CA Paris, Pôle 5 - ch. 15, 11 juillet 2025, n° 24/03672
PARIS
Ordonnance
Autre
Grosses délivrées aux parties le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 15
ORDONNANCE DU 11 JUILLET 2025
(n°26, 52 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 24/03672 - N° Portalis 35L7-V-B7I-CI67G
Décision déférée : Sur saisine après cassation partielle en date du 11 octobre 2023 d'une ordonnance rendue par le magistrat délégué du Premier Président de la Cour d'appel de PARIS le 30 mars 2022, saisi sur appel d'une ordonnance rendue le 1er février 2021 par le Juge des libertés et de la détention près le Tribunal judiciaire de PARIS
Nature de la décision : Contradictoire
Nous, Mme Karima ZOUAOUI, Présidente de chambre à la Cour d'appel de PARIS, déléguée par le Premier Président de ladite Cour pour exercer les attributions résultant de l'article L. 16B du Livre des procédures fiscales, modifié par l'article 164 de la loi n° 2008-776 du 04 août 2008 ;
Assistée de M. Valentin HALLOT, Greffier lors des débats et de Mme Véronique COUVET, Greffier lors de la mise à disposition ;
Après avoir appelé à l'audience publique du 12 mars 2025 :
LA SOCIÉTÉ PROPHARMED INTERNATIONAL S.A. société de droit suisse
Prise en la personne de son Directeur général
Élisant domicile au cabinet de Me Jacques BELLICHACH
[Adresse 13]
[Localité 14]
Monsieur [O] [F] [C]
Né le [Date naissance 3] 1957 à [Localité 21] (ALGÉRIE)
Élisant domicile au cabinet de Me Jacques BELLICHACH
[Adresse 13]
[Localité 14]
Madame [HW] [S] épouse [C]
Née le [Date naissance 2] 1963 à [Localité 30]
Élisant domicile au cabinet de Me Jacques BELLICHACH
[Adresse 13]
[Localité 14]
LA SOCIÉTÉ RESSOURCETHICA S.C.A.
Prise en la personne de son gérant
Élisant domicile au cabinet de Me Jacques BELLICHACH
[Adresse 13]
[Localité 14]
Madame [R] [C]
Née le [Date naissance 8] 1994 à [Localité 24]
Élisant domicile au cabinet de Me Jacques BELLICHACH
[Adresse 13]
[Localité 14]
Monsieur [AL] [Y]
Né le [Date naissance 7] 1997 à [Localité 32]
Élisant domicile au cabinet de Me Jacques BELLICHACH
[Adresse 13]
[Localité 14]
Représentés par Me Jacques BELLICHACH, avocat au barreau de PARIS, toque : G0334
Assistés de Me Marie PELTIER-FEAT de la SELARL F.E.A.T. SOCIÉTÉ D'AVOCAT, avocat au barreau de TOULON
DEMANDEURS À LA SAISINE APRÈS CASSATION
APPELANTS INITIAUX
et
LA DIRECTION NATIONALE D'ENQUÊTES FISCALES
[Adresse 10]
[Adresse 10]
[Localité 19]
Représentée par Me Jean DI FRANCESCO de la SCP URBINO ASSOCIÉS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0137
Assistée de Me Nicolas NEZONDET, de la SCP URBINO ASSOCIÉS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0137
DÉFENDERESSE À LA SAISINE APRÈS CASSATION
INTIMEE INITIALE
Et après avoir entendu publiquement, à notre audience du 12 mars 2025, l'avocat des demandeurs à la saisine après cassation et l'avocat de la défenderesse à la saisine après cassation
Les débats ayant été clos avec l'indication que l'affaire était mise en délibéré au 11 juin 2025, prorogé au 9 juillet 2025 puis prorogé à nouveau au 11 juillet suivant pour mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
Avons rendu l'ordonnance ci-après :
1. Le 1er février 2021, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Paris a rendu, en application des articles L.16B et R. 16B-1 du livre des Procédures Fiscales (ci-après, "LPF"), une ordonnance d'autorisation d'opérations de visite et de saisie à l'encontre de la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL SA.
2. L'ordonnance a autorisé les opérations de visite et de saisie dans les lieux suivants :
- locaux et dépendances susceptibles d'être occupés par M. [O] [F] [C] et/ou Madame [HW] [S], sis [Adresse 11] ;
- locaux et dépendances, sis [Adresse 18] susceptibles d'être occupés par Madame [R] [C] et/ou Monsieur [AL] [Y] et/ou l'entreprise individuelle [Y] [AL].
3. L'ordonnance a fait droit à la requête de la Direction Nationale des Enquêtes Fiscales (ci-après, "DNEF") en date du 27 janvier 2021 au motif que la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL SA exercerait depuis la France tout ou partie de son activité de promotion de produits pharmaceutiques sans souscrire les déclarations fiscales correspondantes et ainsi omettrait de passer les écritures comptables afférentes.
4. Pour autoriser les enquêteurs de la Direction Nationale des Enquêtes Fiscales à procéder à la visite des locaux et dépendances susvisés, l'ordonnance retient pour l'essentiel que :
- la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL SA, dirigée par Monsieur [O] [F] [C], intervient dans le secteur pharmaceutique. Elle dispose également d'un bureau de représentation en côte d'ivoire ;
- depuis le 28/11/2003, la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL SA dispose de son siège social [Adresse 6] à [Localité 28] en Suisse ;
- la consultation des données issues du site internet d'accès public " moneyhouse.ch " fait ressortir que 12 entreprises actives sont répertoriées à l'adresse du siège social de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA ;
- la société InterExperts SA réalisant des activités de fiduciaire, bureau de comptabilité, conseiller fiscal, bureau de révision et de gérance de fortune est également indiquée à l'adresse [Adresse 6] à [Localité 28] en Suisse ;
- l'adresse du siège social de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA sise [Adresse 6] à [Localité 28] en Suisse est citée dans les " Panama Papers " ;
- sur la base de données économiques D&B, l'entité PROPHARMED INTERNATIONAL SA disposerait d'un effectif de 4 personnes ;
- ainsi, il peut être présumé que la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA :
- dispose de moyens d'exploitation limités à l'adresse de son siège social qui a d'ailleurs été citée dans l'enquête d'investigation dite des " Panama Papers " ;
- utilise ou a utilisé les services d'une société fiduciaire suisse ;
- dispose d'un administrateur domicilié en Suisse en la personne de [B] [M] ;
- il peut être présumé que [B] [M], compte tenu de ses fonctions d'administrateur de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA, d'associé du cabinet d'avocats suisse KELLERHALS CARRARD et de son implication dans 73 mandats dont 25 actifs, ne gère pas de façon habituelle et permanente la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA ;
- dès lors, la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA semble disposer de moyens humains et matériels limités en Suisse pour la réalisation de ses activités de représentation, distribution et promotion de produits pharmaceutiques et le pouvoir décisionnel de ladite société est présumé être concentré entre les mains de Monsieur [O] [F] [C] ;
- selon l'examen des déclarations d'honoraires ou commissions versées au cours des années 2010 à 2019, souscrites par les laboratoires français, l'entité de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL SA a perçu des honoraires ou des commissions pour un total de plus de 43 160 000 euros ;
- il peut être présumé que l'entité PROPHARMED INTERNATIONAL SA peut être considérée comme un prestataire de services indépendant, assurant notamment la promotion, au nom et pour le compte de différents laboratoires français, de produits pharmaceutiques dans de nombreux pays africains ;
- la dénomination " PROPHARMED ", mentionnée par le groupe EURAPHARMA sur son site internet est présumée désigner l'entité de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL SA ;
- la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA :
-- perçoit de manière régulière et habituelle des commissions et honoraires significatifs en provenance de laboratoires pharmaceutiques ou de sociétés grossistes en produits pharmaceutiques installés sur le territoire français ;
' depuis 2011, perçoit des commissions et honoraires à titre prépondérant de l'entité française E.P.DIS, filiale du groupe EURAPHARMA lui-même actionnaire de la société RESSOURCETHICA ;
-- peut être considérée, conformément aux informations communiquées par le groupe EURAPHARMA, comme faisant partie de son " réseau France " et comme exerçant une activité de promotion médicale et pharmaceutique à destination de l'Afrique et dans les collectivités territoriales d'Outre mer (CTOM) en s'appuyant sur des réseaux de visiteurs médicaux et de délégués pharmaceutiques qui assurent la promotion des produits et les prises de commandes pour le compte des laboratoires ;
- la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL SA, qui ne dispose d'aucun établissement déclaré sur le territoire français, s'avère pourtant mentionnée sur une boîte aux lettres du siège social de sa société mère, la SCA RESSOURCETHICA, sise [Adresse 4] et s'avère également destinataire de biens importés à l'adresse [Adresse 17]. ;
- Madame [D] [F], épouse de Monsieur [O] [F], qui déclare avoir travaillé pour les entités EURAPHARMA et PROPHARMED France, est susceptible d'avoir également exercé des fonctions pour le compte de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA depuis les locaux de RESSOURCETHICA à [Localité 37] ;
- Madame [ZU] [I] épouse [Z], domiciliée en France, était rémunérée comme directrice administrative par la société PROPHARMED France jusqu'en 2016. A partir de 2017, elle est rémunérée par la société RESSOURCETHICA pour la fonction de directrice administrative et financière ;
- Madame [ZU] [Z] utilise des moyens de communications appartenant à la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL SA dans ses relations avec l'administration française ;
- Madame [X] [E], employée de la société française RESSOURCETHICA pendant 7 ans, est susceptible d'avoir exercé ses fonctions pour le compte de la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL SA depuis les locaux de RESSOURCETHICA à [Localité 37] ;
- il apparaît que l'activité de la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL SA est réalisée notamment par une salariée de la SCA RESSOURCETHICA au siège de cette dernière à [Localité 37] en la personne d'[L] [W], résidente fiscale française, figurant parmi les salariés de la SCA RESSOURCETHICA en qualité de Responsable Grands Comptes ;
- [R] [C], responsable grands comptes - junior chez RESSOURCETHICA / PROPHARMED INTERNATIONAL SA jusqu'en septembre 2020 puis Responsable département DIGITAL chez GROUPE ETHICA - est présumée exercer ou avoir exercé ses fonctions pour le compte de PROPHARMED INTERNATIONAL SA depuis la France où elle est présumée travailler au sein de la société RESSOURCETHICA à [Localité 37] ;
- il résulte de ce tout qui précède que la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL SA est présumée utiliser notamment le personnel de la société française SCA RESSOURCETHICA afin de réaliser son objet social ;
- il peut être présumé qu'en 2006-2007, le directeur général de CIDER PROMOTION INTERNATIONAL (devenue la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA) exerçait déjà son activité en France dans la région parisienne ;
- les entités françaises SCA RESSOURCETHICA et SARL AFRIGESTION sont présumées exercer une activité similaire ou complémentaire à l'entité de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL SA et disposent également d'un dirigeant commun en la personne de Monsieur [O] [F] [C] ;
- la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL SA est dirigée par la société française SCA RESSOURCETHICA, son actionnaire à 99,99%, et de manière effective par Monsieur [O] [F] [C], gérant de la SARL AFRIGESTION elle-même représentante de la SCA RESSOURCETHICA. Monsieur [C] est directeur général investi d'un pouvoir de signature individuelle au sein de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA ;
- Monsieur [C], dirigeant de PROPHARMED INTERNATIONAL/ RESSOURCETHICA SCA, se déclare domicilié à l'étranger et son épouse [HW] [S], indique être séparée et partie à l'étranger en 2015 ;
- Monsieur [C] semble toujours être marié à Madame [S] [HW] et ils sont notamment tous les deux titulaires d'une adresse commune à [Localité 31] sise [Adresse 11] dans le [Localité 5] (revendiquée en 2020 comme adresse en France par Madame [HW] [C]), ainsi que de contrats d'assurance et d'assurance vie rattachés à cette adresse. Ils disposent en outre de lignes téléphoniques actives et de véhicules sur le territoire français ;
- Monsieur [C] est présumé utiliser une ligne téléphonique prise en charge par la SCA RESSOURCETHICA, venant aux droits et obligations de la SAS PROPHARMED France, alors qu'il ne perçoit aucune rémunération de cette entité ;
- Madame [HW] [S] considère qu'elle réside en France et plus particulièrement à [Localité 31], de manière stable et régulière, afin de solliciter la prise en charge de ses frais de santé par la CPAM de [Localité 31] alors que Monsieur [C] revendique un régime réservé aux expatriés ;
- Monsieur et Madame [C] sont gérants d'une société monégasque propriétaire d'une villa sise [Adresse 16]. L'examen du contrat d'électricité au nom de [HW] [C] laisse présumer que cette dernière y réside ;
- Monsieur et Madame [C] sont titulaires de comptes bancaires ouverts et non clôturés sur le territoire français et sont donc susceptibles d'y être présents de manière habituelle à l'adresse [Adresse 11] ainsi qu'au [Adresse 17] ;
- Monsieur et Madame [C] disposent de résidences identiques en France témoignant d'une occupation effective et commune, de comptes bancaires ouverts en France, de lignes téléphoniques utilisées à titre personnel gérées par des opérateurs français et de véhicules automobiles immatriculés en France, ce qui laisse présumer qu'ils résident à titre habituel et permanent en France ;
- ainsi, il peut être considéré que le centre décisionnel de la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL SA est présumé se situer en France notamment en la personne de Monsieur [C], susceptible de résider de manière habituelle et permanente sur le territoire national et disposant de la qualité de directeur général et des pouvoirs de gestion et d'engagement de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA ;
- ainsi, il résulte de tout ce qui précède que la SCA de droit français RESSOURCETHICA dispose, outre le rôle clé réservé à Monsieur [C] par ailleurs gérant de la SCA au travers de la SARL AFRIGESTION, de salariés et cadres aptes à réaliser, depuis le territoire français, les activités de promotion médicale et pharmaceutique de la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL SA ;
- il peut être considéré que la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL SA semble utiliser notamment les moyens humains et matériels localisés à [Localité 37] et appartement à la SCA RESSOURCETHICA ou à la SARL AFRIGESTION, elle-même dirigée par Monsieur [C] et gérante de la SCA précitée pour la réalisation de tout ou partie de son activité de promotion, au nom et pour le compte de laboratoires, de produits pharmaceutiques ainsi que de la réalisation des démarches administratives afférentes auprès du corps médicale et pharmaceutique.
