CA Toulouse, 3e ch., 15 juillet 2025, n° 23/01052
TOULOUSE
Arrêt
Autre
15/07/2025
ARRÊT N° 386/2025
N° RG 23/01052 - N° Portalis DBVI-V-B7H-PKQM
EV/IA
Décision déférée du 20 Février 2023
Président du TJ de [Localité 9]
22/04292
Mme MICHEL
S.A. AXA FRANCE IARD
C/
[X] [D] épouse [B]
[G] [B]
S.A.S. URETEK FRANCE
CONFIRMATION PARTIELLE
Grosse délivrée
le
à
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
***
COUR D'APPEL DE TOULOUSE
3ème chambre
***
ARRÊT DU QUINZE JUILLET DEUX MILLE VINGT CINQ
***
APPELANTE
S.A. AXA FRANCE IARD
[Adresse 3]
[Localité 6]
Représentée par Me Eric-gilbert LANEELLE de la SELAS CLAMENS CONSEIL, avocat au barreau de TOULOUSE
INTIMÉS
Madame [X] [D] épouse [B]
[Adresse 8]
[Localité 4]
Représentée par Me Etienne DURAND-RAUCHER de la SCP CABINET MERCIE - SCP D'AVOCATS, avocat au barreau de TOULOUSE
Monsieur [G] [B]
[Adresse 8]
[Localité 4]
Représenté par Me Etienne DURAND-RAUCHER de la SCP CABINET MERCIE - SCP D'AVOCATS, avocat au barreau de TOULOUSE
S.A.S. URETEK FRANCE
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représentée par Me Ophélie BENOIT-DAIEF de la SELARL LX PAU-TOULOUSE, avocat postulant au barreau de TOULOUSE et par Me Stéphanie NGUYEN NGOC de l'AARPI AXIAL Avocats, avocat plaidant au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR
Après audition du rapport, l'affaire a été débattue le 30 Avril 2025 en audience publique, devant la Cour composée de :
E. VET, conseiller faisant fonction de président de chambre
P. BALISTA, conseiller
S. GAUMET, conseiller
qui en ont délibéré.
Greffière, lors des débats : I. ANGER
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties
- signé par E. VET, président, et par I. ANGER, greffière de chambre.
FAITS ET PROCÉDURE
M. [G] [B] et Mme [X] [D] épouse [B] ont fait construire une maison à usage d'habitation située [Adresse 2].
Le lot gros oeuvre avait été confié à la SARL [K] [W], assurée au titre de la garantie décennale auprès de la SA Axa France Iard qui est aussi l'assureur multirisque habitation des époux [B].
La SARL [K] [W] a établi deux factures les 9 juillet et 6 septembre 2003.
Le 22 décembre 2005, M. et Mme [B] ont déclaré un sinistre catastrophe naturelle auprès de leur assureur, à la suite de la constatation de nombreuses fissures affectant leur maison et à la publication d'un arrêté de catastrophe naturelle cdu 22 décembre 2005 concernant la commune de [Localité 7].
L'assureur n'a pas pris en charge le sinistre, estimant que les désordres pouvaient éventuellement relever de la garantie décennale du constructeur.
Les époux [B] ont alors procédé à une nouvelle déclaration de sinistre auprès de la même compagnie en sa qualité d'assureur garantie décennale de la SARL [K] [W].
La SA Axa opposait que la garantie décennale n'était pas mobilisable dans la mesure où les désordres ne compromettaient pas la solidité de l'ouvrage, sous réserve d'évolution.
En 2011, constatant une aggravation des fissures, les époux [B] ont procédé à une nouvelle déclaration de sinistre auprès de la SA Axa.
Missionné par l'assureur au titre l'assurance multirisque habitation, le Cabinet Elex, concluait le 1er février 2013 que certains désordres (mur de clôture fissuré, détachements centimétriques entre le dallage sous l'auvent et les aggloa périphériques, fissures verticales d'ouverture en partie droite du linteau de la porte-fenêtre gauche) n'avaient pas pour caractère déterminant la sécheresse mais découlaient de choix structurels inappropriés au terrain, les autres désordres constatés (autres types de fissures) justifiant la convocation de l'assureur décennal du maçon.
Selon rapport du 7 août 2013 et rapport complémentaire du 15 septembre 2014, la SAS Saretec, expert mandaté au titre de la garantie décennale de la SARL [K] [W], concluait à un défaut de fondations sur la partie basse de l'habitation, nécessitant des travaux de reprise en sous-oeuvre.
Ces travaux de reprise étaient confiés à la SAS Uretek France, réceptionnés le 5 juin 2015 et réglés par M. et Mme [B] le 20 juillet 2015.
La compagnie Axa réglait aux époux [B] la somme de 55.009,84 € le 15 janvier 2015, correspondant aux travaux de reprise et aux travaux d'embellissements consécutifs.
Constatant l'apparition de nouvelles fissures, les époux [B] déclaraient un nouveau sinistre à la compagnie Axa le 17 février 2017.
Sur saisine des époux [B], le juge des référés du tribunal de grande instance de Toulouse ordonnait le 14 juin 2018 une expertise judiciaire confiée à Mme [I] de la SARL Keops qui a déposé son rapport le 6 mai 2022.
Suivant autorisation donnée le 28 septembre 2022 d'assigner à jour fixe, les époux [B] ont fait assigner devant le tribunal judiciaire de Toulouse par actes d'huissier des 5, 7 et 10 octobre 2022, la SA Axa France Iard, la SARL [K] [W] et la SAS Uretek France aux fins de :
- homologuer le rapport d'expertise judiciaire,
- condamner solidairement la SARL [K] [W], la Cie Axa France Iard, la SAS Uretek à payer à M. et Mme [B] les sommes suivantes :
* 190.658,17 € TTC, avec indexation sur l'indice du coût de la construction BT01 au titre des travaux de reprise,
* 11.730,00 € TTC au titre du préjudice lié au relogement et au stockage des meubles pendant la durée des travaux de reprise,
* 5.000,00 € à titre de dommages-et-intérêts en réparation du préjudice de jouissance pendant la durée des travaux de reprise,
* 12.000 € à titre de dommages-et-intérêts en réparation du préjudice moral,
* 6.000 € au titre des frais irrépétibles,
- les entiers dépens, en ce compris les frais d'expertise judiciaire, qui pourront être recouvrés directement par Me Durand-Raucher conformément à l'article 699 du code de procédure civile,
- dire n'y avoir lieu à écarter l'exécution provisoire de la décision à intervenir.
Par jugement contradictoire du 20 février 2023, le tribunal a :
- déclaré irrecevable l'action introduite par Mme [X] [B] née [D] et M. [G] [B] à l'encontre de la SARL [K] [W] et de son assueur, la SA Axa France Iard sur le fondement de l'article 1792 du code civil,
- condamné in solidum la SA Axa France Iard et la SAS Uretek à payer à Mme [X] [B] née [D] et M. [G] [B] :
* la somme de 112.264,79 € au titre de la reprise des désordres affectant la partie nuit, avec indexation sur l'indice du coût de la construction BT01,
* la somme de 11.730 € au titre des frais de relogement temporaire des requérants,
* la somme de 3.000 € au titre du préjudice de jouissance résultant des travaux de reprise,
- condamné la SA Axa France Iard à payer à Mme [X] [B] née [D] et M. [G] [B] :
* la somme de 78.393, 38 € au titre de la reprise des désordres affectant la partie jour, avec indexation sur l'indice du coût de la construction BT01,
- débouté Mme [X] [B] née [D] et M. [G] [B] de leur demande au titre d'un préjudice moral,
- dit que dans les rapports entre co-obligés, la charge finale de la dette au titre des dommages résultant des désordres de la partie nuit, des frais de relogement temporaire et au titre du préjudice de jouissance sera supportée à hauteur de 80% par la SA Axa France Iard et à hauteur de 20% par la SAS Uretek, proportions dans lesquelles il est fait droit aux recours,
- débouté la SA Axa France Iard de son appel en garantie concernant les dommages affectant la partie jour de la construction
- déclaré sans objet les demandes de la SA Axa France Iard relatives à l'opposabilité des franchises contractuelles,
- condamné in solidum la SA Axa France Iard et la SAS Uretek à payer à Mme [X] [B] née [D] et M. [G] [B] la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné in solidum la SA Axa France Iard et la SAS Uretek aux dépens, y compris les frais d'expertise judiciaire qui pourront être recouvrés directement par Me Durand-Raucher conformément à l'article 699 du code de procédure civile,
- dit que dans les rapports entre co-obligés, la charge finale de la dette au titre de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens, comprenant les frais d'expertise, sera supportée à hauteur de 80% par la SA Axa France Iard et à hauteur de 20% par la SAS Uretek,
- rejeté toutes les autres demandes plus amples ou contraires formées par les parties,
- rappelé que l'exécution provisoire du jugement est de droit.
