires aux articles [101 TFUE et 102 TFUE], qui incombe à la Commission, serait insoutenable et incompatible avec la mission de surveillance de la bonne application de ces dispositions qui lui est attribuée par le [TFUE] »422.
432.-Dans un arrêt du 12 juillet 2011, le Tribunal de l’Union européenne (ci-après le « Tribunal ») a relevé qu’une « valeur probante particulièrement élevée peut par ailleurs être reconnue [aux déclarations] qui, premièrement, sont fiables, deuxièmement, sont faites au nom d’une entreprise, troisièmement, proviennent d’une personne tenue de l’obligation professionnelle d’agir dans l’intérêt de cette entreprise, quatrièmement, vont à l’encontre des intérêts du déclarant, cinquièmement, proviennent d’un témoin direct des circonstances qu’elles rapportent et, sixièmement, ont été fournies par écrit, de manière délibérée et après mûre réflexion »423.
433.-Quant au statut des déclarations du demandeur de clémence, le même arrêt du Tribunal a confirmé leur valeur probante particulière : « bien qu’une certaine méfiance à l’égard de dépositions volontaires des principaux participants à une entente illicite soit généralement de mise, étant donné la possibilité, invoquée par les requérantes, que ces participants aient tendance à minimiser l’importance de leur contribution à l’infraction et de maximiser celle des autres, il n’en reste pas moins que le fait de demander à bénéficier de l’application de la communication sur la coopération en vue d’obtenir une immunité ou une réduction de l’amende ne crée pas nécessairement une incitation à présenter des éléments de preuve déformés en ce qui concerne la participation des autres membres de l’entente. En effet, toute tentative d’induire la Commission en erreur pourrait remettre en cause la sincérité ainsi que la complétude de la coopération du demandeur et, partant, mettre en danger la possibilité pour celui-ci de tirer pleinement bénéfice de la communication sur la coopération »424.
La cour d’appel de Paris a déjà eu l’occasion d’admettre que les déclarations d’un demandeur de clémence sont des moyens de preuve pertinents, pouvant être pris en compte au titre du faisceau d’indices précis, graves et concordants fondant un constat d’infraction425. Dans un arrêt du 6 octobre 2022, elle a également précisé que « les seules déclarations du demandeur de clémence ne peuvent à elles seules établir l'existence de pratiques anticoncurrentielles et doivent être corroborées par d'autres indices. Toutefois, lorsque ces déclarations sont cohérentes, précises et circonstanciées, elles constituent un indice particulièrement fiable de sorte que le degré de corroboration requis est moindre, aussi bien en terme de précision qu'en terme d'intensité, qu'il ne le serait ci ces dernières n'étaient pas particulièrement fiables »426.
b)-Sur les restrictions accessoires
435.-La Cour de justice a admis la possibilité de voir échapper à l’interdiction des ententes prévue à l’article 101 paragraphe 1, du TFUE, des accords qui constituent des restrictions accessoires, c’est-à-dire des restrictions objectivement nécessaires et proportionnées à un comportement principal ne contrevenant pas aux règles de concurrence427. La Commission a également rappelé cette position dans ses lignes directrices relatives à la mise en œuvre de l’article 101, paragraphe 3, du TFUE428.
436.-Récemment, la Cour de justice, dans l’arrêt du 19 septembre 2024 rendu dans l’affaire Booking.com, a rappelé les principes de mise en œuvre de la théorie des restrictions accessoires : « Selon une jurisprudence constante, si une opération ou une activité déterminée ne relève pas du principe d’interdiction prévu à l’article 101, paragraphe 1, TFUE, en raison de sa neutralité ou de son effet positif sur le plan de la concurrence, une restriction de l’autonomie commerciale d’un ou de plusieurs des participants à cette opération ou à cette activité ne relève pas non plus dudit principe d’interdiction si cette restriction est objectivement nécessaire à la mise en œuvre de ladite opération ou de ladite activité et est proportionnée aux objectifs poursuivis par l’une ou l’autre. »429
437.-La Cour de justice précise ainsi que pour qu’une restriction soit qualifiée d’« accessoire » :
« (…) [i]l convient, premièrement, de rechercher si la réalisation de l’opération principale, dépourvue de caractère anticoncurrentiel, serait impossible en l’absence de la restriction en question. Le fait que cette opération soit simplement rendue plus difficilement réalisable, voire moins profitable, en l’absence de la restriction en cause ne saurait être considéré comme conférant à cette restriction le caractère « objectivement nécessaire » requis afin de pouvoir être qualifiée d’« accessoire ». En effet, une telle interprétation reviendrait à étendre cette notion à des restrictions qui ne sont pas strictement indispensables à la réalisation de l’opération principale. Un tel résultat porterait atteinte à l’effet utile de l’interdiction prévue à l’article 101, paragraphe 1, TFUE »430.
438.-La Cour de justice ajoute ensuite : « Deuxièmement, il y a lieu, le cas échéant, d’examiner la proportionnalité de la restriction en cause par rapport aux objectifs sous-tendant l’opération en question. Ainsi, afin de réfuter le caractère accessoire d’une restriction, la Commission et les autorités nationales de la concurrence peuvent rechercher s’il existe des solutions de remplacement réalistes, moins restrictives de concurrence que la restriction en cause. Ces solutions de remplacement ne sont pas limitées à la situation qui se produirait en l’absence de la restriction en question, mais peuvent également s’étendre à d’autres hypothèses contrefactuelles fondées, notamment, sur des situations réalistes qui pourraient survenir en l’absence de ladite restriction »431.
c)-Sur la notion de restriction par objet
439.-L’article 101, paragraphe 1, du TFUE prohibe les accords et pratiques concertées entre les entreprises lorsqu’elles ont pour objet ou peuvent avoir pour effet d’empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence sur un marché, notamment lorsqu’elles tendent à faire obstacle à la fixation des prix par le libre jeu du marché en favorisant artificiellement leur hausse ou leur baisse.
440.-Il résulte de cette disposition que l’objet et l’effet anticoncurrentiels d’une pratique sont des conditions alternatives pour la mise en œuvre de l’interdiction prévue par celle-ci.
441.-Dans ce cadre, la Cour de justice a précisé qu’il convenait d’examiner, en premier lieu, l’objet même de l’accord, et qu’il n’y avait lieu, dans un second temps, d’en examiner les effets que si l’analyse de l’objet de l’accord ne révélait pas un degré de nocivité suffisant à l’égard de la concurrence pour caractériser une entente prohibée432.
442.-De manière générale, l’appréciation de l’existence d’un degré suffisant de nocivité nécessite d’examiner concrètement et cumulativement la teneur et les objectifs de la disposition restrictive de concurrence, ainsi que le contexte économique et juridique dans lequel elle s’insère433.
443.-À cet égard, la Cour de justice a souligné que « certains types de coordination entre entreprises révèlent un degré suffisant de nocivité́ à l’égard de la concurrence pour qu’il puisse être considéré́ que l’examen de leurs effets n’est pas nécessaire »434.
444.-En outre, la Cour de justice relève que, « [a]insi qu’il ressort de l’article 101, paragraphe 1, sous a) et c), TFUE, qui se réfère notamment à la fixation des « prix d’achat ou de vente » et à la répartition des « marchés ou [des] sources d’approvisionnement », de tels cartels, de tels accords horizontaux et de telles décisions d’associations d’entreprises peuvent porter non seulement sur les produits ou les services commercialisés par les entreprises concernées, donc sur l’offre, mais également sur les ressources de toute nature dont ces entreprises ont besoin pour réaliser ces produits ou ces services, donc sur la demande. Le comportement collusoire desdites entreprises peut ainsi consister, par exemple, à se répartir les fournisseurs, à utiliser leur pouvoir de marché collectif pour fixer le prix auquel elles achèteront leurs intrants ou encore, comme l’a déjà relevé la Cour [de justice], à limiter ou à contrôler le paramètre essentiel de concurrence que peut constituer, dans certains secteurs ou sur certains marchés, le recrutement de travailleurs de haut niveau »435.
445.-Tel est le cas, selon la Cour de justice, « [d’]une interdiction générale, absolue et permanente du recrutement unilatéral de joueurs déjà engagés, imposée par voie de décision d’une association d’entreprises à l’ensemble des entreprises que sont les clubs de football professionnel et pesant sur l’ensemble des travailleurs que sont ces joueurs. Elles viennent ainsi figer la répartition de ces ressources entre ces clubs, sous réserve de transferts négociés entre ceux-ci. Elles constituent, à ce titre, une restriction patente de la concurrence à laquelle lesdits clubs pourraient se livrer en leur absence, aboutissant à un cloisonnement du marché au profit de l’ensemble de ces mêmes clubs »436.
446.-S’agissant du contexte économique et juridique dans lequel s’inscrit le comportement en cause, la Cour de justice a précisé qu’« il y a lieu de prendre en considération la nature des produits ou des services concernés ainsi que les conditions réelles qui caractérisent la structure et le fonctionnement du ou des secteurs ou marchés en question. En revanche, il n’est en aucune manière nécessaire d’examiner et à plus forte raison de démontrer les effets de ce comportement sur la concurrence, qu’ils soient réels ou potentiels et négatifs ou positifs »437.
447.-En ce qui concerne les objectifs poursuivis par le comportement en cause, la Cour de justice a également précisé qu’« il y a lieu de déterminer les buts objectifs que ce comportement vise à atteindre à l’égard de la concurrence. En revanche, la circonstance que les entreprises impliquées ont agi sans avoir l’intention subjective d’empêcher, de restreindre ou de fausser la concurrence et le fait qu’elles ont poursuivi certains objectifs légitimes ne sont pas déterminants aux fins de l’application de l’article 101, paragraphe 1, TFUE »438.
448.-Enfin, la Cour de justice souligne qu’il convient « en tout état de cause, [de] faire apparaître les raisons précises pour lesquelles le comportement en cause présente un degré suffisant de nocivité à l’égard de la concurrence, justifiant de considérer qu’il a pour objet d’empêcher, de restreindre ou de fausser celle-ci »439.
d)-Sur la notion de restriction de concurrence par effet
449.-S’agissant de l’appréciation des effets anticoncurrentiels, la Cour de justice estime que
« [d]ans l’hypothèse où l’analyse d’un type de coordination entre entreprises ne présenterait pas un degré suffisant de nocivité à l’égard de la concurrence, il conviendrait, en revanche, d’en examiner les effets et, pour l’interdire, d’exiger la réunion des éléments établissant que le jeu de la concurrence a été, en fait, soit empêché, soit restreint, soit faussé de façon sensible »440.
450.-La Cour de justice précise également qu’il convient, afin d’apprécier l’existence d’effets anticoncurrentiels causés par un accord entre entreprises, de comparer la situation concurrentielle résultant de cet accord et celle qui existerait en son absence441.
451.-Les juridictions nationales font référence au même standard d’analyse des effets anticoncurrentiels, ainsi que l’a récemment rappelé la cour d’appel de Paris dans un arrêt du 16 novembre 2023, dans lequel elle a indiqué que « pour apprécier si un accord doit être considéré comme prohibé en raison des altérations du jeu de la concurrence qui en sont l’effet, il convient d’examiner le jeu de la concurrence dans le cadre réel où il se produirait à défaut de l’accord litigieux »442. Dans le même arrêt, elle a également rappelé que l’analyse des effets d’un accord ne se limite pas à ses seuls effets actuels, cette appréciation devant également tenir compte de ses effets potentiels443.
e)-Sur la durée des pratiques
452.-Afin de déterminer la durée d’une infraction aux règles de la concurrence, il convient de rechercher la période qui s’est écoulée entre la date de la conclusion de l’accord anticoncurrentiel et la date à laquelle il y a été mis fin444. En l’absence d’éléments de preuve susceptibles d’établir directement la durée de cette infraction et sa continuité, l’Autorité doit se fonder, au moins, sur des éléments de preuve se rapportant à des faits suffisamment rapprochés dans le temps, de façon qu’il puisse être raisonnablement admis que cette infraction s’est poursuivie de façon ininterrompue entre deux dates précises445.
453.-En outre, s'agissant du caractère continu de l'entente, la cour d’appel de Paris446 a récemment rappelé la jurisprudence constante de l’Union447 en vertu de laquelle l'absence de preuve de l'existence d'un accord au cours de certaines périodes déterminées, ou, tout au moins, de sa mise en œuvre par une entreprise au cours d'une période donnée, ne fait pas obstacle à ce que l'infraction soit regardée comme constituée durant une période globale plus étendue que celles-ci, dès lors qu'une telle constatation repose sur des indices objectifs et concordants.
454.-L’Autorité considère que « [l]a continuité d’une pratique peut être établie notamment par l’existence d’actions manifestant son maintien, par la répétition de l’accord anticoncurrentiel ou compte tenu du fait qu’il est resté en vigueur et a conservé, de façon continue, son objet et ses effets, actuels et potentiels »448.
455.-La cour d’appel de Paris a également rappelé que, dans le cadre d'une infraction s'étendant sur plusieurs années, le fait que les manifestations de l'entente interviennent à des périodes différentes, pouvant être séparées par des laps de temps plus ou moins longs, demeure sans incidence sur l'existence de cette entente, pour autant que les différentes actions qui font partie de cette infraction poursuivent une seule finalité et s'inscrivent dans un plan d'ensemble. Dans ce cas, les éléments de preuve doivent se rapporter à des faits suffisamment rapprochés dans le temps, pour qu'il puisse être raisonnablement admis que l'infraction s'est poursuivie de façon ininterrompue entre deux dates précises449. Une infraction continue peut ainsi être caractérisée sur une période donnée sans que soit démontrée l'existence d'actes matériels tout au long de cette période. Par ailleurs, la période séparant deux manifestations d’un comportement infractionnel doit être appréciée à la lumière du fonctionnement de l’entente en question450.
456.-Enfin, les juridictions de l’Union considèrent qu’il n’est pas nécessaire que la participation des mises en cause soit étayée par des preuves documentaires directes couvrant toute la durée de l’infraction dès lors que leur participation continue ressort de l’examen global de l’ensemble des éléments de preuve produits par la Commission pour toute la période considérée451.
2.-APPLICATION AU CAS D’ESPECE
a)-Sur le grief n° 1
457.-Seront successivement étudiés la question de la prescription quinquennale soulevée par Alten, l’accord de volontés et le caractère anticoncurrentiel de la pratique.
La prescription
Arguments d’Alten
458.-Alten soutient que la prescription serait acquise pour les faits antérieurs au 5 avril 2013, dès lors qu’ils se seraient matérialisés plus de cinq ans avant le premier document de clémence dénonçant les pratiques en cause, à savoir un procès-verbal du 5 avril 2018452.
459.-En effet, d’une part, il n’existerait aucun élément probant susceptible de caractériser la pratique pour la période postérieure au 5 avril 2013453 et, d’autre part, les éléments du dossier n’établiraient pas la continuité de la pratique454.
Réponse de l’Autorité
460.-L’article L. 462-7 du code de commerce dispose que « [l]’Autorité ne peut être saisie de faits remontant à plus de cinq ans s’il n'a été fait aucun acte tendant à leur recherche, leur constatation ou leur sanction » et précise que les actes interruptifs de prescription sont les
« actes interruptifs de la prescription de l'action publique exercée en application du premier alinéa de l'article L. 420-6 » et « [t]out acte tendant à la recherche, à la constatation ou à la sanction de pratiques anticoncurrentielles par l'Autorité de la concurrence, une autorité nationale de concurrence d'un autre Etat membre de l'Union européenne ou la Commission européenne ».
461.-Concernant le point de départ de cette prescription, il est de jurisprudence constante qu’en présence d’une infraction continue, ce point de départ est le lendemain du jour au cours duquel le comportement infractionnel a cessé455.
462.-Figurent parmi les actes interruptifs de prescription, selon la jurisprudence et la pratique décisionnelle, l’ensemble des actes réalisés par les rapporteurs456, sans qu’il y ait lieu de
distinguer si ces actes s’inscrivent dans le cadre d’une enquête ou d’une saisine d’office de l’Autorité457.
463.-C’est à l’aune de ces principes, ainsi que de ceux rappelés aux paragraphes 452 à 456, qu’il y a lieu d’apprécier si la prescription est acquise.
464.-En l’espèce, s’agissant en premier lieu de la date de fin de la pratique, l’Autorité relève que les sociétés demandeuses de clémence ont déclaré que l’accord litigieux avait perduré au moins jusqu’en 2016.
465.-Ces déclarations sont corroborées par plusieurs pièces au dossier qui attestent de l’existence des pratiques postérieurement au 5 avril 2013, ainsi que cela ressort des constatations opérées aux paragraphes 115 à 125.
466.-Au mois de mai 2013, des échanges intervenus entre Ausy/Randstad et Alten témoignent en effet de ce que ces deux entreprises se contactaient régulièrement en cas de non-respect des termes de l’entente. À la suite d’une tentative d’embauche par Alten d’un manager d’Ausy/Randstad, un courriel du 2 mai 2013 fait ainsi état d’une conversation téléphonique intervenue entre des interlocuteurs des deux entreprises, au cours de laquelle il a été rappelé qu’aucune « approche de nos managers respectifs » ne doit avoir lieu. L’accord en question y est qualifié par Ausy/Randstad de « deal » entre les deux entreprises, la tentative d’embauche par Alten d’un de leurs managers n’étant qu’« un cas isolé » de déviance de l’entente458. Le 5 mai 2013, ce courriel est, par ailleurs, transféré par M. E (Directeur général, Ausy SAS) à M. I (PDG, Alten SA) pour information459.
467.-La notification de griefs fait également état de plusieurs éléments de preuve des pratiques durant l’année 2016.
468.-Tout d’abord, dans une note au sujet du recrutement de M. Y, alors directeur des opérations chez Ausy/Randstad, du 22 mars 2016, Mme W, prestataire indépendante de recrutement, s’interroge sur l’accord entre les parties, qu’elle qualifie de « pacte de non-agression »460.
469.-Ensuite, à propos du recrutement de M. V, également directeur chez Ausy/Randstad,
M. D (DG Adjoint du groupe et DG France de Ausy) se plaint, dans un courriel du 26 septembre 2016 adressé à M. Q (DG Délégué chez Alten), du non-respect des « accords de non-agression que nous avons passé depuis des années avec I », ajoutant même : « [n]ous nous sommes toujours tenus à cet accord »461.
470.-Enfin, bien que la réponse d’Alten à Ausy/Randstad ne figure pas au dossier, il ressort des constatations opérées au paragraphe 123 que ce courriel a été transféré, le même jour, à
M. I et M. M par M. Q, ce dernier précisant que selon lui, le rachat d’Ausy/Randstad par Randstad « annule de fait tout agrément particulier avec Ausy »462, confirmant ainsi le maintien de l’accord litigieux, au moins jusqu’à ce rachat qui s’est finalisé en janvier 2017.
471.-Il découle de l’ensemble de ces éléments que la pratique a perduré au moins jusqu’au 26 septembre 2016. Contrairement à ce que soutient Alten, il ne saurait donc être considéré qu’aucune preuve n’attesterait de l’existence de la pratique postérieurement au 5 avril 2013.
472.-En second lieu, concernant la continuité de l’infraction, Alten soutient que la notification de griefs ne ferait état que de trois courriels, postérieurement au 5 avril 2013, lesquels ne seraient pas suffisamment rapprochés dans le temps pour caractériser la continuité de la pratique. En particulier, les services d’instruction n’apporteraient aucun élément de preuve de la pratique pour les années 2014 et 2015.
473.-Aucun de ces arguments ne saurait prospérer.
474.-L’Autorité relève, tout d’abord, qu’il ressort des déclarations des sociétés demandeuses de clémence que l’accord en cause a globalement été respecté jusqu’en 2016 et qu’il a perduré jusqu’en 2018.
475.-Il convient également de rappeler que si la jurisprudence citée aux paragraphes 452 à 456 retient que la durée séparant deux manifestations d'un comportement infractionnel constitue un critère pertinent pour établir le caractère continu d’une infraction, la question de savoir si cette période est suffisamment longue pour être considérée comme une interruption de l'infraction ne peut être abordée de manière abstraite. Il est en effet nécessaire de l'apprécier dans le cadre spécifique du fonctionnement de l'entente en cause463.
476.-Or, en l’espèce, il y a lieu de relever que l’accord litigieux consistait essentiellement en une obligation de ne pas faire mise à la charge des parties, à savoir s’abstenir mutuellement de recruter certains de leur personnel respectif, ce qui ne nécessitait donc pas, par principe, d’échanges fréquents entre les protagonistes. À cet égard, le gentlemen’s agreement étant
« purement oral »464, les preuves de l’accord se sont donc essentiellement manifestées lorsque ce dernier n’était pas respecté par les parties et que des rappels à l’ordre étaient effectués.
477.-En outre, en présence d’une demande de clémence, cohérente, précise et circonstanciée, il convient d’en tenir compte comme un élément de preuve complémentaire des autres pièces du dossier afin d’établir le caractère continu de l’infraction. Au cas d’espèce, les déclarations des sociétés demandeuses de clémence indiquent de manière suffisamment cohérente, précise et circonstanciée que l’accord en cause a été respecté au moins jusqu’en 2016. Les échanges de courriels intervenus entre 2013 et 2016, mentionnés aux paragraphes 115 à 125, corroborent ainsi ces déclarations qui constituent un élément de preuve particulièrement fiable de la continuité de la pratique entre 2013 et 2016.
478.-En conséquence, et au regard de la jurisprudence citée aux paragraphes 425 à 433, le caractère fragmentaire des pièces au dossier postérieurement au 5 avril 2013 ne s’oppose pas à ce qu’une reconstitution du déroulé des pratiques soit établie. Alten ne saurait donc contester la valeur probante des pièces au seul regard de leur nombre.
479.-Ensuite, s’il est exact que la notification de griefs ne fait état d’aucune pièce pour les années 2014 et 2015, les preuves recueillies jusqu’en 2013 ainsi qu’en 2016 démontrent que les pratiques litigieuses se sont poursuivies selon les mêmes modalités depuis 2007. Ainsi, tant avant 2013 qu’à partir de 2016, les parties font état d’un engagement réciproque de non- débauchage concernant les cadres business manager, qualifiant leur accord de « gentleman agreement pour ne pas se "chasser" mutuellement les équipes managériales »465,
« [d’]accord de non débauchage de managers »466, de « deal »467 ou encore de « pacte »468 et « accords de non-agression »469. Les échanges interviennent en outre entre les mêmes interlocuteurs d’Alten et d’Ausy/Randstad, essentiellement M. E, M. D, M. I et M. M, témoignant de ce que l’accord était géré directement au plus haut niveau de la hiérarchie au sein des deux entreprises sur l’ensemble de la période infractionnelle.
480.-Enfin, il n’existe aucune preuve ou indice que la pratique litigieuse se serait interrompue entre 2013 et 2016. Au contraire, il est établi qu’Alten, alors même qu’elle soutient s’être distanciée publiquement de l’accord litigieux, n’a tout au plus que discuté de son champ d’application pour tenter d’en limiter sa portée. Alten ne fait état d’aucun acte susceptible de démontrer qu’elle aurait pris des dispositions adéquates pour faire cesser les pratiques entre 2013 et 2016.
481.-Or, selon la jurisprudence de la Cour de justice « quand bien même la Commission admet ne pas avoir apporté de preuve de la participation active de Coppens à l’accord sur les devis de complaisance pour les années 1994 et 1995, il n’en demeure pas moins que, en prenant en compte, d’une part, l’absence d’élément indiquant que Coppens se serait, au cours de cette période, publiquement distanciée du contenu de cet accord, notamment en informant par écrit ses concurrents de sa volonté de ne plus y participer, et, d’autre part, les nombreuses preuves de la participation active de Coppens audit accord après cette période, récapitulées notamment au considérant 280 de la décision litigieuse et qui ne sont pas contestées par Coppens, la Commission était fondée à considérer que cette société pouvait être tenue pour responsable d’avoir participé audit accord de manière ininterrompue pour l’ensemble de la période allant du 13 octobre 1992 au 29 juillet 2003 »470.
482.-Il résulte de l’ensemble de ce qui précède que la circonstance qu’il n’y aurait au dossier aucune pièce entre le 5 mai 2013 et le 22 mars 2016 ne s’oppose pas à ce qu’il soit considéré que l’entente litigieuse présente un caractère continu.
483.-Il y a donc lieu de considérer que la pratique en cause s’est achevée le 26 septembre 2016. Compte tenu de son caractère continu, Alten n’est donc pas fondée à soutenir que les pratiques mises en œuvre avant le 5 avril 2013 seraient prescrites.
L’accord de volontés
Arguments d’Alten
484.-Alten conteste l’existence d’un accord de volontés et soutient que les services d’instruction ne feraient état que d’un engagement unilatéral pris par M. E et M. D, anciens dirigeants d’Alten, de ne pas inciter les business managers d’Alten à quitter cette société pour rejoindre
Ausy/Randstad. Par ailleurs, cet engagement n’aurait répondu qu’à une problématique de lutte contre la concurrence déloyale471.
485.-En outre, Alten fait valoir que les déclarations du demandeur de clémence ne seraient que des indices des pratiques, non corroborées par d’autres pièces du dossier, lesquelles démontreraient au contraire une distanciation de la part d’Alten472. Elle se prévaut également non seulement de sa politique de gestion des ressources humaines, qui privilégierait les recrutements en sortie d’école473 mais aussi de la quasi absence de recrutement, par Alten, de business managers d’Ausy, tant pendant qu’après la période de la pratique alléguée474.
Réponse de l’Autorité
486.-Les éléments du dossier attestent de l’existence d’une entente entre les sociétés Ausy et Alten ayant pris la forme d’un accord appelé gentlemen’s agreement visant à empêcher le débauchage et l’emploi réciproque de leurs commerciaux et managers (dits « business managers »)475. Cet accord est intervenu alors que M. E et M. D, anciens dirigeants d’Alten, quittaient leur entreprise pour rejoindre Ausy en prenant l’engagement de ne pas débaucher leurs anciennes équipes.
487.-La preuve de cette entente repose sur un faisceau d’indices graves, précis et concordants constitué (i) des déclarations des sociétés demandeuses de clémence, corroborées par plusieurs autres éléments du dossier, tels que des (ii) courriels internes à Ausy ou (iii) des échanges de courriels entre les deux entreprises, ainsi que (iv) des déclarations.
488.-Les éléments factuels exposés aux paragraphes 83 à 125 indiquent que l’accord litigieux prévoyait l’obligation pour chacune des parties de ne pas démarcher et/ou employer certains personnels de l’autre partie, à l’exclusion des ingénieurs consultants, non visés par l’accord. La mise en œuvre de l’accord a également impliqué des échanges d’informations entre les deux sociétés concernant la mobilité ou les projets de mobilité de leur personnel, comme en témoignent les éléments exposés aux paragraphes 102 à 125.
489.-En premier lieu, contrairement à ce que soutient Alten, les éléments du dossier attestent du caractère réciproque de l’accord.
490.-Cela ressort, d’une part, des déclarations des sociétés demandeuses de clémence mentionnées aux paragraphes 83 à 89, lesquelles indiquent que l’accord de non-débauchage a été conclu à la demande d’Alten, lors du départ de l’entreprise de M. E et M. D vers Ausy, et que sa réciprocité était une condition à l’engagement pris par les parties476.
491.-Ces déclarations sont corroborées, d’autre part, par plusieurs autres éléments du dossier, qu’il s’agisse du courriel interne à Ausy du 3 avril 2008 dans lequel M. E rappelle à ses
équipes qu’ « [i]l y a une non-agression réciproque et tacite [avec Alten] »477 ou encore de l’échange entre Alten et Ausy des 22 et 23 juillet 2009 évoquant un « gentlemen agreement pour ne pas se "chasser" mutuellement les équipes managériales »478.
492.-De même, en 2012, face à la perspective d’une embauche d’un personnel d’Ausy par Alten, un courriel d’Ausy à M. I, PDG d’Alten, évoque « l’accord de non débauchage réciproque » entre les deux acteurs en insistant sur l’intérêt qu’il y aurait à faire perdurer « cette pratique réciproque »479.
493.-Un accord de « "non-débauchage" mutuel de managers »480 entre les deux entreprises est également mentionné dans un courriel adressé à M. M (Responsable du recrutement chez Alten SA481) le 31 mai 2012 par le DRH d’Ausy.
494.-À nouveau, en 2013, ce dernier évoque le caractère réciproque de cet accord dans un courriel adressé à M. M, en précisant « qu’il était acquis entre nous que nous ne pratiquerions pas d’approche de nos managers respectifs »482.
495.-Enfin, en 2016, une chargée de recrutement d’Alten envisageant une embauche d’un candidat Ausy s’interroge sur le « pacte de non-agression Alten/ausy »483.
496.-En deuxième lieu, il ne saurait être considéré que l’accord litigieux se limitait, comme le soutient Alten, à prévenir un acte de concurrence déloyale ou une problématique de désorganisation massive des équipes, dès lors qu’il visait à empêcher tout recrutement respectif de business managers, même lorsqu’il s’agissait d’un seul collaborateur. Ainsi, sont visées dans les pièces du dossier « un Commercial »484, « quelques CVS commerciaux »485 ou « l’un de nos managers »486.
497.-S’agissant, en troisième lieu, de l’argument relatif à la distanciation d’Alten à tout engagement réciproque, il y a lieu de rappeler que la notion de distanciation publique est utilisée pour renverser la présomption d’adhésion d’une entreprise à une entente lorsque cette entreprise participe à des réunions dont l’objet est anticoncurrentiel. En dehors du cadre de réunions anticoncurrentielles, comme cela est le cas des faits de l’espèce, l’absence de distanciation publique par une entreprise ne constitue en revanche qu’un indice d’une adhésion à l’accord, ainsi qu’Alten le précise elle-même dans ses écritures487.
498.-En l’espèce, l’accord de volontés entre Ausy et Alten est établi à partir des différentes pièces du dossier rappelées aux paragraphes 486 à 488 ci-dessus. Dans ces conditions, la circonstance qu’Alten n’aurait pas respecté l’accord litigieux, à supposer qu’elle soit établie, ne peut être interprétée comme une distanciation publique, mais simplement comme une absence de mise en œuvre de l’entente.
499.-Or, selon la jurisprudence et la pratique décisionnelle de l’Autorité, la circonstance que des accords litigieux n’aient pas été mis en œuvre demeure sans incidence sur leur existence et leur qualification juridique488.