5. L'ordonnance retient ainsi que la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL SA est présumée s'être soustraite et/ou se soustraire à l'établissement et au paiement des impôts sur les bénéfices ou des taxes sur le chiffre d'affaires, en se livrant à des achats ou des ventes sans facture, en utilisant ou en délivrant des factures ou des documents ne se rapportant pas à des opérations réelles ou en omettant sciemment de passer ou de faire passer des écritures ou en passant ou en faisant passer sciemment des écritures inexactes ou fictives dans des documents comptables dont la tenue est imposée par le Code général des impôts (articles 54 et 209-I pour l'IS et 286 pour la TVA).
6. Les opérations de visite et de saisies se sont déroulées le 04 février 2021 dans les locaux et dépendances sis [Adresse 18].
PROCEDURE
7. Le 19 février 2021, les sociétés PROPHARMED INTERNATIONAL SA et SCA RESSOURCETHICA, Monsieur [F] [C], Madame [HW] [S] épouse [C], Madame [R] [C], et Monsieur [AL] [Y] ont interjeté appel de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Paris du 3 févier 2021.
8. Les appelants demandaient au délégué du premier président de la cour d'appel de Paris de :
à titre principal :
- annuler l'ordonnance rendue le 1er février 2021 par le juge des libertés et de la détention de [Localité 31] ;
- annuler les opérations de visite et de saisies réalisées le 4 février 2021 par la DNEF dans les locaux des époux [C] ;
- ordonner la restitution aux sociétés susmentionnées de l'ensemble des documents saisis sans possibilité pour la DNEF d'en garder une copie ;
à titre subsidiaire :
- annuler la saisie des pièces n°106 à 108, opérée dans le cadre de la visite domiciliaire réalisée le 4 février 2021 au domicile de Monsieur [F] [C] ;
- dire que la copie des pièces devra être détruite et qu'elle ne pourra en aucun cas être utilisée par l'administration dans un quelconque dossier que ce soit.
9. La DNEF demandait au délégué du premier président de la cour d'appel de Paris de :
- déclarer irrecevable le recours en demande d'annulation de la saisie des pièces ;
- confirmer l'ordonnance du juge des libertés et de la détention de [Localité 31] du 1er février 2021;
- rejeter toutes autres demandes, fins et conclusions ;
- condamner les appelants au paiement de la somme de 2000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'en tous les dépens.
10. L'affaire a été audiencée pour être plaidée le 29 septembre 2021 puis le 27 octobre 2021, date à laquelle elle a été renvoyée au 16 février 2022 et mise en délibérée pour être rendue le 30 mars 2022.
11. Par ordonnance rendue le 30 mars 2022, le magistrat délégué a :
- déclaré irrecevable la demande d'annulation de la saisie des pièces lors des opérations de visite domiciliaire du 4 février 2021 ;
- confirmé en toutes ses dispositions l'ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Paris du 1er février 2021 ;
- déclaré régulières les opérations de visite et de saisies subséquentes effectuées le 4 février 2021 dans les locaux et dépendances mentionnés dans l'ordonnance du juge des libertés et de la détention ;
- rejeté toute autre demande ;
- accordé la somme de 1700 € à l'administration fiscale à charge pour les parties appelantes au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- mis les dépens à la charge des parties appelantes.
12. La société PROPHARMED INTERNATIONAL SA, Monsieur [O] [C], Madame [HW] [S] épouse [C], la société RESSOURCETHICA, Madame [R] [C], Monsieur [AL] [Y] ont formé un pourvoi contre l'ordonnance rendue par le premier président de la cour d'appel le 30 mars 2022.
13. Les demandeurs ont fait grief à l'ordonnance d'avoir confirmé en toutes ses dispositions l'ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Paris en date du 1er février 2021 et déclaré en conséquence régulières les opérations de visite et de saisie subséquentes effectuées le 4 février 2021, alors qu'elles auraient, notamment, violé le règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation des données et abrogeant la directive 95/46/CE ( ci-après, " RGPD "), jugeant ces dispositions inapplicables aux infractions fiscales et par conséquent, à la procédure mise en 'uvre par l'article L. 16B du LPF.
14. La Cour de cassation, par arrêt du 11 octobre 2023, au visa des articles 2 et 23 du RGPD, de l'article 48 de la loi n°78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, et de l'article L. 16B du LPF, a cassé et annulé, sauf en ce qu'elle déclare irrecevable la demande d'annulation de la saisie des pièces lors des opérations de visite domiciliaire du 4 février 2021, l'ordonnance rendue le 30 mars 2022 , entre les parties, par le premier président de la cour d'appel de Paris.
15. La Cour de cassation a jugé que le premier président n'a pas donné de base légale à sa décision, par des motifs impropres à établir qu'étaient réunies les conditions de la limitation prévue à l'article 23 du RGPD et mise en 'uvre à l'article 48 de la loi n°78-17 du 6 janvier 1978, à l'obligation de fournir à la personne concernée les informations prévues à l'article 14 du RGPD.
16. En conséquence, dans le dispositif de son arrêt, la Cour de cassation a remis, sauf sur le point déclaré irrecevable, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cette ordonnance et les renvoie devant la juridiction du premier président de la cour d'appel de Paris autrement composée renvoyé les parties devant le premier président de la cour d'appel afin qu'il soit à nouveau statué sur le fond.
17. L'affaire a été audiencée pour être plaidée le 09 octobre 2024 puis renvoyée à la demande des parties à l'audience du 12 mars 2025.
18. Par conclusions d'appel récapitulatives et responsives déposées au greffe de la cour d'appel de Paris le 9 octobre 2024, la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA, Monsieur [O] [C], Madame [HW] [S] épouse [C], la société RESSOURCETHICA, Madame [R] [C], Monsieur [AL] [Y], appelants, demandent au délégué du premier président de la cour d'appel de Paris :
- d'annuler l'ordonnance rendue le 1er février 2021 par le juge des libertés et de la détention du Tribunal judiciaire de Paris ;
- de condamner la DNEF à verser à la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA la somme de 1000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
19. Par conclusions récapitulatives déposées au greffe de la cour d'appel de Paris le 24 octobre 2024, la DNEF en réplique demande au premier président de la cour d'appel de:
- confirmer l'ordonnance du juge des libertés et de la détention de [Localité 31] du 1er février 2021;
- rejeter toutes demandes, fins et conclusions ;
- condamner les appelants au paiement de la somme de 2 000€ au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, outre les entiers dépens.
MOTIFS DE LA DECISION
Moyens des parties
20. A l'appui de leur demande d'annulation de l'ordonnance du 1er février 2021 rendue par le juge des libertés et de la détention de [Localité 31], la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA, Monsieur [O] [C], Madame [HW] [S] épouse [C], la société RESSOURCETHICA, Madame [R] [C], Monsieur [AL] [Y], appelants, font valoir en premier lieu la violation du règlement général sur les données personnelles (règlement (UE) 2016/679). Ils allèguent d'une part un manquement à une obligation d'information à l'égard des personnes dont des données ont été traitées, et d'autre part une transmission de ces informations à des tiers non autorisés.
21. Ils soutiennent qu'il appartient au juge de l'autorisation de contrôler si l'administration s'est conformée aux obligations résultant du RGPD et le cas échéant, aux limitations à ces obligations résultant du droit national. Ils font valoir que le RGPD s'applique à la procédure de l'article L. 16B et implique que les personnes physiques dont les informations sont traitées en soient informées, conformément à l'article 14 du règlement précité, ce qui n'a pas été le cas en l'espèce.
22. Pour les appelants, 19 pièces produites à l'appui de la requête " qui concernaient les personnes physiques reprises dans le cadre de l'ordonnance querellée, n'ont fait l'objet d'aucun contrôle par le juge des libertés et de la détention. Aucunes des pièces listées ci-dessous ne portent la mention de PROPHARMED INTERNATIONAL. " (pièces 6, 7, 22, 30, 38, 41, 44, 46, 50, 50-1, 51, 52, 53, 54, 55, 59, 60, 61-1, 61).
23. Ils estiment que " le contrôle de proportionnalité du juge aurait dû faire apparaître que {certaines pièces} (') révèlent des informations personnelles qui sont sans intérêt pour la procédure de visite domiciliaire de la société PROPHARMED INTERNATIONAL ".
24. Ils indiquent que " l'ordonnance du juge des libertés et de la détention motive les droits de visite et de saisie par le biais de trois traitements généraux créés par la DGFiP (ADONIS, SIR, FICOBA) dont certaines pièces du dossier sont issues et cela ne respecte pas les règles posées par les textes susvisés. Ainsi, la requête et les pièces communiquées sur lesquelles se fonde l'ordonnance résultent elles-mêmes de traitements sui generis mis en 'uvre par la DNEF pour les besoins spécifiques de son enquête à l'encontre des appelantes. Ces traitements portent sur des données issues de traitements généraux précités créés et des données issues de recherches sur des bases de données ou des sources d'accès public, tels que des moteurs de recherches, des réseaux sociaux professionnels ou d'autres bases de données " (pièces 22, 41, 43, 54, 59, 61, 6 et 7).
25. Ils soutiennent que l'article 4 de l'arrêté du 5 avril 2022 prévoit que les données relatives au " dossier fiscal des particuliers " (ADONIS) soient archivées " au début de la 4e année suivant l'année d'imposition " et que l'article 3 de l'arrêté du 14 juin 1982 relatif au système FICOBA, dans sa version en vigueur lors de la fermeture des comptes, prévoyait une durée de conservation de trois ans après clôture du compte des personnes physiques " alors qu'en l'espèce, les données rapportées s'agissant de Madame [S] remontent à plus de quatre ans et celles issues du système FICOBA sont encore antérieures ' (pièces 30 et 38).
26. Ils arguent que la volumétrie et la diversité des données personnelles collectées au cas particulier révèlent que la Direction Nationale d'Enquêtes Fiscales a procédé à un traitement de masse, collectant des données personnelles publiquement accessibles, sans disposer de fondement légal.
27. Ils concluent que le traitement ainsi effectué est illicite et qu'il en est par conséquent de même des pièces produites par l'administration.
28. Ils font valoir qu'il résulte des délibérations de la Commission Nationale de l'Informatique et des Libertés (ci-après, " CNIL ") ainsi que de la jurisprudence que lorsque l'administration demande la communication de données à caractère personnel sur la base d'une disposition législative, elle doit veiller à ne pas causer une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée des intéressés, et qu'en l'espèce, " cet équilibre n'a pas été respecté ".
29. Ils considèrent que : " les données en question non seulement constituent des données à caractère personnel mais elles révèlent, pour partie, des informations concernant la vie privée des personnes ".
30. Ils estiment que le juge des libertés et de la détention n'a pas effectué de contrôle de proportionnalité, a méconnu le droit au respect de la vie privée des personnes physiques dont certains renseignements figuraient dans les pièces produites à l'appui de la requête.
31. Ils soutiennent, au visa de la loi modifiée du 6 juin 1978 et de la jurisprudence et de la position de la CNIL, une obligation d'information à l'égard des personnes dont les données sont traitées et qu'en cas de manquement, les éléments de preuve ont été collectés de façon déloyale et donc sont illicites.
32. Ils font valoir qu'en l'espèce, " plusieurs modalités de collecte des données ont été utilisées (directement auprès des personnes pour les traitements tels qu'ADONIS, FICOBA, SIR ; indirectement pour les traitements sui generis de la DNEF) et que l'ensemble de ces traitements relève, selon les finalités, du règlement ou de la directive susvisés ".