Par déclaration du 22 mars 2023, la SA Axa France Iard a relevé appel de la décision.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
La SA Axa France Iard dans ses dernières conclusions du 18 décembre 2023, demande à la cour au visa des articles 1792 et 1792-4-1,1240 et suivants du code civil, de :
- confirmer le jugement rendu le 20 février 2023 en ce qu'il a déclaré irrecevable le recours formé à l'encontre d'Axa au visa de l'article 1792 du code civil,
- infirmer le jugement rendu le 20 février 2023 en ce qu'il a:
* condamné in solidum la SA Axa France Iard et la SAS Uretek à payer à Mme [X] [B] née [D] et M. [G] [B]:
** la somme de 112.264,79 € au titre de la reprise des désordres affectant la partie nuit, avec indexation sur l'indice du coût de la construction BT01,
** la somme de 11.730 € au titre des frais de relogement temporaire des requérants,
** la somme de 3.000 € au titre du préjudice de jouissance résultant des travaux de reprise,
* condamné la SA Axa France Iard à payer à Mme [X] [B] née [D] et M. [G] [B] :
** la somme de 78.393, 38 € au titre de la reprise des désordres affectant la partie jour, avec indexation sur l'indice du coût de la construction BT01,
- dit que dans les rapports entre co-obligés, la charge finale de la dette au titre des dommages résultant des désordres de la partie nuit, des frais de relogement temporaire et au titre du préjudice de jouissance sera supportée à hauteur de 80% par la SA Axa France Iard et à hauteur de 20% par la SAS Uretek, proportions dans lesquelles il est fait droit aux recours,
* débouté la SA Axa France Iard de son appel en garantie concernant les dommages affectant la partie jour de la construction
* déclaré sans objet les demandes de la SA Axa France Iard relatives à l'opposabilité des franchises contractuelles,
* condamné la SA Axa France Iard à payer à Mme [X] [B] née [D] et M. [G] [B] la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
* condamné la SA Axa France Iard aux dépens, y compris les frais d'expertise judiciaire qui pourront être recouvrés directement par Me Durand-Raucher conformément à l'article 699 du code de procédure civile,
* dit que dans les rapports entre co-obligés, la charge finale de la dette au titre de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens, comprenant les frais d'expertise, sera supportée à hauteur de 80% par la SA Axa France Iard et à hauteur de 20% par la SAS Uretek,
Statuant à nouveau,
' à titre principal,
- dire et juger que seule la responsabilité de la société Uretek peut être présumée sur le fondement de l'article 1792 du code civil,
- débouter les époux [B] de leurs demandes au titre de la responsabilité délictuelle de la compagnie Axa, faute de démonstration d'une faute en lien direct et certain avec les préjudices,
- «débouter toutes demandes» formulées à l'encontre de la compagnie Axa,
- les condamner à verser à la compagnie Axa la somme de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens, dont distraction au profit de la Selas Clamens Conseil à valoir sur son offre de bien conformément à l'article 699 du code de procédure civile,
' à titre subsidiaire,
- limiter la quote-part de responsabilité de la compagnie Axa à concurrence de 5 % des préjudices pour les parties « nuit » et « jour »,
- dire et juger que la responsabilité de la société Uretek est engagée de manière prépondérante sur le fondement de la garantie décennale pour la partie « nuit »,
- dire et juger que la responsabilité de la société Uretek est engagée de manière prépondérante sur le fondement de la garantie décennale ou à défaut sur le fondement de la responsabilité délictuelle au titre de son obligation de conseil, pour la partie
« jour»,
- condamner la société Uretek à relever et garantir la compagnie Axa à concurrence de 95 % des condamnations susceptibles d'être prononcées à son encontre pour les parties « nuit » et « jour»,
- la condamner à verser à la compagnie Axa la somme de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens, dont distraction au profit de la Selas Clamens Conseil à valoir sur son offre de bien conformément à l'article 699 du CPC.
' en tout état de cause :
- débouter les époux [B] de leurs demandes au titre du trouble de jouissance et du préjudice moral.
Mme [X] [B] née [D] et M. [G] [B] dans leurs dernières conclusions du 18 septembre 2023, demandent à la cour au visa des articles 1240 et suivants et 1792 et suivants du code civil, de :
- infirmer le jugement du 20 février 2023 en ce qu'il :
* déclare irrecevable l'action des demandeurs à l'encontre de la Cie Axa sur le fondement de l'article 1792 du code civil,
* limite la condamnation de la SAS Uretek aux désordres affectant la « partie nuit »,
* limite l'indemnisation des demandeurs au titre du préjudice de jouissance,
* déboute M. et Mme [B] de leur demande au titre du préjudice moral.
Et, statuant à nouveau,
- condamner solidairement la Cie Axa France Iard et la SAS Uretek à payer à M. et Mme [B] les sommes suivantes :
* 190.658,17 € TTC, avec indexation sur l'indice du coût de la construction BT01 au titre des travaux de reprise,
* 11.730,00 € TTC au titre du préjudice lié au relogement et au stockage des meubles pendant la durée des travaux de reprise,
* 5.000,00 € à titre de dommages-et-intérêts en réparation du préjudice de jouissance pendant la durée des travaux de reprise,
* 12.000,00 € à titre de dommages-et-intérêts en réparation du préjudice moral,
* 6.000,00 € au titre des frais irrépétibles de justice de première instance sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
* 6.000,00 € au titre des frais irrépétibles de justice d'appel sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
* les entiers dépens, en ce compris les frais d'expertise judiciaire, qui pourront être recouvrés directement par Me Durand-Raucher conformément à l'article 699 du code de procédure civile,
À titre subsidiaire,
- confirmer le jugement du 20 février 2023 en toutes ses dispositions,
Ce faisant,
- condamner solidairement la SA Axa France Iard et la SAS Uretek à payer à Mme [X] [B] née [D] et M. [G] [B] :
* la somme de 112.264,79 € au titre de la reprise des désordres affectant la partie nuit, avec indexation sur l'indice du coût de la construction BT01,
* la somme de 11.730,00 € au titre des frais de relogement temporaire des requérants
* la somme de 3.000,00 € au titre du préjudice de jouissance résultant des travaux de reprise,
- condamner la SA Axa France Iard à Mme [X] [B] née [D] et M. [G] [B] :
* la somme de 78.393,38 € au titre de la reprise des désordres affectant la partie jour, avec indexation sur l'indice du coût de la construction BTOI,
- condamner solidairement la SA Axa France Iard et la SAS Uretek à payer à Mme [X] [B] née [D] et M. [G] [B] la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et la somme de 6.000,00 € au titre des frais d'appel,
- condamner solidairement la SA Axa France Iard et la SAS Uretek aux dépens, y compris les frais d'expertise judiciaire qui pourront être recouvrés directement par Me Durand-Raucher conformément à l'article 699 du code de procédure civile,
En toute hypothèse,
- débouter la Cie Axa France Iard de son appel et de ses demandes,
- débouter la SAS Uretek de son appel incident et de ses demandes.
La SAS Uretek France dans ses dernières conclusions du 15 décembre 2023, demande à la cour au visa des articles 1240 et 1792 du code civil, de :
- confirmer le jugement en ce qu'il a :
* débouté les époux [B] de leur demande de condamnation dirigée à l'encontre de la SAS Uretek France sur le fondement de la garantie décennale, au titre des désordres affectant la partie « jour » se situant hors périmètre d'intervention de cette dernière, soit la somme de 78 393, 30 € TTC ,
* débouté les époux [B] de leur demande de condamnation dirigée à l'encontre de la SAS Uretek France sur le fondement de la garantie décennale, au titre des désordres affectant la partie « nuit » traitée par injections (112 264,79 € : travaux de reprise),
* débouté les époux [B] de leur demande au titre du préjudice moral,
* limité l'indemnité au titre du préjudice de jouissance à 3 000 €,
- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la SA Axa France Iard à payer aux époux [B] les sommes suivantes :
* 112 264,79 € au titre de la reprise des désordres affectant la partie « nuit »,
* 11 730 € au titre des frais de relogement,
* 3 000 € au titre du préjudice de jouissance,
* 78 393,38 € au titre de la reprise des désordres affectant la partie « Jour » au principal,
- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté SA Axa France Iard de son recours à l'encontre de la SAS Uretek France au titre des désordres affectant la partie « jour ».
L'ordonnance de clôture est intervenue le 14 avril 2025.
La cour, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des demandes et moyens des parties, fera expressément référence à la décision déférée ainsi qu'aux dernières conclusions déposées.
MOTIFS
Si la SA Axa France Iard a formé appel de la décision en ce qu'elle a déclaré sans objet ses demandes relatives à l'opposabilité des franchises contractuelles, elle ne présente aucune demande à ce titre dans le dispositif de ses conclusions et n'évoque pas cette question dans sa motivation.
Par ailleurs, la cour précise que le côté de la maison appelé partie « nuit » par les parties correspondant à celui sur lequel la SAS Uretek est intervenue, et est appelé partie Est par l'expert.
Sur la forclusion de l'action fondée contre la SA Axa France Iard en qualité d'assureur décennal de la SARL [K] [W]:
Les époux [B] font valoir que les nouveaux désordres constatés par l'expert judiciaire sont la suite de l'aggravation de ceux pris en charge par l'assureur amiablement au titre de la garantie décennale de la SARL [W] et doivent être considérés comme des désordres évolutifs.
Ils expliquent qu'en 2015, le désordre originel a été constaté et pris en charge par la compagnie Axa, que selon l'expert, les travaux entrepris n'ont pas permis de stabiliser les fondations. Ainsi, les désordres apparus postérieurement étant de même nature doivent donc être pris en charge par l'assureur décennal, la dénonciation judiciaire des premiers désordres ne pouvant être une condition de recevabilité alors qu'ils ont été pris en charge par la compagnie Axa.
La SA Axa oppose que la prescription décennale ne peut être interrompue que par une assignation en justice et qu'en l'espèce les travaux effectués par la SARL [W] étant intervenus courant 2003 les époux [B] sont forclos à agir en réparation des désordres dénoncés le 1er février 2017.
Sur ce
L'article 1792 du Code civil dispose : «Tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination.
Une telle responsabilité n'a point lieu si le constructeur prouve que les dommages proviennent d'une cause étrangère.».
Selon l'article 1792'4-1du même code, l'action fondée sur ce texte se prescrit par 10 ans.
Enfin, de nouveaux désordres, dits désordres évolutifs, constatés au-delà de l'expiration du délai décennal qui est un délai d'épreuve, peuvent être réparés au titre de l'article 1792 du code civil s'ils trouvent leur siège dans l'ouvrage où un désordre de même nature avait été constaté et dont la réparation avait été demandée en justice avant l'expiration de ce délai.
Si la théorie des dommages dits évolutifs autorise la mise en jeu de la responsabilité décennale des constructeurs au-delà du délai de 10 ans à compter de la réception, c'est seulement sous réserve que les conditions cumulatives suivantes soient réunies : le désordre initial doit présenter le degré de gravité requis à l'article 1792 du code civil, les désordres apparus au-delà du délai de 10 ans doivent constituer une aggravation des désordres initiaux, et à défaut, il doit y avoir identité de cause des nouveaux dommages et des dommages initiaux.
Surtout, le désordre initial doit avoir donné lieu à une action en responsabilité décennale contre le constructeur ou à une action directe contre son assureur de responsabilité avant l'expiration du délai décennal, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.
En effet, la réception des travaux réalisés par la SARL [W] est intervenue tacitement par la prise de possession de l'ouvrage et le règlement de la facture du 6 septembre 2003 et aucune dénonciation judiciaire n'est intervenue dans le délai de la prescription décennale.
En conséquence, la décision déférée doit être confirmée en ce qu'elle a déclaré irrecevable l'action des époux [B] à l'encontre de la SA Axa France Iard, assureur décennal de la SARL [K] [W] sur le fondement de l'article 1792 du Code civil.