500.-En tout état de cause, la prétendue distanciation d’Alten par les actes n’est pas caractérisée en l’espèce. Ainsi, en 2009, lorsque M. E (directeur général, Ausy) a demandé à Mme H (chargée du recrutement BM, Alten SA) de ne plus contacter ses salariés au nom du
« gentleman agreement », celle-ci a acquiescé, sans que M. I (PDG d’Alten), en copie des échanges, conteste ce positionnement (voir le paragraphe 96). De même, les échanges entre Ausy et Alten relatifs au recrutement de M. K en 2012 ont donné lieu, non pas à une distanciation de la part d’Alten, mais à une confirmation de l’accord par les parties (voir les paragraphes 102 à 111). Par la suite, dans un courriel interne du 26 septembre 2016, M. Q (directeur général délégué, Alten SA) indique à M. I (PDG, Alten) que selon lui, le rachat d’Ausy par Randstad « annule de fait tout agrément particulier avec Ausy », confirmant ainsi le maintien de l’accord litigieux, au moins jusqu’à ce rachat (voir le paragraphe 124).
501.-Alten ne saurait donc valablement soutenir que M. M, son responsable du recrutement, a contesté l’existence de l’accord de non-débauchage en s’en distanciant publiquement alors qu’il résulte des éléments du dossier que ce dernier a tout au plus discuté de son étendue, laissant entendre que les situations de candidature spontanée, c’est-à-dire « si le manager est en recherche active »489 en seraient exclues (voir le paragraphe 109).
502.-Par conséquent, dans ce contexte, un faisceau d’indices graves, précis et concordants atteste de l’existence de l’accord de volontés entre Ausy et Alten.
Le caractère anticoncurrentiel des pratiques
Arguments d’Alten
503.-Alten soutient que la notion de restriction de concurrence par objet est d’interprétation restrictive et réservée à des pratiques pour lesquelles une pratique décisionnelle antérieure ou une théorie économique établissent leur degré de nocivité490. Or, il n’existerait, aucun précédent aux termes duquel un accord de non-sollicitation entre des entreprises ayant des parts de marché faibles (inférieures ou proches de 10 %) aurait été considéré comme restrictif de concurrence par objet.
504.-Alten fait également valoir que l’absence de nocivité de la pratique reprochée ressort de son contexte économique. À cet égard, sur la base d’éléments chiffrés concernant ses ressources humaines, elle soutient que la pratique n’a concerné qu’une infime partie de ses recrutements globaux et une part très limitée de ses salariés business managers 491. Au surplus, la pratique alléguée n’aurait concerné que deux acteurs qui ne sont pas proches concurrents pour le recrutement des business managers492.
Réponse de l’Autorité
505.-Conformément aux principes rappelés aux paragraphes 439 à 456, afin d’apprécier si un accord entre entreprises présente un degré suffisant de nocivité à l’égard de la concurrence pour être considéré comme une restriction de concurrence par objet, au sens de l’article 101, paragraphe 1, du TFUE, il convient de s’attacher à la teneur de ses dispositions, aux objectifs qu’il vise à atteindre ainsi qu’au contexte économique et juridique dans lequel il s’insère. Dans le cadre de l’appréciation dudit contexte, il y a également lieu de prendre en considération la nature des biens ou des services affectés, ainsi que les conditions réelles du fonctionnement et de la structure du ou des marchés en question.
506.-S’agissant, en premier lieu, de la teneur et des objectifs de l’accord, il y a lieu de considérer, à l’instar de la notification de griefs, que l’accord entre Ausy/Randstad et Alten a eu pour objet de limiter la liberté commerciale de chacun de ses membres en matière d’embauche de personnel, les parties ayant renoncé à se faire concurrence sur l’un des paramètres parmi les plus stratégiques de leur activité, à savoir les ressources humaines.
507.-Si l’accord se limite à une catégorie particulière de personnel, à savoir, les business managers, et exclut les consultants de son champ d’application, Alten ne peut pour autant valablement contester l’existence d’un paramètre de concurrence affecté en soutenant que cette catégorie de personnel ne représente qu’une part minime de l’effectif de l’entreprise et ne joue pas de rôle stratégique493.
508.-Il ressort en effet des éléments exposés aux paragraphes 41 à 45 que les ressources humaines, toutes catégories confondues, sont déterminantes dans l’activité des acteurs présents dans les secteurs en cause. S’agissant des business managers en particulier, il sera relevé, comme le soutient Alten, qu’ils assurent à la fois des fonctions d’animation commerciale et d’encadrement des équipes d’ingénieurs. Chargés du bon déroulement des projets dont ils sont responsables, ils constituent ainsi une catégorie de personnel de premier plan, et sont indispensables au bon fonctionnement de leur entreprise. Un accord de non-débauchage concernant précisément les business managers apparaît donc particulièrement stratégique.
509.-Les éléments du dossier témoignent en effet de ce qu’Ausy/Randstad et Alten rivalisent entre elles pour embaucher des cadres business managers, comme exposé aux paragraphes 90 à
125. Il sera d’ailleurs relevé qu’Alten fait état, dans ses observations, d’un épisode de débauchage de cette catégorie d’employés par l’un de ses concurrents, accompagné de mouvements de personnel ayant entrainé désorganisation et diminution de sa productivité494.
510.-En outre, le champ d’application de cet accord n’est pas limité dans sa durée et s’applique à tous les business managers, indépendamment de la mission à laquelle ils sont affectés et du client pour lequel ils interviennent. Dans ce contexte, l’accord litigieux vise bien à s’entendre sur un paramètre de concurrence entre les entreprises, au détriment de leur personnel.
511.-Si Alten s’efforce de réduire la teneur et les objectifs des pratiques reprochées, en soutenant que l’accord n’est pas réciproque et se limite à ne pas débaucher massivement chez l’autre partie495, tant les déclarations du demandeur de clémence que les pièces figurant au dossier démontrent bien, comme indiqué précédemment au paragraphe 491, une réciprocité entre les parties à l’accord, ainsi qu’une portée de l’accord allant au-delà de l’abstention de débauchage massif.
512.-La teneur de l’accord est ainsi régulièrement rappelée par les parties, y compris lorsque l’initiative vient du salarié, ainsi qu’il ressort, notamment, de l’échange de 2007 entre Mme F et M. E, dans lequel ce dernier exprime sa réticence à l’engagement d’un salarié d’Alten à la suite d’une candidature spontanée. M. E lui répond « non », qu’il ne « préfère pas »496 (voir le paragraphe 92).
513.-L’accord entre Ausy/Randstad et Alten consiste donc bien à s’accorder pour renoncer à recruter leur personnel respectif, que ce soit sur sollicitation de l’entreprise ou à la suite d’une candidature spontanée, en se concertant lorsque des mouvements étaient en projet.
514.-Alten ne peut donc pas soutenir que les pratiques visent à lutter contre des actes de concurrence déloyale alors qu’il ressort des pièces du dossier qu’elles sont assimilables à un accord général de non-débauchage des business manager, non limité dans le temps. En tout état de cause, la poursuite d’un objectif légitime, à le supposer avéré, n’exclut pas que les pratiques puissent être considérées comme ayant un objet restrictif de la concurrence497.
515.-Ces pratiques, en tant qu’elles constituent un accord ayant pour objet la répartition de sources d’approvisionnement, figurent parmi les ententes anticoncurrentielles expressément citées par les dispositions de l’article 101, paragraphe 1, sous c), du TFUE et de l’article L. 420-1, 4° du code de commerce. Elles sont considérées, aux termes d’une jurisprudence constante, comme constituant « des violations particulièrement graves de concurrence » et ayant « un objet restrictif de la concurrence en [elles]-mêmes »498, cette analyse ayant, en outre, été confirmée par la Cour de justice précisément au sujet d’accord de non-débauchage499.
516.-Les arguments d’Alten relatifs à l’absence d’expérience sanctionnant de telles pratiques doivent donc être écartés.
517.-En tout état de cause, si l’existence d’une expérience suffisamment solide et fiable sur la nocivité de certains types d’accord est prise en compte pour apprécier leur qualification de restriction par objet500, il convient de rappeler que la Cour de justice a également précisé que le fait qu’une autorité de concurrence n’ait jamais qualifié de restriction par objet un accord similaire à celui qui fait l’objet de son analyse n’est pas de nature, en soi, à l’empêcher de
retenir une telle qualification à l’avenir501. La jurisprudence nationale se prononce dans le même sens502.
518.-En ce qui concerne, en second lieu, le contexte économique et juridique dans lequel les pratiques se sont inscrites, il y a lieu de rappeler, à titre liminaire, que la Cour de justice considère que s’agissant des accords qui ont un objet restrictif de la concurrence en eux-mêmes et relèvent d’une catégorie d’accords expressément interdite par l’article 101, paragraphe 1, du TFUE, tels que, comme indiqué précédemment, au regard de leur teneur et leur objectif, ceux mis en œuvre par Alten et Ausy/Randstad: « l’analyse du contexte économique et juridique dans lequel la pratique s’insère peut ainsi se limiter à ce qui s’avère strictement nécessaire en vue de conclure à l’existence d’une restriction de la concurrence par objet »503.
519.-En l’espèce, comme indiqué précédemment, au regard de leur teneur et leur objectif, les pratiques mises en œuvre par Alten et Ausy/Randstad relèvent de la catégorie d’accords anticoncurrentiels expressément visés par le c) de l’les articles 101, paragraphe 1, c) du TFUE et par le 4° de l’article L. 420-1, 4° du code de commerce. Dans ces conditions, ainsi que le précise la jurisprudence mentionnée au paragraphe précédent, l’analyse du contexte économique et juridique dans lequel les pratiques s’insèrent peut se limiter à ce qui s’avère strictement nécessaire en vue de conclure à l’existence d’une restriction de la concurrence par objet.
520.-La notification de griefs examine néanmoins de manière approfondie le contexte économique et juridique des pratiques en cause.
521.-Ainsi, s’agissant du contexte économique, les services d’instruction ont analysé, comme indiqué aux paragraphes 10 à 18 et 41 à 77, les secteurs concernés ainsi que leur mode de fonctionnement. Dans une partie spécialement dédiée au « [c]ontexte général des pratiques », ils ont exposé les caractéristiques des marchés du travail dans les secteurs en cause et expliqué en quoi les ressources humaines constituent un paramètre de concurrence entre les opérateurs, au regard du poids des frais de personnel dans l’ensemble de leurs dépenses, du caractère rare et disputé des ressources humaines ou des mouvements de personnel importants auxquels ils doivent faire face, y compris, comme le confirme Alten, s’agissant des business manager504.
522.-Concernant les relations entre les parties, les services d’instruction ont également relevé, comme indiqué aux paragraphes 79 et 80, qu’elles étaient en concurrence pour l’embauche et l’emploi de ressources humaines.
523.-Au titre du contexte juridique des pratiques, les services d’instruction ont fait référence aux différents moyens mis en place par les entreprises pour se prémunir contre d’importants mouvements de personnel. La notification de griefs fait également référence à la jurisprudence pertinente applicable, rappelée ci-dessus aux paragraphes 60 et suivants.
524.-L’Autorité relève ainsi que les éléments du contexte économique et juridique, loin d’exonérer les pratiques, confirment au contraire leur particulière nocivité puisque sous couvert de prévenir des pratiques de concurrence déloyale, les parties mises en cause se sont entendues pour s’interdire mutuellement de recruter ou d’embaucher une catégorie de personnel, les business managers, que ces derniers aient pris ou non l’initiative de candidater.
525.-Partant, contrairement à ce que soutient Alten, il importe peu que la pratique n’ait concerné qu’une faible proportion des recrutements chez Alten. En présence d’une infraction anticoncurrentielle par objet, le fait que l’infraction n’ait pas été mise en œuvre concrètement par les parties ou qu’elle se soit révélée inutile pour certaines n’est pas pertinent dans l’analyse505. De même, le poids des opérateurs en cause sur le marché concerné relève de l’examen des effets anticoncurrentiels de la pratique et n’entre pas dans le cadre de l’analyse de son contexte économique.
526.-Par conséquent, les pratiques litigieuses constituent des restrictions de concurrence par objet. Dès lors, il n’est pas nécessaire d’en examiner les éventuels effets anticoncurrentiels.
La durée des pratiques
527.-Si les sociétés demandeuses de clémence ont déclaré que le gentlemen’s agreement avait été conclu dès 2004 lors du départ de M. D et M. E de chez Alten vers Ausy/Randstad, le courriel du 16 novembre 2007 mentionné au paragraphe 92, dans lequel M. E exprime son refus de contacter un commercial de chez Alten permet de fixer de manière claire et non-équivoque le point de départ des pratiques au plus tard à cette date.
528.-Comme indiqué aux paragraphes 472 à 483, les éléments du dossier attestent, par ailleurs, que ces pratiques ont perduré de manière continue au moins jusqu’au 26 septembre 2016 sans qu’aucune partie prenne les dispositions adéquates pour les faire cesser. Les courriels du 26 septembre 2026 mentionnés aux paragraphes 122 à 124 constituent les dernières pièces du dossier attestant des pratiques.
529.-L’accord anticoncurrentiel entre Ausy/Randstad et Alten visé par le grief n° 1 a donc une durée comprise au minimum entre le 16 novembre 2007 et le 26 septembre 2016.
b)-Sur le grief n° 2
530.-Aux termes du grief n° 2, il est reproché à Bertrandt et au Groupe Expleo d’avoir mis en œuvre une entente anticoncurrentielle prohibée par les articles 101, paragraphe 1, du TFUE et L. 420-1 du code de commerce, qui consiste en un accord visant à ne pas se faire concurrence pour le recrutement de leur personnel respectif. Cet accord est constitué de deux types de pratiques : d’une part, des clauses de non-sollicitation de personnel insérées dans des contrats de partenariat et, d’autre part, un gentlemen’s agreement.
531.-Il convient, préalablement à l’analyse de l’accord de volontés, du caractère anticoncurrentiel des deux pratiques, ainsi que de leur durée, de répondre à l’argument des parties contestant l’existence de deux pratiques distinctes.
Sur l’existence de deux pratiques distinctes
Argument des parties
532.-Le Groupe Expleo et Bertrandt soutiennent que le « gentleman agreement » s’inscrivait dans le cadre de la négociation de leur partenariat licite relatif au projet [Confidentiel] pour le compte du client Renault.
533.-Plus précisément, selon le Groupe Expleo, la mention d’un « gentleman agreement » dans certaines pièces du dossier ferait référence à la période de « vide juridique » concernant le risque de débauchage mutuel de leur personnel pendant la phase de négociation du contrat de partenariat. Ainsi, ce que les parties qualifient dans leurs correspondances de « gentleman agreement » correspondrait, en réalité, à une « tentative d’accord » entre elles permettant de pallier l’absence de clause de non-sollicitation de personnel dans le cadre du Projet [Confidentiel] en cours de négociation506.
534.-Ce contrat, finalement conclu le 20 mars 2019, mais entrant en vigueur de manière rétroactive à compter du 1er janvier 2018507, contient une clause de non-sollicitation qui permettrait d’encadrer contractuellement ce risque de débauchage pendant la période précontractuelle508.
535.-Le « gentleman agreement » couvrirait ainsi, selon les parties, le même champ que la clause de non-sollicitation in fine conclue entre elles. Le grief reproché ne se serait donc matérialisé que sous la forme d’une seule pratique, les clauses de non-sollicitation, sans qu’il soit possible de distinguer ces dernières du « gentleman agreement ».
Réponse de l’Autorité
536.-Il ressort des éléments du dossier exposés aux paragraphes 147 à 217 que les parties se sont entendues pour empêcher leurs recrutements respectifs en vertu d’un « gentleman agreement », en dehors de tout partenariat spécifique entre le Groupe Expleo et Bertrandt, lequel n’était pas encore formalisé contractuellement durant la période infractionnelle comprise entre les mois de février et septembre 2018. L’existence de ce « gentleman agreement » ne saurait ainsi être contestée.
537.-En premier lieu, contrairement à ce qui est soutenu, il n’est pas démontré que la mention d’un « gentleman agreement » dans plusieurs éléments du dossier relèverait d’un « abus de langage » de la part d’opérationnels chargés des recrutements. Au contraire, plusieurs pièces font état précisément du fait que cet accord (i) consiste à « s’averti[r] mutuellement »509 en cas d’embauche chez l’une ou l’autre des parties, y compris en cas de candidatures spontanées, et prévoit (ii) une interdiction « d’approche directe d’un collaborateur »510, l’objectif étant de « limiter au strict incontournable »511 les mouvements de personnel entre les deux entreprises.
538.-En outre, le caractère général et non limité du « gentleman agreement » ressort de plusieurs pièces qui visent, s’agissant des personnes concernées, les « employés » ou les « fournisseurs »512, les « collaborateurs ou S/T [sous-traitants] »513 ainsi que les « effectifs en propre et les Rangs 2 et intérimaires »514. Ainsi, conformément au rappel du cadre du
« gentleman agreement » effectué en interne par Bertrand le 9 mars 2018, « [à] chaque fois que vous [les personnes en charge des recrutements] avez l’information d’une sollicitation de nos ressources », le directeur général de Bertrand devait en être informé pour qu’il puisse « stopper les actions d’agressions des opérationnels »515 (voir le paragraphe 151) et ce, indépendamment du fait que le personnel concerné ait été affecté ou non à la réalisation d’un projet dans le cadre d’un contrat ou partenariat spécifique liant les deux entreprises.
539.-En deuxième lieu, en ce qui concerne la clause de non-sollicitation insérée dans le contrat [Confidentiel], il ressort de l’analyse présentée ci-dessous aux paragraphes 593 à 601 que l’obligation de non-sollicitation qu’elle prévoit est limitée aux collaborateurs impliqués dans le projet en question, pour la seule durée du contrat et une année uniquement suivant sa cessation.
540.-Dès lors, dans la mesure où les deux pratiques, ne se rattachent pas aux mêmes éléments de fait, elles doivent être appréhendées isolément par l’Autorité.
541.-En troisième lieu, il convient de relever que l’examen des pièces fournies par Bertrandt dans ses observations n’établit pas davantage que le « gentleman agreement » serait en lien avec la clause de non-sollicitation insérée dans le contrat [Confidentiel]. En effet, dans ces pièces, à aucun moment il n’est fait référence à l’insertion d’une telle clause dans le contrat concerné. En outre, Bertrandt n’établit pas que les employés visés dans les échanges au dossier sont affectés à l’exécution de ce contrat.
542.-De l’aveu même des entreprises mises en cause, le « gentleman agreement » vise en effet à combler un « vide juridique » tenant à l’absence de clause de non-sollicitation de personnel dans le cadre du Projet [Confidentiel] en cours de négociation516, laquelle n’a été insérée dans ce contrat de sous-traitance que le 20 mars 2019. Entre les mois de février et septembre 2018, le Groupe Expleo et Bertrandt se sont donc entendues pour ne pas se faire concurrence sur le recrutement de leur personnel respectif, en dehors de tout cadre contractuel qui aurait pu strictement délimiter le champ des différents échanges entre les parties.
543.-Il convient de relever, en dernier lieu, qu’à supposer que ce « gentleman agreement » vise à couvrir la période de négociation entre le Groupe Expleo et Bertrandt en vue du Projet [Confidentiel], aucune de ces sociétés n’a pris la peine de formaliser ce cadre de négociation, ni de limiter dans son champ matériel comme temporel cet accord de non-sollicitation.
544.-Ainsi, contrairement à ce que soutiennent les mises en cause, les clauses de non-sollicitation et le « gentleman agreement » constituent bien des pratiques distinctes qu’il convient d’analyser séparément dans les développements qui suivent.
Sur l’accord de volontés
Sur les clauses de non-sollicitation de personnel
545.-Il ressort des éléments factuels exposés aux paragraphes 132 à 146 qu’entre 2011 et 2020, les sociétés le Groupe Expleo et Bertrandt ont prévu, dans certaines de leurs conventions de groupement ou de sous-traitance, des clauses de non-sollicitation de personnel.
546.-Ces clauses figurent dans des contrats qui formalisent de façon expresse l’accord de volontés entre les deux entreprises.
Sur le « gentleman agreement » portant sur les ressources humaines
-Arguments des parties
547.-Le Groupe Expleo soutient que le gentlemen’s agreement ne peut être qualifié d’entente anticoncurrentielle faute d’accord de volontés entre les parties, ou de pratique concertée, compte tenu de l’absence de consensus sur ses contours, ses règles et son contenu517. Ainsi, selon le Groupe Expleo, les éléments du dossier témoignent simplement d’une tentative d’accord en l’absence de clause de non-sollicitation de personnel dans le cadre du Projet [Confidentiel]518 en cours de négociation.
548.-Bertrandt fait également valoir que les services d’instruction ne démontrent pas la volonté des deux parties de renoncer à leur autonomie sur le marché et de coordonner leurs stratégies de recrutement. Les services d’instruction ne seraient ainsi pas parvenus à définir précisément la pratique de gentlemen’s agreement qu’ils opposent aux mises en cause519.
-Réponse de l’Autorité
549.-Les éléments du dossier attestent de l’existence d’une entente entre les sociétés Bertrandt et le Groupe Expleo ayant pris la forme d’un gentlemen’s agreement portant sur leurs ressources humaines et visant à limiter le recrutement de leur personnel respectif.
550.-Contrairement à ce qui est soutenu, il ressort des pièces du dossier que Bertrandt et le Groupe Expleo sont allées bien au-delà de la simple « tentative d’accord » et sont parvenues à un consensus sur un comportement précis à adopter quant au recrutement de leurs ressources humaines respectives.
551.-Ainsi, en premier lieu, et comme indiqué au paragraphe 149, l’existence des pratiques trouve sa première manifestation dans le courriel interne du Groupe Expleo du 6 février 2018 dans lequel M. 2 (directeur Business Unit Auto France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) rappelle à quatre de ses collègues le contenu des accords conclus avec Bertrandt. Il évoque à cet égard l’existence d’un « gentleman agreement » en vertu duquel les deux sociétés s’engagent à « gérer les recrutements en bonne intelligence », les limiter
« au strict incontournable » et à s’avertir mutuellement lorsqu’elles « déclenchent » un recrutement520.
552.-Le 9 mars 2018, l’assistante du directeur général de Bertrandt SAS procède au même rappel en interne, auprès de tous les responsables de l’entreprise, en précisant que l’accord conclu avec le Groupe Expleo, qualifié expressément de « gentlemen’s agreement », porte tant sur
« les effectifs en propre que [sur] les Rangs 2 et intérimaires ». À cette occasion, il est donné une directive claire aux équipes de prévenir le directeur général de l’entreprise en cas de sollicitation de leurs ressources par le Groupe Expleo afin qu’il puisse « stopper les actions d’agressions des opérationnels »521.
553.-Par la suite, entre les mois d’avril et septembre 2018, l’existence et le contenu de l’accord litigieux vont être réaffirmés auprès des équipes en interne par les directeurs généraux des deux entreprises, comme en attestent les éléments factuels exposés aux paragraphes 190 à 217.
554.-Ainsi, lorsque des « brèches »522 dans l’accord ont été constatées de part et d’autre, comme cela a été le cas s’agissant du recrutement de Mme 26, recrutée par le Groupe Expleo sans information préalable de Bertrandt, les deux entreprises se sont contactées afin de « repasser le message concernant le gentleman agreement avec Bertrandt » et ce, notamment, pour ne pas se livrer à une « guerre des embauches » 523.
555.-En second lieu, il convient de relever que l’accord a également été mis en œuvre, le Groupe Expleo et Bertrandt s’avertissant à plusieurs reprises en cas de projets d’embauches d’employés venant de l’une ou l’autre société, comme en témoigne la mise en place d’un
« canal d’alerte mutuel »524 entre les deux parties, évoqué dans un courriel du 4 mai 2018 (voir le paragraphe 162). Contrairement à ce que soutient le Groupe Expleo, il est indifférent, pour la qualification des pratiques, que ce courriel démontre que « l’accord ne fonctionne pas » ou que Bertrandt ait « menti » au Groupe Expleo en affirmant qu’elle avait autorisé le recrutement d’un de leur collaborateur525.
556.-De même, Bertrand n’est pas fondée à soutenir que les parties n’aurait jamais cesser de se faire concurrence pour le recrutement de collaborateurs ou que son comportement aurait été
« ambivalent »526 à l’égard du Groupe Expleo.
557.-En effet, il est de jurisprudence constante, tant nationale527 qu’européenne528, qu’un accord anticoncurrentiel ne constitue pas une tentative d’entente mais une entente anticoncurrentielle, quand bien même l’accord n’a pas été mis en place, les engagements n’ont pas été tenus ou certaines parties ont échangé des informations erronées.
558.-En tout état de cause, les pièces du dossier mentionnées aux paragraphes 155 à 171 attestent que Bertrandt a informé le Groupe Expleo des candidatures de M. 12 et M. 13 et que cette dernière a mis son veto à l’embauche de ses deux employés. Bertrandt a également appelé l’attention d’Assystem (actuellement Expleo) sur les profils de M. 28, M. 29 et M. 31 en indiquant, pour ce dernier candidat, qu’elle s’interdisait de l’embaucher, comme en attestent les éléments mentionnés au paragraphe 174. Bertrandt a également évoqué avec le Groupe Expleo une liste de salariés d’Assystem (actuellement Expleo) « sur le départ », notamment Mme 37 (voir le paragraphe 175), puis souligné qu’elle allait lui faire « une synthèse » d’une « quinzaine de profils sourcés ou reçus de salariés Assystem [actuellement Expleo]» en précisant n’avoir « pris aucun contact pour le moment » (voir le paragraphe 185).
559.-Au mois de juillet 2018, Bertrandt a de nouveau informé le Groupe Expleo de la candidature de trois collaborateurs d’Assystem [actuellement Expleo] (M. 44, M. 45 et M. 46). Bertrandt a indiqué à Assystem [azctuellement Expleo] avoir « stoppé » le processus de sélection « depuis l’identification d’appartenance à la société Assystem [actuellement Expleo]» et demandé au Groupe Expleo de bien vouloir l’informer de sa « position quant à la possibilité de pouvoir leur faire une offre ou pas »529 (voir le paragraphe 190).
560.-Quant au Groupe Expleo, il ressort des éléments du dossier mentionnés au paragraphe 181 que le 20 avril 2018, M. 2 (Directeur Business Unit Auto France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) a bloqué le processus de recrutement de M. 39 de chez Bertrandt, en rappelant par courriel à ses équipes qu’elles ne devaient pas solliciter les ressources de Bertrandt, que ce soient leurs employés ou leurs fournisseurs, en application d’un « gentleman agreement clair avec Bertrand »530. Le Groupe Expleo a également informé Bertrandt au mois de juillet 2018 au sujet de deux profils (M. 42 et M. 43, en poste chez Bertrandt) et indiqué avoir « bloqué toute démarche »531. En contrepartie, le Groupe Expleo a demandé à Bertrandt de « stopper toute démarche » envers M. 44, M. 45 et M. 46, en précisant que « l’objectif essentiel » du « gentleman agreement » entre le Groupe Expleo et Bertrandt n’est pas « d’échanger des collaborateurs » mais de « les garder dans nos entreprises respectives » (voir le paragraphe 198).
561.-Au mois de septembre 2018, le Groupe Expleo a informé Bertrandt que M. 49 avait approché le service recrutement du Groupe Expleo mais que ce dernier avait « suivi les consignes » et avait « tout stoppé ». Le Groupe Expleo a ensuite demandé à Bertrandt s’il était possible d’envisager « une levée d’écrou »532 pour ce collaborateur (voir le paragraphe 205). Le 12 septembre 2018, le Directeur général de Bertrandt lui a répondu :
« [j]e suis au regret de vous demander de vous abstenir d’embaucher ce collaborateur car vous devez certainement le savoir, il est sur un projet majeur et son profil fait partie de nos difficultés de recrutement »533 (voir le paragraphe 209). Contrairement à ce que soutient le Groupe Expleo, peu importe que Bertrandt n’ait pas initialement informé le Groupe Expleo de ce recrutement, ou que le Groupe Expleo ait finalement procédé au recrutement de M. 49. Les échanges entre les parties démontrent en effet la volonté des parties de s’informer mutuellement de leurs recrutements respectifs. Comme indiqué précédemment, il est indifférent, pour la qualification de l’accord de volonté, que l’entente se soit révélée in fine inutile.
562.-Il résulte de ce qui précède que l’existence d’un accord de volonté entre Bertrandt et le Groupe Expleo quant à un comportement à adopter sur le marché est établie. Les parties mises en cause ne sauraient donc se prévaloir de l’absence de consensus ou de règles précises entourant le gentlemen’s agreement pour contester l’accord de volontés dès lors qu’il ressort du dossier qu’il s’agissait pour les parties de s’avertir mutuellement lors d’une potentielle embauche chez l’une ou chez l’autre et, ainsi, de limiter le recrutement de leur personnel respectif.
Sur le caractère anticoncurrentiel des pratiques
563.-Le caractère anticoncurrentiel des clauses de non-sollicitation de personnel et du gentlemen’s agreement sera successivement analysé.
564.-Les services d’instruction font valoir que les clauses de non-sollicitation prévues dans les contrats de partenariat et/ou de sous-traitance conclus entre Bertrandt et le Groupe Expleo ne peuvent être considérées comme des restrictions accessoires, ce que les parties contestent dans leurs observations en réponse à la notification de griefs.
565.-Or, en l’espèce, d’une part, la disjonction de l’instruction en deux affaires distinctes (voir, sur ce point, les paragraphes 3 et 7) ne permettait pas d’analyser les contrats principaux conjointement aux clauses de non-sollicitation litigieuses, analyse qui aurait été nécessaire pour considérer ces clauses comme des restrictions accessoires, conformément aux principes rappelées aux paragraphes 435 à 437. D’autre part, en tout état de cause, comme il sera démontré ci-après, eu égard aux particularités de l’espèce et aux éléments du dossier, le caractère restrictif de concurrence des clauses examinées n’est pas démontré.
566.-S’agissant du gentlemen’s agreement, l’Autorité relève qu’il ressort des faits de l’espèce que ce dernier s’inscrit en dehors de tout cadre contractuel entre les parties et ne se rattache à aucune opération principale dont il aurait pu être l’accessoire.