33. Ils arguent que les personnes concernées par ces traitements " n'ont pu exercer leurs droits, notamment celui essentiel de saisir la Commission Nationale de l'Informatique et des Libertés, de contacter le Délégué à la Protection des Données (ci-après, " DPD ") ou d'exercer leur droit à l'oubli puisqu'elles n'ont pas bénéficié de l'information nécessaire à cette fin ".
34. Pour les appelants, la communication de données à des tiers non autorisés constitue une violation du principe de confidentialité et en l'espèce, des données personnelles issues des traitements ADONIS, FICOBA et SIR ont été communiquées à l'employeur des personnes concernées ainsi qu'à d'autres entités privées qui en ont été informés et que ces manquements " concernent a minima 19 pièces sur les 79 annexées à l'ordonnance ".
35. Ils ajoutent que ces pièces ne font aucune référence à la société dont la fraude est présumée et que les pièces fournies n'entrent pas dans l'exception de l'article 23 précité et que le traitement des informations y figurant impliquait l'obligation d'information prévue à l'article 14 du RGPD.
36. Ils concluent à l'annulation de l'ordonnance rendue sur le fondement de pièces d'origine illicite, en violation de la vie privée et de l'inviolabilité du domicile.
37. En deuxième lieu, les appelants contestent l'existence d'une présomption de fraude.
38. Ils contestent que le centre décisionnel de la société PROPHARMED INTERNATIONAL soit situé en France. Ils soutiennent que :
- Monsieur [C] a la nationalité française et ivoirienne, n'exerce aucune fonction salariée en France et ne dispose d'aucun mandat social rémunéré, est séparé de biens de son épouse avec laquelle il réalise des déclarations distinctes ;
- " le pouvoir décisionnel qui semble concentré, pour le juge des libertés et de la détention, entre les mains de Monsieur [F] [C] n'est pas exercé en France, pays dans lequel il ne vit pas et duquel il n'est pas résident. A ce titre, relevons que Monsieur [F] [C] n'est propriétaire d'aucune résidence en France. Il ne dispose pas d'un domicile à [Localité 31], la société RESSOURCETHICA est locataire d'un appartement à [Localité 31] pour ses clients et son Directeur Général notamment " ;
- la résidence sise [Adresse 23] n'est pas habitable selon le constat d'huissier produit et appartient à une SCI dont Monsieur [C] est associé à 5% (pièces n°100 et 102) ;
- l'ordonnance n'indique pas que les fonctions de directeur général seraient effectuées depuis la France alors que Monsieur [C] déclare en Côte d'Ivoire ses revenus suisses et qu'il ne réside pas en France ;
- la société PROPHARMED INTERNATIONAL n'a pas de dirigeant résident fiscal français; Au terme d'un examen de situation fiscale personnelle (ci-après, " ESFP "), Monsieur [C] a reçu un avis d'absence de redressement (pièce n°121) et, en l'absence de dirigeant fiscal français, la société PROPHARMED INTERNATIONAL ne peut avoir son siège de direction effective en France ;
- la société PROPHARMED INTERNATIONAL fait l'objet depuis le 11 mars 2022 d'une vérification de comptabilité et qu'à ce jour, aucune proposition de vérification ne lui a été envoyée " l'administration affirmant même que tout redressement sur le fondement du siège de direction effective était abandonné " (pièces n°123 et 124) ;
- le centre décisionnel ne peut être présumé en France au motif du logement de fonction du directeur général au sens de la jurisprudence dès lors que la société PROPHARMED INTERNATIONAL dispose en Suisse d'un président suisse, d'un directeur général ivoirien, d'organes de décision (Conseils d'Administration et Assemblées Générales) situés en Suisse et d'un commissaire aux comptes de nationalité suisse ;
- le fait, pour une société étrangère, d'être détenue par une société française et dont le gérant serait domicilié en France ne suffit pas, en l'absence d'autres éléments, à présumer que son centre décisionnel se trouve en France et donc à caractériser la fraude prévue par l'article L. 16B dès lors que son dirigeant se rend régulièrement au siège de la société et qu'elle y a du personnel permanent en Suisse et sur les territoires des consommateurs finaux ;
- dès lors que la résidence fiscale du centre décisionnel est querellée, que le " centre décisionnel n'est pas résident fiscal français déclaré comme tel au terme de ses propres déclarations souscrites en France et qu'il démontre au contraire qu'il est résident fiscal étranger, aucune présomption de fraude mise en place par un centre décisionnel français ne peut être retenue " (CA [Localité 31], Pôle 5, Chambre 12, 2 février 2022, n°21/10621).
39. Ils soutiennent que le centre décisionnel de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA est situé en Suisse en soulignant que :
- les deux dirigeants de la société ne sont pas résidents fiscaux français, Monsieur [M] (administrateur) est suisse et Monsieur [C] est ivoirien (pièces n°70 et 81) ;
- la société PROPHARMED INTERNATIONAL dispose d'une direction effective à [Localité 28] en la personne de Monsieur [H] qu'elle rémunère plus de 80 000 francs par an (pièce n°83) ;
- Monsieur [C] se rend régulièrement en Suisse ;
- les conseils d'administration et assemblées générales se tiennent en Suisse ;
- tous les procès-verbaux produits indiquent une adresse de tenue des assemblées générales au domicile professionnel du président, les dates et heures des tenues sont notées avec un secrétaire qui est suisse (pièce n°82) ;
- les statuts de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA prévoient que la société est administrée par un Conseil d'Administration composé d'un ou plusieurs membres et qu'il peut prendre des décisions sur toutes les affaires qui ne sont pas attribuées à l'assemblée générale par la loi ou les statuts (pièce n°2 produite à l'appui de la requête) ;
- le conseil d'administration est le dirigeant de la société PROPHARMED INTERNATIONAL en Suisse, ce conseil d'administration est composé d'un membre unique qui dispose de la signature individuelle, il s'agit de Monsieur Charles [M]. Monsieur [F] [C] est nommé Directeur Général, il n'est pas membre du Conseil d'Administration ;
- Monsieur [F] [C] est rémunéré par la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA et déclare en Côte d'Ivoire ses revenus suisses pour un montant de 66.368.101 [Localité 27] CFA ou 102.012,55 francs Suisses au titre de ses revenus 2016, 66.059.641 [Localité 27] CFA ou 113.487 francs Suisses au titre de ses revenus 2017 et 66.184.601 [Localité 27] CFA ou 109.514 francs Suisses au titre de ses revenus 2018 (pièce 81);
- la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA n'a d'autre choix que de nommer une fiduciaire conformément à l'article 727 du Code des obligations suisse et de ses statuts ;
- en l'espèce, la présence d'un président suisse, Monsieur [M], ayant la capacité d'engager la société PROPHARMED INTERNATIONAL car disposant de la signature individuelle et étant membre unique du conseil d'administration enlève toute présomption de fraude ;
- " le fait que [F] [C] soit directeur général de PROPHARMED INTERNATIONAL, filiale et gérant de RESSOURCETHICA société mère, n'est pas un élément permettant de présumer une fraude alors même que Monsieur [F] [C] aurait des attaches en France ".
40. Ils font valoir que la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA disposait, de moyens matériels en Suisse pour exercer son activité en soutenant que :
- la société disposait de locaux en Suisse ; Ils contestent que le bail de la société PROPHARMED INTERNATIONAL pour son siège social [Adresse 6] ait été résilié le 31 octobre 2008 comme le soutient l'administration. Le bail a pris effet le 1 novembre 2003 et était toujours en vigueur le 31 octobre 2008 (pièces n°110, 89, 120). Le bail a été résilié en juin 2016 et une sous-location est ensuite intervenue à la même date à la même adresse, avec le paiement d'un loyer du 2003 à 2021 (pièces n°111 et 111-a) ;
- la société faisait appel à un expert-comptable suisse, déposait ses comptes en Suisse et le recours à une société fiduciaire est une obligation légale ;
- la société dispose à [Localité 28] de moyens matériels, d'immobilisations et est titulaire de contrats de maintenances, factures d'eau, électricité etc. (pièces n°112, 113, 114) :
- la société avait une ligne téléphonique en Suisse (pièce n°95) ;
- la société dispose d'une adresse mail en Suisse et d'un nom de domaine en Suisse (pièce n°57) ;
- la société dispose d'une plaque sur l'immeuble de son siège social (pièce n°93) ;
- " l'ordonnance ne soutient ni n'allègue que la société PROPHARMED INTERNATIONAL serait propriétaire d'un quelconque actif corporel ou incorporel en France ".
41. Les appelants font valoir que la société PROPHARMED INTERNATIONAL disposait, en Suisse, des moyens humains nécessaires à son activité et contestent le recours au personnel de la société RESSOURCETHICA à cette fin. Ils soutiennent que :
- la société suisse avait des employés suisses " conformément à ce qui est mentionné dans la base de données Dun et Badstreet " (pièce n°3-2) ;
- le commissaire aux comptes suisse indique le montant des salaires perçus par les salariés suisses, il s'agit d'un montant de 91.137 francs suisses (pièces n°76 et 114-a) ;
- " les services dispensés par la société suisse aux laboratoires français et étrangers qui sont les clients de PROPHARMED INTERNATIONAL le sont par des employés de PROPHARMED INTERNATIONAL développés sur le territoire africain, salariés sous contrat de droit suisse " (pièces n°76, 75, 81, 80) ;
- la société suisse faisait appel à du personnel français de sa société mère en fonction support, par l'intermédiaire de conventions de prestations de services rémunérées. Cette rémunération est déclarée en France (pièces n°84, 85, 86). Les fonctions exercées par ce personnel français sont des fonctions administratives, d'ordre comptable, financier qui ne correspondent pas au secteur d'activité de PROPHARMED INTERNATIONAL ;
- " le fait d'avoir recours à des sociétés extérieures est inhérent à la dynamique de groupe et des prestations dispensées par un siège social à sa filiale et n'implique pas la réalisation par la société mère du chiffre d'affaires de la filiale " ;
- Madame [ZU] [Z] exerce les fonctions de directeur administratif et financier pour la société PROPHARMED INTERNATIONAL (pièce n°115), dans le cadre du contrat de prestations de services conclu entre PROPHARMED FRANCE et PROPHARMED INTERNATIONAL puis RESSOURCETHICA et PROPHARMED INTERNATIONAL (pièces n°84 et 85) ;
- le personnel de RESSOURCETHICA ne réalise pas l'objet social de PROPHARMED INTERNATIONAL auprès des laboratoires français mais " des fonctions support inhérentes à toute logique de groupe " ;
- les salariés de RESSOURCETHICA ne pallient pas l'insuffisance de moyens en Suisse; Les salariés de RESSOURCETHICA rendent des prestations de nature administrative à PROPHARMED INTERNATIONAL qui a une activité commerciale de commissionnaire;
- le fait que la société mère française prenne en charge pour sa filiale suisse les prestations purement administratives répond à une stratégie de groupe et ne peut suffire à démontrer que le cycle de commercialisation est accompli en partie sur le territoire français (Cour d'Appel, Aix en Provence, 5 avril 2018, n°17/13311).
42. Ils indiquent que Madame [Z], Madame [F], Madame [E], Madame [W] et Monsieur [K] étaient salariés de la société PROPHARMED France et que la société PROPHARMED FRANCE a été dissoute par décision de l'associé unique du 17 novembre 2016 au terme d'une transmission universelle de patrimoine prenant effet le 1er janvier 2016 et enregistrée au RCS de [Localité 29]. Ils ajoutent que la transmission universelle a été réalisée au profit de l'associé unique, la société RESSOURCETHICA.
43. Précisant que " la promotion des produits pharmaceutiques passait d'abord par la conclusion de contrat avec des laboratoires pharmaceutiques, que ces laboratoires commissionnaient la société prestataire sur la base des ventes réalisées de ses produits et que ces ventes étaient conclues grâce à des visiteurs médicaux qui rencontraient les médecins, les pharmaciens et les personnels des hôpitaux sur le territoire dévolu par le contrat (en l'espèce l'Afrique de l'ouest)' professionnels de santé qui commandaient ensuite les produits pharmaceutiques des laboratoires en question ", ils considèrent que cette explication " aurait permis de se rendre compte que l'activité salariée de Madame [Z] et de Monsieur [K] notamment, employés de PROPHARMED FRANCE d'abord et de RESSOURCETHICA ensuite, ne permettait pas, de [Localité 37], de développer cette activité. Bien évidemment, [F] [C], dirigeant de droit de la société PROPHARMED INTERNATIONAL et résidant en Côte d'Ivoire a le pouvoir d'engager cette société mais son travail est réalisé en Afrique avec ses commerciaux qui sont employés de la société suisse, lesquels développent le chiffre d'affaire de la société PROPHARMED INTERNATIONAL sur le marché africain ", ils soutiennent l'absence de relation de la société PROPHARMED INTERNATIONAL avec la France.