Sur la responsabilité de la SA Axa France Iard et de la SAS Uretek France France à l'égard des époux [B]:
Les époux [B] font valoir que :
' la responsabilité délictuelle de l'assureur peut être retenue en ce que les travaux qu'il a accepté de prendre en charge se sont révélés insuffisants et contraires aux préconisations du technicien qu'il avait mandaté,
' les désordres résultant des travaux effectués par la SAS Uretek France sont de nature décennale et si la partie jour a subi des désordres c'est aussi en raison de l'intervention partielle de la SAS Uretek sur la partie nuit alors qu'elle connaissait les risques induits par une intervention partielle,
' cette société a accepté de réaliser des travaux de reprise en sous-'uvre partiels et par injection de résine alors que l'étude de sol réalisée préconisait de conforter les fondations par micro-pieux sur l'ensemble de la construction, considérant que la solution de confort par injection de résine expansive n'était pas adaptée,
' la SAS Uretek France ayant accepté d'intervenir sans étude préalable d'un bureau d'études structure ne peut invoquer aucune cause étrangère pouvant exonérer sa responsabilité décennale de plein droit qui ne peut être limitée à la partie nuit de l'immeuble puisque la partie jour a subi des désordres en raison de cette intervention partielle dont la SAS Uretek France connaissait les risques.
La SA Axa France Iard oppose que:
' aucune obligation ne lui imposait d'initier une mesure d'expertise visant à rechercher la cause et à déterminer les travaux de reprise dont elle n'est pas prescripteur,
' seule la société Uretek France ayant conçu et réalisé les travaux de confortement dont elle avait seule la maîtrise peut voir sa responsabilité retenue,
' l'expertise judiciaire démontre que la SAS Uretek a préconisé des travaux inadaptés à la nature du sol et à la présence de végétaux et en limitant les travaux à la partie nuit sans étude préalable de la structure elle a créé un point dur aggravant le tassement différentiel alors qu'elle était chargée de définir les travaux de reprise pour les deux blocs, par ailleurs elle n'a suggéré le traitement pour la partie jour que dans un cadre optionnel alors qu'elle était informée de l'absence de joint différentiel entre les deux blocs exposant à l'apparition de désordres par répercussions sur la partie jour et aurait dû en l'absence de choix de cette option, refuser de limiter son intervention à un seul bloc,
' par ailleurs la société Uretek France a reconnu avoir oublié de traiter le cellier et dans le cadre de son service après-vente préconisé des injections complémentaires qui n'ont jamais été réalisées alors qu'elle était tenue à une obligation de résultat l'égard des époux [B].
La SAS Uretek France France oppose que:
' l'assureur qui finance une solution de reprise ne permettant pas de mettre un terme définitif aux désordres engage sa responsabilité de même que celui qui fait l'économie dans le cadre de l'instruction amiable d'un sinistre des études géotechniques nécessaires à la parfaite définition de la solution réparatoire,
' en l'espèce, le cabinet Saretec missionné par Axa a fait le choix inapproprié de la consulter pour un traitement par injection validé en amont aux lieu et place d'une reprise par micro-pieux préconisée par le géo-technicien et a au surplus choisi de limiter le traitement à une partie seulement de la maison,
' par ailleurs, la SA AXA a renoncé à faire intervenir un BET structure qui aurait défini les dispositions permettant de résoudre les problématiques structurelles dont le joint de fractionnement entre les deux parties de l'ouvrage et n'a pas prévu l'agrafage des fissures qu'elle-même avait réclamé ni supprimé la végétation pourtant cause aggravante des désordres.
Sur ce
Les époux [B] ont confié le gros 'uvre de la construction de leur maison d'habitation à la SARL [K] [W] assurée au titre de sa garantie décennale auprès de la SA Axa France Iard qui, suite à des désordres a reconnu sa garantie et, dans un cadre amiable, financé des travaux de reprise réalisés par la SAS Uretek France suite à l'expertise amiable réalisée par la SAS Saretec qu'elle avait mandatée.
La SA Axa France Iard assureur dommages-ouvrage avait l'obligation de déterminer, aux termes des opérations d'expertise qu'elle avait diligentées des travaux d'une ampleur et d'une nature propres à la mise en oeuvre d'une réparation pérenne des désordres affectant l'ouvrage.
Il conviendra en conséquence de rechercher si la SA Axa France Iard a commis des fautes dans la gestion du sinistre initial.
Par ailleurs, la responsabilité de la SAS Uretek France France est recherchée par les époux [B] sur le fondement de l'article 1792 du Code civil dont les termes ont été rappelés et qui est une responsabilité de plein droit du constructeur envers le maître de l'ouvrage, des désordres qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou le rendent impropre à sa destination, sauf s'il prouve que les dommages proviennent d'une cause étrangère.
Enfin, comme rappelé par les premiers juges, chacun des responsables d'un même dommage doit être condamné à le réparer en totalité sans qu'il y ait lieu à tenir compte du partage de responsabilité entre les divers responsables qui n'affectent que les rapports entre eux.
En l'espèce, il résulte des pièces produites que:
' une expertise amiable a été réalisée par le cabinet Saretec les 7 août 2013 et 15 septembre 2014 et à cette occasion la société Géobilan a effectué un diagnostic géotechnique de l'immeuble selon lequel les désordres affectant la partie Est sont liés à un défaut de fondation qui engendre des tassements différentiels alors que la dessiccation semblait être à l'origine principale des fissures observées dans la partie Ouest,
- le cabinet géotechnique concluait que pour éviter des tassements différentiels l'ensemble de la construction devait être partout fondé sur le même sol, avec le même système de fondation et que pour stabiliser l'ensemble de la construction il faudrait la fonder sur des micro-pieux scellés dans le substratum molassique à partir de 5 m de profondeur,
' suite à ce rapport, le cabinet Saretec, relevant que la maison était composée de deux corps de bâtiments fondés différemment n'ayant pas été isolés par un joint de rupture,
et que les investigations avaient démontré un défaut de fondation sur la partie Est et que la partie Ouest subissait une petite déformation a retenu deux solutions de reprise: une reprise intégrale par micro pieux des fondations et du dallage (104'902,32 €) ou une reprise par injection de résine(52'773,77 €), précisant à ce titre « il convient d'ajouter à notre avis l'injection de «la pièce nuit» pour un montant de 5345,67 €,
Il précisait enfin : « la partie supérieure en rez-de-chaussée (partie ouest) de l'habitation ne nécessite pas de reprise en sous-'uvre au droit des fondations. », seul le dallage affecté d'un tassement devant être repris,
' l'entreprise Uretek France a réalisé les travaux de réparation suivant devis du 14 janvier 2015 prévoyant le traitement d'une partie des fondations et du dallage et proposant le traitement du dallage de l'autre partie en option,
' l'assureur n'a finalement pas opté pour le traitement de la partie nuit proposé,
' le devis mentionnait la nécessité: d'un agrafage des fissures, de vérifier la rigidité du bâtiment par un BET spécialisé et d'élaguer les arbres situés à une distance de moins de 8 m l'assureur n'a finalement pas opté pour la reprise de la partie nuit.
Il résulte de l'expertise judiciaire que:
' l'expert a constaté l'apparition de nouvelles micro-fissures et surtout de nouvelles fissures notamment à l'angle sud-est de la partie Est de la maison de même qu'à l'intérieur,
' selon le cahier des charges du procédé Uretek France Deep Injections validé par Socotec le 31 décembre 2014 une étude de sol et une description de la structure de l'ouvrage devaient être réalisées, la faisabilité de l'opération notamment au regard du relevage ponctuel partiel de l'ouvrage devant être appréciée au cours d'une visite,
' l'étude géotechnique qui avait été réalisée n'abordait pas la possibilité du mode réparatoire retenu c'est-à-dire l'injection de résine, seule la reprise par micro-pieux ayant été envisagée et cette étude n'a pas réalisé une reconnaissance précise des fondations, alertant cependant sur le défaut de fondation de la partie Est, sur l'insuffisance de profondeur des fondations de la partie Ouest et sur le fait que les deux parties n'étaient pas isolées par un joint de rupture, en tout état de cause, elle prévoyait clairement : « pour éviter des tassements différentiels pouvant engendrer de nouvelles fissures, il faut que l'ensemble de la construction soit partout fondé sur le même sol, avec le même système de fondation »,
' les injections de résine réalisées par la société Uretek France n'ont pas permis de stabiliser les fondations et le dallage et si les désordres dans la partie Est nécessitent réparation, ceux de la partie Ouest étant de moindre importance, le dispositif constructif de la maison composée de deux parties dont les fondations sont différentes mais qui ne sont pas isolées par un joint de rupture imposait un traitement intégral,
En conclusion, la solution qui a été choisie par Axa n'était pas celle préconisée par le bureau d'études techniques d'une installation de micro-pieux sur l'ensemble de la construction mais celle par injection de résine expansive d'une partie des fondations, ceci sans que le cahier des charges prévu pour l'exécution de cette technique soit respecté.
- sur la responsabilité délictuelle de la SA Axa France Iard :
Il résulte de l'expertise que l'assureur de responsabilité civile décennale qui, admettant sa garantie s'est chargé, par une expertise pour laquelle il a désigné son expert, de déterminer les travaux de nature à mettre fin aux désordres et à assurer la réparation pérenne de l'ouvrage, ne peut être considéré comme ayant rempli ses obligations en proposant une solution technique différente de celle envisagée au cours des opérations d'expertise, laquelle n'a pas réparé les désordres de manière pérenne alors qu'au surplus la pose de micro-pieux avait été préconisée par le bureau d'études commis et que son propre expert avait considéré qu'un traitement par résine plus large était nécessaire.
Par ailleurs, si le devis de la société Uretek France préconisait : agrafage des fissures, l'intervention d'un bureau d'études structures et un élagage de la végétation, il n'est pas contesté que ces préconisations n'ont pas été respectées, ces demandes étant hors devis.
En conséquence, la décision déférée doit être confirmée en ce qu'elle, sur le fondement de l'article 1240 du Code civil retenu la responsabilité de la SA Axa dans le préjudice subi par les époux [B] résultait des fautes commises par elle dans le choix du traitement des désordres.
Dès lors, elle devra indemniser les époux [B] pour l'ensemble des préjudices subis.
- sur la responsabilité décennale de la SAS Uretek:
La SAS Uretek France ne conteste pas l'engagement de sa responsabilité décennale au titre des désordres affectant la partie « nuit » sur laquelle elle est intervenue.
Les époux [B] et la SA Axa France Iard contestent cette limitation de responsabilité à la seule zone d'intervention de la SAS Uretek France.
Sur ce
Le débat porte exclusivement sur la zone sur laquelle la SAS Uretek n'est pas intervenue.
Il résulte de l'article 1792 du Code civil que la responsabilité décennale ne peut porter que sur l'ouvrage réalisé et en l'espèce la SAS Uretek n'est pas intervenue sur la zone jour et sa responsabilité décennale ne peut en conséquence être recherchée.
Dès lors, la décision déférée doit être confirmée en ce qu'elle n'a pas retenu la responsabilité décennale de la SAS Uretek France concernant la partie jour de la maison.