Sur les clauses de non-sollicitation de personnel
-Sur l’objet anticoncurrentiel
567.-Aux termes de la notification de griefs, il est reproché à Bertrandt et au Groupe Expleo d’avoir inséré, dans une série de contrats de partenariat et de sous-traitance, des clauses de non-sollicitation réciproques. Celles-ci stipulaient, en substance, que chaque partie s’interdisait de faire des offres d’engagement à tout collaborateur de l’autre partie, qu’il soit ou non intervenu dans la réalisation des prestations objet des contrats de partenariat et de sous-traitance concernés. Ces clauses avaient toutes des durées qui excédaient la durée d’exécution du contrat concerné et couvraient également les situations dans lesquelles la sollicitation initiale était formulée par le collaborateur lui-même.
568.-Toutefois, au regard de leur teneur et des objectifs poursuivis, ainsi que du contexte juridique et économique dans lequel elles s’insèrent, les différentes clauses de non-sollicitation de personnel cités aux paragraphes 138, 139, 142 et 145 ne sauraient en l’espèce être qualifiées de restrictions ayant un objet anticoncurrentiel.
a.-Les clauses de non-sollicitation de personnel insérées dans les contrats conclus dans le cadre du projet « [Confidentiel] » (2011-2015)
569.-Il ressort des constatations opérées aux paragraphes 136 à 139 que dans le cadre de ce projet, trois conventions de groupements momentanés d’entreprises (ci-après « GME ») ont été signées entre Bertrandt et le Groupe Expleo en vue de soumettre des offres communes pour le client final Renault, en qualité de cotraitants. Ces trois conventions contiennent chacune une clause de non-sollicitation de personnel rédigée en des termes similaires.
570.-S’agissant, en premier lieu, de la teneur de ces clauses, il convient de relever, tout d’abord, qu’elles visent « tout collaborateur de l’autre membre ayant participé à l’offre commune ou ayant réalisée des Prestations dans le cadre du Projet » ou « tout collaborateur ayant participé aux offres / grilles de décomposition communes des prix ou ayant réalisé des Prestations dans le cadre du Marché ». Le champ d’application de ces clauses est donc limité à une catégorie précise de collaborateurs en lien avec l’exécution d’un contrat.
571.-En ce qui concerne, ensuite, le champ d’application matériel de ces clauses, elles interdisent aux parties de procéder au recrutement de leur personnel respectif « même si la sollicitation initiale est formulée par le collaborateur ». L’engagement pris par les parties est par ailleurs réciproque.
572.-L’obligation de non-sollicitation s’applique néanmoins pour une période limitée à l’exécution des contrats en question, et douze mois suivant leur terme compte tenu, au cas d’espèce, des nécessités d’accompagnement post-contractuel du client final, telles qu’explicitées lors de la séance du 16 octobre 2024. Ainsi, quand bien même la sollicitation active serait prohibée et l’interdiction de sollicitation serait mutuelle, les clauses litigieuses n’ont vocation à s’appliquer que pour une durée limitée qui apparaît raisonnable au regard de l’intérêt, pour les parties, de garantir la stabilité des équipes affectées à la réalisation d’un projet.
573.-Enfin, elles prévoient une indemnisation en cas de non-respect de l’obligation de non-sollicitation. Comme le font valoir les parties mises en cause, le montant de cette indemnisation ne compense toutefois que partiellement le préjudice subi par le débauchage d’un collaborateur et ne revêt donc pas un caractère dissuasif significatif. Les éléments du dossier confirment d’ailleurs qu’aucune indemnisation n’a été versée malgré les manquements constatés aux obligations de non-sollicitation.
574.-Les clauses de non-sollicitation litigieuses visent ainsi à protéger les parties contre des recrutements importants de collaborateurs affectés à un projet donné, lesquels seraient préjudiciables à sa réalisation (désorganisations, délais, coûts, etc.), sans toutefois empêcher complétement le recrutement ponctuel d’un collaborateur.
575.-Au regard de leur teneur et de leur objectif, il apparaît ainsi que les clauses litigieuses se bornent à établir un engagement de non-recrutement d’une catégorie particulière de personnel, dans le cadre de l’exécution d’un contrat déterminé, avec un seul client des entreprises co-contractantes et pour une durée limitée à l’exécution de ce contrat dans l’objectif d’assurer la bonne réalisation de ce projet.
576.-L’appréciation des dispositions contractuelles litigieuses ne permet donc pas, en l’espèce, d’identifier un objet anticoncurrentiel.
577.-En second lieu, l’Autorité relève que l’analyse du contexte juridique et économique corrobore l’absence d’objet anticoncurrentiel des clauses litigieuses.
578.-S’agissant du contexte juridique, il apparaît en effet que le champ d’application des clauses litigieuses se rattache à l’exécution d’un contrat déterminé, pour le compte d’un seul client des entreprises co-contractantes. En outre, ces clauses sont insérées dans des conventions de GME constitués en vue de répondre à un appel d’offres, de sorte que l’obligation de non- sollicitation vise précisément à ce que le personnel chargé de la préparation des offres, et notamment des grilles de décomposition des prix, ne puisse être recruté par l’un ou l’autre des co-contractants qui sont par ailleurs concurrents.
579.-Par ailleurs, comme indiqué aux paragraphes 65 à 74, l’Autorité relève que de telles clauses ne sont pas interdites en soi. Si la Cour de cassation considère qu’elles sont attentatoires à la liberté du travail et d’entreprendre et qu’elles doivent être appréciées strictement, leur licéité sera fonction de leur proportionnalité au regard des objectifs légitimes qu’elles cherchent à protéger.
580.-S’agissant du contexte économique, il ressort des constatations opérées aux paragraphes 41 à 51 que le recrutement de collaborateurs affectés à l’exécution d’un projet, dans un secteur marqué par un taux de rotation élevé, peut avoir des répercussions importantes sur l’exécution des contrats et engagements pris avec les clients finaux et, in fine, sur la qualité des projets en question.
581.-Dans ce contexte, il apparaît que les clauses de non-sollicitation litigieuses tendent à garantir la stabilité d’un nombre limité de collaborateurs affectés à la réalisation d’un projet précis dans le cadre d’un partenariat ponctuel entre elles. L’objectif de ces clauses était donc d’assurer une protection contre un risque de débauchage entre co-contractants et, ainsi, de garantir la bonne exécution du projet en question.
582.-Au vu de ce qui précède, il n’est pas établi que les clauses en question présentent un caractère anticoncurrentiel à raison de leur objet.
b.-Les clauses de non-sollicitation de personnel insérées dans les contrats conclus dans le cadre du projet «[Confidentiel] » (2014-2015)
583.-Il ressort des constatations opérées aux paragraphes 140 à 142 que ce projet a donné lieu à la signature d’une convention de GME entre Bertrandt et le Groupe Expleo, complétée de deux contrats de sous-traitance pour le compte du client Renault. Ces deux contrats de sous- traitance sont régis par les conditions générales de service d’Expleo. Tant la convention de GME que les contrats de sous-traitance contiennent chacune une clause de non-sollicitation de personnel.
584.-S’agissant, en premier lieu, de la teneur de ces clauses, il convient de relever, tout d’abord, que la clause insérée dans la convention de GME vise uniquement les collaborateurs de l’autre partie intervenus dans la réalisation des prestations. Quant aux clauses applicables à chacun des deux contrats de sous-traitance, il y a lieu de retenir, comme le font valoir les parties mises en cause, que leur champ d’application personnel est également limité aux collaborateurs ayant participé à la réalisation des prestations. En effet, ces clauses sont contenues dans les conditions générales de service du Groupe Expleo dont l’application est limitée aux « [p]restations de Services » fournies par les parties dans le cadre des contrats de sous-traitance précités534.
585.-En ce qui concerne, ensuite, le champ d’application matériel de ces clauses, elles interdisent aux parties de procéder au recrutement de leur personnel respectif « même si la sollicitation initiale est formulée par le collaborateur ». L’obligation de non-sollicitation est réciproque dans la convention de GME, ce qui apparaît justifié dès lors que, comme indiqué précédemment, elle s’inscrit dans le cadre d’une relation horizontale entre deux concurrents qui répondent en commun à un appel d’offres. En revanche, elle n’est pas réciproque dans le cadre des deux contrats de sous-traitance et engage seulement le donneur d’ordre vis-à-vis du personnel de son sous-traitant, ce qui limite d’autant plus le champ d’application des clauses litigieuses et, partant, leur potentiel caractère anticoncurrentiel.
586.-En effet, dans le cadre d’une relation de sous-traitance, dès lors que ce sont essentiellement les équipes du sous-traitant qui exécutent le projet, des clauses réciproques permettant au donneur d’ordre de se prémunir d’actions de débauchage de la part du sous-traitant seraient peu susceptibles d’être justifiées. En fonction des circonstances propres à chaque espèce, de telles clauses pourraient relever d’une interdiction au titre des articles 101, paragraphe 1, du TFUE et L. 420-1 du code de commerce.
587.-En outre, les clauses litigieuses ont une durée limitée. En ce qui concerne la convention de GME, l’obligation de non-sollicitation s’étend pendant la durée du contrat et douze mois suivant son terme compte tenu, en l’espèce, des nécessités d’accompagnement post-contractuel du client final, telles qu’explicitées lors de la séance du 16 octobre 2024. S’agissant de la clause de non-sollicitation de personnel contenue dans les conditions générales de service du Groupe Expleo régissant les deux contrats de sous-traitance, si son libellé ne comporte pas en lui-même de durée précise, il y a lieu de considérer qu’elle n’avait pas vocation à perdurer au-delà du terme du projet auquel elle se rapportait dès lors, d’une part, que les conditions générales de service en question sont d’une durée limitée et, d’autre part, que le projet [Confidentiel] a pris fin le 22 décembre 2016, ainsi que cela ressort des constatations opérées au paragraphe 143. Aucun élément figurant au dossier ne permet ainsi de considérer que ces clauses ont continué à s’appliquer au-delà de la date du
22 décembre 2016. Comme indiqué précédemment, l’obligation de non-sollicitation s’applique ainsi pour une durée limitée qui parait raisonnable au regard de l’intérêt qu’il existe, pour les parties, à garantir la stabilité des équipes affectées à la réalisation d’un projet précis et des spécificités de ce dernier, telles qu’elles ressortent des éléments du dossier.
588.-Enfin, s’agissant de l’indemnisation en cas de non-respect de l’obligation de non- sollicitation, il ressort des éléments du dossier que la pénalité financière prévue par la clause de non-sollicitation insérée dans les deux contrats de sous-traitance présente un caractère dissuasif relatif dans la mesure où elle n’a jamais été appliquée malgré les manquements constatés. Dès lors elle n’a pas n’empêché les recrutements ponctuels de collaborateurs. La clause contenue dans la convention de GME ne comporte quant à elle aucune pénalité financière.
589.-Les clauses de non-sollicitation litigieuses visent ainsi à protéger les parties contre des recrutements importants de collaborateurs affectés à un projet donné, lesquels seraient préjudiciables à sa réalisation (désorganisations, délais, coûts, etc.), sans toutefois empêcher complétement le recrutement ponctuel d’un collaborateur.
590.-Au regard de leur teneur et de leur objectif, il apparaît ainsi que les clauses litigieuses se bornent à établir un engagement de non-recrutement d’une catégorie particulière de personnel, dans le cadre de l’exécution d’un contrat déterminé, avec un seul client des entreprises co-contractantes et pour une durée limitée à l’exécution de ce contrat dans l’objectif d’assurer la bonne réalisation de ce projet.
591.-L’appréciation de la teneur et des objectifs des dispositions contractuelles litigieuses ne permet donc pas d’identifier un objet anticoncurrentiel.
592.-En second lieu, l’Autorité relève, comme indiqué aux paragraphes 577 à 581 que l’analyse du contexte économique et juridique corrobore l’absence d’objet anticoncurrentiel des clauses litigieuses.
c.-Les clauses de non-sollicitation de personnel insérées dans les contrats conclus dans le cadre du projet « [Confidentiel]» (2019)
593.-Il ressort des constatations opérées aux paragraphes 144 à 146 que ce projet a donné lieu à la signature d’un contrat de sous-traitance aux termes duquel Expleo a sous-traité à Bertrandt la réalisation de certaines prestations pour le compte du client Renault. Ce contrat contient une clause de non-sollicitation.
594.-S’agissant, en premier lieu, de la teneur de la clause insérée dans ce contrat, il convient de relever, tout d’abord, qu’elle vise uniquement les collaborateurs de l’autre partie intervenus dans la réalisation des prestations objet du contrat.
595.-En ce qui concerne, ensuite, son champ d’application matériel, il y a lieu de noter, comme indiqué précédemment, que quand bien même la sollicitation active serait prohibée et l’interdiction de sollicitation serait mutuelle, la clause litigieuse n’a vocation à s’appliquer que pour la durée d’exécution du contrat, augmentée de douze mois, compte tenu, au cas d’espèce, des nécessités d’accompagnement post contractuel du client final, telles qu’explicitées lors de la séance du 16 octobre 2024. Cette durée apparaît raisonnable pour permettre aux parties de remplir les obligations post-contractuelles auxquelles elles se sont engagées et garantir la stabilité des équipes affectées à la réalisation du projet.
596.-S’agissant en particulier de la réciprocité de l’obligation de non-sollicitation, il convient de souligner, en l’espèce, qu’elle apparaît justifiée compte tenu des spécificités du contrat de sous-traitance qui prévoyait la possibilité, pour Bertrandt, de faire appel à des collaborateurs du Groupe Expleo pour l’exécution des prestations prévues au contrat535.
597.-Enfin, s’agissant de l’indemnisation en cas de non-respect de l’obligation de non- sollicitation, il ressort des éléments du dossier que la pénalité financière prévue présente un caractère dissuasif relatif dans la mesure où elle n’a jamais été appliquée malgré les manquements constatés et n’empêche donc pas les recrutements ponctuels de collaborateurs.
598.-La clause de non-sollicitation litigieuse vise ainsi à protéger les parties contre des recrutements importants de collaborateurs affectés à un projet donné, lesquels seraient préjudiciables à sa réalisation (désorganisations, délais, coûts, etc.), sans toutefois empêcher complétement le recrutement ponctuel d’un collaborateur.
599.-L’appréciation des dispositions contractuelles litigieuses ne permet donc pas d’identifier un objet anticoncurrentiel.
600.-En second lieu, l’Autorité relève, comme indiqué aux paragraphes 577 à 581, que l’analyse du contexte juridique et économique, tel qu’il ressort des éléments de l’espèce, corrobore l’absence d’objet anticoncurrentiel des clauses litigieuses.
601.-Au vu de ce qui précède, il n’est pas établi que les clauses en question présentent un caractère anticoncurrentiel à raison de leur objet.
-Sur les effets anticoncurrentiels
602.-Selon les services d’instruction, les éléments au dossier permettraient de démontrer l’existence d’effets anticoncurrentiels, réels ou potentiels, entrainés par les clauses de non- sollicitation contenues dans les contrats relatifs aux projets « [Confidentiel] »,
« [Confidentiel] » et « [Confidentiel] » » sur le marché concerné par les pratiques.
603.-Toutefois, les éléments au dossier ne permettent pas de déterminer l’impact des clauses en question sur les marchés de produit et géographique définis.
604.-L’Autorité relève en particulier que les clauses de non-sollicitation litigieuses concernent, ainsi que le font valoir les parties mises en cause, une part limitée des mouvements de personnel du Groupe Expleo et Bertrandt et ont par ailleurs été mises en œuvre pour des durées circonscrites et raisonnables.
605.-Par conséquent, l’Autorité considère que les éléments au dossier ne permettent pas d’établir que les clauses de non-sollicitation contenues dans les contrats précités ont entrainé des effets anticoncurrentiels.
-Conclusion
606.-Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent, et sans qu’il soit besoin de se prononcer sur les autres arguments soulevés par les parties, que les éléments du dossier ne permettent pas d’établir que les clauses de non-sollicitation litigieuses revêtent un caractère anticoncurrentiel.
Sur le gentleman’s agreement portant sur les ressources humaines
-Argument des parties
607.-Les parties mises en cause contestent le caractère anticoncurrentiel par objet du
gentlemen’s agreement.
608.-S’agissant de sa teneur, elles soutiennent qu’il s’inscrivait dans le cadre de leur partenariat [Confidentiel]. Elles ajoutent que les preuves de défaillance de cet accord seraient nombreuses et qu’il n’aurait conduit au refus d’embauche que dans trois cas sur les vingt-neuf identifiés au total par les services d’instruction. Les pièces du dossier démontreraient donc que Bertrandt et le Groupe Expleo n’auraient jamais renoncé à se faire concurrence.
609.-Elles font encore valoir que le gentlemen’s agreement poursuivait des objectifs légitimes, illustrés notamment par le fait que le Groupe Expleo envisageait d’engager des poursuites judiciaires à l’encontre de Bertrandt et avait sollicité l’approbation d’un plan d’action par son équipe juridique.
610.-En ce qui concerne le contexte économique, Expleo souligne que le gentlemen’s agreement s’inscrivait dans le cadre d’un environnement très concurrentiel, la main-d’œuvre qualifiée étant rare, stratégique et disputée. Dans ce contexte, l’objectif du gentlemen’s agreement participait de la prévention des départs massifs observés dans le secteur536. En outre, d’importants partenariats au profit de Renault auraient été renouvelés sans qu’il existe une protection contractuelle permettant aux parties d’éviter le débauchage de leur personnel respectif. Enfin, la position négligeable des parties sur les marchés concernés n’a pas été prise en compte par les services d’instruction.
611.-Au titre du contexte juridique, les parties mises en cause soulignent qu’aucune des décisions d’autorités de concurrence citées dans la notification de griefs ne serait comparable au cas d’espèce. L’absence d’expérience acquise s’opposerait donc à l’existence d’un objet anticoncurrentiel.
-Réponse de l’Autorité
612.-S’agissant, en premier lieu, de la teneur et des objectifs du gentlemen’s agreement, il y a lieu de considérer, à l’instar de la notification de griefs, que l’accord entre le Groupe Expleo et Bertrandt a eu pour objet de limiter la liberté commerciale de chacun de ses membres en matière d’embauche de personnel, les parties ayant renoncé à se faire concurrence sur l’un des paramètres parmi les plus stratégiques de leur activité, à savoir les ressources humaines.
613.-La teneur de l’accord ressort de plusieurs pièces au dossier qui font état de ce que cet accord
(i) consistait à « s’avertir mutuellement »537 en cas d’embauche chez l’une ou l’autre des parties, y compris en cas de candidatures spontanées, et prévoyait (ii) une interdiction
« d’approche directe d’un collaborateur »538, l’objectif étant de « limiter au strict incontournable »539 les mouvements de personnel entre les deux entreprises.
614.-Comme indiqué précédemment, l’accord porte, s’agissant des personnes concernées, sur les
« employés ou (…) fournisseurs »540, les « collaborateurs ou S/T [sous-traitants] »541 ainsi que les « effectifs en propre et les Rangs 2 et intérimaires »542, sans aucune limitation tenant aux contrats et/ou projets en commun que pourraient ou auraient pu avoir entre elles les deux mises en cause.
615.-Le gentlemen’s agreement présente ainsi un caractère général, et non limité dans le temps, ayant vocation à s’appliquer à « chaque fois que vous [les personnes en charge des recrutements] avez l’information d’une sollicitation de nos ressources » en vue de « stopper les actions d’agressions des opérationnels » (voir le paragraphe 151).
616.-L’accord entre le Groupe Expleo et Bertrandt consistait donc bien à s’accorder pour renoncer à recruter leur personnel respectif, que ce soit sur sollicitation de l’entreprise ou à la suite d’une candidature spontanée, en se concertant lorsque des mouvements étaient en projet.
617.-Ces pratiques, en tant qu’elles constituent un accord ayant pour objet la répartition de sources d’approvisionnement figurent parmi les ententes anticoncurrentielles expressément citées par les dispositions de l’article 101, paragraphe 1, sous c) du TFUE et de l’article L. 420-1, 4° du code de commerce. Elles sont considérées, aux termes d’une jurisprudence constante, comme constituant « des violations particulièrement graves de concurrence » et ayant « un objet restrictif de la concurrence en [elles]-mêmes »543, cette analyse ayant en outre été confirmée par la Cour de justice précisément au sujet d’accords de non-débauchage544.
618.-Les arguments des parties relatifs à l’absence d’expérience sanctionnant de telles pratiques doivent donc être écartés.
619.-En tout état de cause, si l’existence d’une expérience suffisamment solide et fiable sur la nocivité de certains types d’accord est prise en compte pour apprécier leur qualification de restriction par objet545, il y a lieu de rappeler que la Cour de justice a également précisé que le fait qu’une autorité de concurrence n’ait jamais qualifié de restriction par objet un accord similaire à celui qui fait l’objet de son analyse n’est pas de nature, en soi, à l’empêcher de retenir une telle qualification à l’avenir546. La jurisprudence nationale se prononce dans le même sens547.
620.-S’agissant, en second lieu, du contexte économique et juridique dans lequel les pratiques se sont inscrites, il y a lieu de rappeler, à titre liminaire, que la Cour de justice considère que les accords qui ont un objet restrictif de la concurrence en eux-mêmes et relèvent d’une catégorie d’accords expressément interdite par l’article 101, paragraphe 1, du TFUE, ne peuvent être justifiés au moyen d’une analyse du contexte : « [s]’agissant de tels accords, l’analyse du contexte économique et juridique dans lequel la pratique s’insère peut ainsi se limiter à ce qui s’avère strictement nécessaire en vue de conclure à l’existence d’une restriction de la concurrence par objet »548.
621.-En l’espèce, comme indiqué précédemment, au regard de leur teneur et de leur objectif, les pratiques mises en œuvre par le Groupe Expleo et Bertrandt relèvent de la catégorie d’accords anticoncurrentiels expressément visés par le l’article 101, paragraphe 1, sous c) du TFUE et de l’article L. 420-1,4° du code de commerce. Dans ces conditions, ainsi que le précise la jurisprudence mentionnée ci-dessus, l’analyse du contexte économique et juridique dans lequel les pratiques s’insèrent peut se limiter à ce qui s’avère strictement nécessaire en vue de conclure à l’existence d’une restriction de la concurrence par objet.
622.-S’agissant du contexte économique, les services d’instruction ont analysé, comme indiqué aux paragraphes 10 à 18 et 41 à 77, les secteurs concernés ainsi que leur mode de fonctionnement. Dans une partie spécialement dédiée au « [c]ontexte général des pratiques », ils ont exposé les caractéristiques des marchés du travail dans les secteurs en cause et expliqué en quoi les ressources humaines constituent un paramètre de concurrence entre les opérateurs, au regard du poids des frais de personnel dans l’ensemble de leurs dépenses, du caractère rare et disputé des ressources humaines ou des mouvements de personnel importants auxquels ils doivent faire face549.
623.-Concernant les relations entre les parties, les services d’instruction ont également relevé qu’elles étaient en concurrence pour l’embauche et l’emploi de ressources humaines.
624.-Le caractère fortement concurrentiel du marché amont des ressources humaines mis en avant par le Groupe Expleo ne saurait exonérer les pratiques mais confirme au contraire leur particulière nocivité puisque sous couvert de prévenir des pratiques de concurrence déloyale, les parties mises en cause se sont entendues pour s’interdire mutuellement de recruter ou d’embaucher leur personnel respectif, que ces derniers ait pris ou non l’initiative de candidater.
625.-Les parties mises en cause ne sauraient davantage, pour contester le caractère anticoncurrentiel de leur accord, soutenir qu’il n’existait aucune protection juridique pour se prémunir contre d’éventuels débauchages massifs de personnel alors qu’elles disposent, comme indiqué aux paragraphes 56 à 77 de plusieurs moyens, tant juridiques qu’en matière de politique de ressources humaines, pour y faire face.
626.-Du reste, il ressort précisément des faits de l’espèce qu’elles ont envisagé d’engager des actions en concurrence déloyale, comme en témoignent le courrier adressé à Bertrandt par le Groupe Expleo le 25 juin 2018 au sujet du débauchage de ses salariés550 ou encore le
« plan d’action juridique pour attaquer Bertrandt »551 que le Groupe Expleo a envisagé de mettre en place en septembre 2018. Ces actions, qui ne sauraient témoigner de ce que le gentlemen’s agreement s’inscrivait dans une « démarche pleinement légitime »552 démontrent, au contraire, que ce n’est que lorsqu’il n’était pas respecté que les parties ont envisagé de recourir à des voies légales pour limiter les recrutements de leur personnel respectif. Cela ressort en particulier des échanges internes au Groupe Expleo du 12 juin 2018 dans lesquels il est suggéré, en réponse à une alerte au sujet du potentiel départ d’un collaborateur du groupe Expleo chez Bertrandt, d’appeler 14 de chez Bertrandt pour lui « repasse[r] une couche » avant d’indiquer, dans un second temps uniquement que « l’Étape d’après c’est le Tribunal »553.
627.-En tout état de cause, s’agissant de la prise en compte des objectifs poursuivis par une mesure faisant l’objet d’une appréciation au titre de l’article 101, paragraphe 1, du TFUE, la Cour de justice a déjà jugé que le fait qu’elle soit considérée comme poursuivant un objectif légitime n’exclut pas que, eu égard à l’existence d’un autre objectif poursuivi par celle-ci et devant être regardé, quant à lui, comme illégitime, compte tenu également de la teneur des dispositions de cette mesure et du contexte dans lequel elle s’inscrit, ladite mesure puisse être considérée comme ayant un objet restrictif de la concurrence554.
628.-Partant, les arguments des parties tendant à justifier la pratique mise en œuvre au titre de la poursuite d’objectifs légitimes doivent être écartés.
629.-Au titre du contexte juridique des pratiques, les services d’instruction ont fait référence aux différents moyens juridiques mis en place par les entreprises pour se prémunir contre la concurrence déloyale. La notification de griefs fait également référence à la jurisprudence pertinente applicable, rappelée ci-dessus aux paragraphes 60 et suivants.
630.-Il ressort en outre des éléments du dossier exposés aux paragraphes 147 à 217 que le gentlemen’s agreement s’est noué en dehors de tout contrat et/ou partenariat spécifique entre le Groupe Expleo et Bertrandt. En particulier, et comme indiqué précédemment, les pratiques visaient précisément à pallier l’absence de clause de non-sollicitation entre les parties durant la période précédant la conclusion du contrat [Confidentiel]. Les parties sont donc convenues de ne pas se faire concurrence sur le recrutement de leurs ressources humaines. Ce faisant, et à rebours de ce qu’elles ont précisément négocié dans le cadre de la clause de non- sollicitation de personnel insérée dans le contrat [Confidentiel], elles ont mis en place un accord de non débauchage généralisé de leur personnel.
631.-L’Autorité relève ainsi que les éléments du contexte économique et juridique, loin d’exonérer les pratiques, confirment au contraire leur particulière nocivité puisque sous couvert de prévenir des pratiques de concurrence déloyale, les parties mises en cause se sont entendues pour s’interdire mutuellement de recruter ou d’embaucher leur collaborateurs respectifs, que ces derniers ait pris ou non l’initiative de candidater.
632.-Partant, contrairement à ce qui est soutenu, il importe peu que les parties n’occupent qu’une position négligeable sur les marchés concernés dès lors que cela relève de l’examen des effets anticoncurrentiels de la pratique et n’entre pas dans le cadre de l’analyse de son contexte économique. De même, en présence d’une infraction anticoncurrentielle par objet, le fait que l’infraction n’ait pas été mise en œuvre concrètement par les parties ou qu’elle se soit révélée inutile pour certaines n’est pas pertinent dans l’analyse555.
633.-Par conséquent, les pratiques litigieuses constituent des restrictions de concurrence par objet.
Dès lors, il n’est pas nécessaire d’en examiner les éventuels effets anticoncurrentiels.
La durée des pratiques
634.-L’existence du gentlemens’s agreement est établie à partir des pièces du dossier entre les mois de février et septembre 2018.
635.-Le courriel du 6 février 2018 dans lequel M. 2 (Directeur Business Unit Auto France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) indique à quatre de ses collègues
« [g]entleman agreement (…) Bertrandt et Assystem [actuellement Expleo] respectent la législation du travail et gèrent en bonne intelligence les recrutements de l’un chez l’autre en essayant de les limiter au strict incontournable et en s’avertissant mutuellement lorsque nous déclenchons une embauche » permet de fixer le point de départ des pratiques à cette date.
636.-La circonstance que l’accord ait été appliqué de manière variable dans le temps par l’une et/ou l’autre des parties ne saurait remettre en cause la continuité de la pratique, compte tenu de sa nature anticoncurrentielle par objet et de la jurisprudence précédemment rappelée.
637.-Ainsi que cela ressort des constatations opérées aux paragraphes 209 à 217 les parties ont progressivement mis fin aux pratiques litigieuses à partir du mois de septembre 2018. Il y a lieu de retenir comme marquant la date de fin des pratiques, ainsi que le font valoir les parties mises en cause, le courriel du 21 septembre 2018, dans lequel M. 2 (Directeur Business Unit Auto France, Assystem France SAS [actuellement Expleo France]) indique à ses collègues :
« [n]ous ne sommes plus dans le cadre d’un gentleman agreement, il faut traiter avec plus d’énergie, merci de me faire savoir vos réflexions ».
638.-L’accord anticoncurrentiel entre le Groupe Expleo et Bertrand visé par le grief n° 2 et consistant en un gentlemen’s agreement a donc une durée comprise entre le 6 février 2018 et le 21 septembre 2018.
c)-Sur le grief n° 3
639.-Aux termes du grief n° 3, il est reproché à Ausy/Randstad et Atos d’avoir mis en œuvre une entente anticoncurrentielle prohibée par les articles 101, paragraphe 1, du TFUE et
L. 420-1 du code de commerce, consistant en un accord visant à ne pas se faire concurrence pour le recrutement de leurs ingénieurs consultants respectifs. Cet accord est constitué, selon les services d’instruction, de deux types de pratiques : d’une part, des clauses de non-sollicitation de personnel insérées dans des contrats de partenariat et, d’autre part, un
« pacte de non-agression ».
640.-Atos conteste cette présentation et considère qu’il n’existe pas de pacte de non-agression indépendant des clauses de non-sollicitation556. Elle soutient que le principal courriel qui démontrerai l’existence de ce pacte, à savoir celui du 13 février 2017, est postérieur aux premiers contrats de partenariat entre les parties prévoyant des clauses de non-sollicitation, dont le premier date de 2014. Par ailleurs, la durée du pacte de non-agression serait comprise dans celle des clauses de non-sollicitation. Le courriel litigieux n’aurait donc fait que réitérer l’engagement contractuel pris par les deux entreprises. Le pacte de non-agression ne concernerait, au surplus, que trois collaborateurs d’Atos entrant dans le champ couvert par les clauses de non-sollicitation557.