44. Ils contestent que la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL ne dispose pas en Suisse des ressources et compétences nécessaires à la promotion des produits pharmaceutiques et que son activité continue d'être assurée par les salariés de RESSOURCETHICA ou de PROPHARMED FRANCE et de son directeur général qui serait résident fiscal français en soutenant que :
- la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA est effectivement domiciliée en Suisse, en produisant un contrat de bail en date du 9 octobre 2003 relatif aux locaux sis [Adresse 6] à [Localité 28] (pièce n°89) ;
- la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA dispose d'une ligne téléphonique à l'adresse sise [Adresse 6] à [Localité 28] ;
- les bilans de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA révèlent que la société disposait au 31 décembre 2017 d'un effectif de 282 salariés (entre ceux du siège et les commerciaux africains, plus les deux mandataires sociaux), 301 au 31 décembre 2018, et 477 au 31 décembre 2019. La société PROPHARMED INTERNATIONAL communique la liste de ses effectifs et leur lieu d'exercice (pièce n°75) ;
- la société PROPHARMED INTERNATIONAL dispose d'une adresse de messagerie en Suisse et d'un nom de domaine PROPHARMED INTERNATIONAL appartenant à CIDER PROMOTION INTERNATIONAL SA (ancien nom de la société PROPHARMED INTERNATIONAL) et le nom de [P] [A] (salariée de PROPHARMED INTERNATIONAL) apparaît sur ce nom de domaine ainsi que l'adresse du siège [Adresse 6] à [Localité 28], sachant que ce nom de domaine a été enregistré le 11 septembre 2007 pour la première fois, soit avant que RESSOURCETHICA ne rachète cette filiale ;
- si les sociétés les sociétés PROPHARMED INTERNATIONAL et PROPHARMED FRANCE et RESSOURCETHICA ont des activités similaires (la promotion des produits des laboratoires pharmaceutiques), cette circonstance n'est pas déterminante car leurs territoires d'intervention sont différents ;
- le fait que les sociétés RESSOURCETHICA et PROPHARMED INTERNATIONAL aient un dirigeant commun est inhérent à la logique du groupe ;
- la réalité de l'activité, en Suisse de l'administrateur de PROPHARMED INTERNATIONAL, de son directeur général et de ses salariés en Suisse et en Afrique.
45. Les appelants concluent que l'ordonnance confond les salariés de PROPHARMED FRANCE et de RESSOURCETHICA. Ils indiquent que :
- les deux sociétés sont distinctes de par leur domaine d'intervention et PROPHARMED INTERNATIONAL a conclu des contrats de prestation de services avec PROPHARMED FRANCE et RESSOURCETHICA pour avoir accès à des services administratifs auprès des salariés de ces deux entités françaises ;
- jusqu'en 2016, " les salariés stigmatisés de RESSOURCETHICA comme étant les moyens humains développant le chiffre d'affaires de PROPHARMED INTERNATIONAL étaient des salariés de PROPHARMED France " ;
- ces salariés, une fois la transmission universelle de patrimoine réalisée, sont des salariés de RESSOURCETHICA, alors que des conventions de prestation de services étaient régulièrement conclues entre les différentes entités pour réaliser les prestations mises en cause par l'administration.
46. Ils estiment que le fait qu'une boîte aux lettres avec la mention " PROPHARMED INTERNATIONAL " apparaisse à l'adresse de RESSOURCETHICA à [Localité 37] n'emporte aucune présomption dès lors que toutes les sociétés composant le groupe RESSOURCETHICA ou l'ayant composé, qu'elles soient établies en France ou l'étranger, y sont indiquées.
47. Ils font valoir que la société PROPHARMED INTERNATIONAL dispose des moyens humains et matériels, en Suisse, permettant de réaliser son objet social, les pièces de l'ordonnance en cause indiquant que la société PROPHARMED INTERNATIONAL dispose de 4/5 salariés, en plus de ses deux dirigeants, son administrateur suisse et son directeur général ivoirien. Ils estiment que la société PROPHARMED INTERNATIONAL démontre qu'elle emploie des salariés en Suisse au siège mais également sur le continent africain (sous contrat de droit suisse).
48. Ils soutiennent, s'agissant des liens entre les sociétés EURAPHARMA, PROPHARMED INTERNATIONAL et RESSOURCETHICA, que :
- la société EURAPHARMA est associée de RESSOURCETHICA et détient 35% des parts ;
- la société française EURAPHARMA fait apparaître que celle-ci est " l'actionnaire de 23 sociétés en Afrique et notamment du premier grossiste répartiteur grâce à ses sociétés LABOREX qui est le leader dans la distribution de médicaments et produits parapharmaceutiques pour les pharmacies et les établissements agrées sur le territoire. Ainsi, chaque pays africain dispose d'une société appelée LABOREX qui est une filiale d'EURAPHARMA, pôle santé du groupe CFAO et EURAPHARMA est associée de RESSOURCETHICA à 35%. ".
49. Ils indiquent, s'agissant de l'activité de la société PROPHARMED INTERNATIONAL que la société perçoit des commissions par des laboratoires français pour son activité développée sur le territoire africain par le biais de son directeur général ivoirien et de ses 477 salariés de nationalité africaine répartis sur l'ensemble de l'Afrique de l'Ouest.
50. Ils considèrent qu'il n'est ni rapporté ni allégué la mise en place par la société RESSOURCETHICA d'un schéma frauduleux tendant à localiser ses bénéfices à l'étranger, et la structuration juridique reprise dans l'ordonnance de 2021 provient d'une situation de fait datant de puis de 12 ans.
51. Ils arguent que la présence d'une société travaillant à l'international au sein d'un groupe est " classique et parfaitement licite ".
52. Ils estiment que l'ordonnance querellée ne réalise aucune description, même succincte, de l'activité de PROPHARMED INTERNATIONAL et ne donne aucune indication sur la réalité économique, matérielle et légale du secteur concerné (les visiteurs médicaux) et de la nature de l'activité visée par les présomptions de fraude.
53. Ils indiquent qu'aucun élément présenté par l'administration ne démontre que la société PROPHARMED INTERNATIONAL réalise la totalité de son chiffre d'affaires en France et conteste que celui-ci puisse être déterminé à partir d'une extraction partielle des seules déclarations de commission réalisées par les laboratoires pharmaceutiques français.
54. Ils soutiennent que le fait que la société PROPHARMED INTERNATIONAL ait facturé en 2018 et 2019 une somme globale de 10.000.000 euros à la société EP DIS (implantée en France) ne suffit pas à établir la présomption alléguée.
55. Ils font valoir que certains contrats ont été signés avant que la société RESSOURCETHICA ne soit propriétaire de PROPHARMED INTERNATIONAL.
56. Ils contestent que la société PROPHARMED INTERNATIONAL ait été domiciliée en Suisse en raison de la fiscalité du pays.
57. Ils expliquent en ce sens que des contrats, conclus intuitu personae entre PROPHARMED INTERNATIONAL et ses clients français, sont antérieurs à 2009, date d'acquisition par RESSOURCETHICA de PROPHARMED INTERNATIONAL, que les conditions de révision de ces contrats au profit de la société RESSOURCETHICA seraient coûteuses et que la volonté de ne pas modifier le lieu d'implantation et la société prestataire de services, à savoir PROPHARMED INTERNATIONAL, résulte de l'économie et de la rémunération attachée à ces contrats historiques conclus par la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL.
58. Ils concluent que les moyens attribués à PROPHARMED INTERNATIONAL (équipe de 4/5 personnes, plus deux dirigeants, l'un suisse et l'autre ivoirien), apparaissent suffisants pour effectuer cette activité développée au moyen de 622 salariés officiant en Afrique.
59. En troisième lieu, les appelants soulèvent l'absence d'action ou d'omission entrant dans le champ de l'article L. 16B du LPF. Ils font valoir que :
- la société PROPHARMED INTERNATIONAL est seulement soumise au droit suisse et dépose régulièrement ses écritures comptables en suisse ;
- l'administration française peut avoir accès aux informations comptables de la société PROPHARMED INTERNATIONAL par l'effet des conventions bilatérales d'assistance administrative ;
- l'absence de dépôt de déclarations fiscales en France ne saurait à elle seule constituer une présomption d'absence de comptabilité justifiant la mise en 'uvre de la procédure de l'article L. 16B.
60. Ils considèrent que le juge des libertés et de la détention a commis une erreur de droit en retenant l'existence d'un établissement stable en France de la société PROPHARMED INTERNATIONAL alors qu'il est uniquement relevé que l'un des deux dirigeants a des avoirs en France et une insuffisance de moyens matériels et humains en Suisse. Ils soutiennent qu'à défaut " d'avoir repris les faits lui permettant de conclure à une absence totale de moyens humains et matériels en Suisse et à la présence d'un dirigeant unique résident fiscal français, elle ne pouvait conclure à la présomption d'un établissement stable en France par un centre décisionnel situé en France ".
61. Les appelants font valoir que la société PROPHARMED n'avait pas à déposer de comptabilité en France car elle n'y possède aucun établissement stable. Ils soutiennent que:
- la qualification d'un établissement stable ne repose pas sur la nationalité des clients de la société et dès lors, le fait que PROPHARMED INTERNATIONAL ait à déposer des déclarations en France ne peut résulter de la nationalité de ses clients ;
- le juge des libertés et de la détention a voulu faire application d'une jurisprudence du Conseil d'État pour qualifier un établissement stable d'une société de nationalité étrangère (CE, Ass. Plén. 11 déc. 2020, n°420174), qui ne permet pas de qualifier un établissement stable en France à l'égard de la société PROPHARMED INTERNATIONAL " qui s'entremet de manière transparente entre des laboratoires français (et étrangers) et des clients situés sur le continent africain " ;
- la société PROPHARMED INTERNATIONAL n'a pas d'établissement stable en France du fait qu'elle est le commissionnaire transparent de sociétés françaises ;
- le territoire d'intervention de la société PROPHARMED INTERNATIONAL est l'Afrique, PROPHARMED INTERNATIONAL conclut des contrats avec des clients français et étrangers qui précisent les territoires d'intervention, qui sont extérieurs à la France (pièce n°116) ;
- aucune prestation d'intermédiation n'est réalisée en France par la société PROPHARMED INTERNATIONAL pour le compte de ses clients français ou étrangers ;
- le fait d'avoir des clients français est insuffisant pour établir une présomption de prestation d'intermédiation sur le territoire français, démentie d'ailleurs par les termes du contrat obtenu dans le cadre du droit de communication par l'administration et ceux transmis par les présente ;
- la cour d'appel de Paris a jugé qu'une société de droit étranger qui a des clients français mais qui intervient sur des territoires étrangers contredit l'affirmation du juge des libertés et de la détention de présomption de prestation de consultant sur le territoire français (cour d'appel Paris, pole 5, chambre 15, 2 février 2022, n°21/10621) alors qu'en l'espèce, le juge des libertés et de la détention a relevé un contrat entre la société PROPHARMED INTERNATIONAL et la société DAIKO, annexé à la requête, qui indiquait un territoire d'intervention au Bénin, Burkina Faso, Cameroun, Centrafrique, Congo RDC, Côte d'Ivoire, Gabon, Mali, Niger, Sénégal, Tchad, Togo en Guinée, et Mauritanie et non en France ;
- la cour d'appel de Rennes a considéré que le fait que des sociétés filiales d'une même société mère aient des activités similaires n'est pas déterminant, les requérants expliquant que l'une exerce son activité en France et l'autre à l'international (CA Rennes, 8 déc. 2020, n°19/05184) ;
- en l'espèce, la société PROPHARMED INTERNATIONAL a des clients français mais ne réalise aucune prestation en France pour ces clients, " l'administration ne démontre pas en quoi les prestations réalisées en France pour des clients français seraient majoritaires ", si les sociétés PROPHARMED INTERNATIONAL et RESSOURCETHICA ont des activités similaires, la première intervient sur le marché africain, la seconde sur le marché français " alors même qu'elles auraient les mêmes clients français et étrangers " ;
- " l'administration agite le chiffre de 43.000.000 euros de chiffre d'affaires réalisé sur 10 ans avec des clients français, sauf à rappeler notamment que la société suisse a déclaré des résultats largement déficitaires en 2015 et 2016 avec des pertes respectives de 415.407 francs suisse en 2015 et de 1.939.304 francs suisses en 2016 ".
62. Ils arguent que, sans moyens matériels et humains en France, la société PROPHARMED INTERNATIONAL ne peut pas avoir d'établissement stable en France et qu'en 2022, la société RESSOURCETHICA a licencié ses salariés et ses bureaux de [Localité 37] ont été fermés.
63. La DNEF, dans ses écritures du 24 octobre 2024 et à l'audience a répliqué en concluant à la confirmation de l'ordonnance et au rejet de toutes les demandes.