La SAS Uretek France sera donc tenue à l'égard des époux [J] dans cette limite.
Sur le montant des reprises et les préjudices subis:
L'expert a évalué les travaux de reprise à la somme totale de 190'658,17 € TTC se décomposent comme suit :
- zone jour : 78'393,38 € TTC,
- zone nuit : 112'264,79 € TTC
Ces montants ne sont pas spécialement contestés par les parties.
La SAS Uretek ne pouvant être tenue vis à vis des maîtres de l'ouvrage au regard de la formulation de leurs prétentions qu'au titre des reprises effectuer en zone nuit, elle sera condamnée in solidum avec la SA Axa impayé à payer la somme de 112'264,79 € avec indexation sur l'indice du coût de la construction BT 01.
La SA Axa sera seule tenue à l'égard des époux [B] du coût des reprises de la zone jour à hauteur de 78'393,38 € avec indexation sur l'indice du coût de la construction BT01.
La décision déférée sera confirmée de ces chefs.
Par ailleurs le montant qui a été octroyé par les premiers juges au titre du coût du relogement temporaire des époux [B] pendant la durée des travaux, soit 11'730 € n'est pas spécialement contesté et la décision déférée sera confirmée en ce qu'elle a condamné in solidum SAS Uretek et la SA Axa à leur verser ce montant.
Les époux [B] font valoir que:
' leur préjudice de jouissance doit être évalué à 5000 € et non 3000 € comme retenu par le tribunal judiciaire dès lors qu'ils ne pourront pas jouir de leur bien et que leur relogement ponctuel dans un établissement hôtelier leur offrira des prestations inférieures,
' ils subissent un préjudice moral alors que depuis l'apparition des premières fissures en 2015 ils ont subi les errements d'une procédure judiciaire longue et fastidieuse, une expertise judiciaire d'une durée de quatre ans, alors qu'ils constataient avec impuissance l'aggravation des désordres de leur maison et craignaient pour leur sécurité et celle de leurs enfants.
La SA Axa oppose que :
' le montant octroyé par les premiers juges au titre du préjudice de jouissance fait doublon avec l'indemnisation qui leur a été accordée au titre de leur relogement pendant les travaux et correspond au surplus à une indemnisation forfaitaire,
' les époux [B] sollicitent l'indemnisation d'un préjudice moral sans justifier d'une atteinte à leur personne dans leur honneur, leur réputation ou leur affection.
La SAS Uretek France considère que les époux [B] ne démontrent pas le préjudice moral allégué et que leur préjudice de jouissance a été justement limité à 3000 €.
La cour considère que le préjudice de jouissance qui a été indemnisé par les premiers juges ne fait pas double emploi avec l'indemnisation de leurs frais de relogement qui ne concerne que la prise en charge financière alors que le préjudice de jouissance subi par les époux [B] indemnise le préjudice résultant du fait que pendant cinq mois ils ne pourront jouir de leur bien qui par ailleurs offre une surface habitable de 112 m² trois chambres et un jardin pour leurs enfants.
Au regard de ces éléments, si c'est à bon droit que les premiers juges ont indemnisé ce préjudice, compte tenu de la durée importante pendant laquelle les époux [B] et leurs enfants ne pourront jouir de leur bien, du fait que leur relogement ne leur offrira que des prestations moindres par rapport à leur bien (superficie, jardin), s'agissant de la location d'un appartement Appart'City, ce préjudice sera indemnisé par l'octroi de 5000 € par infirmation de la décision déférée.
Par ailleurs, le préjudice moral dont il est demandé réparation par les époux [B] est expliqué par le fait qu'ils ont constaté les premières fissures en 2015, subi une procédure longue tout en constatant l'aggravation des désordres dans leur maison entraînant la peur de voir tomber les plafonds de leur chambre et de celles de leurs enfants.
Cependant, les époux [B] ne produisent aucune pièce objectivant ce préjudice (attestation, pièces médicales) et la durée de la procédure ne peut être reprochée à leurs adversaires.
La décision déférée doit donc être confirmée en ce qu'elle a rejeté la demande présentée par les époux [B] à ce titre.
Sur la charge finale de l'indemnisation des époux [B]:
La SA Axa souligne que l'expert amiable a retenu que les deux solutions de reprises, par micro-pieux ou par injection étaient envisageables et que la SAS Uretek n'aurait pas dû limiter ses travaux à la partie nuit sans étude préalable de la structure, ce qui a aggravé le tassement différentiel alors qu'elle était chargée de définir les travaux de reprise pour les deux blocs et qu'elle n'a pas préconisé le traitement de la partie jour, proposant une simple option commerciale. Par ailleurs, elle a omis de traiter le cellier et n'a pas fait les injections complémentaires préconisées par le service après-vente.
Enfin, le géotechnicien commis dans le cadre de l'expertise judiciaire a souligné que la végétation rendait les travaux par injection inadaptés.
La SAS Uretek oppose que le cabinet Saretec a exclu la partie jour de son intervention et opté pour un traitement par injection le 15 septembre 2014 alors qu'elle-même n'a établi un devis que le 14 janvier 2015. Par ailleurs, elle souligne que ses recommandations n'ont pas été respectées: agrafage des fissures, intervention d'un BET structures et suppression de la végétation alentour. Par ailleurs le devis souligne la nécessité d'une stabilisation hydrique et certains réseaux se sont révélés fuyards.
Sur ce
La SAS Uretek à laquelle ont été confiés les travaux de reprise de la maison des époux
[B] a réalisé des travaux qui se sont révélés insuffisants en ce que de nouvelles fissures sont apparues.
Dans le cadre de sa recherche d'une solution pérenne, elle devait, respecter ses propres conditions particulières figurant au devis prévoyant une intervention subsidiaire à celle d'un géotechnicien et vérifier le retrait de la végétation alentour, le géotechnicien qui est intervenu dans le cadre de l'expertise judiciaire ayant relevé le facteur aggravant de cette végétation, ce qu'elle ne pouvait ignorer, le devis préconisant seulement un élagage et non un arrachage des arbres situés à une distance de moins de 8 m.
Cependant, la SA Axa ne pouvait ignorer les conditions particulières du devis qu'elle avait signé et dont elle n'a pas non plus respecté les termes. Par ailleurs, si elle avait pris la précaution de faire intervenir un géotechnicien antérieurement à l'intervention de la SAS Uretek elle n'a en rien suivi ses préconisations de réalisation de micro-pieux après analyse fouillée de la nature du sol et surtout, alors que cette technique n'avait pas été envisagée ne l'a pas réinterrogé sur cette possibilité. Or, cette précaution était indispensable compte tenu de la nature du sol et au regard de la gravité des conséquences encourues pour les époux [B].
En regard de ces éléments, la décision déférée sera infirmée et la part de responsabilité des deux sociétés dans les préjudices subis par les époux [B] fixée à 50 % chacune.
La charge finale de la dette sera donc supportée comme suit :
- par la SA Axa d'une part, la société Uretek d'autre part, par un partage par moitié de la dette dans laquelle elles sont co-obligées dans l'indemnisation des maîtres de l'ouvrage s'agissant du coût des reprises de la partie nuit, des frais de relogement pendant les travaux et du préjudice de jouissance,
- par voie d'infirmation de la décision entreprise, par la condamnation de la société Uretek à relever et garantir la SA Axa à hauteur de la moitié de la somme mise à sa charge au titre du coût des travaux de reprise de la partie jour.
Sur les demandes annexes:
L'équité commande de confirmer la décision déférée sur la somme allouée aux époux [B] au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de faire droit à leurs demandes à ce titre en cause d'appel à hauteur de 6000 € que leurs adversaires seront condamnés à leur verser in solidum.
La charge finale de cette dette sera supportée par moitié par les parties co-obligées.
Par ailleurs, la demande de la SA Axa France Iard à ce titre sera rejetée.
Par voie d'infirmation de la décision entreprise, la charge finale des dépens de première instance et des frais irrépétibles des époux [B] sera supportée par moitié par la SA Axa et la société Uretek, lesquelles seront condamnées in solidum aux dépens d'appel, dont la charge finale sera supportée dans la même proportion que celle fixée au titre des dépens de première instance.
PAR CES MOTIFS:
La cour,
Statuant dans les limites de sa saisine:
Confirme la décision déférée sauf en ce qu'elle a:
- condamné in solidum la SA Axa France Iard et la SAS Uretek à payer à Mme [X] [B] née [D] et M. [G] [B] la somme de 3.000 € au titre du préjudice de jouissance résultant des travaux de reprise,
- dit que dans les rapports entre co-obligés, la charge finale de la dette au titre des dommages résultant des désordres de la partie nuit, des frais de relogement temporaire et au titre du préjudice de jouissance sera supportée à hauteur de 80% par la SA Axa France Iard et à hauteur de 20% par la SAS Uretek, proportions dans lesquelles il est fait droit aux recours,
- débouté la SA Axa France Iard de son appel en garantie concernant les dommages affectant la partie jour de la construction,
- dit que dans les rapports entre co-obligés, la charge finale de la dette au titre de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens, comprenant les frais d'expertise, sera supportée à hauteur de 80% par la SA Axa France Iard et à hauteur de 20% par la SAS Uretek,
Statuant à nouveau de ces chefs et y ajoutant :
Condamne in solidum la SA Axa France Iard et la SAS Uretek à payer à Mme [X] [B] née [D] et M. [G] [B] la somme de 5 000 € au titre du préjudice de jouissance résultant des travaux de reprise,
Dit que dans les rapports entre co-obligés, la charge finale de la dette au titre des dommages résultant des désordres de la partie nuit, des frais de relogement temporaire, du préjudice de jouissance, sera supportée à hauteur de 50% par la SA Axa France Iard et à hauteur de 50% par la SAS Uretek, proportions dans lesquelles il est fait droit aux recours,
Condamne la SAS Uretek à relever et garantir la SA Axa France Iard à hauteur de la moitié de la condamnation mise à sa charge au titre du coût des travaux de reprise de la partie jour,
Condamne in solidum la SA Axa France Iard et la SAS Uretek à payer à Mme [X] [B] née [D] et M. [G] [B] la somme de 6 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,
Condamne in solidum la SA Axa France Iard et la SAS Uretek aux dépens d'appel,
Autorise, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,Me Étienne Durand-Raucher à recouvrer directement contre la partie condamnée ceux des dépens dont il aurait fait l'avance sans recevoir provision,
Dit que dans les rapports entre co-obligés, la charge finale de la dette au titre de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens pour la procédure de première instance et en cause d'appel, comprenant les frais d'expertise, sera supportée à hauteur de 50% par la SA Axa France Iard et à hauteur de 50% par la SAS Uretek.