641.-Elle soutient également que la pratique reprochée ne remplit pas les critères de l’infraction anticoncurrentielle par objet.
642.-Partant, il convient de vérifier si l’accord en cause est bien constitué de deux pratiques distinctes, comme le soutiennent les services d’instruction, avant d’analyser son caractère anticoncurrentiel.
Sur l’existence de deux pratiques distinctes
643.-Selon la notification de griefs, l’échange de courriels entre Ausy/Randstad et Atos mentionné aux paragraphes 241 et 242 démontre qu’au mois de février 2017, les deux entreprises sont convenues d’un accord aux termes duquel elles se sont engagées, s’agissant de consultants salariés ayant déjà travaillé à Toulouse pour l’un des comptes du groupe Airbus ou pour le CNES, à se contacter mutuellement dans le cadre d’un projet de recrutement pour envisager ensemble, à l’issue de ce contact, l’opportunité ou non de recevoir le consultant en vue de son éventuel recrutement.
644.-Les éléments du dossier ne permettent toutefois pas de retenir, comme le propose la notification de griefs, l’existence d’un pacte de non-agression sur les recrutements distincts des clauses de non-sollicitation insérées dans les contrats de partenariats liant les deux entreprises.
645.-En premier lieu, l’Autorité relève que les sociétés demandeuses de clémence n’ont pas fait état précisément de deux pratiques distinctes558. S’agissant en particulier de l’existence d’un pacte de non-agression, elles n’ont pas confirmé aux services d’instruction qu’il aurait dépassé le champ d’application des clauses de non-sollicitation par ailleurs conclues dans le cadre de partenariats entre les parties559.
646.-En deuxième lieu, comme le soutient Atos, l’interdiction de sollicitation évoquée dans le courriel du 13 février 2017 qui matérialiserait, selon les services d’instruction, la conclusion du pacte de non-agression entre les parties, concerne précisément deux clients de ces dernières, à savoir Airbus et le CNES, pour lesquels elles ont noué des partenariats ponctuels, tel que cela ressort des constatations opérées aux paragraphes 231 à 240.En outre, le courriel fait référence « aux périmètres » de ces « partenariats forts de coopération » entre les parties. Enfin, l’obligation de non-sollicitation concerne précisément les collaborateurs affectés à ces clients. Il est donc plausible, comme le soutient Atos, que ce courriel fasse référence aux clauses contractuelles expressément prévues dans les différents contrats de partenariat conclus entre les parties pour le compte de ces deux clients.
647.-Si ce courriel ne précise pas la durée de l’obligation de non-sollicitation prévue, il ressort néanmoins des échanges intervenus entre les parties au sujet de trois recrutements supposément en lien avec le pacte de non-agression qu’elles ont tenté de vérifier la période à laquelle les collaborateurs en question avaient été affectés à des projets pour le compte des clients Airbus ou CNES. Or, si le pacte de non-agression sur les recrutements n’avait pas de limitation de durée, comme le soutiennent les services d’instruction, il n’était en rien nécessaire de s’interroger sur la période à laquelle ces collaborateurs avaient été affectés aux projets en question.
648.-En troisième lieu, il ressort des éléments du dossier exposés aux paragraphes 281 à 314 qu’il ne peut être démontré avec certitude que les collaborateurs concernés par les échanges de courriels cités dans la notification de griefs relevaient de l’application d’un pacte de non- agression et non pas de la seule mise en œuvre de clauses de non-sollicitation.
649.-Ainsi, s’agissant de Mme 84, visée par des échanges au dossier entre les parties du 8 au 15 mars 2017, l’Autorité relève qu’elle a travaillé pour Airbus sur le projet [Confidentiel], qui était couvert par deux contrats de sous-traitance sur la période du 2 janvier 2015 au 31 mars 2016 lesquels incluaient chacun une clause de non-sollicitation, dont l’application s’étendait une année après la fin de ces contrats, soit jusqu’au 31 mars 2017. Dans ce contexte, et au vu des pièces du dossier exposées aux paragraphes 281 à 287, il n’est pas établi que les discussions à son sujet relevaient d’un pacte de non-agression entre les parties, alors qu’elle pouvait effectivement être concernée par la clause de non-sollicitation présente dans le contrat de sous-traitance « [Confidentiel] » signé entre les parties le 31 décembre 2015. Si Mme 70 (Business Unit director, Ausy SAS) a pu indiquer, lors de ces échanges, que la candidate en question « ne rentre pas dans la clause de non débauchage de façon purement contractuel »560, cet élément n’est corroboré par aucune autre pièce du dossier et ne saurait suffire à établir, à lui seul, que les échanges en question relevaient de l’application d’un pacte de non-agression. Du reste, il sera relevé que les sociétés demandeuses de clémence n’ont pu indiquer avec certitude si cette candidate relevait d’un pacte de non-agression ou d’une clause de non-sollicitation contractuelle561. Il n’est pas davantage établi qu’Ausy/Randstad aurait sollicité l’accord préalable d’Atos avant de procéder à son recrutement.
650.-Il en est de même concernant M. 86, visé par des échanges entre Atos et Ausy/Randstad entre le 12 janvier 2018 et le 1er février 2018. Il ressort des éléments du dossier que ce collaborateur était affecté au projet Airbus [Confidentiel] qui a donné lieu au contrat de sous- traitance « [Confidentiel] » signé le 2 février 2015 et exécuté du 1er mars 2015 au 31 décembre 2017. La clause de non-sollicitation de ce contrat s’appliquait pour une durée de 12 mois suivant son terme, soit jusqu’au 31 décembre 2018. Quand bien même les parties ont pu faire référence, dans leurs échanges, à l’occasion de son recrutement par Atos, à un
« pacte de non-agression », il existe une incertitude sur le sens que les parties ont entendu donner à ce terme, ce d’autant plus qu’il n’est mentionné qu’à une seule reprise et par une seule personne, à savoir Mme 69 (directrice de projet, Atos Integration SAS)562 Si cette dernière a en outre mentionné l’existence de ce pacte lors de ses déclarations aux services d’instruction le 30 juin 2022, elle a également indiqué dans cette même déclaration à ce sujet : « [i]l y avait forcément une clause de non-sollicitation. Dans tous les contrats on a une clause de ce type »563. Il n’est ainsi pas exclu que ce qu’elle qualifie de pacte de non- agression, soit, en réalité, l’inclusion systématique de clauses de non-sollicitation dans les contrats. M. 67 (Business unit Director, Ausy SAS) a pu évoquer quant à lui un « gentleman agreement » dans un courriel du 12 janvier 2018564, tout en faisant référence, dans ce même courriel, au cas de M. 72 (Atos) comme relevant de cet « accord », alors pourtant que sa candidature s’inscrivait bien dans le cadre d’une clause de non-sollicitation (voir, ci-dessus les paragraphes 266 à 271). L’Autorité relève à cet égard que la notification de griefs ne démontre pas en quoi le pacte de non-agression aurait simplifié et étendu l’usage des clauses de non-sollicitation dont relevait ce candidat.
651.-Enfin, M. 90, visé par des échanges entre les parties entre le 21 février et le 30 mars 2018, a été affecté au mois de mars 2018 au projet [Confidentiel] pour Airbus et pouvait donc être couvert par la clause de non-sollicitation du contrat de partenariat existant pour ce projet pour la période allant du 1er janvier 2017 au 31 décembre 2021. Si les sociétés demandeuses de clémence ont pu indiquer qu’en l’état de leurs informations, tel n’était pas le cas, elles n’ont pour autant pas formellement exclu qu’il en soit autrement. Par ailleurs, ces déclarations ne sont en toute hypothèse corroborées par aucun élément du dossier.
652.-Il découle de l’ensemble de ces éléments qu’il n’est pas établi que les parties ont conclu un pacte de non-agression qui serait distinct ou irait au-delà des clauses de non-sollicitation prévues dans leurs différents contrats de partenariat.
653.-Seules les clauses de non-sollicitation litigieuses seront donc analysées ci-dessous.
Sur les clauses de non-sollicitation de personnel
654.-Les services d’instruction font valoir que les clauses de non-sollicitation prévues dans les contrats de sous-traitance conclus entre Ausy/Randstad et Atos ne peuvent être considérées comme des restrictions accessoires, ce que conteste Atos dans ses observations en réponse à la notification de griefs.
655.-Or, en l’espèce, d’une part, la disjonction de l’instruction en deux affaires distinctes (voir, sur ce point, les paragraphes 3 et 7) ne permettait pas d’analyser les contrats principaux conjointement aux clauses de non-sollicitation litigieuses. D’autre part, en tout état de cause, comme il sera démontré ci-après, eu égard aux particularités de l’espèce et aux éléments du dossier, le caractère restrictif de concurrence des clauses examinées n’est pas démontré.
Sur l’objet anticoncurrentiel
656.-Aux termes de la notification de griefs, il est reproché à Ausy/Randstad et Atos d’avoir inséré, dans une série de contrats de partenariat et de sous-traitance, des clauses de non-sollicitation qui, eu égard à leur caractère réciproque, leur champ étendu, leur nature et leur finalité, ont eu pour objet de limiter la liberté commerciale des parties en matière d’embauche de personnel. Un tel accord constitue ainsi, selon les services d’instruction, une entente de répartition des sources d’approvisionnement sur les marchés amont des ressources humaines dans les secteurs de l’ingénierie et du conseil en technologies ainsi que des services informatiques intéressant les domaines de l’aéronautique, l’aérospatial et la défense à Toulouse
657.-Les éléments du dossier ne permettent toutefois pas de retenir, comme le propose la notification de griefs, que les différentes clauses de non-sollicitation de personnel cités aux paragraphes 232 à 240 revêtent un objet anticoncurrentiel, tant au regard de leur teneur et objectifs que du contexte juridique et économique dans lequel elles s’insèrent.
-Les clauses de non-sollicitation de personnel insérées dans les contrats de sous-traitance relatifs au contrat [Confidentiel]
658.-Il ressort des constatations opérées aux paragraphes 232 et 233 que dans le cadre de ce projet, deux contrats de sous-traitance ont été signés entre Atos et Ausy/Randstad en vue de réaliser des prestations pour le compte de leur client final Airbus. Ces deux contrats contiennent chacun une clause de non-sollicitation de personnel.
659.-S’agissant, en premier lieu, de la teneur de ces clauses, il convient de relever, tout d’abord, qu’elles visent « un collaborateur de l’autre Partie ou du Client Final ayant participé à l’exécution du Contrat ». Le champ d’application personnel de ces clauses est donc limité à une catégorie précise de collaborateurs en lien avec l’exécution même d’un contrat donné.
660.-En ce qui concerne, ensuite, le champ d’application matériel de ces clauses, la clause de non-sollicitation de personnel contenue dans le contrat de sous-traitance du 2 décembre 2014 interdit aux parties de procéder au recrutement de leur personnel respectif « même si la sollicitation initiale est formulée par le collaborateur ». L’engagement pris par les parties est par ailleurs réciproque, ce qui se justifie, en l’espèce, compte tenu de l’intervention, dans la réalisation des prestations, de personnel technique clé tant du donneur d’ordre que du sous-traitant.
661.-En outre, l’obligation de non-sollicitation s’applique pour une période limitée à l’exécution des contrats en question, et douze mois suivant leur terme compte tenu, en l’espèce, des nécessités d’accompagnement post contractuel du client final, telles qu’explicitées lors de la séance du 16 octobre 2024. Ainsi, quand bien même la sollicitation active serait prohibée et l’interdiction de sollicitation serait mutuelle, les clauses litigieuses n’ont vocation à s’appliquer que pour une durée limitée qui apparaît raisonnable au regard de l’intérêt qu’il existe, pour les parties, à garantir la stabilité des équipes affectées à la réalisation d’un projet précis.
662.-Enfin, elles prévoient une indemnisation en cas de non-respect de l’obligation de non- sollicitation. Il ressort toutefois des éléments du dossier que cette pénalité présente un caractère dissuasif relatif, aucune indemnisation n’ayant été versée malgré les manquements constatés aux obligations de non-sollicitation565.
663.-Les clauses de non-sollicitation litigieuses visent ainsi à protéger les parties contre des recrutements importants, par un concurrent ayant un accès privilégié aux ressources humaines de son cocontractant, de collaborateurs affectés à un projet donné, lesquels seraient préjudiciables à sa réalisation (désorganisations, délais, coûts, etc.) sans toutefois empêcher le recrutement ponctuel d’un collaborateur.
664.-Au regard de leur teneur et de leur objectif, il apparaît ainsi que les clauses litigieuses se bornent à établir un engagement de non-recrutement d’une catégorie particulière de personnel, dans le cadre de l’exécution d’un contrat déterminé, avec un seul client des entreprises co-contractantes et pour une durée limitée à l’exécution de ce contrat dans l’objectif d’assurer la bonne réalisation de ce projet.
665.-L’appréciation des dispositions contractuelles litigieuses ne permet donc pas d’identifier un objet anticoncurrentiel.
666.-En second lieu, l’Autorité relève que l’analyse du contexte juridique et économique corrobore l’absence d’objet anticoncurrentiel des clauses litigieuses.
667.-S’agissant de leur contexte juridique, il apparaît en effet que leur champ d’application se limite à l’exécution d’un contrat déterminé, pour le compte d’un seul client des entreprises co-contractantes.
668.-En outre, comme indiqué aux paragraphes 65 à 74, l’Autorité relève que de telles clauses ne sont pas interdites en soi. Si la Cour de cassation considère qu’elles sont attentatoires à la liberté du travail et d’entreprendre et qu’elles doivent être appréciée strictement, leur licéité sera fonction de leur proportionnalité au regard des objectifs légitimes qu’elles cherchent à protéger.
669.-S’agissant du contexte économique, il ressort des constatations opérées aux paragraphes 41 à 51 que le recrutement de collaborateurs affectés à l’exécution d’un projet, dans un secteur marqué par un taux de rotation important, peut avoir des répercussions importantes sur l’exécution des contrats et engagements pris avec les clients finaux et impacter ainsi la qualité des projets en question.
670.-Dans ce contexte, il apparaît que les clauses de non-sollicitation litigieuses tendent à garantir la stabilité d’un nombre limité de collaborateurs affectés à la réalisation d’un projet précis dans le cadre d’un partenariat ponctuel entre elles. L’objectif de ces clauses était donc d’assurer une protection contre un risque de débauchage entre co-contractants et, ainsi, de garantir la bonne exécution du projet en question.
671.-Au vu de ce qui précède, il n’est pas établi que les clauses en question présentent un caractère anticoncurrentiel à raison de leur objet.
-La clause de non-sollicitation de personnel insérée dans le contrat de sous-traitance conclu dans le cadre des projets « [Confidentiel] » et
« [Confidentiel] »
672.-Il ressort des constatations opérées aux paragraphes 234 et 235 que ce projet a donné lieu à la signature d’un contrat de sous-traitance d’Atos pour Ausy/ Randstad le 2 févier 2015 pour une période courant du 1er mars 2015 au 31 décembre 2016. Ce contrat contient une clause de non sollicitation de personnel.
673.-S’agissant, en premier lieu, de sa teneur, il convient de relever qu’elle vise « toute personne ayant participé à la réalisation des travaux demandés ». Le champ d’application personnel de cette clause est donc limité à une catégorie précise de collaborateurs en lien avec l’exécution même d’un contrat donné.
674.-En ce qui concerne, ensuite, son champ d’application matériel, il n’interdit pas aux parties de procéder au recrutement de leur personnel respectif lorsque la sollicitation provient du collaborateur, ce qui limite d’autant sa portée. L’engagement pris par les parties est par ailleurs réciproque, ce qui se justifie, en l’espèce, compte tenu de l’intervention, dans la réalisation des prestations, de personnel technique clé tant du donneur d’ordre que du sous- traitant.
675.-En outre, l’obligation de non-sollicitation s’applique pour une période limitée à l’exécution du contrat en question, et douze mois suivant son terme compte tenu, en l’espèce, des nécessités d’accompagnement post contractuel du client final, telles qu’explicitées lors de la séance du 16 octobre 2024. Ainsi, quand bien même l’obligation de non-sollicitation serait réciproque, la clause litigieuse n’a vocation à s’appliquer que pour une durée limitée qui apparaît raisonnable au regard de l’intérêt qu’il existe, pour les parties, à garantir la stabilité des équipes affectées à la réalisation d’un projet précis.
676.-Enfin, elle prévoit une indemnisation en cas de non-respect de l’obligation de non-sollicitation. Il ressort toutefois des éléments du dossier que cette pénalité présente un caractère dissuasif relatif, aucune indemnisation n’ayant été versée malgré les manquements constatés aux obligations de non-sollicitation566.
677.-La clause de non-sollicitation litigieuse vise ainsi à protéger les parties contre des recrutements importants de collaborateurs affectés à un projet donné, lesquels seraient préjudiciables à sa réalisation (désorganisations, délais, coûts, etc.), sans toutefois empêcher complétement le recrutement ponctuel d’un collaborateur.
678.-Au regard de sa teneur et de ses objectifs, il apparaît ainsi que la clause litigieuse se borne à établir un engagement de non-recrutement d’une catégorie particulière de personnel, dans le cadre de l’exécution d’un contrat déterminé, avec un seul client des entreprises co- contractantes et pour une durée limitée à l’exécution de ce contrat dans l’objectif d’assurer la bonne réalisation de ce projet.
679.-L’appréciation des dispositions contractuelles litigieuses ne permet donc pas d’identifier un objet anticoncurrentiel.
680.-En second lieu, l’Autorité relève, comme indiqué aux paragraphes 666 à 670, que l’analyse du contexte juridique et économique corrobore l’absence d’objet anticoncurrentiel.
681.-Au vu de ce qui précède, il n’est pas établi que la clause en question présente un caractère anticoncurrentiel à raison de son objet.
-La clause de non-sollicitation de personnel insérée dans le contrat de sous-traitance « [Confidentiel] » pour Airbus Defence & Space (2016-2021)
682.-Il ressort des constatations opérées aux paragraphes 236 et 237 que ce projet a donné lieu à la signature d’un contrat de sous-traitance d’Atos pour Ausy/Randstad le 12 décembre 2016 pour une période courant du 1er janvier 2017 au 31 décembre 2021. Ce contrat contient une clause de non-sollicitation de personnel.
683.-S’agissant, en premier lieu, de sa teneur, il convient de relever qu’elle vise « un collaborateur de l'autre Partie ayant participé à l'exécution du Contrat ». Son champ d’application personnel est donc limité à une catégorie précise de collaborateurs en lien avec l’exécution même d’un contrat donné.
684.-En ce qui concerne, ensuite, son champ d’application matériel, elle interdit aux parties de procéder au recrutement de leur personnel respectif « même si la sollicitation initiale est formulée par le collaborateur ». L’engagement pris par les parties est par ailleurs réciproque.
685.-L’obligation de non-sollicitation s’applique néanmoins pour une période limitée à l’exécution du contrat en question, et à 24 mois suivant son terme compte tenu des spécificités des activités en cause dans le domaine spatial pour le compte d’Airbus Defence & Space. Cette durée de 24 mois se justifie compte tenu de l’habilitation de sécurité exigée pour le personnel amené à travailler sur le projet en question, du fait du caractère classifié des informations auxquelles il a accès567.
686.-Ainsi, quand bien même la sollicitation active serait prohibée et l’interdiction de sollicitation serait mutuelle, les clauses litigieuses n’ont vocation à s’appliquer que pour une durée limitée qui apparaît raisonnable au regard de l’intérêt qu’il existe, pour les parties, à garantir la stabilité des équipes affectées à la réalisation d’un projet précis, comme cela a été explicitées lors de la séance du 16 octobre 2024.
687.-S’agissant en particulier de la réciprocité de l’obligation de non-sollicitation, il convient de souligner, en l’espèce, qu’elle apparaît justifiée au regard des spécificités du contrat de sous- traitance qui prévoyait l’accompagnement du client final par le biais d’une « équipe socle » de collaborateurs d’Ausy, certaines tâches lui étant spécifiquement réservées dans le cadre de la sous-traitance organisée avec Atos568.
688.-Enfin, elle prévoit une indemnisation en cas de non-respect de l’obligation de non-sollicitation. Il ressort toutefois des éléments du dossier que cette pénalité présente un caractère dissuasif relatif, aucune indemnisation n’ayant été versée malgré les manquements constatés aux obligations de non-sollicitation569.
689.-La clause de non-sollicitation litigieuse vise ainsi à protéger les parties contre des recrutements importants de collaborateurs affectés à un projet donné, lesquels seraient préjudiciables à sa réalisation (désorganisations, délais, coûts, etc.), sans toutefois empêcher complétement le recrutement ponctuel d’un collaborateur.
690.-Au regard de sa teneur et de ses objectifs, il apparaît ainsi que la clause litigieuse se borne à établir un engagement de non-recrutement d’une catégorie particulière de personnel, dans le cadre de l’exécution d’un contrat déterminé, avec un seul client des entreprises co-contractantes et pour une durée limitée à l’exécution de ce contrat dans l’objectif d’assurer la bonne réalisation de ce projet.
691.-L’appréciation des dispositions contractuelles litigieuses ne permet donc pas d’identifier un objet anticoncurrentiel.
692.-En second lieu, l’Autorité relève, comme indiqué aux paragraphes 666 à 670, que l’analyse du contexte juridique et économique corrobore l’absence d’objet anticoncurrentiel.
693.-Au vu de ce qui précède, il n’est pas établi que la clause en question présente un caractère anticoncurrentiel à raison de son objet.
-Les clauses de non-sollicitation de personnel insérées dans les contrats
« [Confidentiel] » signés pour le client CNES (2016-2022)
694.-Il ressort des constatations opérées aux paragraphes 238 à 240 que dans le cadre de ce projet, Atos et Ausy/Randstad ont signé un protocole préalable de sous-traitance puis un contrat de sous-traitance en vue de réaliser des prestations pour le compte de leur client final, le CNES. Ces deux contrats contiennent chacun une clause de non-sollicitation de personnel rédigée en des termes similaires.
695.-S’agissant, en premier lieu, de la teneur de ces clauses, il convient de relever, tout d’abord, qu’elles visent « un collaborateur de l’autre Partie intervenant au titre du présent Contrat » ou « du présent Protocole ». Le champ d’application personnel de ces clauses est donc limité à une catégorie précise de collaborateurs en lien avec l’exécution même d’un contrat donné.
696.-En ce qui concerne, ensuite, le champ d’application matériel de ces clauses, elles n’interdisent pas aux parties de procéder au recrutement de leur personnel respectif lorsque la sollicitation provient du collaborateur, ce qui limite d’autant leur portée. L’engagement pris par les parties est par ailleurs réciproque ce qui apparaît en l’espèce justifié compte tenu des exigences de protection du secret en matière de défense nationale auxquelles est assujetti le personnel amené à travailler pour le compte du CNES570.
697.-Par ailleurs, l’obligation de non-sollicitation s’applique pour une période limitée à l’exécution du contrat en question, et douze mois suivant son terme compte tenu, au en l’espèce, des nécessités d’accompagnement post contractuel du client final, telles qu’explicitées lors de la séance du 16 octobre 2024. Ainsi, quand bien même l’obligation de non-sollicitation serait réciproque, les clauses litigieuses n’ont vocation à s’appliquer que pour une durée limitée qui apparaît raisonnable au regard de l’intérêt qu’il existe, pour les parties, à garantir la stabilité des équipes affectées à la réalisation d’un projet précis.
698.-Enfin, elles prévoient une indemnisation en cas de non-respect de l’obligation de non-sollicitation. Il ressort toutefois des éléments du dossier que cette pénalité présente un caractère dissuasif relatif, aucune indemnisation n’ayant été versée malgré les manquements constatés aux obligations de non-sollicitation571.
699.-Les clauses de non-sollicitation litigieuses visent ainsi à protéger les parties contre des recrutements importants de collaborateurs affectés à un projet donné, lesquels seraient préjudiciables à sa réalisation (désorganisations, délais, coûts, etc.) sans toutefois empêcher le recrutement ponctuel d’un collaborateur.
700.-Au regard de leur teneur et de leurs objectifs, il apparaît ainsi que les clauses litigieuses se bornent à établir un engagement de non-recrutement d’une catégorie particulière de personnel, dans le cadre de l’exécution d’un contrat déterminé, avec un seul client des entreprises cocontractantes et pour une durée limitée à l’exécution de ce contrat dans l’objectif d’assurer la bonne réalisation de ce projet.
701.-L’appréciation des dispositions contractuelles litigieuses ne permet donc pas d’identifier un objet anticoncurrentiel.
702.-En second lieu, l’Autorité relève, comme indiqué aux paragraphes 666 à 670, que l’analyse du contexte juridique et économique corrobore l’absence d’objet anticoncurrentiel des clauses litigieuses.
703.-Au vu de ce qui précède, il n’est pas établi que les clauses en question présentent un caractère anticoncurrentiel à raison de leur objet.
Sur les effets anticoncurrentiels
704.-Selon la notification de griefs, les clauses de non-sollicitation ont limité la mobilité de certains employés de Ausy/Randstad vers Atos et inversement. Elles sont également susceptibles d’avoir limité le montant des rémunérations des personnels concernés, à tout le moins de les maintenir à un niveau infra-concurrentiel. Enfin, les services d’instruction considèrent que l’accord a eu pour effet une répartition de la fourniture des prestations sur les marchés aval des services d’ingénierie, de conseil en technologies et informatiques intéressant les domaines de l’aéronautique, l’aérospatiale et la défense à Toulouse de même qu’une limitation de ces prestations, en restreignant artificiellement la quantité de main- d'œuvre disponible pour chaque concurrent à un moment donné.
705.-Toutefois, les éléments au dossier ne permettent pas de déterminer l’impact des clauses en question sur les marchés du travail tels que définis.
706.-L’Autorité relève en particulier, s’agissant des effets des pratiques sur le marché amont des ressources humaines, que les clauses de non-sollicitation litigieuses concernent, ainsi que le font valoir les parties mises en cause, une part limitée du marché global identifié par la notification des griefs. Les pratiques n’ont donc concerné qu’une faible proportion du personnel d’Ausy/Randstad et d’Atos et pour des durées circonscrites et raisonnables.
707.-Il s’en suit, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur les autres arguments soulevés par les parties, que les pratiques relatives à l’insertion de clauses de non-sollicitation dans certains contrats visées par le grief notifié ne sont pas établies.
708.-Pour l’ensemble des raisons qui précèdent, l’Autorité considère que les pratiques d’entente visées par le grief n° 3 ne sont pas établies.
E.-SUR L’IMPUTABILITÉ DES PRATIQUES
1.-PRINCIPES APPLICABLES
709.-Il résulte d’une jurisprudence constante que les articles L. 420-1, L. 420-2 du code de commerce et 101 et 102 du TFUE visent les infractions commises par des entreprises. La notion d’entreprise doit être comprise comme désignant une unité économique, même si, du point de vue juridique, celle-ci est constituée de plusieurs personnes physiques ou morales. Cette entité économique doit, lorsqu’elle enfreint les règles de concurrence, répondre de cette infraction, conformément au principe de responsabilité personnelle572.
710.-En droit interne comme en droit de l’Union, au sein d’un groupe de sociétés, le comportement d’une filiale peut être imputé à la société mère lorsque, bien qu’ayant une personnalité juridique distincte, cette filiale ne détermine pas de façon autonome son comportement sur le marché, mais applique pour l’essentiel les instructions qui lui sont données par la société mère, eu égard aux liens économiques, organisationnels et juridiques qui unissent ces deux entités juridiques573.
711.-Ainsi, dans le cas particulier où une société mère détient, directement ou indirectement par le biais d’une société interposée, la totalité ou la quasi-totalité du capital de sa filiale auteure d’un comportement infractionnel, il existe une présomption réfragable selon laquelle cette société mère exerce effectivement une influence déterminante sur le comportement de sa filiale. Dans ce cas de figure, l’Autorité sera en mesure de considérer la société mère comme tenue solidairement au paiement de l’amende infligée à sa filiale, à moins que cette société mère, à laquelle il incombe de renverser cette présomption, n’apporte des éléments de preuve suffisants de nature à démontrer que sa filiale se comporte de façon autonome sur le marché574.
2.-APPLICATION AU CAS D’ESPECE
a)-Imputabilité des pratiques à Ausy/Randstad
712.-Il y a lieu de retenir au titre du grief n° 1 la responsabilité de la société Ausy SAS, devenue Randstad Digital France SAS le 30 août 2023, en tant qu’auteure des pratiques.
b)-Imputabilité des pratiques à Alten
713.-Il y a lieu de retenir, au titre du grief n° 1, la responsabilité de la société Alten SA, en tant qu’auteure des pratiques.
714.-La société Alten ne formule aucune contestation à ce sujet.
c)-Imputabilité des pratiques à Bertrandt
715.-Il y a lieu de retenir, au titre du grief n° 2, la responsabilité de la société Bertrandt SAS en tant qu’auteure des pratiques.
716.-En outre, sur la période de commission des pratiques, la société Bertrandt SAS était détenue à 100 % par Bertrandt France SAS, elle-même détenue à 100 % par la société Bertrandt AG. Les responsabilités de Bertrandt France SAS et Bertrandt AG doivent donc également être retenues en leur qualité de sociétés mères détenant directement et indirectement la totalité du capital de Bertrandt SAS575, et présumées, dès lors, avoir exercé une influence déterminante sur le comportement de leur filiale.
717.-La société Bertrandt ne conteste pas ce point.
d)-Imputabilité des pratiques au Groupe Expleo
718.-Il y a lieu de retenir, au titre du grief n° 2, la responsabilité de la société Expleo France SAS (anciennement dénommée Assystem France SAS, jusqu’au 13 février 2019) en tant qu’auteure des pratiques.
719.-En outre, la responsabilité de la société Expleo Group SAS (anciennement dénommée Assystem Technologies Group, jusqu’au 6 février 2019), sera retenue en tant que société mère détenant 100 % du capital d’Expleo France SAS576 depuis le 28 septembre 2017, et présumée, dès lors, avoir exercé une influence déterminante sur le comportement de celle-ci pendant la période de commission des pratiques.