64. S'agissant de la décision de la Cour de cassation du 11 octobre 2023, l'administration fiscale considère que, si elle doit respecter les règles du RGPD lorsqu'elle produit, pour justifier sa demande, des données issues de bases de données ou de sites d'accès public, elle n'a cependant pas l'obligation de fournir à la personne concernée les informations prévues à l'article 14 de ce règlement si sont réunies les conditions de l'exception prévue au paragraphe 5 de ce texte ou des limitations prévues à l'article 23 telles que mises en 'uvre par l'article 48 de la loi du 6 janvier 1978.
65. S'agissant de la violation alléguée des règles relatives à la protection des données personnelles, l'administration fiscale considère qu'il convient de distinguer deux types de traitements de données (direct et indirect) mis en 'uvre par l'administration fiscale lorsqu'elle a préparé la requête aux fins d'autorisation de procéder à une visite domiciliaire.
66. D'une part, sur les données collectées directement auprès des contribuables, soumises à l'article 13 du RGPD, la DNEF estime que l'obligation d'information est satisfaite par le renvoi au site internet gouvernemental de l'administration fiscale et qu'en conséquence, les informations extraites sont licites et ne peuvent entraîner l'annulation de l'ordonnance comme l'a jugé la Cour d'appel de Paris (CA Paris, 3 mars 2021, n°19/09947). En outre, selon elle, les appelants ne peuvent remettre en cause le format adopté pour informer les personnes concernées de leurs droits, information qui peut intervenir par voie électronique aux termes de l'article 12 du RGPD.
67. D'autre part, s'agissant des données collectées indirectement auprès des contribuables, la DNEF soutient que le paragraphe 5 de l'article 14 du RGPD prévoit deux séries d'exceptions, notamment lorsque l'obligation d'information nécessiterait, pour son débiteur, de déployer des efforts disproportionnés (article 14, paragraphe 5, b).
68. Elle estime qu'elle n'a en outre pas l'obligation de fournir à la personne concernée les informations prévues à l'article 14 de ce règlement si sont réunies les conditions des limitations prévues à l'article 23. Selon l'administration, cette obligation ne s'applique pas car :
- aux termes de l'article 23 du RGPD, transposé en droit interne aux alinéa 4 et 5 de l'article 48 de la loi du 6 janvier 1978, dans la mesure où elle est susceptible de rendre impossible ou de compromettre gravement la réalisation des objectifs du traitement ;
- aux termes de l'article 23 du RGPD, l'Etat membre peut limiter la portée de cette obligation lorsqu'une telle limitation respecte l'essence des libertés et droits fondamentaux et qu'elle constitue une mesure nécessaire et proportionnée dans une société démocratique pour garantir la prévention et la détection des infractions pénales, les enquêtes et les poursuites en la matière et d'autres objectifs importants d'intérêt public général d'un état membre, notamment un intérêt économique ou financier important, y compris dans les domaines monétaire, budgétaire et fiscal.
69. Elle considère qu'en l'espèce, la préparation de la requête a conduit à appréhender les données de sociétés en relation d'affaires avec PROPHARMED INTERNATIONAL, notamment les salariés de RESSOURCETHICA sans que ces derniers n'aient à recevoir d'informations sur la collecte de données en cours sauf à compromettre la mise en 'uvre de la visite domiciliaire.
70. S'agissant de la violation alléguée du principe de proportionnalité, l'administration fiscale soutient qu'aucun texte n'impose le recours à d'autres modes de preuves ou procédures, l'existence de présomption de fraude suffisant à mettre en 'uvre la procédure de l'article L. 16B du LPF.
71. S'agissant du " traitement de masse " des données personnelles, l'administration fiscale soutient être fondée à rassembler des données lorsqu'elle prépare une requête aux fins d'autoriser une visite domiciliaire, qu'elle est également fondée à recueillir des informations tirées de la consultation de sites d'accès publics, et qu'elle n'a procédé à aucune collecte d'informations qui soit automatique, massive, préalable et en dehors de toute suspicion de fraude mais a procédé à des consultations ciblées sur des sites publics.
72. Sur la résidence fiscale de Monsieur [C], l'administration fiscale soutient que:
- les éléments retenus par le juge des libertés et de la détention ne visent pas à établir la résidence fiscale de Monsieur [C] mais permettent de présumer de la présence régulière de ce dernier sur le territoire national et en conséquence, du centre décisionnel de la société PROPHARMED INTERNATIONAL en France ;
- l'avis de redressement du 4 mai 2023 (pièce n°23) ne contredit pas l'argumentation de l'administration entendant attester de la résidence régulière de Monsieur [C] en France. L'administration ajoute que l'existence des présomptions s'apprécie à l'aune des éléments soumis au juge de l'autorisation et non d'éléments postérieurs ;
73. Sur la localisation, en France, du centre décisionnel de PROPHARMED INTERNATIONAL, l'administration fiscale fait valoir que :
- la société PROPHARMED INTERNATIONAL est dirigée par la société française RESSOURCETHICA SCA, son actionnaire à 99,99% et de manière effective par Monsieur [C] ;
- le contrat de travail produit en pièce n°115 devant la cour d'appel avant le renvoi après cassation (pièce depuis retirée de la liste des pièces des appelants et produite par l'administration en pièce n°5) concerne Madame [ZU] [Z] qui travaille en France pour RESSOURCETHICA et PROPHARMED France. Les appelants ne démentent pas que Madame [Z] était salariée de ces dernières mais qu'elle travaillait pour PROPHARMED INTERNATIONAL. Selon l'administration, le recours à des sociétés tierces pour réaliser des prestations de services confirme que la société PROPHARMED INTERNATIONAL n'a pas de consistance en Suisse ;
- l'absence de salariés au sein de la société RESSOURCETHICA depuis 2022 ne remet pas en cause les présomptions pour les années antérieures ;
74. Sur la caractérisation des conditions posées par l'article L. 16B du LPF, l'administration fiscale soutient que :
- l'ordonnance du juge des libertés et de la détention fait référence à des " moyens humains et matériels limités en Suisse " ;
- la chambre commerciale de la Cour de cassation rappelle que l'article L. 16B du LPF exige de simples présomptions (Cass. Com. 9 mars 2010, n°09-13.829) ;
- les appelants ne contestent pas les éléments retenus par le juge des libertés et de la détention permettant de présumer que la présence de Monsieur [U] [M] au poste d'administrateur de la société PROPHARMED INTERNATIONAL visait seulement à satisfaire l'exigence formelle de présence d'un administrateur de nationalité suisse ;
- les appelants ne contestent pas les éléments retenus par le juge des libertés et de la détention permettant de présumer que le pouvoir décisionnel de la société était concentré entre les mains de Monsieur [C] ;
- sur la période postérieure à juin 2016, la société ne justifie pas d'une occupation effective des locaux sis en Suisse et il ressort des éléments retenus par le juge de l'autorisation que la société PROPHARMED INTERNATIONAL utilise notamment le personnel de la société française RESSOURCETHICA afin de réaliser son objet social auprès des laboratoires français ;
75. Sur la prétendue absence d'acte ou d'omission entrant dans le champ de l'article L. 16B du LPF, l'administration fiscale soutient que :
- l'administration fiscale n'est pas tenue de solliciter les autorités fiscales suisses dans le cadre de l'assistante administrative internationale ;
- il résulte de la jurisprudence de la Cour de cassation que pouvaient être relevées des présomptions relevant des articles 1741 (fraude fiscale) ou 1743 (délit comptable) du CGI pour la mise en 'uvre de l'article L. 16B du LPF (Cass. Com. 10 fév. 1998, n°95-30.221; Cass. Com. 20 nov. 2019, n°18-15.423) ;
- l'ordonnance citée par l'appelante a été annulée par la Chambre commerciale de la Cour de cassation le 15 février 2023 (Cass. Com. 15 fév. 2023, n°20-20.600) ;
- il n'est pas reproché à PROPHARMED INTERNATIONAL de ne pas tenir de comptabilité en France mais que les opérations développées par cette dernière en France n'ont pas donné à une passation d'écritures comptables régulières par cette succursale, la qualification juridique sur le fond n'intervient que postérieurement dans le cadre d'une éventuelle procédure devant le juge de l'impôt.
76. Par courriel adressé par message RPVA le 3 juillet 2025, le conseil des appelants a adressé à la juridiction une note en cours de délibéré 'compte tenu des récentes jurisprudences des juges du fond sur ce même type de dossier' pour réitérer sa demande d'annulation de l'ordonnance.
77. Par courriel adressé par message RPVA le 4 juillet 2025, le conseil de la DNEF a demandé à la juridiction d'écarter cette note en application de l'article 445 du code de procédure civile au motif qu'aucune note en délibéré n'a été sollicité par la juridiction. Sur le fond, elle a fait également état d'une jurisprudence récente et réitérer sa demande de confirmation de l'ordonnance.
Sur ce, le magistrat délégué :
Sur les notes adressées par les parties en cours de délibéré
78. En application de l'article 444 du code de procédure civile, "le président peut ordonner la réouverture des débats. Il doit le faire chaque fois que les parties n'ont pas été à même de s'expliquer contradictoirement sur les éclaircissements de droit ou de fait qui leur avaient été demandés.
En cas de changement survenu dans la composition de la juridiction, il y a lieu de reprendre les débats".
79. En application de l'article 445 du code de procédure civile, "après la clôture des débats, les parties ne peuvent déposer aucune note à l'appui de leurs observations, si ce n'est en vue de répondre aux arguments développés par le ministère public, ou à la demande du président dans les cas prévus aux articles 442 et 444".
80. En l'espèce, aucune note en délibéré de la part des parties à la procédure n'a été sollicitée par la présente juridiction après la clôture des débats et le ministère public n'est pas intervenu à la procédure.
81. En conséquence, les deux notes adressées en délibéré, après la clôture des débats, sans aucune demande du président, seront déclarées irrecevables.
Sur l'illicéité des pièces visées par les appelants
82. Les appelants concluent à l'illicéité des pièces annexées à la requête soumise au juge des libertés et de la détention pour obtenir l'autorisation d'effectuer une visite domiciliaire aux motifs tirés de la violation du Règlement (UE) 2016/679 relatif à la protection des données personnelles des personnes physiques, de la disproportion dans le contrôle du juge, du traitement de masse des données personnelles et de leur communication à des tiers.
Sur la violation du Règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil, du 27 avril 2016, relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données (Règlement général sur la protection des données"RGPD")
83. Les appelants font grief à la DNEF, en annexant 64 pièces à sa requête, dont 19 pièces relatives à des personnes physiques et provenant soit de traitements généraux crées par l'administration fiscale soit de traitements sui generis de données issues de recherches sur des bases de données ou des sources d'accès public, pour les besoins spécifiques de son enquête à l'égard de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA, d'avoir violé le Règlement général sur la protection des données, dans la mesure où elle n'aurait pas rempli son obligation d'information dans le cadre de la collecte directe et de la collecte indirecte de données personnelles de personnes physiques.
Ils concluent au caractère illicite de ces 19 pièces dont ils dressent la liste sur les 64 pièces annexées à la requête et en conséquence à l'annulation de l'ordonnance fondée sur des pièces illicites.
84. Ils soutiennent qu'en l'espèce, ces 19 pièces, concernant des personnes physiques, ont été reprises dans le cadre de l'ordonnance querellée sans faire l'objet d'aucun contrôle par le juge des libertés et de la détention au motif qu'aucune d'entre elles ne porte la mention PROPHARMED INTERNATIONAL et dont certaines sont sans intérêt pour la procédure de visite domiciliaire de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA.
85. Ils font ainsi valoir que la collecte, la communication et l'usage de ces 19 pièces par la DNEF constitutives de traitement relevant de l'application du RGPD ainsi que l'usage qui en a été fait par le juge des libertés et de la détention ne respectent pas la vie privée et ne sont ni équilibrés ni proportionnés.
86. La DNEF réplique, s'agissant des données qu'elle collecte directement et traite dans des fichiers comme le fichier ADONIS, fichier d'accès au dossier fiscal des particuliers, créé par l'arrêté du 5 avril 2002 dont l'information est accessible au public, que cet arrêté prévoit la durée de conservation des données et que les autres informations ont fait l'objet d'une information complémentaire sur le site gouvernemental impots.gouv.fr, qui est accessible librement par toute personne équipée d'une connexion internet.
87. Elle soulignent que figurent en bas de la page d'accueil du site internet gouvernemental d'une part une page relative à la "Confidentialité / Informations personnelles" où il y est précisé notamment les mentions obligatoires (pièce n°2) et d'autre part, et surtout, sur la page précitée, est disponible un document PDF de 45 pages, intitulé "CONFIDENTIALITÉ ET PROTECTION DES DONNÉES", qui rappelle l'ensemble des mentions informatives requises de manière détaillée (pièce n° 3) et notamment, la durée de conservation des données, aux finalités des traitements, ... ainsi la déclinaison des informations relatives à chaque catégorie de traitements et des mentions sur les différents fichiers utilisés par l'Administration fiscale (FICOBA, ADONIS, ').