LE GREFFIER LE PRESIDENT
I.ANGER E.VET
ARRÊT N° 386/2025
N° RG 23/01052 - N° Portalis DBVI-V-B7H-PKQM
EV/IA
Décision déférée du 20 Février 2023
Président du TJ de [Localité 9]
22/04292
Mme MICHEL
S.A. AXA FRANCE IARD
C/
[X] [D] épouse [B]
[G] [B]
S.A.S. URETEK FRANCE
CONFIRMATION PARTIELLE
Grosse délivrée
le
à
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
***
COUR D'APPEL DE TOULOUSE
3ème chambre
***
ARRÊT DU QUINZE JUILLET DEUX MILLE VINGT CINQ
***
APPELANTE
S.A. AXA FRANCE IARD
[Adresse 3]
[Localité 6]
Représentée par Me Eric-gilbert LANEELLE de la SELAS CLAMENS CONSEIL, avocat au barreau de TOULOUSE
INTIMÉS
Madame [X] [D] épouse [B]
[Adresse 8]
[Localité 4]
Représentée par Me Etienne DURAND-RAUCHER de la SCP CABINET MERCIE - SCP D'AVOCATS, avocat au barreau de TOULOUSE
Monsieur [G] [B]
[Adresse 8]
[Localité 4]
Représenté par Me Etienne DURAND-RAUCHER de la SCP CABINET MERCIE - SCP D'AVOCATS, avocat au barreau de TOULOUSE
S.A.S. URETEK FRANCE
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représentée par Me Ophélie BENOIT-DAIEF de la SELARL LX PAU-TOULOUSE, avocat postulant au barreau de TOULOUSE et par Me Stéphanie NGUYEN NGOC de l'AARPI AXIAL Avocats, avocat plaidant au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR
Après audition du rapport, l'affaire a été débattue le 30 Avril 2025 en audience publique, devant la Cour composée de :
E. VET, conseiller faisant fonction de président de chambre
P. BALISTA, conseiller
S. GAUMET, conseiller
qui en ont délibéré.
Greffière, lors des débats : I. ANGER
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties
- signé par E. VET, président, et par I. ANGER, greffière de chambre.
FAITS ET PROCÉDURE
M. [G] [B] et Mme [X] [D] épouse [B] ont fait construire une maison à usage d'habitation située [Adresse 2].
Le lot gros oeuvre avait été confié à la SARL [K] [W], assurée au titre de la garantie décennale auprès de la SA Axa France Iard qui est aussi l'assureur multirisque habitation des époux [B].
La SARL [K] [W] a établi deux factures les 9 juillet et 6 septembre 2003.
Le 22 décembre 2005, M. et Mme [B] ont déclaré un sinistre catastrophe naturelle auprès de leur assureur, à la suite de la constatation de nombreuses fissures affectant leur maison et à la publication d'un arrêté de catastrophe naturelle cdu 22 décembre 2005 concernant la commune de [Localité 7].
L'assureur n'a pas pris en charge le sinistre, estimant que les désordres pouvaient éventuellement relever de la garantie décennale du constructeur.
Les époux [B] ont alors procédé à une nouvelle déclaration de sinistre auprès de la même compagnie en sa qualité d'assureur garantie décennale de la SARL [K] [W].
La SA Axa opposait que la garantie décennale n'était pas mobilisable dans la mesure où les désordres ne compromettaient pas la solidité de l'ouvrage, sous réserve d'évolution.
En 2011, constatant une aggravation des fissures, les époux [B] ont procédé à une nouvelle déclaration de sinistre auprès de la SA Axa.
Missionné par l'assureur au titre l'assurance multirisque habitation, le Cabinet Elex, concluait le 1er février 2013 que certains désordres (mur de clôture fissuré, détachements centimétriques entre le dallage sous l'auvent et les aggloa périphériques, fissures verticales d'ouverture en partie droite du linteau de la porte-fenêtre gauche) n'avaient pas pour caractère déterminant la sécheresse mais découlaient de choix structurels inappropriés au terrain, les autres désordres constatés (autres types de fissures) justifiant la convocation de l'assureur décennal du maçon.
Selon rapport du 7 août 2013 et rapport complémentaire du 15 septembre 2014, la SAS Saretec, expert mandaté au titre de la garantie décennale de la SARL [K] [W], concluait à un défaut de fondations sur la partie basse de l'habitation, nécessitant des travaux de reprise en sous-oeuvre.
Ces travaux de reprise étaient confiés à la SAS Uretek France, réceptionnés le 5 juin 2015 et réglés par M. et Mme [B] le 20 juillet 2015.
La compagnie Axa réglait aux époux [B] la somme de 55.009,84 € le 15 janvier 2015, correspondant aux travaux de reprise et aux travaux d'embellissements consécutifs.
Constatant l'apparition de nouvelles fissures, les époux [B] déclaraient un nouveau sinistre à la compagnie Axa le 17 février 2017.
Sur saisine des époux [B], le juge des référés du tribunal de grande instance de Toulouse ordonnait le 14 juin 2018 une expertise judiciaire confiée à Mme [I] de la SARL Keops qui a déposé son rapport le 6 mai 2022.
Suivant autorisation donnée le 28 septembre 2022 d'assigner à jour fixe, les époux [B] ont fait assigner devant le tribunal judiciaire de Toulouse par actes d'huissier des 5, 7 et 10 octobre 2022, la SA Axa France Iard, la SARL [K] [W] et la SAS Uretek France aux fins de :
- homologuer le rapport d'expertise judiciaire,
- condamner solidairement la SARL [K] [W], la Cie Axa France Iard, la SAS Uretek à payer à M. et Mme [B] les sommes suivantes :
* 190.658,17 € TTC, avec indexation sur l'indice du coût de la construction BT01 au titre des travaux de reprise,
* 11.730,00 € TTC au titre du préjudice lié au relogement et au stockage des meubles pendant la durée des travaux de reprise,
* 5.000,00 € à titre de dommages-et-intérêts en réparation du préjudice de jouissance pendant la durée des travaux de reprise,
* 12.000 € à titre de dommages-et-intérêts en réparation du préjudice moral,
* 6.000 € au titre des frais irrépétibles,
- les entiers dépens, en ce compris les frais d'expertise judiciaire, qui pourront être recouvrés directement par Me Durand-Raucher conformément à l'article 699 du code de procédure civile,
- dire n'y avoir lieu à écarter l'exécution provisoire de la décision à intervenir.
Par jugement contradictoire du 20 février 2023, le tribunal a :
- déclaré irrecevable l'action introduite par Mme [X] [B] née [D] et M. [G] [B] à l'encontre de la SARL [K] [W] et de son assueur, la SA Axa France Iard sur le fondement de l'article 1792 du code civil,
- condamné in solidum la SA Axa France Iard et la SAS Uretek à payer à Mme [X] [B] née [D] et M. [G] [B] :
* la somme de 112.264,79 € au titre de la reprise des désordres affectant la partie nuit, avec indexation sur l'indice du coût de la construction BT01,
* la somme de 11.730 € au titre des frais de relogement temporaire des requérants,
* la somme de 3.000 € au titre du préjudice de jouissance résultant des travaux de reprise,
- condamné la SA Axa France Iard à payer à Mme [X] [B] née [D] et M. [G] [B] :
* la somme de 78.393, 38 € au titre de la reprise des désordres affectant la partie jour, avec indexation sur l'indice du coût de la construction BT01,
- débouté Mme [X] [B] née [D] et M. [G] [B] de leur demande au titre d'un préjudice moral,
- dit que dans les rapports entre co-obligés, la charge finale de la dette au titre des dommages résultant des désordres de la partie nuit, des frais de relogement temporaire et au titre du préjudice de jouissance sera supportée à hauteur de 80% par la SA Axa France Iard et à hauteur de 20% par la SAS Uretek, proportions dans lesquelles il est fait droit aux recours,
- débouté la SA Axa France Iard de son appel en garantie concernant les dommages affectant la partie jour de la construction
- déclaré sans objet les demandes de la SA Axa France Iard relatives à l'opposabilité des franchises contractuelles,
- condamné in solidum la SA Axa France Iard et la SAS Uretek à payer à Mme [X] [B] née [D] et M. [G] [B] la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné in solidum la SA Axa France Iard et la SAS Uretek aux dépens, y compris les frais d'expertise judiciaire qui pourront être recouvrés directement par Me Durand-Raucher conformément à l'article 699 du code de procédure civile,
- dit que dans les rapports entre co-obligés, la charge finale de la dette au titre de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens, comprenant les frais d'expertise, sera supportée à hauteur de 80% par la SA Axa France Iard et à hauteur de 20% par la SAS Uretek,
- rejeté toutes les autres demandes plus amples ou contraires formées par les parties,
- rappelé que l'exécution provisoire du jugement est de droit.