720.-Les sociétés Expleo France SAS et Expleo Group SAS ne contestent pas ce point.
721.-Enfin, aux termes de la notification de griefs, la société Assystem SA, qui détenait 100 % du capital d’Assystem Technologies Groupe SAS avant d’en conférer le contrôle exclusif au groupe Ardian en septembre 2017 s’est vue imputer les pratiques litigieuses pour la période comprise entre le 2 mai 2011 et le 27 septembre 2017.
722.-Toutefois, les pratiques retenues dans la présente décision ne débutent qu’à compter du 6 février 2018, soit postérieurement à la cession, par Assystem SA, de sa détention du capital d’Assystem Technologies Groupe SAS. Dès lors, la société Assystem SA doit être mise hors de cause au titre du grief n° 2.
F.-SUR LES SANCTIONS PÉCUNIAIRES
1.-LES PRINCIPES RELATIFS A LA DETERMINATION DES SANCTIONS
a)-Le droit applicable
723.-Les dispositions du I de l’article L. 464-2 du code de commerce et de l’article 5 du règlement (CE) n° 1/2003 du Conseil du 16 décembre 2002577 habilitent l’Autorité à infliger une sanction pécuniaire aux entreprises et aux organismes qui se livrent à des pratiques anticoncurrentielles interdites par les articles L. 420-1 du code de commerce et 101 du TFUE.
724.-Le troisième alinéa du I de l’article L. 464-2 du code de commerce, prévoit que « [l]es sanctions pécuniaires sont appréciées au regard de la gravité et de la durée de l'infraction, de la situation de l'association d'entreprises ou de l'entreprise sanctionnée ou du groupe auquel l'entreprise appartient et de l'éventuelle réitération de pratiques prohibées par le présent titre. Elles sont déterminées individuellement pour chaque entreprise ou organisme sanctionné et de façon motivée pour chaque sanction ».
725.-Aux termes du quatrième alinéa du I de l’article L. 464-2 du code de commerce, « le montant maximum de la sanction est, pour une entreprise, de 10 % du montant du chiffre d'affaires mondial hors taxes le plus élevé réalisé au cours d'un des exercices clos depuis l'exercice précédant celui au cours duquel les pratiques ont été mises en œuvre. Si les comptes de l'entreprise concernée ont été consolidés ou combinés en vertu des textes applicables à sa forme sociale, le chiffre d'affaires pris en compte est celui figurant dans les comptes consolidés ou combinés de l'entreprise consolidante ou combinante ».
726.-L’Autorité apprécie les critères légaux de calcul des sanctions selon les modalités décrites dans son communiqué du 30 juillet 2021 relatif à la méthode de détermination des sanctions pécuniaires (ci-après le « communiqué sanctions »), à moins « [qu’]après une analyse globale des circonstances particulières de l’espèce, notamment au regard des caractéristiques des pratiques en cause, de l’activité des parties concernées et du contexte économique et juridique de l’affaire, ou pour des raisons d’intérêt général, [elle ne décide] de s’en écarter, en motivant ce choix »578.
b)-Sur l’application du communiqué sanctions du 30 juillet 2021
727.-Alten579, Bertrandt580 et le Groupe Expleo581 soutiennent que le communiqué sanctions ne doit pas s’appliquer, eu égard au principe de non-rétroactivité de la loi pénale plus sévère.
728.-Le Groupe Expleo582 ajoute que le communiqué sanctions devrait être écarté au regard du contexte juridique incertain relatif au fait que les pratiques en cause seraient analysées pour la première fois par l’Autorité. Elle considère qu’il existe en effet de nombreux précédents dans lesquels le caractère nouveau de la pratique et/ou l’adoption d’un comportement conforme à la jurisprudence applicable ont conduit la Commission et l’Autorité à imposer une sanction nulle ou symbolique583.
729.-Ces arguments seront rejetés.
Sur l’application du communiqué sanctions de 2021
730.-À titre liminaire, il convient de rappeler que la loi confère à l’Autorité un large pouvoir d’appréciation lui permettant de déterminer au cas par cas, en vertu de l’exigence légale d’individualisation et conformément au principe de proportionnalité, les sanctions pécuniaires qu’elle prononce en application des critères prévus, conformément au principe de légalité des délits et des peines, par le I de l’article L. 464-2 du code de commerce. Depuis la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques, ce plafond est établi, pour une entreprise, à « 10 % du montant du chiffre d’affaire mondial hors taxes le plus élevé réalisé au cours d’un des exercices clos depuis l’exercice précédant celui au cours duquel les pratiques ont été mises en œuvre ».
731.-L’ordonnance n° 2021-649 du 26 mai 2021 relative à la transposition de la directive (UE) 2019/1 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2018 visant à doter les autorités de concurrence des États membres des moyens de mettre en œuvre plus efficacement les règles de concurrence et à garantir le bon fonctionnement du marché intérieur (ci-après la « directive ECN+ »), a conduit à la modification des critères légaux prévus par le I de l’article L. 464-2 du code de commerce584. Ainsi, le critère de la durée de l’infraction a été explicitement introduit, tandis que le critère relatif à l’importance du dommage à l’économie a été supprimé. En revanche, le plafond de 10 % du chiffre d’affaires n’a pas été modifié. Dans ces conditions, et les critères légaux n’étant pas plus sévères que les anciens, l’article 6 de l’ordonnance a pu prévoir que ces modifications sont applicables aux procédures pour lesquelles des griefs ont été notifiés, en application de l’article
L. 463-2 du code de commerce, après l’entrée en vigueur de l’ordonnance.
732.-En l’espèce, dès lors que l’envoi par courrier de la notification de griefs aux sociétés mises en cause a eu lieu le 20 novembre 2023, ce sont les dispositions du I de l’article L. 464-2 du code de commerce dans leur version issue de l’ordonnance du 21 mai 2021 qui trouvent à s’appliquer conformément aux dispositions transitoires et finales de l’article 6 de cette ordonnance.
733.-Pour ce qui est de la mise en œuvre de lignes directrices relatives à l’application de sanctions, le juge de l’Union s’est prononcé, de longue date et de manière constante, sur l’application d’un communiqué sanctions à des pratiques antérieures à son adoption585.
734.-L’Autorité adopte, pour sa part, des communiqués relatifs à la méthode de détermination des sanctions. Afin de préciser la façon dont elle exerce son pouvoir de sanction en application des critères prévus par le I de l’article L. 464-2 du code de commerce tel que modifié par l’ordonnance n° 2021-649, l’Autorité a adopté, le 30 juillet 2021, le communiqué sanctions, en remplacement de l’ancien communiqué du 6 mai 2011, ce dernier étant devenu sans objet du fait de la suppression dans la loi des critères dont il explicitait l’application (notamment celui relatif à l’importance du dommage à l’économie). L’Autorité a ainsi logiquement appliqué le nouveau communiqué sanctions aux affaires dans lesquelles les nouveaux critères légaux étaient applicables, à savoir celles dans lesquelles les griefs ont été notifiés après l’entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2021-649 précitée586.
735.-Par ailleurs, il convient de relever que les communiqués sanctions adoptés par l’Autorité ne peuvent pas être considérés comme des textes à valeur normative, et donc comme une loi pénale. Dans le nouveau communiqué sanctions, l’Autorité indique à cet égard que celui-ci revêt le caractère de lignes directrices au sens de la jurisprudence administrative (voir paragraphe 12 dudit communiqué). En effet, ce nouveau communiqué, comme celui de 2011, se borne, dans un souci de transparence, à préciser par avance, et sous réserve de l’examen concret des circonstances propres à chaque cas d’espèce, les modalités concrètes selon lesquelles l’Autorité entend faire usage du pouvoir d’appréciation qui lui a été confié par la loi pour déterminer, en vertu des dispositions du I de l’article L. 464-2 du code de commerce, sous le contrôle des juridictions, les sanctions qu’elle impose587
736.-Toutefois, l’Autorité rappelle que les différentes étapes de cette méthode structurent la façon dont elle exerce son pouvoir d’appréciation, sans se substituer à l’examen spécifique auquel elle procède dans chaque affaire, en fonction des circonstances propres à celle-ci et conformément à l’exigence légale d’individualisation. Si le communiqué sanctions permet, entre autres, à tous les acteurs économiques d’anticiper les risques financiers associés à la commission d’infractions, il n’est ni possible, ni souhaitable, tant du point de vue de l’Autorité que dans l’intérêt des entreprises et des associations d’entreprises concernées, de concevoir un barème automatique permettant de prévoir le montant précis des sanctions encourues. Le montant applicable à chaque espèce donne lieu à une décision spécifique, qui tient compte de l’ensemble des motifs pertinents de la décision concernée et du contexte de l’affaire en cause588.
737.-De plus, le principe de non-rétroactivité de la loi pénale plus sévère ne s’oppose pas à ce que l’Autorité adapte sa méthode de calcul de sanction aux besoins de l’application efficace des règles de concurrence589.
738.-Il en résulte que l’application du communiqué sanctions n’est pas susceptible de porter atteinte au principe de non-rétroactivité de la loi pénale plus sévère.
Sur l’opportunité de s’écarter du communiqué sanctions
739.-Il ressort de la pratique décisionnelle de l’Autorité que lorsqu’elle s’est écartée du communiqué sanctions en raison d’une incertitude juridique sur la qualification des pratiques, il s’agissait de cas dans lesquels le droit et la jurisprudence applicables en la matière n’étaient pas clairement fixés, notamment s’agissant de pratiques tendant à l’interdiction de la revente en ligne590.
740.-Or, au cas présent, l’illicéité des pratiques sanctionnées est clairement établie par la jurisprudence s’agissant d’accords ayant pour objet la répartition de sources d’approvisionnement qui figurent parmi les ententes anticoncurrentielles expressément citées par les dispositions de l’article 101, paragraphe 1, sous c), du TFUE et de l’article
L. 420-1, 4° du code de commerce591. La circonstance que ces pratiques ont été, en l’espèce, mises en œuvre de manière isolée et non dans le cadre d’une entente plus globale ne saurait leur conférer un caractère inédit.
741.-En tout état de cause, il ressort d’une jurisprudence constante que le prétendu caractère inédit des pratiques, à supposer qu’il soit établi, ne justifie pas de sortir du communiqué sanctions ou d’imposer une sanction nulle ou symbolique à ce titre592.
742.-Par conséquent, aucune circonstance particulière invoquée par les parties ne justifie que l’Autorité s’écarte de la méthodologie décrite par le communiqué sanctions, en application de son point 6. Il convient donc d’apprécier les critères légaux selon les modalités pratiques qui y sont décrites.
743.-Conformément au point 19 du communiqué sanctions, seront successivement abordés la détermination du montant de base de la sanction pécuniaire, les éléments d’individualisation de ce montant et ses ajustements finaux.
2.-LA DETERMINATION DU MONTANT DE BASE DES SANCTIONS
a)-La valeur des ventes
Rappel des principes applicables
744.-Conformément au point 20 du communiqué sanctions, l’Autorité retient comme assiette du montant de base, pour le calcul de la sanction, la valeur des ventes réalisées par l’entreprise mise en cause pour les biens ou les services qui sont en relation avec l’infraction.
745.-Selon le point 22 du communiqué sanctions, la valeur à prendre en compte correspond à l’ensemble des catégories de produits ou de services en relation directe ou indirecte avec l’infraction vendues par l’entreprise ou par l’association d’entreprises concernée durant son dernier exercice comptable complet de participation à celle-ci. C’est la qualification de l’infraction faite par l’Autorité, au regard de son objet ou de ses effets, qui détermine ces catégories de produits ou services.
746.-En outre, sont prises en compte les ventes réalisées sur le marché concerné par l’infraction, sans qu’il soit besoin d’analyser si lesdites ventes ont été influencées par la pratique en cause. À cet égard, dans un arrêt Chronopost du 19 juillet 2018, la cour d’appel de Paris a considéré que « dès l’instant où une catégorie de produits ou de services est "en relation avec l’infraction", la valeur des ventes de cette catégorie de produits ou de services doit être prise en compte. (…) Il n’est, en revanche, fait aucune référence à une nécessaire affectation des ventes de ces catégories de produits ou services par l’infraction pour pouvoir prendre en compte leur vente »593. La Cour de cassation a confirmé cette position dans un arrêt du 22 septembre 2021, précisant que « les ventes en relation avec l’infraction, au sens du communiqué, sont les ventes réalisées sur le marché sur lequel les pratiques en cause (…) ont été établies, affectant ainsi le fonctionnement de la concurrence sur ce marché »594. Cette approche est également celle qu’adopte le juge de l’Union595 .
747.-Enfin, le communiqué indique au point 25 que « [d]ans les cas où elle considère que le dernier exercice comptable complet de participation à l’infraction ne constitue manifestement pas une référence représentative, l’Autorité retient un exercice qu’elle estime plus approprié, ou une moyenne d’exercices, en motivant ce choix ».
Application au grief n° 1
748.-Alten596 estime que la valeur des ventes devrait être limitée aux montants des dépenses de personnel concernées par les pratiques, à savoir celles correspondant aux business managers sur le marché amont des ressources humaines. En effet, la valeur des ventes d’Alten à l’aval serait 29 fois supérieure à celle à l’amont et disproportionnée par rapport à l’ampleur de la pratique sanctionnée597.
749.-En l’espèce, les pratiques retenues au titre du grief n° 1 concernent un gentlemen’s agreement entre Alten et Ausy/Randstad portant sur le recrutement de leur personnel respectif, plus particulièrement les business managers. Comme indiqué au paragraphe 515 il s’agit d’une entente de répartition des sources d’approvisionnement sur le marché amont des ressources humaines dans les secteurs de l’ingénierie et du conseil en technologies ainsi que des services informatiques.
750.-Conformément aux principes rappelés ci-dessus aux paragraphes 744 à 747, il y a donc lieu de retenir les dépenses de personnel correspondant à la catégorie des business manager au titre de la valeur des ventes.
751.-L’année de référence pour la détermination de la valeur des ventes est l’année 2015, année correspondant au dernier exercice comptable complet de participation à l’infraction.
752.-La valeur des ventes à prendre en compte pour la détermination du montant de base de la sanction au titre du grief n° 1 est ainsi de :
-[10-15] millions d’euros s’agissant d’Ausy/Randstad ;
-16,9 millions d’euros s’agissant d’Alten SA.
Application au grief n° 2
753.-Bertrandt et le Groupe Expleo estiment que, dans la mesure où les pratiques portent précisément sur le recrutement des ressources humaines, il convient de retenir comme valeur des ventes les frais de personnel sur le marché amont des ressources humaines. Elles précisent en outre que seules les dépenses de personnel au titre des services d’ingénierie réalisés pour Renault pour les projets visés dans la notification de griefs, à savoir
« [Confidentiel] » et « [Confidentiel] »598 devraient être prises en considération. Rien ne justifierait que les services d’instruction retiennent comme valeur des ventes la totalité du chiffre d’affaires réalisé pour l’ensemble du domaine automobile599.
754.-En l’espèce, les pratiques retenues au titre du grief n° 2 concernent un gentlemen’s agreement entre Bertrandt et le Groupe Expleo portant sur le recrutement de leur personnel respectif. Comme indiqué au paragraphe 617, il s’agit d’une entente de répartition des sources d’approvisionnement sur le marché amont des ressources humaines dans les secteurs de l’ingénierie et du conseil en technologies ainsi que des services informatiques.
755.-L’Autorité relève que l’accord litigieux n’est pas limité à une catégorie particulière de collaborateurs des entreprises mises en cause et intervient, comme indiqué au paragraphe 614, en dehors de tout contrat et/ou partenariat spécifique entre Bertrandt et le Groupe Expleo.
756.-Compte tenu de l’ensemble de ces éléments, les valeurs de référence à prendre en compte seront l’ensemble des dépenses de personnel du secteur automobile de Bertrandt SAS et Expleo France.
757.-L’année de référence pour la détermination de la valeur des ventes est l’année 2018, correspondant au dernier exercice comptable complet de participation à l’infraction.
758.-La valeur des ventes à prendre en compte pour la détermination du montant de base de la sanction au titre du grief n° 2 est ainsi de :
-s’agissant de Bertrandt : [10-90] millions d’euros ; et,
-s’agissant du Groupe Expleo : [15-25] millions d’euros.
b)-La gravité des pratiques
Rappel des principes applicables
759.-Aux termes du communiqué sanctions, l’Autorité apprécie la gravité des faits « de façon objective et concrète, au vu de l’ensemble des éléments pertinents du cas d’espèce »600. Pour ce faire, l’Autorité peut notamment tenir compte, en fonction de leur pertinence, des éléments énumérés de manière non limitative au point 28 du communiqué sanctions, parmi lesquels figurent la nature de l’infraction en cause et des faits retenus pour la caractériser, la nature du ou des paramètres de la concurrence concernés, la nature des activités, des secteurs ou des marchés en cause, ou encore les caractéristiques objectives de l’infraction (caractère secret ou non, degré de sophistication, connaissance du caractère infractionnel de la pratique, existence de mécanismes de police ou de mesures de représailles, etc.).
760.-En considération de la gravité des faits ainsi appréciée, le communiqué sanctions prévoit que l’Autorité retient au cas par cas, une proportion de la valeur des ventes réalisées comprise entre 0 % et 30 %.
761.-L’Autorité peut, dans les affaires d’abus de position dominante, ainsi que dans les affaires d’ententes horizontales les plus graves, telles que les accords de fixation de prix, de répartition de marché et de limitation de production, ajouter au montant de base, une somme comprise entre 15 % et 25 % de la valeur des ventes, afin de dissuader les entreprises de participer à de telles pratiques.
Application au cas d’espèce
762.-À titre liminaire, Alten estime que l’utilisation des mêmes déterminants de la sanction pécuniaire pour les trois griefs est erronée dès lors que ces derniers n’ont pas de lien entre eux. Elle précise à cet égard que lorsque l’Autorité notifie des griefs distincts, elle procède généralement à une analyse séparée de la gravité dans la mesure où la sanction est distincte pour chaque grief, ce qui correspond à la situation d’espèce601.
763.-Les mises en causes considèrent, ensuite, que ces pratiques sont exemptes de gravité dès lors qu’elles ne présentaient aucun caractère secret, ni de sophistication et qu’elles n’ont eu aucun effet réel ou potentiel sur les marchés concernés602.
764.-Le Groupe Expleo ajoute que l’accord de non-débauchage est dénué de toute gravité dès lors qu’il s’agit d’une pratique anticoncurrentielle inédite qui n’aurait, seule, jamais fait l’objet d’une condamnation. L’équipe juridique du Groupe Expleo aurait d’ailleurs estimé cette pratique comme étant licite603.
765.-Ces arguments ne sauraient prospérer.
766.-En premier lieu, les deux ententes sanctionnées en l’espèce présentent des caractéristiques communes. En effet, elles ont été mises en œuvre sur les marchés des ressources humaines dans les secteurs de l’ingénierie et du conseil en technologies, ainsi que des services informatiques. Par ailleurs, il s’agit, dans chaque cas, d’accords entre deux entreprises visant à ne pas se faire concurrence entre elles pour le recrutement de leur personnel respectif.
767.-Au regard de ces éléments, le critère de gravité des pratiques peut donc être examiné de manière commune pour l’ensemble des pratiques sanctionnées.
768.-En deuxième lieu, il ressort de la jurisprudence en la matière604 que, contrairement à ce que soutiennent les parties, le caractère non secret et non sophistiqué des pratiques ne saurait, en soi, constituer un facteur d’atténuation de la gravité des pratiques.
769.-En troisième lieu, si les parties font valoir l’absence d’effet significatif ou d’efficacité des pratiques pour voir atténuer leur gravité, il n’en demeure pas moins que le communiqué sanctions souligne la nature très grave des ententes horizontales par leur nature même605 et que, depuis la suppression du dommage à l’économie comme critère légal, les éventuels effets réels sur le marché ne sont pas mentionnés parmi les éléments pertinents d’appréciation de la gravité606.
770.-Or, en l’espèce, il a été démontré que les pratiques visées par les deux griefs constituent des ententes de répartition des sources d’approvisionnement qui relèvent de l’article 101, paragraphe 1, sous c), du TFUE, lesquelles sont considérées comme étant d’une particulière gravité au regard de leur objet, sans qu’il soit besoin d’en examiner les effets . À cet égard, la cour d’appel de Paris rappelle de manière constante que « les accords horizontaux de répartition de marché ou de clients comptent, par leur nature même, parmi les restrictions de concurrence les plus graves »607. Les arguments des parties sur l’absence d’effets des pratiques alléguées seront donc écartés.
771.-Par ailleurs, parmi les personnes susceptibles d’être affectées par les pratiques, figurent en premier lieu les travailleurs, dont les perspectives de mobilité et d’amélioration des conditions de travail vie ont pu être affectées.
772.-En dernier lieu et comme indiqué précédemment, les pratiques de non-débauchage ne sont pas des pratiques inédites.
773.-Il résulte de ce qui précède que les infractions reprochées aux entreprises mises en cause, qui portent sur des ententes horizontales de répartition des sources d’approvisionnement, se révèlent être d’une particulière gravité.
774.-L’Autorité retiendra en conséquence une proportion de la valeur des ventes de 16 %.
c)-La prise en compte de la durée
775.-Ainsi que l’énonce le communiqué sanctions aux points 32 et suivants, la durée de l’infraction a nécessairement un impact sur les conséquences potentielles de l’infraction sur le marché et joue donc un rôle significatif dans la détermination du montant de la sanction. C’est pourquoi, pour calculer le montant de base de la sanction pécuniaire, l’Autorité multiplie le montant déterminé par la valeur des ventes de chaque entreprise par le nombre d’années où cette entreprise a participé à l’infraction.
776.-Il ressort également du point 34 du communiqué sanctions que les périodes de moins d’une année sont prises en compte au prorata temporis de la durée de la participation de l’entreprise à l’infraction.
777.-En l’espèce, au titre du grief n° 1, les pratiques en cause ont été mises en œuvre de façon continue du 16 novembre 2007 jusqu’au 26 septembre 2016.
778.-Au titre du grief n° 2, le gentlemen’s agreement est caractérisé entre le 6 février et le 21 septembre 2018.
779.-Les coefficients de durée applicables sont présentés ci-après :

d)-Conclusions sur le montant de base des sanctions
780.-Il résulte de ce qui précède que l’Autorité prendra pour montant de base des sanctions les sommes présentées ci-dessous.

3.-L’INDIVIDUALISATION DES SANCTIONS
781.-Selon l’article L. 464-2 du code de commerce, les sanctions « sont déterminées individuellement pour chaque entreprise ou organisme sanctionné ».
782.-En fonction des éléments propres à chaque cas d’espèce, l’Autorité peut prendre en considération différentes circonstances atténuantes ou aggravantes caractérisant le comportement de chaque entreprise dans le cadre de sa participation à l’infraction, ainsi que d’autres éléments objectifs pertinents relatifs à sa situation individuelle. Cette prise en considération peut conduire à ajuster la sanction tant à la hausse qu’à la baisse.
783.-L’individualisation des éléments déterminant la sanction conduit à examiner, pour chacune des entreprises mises en cause, l’existence de circonstances atténuantes ou aggravantes et les autres éléments d’individualisation.
a)-Les circonstances atténuantes et/ou aggravantes
Rappel des principes applicables
784.-Le communiqué sanctions mentionne plusieurs circonstances qui peuvent conduire l’Autorité à réduire ou augmenter le montant de base de la sanction pécuniaire.
785.-Aux termes du point 37 du communiqué sanctions, l’Autorité peut tenir compte de certaines circonstances atténuantes et ainsi réduire le montant de base de la sanction pécuniaire, notamment, lorsque l’entreprise ou l’association d’entreprises apporte la preuve :
« - qu’elle a mis fin à l’infraction dès les premières interventions de l’Autorité, étant précisé que cette circonstance atténuante n’est pas applicable aux accords ou pratiques de nature secrète, en particulier les cartels ;
--qu’elle a durablement adopté un comportement concurrentiel, pour une part substantielle des produits ou services en cause, au point d’avoir perturbé, en tant que franc-tireur, le fonctionnement même de la pratique en cause ;
--qu’elle a été contrainte à participer à l’infraction ;
--qu’elle coopère effectivement avec l’Autorité, en allant au-delà des obligations auxquelles elle est juridiquement soumise et en dehors du champ d’application de la procédure de clémence ;
--que l’infraction a été autorisée, sollicitée ou encouragée par les autorités publiques ;
--qu’elle a mis en œuvre, en cours de procédure, des mesures de réparation bénéficiant spécifiquement aux victimes de la pratique, notamment le versement à ces dernières d’une indemnité due en exécution d’une transaction au sens de l’article 2044 du code civil ».
786.-Aux termes du point 38 du même communiqué, des circonstances aggravantes peuvent également être prises en compte pour augmenter le montant de base de la sanction pécuniaire, notamment lorsque :
« - l’entreprise ou l’association d’entreprises a joué un rôle de meneur ou d’incitateur, ou a joué un rôle particulier dans la conception ou la mise en œuvre de l’infraction ;
--l’entreprise ou l’association d’entreprises a pris des mesures en vue d’en contraindre d’autres à participer à l’infraction, ou a pris des mesures de rétorsion à leur encontre en vue de faire respecter celle- ci ;
--l’entreprise ou l’association d’entreprises jouit d’une capacité d’influence ou d’une autorité morale particulières, notamment parce qu’elle est chargée d’une mission de service public ».
Application au cas d’espèce
Sur le rôle de franc-tireur ayant perturbé le fonctionnement de l’entente
787.-Alten et Bertrandt soutiennent qu’elles ont continué à adopter un comportement concurrentiel pendant la période des pratiques alléguées au point de perturber le fonctionnement de l’entente en agissant comme « francs-tireurs »608.
788.-Aux termes du point 37 du communiqué sanctions, une réduction de la sanction peut être justifiée lorsque le comportement individuel d’une entreprise démontre qu’elle a
« durablement adopté un comportement concurrentiel, pour une part substantielle des produits ou services en cause, au point d’avoir perturbé, en tant que franc-tireur, le fonctionnement même de la pratique en cause ».
789.-La pratique décisionnelle609 et la jurisprudence nationales et de l’Union610 ont admis que cette circonstance pouvait conduire à une atténuation de la sanction individuelle. Pour pouvoir être prise en considération, cette circonstance atténuante doit être démontrée par l’entreprise qui l’allègue. S’il n’est pas exigé que l’intéressé se soit publiquement distancié de l’infraction, il n’est néanmoins pas suffisant qu’il ait violé, de façon ponctuelle ou partielle, la discipline commune611.
En ce qui concerne Alten
790.-S’appuyant sur plusieurs échanges de courriels tant entre les parties mises en cause qu’en interne au sein d’Alten, cette dernière soutient qu’elle a adopté de manière constante un comportement concurrentiel pendant la période de la pratique, de 2007 à 2016. Ces pièces feraient état d’actions de débauchage par Alten de business managers d’Ausy dont Ausy se serait plainte. Alten ajoute qu’il existe une stabilité dans ses recrutements de business managers en provenance d’Ausy tant pendant la période infractionnelle qu’après 2016.
791.-Toutefois, les pièces citées par Alten concernent uniquement des recrutements ponctuels de personnels d’Ausy par Alten : une personne est évoquée dans un courriel du 4 août 2011612, un collaborateur, K, et « 3 recrutements » en 2012 sont évoqués dans des courriels des 3 mai et 4 juin 2012613, (voir, ci-dessus les paragraphes 106 et 112 à 114), et enfin, une démarche de recrutement d’un directeur est évoquée en 2016614.
792.-Contrairement à ce qui est soutenu, il ressort des éléments du dossier qu’Alten n’a jamais tenté de remettre en cause sa participation aux pratiques litigieuses et qu’elle a tout au plus discuté du champ d’application du gentlemen’s agreement, comme indiqué ci-dessus au paragraphes 513 et suivants.
793.-Les éléments cités par Alten se bornent ainsi à évoquer des cas ponctuels de non-respect de l’entente et de rappels à l’ordre effectués par Ausy. Il ne peut donc en être déduit qu’ils traduisent un comportement concurrentiel d’Alten ayant perturbé le fonctionnement de l’entente.
794.-Il n’y a donc pas lieu de retenir de circonstance atténuante au titre d’un quelconque comportement de franc-tireur au bénéfice d’Alten.
En ce qui concerne Bertrandt
795.-Bertrandt soutient qu’elle doit bénéficier d’une circonstance atténuante du fait de l’adoption d’un comportement concurrentiel dès lors qu’elle a continué à recruter des collaborateurs du Groupe Expleo.
796.-Toutefois, elle n’avance aucun élément précis et se borne à faire état de l’absence d’effets de la pratique.
797.-Or, il ressort du dossier que Bertrandt a averti le Groupe Expleo lorsque certains employés du Groupe Expleo avaient candidaté chez elle (voir le paragraphe 164). Un « canal d’alerte mutuel » entre les deux parties avait même été mis en place (voir le paragraphe 162). Les directeurs généraux des deux entreprises ont, par ailleurs, régulièrement rappelé leur volonté de respecter l’accord litigieux (voir le paragraphe 164). Ainsi, il ne saurait être considéré que Bertrandt a adopté un comportement concurrentiel pour une part substantielle des ressources humaines en cause, conformément à la jurisprudence citée ci-dessus.
798.-Il n’y a donc pas lieu de retenir de circonstance atténuante au titre d’un quelconque comportement de franc-tireur au bénéfice de Bertrandt.
Sur le caractère nouveau et l’incertitude juridique des pratiques
799.-Expleo soutient que le caractère nouveau des pratiques et l’incertitude juridique devront être pris en compte au titre des circonstances atténuantes et conduire à réduire le montant de la sanction prononcée615.
800.-Un tel argument ne saurait toutefois prospérer. En effet, comme mentionné précédemment les pratiques en question ne sont pas nouvelles. Il n’y a donc pas lieu de retenir de circonstance atténuante au titre d’une supposée incertitude juridique.
801.-Il découle de l’ensemble de ce qui précède que l’Autorité ne retiendra aucune circonstance aggravante ou atténuante à l’égard des entreprises mises en cause au titre des griefs n° 1 et n° 2.
b)-Les autres éléments d’individualisation
Rappel des principes applicables
802.-Selon le point 39 du communiqué sanctions, après avoir procédé à l’ajustement individuel du montant de la sanction eu égard aux éventuelles circonstances aggravantes et atténuantes, l’Autorité peut ensuite adapter le montant obtenu à la hausse ou à la baisse, afin d’assurer le caractère à la fois dissuasif et proportionné de la sanction pécuniaire, « en prenant en considération d’autres éléments objectifs propres à la situation de l’entreprise ou à l’association d’entreprises concernée ».