88. Elle soutient que l'administration fiscale a fait le choix d'un document d'une quarantaine de pages en ligne, accessible à tous sur un site gouvernemental, comportant les informations obligatoires à porter à la connaissance des contribuables en matière de protection des données, recense l'ensemble des nombreux traitements réalisés par la Direction Générale des Finances publiques, que c'est d'ailleurs sur ce site que les personnes physiques et les personnes morales effectuent leurs formalités fiscales, notamment la déclaration de revenus annuelle, opération durant laquelle le contribuable peut consulter une notice de deux pages intitulée « Document de présentation du traitement des données dans le cadre de la déclaration de revenu » (pièce n° 4), cette notice étant accessible au début de la déclaration fiscale en ligne.
89. En conséquence, elle conclut que l'administration fiscale a respecté son obligation d'information auprès des personnes concernées dans le cadre de la collecte directe de données et que les informations extraites des fichiers sont donc parfaitement licites et ne peuvent entraîner l'annulation de l'ordonnance.
90. S'agissant des données qu'elle collecte indirectement, comme les extraits de profils LinkedIn relatifs aux salariés de la société RESSOURCETHICA, elle conclut à l'application de l'article 14 paragraphe 5 du RGPD au motif qu 'il est évident que lorsque l'Administration fiscale prépare une requête aux fins de solliciter une autorisation pour mener une visite domiciliaire (et collecte ainsi, à cette fin, des données personnelles), il n'est pas question d'avertir les personnes citées dans la requête de la préparation d'une telle opération, au risque d'en compromettre gravement la réalisation'.
Elle ajoute que 'La préparation de la requête a immanquablement conduit à appréhender les données de sociétés en relation d'affaires avec PROPHARMED INTERNATIONAL, à savoir les salariés de RESSOURCETHICA, sans que ces derniers n'aient à recevoir d'information sur la collecte de données en cours, sauf à compromettre la mise en oeuvre de la visite domiciliaire. '
91. En conséquence, elle fait valoir qu'il est inexact d'indiquer que l'administration fiscale a manqué à l'obligation d'informer les personnes concernées dans le cadre de la collecte indirecte de données et que les informations extraites des fichiers sont donc parfaitement licites et ne peuvent entraîner l'annulation de l'ordonnance.
92. Selon l'article 2 du Règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil, du 27 avril 2016, relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, et abrogeant la directive 95/46/CE (règlement général sur la protection des données, "RGPD"), 'le présent règlement ne s'applique pas au traitement de données à caractère personnel effectué :
a) dans le cadre d'une activité qui ne relève pas du champ d'application du droit de l'Union ;
b) par les États membres dans le cadre d'activités qui relèvent du champ d'application du chapitre 2 du titre V du traité sur l'Union européenne ;
c) par une personne physique dans le cadre d'une activité strictement personnelle ou domestique ;
d) par les autorités compétentes à des fins de prévention et de détection des infractions pénales, d'enquêtes et de poursuites en la matière ou d'exécution de sanctions pénales, y compris la protection contre des menaces pour la sécurité publique et la prévention de telles menaces.'
93. L'article L. 16B du livre des procédures fiscales a pour objectif de rechercher la preuve des agissements selon lesquels un contribuable se soustrait à l'établissement ou au paiement des impôts sur le revenu ou sur les bénéfices ou des taxes sur le chiffre d'affaires en se livrant à des achats ou à des ventes sans facture, en utilisant ou en délivrant des factures ou des documents ne se rapportant pas à des opérations réelles ou en omettant sciemment de passer ou de faire passer des écritures ou en passant ou en faisant passer sciemment des écritures inexactes ou fictives dans des documents comptables dont la tenue est imposée par le code général des impôts.
94. La réalisation de l'objectif ainsi poursuivi est atteinte par une décision prise par l'autorité judiciaire, à la demande de l'administration fiscale, qui autorise les agents de l'administration des impôts à effectuer des visites en tous lieux, même privés, où les pièces et documents s'y rapportant sont susceptibles d'être détenus ou d'être accessibles ou disponibles et procéder à leur saisie, quel qu'en soit le support.
95. Ces visites sont autorisées par une ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire dans le ressort duquel sont situés les lieux à visiter, rendue non contradictoirement. L'ordonnance est exécutoire au seul vu de la minute et est notifiée verbalement et sur place au moment de la visite, à l'occupant des lieux ou à son représentant qui en reçoit copie intégrale contre récépissé ou émargement au procès-verbal prévu au IV du même article. L'ordonnance peut faire l'objet d'un appel devant le Premier président de la cour d'appel dans le ressort de laquelle le juge a autorisé la mesure.
96. Le traitement de données à caractère personnel mis en oeuvre par l'administration fiscale aux fins d'obtenir l'autorisation de procéder à des opérations de visite et saisie sur le fondement de l'article L.. 16B du livre des procédures fiscales, qui a pour finalité d'obtenir le droit de procéder à une mesure d'enquête pouvant donner lieu à la constatation d'une infraction ou d'un manquement à la législation fiscale, dans le but de percevoir l'impôt et de lutter contre la fraude fiscale, entre dans le champ d'application matériel du RGPD.
97. Selon l'article 13 dudit règlement, 'lorsque des données à caractère personnel sont collectées directement auprès de la personne concernée, les informations à lui fournir sont les suivantes : identité du responsable de traitement, coordonnées du délégué à la protection des données, finalités et base juridique du traitement, intérêts légitimes poursuivis par le responsable lorsque le traitement est fondé sur cette base légale, destinataire des données et éventuelle possibilité de transferts, durée de conservation, possibilité d'en demander l'accès, la rectification ou l'effacement, droit d'introduire une réclamation auprès d'une autorité de contrôle, conséquences éventuelles de la non-fourniture de ces données, existence éventuelle d'une prise de décision automatisée, informations relatives à une autre finalité éventuelle.'
98. Selon le paragraphe 5 de l'article 14 dudit règlement, relatif aux informations à fournir lorsque les données à caractère personnel n'ont pas été collectées auprès de la personne concernée, "les paragraphes 1 à 4 du même article ne s'appliquent pas lorsque et dans la mesure où : b) la fourniture de telles informations se révèle impossible ou exigerait des efforts disproportionnés, (...) ou dans la mesure où l'obligation visée au paragraphe 1 du présent article est susceptible de rendre impossible ou de compromettre gravement la réalisation des objectifs dudit traitement."
99. Dès lors, le juge des libertés et de la détention, saisi d'une requête sur le fondement de l'article L.16B du LPF, doit notamment vérifier si, dans le litige qui lui est soumis, le responsable du traitement est tenu de fournir à la personne concernée les informations prévues à son article 14 ou si sont réunies les conditions des exceptions ou limitations à cette obligation d'information qu'il prévoit.
100. En l'espèce, s'agissant des 19 pièces pour lesquelles les appelants soulèvent l'illicéité pour défaut de traitement conforme au RGPD par l'administration fiscale, il convient de relever qu'elles sont composées des informations provenant à la fois de bases de données traitées par l'administration fiscale telles ADONIS ou FICOBA (attestations sur compte fiscal, n°30, 46, 51, 53, 55, 60 et fichiers Ficoba pièce n°38 et Canopée pièce n°50-1) et de sites d'accès public tels les éléments relatifs aux activités de Monsieur [M], avocat, de nationalité suisse et résident suisse, administrateur de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA ( pièces 6 et 7), les profils LinkedIn de salariés de la société RESSOURCETHICA ( pièces n° 22, 41, 44, 54, 59, 61-1, 61,) une attestation de constat visuel (pièce n°50) et une information légale (pièce n°52).
101. S'agissant des pièces composées des informations provenant de bases de données traitées par l'administration fiscale telles ADONIS ou FICOBA (attestations sur compte fiscal, n°30, 46, 51, 53, 55, 60 et fichiers Ficoba pièce 38 et Canopée pièce 50-1), il convient de constater que la DNEF justifie du respect des dispositions de l'article 13 du RGPD avec la production, notamment, de la notice relative à la confidentialité et la protection des données, mise à disposition des contribuables lors de leur déclaration de revenus en ligne et du document de présentation du traitement des données sur le site internet de la DGFIP et ainsi lors de la collecte directe de leurs données. (pièces n°3 et 4 de la DNEF).
102. Dès lors, les pièces composées d'attestations sur compte fiscal, n°30, 46, 51, 53, 55, 60 et les fichiers Ficoba, pièce n°38 et Canopée pièce n°50-1, provenant de traitement de données collectées directement par l'administration avec l'information prévue par l'article 13 du RGPD pour les contribuables, sont donc licites.
103. S'agissant des pièces composées des informations provenant de sites d'accès public tels les éléments relatifs aux activités de Monsieur [M], avocat, de nationalité suisse et résident suisse, administrateur de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA (pièces 6 et 7), les profils LinkedIn de salariés de la société RESSOURCETHICA (pièces 22, 41, 44, 54, 59, 61-1, 61,) il convient de constater qu'elles relèvent des dispositions de l'article 14 du RGPD en ce qu'elles n'ont pas été collectées directement par l'administration fiscale.
104. La DNEF qui ne conteste pas avoir collecté ces informations indirectement, reconnaît l'application de l'article 14 du RGPD mais invoque le paragraphe 5 dudit article qui dispose 'les paragraphes 1 à 4 du même article ne s'appliquent pas lorsque et dans la mesure où : b) la fourniture de telles informations se révèle impossible ou exigerait des efforts disproportionnés, (...) ou dans la mesure où l'obligation visée au paragraphe 1 du présent article est susceptible de rendre impossible ou de compromettre gravement la réalisation des objectifs dudit traitement'.
105. Si l'article 14 du RGPD soumet le responsable du traitement à l'obligation de fournir un certain nombre d'informations à la personne concernée lorsque les données à caractère personnel n'ont pas été collectées auprès d'elle, il résulte du paragraphe 5 de ce texte que cette obligation ne s'applique pas dans la mesure où elle est susceptible de rendre impossible ou de compromettre gravement la réalisation des objectifs dudit traitement.
106. Tel est bien le cas en l'espèce. La DNEF, qui a sollicité une autorisation d'une visite domiciliaire, auprès du juge des libertés et de la détention, pour rechercher si la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA recourait au personnel de la société RESSOURCETHICA, justifie de la nécessité de ne pas informer lesdits salariés afin de ne pas compromettre la mise en oeuvre de la visite domiciliaire, lesdits salariés étant susceptibles d'en informer leur employeur, la société RESSOURCETHICA détenant 99,99 % de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA.
107. Leur employeur, la société en commandite par action, RESSOURCETHICA, dont la gérance est assurée par la société AFRIGESTION dont le gérant unique est Monsieur [C], détient 99,99 % du capital de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA dont la direction générale est également assurée par Monsieur [C].
108. Ces liens étroits entre les deux sociétés ne garantissent pas que les salariés auraient gardé le secret et n'auraient pas informé leur employeur, la société RESSOURCETHICA, si l'administration fiscale les avait informés du traitement de leur profil sur LinkedIn. Bien au contraire, ces liens rendent hautement probables le fait que la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA aurait été informée par les salariés concernés.
109. En effet, d'anciennes salariées de la société PROPHARMED FRANCE absorbée par la société RESSOURCETHICA, et visées par les pièces n°54, 59, 61, 61-1, ayant des fonctions de responsable commercial et marketing, de responsable administratif et financier et de responsable qualité et conformité au sein de la société RESSOURCETHICA, si elles avaient fait l'objet d'une information par l'administration fiscale du traitement de leur profil LinkedIn, dans le cadre d'une enquête fondée sur l'article L.16B, étaient susceptibles d'en informer leur employeur, la société RESSOURCETHICA.
110. Il en est de même, de Monsieur [M], visé par les pièces n° 6 et 7, en raison de sa fonction d'administrateur unique de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA, qui, s'il avait fait l'objet d'une information par l'administration fiscale du traitement de sites internet comportant mention de ses mandats d'administrateurs, dans le cadre d'une enquête fondée sur l'article L.16B, était susceptible d'en informer Monsieur [C], directeur général de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA.
111.Il en est de même de Madame [R] [C], visée par la pièce n°44, exerçant des fonctions au sein de la société la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA qui, si elle avait fait l'objet d'une information par l'administration fiscale du traitement de son profil LinkedIn dans le cadre d'une enquête fondée sur l'article L.16B, était susceptible d'en informer, Monsieur [C], en raison de leurs liens familiaux.
112. Tel est également le cas de Monsieur [Y], visé par la pièce n°52, compagnon de Mme [R] [C], qui, s'il avait fait l'objet d'une information par l'administration fiscale du traitement des informations tirées du site 'infolegale.fr', dans le cadre d'une enquête fondée sur l'article L.16B, était susceptible d'en informer Mme [R] [C].