Par déclaration du 22 mars 2023, la SA Axa France Iard a relevé appel de la décision.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
La SA Axa France Iard dans ses dernières conclusions du 18 décembre 2023, demande à la cour au visa des articles 1792 et 1792-4-1,1240 et suivants du code civil, de :
- confirmer le jugement rendu le 20 février 2023 en ce qu'il a déclaré irrecevable le recours formé à l'encontre d'Axa au visa de l'article 1792 du code civil,
- infirmer le jugement rendu le 20 février 2023 en ce qu'il a:
* condamné in solidum la SA Axa France Iard et la SAS Uretek à payer à Mme [X] [B] née [D] et M. [G] [B]:
** la somme de 112.264,79 € au titre de la reprise des désordres affectant la partie nuit, avec indexation sur l'indice du coût de la construction BT01,
** la somme de 11.730 € au titre des frais de relogement temporaire des requérants,
** la somme de 3.000 € au titre du préjudice de jouissance résultant des travaux de reprise,
* condamné la SA Axa France Iard à payer à Mme [X] [B] née [D] et M. [G] [B] :
** la somme de 78.393, 38 € au titre de la reprise des désordres affectant la partie jour, avec indexation sur l'indice du coût de la construction BT01,
- dit que dans les rapports entre co-obligés, la charge finale de la dette au titre des dommages résultant des désordres de la partie nuit, des frais de relogement temporaire et au titre du préjudice de jouissance sera supportée à hauteur de 80% par la SA Axa France Iard et à hauteur de 20% par la SAS Uretek, proportions dans lesquelles il est fait droit aux recours,
* débouté la SA Axa France Iard de son appel en garantie concernant les dommages affectant la partie jour de la construction
* déclaré sans objet les demandes de la SA Axa France Iard relatives à l'opposabilité des franchises contractuelles,
* condamné la SA Axa France Iard à payer à Mme [X] [B] née [D] et M. [G] [B] la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
* condamné la SA Axa France Iard aux dépens, y compris les frais d'expertise judiciaire qui pourront être recouvrés directement par Me Durand-Raucher conformément à l'article 699 du code de procédure civile,
* dit que dans les rapports entre co-obligés, la charge finale de la dette au titre de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens, comprenant les frais d'expertise, sera supportée à hauteur de 80% par la SA Axa France Iard et à hauteur de 20% par la SAS Uretek,
Statuant à nouveau,
' à titre principal,
- dire et juger que seule la responsabilité de la société Uretek peut être présumée sur le fondement de l'article 1792 du code civil,
- débouter les époux [B] de leurs demandes au titre de la responsabilité délictuelle de la compagnie Axa, faute de démonstration d'une faute en lien direct et certain avec les préjudices,
- «débouter toutes demandes» formulées à l'encontre de la compagnie Axa,
- les condamner à verser à la compagnie Axa la somme de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens, dont distraction au profit de la Selas Clamens Conseil à valoir sur son offre de bien conformément à l'article 699 du code de procédure civile,
' à titre subsidiaire,
- limiter la quote-part de responsabilité de la compagnie Axa à concurrence de 5 % des préjudices pour les parties « nuit » et « jour »,
- dire et juger que la responsabilité de la société Uretek est engagée de manière prépondérante sur le fondement de la garantie décennale pour la partie « nuit »,
- dire et juger que la responsabilité de la société Uretek est engagée de manière prépondérante sur le fondement de la garantie décennale ou à défaut sur le fondement de la responsabilité délictuelle au titre de son obligation de conseil, pour la partie
« jour»,
- condamner la société Uretek à relever et garantir la compagnie Axa à concurrence de 95 % des condamnations susceptibles d'être prononcées à son encontre pour les parties « nuit » et « jour»,
- la condamner à verser à la compagnie Axa la somme de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens, dont distraction au profit de la Selas Clamens Conseil à valoir sur son offre de bien conformément à l'article 699 du CPC.
' en tout état de cause :
- débouter les époux [B] de leurs demandes au titre du trouble de jouissance et du préjudice moral.
Mme [X] [B] née [D] et M. [G] [B] dans leurs dernières conclusions du 18 septembre 2023, demandent à la cour au visa des articles 1240 et suivants et 1792 et suivants du code civil, de :
- infirmer le jugement du 20 février 2023 en ce qu'il :
* déclare irrecevable l'action des demandeurs à l'encontre de la Cie Axa sur le fondement de l'article 1792 du code civil,
* limite la condamnation de la SAS Uretek aux désordres affectant la « partie nuit »,
* limite l'indemnisation des demandeurs au titre du préjudice de jouissance,
* déboute M. et Mme [B] de leur demande au titre du préjudice moral.
Et, statuant à nouveau,
- condamner solidairement la Cie Axa France Iard et la SAS Uretek à payer à M. et Mme [B] les sommes suivantes :
* 190.658,17 € TTC, avec indexation sur l'indice du coût de la construction BT01 au titre des travaux de reprise,
* 11.730,00 € TTC au titre du préjudice lié au relogement et au stockage des meubles pendant la durée des travaux de reprise,
* 5.000,00 € à titre de dommages-et-intérêts en réparation du préjudice de jouissance pendant la durée des travaux de reprise,
* 12.000,00 € à titre de dommages-et-intérêts en réparation du préjudice moral,
* 6.000,00 € au titre des frais irrépétibles de justice de première instance sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
* 6.000,00 € au titre des frais irrépétibles de justice d'appel sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
* les entiers dépens, en ce compris les frais d'expertise judiciaire, qui pourront être recouvrés directement par Me Durand-Raucher conformément à l'article 699 du code de procédure civile,
À titre subsidiaire,
- confirmer le jugement du 20 février 2023 en toutes ses dispositions,
Ce faisant,
- condamner solidairement la SA Axa France Iard et la SAS Uretek à payer à Mme [X] [B] née [D] et M. [G] [B] :
* la somme de 112.264,79 € au titre de la reprise des désordres affectant la partie nuit, avec indexation sur l'indice du coût de la construction BT01,
* la somme de 11.730,00 € au titre des frais de relogement temporaire des requérants
* la somme de 3.000,00 € au titre du préjudice de jouissance résultant des travaux de reprise,
- condamner la SA Axa France Iard à Mme [X] [B] née [D] et M. [G] [B] :
* la somme de 78.393,38 € au titre de la reprise des désordres affectant la partie jour, avec indexation sur l'indice du coût de la construction BTOI,
- condamner solidairement la SA Axa France Iard et la SAS Uretek à payer à Mme [X] [B] née [D] et M. [G] [B] la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et la somme de 6.000,00 € au titre des frais d'appel,
- condamner solidairement la SA Axa France Iard et la SAS Uretek aux dépens, y compris les frais d'expertise judiciaire qui pourront être recouvrés directement par Me Durand-Raucher conformément à l'article 699 du code de procédure civile,
En toute hypothèse,
- débouter la Cie Axa France Iard de son appel et de ses demandes,
- débouter la SAS Uretek de son appel incident et de ses demandes.
La SAS Uretek France dans ses dernières conclusions du 15 décembre 2023, demande à la cour au visa des articles 1240 et 1792 du code civil, de :
- confirmer le jugement en ce qu'il a :
* débouté les époux [B] de leur demande de condamnation dirigée à l'encontre de la SAS Uretek France sur le fondement de la garantie décennale, au titre des désordres affectant la partie « jour » se situant hors périmètre d'intervention de cette dernière, soit la somme de 78 393, 30 € TTC ,
* débouté les époux [B] de leur demande de condamnation dirigée à l'encontre de la SAS Uretek France sur le fondement de la garantie décennale, au titre des désordres affectant la partie « nuit » traitée par injections (112 264,79 € : travaux de reprise),
* débouté les époux [B] de leur demande au titre du préjudice moral,
* limité l'indemnité au titre du préjudice de jouissance à 3 000 €,
- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la SA Axa France Iard à payer aux époux [B] les sommes suivantes :
* 112 264,79 € au titre de la reprise des désordres affectant la partie « nuit »,
* 11 730 € au titre des frais de relogement,
* 3 000 € au titre du préjudice de jouissance,
* 78 393,38 € au titre de la reprise des désordres affectant la partie « Jour » au principal,
- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté SA Axa France Iard de son recours à l'encontre de la SAS Uretek France au titre des désordres affectant la partie « jour ».
L'ordonnance de clôture est intervenue le 14 avril 2025.
La cour, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des demandes et moyens des parties, fera expressément référence à la décision déférée ainsi qu'aux dernières conclusions déposées.
MOTIFS
Si la SA Axa France Iard a formé appel de la décision en ce qu'elle a déclaré sans objet ses demandes relatives à l'opposabilité des franchises contractuelles, elle ne présente aucune demande à ce titre dans le dispositif de ses conclusions et n'évoque pas cette question dans sa motivation.
Par ailleurs, la cour précise que le côté de la maison appelé partie « nuit » par les parties correspondant à celui sur lequel la SAS Uretek est intervenue, et est appelé partie Est par l'expert.
Sur la forclusion de l'action fondée contre la SA Axa France Iard en qualité d'assureur décennal de la SARL [K] [W]:
Les époux [B] font valoir que les nouveaux désordres constatés par l'expert judiciaire sont la suite de l'aggravation de ceux pris en charge par l'assureur amiablement au titre de la garantie décennale de la SARL [W] et doivent être considérés comme des désordres évolutifs.
Ils expliquent qu'en 2015, le désordre originel a été constaté et pris en charge par la compagnie Axa, que selon l'expert, les travaux entrepris n'ont pas permis de stabiliser les fondations. Ainsi, les désordres apparus postérieurement étant de même nature doivent donc être pris en charge par l'assureur décennal, la dénonciation judiciaire des premiers désordres ne pouvant être une condition de recevabilité alors qu'ils ont été pris en charge par la compagnie Axa.
La SA Axa oppose que la prescription décennale ne peut être interrompue que par une assignation en justice et qu'en l'espèce les travaux effectués par la SARL [W] étant intervenus courant 2003 les époux [B] sont forclos à agir en réparation des désordres dénoncés le 1er février 2017.
Sur ce
L'article 1792 du Code civil dispose : «Tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination.
Une telle responsabilité n'a point lieu si le constructeur prouve que les dommages proviennent d'une cause étrangère.».
Selon l'article 1792'4-1du même code, l'action fondée sur ce texte se prescrit par 10 ans.
Enfin, de nouveaux désordres, dits désordres évolutifs, constatés au-delà de l'expiration du délai décennal qui est un délai d'épreuve, peuvent être réparés au titre de l'article 1792 du code civil s'ils trouvent leur siège dans l'ouvrage où un désordre de même nature avait été constaté et dont la réparation avait été demandée en justice avant l'expiration de ce délai.
Si la théorie des dommages dits évolutifs autorise la mise en jeu de la responsabilité décennale des constructeurs au-delà du délai de 10 ans à compter de la réception, c'est seulement sous réserve que les conditions cumulatives suivantes soient réunies : le désordre initial doit présenter le degré de gravité requis à l'article 1792 du code civil, les désordres apparus au-delà du délai de 10 ans doivent constituer une aggravation des désordres initiaux, et à défaut, il doit y avoir identité de cause des nouveaux dommages et des dommages initiaux.
Surtout, le désordre initial doit avoir donné lieu à une action en responsabilité décennale contre le constructeur ou à une action directe contre son assureur de responsabilité avant l'expiration du délai décennal, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.
En effet, la réception des travaux réalisés par la SARL [W] est intervenue tacitement par la prise de possession de l'ouvrage et le règlement de la facture du 6 septembre 2003 et aucune dénonciation judiciaire n'est intervenue dans le délai de la prescription décennale.
En conséquence, la décision déférée doit être confirmée en ce qu'elle a déclaré irrecevable l'action des époux [B] à l'encontre de la SA Axa France Iard, assureur décennal de la SARL [K] [W] sur le fondement de l'article 1792 du Code civil.