803.-Parmi ces éléments figurent en particulier l’appartenance de l’entreprise à un groupe disposant d’une puissance économique ou de ressources globales puissantes.
804.-La circonstance qu’une entreprise dispose d’une puissance financière importante peut justifier que la sanction qui lui est infligée, en considération d’une ou plusieurs infractions données, soit plus élevée que si tel n’était pas le cas, afin d’assurer le caractère à la fois dissuasif et proportionné de la sanction pécuniaire616. À cet égard, la Cour de cassation a déjà eu l’occasion de préciser que l’efficacité de la lutte contre les pratiques anticoncurrentielles requiert que la sanction pécuniaire soit effectivement dissuasive – objectif également mis en exergue, s’agissant des sanctions pouvant être imposées en cas de violation de règles nationales de concurrence, par l’arrêt de la Cour européenne des droits de l’Homme du 27 septembre 2011, Menarini Diagnostics/Italie617 , au regard de la situation financière propre à chaque entreprise au moment où elle est sanctionnée618.
805.-La jurisprudence de l’Union considère également qu’une majoration sur ce fondement, en ce qu’elle se réfère à la situation financière globale de l’entreprise, est de nature à rendre la sanction pécuniaire d’autant plus dissuasive et proportionnée619.
806.-Enfin, la cour d’appel de Paris a précisé que le niveau du chiffre d’affaires total réalisé par la société mère et le rapport de la valeur des ventes de la filiale en relation avec l’infraction avec ce chiffre d’affaires total peuvent constituer, ensemble, un critère pertinent pour apprécier s’il y a lieu d’appliquer une telle majoration.
Application au cas d’espèce
807.-Alten conteste l’application d’un coefficient de majoration pour tenir compte de sa puissance économique. Elle avance notamment, que sa part de marché sur les marchés en cause est infime et que le montant de base de sa sanction est suffisamment élevé pour revêtir un caractère dissuasif620.
808.-En l’espèce, compte tenu du ratio de la valeur des ventes rapporté au chiffre d’affaires mondial d’Alten, l’application d’une telle majoration n’apparaît pas pertinente.
809.-De même, compte tenu du ratio de la valeur des ventes rapporté au chiffre d’affaires mondial d’Ausy/Randstad, l’application d’une telle majoration n’apparaît pas pertinente non plus.
810.-Par conséquent, l’Autorité ne retiendra aucune majoration au titre de la taille de l’entreprise.
c)-Sur les ajustements finaux
811.-Le communiqué sanctions précise au paragraphe 46 que l’Autorité vérifie que le montant de la sanction pécuniaire résultant de l’individualisation du montant de base n’excède pas le maximum légal, puis intègre une éventuelle exonération totale ou partielle accordée au titre de la clémence et ajuste enfin la sanction, s’il y a lieu, au regard de la capacité contributive de l’entreprise ou de l’association d’entreprises.
812.-En l’espèce, le montant individualisé des sanctions de chaque entreprise calculé selon la méthode exposée ci-dessus est présenté dans le tableau suivant.

La vérification du respect du seuil maximum légal
813.-Conformément au I de l’article L. 464-2 du code de commerce, il convient de vérifier que le montant de la sanction pécuniaire résultant de l’individualisation du montant de base n’excède pas le maximum légal de 10 % du chiffre d’affaires mondial hors taxes le plus élevé réalisé au cours d’un des exercices clos depuis l’exercice précédant celui au cours duquel les pratiques ont été mises en œuvre.
814.-Le tableau ci-dessous mentionne, pour chacune des entreprises concernées en l’espèce, le plafond légal de sanction applicable :

815.-Il ressort de ce qui précède que les sanctions infligées n’excèdent pas la proportion de 10 % du chiffre d’affaires mondial hors taxes réalisé par l’entreprise.
La prise en compte de la procédure de clémence
816.-S’il y a lieu, l’Autorité réduit le montant de la sanction pécuniaire pour tenir compte de l’exonération totale ou partielle accordée au titre de la mise en œuvre de la procédure de clémence régie par le IV de l’article L. 464-2 du code de commerce. Cette réduction est déterminée selon les modalités indiquées dans le communiqué de procédure pertinent et applicable621. En l’espèce, le groupe Ausy/Randstad a obtenu un avis de clémence conditionnel le 30 octobre 2018. Le communiqué de procédure du 3 avril 2015 relatif au programme de clémence français (ci-après le « communiqué clémence ») est ainsi applicable en l’espèce.
Rappel des principes applicables
817.-Le IV de l’article L. 464-2 du code de commerce subordonne la mise en œuvre de la procédure de clémence à deux conditions.
818.-En premier lieu, le demandeur de clémence qui a, avec d’autres, mis en œuvre une pratique prohibée par l’article L. 420-1 du code de commerce, doit contribuer à établir la réalité de cette pratique et à identifier ses auteurs, en apportant des éléments d’information dont l’Autorité ne disposait pas antérieurement. C’est en considération de ces éléments que, lorsqu’elle adopte une décision constatant l’existence d’une infraction et imposant une sanction à ses auteurs, l’Autorité peut accorder une exonération de sanction pécuniaire proportionnée à la contribution que le demandeur de clémence a apportée à l’établissement de l’infraction622.
819.-En second lieu, le demandeur de clémence doit se conformer aux conditions particulières énoncées dans l’avis de clémence. L’Autorité peut en effet soumettre, au cas par cas, c’est-à-dire dans chaque affaire dont elle a à connaître et pour chaque demande de clémence faite dans ce cadre, l’octroi de la clémence à des conditions particulières dont elle apprécie le respect au moment du prononcé de la décision. Selon le point 23 du communiqué clémence, il s’agit pour le demandeur de clémence d’apporter « une coopération véritable, totale, permanente et rapide dès le dépôt de sa demande et tout au long de la procédure d’enquête et d’instruction »623, coopération dont l’effectivité est déterminante pour l’obtention de l’exonération envisagée par l’avis de clémence. À cet égard, il ressort de la décision n° 11-D-17 du 8 décembre 2011 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur des lessives, que « la coopération attendue du demandeur n’est pas épuisée par le seul fait de présenter sa demande de clémence : elle reste nécessaire tout au long de la période séparant le dépôt de cette demande de la tenue de la séance du collège, en passant par les différentes étapes de la phase préliminaire d’enquête et de la procédure d’instruction »624.
Application au cas d’espèce
820.-Dans le cadre de la présente procédure, les sociétés Randstad N.V., Randstad France SAS, Ausy/Randstad et ses filiales ont obtenu le bénéfice conditionnel de la clémence par avis n° 18-AC-05 du 18 juillet 2018 aux fins d’une exonération totale des sanctions encourues.
821.-En l’espèce, il ressort du dossier que les sociétés Randstad ont respecté l’ensemble des obligations figurant dans l’avis de clémence.
822.-Ainsi, au vu des circonstances de l’espèce, l’Autorité accordera une exonération totale de sanction à Randstad Digital France SAS pour le grief n° 1.
4.-CONCLUSION SUR LE MONTANT FINAL DES SANCTIONS PECUNIAIRES
823.-L’ensemble des éléments présentés précédemment mènent aux montants finaux suivants :

G.-LES AUTRES SANCTIONS
824.-Aux termes de l’article L. 464-2 du code de commerce, l’Autorité peut également ordonner
« la publication, la diffusion ou l’affichage de sa décision ou d’un extrait de celle-ci selon les modalités qu’elle précise (…). Les frais sont supportés par la personne intéressée ».
825.-Afin d’appeler l’attention des acteurs économiques présents dans le secteur de l’ingénierie et du conseil en technologies, ainsi que des services informatiques, il y a lieu d’ordonner la publication, à frais partagés des entités sanctionnées et au prorata de leurs sanctions pécuniaires, dans l’édition papier et sur le site Internet du journal Le Monde Informatique, du résumé figurant à la page 2 et 3 de la présente décision.
826.-Cette publication interviendra dans un encadré en caractères noirs sur fond blanc de hauteur au moins égale à trois millimètres sous le titre suivant, en caractère gras de même taille :
« Décision de l’Autorité de la concurrence n° 25-D-03 du 11 juin 2025 relative à des pratiques mises en œuvre dans les secteurs de l’ingénierie et du conseil en technologies, ainsi que des services informatiques ». Elle pourra être suivie de la mention selon laquelle la décision a fait l’objet d’un recours devant la cour d’appel de Paris si un tel droit est exercé.
827.-En outre, les ententes concernées portant sur les ressources humaines dans des secteurs où la recherche de main-d’œuvre constitue un paramètre de concurrence pour les entreprises qui y sont actives, il y a lieu d’ordonner également la publication du résumé suivant sur un support numérique accessible à tous et, en particulier, aux ressources humaines actives dans les secteurs concernés par la présente décision. Le réseau social professionnel LinkedIn apparaît dans ce contexte adapté. Le résumé suivant sera suivi d’un lien renvoyant à la décision de l’Autorité publiée sur son site :
« Sanction de l’Autorité de la concurrence sur les marchés du travail dans les secteurs de l’ingénierie, du conseil en technologies et des services informatiques : [nom de l’entreprise] condamnée à [montant de la sanction] euros pour des pratiques de non-débauchage visant à s’interdire de solliciter et d‘embaucher leur personnel respectif ».
828.-Cette publication interviendra dans la langue de publication de la page institutionnelle LinkedIn des entités sanctionnées pendant une durée d’un mois. Elle pourra être suivie de la mention selon laquelle la décision a fait l’objet d’un recours devant la cour d’appel de Paris si un tel droit est exercé.
829.-Elles informeront le service de la procédure et de la documentation, de ces publications, dans un délai de trois mois à compter de la notification de la décision.
DÉCISION
Article 1er : Il est établi que les sociétés Randstad Digital France SAS (RCS Nanterre 352 905 707), anciennement Ausy SAS et Alten SA (RCS Nanterre 348 607 417), en tant qu’auteures, ont enfreint les dispositions des articles L. 420-1 du code de commerce et 101, paragraphe 1, du TFUE pour avoir, entre le 16 novembre 2007 et le 26 septembre 2016, conclu et mis en œuvre un accord de non-débauchage visant à ne pas se faire concurrence pour le recrutement de leur personnel respectif (business managers).
Article 2 : Il est établi que les sociétés suivantes ont enfreint les dispositions des articles
L. 420-1 du code de commerce et 101, paragraphe 1, du TFUE pour avoir, entre le 6 février 2018 et le 21 septembre 2018, conclu et mis en œuvre un accord de non-débauchage visant à ne pas se faire concurrence pour le recrutement de leur personnel respectif :
-Expleo France SAS (RCS Versailles 404 271 470, anciennement Assystem France SAS), en tant qu’auteure et Expleo Group SAS en tant que société mère de la société Expleo France SAS ; et
-Bertrandt SAS (RCS Versailles 422 868 851), en tant qu’auteure et Bertrandt France SAS (RCS Versailles 329 186 704) et Bertrandt AG (enregistrée à Stuttgart en Allemagne sous le numéro HRB 245259), en tant que sociétés mères de la société Bertrandt SAS.
Article 3 : La société Assystem SA (RCS Versailles 412 076 937) est mise hors de cause au titre du grief n° 2.
Article 4 : Les conditions d’une interdiction au titre de l’article 101 du TFUE ne sont pas réunies s’agissant des pratiques relatives à l’insertion de clauses de non-sollicitation de personnel dans différents contrats visés par le grief n° 2 notifié aux sociétés Bertrandt SAS (RCS Versailles 422 868 851), Bertrandt France SAS (RCS Versailles 329 186 704) et Bertrandt AG (enregistrée à Stuttgart en Allemagne sous le numéro HRB 245259) Expleo France SAS (RCS Versailles 404 271 470, anciennement Assystem France SAS), Assystem SA (RCS Versailles 412 076 937) et Expleo Group SAS (RCS Versailles 831 178 785).
Conformément à l’article 3, paragraphe 2, du règlement (CE) n° 1/2003 du 3 décembre 2002, ces pratiques ne peuvent pas non plus être interdites sur le fondement de l’article L. 420-1du code de commerce. Il n’y a donc pas lieu, en application de l’article 5 du règlement n° 1/2003, à poursuivre la procédure, que ce soit au titre du droit de l’Union ou du droit national.
Article 5 : Les conditions d’une interdiction au titre de l’article 101 du TFUE ne sont pas réunies s’agissant des pratiques visées par le grief n° 3. Les sociétés Atos France SAS (RCS Pontoise 408 024 719), Atos SE (RCS Pontoise 323 623 603), Randstad Digital France SAS (RCS Nanterre 352 905 707), anciennement Ausy SAS, Randstad France SAS (RCS Bobigny 350 988 051) et Randstad NV (enregistrée aux Pays-Bas sous le numéro CCI 33216172), sont donc mises hors de cause au titre du grief n° 3.
Conformément à l’article 3, paragraphe 2, du règlement (CE) n° 1/2003 du 3 décembre 2002, ces pratiques ne peuvent pas non plus être interdites sur le fondement de l’article L. 420-1du code de commerce. Il n’y a donc pas lieu, en application de l’article 5 du règlement n° 1/2003, à poursuivre la procédure, que ce soit au titre du droit de l’Union ou du droit national.
Article 6 : La société Randstad Digital France SAS est exonérée de sanction pécuniaire en application du IV de l’article L. 464-2 du code de commerce.
Article 7 : Au titre des pratiques visées aux articles 1 et 2, sont infligées les sanctions pécuniaires suivantes :
-Alten SA (RCS Nanterre 348 607 417) : 24 000 000 euros ;
-Expleo France SAS, solidairement avec Expleo Group SAS : 1 900 000 euros ; et,
-Bertrandt SAS, solidairement avec Bertrandt France SAS et Bertrandt AG : 3 600 000 euros.
Article 8 : Il est ordonné aux entreprises sanctionnées visées à l’article 7 de se conformer aux injonctions de publications prévues aux paragraphes 825 à 829 de la présente décision.
NOTES
1 Ce résumé a un caractère strictement informatif. Seuls font foi les motifs de la décision numérotés ci-après.
2 18/0004 AC, cotes VC 2 à 5 ; 18/0135 F, VNC 125 à 128 ; 18/0135 F : cotes 43 109 à 43 112.
3 D’autres pratiques dénoncées par le demandeur de clémence sont toujours en cours d’instruction.
4 18/0135 F, cotes 43 109 à 43 132, notamment 43 128 à 43 130.
5 18/0135 F, cote 2.
6 Ausy, Akka Technologies, Alten, Atran Technologies, Assystem, Astek, Société pour l’Information Industrielle (SII) et la principale organisation professionnelle des secteurs concernés (le Syntec Numérique, devenu Numeum), soit en tout, 14 sites.
7 Plusieurs recours ont été formés à l’encontre des ordonnances rendues par le juge des libertés et de la détention du TGI de Nanterre autorisant les opérations en cause mais également afin de contester le déroulement des opérations de visite et saisie. Voir, notamment, Cass. Crim, 13 septembre 2022, n° 21-83.852 et Cass. crim, 21 février 2023, n° 21-85.572 rejetant les recours d’Alten ainsi que Cass. crim, 10 mai 2023, n° 22-82.179 rejetant les recours d’Expleo.
8 Décision n° 19-D-09 du 22 mai 2019 relative à des pratiques d’obstruction mises en œuvre par le groupe Akka et contentieux relatif à cette décision : CA Paris, 26 mai 2020, RG n° 19/11880, Cass, com, 13 janvier 2021 n° C 20-16.849, décision du Conseil constitutionnel n° 2021-892 du 26 mars 2021, Cass. Com. 1er décembre 2021 n° C 20-16.849.
9 18/0135 F, cotes 43 447 à 43 473 et 43 485.
10 Étude Xerfi, Les services d’ingénierie, d’études et de conseils techniques, février 2022, 18/0135 F, cotes 34 737 à 35 116, notamment cote 34 767.
11 Étude Xerfi, Les services d’ingénierie, d’études et de conseils techniques, février 2022, 18/0135 F, cote 34 767.
12 Étude Xerfi, Les services d’ingénierie, d’études et de conseils techniques, février 2022, 18/0135 F, cotes 34 767 et 34 770.
13 Étude Xerfi, Les services d’ingénierie, d’études et de conseils techniques, février 2022, 18/0135 F, cote 34 765.
14 Un vocable couramment utilisé pour désigner ce secteur est le secteur de « l’IT », pour, en français, « technologies de l’information ».
15 Étude Xerfi, Les services numériques, août 2022, 18/0135 F, cotes 35 411 à 35 718, notamment 35 448 à
35 460.
16 Étude Xerfi, Les services numériques, août 2022, 18/0135 F, cotes 35 434 et 35 452.
17 Étude Xerfi, Les services numériques, août 2022, 18/0135 F, cote 35 516.
18 Étude Xerfi, Les services numériques, août 2022, 18/0135 F, cotes 35 411 et suivantes.
19 Étude Xerfi, Les services numériques, août 2022, 18/0135 F, cote 35 514, L’étude relève que « [l]e tissu sectoriel se compose à plus de 80 % d’indépendants intervenant avant tout auprès de TPE et PME. Les 4 premières ESN ont toutefois capté à elles seules près de 23 % des revenus de notre panel en 2020. Ce chiffre montait même à 40 %, à cette date, pour les 20 premières sociétés opérant dans les services numériques. Les majors monopolisent en effet les projets des grands comptes ».
20 Étude Xerfi, Les services numériques, août 2022, 18/0135 F, cote 35 523.
21 Étude Xerfi, Les services d’ingénierie, d’études et de conseils techniques, juin 2021, 18/0135 F, cote 34 837.
22 Étude Xerfi, Les services d'ingénierie, d'études et de conseils techniques, juin 2021, 18/0135 F, cote 34 836, relève que « plus de 70 % des sociétés du panel Xerfi employaient moins de 10 personnes en 2019. Ces petits acteurs sont pour la plupart des bureaux d'études indépendants intervenant dans l'ingénierie de la construction. Ces cabinets se caractérisent par leur empreinte locale et leur spécialisation sur un sujet (comme la thermique, le béton, la VRD, etc.). Ils opèrent par ailleurs régulièrement en qualité de prestataire auprès des leaders du marché. Malgré leur domination numérique, ces acteurs ne génèrent qu'une faible partie des revenus (8,7 %) de l'échantillon Xerfi ».
23 Étude Xerfi, Les services d'ingénierie, d'études et de conseils techniques, juin 2021, 18/0135 F, cote 34 849.
24 Randstad N.V. est une société de droit néerlandais enregistrée au Pays-Bas sous le numéro 33216172 (KvK nummer), sise Diemermere 25, 1112 TC Diemen, Pays-Bas. Elle était dénommée initialement, au moment du dépôt de la demande de clémence, Randstad Holding N.V. Cf. 18/0135 F, cotes VC 18/0004 AC 1 617 et 1 618, VNC 18/0135 F 1 438 et 1 439.
25 18/0135 F, cote VC 29 942, VNC 31 719.
26 CA non consolidé. Cf. Étude Xerfi, Les services d’ingénierie, d’études et de conseils techniques, février 2022, 18/0135 F, cote 34 920.
27 18/0135 F, cote 29 906.
28 18/0135 F, cote 29 907.
29 18/0135 F, cote 29 907.
30 18/0135 F, cotes 37 604 et 37 605.
31 Ausy SAS était initialement Ausy SA, avant un changement de forme sociale effectif le 15 mai 2017. Cf. 18/0135 F, cotes 37 650 et 43 074.
32 18/0135 F, cotes 31 472 et 31 473 ; 31 475.
33 18/0135 F, cote 31 474.
34 18/0135 F, cote 31 475.
35 Alten SA détient 100 % du capital d’Alten Sud Ouest SAS et d’Alten Systèmes d’information et réseaux SAS, 18/0135 F, cote VC 31 581, VNC 33 072.
36 Atos, Rapport intégré 2020, 18/0135 F, cotes 38 651 à 38 741. Voir également Rapport intégré 2021, 18/0135 F, cotes 43 170 à 43 250.
37 18/0135 F, cotes 28 813 à 28 824. Voir également le site internet d’Atos : https://atos.net/fr/profil.
38 18/0135 F, cotes 28 801 à 29 310, notamment cote 28 841.
39 18/0135 F, cotes 28 136 à 28 142. Voir également le site internet de Bertrandt : https://www.bertrandt.com/en/.
40 CA non consolidé. Voir Étude Xerfi, Les services d’ingénierie, d’études et de conseils techniques, Conjoncture et prévisions - Étude annuelle : tendances et concurrence - Performances financières des entreprises, février 2022, 18/0135 F, cote 34 923.
41 18/0135 F, cotes 28 136 à 28 142.
42 18/0135 F, cote 43 477.
43 18/0135 F, cote 28 153.
44 18/0135 F, cote 28 150.
45 Les dénominations du groupe ont évolué à la suite de la prise de contrôle par le fonds Ardian en 2017 :
« Assystem Technologies a changé de dénomination le 6 février 2019 pour devenir "Expleo" (Assystem Technologies Groupe SAS est devenu Expleo Group SAS) », 18/0135 F, cote 31 287.
46 Voir la décision de la Commission M.8548 du 18 août 2017, Ardian/GPSBranch of Assystem Group.
47 Cf. Étude Xerfi, Les services d’ingénierie, d’études et de conseils techniques, juin 2021, 18/0135 F cote 34 873. Ces sociétés sont détenues à hauteur de 58,69 % par Ardian LBO Found IV B (société contrôlante selon Expleo), Assystem SA (38,5 %) et HDI SAS (1,04 %).
48 18/0135 F, cotes 31 287 et cote VC 31 311.
49 18/0135 F, cotes 31 287 et 31 288.
50 18/0135 F, cotes 43 109 à 43 132, notamment 43 128 à 43 130.
51 Étude Xerfi, Les services d’ingénierie, d’études et de conseils techniques, février 2022, 18/0135 F, cotes 34 737 à 35 116, notamment cote 34 743.
52 Étude Xerfi, Les services numériques, août 2022, 18/0135 F, cote 35 423.
53 18/0135 F, cote 34 689.
54 18/0135 F, cote 31 871.
55 18/0135 F, cote 34 687.
56 18/0135 F, cote 31 871.
57 18/0135 F, cote 32 402.
58 18/0135 F, cote 29 907.
59 Étude Xerfi, Les services d'ingenierie, d’études et de conseils techniques, juin 2021, 18/0135 F, cote 34 811.
60 Étude Xerfi, Les services d'ingenierie, d’études et de conseils techniques, juin 2021, 18/0135 F, cote 34 811.
61 Étude Xerfi, Les services numériques, août 2022, 18/0135 F, cote 35 423.
62 « La politique RH essaie de retenir au mieux les collaborateurs. On sait que nos collaborateurs sont notre savoir-faire. On met en place pas mal d’actions, on travaille la marque employeur, des évènements pour retenir les collaborateurs. Cela passe par des revalorisations salariales (…) » (M. X, directeur général de Bertrandt SAS, dans le secteur automobile – 18/0135 F, cote 34 689).
63 « Pour limiter les départs : on joue sur la qualité : "Great place to work", cours de sport, cours de cuisine etc. Montrer aux consultants qu’on est une boîte sympa. Notre but est de fidéliser les salariés, surtout qu’ils ne partent pas. Depuis 5 ans, on est ainsi labellisé "Great place to work" : c’est une enquête satisfaction anonyme, de 82 questions posées à l’ensemble des salariés. L’idée est ensuite qu’il y ait des propositions d’amélioration faite de la part des salariés volontaires. La direction prend en compte ces propositions tous les ans. Chaque année le PDG répond à l’intégralité des questions des salariés en présentiel. » (M. B, Directeur Sud-Ouest, Mme C, Responsable recrutement Sud-Ouest, SII, SCT active dans le secteur aéronautique et défense – 18/0135 F, cote 32 190).
64 Notamment au regard de l’activité réellement exercée par l’employeur et de la nature de l’emploi occupé par le salarié. Constitue un intérêt légitime le fait pour une entreprise de vouloir défendre sa clientèle et sa spécialité. Il a été jugé, par exemple, qu'une clause est valable si elle a pour objet de protéger un savoir-faire spécifique acquis au sein de l'entreprise (Cass. soc., 14 févr. 1995, n° 93-43.898 : JurisData n° 1995-000624). Est également valable toute clause visant à prévenir un possible détournement de consommateurs ou d'acheteurs (Cass. soc., 1er mars 1995, n° 93-42.754).
65 A été jugée valable une clause interdisant pendant deux ans à un salarié, électricien dans un grand magasin d'électroménager, de s'intéresser directement ou indirectement à toute entreprise ayant en tout ou partie une activité similaire (Cass. soc., 27 nov. 2002, n° 00-45.360).
66 À savoir une clause prenant en compte les spécificités de l'emploi, c'est-à-dire la qualification, le savoir-faire, la technicité ou la spécialisation qu'il requiert (Cass. soc., 27 juin 2001, n° 99-44.894).
67 Cass. soc., 10 juill. 2002, n° 00-45.135.
68 18/0135 F, cotes 34 691, 32 171 et 31 871.
69 Les clauses de non-sollicitation sont alors généralement stipulées en complément de clauses de non- concurrence, les deux types de clauses visant à protéger au moins temporairement l’acquéreur de la concurrence du cédant sur l’activité ou l’entreprise cédée, et sa valeur économique.
70 18/0135 F, cote 34 697.
71 Exemple de clause-type dans des modèles de contrats concernant des relations clients-fournisseurs :
« Chacune des Parties renonce à engager ou à faire travailler, directement ou par personne interposée, tout salarié de l'autre Partie, sans accord exprès et préalable de cette dernière ». 18/0135 F, cotes 36 900 à 37 061 ; voir en particulier l’étude comparative des services d’instructions aux cotes 43 297 à 43 299.
72 18/0135 F, cote 32 152.
73 Voir, notamment, 18/0135 F, cotes 32 040 à 32 042.
74 Certains praticiens ou commentateurs utilisent l’expression de « débauchage actif » ou encore de « do not call » en terminologie anglo-saxonne.
75 Par exemple, le « débauchage passif », dans ce cas, la terminologie habituelle de clause de « non- sollicitation » est inadéquate.
76 Cass. com. 27 mai 2021, n° 18-23.261, paragraphes 10 et suivants.
77 Voir récemment cour d’appel de Versailles, ch. 12, 12 mai 2022, n° 20/04926. Cas d’une clause réciproque dans une relation verticale client-fournisseur (entreprises non concurrentes entre elles) ; les pièces réunies au dossier montrant une recherche d’emploi par le salarié concerné, la cour a jugé : « [i]l s'en déduit que la salariée recherchait activement un nouvel emploi bien avant sa démission du 28 juin 2015. Il est donc plausible qu'elle s'en soit ouvert à la société Cap nutrition sans que celle-ci ne la sollicite. La société AWE succombe à rapporter la preuve que la société Cap nutrition a sollicité le recrutement de Mme G B en contravention de la clause de non sollicitation. […] La cour infirmera le jugement en ce qu'il a condamné la société Cap nutrition à la somme de 15.000 euros pour violation de la clause de non sollicitation. »
78 Cass. com., 11 juillet 2006, n° 04-20.438.
79 Cass. com., 27 mai 2021, n° 18-23.261 et 18-23.699.
80 Voir, sur ce point, Commission européenne, DG COMP, Competition policy brief n° 2/2024, Antitrust in labour markets, mai 2024.
81 Cass. com., 5 février 1991, n° 88-16.214.
82 Cass. com., 9 mars 1999 n° 97-12.009. Voir également Cass. com, 8 juillet 2020, n° 18-17.169, Cass. com., 23 juin 2021, n° 19-21.911 F-D, Sté Sud Ouest déchets industriels c/ Sté Eiffage-Energie systèmes - Clemessy services et Cass. com., 13 avril 2023, n° 22-12.808.
83 18/0135 F, cotes 32 402, 32 403 et 31 872.
84 18/0135 F, cotes 29 909 et 29 910, notamment 29 909. Voir également cote 31 476.
85 18/0135 F, cote 31 476.
86 18/0135 F, cotes 43 109 à 43 132, notamment 43 129 à 43 130.
87 18/0135 F, cote 43 129.
88 18/0135 F, cotes 43 128 et 43 129.
89 18/0135 F, cotes 29 909 à 29 913, notamment 29 909.
90 18/0135 F, cotes 43 151 à 43 156, notamment 43 155 et cotes 43 134 à 43 137, notamment 43 136.
91 18/0135 F, cotes 29 909 à 29 913, notamment 29 910.
92 18/0135 F, cote 43 155.
93 18/0135 F, cote 29 912.
94 18/0135 F, cote 29 912.
95 18/0135 F, cote 43 140.
96 18/0135 F, cotes 43 141 et 43 159.
97 18/0135 F, cotes 43 129, 43 133 et 43 159.
98 18/0135 F, cotes 43 129 et 43 133.
99 18/0135 F, cotes 43 133, 43 132, 43 144, 43 166 et 43 162.
100 18/0135 F, cotes 43 143 et 43 161.
101 18/0135 F, cotes 43 143 et 43 161.
102 18/0135 F, cotes 43 129 et 43 133.
103 18/0135 F, cotes 43 301 et 43 302.
104 18/0135 F, cotes 43 129 et 43 133.
105 18/0135 F, cote 46 366.
106 18/0135 F, cotes 30 396, 30 399, 30 405, 30 408.
107 18/0135 F, cotes 30 396, 30 399, 30 405, 30 408.
108 18/0135 F, cotes 30 398, 30 405 et 30 408.
109 18/0135 F, cote 46 366.
110 18/0135 F, cotes 30 398 et 30 404.
111 18/0135 F, cote 30 404.
112 18/0135 F, cotes 43 146 et 43 164.
113 18/0135 F, cotes 43 145 et 43 163.
114 18/0135 F, cote 43 145.
115 18/0135 F, cote 46 366.
116 18/0135 F, cotes 30 401 et 43 149.
117 18/0135F, cote 46 366.
118 18/0135 F, cote 30 398.
119 18/0135 F, cotes 43 147, 43 165 et 43 167.
120 18/0135 F, cote 43 147.
121 18/0135 F, cote 46 366.
122 18/0135 F, cote 30 414.
123 18/0135 F, cote 30 414.