113. Enfin, s'agissant de la pièce n°50, outre qu'il ne saurait être fait grief à l'administration d'avoir produit, au soutien de sa demande, des attestations établies par ses agents, dès lors qu'elle peut se fonder, pour rechercher la preuve d'une fraude fiscale, sur des éléments régulièrement constatés par elle, le traitement, à supposer établi, des informations recueillies par constat visuel d'un de ces agents au domicile personnel de Monsieur [Y] et produites à l'appui d'une requête sur le fondement de l'article L. 16B du LPF, relève de l'exception prévue par l'article 14 paragraphe 5 dans la mesure où leur communication préalable aux opérations de visite à Monsieur [Y], compagnon de Mme [R] [C], est susceptible de rendre impossible ou de compromettre gravement la réalisation des objectifs dudit traitement.
114. Ainsi, l'exception B prévue à l'article 14, paragraphe 5, du RGPD s'applique en l'espèce, dès lors que la communication de l'information prévue au paragraphe 1 du même article aux personnes visées par ces 19 pièces, avant le déroulement des opérations de visite et saisies induirait un risque de dépérissement, voire de disparition des preuves et, par suite remettrait en cause l'efficacité desdites opérations, pour ne pas dire leur intérêt, qui repose sur l'absence d'information préalable des personnes physiques visées par lesdites visites domiciliaires et, partant, cette communication compromettrait gravement la réalisation de l'objectif poursuivi par l'article L. 16B du livre des procédures fiscales rappelé ci-dessus de lutter efficacement contre la fraude fiscale.
115. Ainsi, il convient de constater que la DNEF n'avait pas l'obligation de fournir aux personnes visées par les pièces n° 6, 7, 22, 41, 44, 54, 59, 61-1, 61, les informations prévues à l'article 14 de ce règlement, les conditions de l'exception prévue au paragraphe 5 de ce texte étant réunies.
116. En conséquence, l'administration a pu produire, auprès du juge des libertés et de la détention les pièces n° 6, 7, 22, 30, 38, 41, 44, 46, 50, 50-1, 51, 52, 53, 54, 55, 59, 60, 61-1, 61 à l'appui de sa requête ainsi que l'ensemble des autres pièces, soit au total 64 pièces et aucune origine illicite desdites pièces produites tirée d'une violation du RGPD ne peut être soulevée en l'espèce.
117. Cette branche du moyen sera en conséquence rejetée.
Sur la proportionnalité du contrôle du juge
118. En l'espèce, les appelants concluent à l'absence de contrôle de proportionnalité quant à l'autorisation de la visite domiciliaire en ce que le juge des libertés et de la détention a violé le principe de proportionnalité en retenant des pièces illicites de nature à porter atteinte à la vie privée de salariés de la société RESSOURCETHICA, de Madame [R] [C], de Monsieur [Y], outre l'inviolabilité de leur domicile, et de Madame [HW] [S] épouse [C].
119. Ils concluent, s'agissant des salariés de la société RESSOURCETHICA que des informations personnelles ont été révélées de même que des données personnelles issues des traitements ADONIS, FICOBA et SIR communiquées à leur employeur et d'autres entités privées.
120. Ils concluent que, s'agissant de Madame [R] [C] et de Monsieur [Y], l'attestation établie et signée le 12 janvier 2021 par Monsieur [N] [V], Inspecteur des Finances Publiques, à partir d'opérations visuelles opérées le 11 janvier 2021 dans le hall d'entrée sis [Adresse 18] concernant Madame [C] [R], pièce n°50, et les informations recueillies sur l'activité de Monsieur [Y], qui révèlent des informations personnelles, sont sans intérêt pour la procédure de visite domiciliaire de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA.
121. Ils concluent, s'agissant de Mme [S] épouse [C], que ses données personnelles et fiscales, ainsi révélées, portent atteinte à sa vie privée et sont sans intérêt pour la procédure de visite domiciliaire de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA.
122. Ils font valoir en page 11 de leurs écritures 'l'Article 4 de l'Arrêté du 5 avril 2002 prévoit que les données relatives au 'dossier fiscal des particuliers' (ADONIS) soient archivées 'au début de la 4eme année suivant l'année d'imposition', et l'Article 3 de l'Arrêté du 14 juin 1982 relatif au système FICOBA, dans sa version en vigueur lors de la fermeture des comptes, prévoyait une durée de conservation de trois ans après la clôture du compte des personnes physiques'.
123. Ils concluent qu''en l'espèce, les données relatées au titre de Madame [S] remontent a plus de 4 ans et celles de FICOBA sont encore plus anciennes...... Il est argué que la volumétrie et la diversité des données personnelles collectées au cas particulier révèlent que la Direction Nationale d'Enquêtes Fiscales a procédé a un traitement de masse, collectant des données personnelles publiquement accessibles, sans en posséder le fondement légal. Le traitement ainsi effectue est donc illicite et il en est par conséquent de même des pièces produites par l'Administration.'
124. S'agissant de ce point de la conservation des données des fichiers ADONIS et FICOBA relatifs à Mme [S] épouse [C], la DNEF rappelle que l'article 3 de l'arrêté du 14 juin 1982 (fichier FICOBA) indique que « Ces données sont conservées dix ans révolus après l'enregistrement de la clôture du compte que le titulaire soit une personne physique ou une personne morale » (dernière modification par l'arrêté du 26 octobre 2020, soit avant l'ordonnance du 1er février 2021) et que l'article 4 de l'arrêté du 5 avril 2002 (fichier ADONIS) indique que « Toutefois, un délai de conservation prolongé, égal à la durée prévue par les textes justifiant cette prolongation, leur est appliqué dans les cas suivants : / - l'avis d'imposition peut faire l'objet d'une reprise après le délai général de prescription ; / (') / - la période d'imposition a donné lieu à une imposition supplémentaire, une imposition primitive pénalisée ou imposée tardivement ».
125. Elle ajoute qu''il est encore précisé à l'article 4 que : « De même, les données visées au I de l'article 3 peuvent être conservées au-delà du délai fixé par le I du présent article à l'initiative du service en charge du dossier concerné, notamment en cas de contentieux sur l'assiette et le recouvrement de l'impôt, de contrôle en cours » (dernière modification par l'arrêté du 27 février 2006) ".
126. Elles souligne que ces fichiers sont « alimentés » au fur et à mesure du temps par les données que les contribuables déclarent à l'administration fiscale et qu'ainsi les durées de conservation des données de Mme [S] épouse [C] ont été respectées.
127. Pour le reste, la DNEF relève que, dans leurs développements relatifs au manquement allégué de l'administration fiscale à l'obligation d'information de l'article 14 du RGPD, les appelants semblent faire valoir que la production des données personnelles de personnes physiques serait disproportionnée dans le cadre d'une suspicion de fraude visant la société PROPHARMED. '
128. Elle rétorque que, 'contrairement à ce qu'indiquent les appelants, ces données concernent des personnes en lien avec la société PROPHARMED (dirigeants, salariés, '), ou des personnes physiques liées à des sociétés en relation d'affaires ou en relation capitalistique avec la société PROPHARMED et que ces données personnelles sont donc pertinentes pour évoquer les suspicions de fraude visant PROPHARMED'.
129. Elle déclare que 'Dès lors qu'existent des présomptions d'agissements de fraude, la procédure de visite domiciliaire était justifiée en ce qu'elle permettait de rechercher la preuve de ces agissements et ainsi d'accéder à des documents de gestion quotidienne de l'entreprise ou relatifs à l'organisation interne, que le contribuable n'a pas l'obligation de remettre dans le cadre d'une procédure de contrôle classique'.
130. Elle en conclut qu'il ne peut être reproché à l'administration d'avoir fait usage de la procédure prévue par l'article L.16 B du Livre des procédures fiscales, au détriment d'une procédure de contrôle inopiné ou de droit de communication.
131. Il convient de rappeler que les dispositions de l'article L.16B du livre des procédures fiscales qui énoncent que les agents de l'administration disposent d'un droit de visite et de saisie visent à conforter les présomptions selon lesquelles un contribuable s'est soustrait frauduleusement à l'établissement ou au paiement de l'impôt. Cette mesure, prévue par cette même disposition, est encadrée par des règles de fond et procédurales et, notamment, ces visites sont autorisées par une ordonnance du juge des libertés et de la détention, qui même si elle est rendue non contradictoirement, peut faire l'objet d'un appel devant le premier président de la cour d'appel, de même que le déroulement des opérations de visite et de saisie, la décision du premier président de la cour d'appel pouvant faire l'objet d'un pourvoi.
132. Il résulte des dispositions de l'article L. 16B du livre des procédures fiscales et de la jurisprudence constante que le juge des libertés et de la détention peut autoriser des visites mêmes dans des lieux privés, où des pièces et documents s'y rapportant sont susceptibles d'être détenus ou d'être accessibles ou disponibles et procéder à leur saisie, quel qu'en soit le support.
133. En outre, il est de jurisprudence établie qu'aucun texte n'impose au juge de vérifier si l'administration pouvait recourir à d'autres procédures moins intrusives (Cass. com., 26 octobre 2010, n° 09-70.509). En outre, l'article L. 16B du livre des procédures fiscales n'exige pas que les agissements présumés revêtent un caractère de gravité particulière (Cass. crim., 10 septembre 2003, n° 02-82.999).
134. Il convient également de rappeler qu'en exerçant son contrôle in concreto sur le dossier présenté par l'administration fiscale, le juge des libertés et de la détention exerce de fait un contrôle de proportionnalité. En cas de refus, il peut inviter l'administration fiscale à avoir recours à d'autres moyens d'enquête moins intrusifs (droit de communication, vérification de comptabilité...). En autorisant les opérations de visite et de saisie, le juge des libertés et de la détention a entendu accorder à l'administration ces modes d'investigations plus intrusifs en fonction du dossier présenté.
135. Ainsi, cconformément à la jurisprudence constante, le juge des libertés et de la détention s'est référé, en les analysant, aux éléments d'information fournis par l'administration fiscale et a souverainement apprécié l'existence des présomptions d'agissements frauduleux, visés à l'article L. 16B du Livre des procédures fiscales, justifiant la mesure autorisée.
136. Si l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales (CESDH) dispose que "Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance", c'est sous réserve qu' "Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui."
137. En l'espèce, les appelants ne caractérisent en rien la disproportion des informations recueillies s'agissant de Madame [S] épouse [C] qui déclare une adresse en France ainsi que son époux Monsieur [C], de Monsieur [Y], compagnon de Mme [R] [C] qui travaille pour la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA dont son père est le directeur général et ainsi ne caractérisent pas une violation des dispositions de l'article 8 précité de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales (CESDH) dont ils auraient été victimes.
138. Pas davantage, ils ne justifient de la disproportion de la mesure à l'égard de salariés de la société RESSOURCETHICA pour lesquels il est présumé qu'ils travaillent pour le compte de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA en France.
139. De même, ils n'établissent pas que l'administration fiscale aurait conservé et utilisé les données fiscales personnelles de Mme [S] au delà des délais prescrits pour la durée des fichiers ADONIS et FICOBA.
140. Il s'infère de ce qui précède qu'il n'y a pas eu violation des dispositions de l'article 8 de la CESDH et ainsi de la vie privée des salariés de la société RESSOURCETHICA, de Mme [S] épouse [C], de Mme [R] [C] et de Monsieur [Y] et que la mesure ordonnée conformément aux dispositions de l'article L. 16B du Livre des procédures fiscales précité n'a pas été disproportionnée eu égard au but poursuivi rappelé ci-dessus.
141. En conséquence, l'administration a pu produire, auprès du juge des libertés et de la détention les pièces n°6, 7, 22, 30, 38, 41, 44, 46, 50, 50-1, 51, 52, 53, 54, 55, 59, 60, 61-1, 61 à l'appui de sa requête ainsi que l'ensemble des autres pièces, soit au total 64 pièces et aucune origine illicite desdites pièces produites tirée d'une atteinte disproportionnée à la vie privée et l'inviolabilité du domicile ne peut être soulevée en l'espèce.
142. Cette branche du moyen sera rejetée.
Sur le traitement de masse des données invoqué par les appelants
143. Les appelants font état, en page 10 de leurs écritures, 'de la volumétrie et la diversité des données personnelles collectées au cas particulier révèlent que la Direction Nationale d'Enquêtes Fiscales a procédé à un traitement de masse, collectant des données personnelles publiquement accessibles, sans en posséder le fondement légal. Le traitement ainsi effectué est donc illicite et il en est par conséquent de même des pièces produites par l'Administration'.
144. En premier lieu, il convient de rappeler que l'administration fiscale est fondée à rassembler des données lorsqu'elle prépare une requête aux fins de solliciter une autorisation de procéder à une visite domiciliaire sur le fondement de l'article L. 16B du Livre des procédures fiscales.