Sur la responsabilité de la SA Axa France Iard et de la SAS Uretek France France à l'égard des époux [B]:
Les époux [B] font valoir que :
' la responsabilité délictuelle de l'assureur peut être retenue en ce que les travaux qu'il a accepté de prendre en charge se sont révélés insuffisants et contraires aux préconisations du technicien qu'il avait mandaté,
' les désordres résultant des travaux effectués par la SAS Uretek France sont de nature décennale et si la partie jour a subi des désordres c'est aussi en raison de l'intervention partielle de la SAS Uretek sur la partie nuit alors qu'elle connaissait les risques induits par une intervention partielle,
' cette société a accepté de réaliser des travaux de reprise en sous-'uvre partiels et par injection de résine alors que l'étude de sol réalisée préconisait de conforter les fondations par micro-pieux sur l'ensemble de la construction, considérant que la solution de confort par injection de résine expansive n'était pas adaptée,
' la SAS Uretek France ayant accepté d'intervenir sans étude préalable d'un bureau d'études structure ne peut invoquer aucune cause étrangère pouvant exonérer sa responsabilité décennale de plein droit qui ne peut être limitée à la partie nuit de l'immeuble puisque la partie jour a subi des désordres en raison de cette intervention partielle dont la SAS Uretek France connaissait les risques.
La SA Axa France Iard oppose que:
' aucune obligation ne lui imposait d'initier une mesure d'expertise visant à rechercher la cause et à déterminer les travaux de reprise dont elle n'est pas prescripteur,
' seule la société Uretek France ayant conçu et réalisé les travaux de confortement dont elle avait seule la maîtrise peut voir sa responsabilité retenue,
' l'expertise judiciaire démontre que la SAS Uretek a préconisé des travaux inadaptés à la nature du sol et à la présence de végétaux et en limitant les travaux à la partie nuit sans étude préalable de la structure elle a créé un point dur aggravant le tassement différentiel alors qu'elle était chargée de définir les travaux de reprise pour les deux blocs, par ailleurs elle n'a suggéré le traitement pour la partie jour que dans un cadre optionnel alors qu'elle était informée de l'absence de joint différentiel entre les deux blocs exposant à l'apparition de désordres par répercussions sur la partie jour et aurait dû en l'absence de choix de cette option, refuser de limiter son intervention à un seul bloc,
' par ailleurs la société Uretek France a reconnu avoir oublié de traiter le cellier et dans le cadre de son service après-vente préconisé des injections complémentaires qui n'ont jamais été réalisées alors qu'elle était tenue à une obligation de résultat l'égard des époux [B].
La SAS Uretek France France oppose que:
' l'assureur qui finance une solution de reprise ne permettant pas de mettre un terme définitif aux désordres engage sa responsabilité de même que celui qui fait l'économie dans le cadre de l'instruction amiable d'un sinistre des études géotechniques nécessaires à la parfaite définition de la solution réparatoire,
' en l'espèce, le cabinet Saretec missionné par Axa a fait le choix inapproprié de la consulter pour un traitement par injection validé en amont aux lieu et place d'une reprise par micro-pieux préconisée par le géo-technicien et a au surplus choisi de limiter le traitement à une partie seulement de la maison,
' par ailleurs, la SA AXA a renoncé à faire intervenir un BET structure qui aurait défini les dispositions permettant de résoudre les problématiques structurelles dont le joint de fractionnement entre les deux parties de l'ouvrage et n'a pas prévu l'agrafage des fissures qu'elle-même avait réclamé ni supprimé la végétation pourtant cause aggravante des désordres.
Sur ce
Les époux [B] ont confié le gros 'uvre de la construction de leur maison d'habitation à la SARL [K] [W] assurée au titre de sa garantie décennale auprès de la SA Axa France Iard qui, suite à des désordres a reconnu sa garantie et, dans un cadre amiable, financé des travaux de reprise réalisés par la SAS Uretek France suite à l'expertise amiable réalisée par la SAS Saretec qu'elle avait mandatée.
La SA Axa France Iard assureur dommages-ouvrage avait l'obligation de déterminer, aux termes des opérations d'expertise qu'elle avait diligentées des travaux d'une ampleur et d'une nature propres à la mise en oeuvre d'une réparation pérenne des désordres affectant l'ouvrage.
Il conviendra en conséquence de rechercher si la SA Axa France Iard a commis des fautes dans la gestion du sinistre initial.
Par ailleurs, la responsabilité de la SAS Uretek France France est recherchée par les époux [B] sur le fondement de l'article 1792 du Code civil dont les termes ont été rappelés et qui est une responsabilité de plein droit du constructeur envers le maître de l'ouvrage, des désordres qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou le rendent impropre à sa destination, sauf s'il prouve que les dommages proviennent d'une cause étrangère.
Enfin, comme rappelé par les premiers juges, chacun des responsables d'un même dommage doit être condamné à le réparer en totalité sans qu'il y ait lieu à tenir compte du partage de responsabilité entre les divers responsables qui n'affectent que les rapports entre eux.
En l'espèce, il résulte des pièces produites que:
' une expertise amiable a été réalisée par le cabinet Saretec les 7 août 2013 et 15 septembre 2014 et à cette occasion la société Géobilan a effectué un diagnostic géotechnique de l'immeuble selon lequel les désordres affectant la partie Est sont liés à un défaut de fondation qui engendre des tassements différentiels alors que la dessiccation semblait être à l'origine principale des fissures observées dans la partie Ouest,
- le cabinet géotechnique concluait que pour éviter des tassements différentiels l'ensemble de la construction devait être partout fondé sur le même sol, avec le même système de fondation et que pour stabiliser l'ensemble de la construction il faudrait la fonder sur des micro-pieux scellés dans le substratum molassique à partir de 5 m de profondeur,
' suite à ce rapport, le cabinet Saretec, relevant que la maison était composée de deux corps de bâtiments fondés différemment n'ayant pas été isolés par un joint de rupture,
et que les investigations avaient démontré un défaut de fondation sur la partie Est et que la partie Ouest subissait une petite déformation a retenu deux solutions de reprise: une reprise intégrale par micro pieux des fondations et du dallage (104'902,32 €) ou une reprise par injection de résine(52'773,77 €), précisant à ce titre « il convient d'ajouter à notre avis l'injection de «la pièce nuit» pour un montant de 5345,67 €,
Il précisait enfin : « la partie supérieure en rez-de-chaussée (partie ouest) de l'habitation ne nécessite pas de reprise en sous-'uvre au droit des fondations. », seul le dallage affecté d'un tassement devant être repris,
' l'entreprise Uretek France a réalisé les travaux de réparation suivant devis du 14 janvier 2015 prévoyant le traitement d'une partie des fondations et du dallage et proposant le traitement du dallage de l'autre partie en option,
' l'assureur n'a finalement pas opté pour le traitement de la partie nuit proposé,
' le devis mentionnait la nécessité: d'un agrafage des fissures, de vérifier la rigidité du bâtiment par un BET spécialisé et d'élaguer les arbres situés à une distance de moins de 8 m l'assureur n'a finalement pas opté pour la reprise de la partie nuit.
Il résulte de l'expertise judiciaire que:
' l'expert a constaté l'apparition de nouvelles micro-fissures et surtout de nouvelles fissures notamment à l'angle sud-est de la partie Est de la maison de même qu'à l'intérieur,
' selon le cahier des charges du procédé Uretek France Deep Injections validé par Socotec le 31 décembre 2014 une étude de sol et une description de la structure de l'ouvrage devaient être réalisées, la faisabilité de l'opération notamment au regard du relevage ponctuel partiel de l'ouvrage devant être appréciée au cours d'une visite,
' l'étude géotechnique qui avait été réalisée n'abordait pas la possibilité du mode réparatoire retenu c'est-à-dire l'injection de résine, seule la reprise par micro-pieux ayant été envisagée et cette étude n'a pas réalisé une reconnaissance précise des fondations, alertant cependant sur le défaut de fondation de la partie Est, sur l'insuffisance de profondeur des fondations de la partie Ouest et sur le fait que les deux parties n'étaient pas isolées par un joint de rupture, en tout état de cause, elle prévoyait clairement : « pour éviter des tassements différentiels pouvant engendrer de nouvelles fissures, il faut que l'ensemble de la construction soit partout fondé sur le même sol, avec le même système de fondation »,
' les injections de résine réalisées par la société Uretek France n'ont pas permis de stabiliser les fondations et le dallage et si les désordres dans la partie Est nécessitent réparation, ceux de la partie Ouest étant de moindre importance, le dispositif constructif de la maison composée de deux parties dont les fondations sont différentes mais qui ne sont pas isolées par un joint de rupture imposait un traitement intégral,
En conclusion, la solution qui a été choisie par Axa n'était pas celle préconisée par le bureau d'études techniques d'une installation de micro-pieux sur l'ensemble de la construction mais celle par injection de résine expansive d'une partie des fondations, ceci sans que le cahier des charges prévu pour l'exécution de cette technique soit respecté.
- sur la responsabilité délictuelle de la SA Axa France Iard :
Il résulte de l'expertise que l'assureur de responsabilité civile décennale qui, admettant sa garantie s'est chargé, par une expertise pour laquelle il a désigné son expert, de déterminer les travaux de nature à mettre fin aux désordres et à assurer la réparation pérenne de l'ouvrage, ne peut être considéré comme ayant rempli ses obligations en proposant une solution technique différente de celle envisagée au cours des opérations d'expertise, laquelle n'a pas réparé les désordres de manière pérenne alors qu'au surplus la pose de micro-pieux avait été préconisée par le bureau d'études commis et que son propre expert avait considéré qu'un traitement par résine plus large était nécessaire.
Par ailleurs, si le devis de la société Uretek France préconisait : agrafage des fissures, l'intervention d'un bureau d'études structures et un élagage de la végétation, il n'est pas contesté que ces préconisations n'ont pas été respectées, ces demandes étant hors devis.
En conséquence, la décision déférée doit être confirmée en ce qu'elle, sur le fondement de l'article 1240 du Code civil retenu la responsabilité de la SA Axa dans le préjudice subi par les époux [B] résultait des fautes commises par elle dans le choix du traitement des désordres.
Dès lors, elle devra indemniser les époux [B] pour l'ensemble des préjudices subis.
- sur la responsabilité décennale de la SAS Uretek:
La SAS Uretek France ne conteste pas l'engagement de sa responsabilité décennale au titre des désordres affectant la partie « nuit » sur laquelle elle est intervenue.
Les époux [B] et la SA Axa France Iard contestent cette limitation de responsabilité à la seule zone d'intervention de la SAS Uretek France.
Sur ce
Le débat porte exclusivement sur la zone sur laquelle la SAS Uretek n'est pas intervenue.
Il résulte de l'article 1792 du Code civil que la responsabilité décennale ne peut porter que sur l'ouvrage réalisé et en l'espèce la SAS Uretek n'est pas intervenue sur la zone jour et sa responsabilité décennale ne peut en conséquence être recherchée.
Dès lors, la décision déférée doit être confirmée en ce qu'elle n'a pas retenu la responsabilité décennale de la SAS Uretek France concernant la partie jour de la maison.
La SAS Uretek France sera donc tenue à l'égard des époux [J] dans cette limite.