124 18/0135 F, cotes 43 129 et 43 133.
125 18/0135 F, cote 31 477.
126 18/0135 F, cote 30 394.
127 18/0135 F, cote 31 874.
128 18/0135 F, cotes 43 150, 43 158 et 43 169 ; 29 911 et 29 957 ; 30 430 et 31 477.
129 18/0135 F, cote 29 957.
130 18/0135 F, cote 46 366.
131 18/0135 F, cote 30 430.
132 18/0135 F, cote 31 477.
133 18/0135 F, cotes 28 136 à 28 155, notamment 28 142 à 28 147.
134 18/0135 F, cote 30 433.
135 18/0135 F, cotes 31 287 à 31 309, notamment 31 288. Voir également 18/0135 F, cote 28 142.
136 Un contrat vie série est un contrat qui vise à assurer le suivi de la production série à toutes les étapes industrielles et un suivi qualité produit des productions pour certains produits.
137 18/0135 F, cotes 34 687 et 34 688.
138 18/0135 F, cotes 28 141 à 28 147, notamment cote 28 144.
139 18/0135 F, cotes 30 211 à 30 241. Bertrandt a été retenu par le client final Renault pour des prestations de conception, d’industrialisation et de maintien opérationnel de véhicules automobiles de tests « [Confidentiel] », et a conclu un contrat de sous-traitance avec Assystem France (actuellement Expleo France) pour la réalisation de certaines de ces prestations (Bertrandt « rang 1 », Assystem (actuellement Expleo) en « rang 2 »). Ce contrat, intitulé « contrat de sous-traitance dans le cadre du projet « [Confidentiel] » a été plus précisément conclu entre quatre personnes morales des groupes Bertrandt et Assystem (actuellement Expleo) : Bertrandt SAS et Bertrandt engineering technologies Romania, d’une part ; Assystem France SAS (actuellement Expleo France) et Assystem Romania, d’autre part. Il a été signé le 28 juillet 2017, pour une entrée en vigueur le 1er janvier 2016 et un terme au 31 décembre 2018. Ce contrat ne prévoit pas de clause de non-sollicitation.
140 18/0135 F, cotes 28 141 à 28 147 et 29 510 à 29 527.
141 Bertrandt a indiqué : « [l]e 1er contrat "[Confidentiel]" pour la gestion et le pilotage des [Confidentiel], a été établi en 2011 et validé signé en janvier 2012, avec une exécution des activités selon le cœur de compétences de chacune des sociétés. Ledit marché a été exécuté entre le 2 mai et le 23 décembre 2011 » (18/0135 F cote 28 142).
142 18/0135 F, cotes 28 141 à 28 147 et 29 537 à 29 557.
143 Bertrandt a indiqué : « [e]n 2012, Bertrandt SAS et Assystem France [actuellement Expleo France] ont signé une nouvelle convention pour exécuter un nouveau marché [Confidentiel] projet [Confidentiel]sur la période du 1er janvier au 21 décembre 2012 » (18/0135 F cote 28 142).
144 18/0135 F, cotes 28 141 à 28 147 et 29 558 à 29 575.
145 18/0135 F, cote 28 142.
146 18/0135 F, cotes 28 142 et 28 143 ; 37 582 à 37 584.
147 18/0135 F, cote 29 523.
148 18/0135 F, cotes 29 549 et 29 570.
149 18/0135 F, cote 28 143.
150 18/0135 F, cotes 29 577 à 29 581.
151 18/0135 F, cotes 28 398 à 28 413, notamment 28 408.
152 18/0135 F, cotes 28 364 à 28 396, notamment 28 396.
153 18/0135 F, cotes 28 334 à 28 362, notamment 28 361.
154 18/0135 F, cotes 37 582 à 37 584.
155 18/0135 F, cotes 28 673 à 28 714 ; 28 631 à 28 672.
156 18/0135 F, cotes 37 582 à 37 584.
157 18/0135 F, cote 28 649.
158 18/0135 F, cote 28 147 pour Bertrandt ; cote 31 296 pour le Groupe Expleo : « A la meilleure connaissance d’Expleo, aucune indemnisation n’a été versée en application d’une clause de non-sollicitation de personnel entre Bertrandt et Expleo par le passé ».
159 18/0135 F, cotes 30 438 à 30 441, notamment 30 439.
160 18/0135 F, cote 30 273.
161 Listes de diffusions intitulées : « V_FR_Comex <[email protected]> », « V_FR_responsables- departements<[email protected]< »,« V_FR_responsables-activites
<[email protected]> » et « V_FR_Recrutement <[email protected]> ».
162 18/0135 F, cotes 30 205, 30 463 et 30 464, 30 484, 30 492 et 30 493, 30 499, 30 512, 30 518, 30 521 et 30 522.
163 18/0135 F, cotes 29 847, 29 851 et 29 860 et 29 861.
164 18/0135 F, cotes 29 776 et 29 848.
165 18/0135 F, cote 29 772.
166 18/0135 F, cotes 29 785 et 29 798.
167 18/0135 F, cote 29 798.
168 18/0135 F, cotes 29 804, 29 852 et 29 857.
169 18/0135 F, cotes 29 804 et 29 857.
170 18/0135 F, cote 30 200.
171 18/0135 F, cotes 29 778, 29 781, 29 811, 29 853, 29 856, 29 866, 30 436, 30 487 et 30 525.
172 18/0135 F, cote 30 436.
173 18/0135 F, cote 30 247.
174 18/0135 F, cote 30 247.
175 18/0135 F, cotes 29 778, 29 779, 29 780, 29 811, 29 849, 29 853, 29854, 29 855, 29 866, 30 486, 30 524 et 30 525.
176 18/0135 F, cotes 29 779, 29 854, 30 524 et 31 325.
177 18/0135 F, cotes 29 784 et 29 801.
178 18/0135 F, cotes 30 267 et 31 328.
179 18/0135 F, cotes 31 300 et 31 301.
180 18/0135 F, cotes 28 797, 29 313, 29 327, 29 335, 29 716, 29 724, 30 996, 32 418.
181 18/0135 F, cotes 28 797, 29 313, 29 327, 29 335, 29 716, 29 724, 30 996, 32 418.
182 18/0135 F, cote 31 301.
183 18/0135 F, cotes 29 763, 29 766, 29 808, 29 812, 29 867.
184 18/0135 F, cote 31 300.
185 18/0135 F, cote 31 300.
186 18/0135 F, cotes 29 759, 29 764, 29 809, 29 864 et 30 245.
187 18/0135 F, cote 30 244.
188 18/0135 F, cote 30 244.
189 18/0135 F, cotes 29 326 à 29 327
190 18/0135 F, cotes 31 300 à 31 303.
191 18/0135 F, cote 30 142.
192 18/0135 F, cote 30 141.
193 18/0135 F, cote 30 141.
194 18/0135 F, cote 30 141.
195 18/0135 F, cote 30 521.
196 18/0135 F, cote 30 521.
197 18/0135 F, cote 30 514.
198 18/0135 F, cotes 30 461, 30 490 et 30 516.
199 18/0135 F, cotes 30 203, 30 461, 30 482, 30 490, 30 497, 30 510, 30 516, 31 316.
200 18/0135 F, cotes 30 204, 30 462, 30 483, 30 491, 30 498, 30 511, 30 517, 31 316 et 31 317.
201 18/0135 F, cotes 30 489 et 30 516.
202 18/0135 F, cote 30 489.
203 18/0135 F, cotes 29 375 et 29 376, 30 202 et 30 203, 30 481, 30 496 et 30 497, 30 509 et 30 510, 31 315.
204 18/0135 F, cote 30 481.
205 18/0135 F, cote 30 509.
206 18/0135 F, cote 30 509.
207 18/0135 F, cote 30 496.
208 18/0135 F, cote 30 496.
209 18/0135 F, cote 30 495.
210 18/0135 F, cote 30 495.
211 18/0135 F, cote 31 313.
212 18/0135 F, cote 30 202.
213 18/0135 F, cotes 30 449, 30 452, 30 466 et 30 470.
214 18/0135 F, cote 30 452.
215 18/0135 F, cotes 30 466 et 30 470.
216 18/0135 F, cote 30 466.
217 18/0135 F, cotes 29 883, 29 889 et 29 890, 30 252, 30 265, 30 270 et 30 271, 31 323.
218 18/0135 F, cotes 29 882, 29 889, 29 891, 30 251, 30 264 et 30 265, 30 270, 31 322.
219 18/0135 F, cotes 29 882, 29 888, 29 891, 30 251, 30 264, 30 269, 31 322.
220 18/0135 F, cotes 29 888, 30 251, 30 264, 30 269, 31 322.
221 18/0135 F, cote 30 502.
222 18/0135 F, cote 30 449.
223 18/0135 F, cotes 29 371 et 29 372, 29 886 et 29 887, 30 249 et 30 250, 30 263, 31 320 et 31 321.
224 18/0135 F, cotes 30 249 et 31 320.
225 18/0135 F, cote 30 507.
226 18/0135 F, cotes 30 506 et 30 507.
227 18/0135 F, cote 30 506.
228 18/0135 F, cotes 30 505 et 30 506.
229 18/0135 F, cote 30 505.
230 18/0135 F, cote 30 505.
231 18/0135 F, cote 30 505.
232 18/0135 F, cote 34 688.
233 18/0135 F, cote 34 688.
234 18/0135 F, cote 34 692.
235 18/0135 F, cote 34 688.
236 18/0135 F, cotes 34 694 et 34 695.
237 18/0135 F, cote 34 691.
238 18/0135 F, cote 34 692.
239 18/0135 F, cote 34 691.
240 18/0135 F, cote 29 759 et cotes 29 324 à 29 330, notamment 29 330.
241 18/0135 F, cotes 29 324 à 29 330, notamment 29 330. Voir également 18/0135 F, cote 34 691.
242 18/0135 F, cote 34 695.
243 18/0135 F, cote 34 696.
244 18/0135 F, cote 34 696.
245 18/0135 F, cotes 31 280 à 31 309, notamment 31 296.
246 18/0135 F, cotes 31 280 à 31 309, notamment 31 296, 31 297 et 31 298.
247 18/0135 F, cote 31 297.
248 18/0135 F, cote 31 296.
249 18/0135 F, cotes 31 280 à 31 309, notamment 31 297 et 31 298.
250 18/0135 F, cotes 31 280 à 31 309, notamment 31 297 et 31 298.
251 18/0135 F, cote 31 298.
252 18/0135 F, cote 31 297
253 18/0135 F, cote 31 298.
254 18/0135 F, cotes 29 924 et 29 925.
255 Ausy SA est devenue Ausy SAS par changement de forme sociale effectif le 15 mai 2017 (voir 18/0135 F, cote 43 074).
256 18/0135 F, cotes 30 003 et 30 004, cote VC 44 526, VNC 44 593.
257 18/0135 F, cotes 30 003 et 30 004.
258 18/0135 F, cotes 30 003 et 30 004.
259 18/0135 F, cote 29 928.
260 18/0135 F, cotes 30 002, 30 003 et 44 567.
261 18/0135 F, cote 29 926.
262 18/0135 F, cotes 29 129 à 29 145, notamment 29 142 et 45 022.
263 18/0135 F, cotes 30 004 et 30 005.
264 18/0135 F, cote 28 848.
265 18/0135 F, cotes 30 005 et 28 969 à 28 989, notamment 28 975.
266 18/0135 F, cotes 30 005 et 30 006.
267 18/0135 F, cotes 30 152 et 30 160.
268 18/0135 F, cote 30 152.
269 18/0135 F, cotes 29 929 et 29 930.
270 18/0135 F, cote 29 929.
271 18/0135 F, cote 30 010.
272 18/0135 F, cote 30 010.
273 18/0135 F, cote 30 009.
274 18/0135 F, cote 30 009.
275 18/0135 F, cote 30 008.
276 18/0135 F, cote 29 938.
277 18/0135 F, cote 30 067.
278 18/0135 F, cote 30 066.
279 18/0135 F, cote 30 066.
280 18/0135 F, cote 29 939.
281 18/0135 F, cote 30 743.
282 18/0135 F, cote 30 342.
283 18/0135 F, cote 30 342.
284 18/0135 F, cote 30 041.
285 18/0135 F, cotes 30 152 et 30 153.
286 18/0135 F, cote 30 182.
287 18/0135 F, cote 30 317.
288 18/0135 F, cote 30 316.
289 18/0135 F, cotes 30 315 et 30 316.
290 18/0135 F, cotes 30 315, 30 307 et 30 306.
291 18/0135 F, cote 30 306.
292 18/0135 F, cotes 30 305 et 30 306.
293 18/0135 F, cote 30 305.
294 18/0135 F, cote 28 852.
295 18/0135 F, cote 32 153.
296 18/0135 F, cotes 30 074 et 30 075, 30 077.
297 18/0135 F, cotes 30 074 et 30 771.
298 18/0135 F, cote 30 771.
299 18/0135 F, cote 30 073.
300 18/0135 F, cotes 30 740, 30 771 et 30 748.
301 18/0135 F, cote 30 771.
302 18/0135 F, cotes 30 740 et 30 748.
303 18/0135 F, cotes 30 070 et 30 748.
304 18/0135 F, cotes 32 150 à 32 154, notamment 32 153.
305 18/0135 F, cote 29 939.
306 18/0135 F, cote 30 335.
307 18/0135 F, cotes 30 169 à 30 170.
308 18/0135 F, cote 30 169.
309 18/0135 F, cote 30 169.
310 18/0135 F, cote 30 054.
311 18/0135 F, cote 30 332.
312 18/0135 F, cote 30 302.
313 18/0135 F, cote 30 332.
314 18/0135 F, cote 30 287.
315 18/0135 F, cotes 29 937 et 29 938.
316 18/0135 F, cotes 30 148, 30 165 et 30 173.
317 18/0135 F, cotes 30 173 et 30 177 à 30 178.
318 18/0135 F, cotes 30 152, 30 160, 30 169, 30 172 et 30 177.
319 18/0135 F, cotes 30 147 et 30 164.
320 18/0135 F, cotes 30 147 et 30 164.
321 18/0135 F, cote 30 164.
322 18/0135 F, cotes 30 160 et 30 161.
323 18/0135 F, cote 30 172.
324 18/0135 F, cote 30 172.
325 18/0135 F, cote 30 176.
326 18/0135 F, cotes 32 150 à 32 154, notamment 32 153.
327 18/0135 F, cote 29 934.
328 18/0135 F, cote 29 934.
329 18/0135 F, cotes 30 284 et 30 285.
330 18/0135 F, cote 30 284.
331 18/0135 F, cote 30 284.
332 18/0135 F, cotes 30 281 et 30 329.
333 18/0135 F, cote 30 328.
334 18/0135 F, cote 30 328.
335 18/0135 F, cote 30 109.
336 18/0135 F, cotes 30 325 et 30 326.
337 18/0135 F, cote 30 321.
338 18/0135 F, cotes 30 320 et 30 321.
339 18/0135 F, cote 30 320.
340 18/0135 F, cotes 29 934 et 29 935.
341 18/0135 F, cote 29 935.
342 18/0135 F, cotes 32 150 à 32 154, notamment 32 153.
343 Article 37 de la loi n° 2020-1508 du 3 décembre 2020 portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne en matière économique et financière.
344 Décision n° 23-D-15 du 29 décembre 2023 relative à des pratiques dans le secteur de la fabrication et la vente de denrées alimentaires en contact avec des matériaux pouvant ou ayant pu contenir du bisphénol A, paragraphe 1647 ; décision n° 23-D-08 du 07 septembre 2023 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur des prestations de services d’ingénierie, de maintenance, de démantèlement et de traitement des déchets pour des sites nucléaires, paragraphe 536.
345 Lettre rectificative n° 534 (2019-2020) de M. Édouard PHILIPPE, Premier ministre, déposée au Sénat le 17 juin 2020 page 30.
346 Voir, par exemple, Pierre Arhel, « Concurrence : règles de procédure – Procédure d’enquête », Répertoire du droit commercial Dalloz, Octobre 2021 (actualisation : mai 2023), paragraphe 200 ; Emmanuelle Claudel, « Le volet concurrentiel de la loi Ddadue : issue d’un feuilleton à rebondissements ! », Revue Trimestrielle du droit commercial, décembre 2020, pages 793 et s. ; Elvire Mazet, Gaëlle Serrano et Olivier Leroy, « Un an de contentieux français de la concurrence (janv. – déc. 2020) », Revues Procédures LexisNexis n° 6, juin 2021, point 19 (généralisation de la « procédure simplifiée »).
347 Voir arrêt du 21 décembre 2017, société Royer Holding, SAS, n°16/06962, p. 6.
348 Voir arrêt du 6 mai 2021, société Transport-Transit-déménagement, n° 20/7505, point 55 ; dans le même sens décision n° 22-D-17 du 11 octobre 2022, paragraphe 80.
349 Arrêt de la CA de Paris, 27 mars 2025, Mobotix, RG n° 21/21452, paragraphe 110. Voir, également, décision n° 22-D-17 du 11 octobre 2022, relative à des pratiques mises en œuvre par la société Gaz de Bordeaux paragraphe 80.
350 18/0135 F, cote VC 46 624, VNC 49 069 et cote 44 915.
351 Voir arrêt du 21 décembre 2017, société Royer Holding, SAS, n° 16/06962, p. 6.
352 Arrêt de la cour d’appel de Paris du 20 janvier 2011 Perrigault SA ; voir également en ce sens CA Paris, 27 mars 2025, Mobotix, RG n° 21/21452, paragraphe 116.
353 Arrêt de la cour d’appel de Paris, 17 mai 2018, Umicore, n° 2016/16621, p. 18. Voir, également, l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 21 décembre 2017, La Banque Postale e.a., n° 2015/17638, p. 31-32.
354 18/0135 F, cotes VC 46 632 (VNC 49 077), 46 633 et 46 634.
355 Arrêts du 21 décembre 2023, European Superleague Company, C‑333/21, point 166 et jurisprudence citée, ainsi que du 27 juin 2024, Commission/Servier e.a., C‑176/19 P, points 288 et 453.
356 Voir notamment décisions n° 97-D-52 du 25 juin 1997 relative à des pratiques relevées dans le secteur du travail temporaire dans les départements de l’Isère et de la Savoie, n° 06-D-03bis, n° 07-D-15, n° 07-D-27, n° 10-D-03, n° 16-D-02, n° 23-D-12.
357 Voir CA de Paris, 29 janvier 2008, le Goff Confort, RG 2006/07820, p.12. Voir également CA de Paris, 27 mars 2025, Mobotix, RG n° 21/21452, paragraphe 113.
358 CA de Paris, 27 mars 2025, Mobotix, RG n° 21/21452, paragraphe 113.
359 Voir, pour un rappel récent, Cass. Com., 8 nov. 2016, pourvoi n° 14-28.234, p. 20, rendu dans l’affaire dite des « Farines » ; cour d’appel Paris, 11 oct. 2012, Chevalier Nord, RG n° 2011/03298, p. 38.
360 Cf. les procès-verbaux suivants : Estella Mobility (M. Y), 28/06/2022, cotes 31 868 à 31 876, Alten Sud ouest (M. 95), 29/06/22, cotes 31 877 à 31883 ; Alten Sud-Ouest (M. R), 30/06/22, cotes 31 952 à 31 966 ; SII (Mme 96), cotes 32 038 à 32047 ; Murmuration (Mme 69), 30/06/22, cotes 32 149
à 32 155 ; Estella Mobility (Mme 70), 30/06/22, cotes 32 156 à 32 162, SII (97), 04/07/22 32 167 à 32 174, SII
(Mme 15 et M. B) 28/06/22, cotes 32 187 à 32 195.
361 Voir les procès-verbaux de recueil de déclarations et de copie de documents aux cotes VC 31 952 à 31 966 (M. R) et 31 877 à 31 883 (M. 95).
362 Voir notamment les observations d’Alten aux cotes 46 361 (VC, cote VNC 48 437) et 46362, et aux cotes VC 46 381 et 46 382 (VNC 48 457 et 48 458).
363 CA Paris, 29 mars 2005, CT0175, RG n° 2004/19930. Pour une application récente, voir décision n° 21-D-20 du 22 juillet 2021 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur des lunettes et montures de lunettes, paragraphes 540 et s ; CA Paris, 21 décembre 2017, RG n° 15/17638 CA Paris, 27 janvier 2011, Société française de radiotéléphonie, RG n° 2010/08945. Voir également, Cass. Com., 27 septembre 2017, Solaire Direct, n° 15-20087 et 15-20291. En droit de l’Union, voir par exemple, TUE 29 mars 2012, Telefonica/Commission, T-336/07, paragraphe 79.
364 Arrêt de la cour d’appel de paris du 7 mars 2024, Fleury Michon LS SAS, point 677 ; arrêt de la cour d’appel de Paris, 24 juin 2008, France Travaux, 2006/06913, page 18 . Voir également, décision n° 07-D-49 du 19 décembre 2007 relative à des pratiques mises en œuvre par les sociétés Biotronik, Ela Medical, Guidant, Medtronic et Saint Jude Medical dans le cadre de l’approvisionnement des hôpitaux en défibrillateurs cardiaques implantables, paragraphes 160 à 163.
365 CA Paris, 23 février 2010, SNCF et Expedia INC, RG n° 2009/05544. Voir également, TUE, arrêt du
19 janvier 2016, Toshiba Corp. c. Commission, T-404/12, paragraphe 39 ; décision n° 12-D-08 du 6 mars 2012 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la production et de la commercialisation des endives, paragraphe 322.
366 Décision n° 05-D-64 du 25 novembre 2005 relative à des pratiques mises en œuvre sur le marché des palaces parisiens, paragraphe 113 ; décision n° 06-D-07 bis du 21 mars 2006 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur des travaux publics dans la région Ile-de-France, paragraphe 503.
367 Voir CA de Paris, 27 mars 2025, Mobotix, RG n° 21/21452, paragraphe 117. Voir également décision n° 20-D-11 du 9 septembre 2020, relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur du traitement de la dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA) qui vise l'arrêt de la Cass. Com., 6 avr. 1999, no 97-12.773 (ODA) ; décision n° 09-D-06 du 5 février 2009 relative à des pratiques mises en œuvre par la SNCF et Expedia Inc. dans le secteur de la vente de voyage en ligne ; voir égal. CA Paris, 24 juin 2008, n° 2006/06193 (page 18) ; voir encore récemment décision n° 19-D-24 du 17 décembre 2019 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur des fruits vendus en coupelles et en gourdes ; décision n° 20-D-09 du 16 juillet 2020 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur des achats et ventes des pièces de porc et de produits de charcuterie.
368 18/0135 F, cotes 46 897 à 46 901.
369 18/0135 F, cotes 46 897 à 46 901.
370 Décisions n° 07-D-15 du 9 mai 2007 relative à des pratiques mises en œuvre dans les marchés publics relatifs aux lycées d'Ile-de-France, paragraphe 212 ; n° 17-D-27 du 21 décembre 2017 relative à des pratiques d’obstruction mises en œuvre par Brenntag, paragraphe 122 et arrêt de la cour d’appel de Paris du 12 décembre 2006, société Bouygues Télécom e.a, n° 2006/00048, p. 12.
371 Décision n° 10-D-32 du 16 novembre 2010 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la télévision payante, paragraphe 134 et arrêt de la cour d’appel de Paris du 29 juin 2004, Syndicat des professionnels européens de l’automobile, confirmé par l’arrêt de la Cour de cassation du 17 janvier 2006, 04-19.092.
372 Arrêt de la cour d’appel de Paris du 29 juin 2004, Syndicat des professionnels européens de l’automobile.
373 18/0135 F, cotes 46 627 à 46 630.
374 CJUE, 14 septembre 2023, Volkswagen Group, C-27/22, point 58, 64 et 66 ; CJUE, gde ch., 22 mars 2022, Bpost, aff. C-117/20, point 58 ; CJUE, gde ch., 22 mars 2022, aff. C-151/20, Nordzucker e.a., point 58.
375 Voir, par exemple, décision n° 24-D-09 du 29 octobre 2024 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur du matériel électrique basse tension, paragraphes 402 ; décision n° 21-D-25 du 2 novembre 2021 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de l’approvisionnement en mélasse à La Réunion, paragraphes 99 et 100 ; décision n° 13-D-20 du 17 décembre 2013 relative à des pratiques mises en œuvre par EDF dans le secteur des services destinés à la production d’électricité photovoltaïque, paragraphes 207 et 208 ; arrêt de la cour d’appel de Paris du 30 janvier 2014, Colgate Palmolive, n° 2012/0723 ; arrêt de la cour d’appel de Paris du 1er juillet 2021, n° 19/005957, paragraphe 626.
376 Voir la Communication de la Commission européenne portant lignes directrices relatives à la notion d’affectation du commerce figurant aux articles 81 et 82 du traité, Journal officiel des communautés européennes n° C 101 du 27 avril 2004, pages 81 à 96.
377 Commission européenne, Lignes directrices relatives à la notion d’affectation du commerce figurant aux articles 81 et 82 du traité, JO C 101 du 27 avril 2004, p. 0081–0096, point 18.
378 Voir notamment arrêt de la Cour de cassation du 31 janvier 2012, Orange Caraïbe e.a., n° 10-25.772, p. 6.
379 Arrêt de la Cour de cassation du 31 janvier 2012, Orange Caraïbe e.a., n° 10-25.772, page 6.
380 Arrêt de la Cour de cassation du 31 janvier 2012, Orange Caraïbe e.a., n° 10-25.772, page 6. Voir également, en ce sens, arrêt de la cour d’appel de Paris, du 28 mars 2013, Société des pétroles Shell e. a., n° 2011/18 245 et arrêt de la Cour de cassation du 20 janvier 2015, Société Chevron Products Company e. a., n° 13-16.745.
381 Voir, par exemple, l’arrêt de la Cour de cassation du 13 juillet 2010, Vedettes inter-îles vendéennes, pourvoi n° 09-67439, page 5.
382 Communication de la Commission sur la définition du marché en cause aux fins du droit de la concurrence de l’Union.
383 Communication de la Commission sur la définition du marché en cause aux fins du droit de la concurrence de l’Union, paragraphe 12.
384 Communication de la Commission sur la définition du marché en cause aux fins du droit de la concurrence de l’Union, paragraphe 12.
385 TUE, 12 septembre 2007, William Prym/Commission, aff. T-30/05, Rec., point 86.
386 Voir, sur ce point, décision n° 05-D-27 du 15 juin 2005 relative à des pratiques relevées dans le secteur du thon blanc, paragraphe 28 ; décision n° 13-D-12 du 28 mai 2013 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la commercialisation de commodités chimiques, paragraphe 575 ; décision n° 20-D-09 du 16 juillet 2020 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur des achats et ventes des pièces de porc et de produits de charcuterie, paragraphe 399. Voir, également arrêt de la cour d’appel de Paris, 26 septembre 2013, société Roland Vlaemynck, RG n° 2012/08948, page 6.
387 Décision de la Commission M.9460 Capgemini / Altran du 23 octobre 2019.
388 18/0135 F, cote VC 46 639, VNC 49 084.
389 18/0135 F cote VC 46 639, VNC 49 084.
390 Étude Xerfi, Les services numériques, août 2022, 18/0135 F, cote 35 479. Voir, également, Rapport sur les sociétés françaises d’ingénierie et de conseil en technologies (dit « rapport Sartorius »), 8 février 2011, précité, page 3.
391 Cote 43 674. Voir notamment les propos de M. Z et M. A (respectivement Directeur juridique et conformité et Office manager labor and social law, Segula Technologies) : « (…) les ressources humaines, les compétences, sont au cœur des activités de Segula Technologies. Les compétences opérationnelles sont, de notoriété, rares sur certaines compétences ou certaines expertises spécifiques. Sans ingénieurs on ne peut pas fournir de prestations d’ingénierie » (18/0135 F, cote 32 401 VC, 33 852 VNC).
392 18/0135 F, cote VC 46 637, VNC 49 082.
393 18/0135 F, cote VC 46 673, VNC 49 118.
394 Décision n° 12-DCC-162 du 26 novembre 2012 relative à la prise de contrôle exclusif de la société Aura RHR par le groupe Ergalis, p.7. et décision n° 10-DCC-85 du 4 août 2010 relative à la prise de contrôle exclusif de la société Axe Travail Temporaire par le groupe Samsic, p.13.
395 Décision de la Commission M.7949, Nowegian/Shiphold/Osm Aviation du 31 mai 2016, p.19 et décision de la Commission M.5009, Randstad/Verdior du 17 avril 2008, p.11.
396 Décision n° 12-DCC-162 du 26 novembre 2012 relative à la prise de contrôle exclusif de la société Aura RHR par le groupe Ergalis, p.7.
397 Voir en ce sens, P. Cahuc et A. Zylberberg, Le marché du travail, De Boeck Université (2001) et S. Naidu, E.A. Posner and G. Weyl, « Antitrust Remedies for Labor Market Power », Harvard Law Review (2018), pages 555-556.
398 18/0135 F, cote 32 152.
399 Étude Xerfi, Les services d’ingénierie, d’études et de conseils techniques, juin 2021, 18/0135 F, cote 34 832.
400 Décision de la Commission M.9460 Capgemini/Altran du 23 octobre 2019, précitée, paragraphe 23.
401 Décision n° 11-DCC-20 du 7 février 2011, Aptus/Ausy, p.7.
402 Lettres du ministre de l’économie du 29 avril 2003 au conseil de la société Assystem relative à une concentration dans le secteur de l’ingénierie ; du 10 septembre 2003 aux conseils de la société Pininfarina, relative à une concentration dans les secteurs du design et de l’ingénierie automobile ; du 27 novembre 2003 aux conseils de la société Brime Technologies, relative à une concentration dans le secteur du conseil et de l’ingénierie ; et du 19 octobre 2007 au conseil de la société Akka Technologies.
403 Voir, notamment, les décisions de la Commission M.9460 Capgemini / Altran du 23 octobre 2019, paragraphes 8 et suivants ; M.8548 Ardian/GPS Branch of Assystem Group du 18 août 2017, paragraphe 12 ;
M. 8270, EDF/CDC/RTE du 20 février 2017, paragraphe 18 ; M. 6794, CDC / Veolia Transdev du 17 juin 2013, paragraphe 27.
404 Voir la lettre du ministre de l’économie du 19 octobre 2007 précitée.
405 Voir lettre du ministre de l’économie du 27 novembre 2003 ; décision n° 16-DCC-183, du 25 novembre 2016 relative à la prise de contrôle exclusif de la société Latécoère Services par le groupe ADF, point 8.