Sur le montant des reprises et les préjudices subis:
L'expert a évalué les travaux de reprise à la somme totale de 190'658,17 € TTC se décomposent comme suit :
- zone jour : 78'393,38 € TTC,
- zone nuit : 112'264,79 € TTC
Ces montants ne sont pas spécialement contestés par les parties.
La SAS Uretek ne pouvant être tenue vis à vis des maîtres de l'ouvrage au regard de la formulation de leurs prétentions qu'au titre des reprises effectuer en zone nuit, elle sera condamnée in solidum avec la SA Axa impayé à payer la somme de 112'264,79 € avec indexation sur l'indice du coût de la construction BT 01.
La SA Axa sera seule tenue à l'égard des époux [B] du coût des reprises de la zone jour à hauteur de 78'393,38 € avec indexation sur l'indice du coût de la construction BT01.
La décision déférée sera confirmée de ces chefs.
Par ailleurs le montant qui a été octroyé par les premiers juges au titre du coût du relogement temporaire des époux [B] pendant la durée des travaux, soit 11'730 € n'est pas spécialement contesté et la décision déférée sera confirmée en ce qu'elle a condamné in solidum SAS Uretek et la SA Axa à leur verser ce montant.
Les époux [B] font valoir que:
' leur préjudice de jouissance doit être évalué à 5000 € et non 3000 € comme retenu par le tribunal judiciaire dès lors qu'ils ne pourront pas jouir de leur bien et que leur relogement ponctuel dans un établissement hôtelier leur offrira des prestations inférieures,
' ils subissent un préjudice moral alors que depuis l'apparition des premières fissures en 2015 ils ont subi les errements d'une procédure judiciaire longue et fastidieuse, une expertise judiciaire d'une durée de quatre ans, alors qu'ils constataient avec impuissance l'aggravation des désordres de leur maison et craignaient pour leur sécurité et celle de leurs enfants.
La SA Axa oppose que :
' le montant octroyé par les premiers juges au titre du préjudice de jouissance fait doublon avec l'indemnisation qui leur a été accordée au titre de leur relogement pendant les travaux et correspond au surplus à une indemnisation forfaitaire,
' les époux [B] sollicitent l'indemnisation d'un préjudice moral sans justifier d'une atteinte à leur personne dans leur honneur, leur réputation ou leur affection.
La SAS Uretek France considère que les époux [B] ne démontrent pas le préjudice moral allégué et que leur préjudice de jouissance a été justement limité à 3000 €.
La cour considère que le préjudice de jouissance qui a été indemnisé par les premiers juges ne fait pas double emploi avec l'indemnisation de leurs frais de relogement qui ne concerne que la prise en charge financière alors que le préjudice de jouissance subi par les époux [B] indemnise le préjudice résultant du fait que pendant cinq mois ils ne pourront jouir de leur bien qui par ailleurs offre une surface habitable de 112 m² trois chambres et un jardin pour leurs enfants.
Au regard de ces éléments, si c'est à bon droit que les premiers juges ont indemnisé ce préjudice, compte tenu de la durée importante pendant laquelle les époux [B] et leurs enfants ne pourront jouir de leur bien, du fait que leur relogement ne leur offrira que des prestations moindres par rapport à leur bien (superficie, jardin), s'agissant de la location d'un appartement Appart'City, ce préjudice sera indemnisé par l'octroi de 5000 € par infirmation de la décision déférée.
Par ailleurs, le préjudice moral dont il est demandé réparation par les époux [B] est expliqué par le fait qu'ils ont constaté les premières fissures en 2015, subi une procédure longue tout en constatant l'aggravation des désordres dans leur maison entraînant la peur de voir tomber les plafonds de leur chambre et de celles de leurs enfants.
Cependant, les époux [B] ne produisent aucune pièce objectivant ce préjudice (attestation, pièces médicales) et la durée de la procédure ne peut être reprochée à leurs adversaires.
La décision déférée doit donc être confirmée en ce qu'elle a rejeté la demande présentée par les époux [B] à ce titre.
Sur la charge finale de l'indemnisation des époux [B]:
La SA Axa souligne que l'expert amiable a retenu que les deux solutions de reprises, par micro-pieux ou par injection étaient envisageables et que la SAS Uretek n'aurait pas dû limiter ses travaux à la partie nuit sans étude préalable de la structure, ce qui a aggravé le tassement différentiel alors qu'elle était chargée de définir les travaux de reprise pour les deux blocs et qu'elle n'a pas préconisé le traitement de la partie jour, proposant une simple option commerciale. Par ailleurs, elle a omis de traiter le cellier et n'a pas fait les injections complémentaires préconisées par le service après-vente.
Enfin, le géotechnicien commis dans le cadre de l'expertise judiciaire a souligné que la végétation rendait les travaux par injection inadaptés.
La SAS Uretek oppose que le cabinet Saretec a exclu la partie jour de son intervention et opté pour un traitement par injection le 15 septembre 2014 alors qu'elle-même n'a établi un devis que le 14 janvier 2015. Par ailleurs, elle souligne que ses recommandations n'ont pas été respectées: agrafage des fissures, intervention d'un BET structures et suppression de la végétation alentour. Par ailleurs le devis souligne la nécessité d'une stabilisation hydrique et certains réseaux se sont révélés fuyards.
Sur ce
La SAS Uretek à laquelle ont été confiés les travaux de reprise de la maison des époux
[B] a réalisé des travaux qui se sont révélés insuffisants en ce que de nouvelles fissures sont apparues.
Dans le cadre de sa recherche d'une solution pérenne, elle devait, respecter ses propres conditions particulières figurant au devis prévoyant une intervention subsidiaire à celle d'un géotechnicien et vérifier le retrait de la végétation alentour, le géotechnicien qui est intervenu dans le cadre de l'expertise judiciaire ayant relevé le facteur aggravant de cette végétation, ce qu'elle ne pouvait ignorer, le devis préconisant seulement un élagage et non un arrachage des arbres situés à une distance de moins de 8 m.
Cependant, la SA Axa ne pouvait ignorer les conditions particulières du devis qu'elle avait signé et dont elle n'a pas non plus respecté les termes. Par ailleurs, si elle avait pris la précaution de faire intervenir un géotechnicien antérieurement à l'intervention de la SAS Uretek elle n'a en rien suivi ses préconisations de réalisation de micro-pieux après analyse fouillée de la nature du sol et surtout, alors que cette technique n'avait pas été envisagée ne l'a pas réinterrogé sur cette possibilité. Or, cette précaution était indispensable compte tenu de la nature du sol et au regard de la gravité des conséquences encourues pour les époux [B].
En regard de ces éléments, la décision déférée sera infirmée et la part de responsabilité des deux sociétés dans les préjudices subis par les époux [B] fixée à 50 % chacune.
La charge finale de la dette sera donc supportée comme suit :
- par la SA Axa d'une part, la société Uretek d'autre part, par un partage par moitié de la dette dans laquelle elles sont co-obligées dans l'indemnisation des maîtres de l'ouvrage s'agissant du coût des reprises de la partie nuit, des frais de relogement pendant les travaux et du préjudice de jouissance,
- par voie d'infirmation de la décision entreprise, par la condamnation de la société Uretek à relever et garantir la SA Axa à hauteur de la moitié de la somme mise à sa charge au titre du coût des travaux de reprise de la partie jour.
Sur les demandes annexes:
L'équité commande de confirmer la décision déférée sur la somme allouée aux époux [B] au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de faire droit à leurs demandes à ce titre en cause d'appel à hauteur de 6000 € que leurs adversaires seront condamnés à leur verser in solidum.
La charge finale de cette dette sera supportée par moitié par les parties co-obligées.
Par ailleurs, la demande de la SA Axa France Iard à ce titre sera rejetée.
Par voie d'infirmation de la décision entreprise, la charge finale des dépens de première instance et des frais irrépétibles des époux [B] sera supportée par moitié par la SA Axa et la société Uretek, lesquelles seront condamnées in solidum aux dépens d'appel, dont la charge finale sera supportée dans la même proportion que celle fixée au titre des dépens de première instance.
PAR CES MOTIFS:
La cour,
Statuant dans les limites de sa saisine:
Confirme la décision déférée sauf en ce qu'elle a:
- condamné in solidum la SA Axa France Iard et la SAS Uretek à payer à Mme [X] [B] née [D] et M. [G] [B] la somme de 3.000 € au titre du préjudice de jouissance résultant des travaux de reprise,
- dit que dans les rapports entre co-obligés, la charge finale de la dette au titre des dommages résultant des désordres de la partie nuit, des frais de relogement temporaire et au titre du préjudice de jouissance sera supportée à hauteur de 80% par la SA Axa France Iard et à hauteur de 20% par la SAS Uretek, proportions dans lesquelles il est fait droit aux recours,
- débouté la SA Axa France Iard de son appel en garantie concernant les dommages affectant la partie jour de la construction,
- dit que dans les rapports entre co-obligés, la charge finale de la dette au titre de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens, comprenant les frais d'expertise, sera supportée à hauteur de 80% par la SA Axa France Iard et à hauteur de 20% par la SAS Uretek,
Statuant à nouveau de ces chefs et y ajoutant :
Condamne in solidum la SA Axa France Iard et la SAS Uretek à payer à Mme [X] [B] née [D] et M. [G] [B] la somme de 5 000 € au titre du préjudice de jouissance résultant des travaux de reprise,
Dit que dans les rapports entre co-obligés, la charge finale de la dette au titre des dommages résultant des désordres de la partie nuit, des frais de relogement temporaire, du préjudice de jouissance, sera supportée à hauteur de 50% par la SA Axa France Iard et à hauteur de 50% par la SAS Uretek, proportions dans lesquelles il est fait droit aux recours,
Condamne la SAS Uretek à relever et garantir la SA Axa France Iard à hauteur de la moitié de la condamnation mise à sa charge au titre du coût des travaux de reprise de la partie jour,
Condamne in solidum la SA Axa France Iard et la SAS Uretek à payer à Mme [X] [B] née [D] et M. [G] [B] la somme de 6 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,
Condamne in solidum la SA Axa France Iard et la SAS Uretek aux dépens d'appel,
Autorise, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,Me Étienne Durand-Raucher à recouvrer directement contre la partie condamnée ceux des dépens dont il aurait fait l'avance sans recevoir provision,
Dit que dans les rapports entre co-obligés, la charge finale de la dette au titre de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens pour la procédure de première instance et en cause d'appel, comprenant les frais d'expertise, sera supportée à hauteur de 50% par la SA Axa France Iard et à hauteur de 50% par la SAS Uretek.
LE GREFFIER LE PRESIDENT
I.ANGER E.VET