406 Décision n° 10-DCC-164 du 18 novembre 2010 relative à la prise de contrôle exclusif de IOSIS Holding par EGIS SA.
407 Décision n° 09-DCC-30 du 29 juillet 2009 relative à l’acquisition des sociétés E.T.C.M. et GER2I Ensemblier par la société EIFFEL Participations (groupe EIFFAGE).
408 Voir, par exemple, décision n° 09-DCC-93 du 31 décembre 2009 relative à l’acquisition par la société Bull SA d’actifs de la société Crescendo Industries.
409 Décisions de la Commission n° M.2365 du 4 avril 2001, Schlumberger / Sema ; M.2609 du 31 janvier 2002, HP / Compaq ; M.3555 du 9 septembre 2004, Hewlett – Packard / Synstar ; M.3571 du 18 novembre 2004, IBM / Maerskdate / DMData ; M.3995 du 1er décembre 2005, Belgacom / Telindus ; M.5197 du 25 juillet 2008, HP / EDS et M.5301 Cap Gemini / BAS du 13 octobre 2008.
410 (i) les services de gestion globale, (ii) les services de gestion d’entreprise, (iii) le développement et l’intégration de logiciels, (iv) le conseil, (v) la maintenance de logiciels et de support logistique, (vi) la maintenance de matériels informatiques et de support logistique, et (vii) l’enseignement et la formation.
411 Voir, par exemple, décision n° 09-DCC-93 du 31 décembre 2009 relative à l’acquisition par la société Bull SA d’actifs de la société Crescendo Industries, p. 7.
412 Voir, notamment, arrêt de la CJUE du 8 juillet 1999, Anic Partecipazioni SpA, C-49/92, point 40 et les arrêts du TUE, 20 avril 1999, Limburgse Vinyl Maatschappij NV, Elf Atochem SA, BASF AG, Shell International Chemical Company Ltd, DSM NV et DSM Kunststoffen BV, Wacker-Chemie GmbH, Hoechst AG, Société Arlésienne de vinyle, Montedison SpA, Imperial Chemical Indistries plc, Hüls AG et Enichem SpA v Commission [1999], Aff. jointes T-305/94, T-306/94, T-307/94, T-313/94 à T-316/94, T-318/94, T-325/94, T-328/94, T-329/94 et T-335/94, point 715.
413 CJUE, 23 novembre 2006, Asnef-Equifax, Aff. C-238/05, point 32.
414 CA Paris du 12 décembre 2006, Bouygues Telecom SA, RG n° 2006/00048.
415 CJUE, 7 janvier 2004, Aalborg Portland e.a./Commission, C-204/00 P, C-205/00 P, C-211/00 P, C-213/00 P, C-217/00 P et C-219/00 P, points 55 à 57.
416 TUE, 8 septembre 2016, H. Lundbeck A/S et Lundbeck Ltd/Commission, T-472/13, point 110 ; CJUE, 26 janvier 2017, Keramag Keramische Werke GmbH e.a/Commission, C-613/13 P, point 52.
417 TUE, 15 mars 2000, Cimenteries CBR SA e.a./Commission, T-25/95, point 1838.
418 Voir notamment l’arrêt de la CJUE du 7 janvier 2004, Aalborg Portland e.a./Commission, C-204/00, points 55 à 57.
419 Arrêt de la Cour de cassation du 7 avril 2010, Société puériculture de France, n° 09-11853.
420 TUE, 2 juin 2016, Moreda-Riviere Trefilerias SA e.a./Commission, T-426/10, point 112.
421 TUE, 15 décembre 2016, Koninklijke Philips NV et Philips France/Commission, T-762/14, point 109.
422 TUE, 3 mars 2011, Siemens AG/Commission, T-110/07, point 50 et jurisprudence citée.
423 TUE, 12 juillet 2011, Hitachi e.a./Commission, T-112/07, point 71 et jurisprudence citée.
424 TUE, 12 juillet 2011, Hitachi e.a./Commission, T-112/07, point 72 et jurisprudence citée.
425 CA Paris, 24 avril 2007, Société JH Industrie, n° 2006/06912, p. 5 et CA Paris 25 février 2009, Transeuro Desbordes Worlwide Relocations, n° 2008/02003, p. 7 et 8.
426 CA Paris, 6 octobre 2022, n° 20/01494, paragraphe 105 et jurisprudence citée, confirmé par Cour de cassation, 8 janvier 2025 n° F 22-22.610, C 22-22.676, F 22-22.679, J 22-22.728.
427 Arrêt de la Cour de justice du 11 juillet 1985, C-42/84, Remia e.a/Com, ECLI:EU:C:1985:327. Voir également arrêt du Tribunal du 18 septembre 2001, T-112/99, Métropole Télévision e.a./Com., ECLI:EU:T:2001:215, notamment paragraphes 104 et suivants.
428 Commission, Lignes directrices concernant l’application de l’article 81, paragraphe 3, du traité, paragraphes 28 à 31, JOUE C 101 du 27.4.2004, p.97-118.
429 Arrêt de la Cour de justice du 19 septembre 2024, C-264/23, Booking.com/Com, ECLI : EU : C : 2024 :764, paragraphe 51 et jurisprudence citée.
430 Arrêt de la Cour de justice du 19 septembre 2024, C-264/23, Booking.com/Com, ECLI : EU : C : 2024 :764, paragraphe 53 et jurisprudence citée.
431 Arrêt de la Cour de justice du 19 septembre 2024, C-264/23, Booking.com/Com, ECLI : EU : C : 2024 :764, paragraphe 54 et jurisprudence citée.
432 Voir les arrêts de la CJUE du 30 juin 1966, Société́ technique minière, L.T.M. e.a., 56-65, page 359 et du 14 mars 2013, Allianz Hungaria Biztosito e.a., C-32/11, point 33.
433 Voir notamment, CJUE, 14 mars 2013, Allianz Hungaria Biztosito e.a., C-32/11, point 36.
434 Voir notamment, CJUE, 11 septembre 2014, Groupement des cartes bancaires (CB), C-67/13, point 49.
435 Voir, en ce sens, CJUE, 4 octobre 2024, C‑650/22, FIFA contre BZ, point 129. Voir, également, CJUE, 21 décembre 2023, Royal Antwerp Football Club, C‑680/21, points 107, 109 et 110.
436 CJUE, 4 octobre 2024, C‑650/22, FIFA contre BZ, point 146.
437 CJUE, 21 décembre 2023, European Superleague Company, C‑333/21, point 166 et jurisprudence citée, ainsi que CJUE, 27 juin 2024, Commission/Servier e.a., C‑176/19 P, points 288 et 453.
438 CJUE, 21 décembre 2023, European Superleague Company, C‑333/21, point 167 et jurisprudence citée.
439 CJUE, 21 décembre 2023, European Superleague Company, C‑333/21, point 168 et jurisprudence citée.
440 CJUE, 2 avril 2020, Budapest Bank e.a., C‑228/18, point 38 et jurisprudence citée.
441 Voir, en ce sens, CJUE, 30 juin 1966, LTM, 56/65, p. 360 ; CJUE, 11 septembre 2014, MasterCard e.a./Commission, C‑382/12 P, point 161, CJUE, 18 novembre 2021, Visma Enterprise, C‑306/20, point 74 ; ainsi que CJUE, 27 juin 2024, Commission/Servier e.a., C‑176/19 P, point 339.
442 CA Paris du 16 novembre 2023, RG n° 20/03434, paragraphe 377 (frappé de pourvoi).
443 CA Paris du 16 novembre 2023, RG n° 20/03434, paragraphe 380 (frappé de pourvoi).
444 TUE, 27 juillet 2005, Brasserie nationale e.a./Commission, T-49/02 à T-51/02, point 185 et du 5 décembre 2006, Westfalen Gassen Nederland/Commission, T-303/02, point 138.
445 TUE, 7 juillet 1994, Dunlop Slazenger/Commission, T-43/92, point 79, et du 16 novembre 2006, Peroxidos Organicos/Commission, T-120/04, point 51.
446 CA Paris du 6 octobre 2022, Apple, RG n° 20/08582, point 384.
447 Voir, notamment, CJUE, 6 décembre 2012, Commission/Verhuizingen Coppens, C-441/11P, point 72 et jurisprudence citée, et, plus récemment, CJUE, 18 mars 2021, Prometon/Commission, C-440/19 P, point 112.
448 Décision n° 07-D-41 du 28 novembre 2007 relative à des pratiques s’opposant à la liberté des prix des services proposés aux établissements de santé à l’occasion d’appels d’offres en matière d’examens anatomo- cyto-pathologiques, paragraphe 95.
449 Voir, notamment, CJUE, 26 septembre 2018, Infineon Technologies/Commission, C-99/17 P, point 53, et CJUE, 18 mars 2021, Prometon/Commission, C-440/19 P, point 112.
450 TUE, 16 juin 2015, FSL e.a./ Commission, T-655/11, point 483 et du 10 novembre 2017, ICAP e.a./ Commission, T-180/15, point 220.
451 Voir en ce sens CJUE, 26 janvier 2017, Commission/Keramag Keramische Werke e.a., C-613/13 P, point 55 et TUE, 28 mars 2019, Pometon SpA/Commission, T-433/16, point 312.
452 18/0135 F, cote 46 367.
453 18/0135 F, cotes 46 365 à 46 368.
454 18/0135 F, cote 46 367.
455 CA Paris, 26 février 1992, BOCCRF 14 mars 1992 relatif au recours formé par la société anonyme Etablissements Louis Carreras contre la décision n° 91-D-29 du 4 juin 1991 du Conseil de la concurrence.
456 CA Paris, 15 juin 1999, BOCCRF 18 févr. 2000, relatif au recours formé par la Société languedocienne de travaux publics et de génie civil (SOLATRAG), la SA Joulie & Fils et autres contre une décision n° 98-D-33 du Conseil de la concurrence en date du 3 juin 1998 relative à des pratiques mises en œuvre à l’occasion de la passation de marchés publics de voirie et réseaux divers dans le département de l’Hérault ; confirmé par Cass. com. 20 nov. 2001, n° 99-16.776. Voir, également, Cass. com. 22 nov. 2005, n° 04-19.102 ; décision n° 03-D-19 du 15 avril 2003 relative à des pratiques relevées sur le marché des granulats dans le département de l’Ardèche.
457 Voir, par exemple, décision n° 92-D-37 du 2 juin 1992, Déménagement des marins de la Marine nationale en Bretagne.
458 18/0135 F, cote 30 414.
459 18/0135 F, cote 30 414.
460 18/0135 F, cote 30 391.
461 18/0135 F, cote 43 150.
462 18/0135 F, cote 30 430.
463 TUE, 10 novembre 2017, ICAP e.a./ Commission, T-180/15, point 220 et jurisprudence citée.
464 18/0135 F, cotes 43 145 et 43 163.
465 18/0135 F, cotes 43 133, 43 132, 43 144, 43 166 et 43 162.
466 18/0135 F, cotes 43 146 et 43 164.
467 18/0135 F, cote 30 414.
468 18/0135 F, cote 30 391.
469 18/0135 F, cote 43 150.
470 CJUE, 6 décembre 2012, Commission / Verhuizingen Coppens, C-441/11 P, point 75.
471 Cotes 46 345, 46 353 et VC 46 354, VNC 48 430.
472 Cote VC 46 361, VNC 48 437.
473 Cote VC 46 361, VNC 48 437.
474 Cotes 46 363 et VC 46 364, VNC 48 440.
475 En réponse à une demande des services d’instruction, Ausy a toutefois précisé qu’il « semblerait que cet accord ait essentiellement concerné les managers, les commerciaux et les "delivery" (à savoir, les directeurs de projet ou salariés occupant des fonctions techniques). A priori, il n’aurait pas concerné les consultants d’Ausy » (cote 29 910).
476 18/0135 F, cotes 43 128 et 43 129.
477 18/0135 F, cotes 43 129, 43 133 et 43 159.
478 18/0135 F, cotes 43 133, 43 132, 43 144, 43 166 et 43 162.
479 18/0135 F, cote 43 145.
480 18/0135 F, cotes 30 401 et 43 149.
481 18/0135 F, cote 46 366.
482 18/0135 F, cote 30 414.
483 18/0135 F, cote 30 394.
484 18/0135 F, cote 43 140.
485 18/0135 F, cotes 43 141 et 43 159.
486 18/0135 F, cote 30 414.
487 18/0135 F, cote 46 351 ; voir, notamment sur ce point, CJUE, 6 décembre 2012, C-441/11 P, Commission/Verhuizingen Coppens, point 75.
488 Voir, notamment sur ce point : TUE, 11 mars 1999, Thyssen Stahl AG / Commission, T-141/94 point 269 ; TUE, 16 juin 2011, Bavaria NV / Commission, T-235/07, point 71 et décision n° 15-D-19 du 15 décembre 2015 relative à des pratiques mises en œuvre dans les secteurs de la messagerie et de la messagerie express, paragraphe 768.
489 18/0135 F, cotes 43 145 et 43 163.
490 18/0135 F, cotes 46 370 et 46 371.
491 18/0135 F, cotes VC 46 545 à 46 598, VNC 48 566 à 48 619.
492 18/0135 F, cotes VC 46 375 à 46 388, VNC 48 451 à 48 464.
493 18/0135 F, cote VC 46 545, VNC 48 566.
494 18/0135 F, cote VC 46 354, VNC 48 430.
495 18/0135 F, cotes 46 353 et 46 383 notamment.
496 18/0135 F, cote 43 140.
497 CJUE, 2 avril 2020, Budapest Bank e.a., C-228/18, point 52 et jurisprudence citée.
498 CJUE, 20 janvier 2016, Toshiba Corporation/Commission, C-373/14 P, point 28.
499 CJUE, 4 octobre 2024, FIFA, C-650/22, point 129 et jurisprudence citée. Voir également Commission européenne, affaire AT.40795 du 2 juin 2025, Delivery Hero and Glovo ; décision n° 24-D-06 du 21 mai 2024 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur des produits préfabriqués en béton ; Comision National de los Mercados y la Competencia (CNMC), décision du 31 juillet 2010, Transitarios, dans l’affaire S/0120/08, page 93 ; Kilpailu- ja kuluttajavirasto (KKV), décision du 31 octobre 2019, paragraphe 62 ; Gazdasági Versenyhivatal, décision du 18 décembre 2020 dans l’affaire VJ/61/2017 ; Autoridade da Concorrência décision du 19 février 2025, affaire PRC/2022/3.
500 CJUE, 2 avril 2020, Budapest Bank e.a., C‑228/18, point 76. Voir, également sur ce point, Cass. 28 juin 2023, pourvoi n° M.21-26015, point 10.
501 CJUE, 25 mars 2021, Lundbeck e.a.,C-591/16 P, points 129 et 130, et Xellia Pharmaceuticals, C-611/16P, points 118 à 120.
502 CA Paris, 12 décembre 2024, RG n° 21/16134, paragraphe 219.
503 CJUE, 20 janvier 2016, Toshiba, C-373/14 P, paragraphes 28 et 29. Voir également Arrêt de la Cour de justice, C-331/21, EDP (Energias de Portugal), points 99 et 100.
504 18/0135 F, cote VC 46 337, VNC 48 413.
505 Voir, notamment, CJUE, 20 janvier 2016, Toshiba Corporation/Commission, C-373/14 P, points 23 et suivants. Voir, également, CJUE, 25 janvier 2007, Sumitomo Metal Industries et Nippon Steel/Commission, C-403/04 P et C-405/04 P, points 44 et 45.
506 18/0135 F, cotes 46 701 à 46 708.
507 18/0135 F, cotes 46 701 à 46 708.
508 18/0135 F, cote 28 691.
509 18/0135 F, cotes 30 438 à 30 441.
510 18/0135 F, cotes 29 778, 29 779, 29 780, 29 811, 29 849, 29 853, 29854, 29 855, 29 866, 30 486, 30 524 et 30 525.
511 18/0135 F, cotes 30 438 à 30 441.
512 18/0135 F, cote 30 141.
513 18/0135 F, cotes 29 779, 29 854, 30 524 et 31 325.
514 18/0135 F, cotes 30 204, 30 462, 30 483, 30 491, 30 498, 30 511, 30 517, 31 316 et 31 317.
515 18/0135 F, cotes 30 205, 30 463 et 30 464, 30 484, 30 492 et 30 493, 30 499, 30 512, 30 518, 30 521 et 30 522.
516 18/0135 F, cotes 46 701 à 46 708.
517 Cotes 46 697 à 46 709.
518 « [Confidentiel] » désigne la direction du client Renault.
519 Cotes 46 963 à 46 940.
520 18/0135 F, cotes 30 438 à 30 441.
521 18/0135 F, cotes 30 205, 30 463 et 30 464, 30 484, 30 492 et 30 493, 30 499, 30 512, 30 518, 30 521 et 30 522.
522 18/0135 F, cote 30 244.
523 18/0135 F, cote 30 244.
524 18/0135 F, cote 30 247.
525 18/0135 F, cote 46 711.
526 18/0135 F, cote 46 930.
527 Arrêt de la cour d’appel de Paris du 15 mars 2018, n° 16/14231, points 36 à 42.
528 TUE, 8 juillet 2008, Knauf Gips KG/Commission, aff. T-52/03, point 201 ; TUE, 11 mars 1999, Thyssen Stahl/Commission, aff. T-141/94, point 269 ; TUE, 16 juin 2011, Bavaria NV/Commission, aff. T-235/07, point 71 et TUE, 24 mars 2011, Comap / Commission aff. T-377/06, points 97 à 99.
529 18/0135 F, cotes 29 375 et 29 376, 30 202 et 30 203, 30 481, 30 496 et 30 497, 30 509 et 30 510, 31 315.
530 18/0135 F, cote 30 141.
531 18/0135 F, cote 30 202.
532 18/0135 F, cotes 29 882, 29 888, 29 891, 30 251, 30 264, 30 269, 31 322.
533 18/0135 F, cotes 29 371 et 29 372, 29 886 et 29 887, 30 249 et 30 250, 30 263, 31 320 et 31 321.
534 18/0135 F, cotes 28 360 à 28 362 et cotes 28 395 à 28 396.
535 18/0135 F, cote 28 680.
536 18/0135 F, cotes 46 715 et suivantes.
537 18/0135 F, cotes 30 438 à 30 441, notamment 30 439.
538 18/0135 F, cotes 29 778, 29 779, 29 780, 29 811, 29 849, 29 853, 29 854, 29 855, 29 866, 30 486, 30 524 et 30 525.
539 18/0135 F, cotes 30 438 à 30 441, notamment 30 439.
540 18/0135 F, cote 30 141.
541 18/0135 F, cote 29 779.
542 18/0135 F, cote 30 205.
543 Arrêt de la Cour de justice du 20 janvier 2016, Toshiba Corporation/Commission, précité, point 28.
544 Arrêt de la Cour de justice 4 oct. 2024, FIFA / BZ, C-650/22, point 129. Voir également Commission européenne, affaire AT.40795 du 2 juin 2025, Delivery Hero and Glovo ; décision n° 24-D-06 du 21 mai 2024 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur des produits préfabriqués en béton ; Comision National de los Mercados y la Competencia (CNMC), décision du 31 juillet 2010, Transitarios, dans l’affaire S/0120/08, page 93 ; Kilpailu- ja kuluttajavirasto (KKV), décision du 31 octobre 2019, paragraphe 62 ; Gazdasági Versenyhivatal, décision du 18 décembre 2020 dans l’affaire VJ/61/2017 ; Autoridade da Concorrência décision du 19 février 2025, affaire PRC/2022/3.
545 Arrêt de la Cour de justice du 2 avril 2020, Budapest Bank e.a., C‑228/18, point 76. Voir également, sur ce point, l’arrêt de la Cour de cassation du 28 juin 2023, pourvoi n° M.21-26015, point 10.
546 Arrêt de la Cour de justice du 25 mars 2021, Lundbeck e.a.,C-591/16P, points 129 et 130, et Xellia Pharmaceuticals, C-611/16P, points 118 à 120.
547 CA Paris, 12 décembre 2024, RG n° 21/16134, paragraphe 219.
548 Arrêt de la Cour de justice du 20 janvier 2016, Toshiba, C-373/14 P, paragraphes 28 et 29. Voir également Arrêt de la Cour de justice, C-331/21, EDP (Energias de Portugal), points 99 et 100.
549 18/0135 F, cote VC 46 337, VNC 48 413.
550 18/0135 F, cote 30 267.
551 18/0135 F, cote 46 716.
552 18/0135 F, cote 46 715.
553 18/0135 F, cote 49 317.
554 Arrêt de la Cour de justice du 2 avril 2020, Budapest Bank e.a., C-228/18, point 52 et jurisprudence citée.
555 Voir, notamment, arrêt de la Cour de justice du 20 janvier 2016, Toshiba Corporation contre Commission, C-373/14 P, ECLI:EU:C:2016:26, points 23 et suivants. Voir, également, arrêt de la Cour de justice du 25 janvier 2007, Sumitomo Metal Industries et Nippon Steel/Commission, C-403/04 P et C-405/04 P, ECLI:EU:C:2007:52, points 44 et 45.
556 18/0135 F, cote 44 921.
557 18/0135 F, cotes 44 922 et 44 923.
558 18/0135 F, cotes 2 256 à 2 258 et cotes 29 932 à 29 933.
559 18/0135 F, cotes 29 932 à 29 933.
560 18/0135 F, cote 30 169.
561 18/0135 F, cotes 29 938 et 29 940.
562 18/0135 F, cote 30 152. Voir également les déclarations de Mme 69, cote 32 153.
563 18/0135 F, cote 32 153.
564 18/0135 F, cote 30 160.
565 18/0135 F, cote 32 154.
566 18/0135 F, cotes 29 929 et 32 154.
567 18/0135 F, cote 44 940 et cote VC 45 064, VNC 47 595.
568 18/0135 F, cote VC 45 151, VNC 47 682.
569 18/0135 F, cote 32 154.
570 18/0135 F, cotes 30 738 et 44 940.
571 18/0135 F, cote 32 154.
572 CJUE, 10 septembre 2009, Akzo Nobel e.a./Commission, C-97/08 P, points 55 et 56 ; du 20 janvier 2011, General Química e.a./Commission, C-90/09 P, point 36. Voir, également, CA Paris, 29 mars 2012, Lacroix Signalisation, n° 2011/01228, pages 18 et 20.
573CJUE, 10 septembre 2009, Akzo Nobel e.a./Commission, C-97/08 P, point 58 ; du 20 janvier 2011, General Química e.a./Commission, C-90/09 P, point 37. Voir, également, CA Paris, 29 mars 2012, Lacroix Signalisation, n° 2011/01228, pages 18 et 19.
574 CJUE, 10 septembre 2009, Akzo Nobel e.a./Commission, C-97/08 P, points 60 et 61. Voir, également, CA Paris, 29 mars 2012, Lacroix Signalisation, n° 2011/01228, page 19.
575 18/0135 F, cote 28 153.
576 18/0135 F, cotes 31 311 et 37 572.
577 Règlement (CE) n° 1/2003 du Conseil du 16 décembre 2002 relatif à la mise en œuvre des règles de concurrence prévues aux articles 81 et 82 du traité, JOUE, 2003, L1, p. 1
578 Communiqué sanctions, paragraphe 6.
579 18/0135 F, cotes 46 413 à 46 423.
580 18/0135 F, cotes 46 950 à 46 952.
581 18/0135 F, cotes 46 736 à 46 739.
582 18/0135 F, cotes 46 739 et 46 740.
583 18/0135 F, cotes 46 736 à 46 740.
584 Voir le 3° du XVIII de l’article 2 de l’ordonnance n° 2021-649 du 26 mai 2021.
585 CJUE, 28 juin 2005, Dansk Rorindustri, aff. jointes C-189/02 P, C-202/02 P, C-205/02 P à C-208/02 P et C-213/02 P, points 227 à 232. Voir, également, CJUE, 18 juillet 2013, Schindler Holding e.a./Commission, C-501/11 P (arrêt dans lequel la Cour a considéré que les lignes directrices adoptées par la Commission « ne constituent ni une législation, ni une législation déléguée au sens de l’article 290, paragraphe 1, TFUE, ni la base légale des amendes infligées en matière de concurrence, lesquelles sont adoptées sur le seul fondement de l’article 23 du règlement n° 1/2003 ».
586 Voir, notamment, décisions n° 22-D-08 du 3 mars 2022 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la collecte et de la gestion des déchets en Haute-Savoie ; n° 22-D-17 du 11 octobre 2022 relative à des pratiques mises en œuvre par la société Gaz de Bordeaux dans le secteur du gaz ; n° 23-D-02 du 8 mars 2023 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la commercialisation du champagne Canard Duchêne aux Antilles et en Guyane ; n° 23-D-03 du 20 mars 2023 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la sécurisation des débits de tabac dans les régions Hauts-de-France et Ile-de-France ; n° 23-D-04 du 12 avril 2023 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la vente d’abonnements à des produits d’intelligence économique (business intelligence) et d’information d’entreprise ; n° 23-D-06 du 14 juin 2023 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la rénovation et de la restauration de couvertures et de charpentes pour les bâtiments du patrimoine public ou privé dans la région des Hauts-de-France ; et n° 23-D-08 du 7 septembre 2023 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur des prestations de services d’ingénierie, de maintenance, de démantèlement et de traitement des déchets pour des sites nucléaires.
587 Voir, en ce sens, Cass.,17 mars 2015, Royal Canin e.a., n° 13 26.003.
588 Communiqué sanctions, paragraphe 13.
589 Voir, en ce sens, TUE, 13 juillet 2011, Schindler Holding e.a./Commission, T-138/07, points 118 à 129 (confirmé par CJUE, 18 juillet 2013, Schindler Holding e.a./Commission, C-501/11 P). Voir, également, CA Paris, 4 juillet 2019, Goodmills Deutschland e.a., RG n° 16/23609, points 464 à 466.
590 Voir, en ce sens, décisions n° 18-D-23 du 24 octobre 2018 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la distribution de matériel de motoculture ; et n° 19-D-14 du 01 juillet 2019 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la distribution des cycles haut de gamme ; ainsi que CA Paris, 13 mars 2014, Société Bang & Olufsen, n° RG 2013/00714, pages 11 à 13 et du 17 octobre 2019, n° RG 18/24456, pages 74 et 75.
591 CJUE, 20 janvier 2016, Toshiba Corporation e.a./Commission, précité, point 28 ; et CJUE, 4 octobre 2024, FIFA, C-650/22, point 129.
592 Com., 1er juin 2022, pourvoi n° 19-20.999. Voir également CA Paris, 12 décembre 2024, n° 21/16134, paragraphes 401 et suivants.
593 CA Paris, 19 juillet 2018, n° 16/01270, point 859.
594 Cass., du 22 septembre 2021, n° 18-21.436, point 54.
595 CJUE, 23 avril 2015, LG Display et LG Display Taiwan/Commission, C-227/14 P, points 56.
596 18/0135 F, cotes 46 402 à 46 405, VC 46 406 et VC 46 407 (VNC 48 482 et 48 483 VNC).
597 18/0135 F, cotes 46 402 à 46 405, VC 46 406 et VC 46 407 (VNC 48 482 et 48 483 VNC), 46 408 et VC 46 409 à 46 411 (VNC 48 485 à 48 488).
598 18/0135 F, cotes 46 952 à 46 955.
599 18/0135 F, cotes 46 741 et VC 46 742, VNC 49 187.
600 Communiqué sanctions, point 27.
601 18/0135 F, cotes 46 400 à 46 401.
602 18/0135 F, cotes VC 46 412 (VNC 48 488) à 46 413, 46 955, 45 914 et 45 915 et 46 743 à 46 745.
603 18/0135 F, cotes 46 743 à 46 745.
604 CA Paris, 15 juin 2023, RG n°21/08411, paragraphe 140.
605 Communiqué sanctions, point 30.
606 Communiqué sanctions, points 27 et 28.
607 Voir, par exemple, CA Paris, 15 juin 2023, RG n° 21/08411, paragraphe 146.
608 18/0135 F, cotes VC 46 424 (VNC 48 500), VC 46 425 (VNC 48 501) et 46 958.
609 Décision n° 07-D-50 du Conseil du 20 décembre 2007 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la distribution de jouets, paragraphes 730 et 769, confirmée par CA Paris, 28 janvier 2009, EPSE Joué Club e.a., n° 2008/00255, pp. 20 et 21.
610 TUE, 8 juillet 2004, Dalmine/Commission, T-50/00, point 291, et du 15 mars 2006, Daiichi Pharmaceutical/Commission, T-26/02, point 113.
611 Décision n° 19-D-24, paragraphe 723, confirmé sur ce point par l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 6 octobre 2022, RG n° 20/01494, paragraphe 379.
612 18/0135 F, cotes 43 301 et 43 302.
613 18/0135 F, cote 43 147.
614 18/0135 F, cotes 43 150, 43 158 et 43 169 ; 29 911 et 29 957 ; 30 430 et 31 477.
615 18/0135 F, cotes 46 751 et 46 752.
616 CA Paris, 11 octobre 2012, Entreprise H. Chevalier Nord e.a., n° 2011/03298, page 71 ; et du 30 janvier 2014, Société Colgate-Palmolive Service, n° 2012/00723, page 41.
617 CEDH, 27 septembre 2011, A. Menarini Diagnostics S.R.L. c. Italie, n°43509/08, paragraphe 41.
618 Cass., 18 septembre 2012, Sephora e.a., n° 12-14401.
619 CJUE, 7 juin 1983, SA Musique Diffusion Française e.a./Commission, 100/80, points 119 à 121 ; 29 juin 2006, Showa Denko KK/Commission, C-289/04 P, points 16 et 17 ; et 4 septembre 2014, YKK Corporation e.a./Commission, C-408/12 P, point 86.
620 18/0135 F, cote 46 923.
621 Communiqué sanctions, paragraphe 53.
622 Voir, notamment, la décision n° 20-D-09, du 16 juillet 2020 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur des achats et ventes des pièces de porc et de produits de charcuterie, paragraphe 950.
623 Point 23 du Communiqué de procédure du 3 avril 2015 relatif au programme de clémence français.
624 Décision n° 11-D-17 du 8 décembre 2011, relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur des lessives, paragraphe 716.