145. En l'espèce, il convient de constater que les pièces produites par la DNEF proviennent de consultations de sites internet d'accès public, comme le site LinkedIn comportant des données renseignées volontairement et directement par des personnes ayant un lien direct ou indirect avec la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA, de confrontations avec des documents détenus légalement par l'administration fiscale tels les fichiers ADONIS ou CANOPEE ou résultant des constatations de ses agents ou encore de l'exercice régulier de son droit de communication.
146. En second lieu, il convient de relever que les appelants qui contestent la liceité des pièces visant des personnes physiques clairement identifiées en raison de leur lien direct ou indirect avec la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA, ne caractérisent pas un traitement de masse de données, la DNEF justifiant d'avoir ciblé ses recherches sur ladite société en consultant manuellement dans le cadre d'une démarche ciblée des sites d'accès publics.
147. En effet, procédant par affirmation, ils ne rapportent pas la preuve de ce que la DNEF aurait procédé en l'espèce à une collecte d'informations automatique, massive, préalable et en dehors de toute suspicion de fraude de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA.
148. En conséquence, cette branche du moyen tiré de l'illiceité d'un traitement de masse des données personnelles mis en oeuvre par la DNEF sera rejetée.
Sur la communication des données à des tiers
149. Les appelant font valoir que 'la communication de données à des tiers non autorisés constitue une violation du principe de confidentialité. En outre, elle est susceptible de relever des délits réprimant les manquements aux obligations de sécurité des données personnelles prévues à l'Article 226-17 du Code Pénal d'une part, et de la divulgation à des tiers portant atteinte à l'intimité de la vie privée de la personne concernée (Article 226-22 du même code) d'autre part. Or, en l'espèce, des données personnelles issues des traitements ADONIS, FICOBA et SIR ont été communiquées à l'employeur des personnes concernées ainsi qu'à d'autres entités privées qui en ont été informés de ces informations'.
150. Il convient de relever que les appelants n'identifient pas les entités privées dont ils font état à l'exception de la société RESSOURCETHICA, employeur de personnes physiques concernées par les données et partie appelante et qu'ils n'identifient pas davantage 'les tiers'. En outre, se référant à des dispositions pénales, ils procèdent par suppositions sans en tirer de conséquence légale et ne justifient pas du fondement du principe de confidentialité dont ils se prévalent.
151. En premier lieu, il convient de rappeler que le juge des libertés et de la détention ne peut être considéré comme un tiers non autorisé au sens des articles 5 (1) (f) du RGPD et 4(6°) de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978.
152. En second lieu, la communication de données personnelles à des tiers non autorisés par la notification de l'ordonnance d'autorisation, à la supposer établie, est sans incidence sur la légalité de cette ordonnance, qui lui est antérieure.
153. Cette branche du moyen sera en conséquence rejetée. En conséquence, le moyen tiré de l'illicéité des pièces sera rejeté en toutes ses branches.
Sur le bien-fondé des présomptions retenues par le juge des libertés et de la détention
154. L'article L.16B. I du livre des procédures fiscales dispose 'Lorsque l'autorité judiciaire, saisie par l'administration fiscale, estime qu'il existe des présomptions qu'un contribuable se soustrait à l'établissement ou au paiement des impôts sur le revenu ou sur les bénéfices ou des taxes sur le chiffre d'affaires ou souscrit des déclarations inexactes en vue de bénéficier de crédits d'impôt prévus au profit des entreprises passibles de l'impôt sur le revenu ou sur les bénéfices en se livrant à des achats ou à des ventes sans facture, en utilisant ou en délivrant des factures ou des documents ne se rapportant pas à des opérations réelles ou en omettant sciemment de passer ou de faire passer des écritures ou en passant ou en faisant passer sciemment des écritures inexactes ou fictives dans des documents comptables dont la tenue est imposée par le code général des impôts, elle peut, dans les conditions prévues au II, autoriser les agents de l'administration des impôts, ayant au moins le grade d'inspecteur et habilités à cet effet par le directeur général des finances publiques, à rechercher la preuve de ces agissements, en effectuant des visites en tous lieux, même privés, où les pièces et documents s'y rapportant sont susceptibles d'être détenus ou d'être accessibles ou disponibles et procéder à leur saisie, quel qu'en soit le support.'
155. Ainsi, il convient de rappeler que l'article L. 16B du livre des procédures fiscales n'exige que de simples présomptions de la commission de fraude, en particulier de ce qu'une société étrangère exercerait depuis la FRANCE tout ou partie de son activité par laquelle elle serait soumise aux obligations fiscales et comptables prévues par le code général des impôts en matière d'impôt sur les bénéfices et/ou de taxes sur le chiffre d'affaires (Cass. Com., 15 février 2023, n°20-20.599).
156. Il convient également de rappeler qu'à ce stade de l'enquête fiscale, en application des dispositions de l'article L.16 B du livre des procédures fiscales, il n'y a pas lieu pour le juge des libertés et de la détention de déterminer si tous les éléments constitutifs des manquements recherchés étaient réunis, mais, en l'espèce, ce juge, dans le cadre de ses attributions, ne doit rechercher que l'existence des présomptions simples des agissements prohibés et recherchés. L'élément intentionnel de la fraude n'a donc pas à être rapporté à ce stade de la procédure (Cass. Com. 7 décembre 2010, n°10-10.923 ; Cass. Com. 15 février 2023, n°21-13.288).
157. En outre, en l'espèce, il ne ressort ni de la requête, ni de l'ordonnance que la DNEF reproche à la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA de s'être implantée en SUISSE pour bénéficier d'un régime fiscal plus avantageux et d'y tenir sa comptabilité, mais a fait état, devant le juge des libertés et de la détention, de l'existence d'une présomption d'une activité exercée à partir du territoire national français, d'où il pouvait être présumé que la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA ne respectait pas ses obligations comptables en France, dans la mesure où était relevée dans l'ordonnance l'absence de toute déclaration fiscale relative à son activité. Les conditions de mise en oeuvre de l'article L16B du livre des procédures fiscales étaient donc remplies
158. Par ailleurs, les appelants soutiennent que le juge des libertés et de la détention n'a pas caractérisé l'existence d'un établissement stable en France. Il convient de rappeler que la jurisprudence constante affirme que la discussion de l'existence d'un établissement stable en FRANCE relève de la compétence du juge de l'impôt, et non de la compétence du juge des libertés et de la détention saisi d'une demande fondée sur l'article L. 16 B du LPF ni de celle du premier président statuant en appel (Cass. Com., 2010-06-29, n° 09-15.706).
159. Il convient enfin de souligner que, sauf pour les appelants à apporter la preuve de l'illicéité des pièces fournies par l'administration, ce qui n'a pas été retenu en l'espèce, il est de jurisprudence constante qu'en se référant et en analysant les seuls éléments d'information fournis par l'administration, le juge apprécie souverainement l'existence des présomptions de fraude justifiant la mesure autorisée.
160. Dès lors, il convient d'examiner les éléments constitutifs des indices, notamment relatifs à la fixation du centre décisionnel et à l'activité de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA en France et l'insuffisance des moyens d'exploitation en Suisse, caractérisant l'existence de présomptions de soustraction à l'établissement et au paiement de l'impôt retenue par le juge des libertés et de la détention à l'encontre de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA.
Sur la direction et les moyens humains et matériels en SUISSE de la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL SA,
161. En l'espèce, s'agissant des éléments caractérisant l'existence de présomptions d'agissements frauduleux retenus par le juge des libertés et de la détention, la décision d'autorisation querellée mentionne, par une appréciation pertinente de la requête accompagnée de pièces qui lui a été présentée et que cette juridiction fait sienne, qu'il ressortait des éléments de l'enquête que :
- initialement dénommée à sa création, le 18 octobre 1983, société DISPHARM SA, puis CIDER PROMOTION INTERNATIONAL SA du 29/04/2003 jusqu'à la date du 18/06/2007 (Pièces n°1, n°3-1 et n°17), la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL SA est inscrite depuis au Service du Registre du Commerce de l'Etat du canton de GENÈVE, sous le numéro CHE-103.340.154 (Pièce n°1) ;
- la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA a pour objet social la représentation, la distribution et la promotion de tous produits pharmaceutiques et également pour but d'acquérir, détenir, exploiter et vendre tous droits sur des médicaments (Pièces n°1 et n°2);
- la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA dispose d'un bureau de représentation en Côte D'IVOIRE sis [Adresse 9] (Pièce n°3-1) ;
- le siège social de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA depuis le 28/11/2003, est fixé [Adresse 6] en Suisse (Pièces n°1, n°3, n°3-2, n°4, n°10, n°11, n°12 et n°12-1) ;
- la consultation des données issues du site internet d'accès public « moneyhouse.ch » fait ressortir que 12 entreprises actives sont répertoriées à l'adresse du siège social de PROPHARMED INTERNATIONAL S.A. sise [Adresse 6] à [Localité 28] en Suisse (Pièce n°4); Selon la base « yellow.local.ch », 24 personnes s'avèrent répertoriées à l'adresse susvisée (Pièce n°5) ; la société InterExperts SA réalisant des activités de fiduciaire, bureau de comptabilité, conseiller fiscal, bureau de révision et de gérance de fortune apparaît domiciliée notamment à la même adresse, [Adresse 6] (Pièce n°5-1) ;
- ainsi, le siège social de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA est fixé à la même adresse, sis [Adresse 6] que 12 autres entreprises et la société InterExperts SA réalisant des activités de fiduciaire, bureau de comptabilité, conseiller fiscal, bureau de révision et de gérance de fortune;
- selon la base de données économiques D&B, la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA disposerait d'un effectif de 4 personnes (Pièce n°3-2) ;
- la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA est détenue à hauteur de 99,99% par la société en commandite par actions de droit français RESSOURCETHICA, sise [Adresse 4] qui a pour gérant et associé commandité la SARL AFRIGESTION sise à la même adresse, elle-même dirigée par M. [O] [C] (Pièces n°9, n°10, n°11, n°12, n°12-1, n°13, n°27 et n°30);
- conformément à l'article 20 des statuts du 29/04/2003 de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA, la majorité des membres du conseil d'administration doit être de nationalité suisse et avoir son domicile en SUISSE (Pièce n°2) ;
- la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA a pour directeur général, depuis le 06/10/2009, M. [F] [C] et M. Charles [M] en est l'administrateur depuis le 28/06/2010 (Pièce n°1); Ils disposent tous les deux d'un pouvoir de signature individuelle (Pièces n°1 et 3) ;
- M. Charles [M], de nationalité suisse, administrateur de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA, est domicilié en Suisse dans la ville de [Localité 26] (en allemand « [Localité 25] ») (Pièces n°1, n°3, n°6 et n°6-1) ;
- selon la base « Monetas.ch », Monsieur [M] est répertorié notamment à [Localité 25] (ou [Localité 26]), [Localité 38] et [Localité 28] au titre de 73 mandats sociaux dont 25 actifs avec la qualité de chef de succursale de 6 personnes morales (dont PROPHARMED INTERNATIONAL SA),chef adjoint de succursale de 8 autres entités distinctes, directeur adjoint s'agissant de 6 autres sociétés, et directeur de succursale pour 2 personnes morales (Pièces n°6 et n°6-1 n°7) ;
- d'après la même base de données, Charles [M] est répertorié comme associé de l'étude d'avocats KELLERHALS CARRARD [Localité 28] SNC (Pièce n°7), ce cabinet d'avocats étant qualifié par le site internet 'magazine-decideurs.com' comme le second plus grand cabinet de suisse en nombre d'avocats, se positionnant sur les dossiers tant locaux qu'internationaux et se concentrant notamment sur les domaines du commercial, du fiscal et de la propriété intellectuelle (Pièce n°8) ;
- ainsi, la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA dispose depuis juin 2010 d'un administrateur, de nationalité suisse et domicilié en SUISSE, associé du Cabinet KELLERHALS CARRARD, satisfaisant à l'exigence statutaire de présence d'un administrateur de nationalité suisse également domicilié en SUISSE (Pièces n°1, n°2, n°3, n°6, n°6-1, n°7 et n°8);
- ainsi, il peut être présumé que Charles [M], compte tenu de ses fonctions d'administrateur de PROPHARMED INTERNATIONAL SA, d'associé du cabinet d'avocats suisse KELLERHALS CARRARD et de son implication dans 73 mandats dont 25 actifs, ne gère pas de façon habituelle et permanente la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL SA pour laquelle le pouvoir décisionnel de ladite société peut être présumé concentré entre les mains de M. [O] [F] [C].
162. S'agissant de l'administration de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA par Monsieur [M], il convient de relever que, conformément aux exigences de la loi suisse relatives à l'établissement d'une société en Suisse qui prescrit une représentation par une personne domiciliée en Suisse, soit un administrateur pour une société anonyme, la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA dispose d'un administrateur en la personne de Monsieur [M] depuis 2010.
163. Dans leurs écritures, les appelants contestent que l'administration de Monsieur [M] soit une administration fiduciaire et font valoir que, ce dernier disposant du pouvoir de signature individuelle sur les comptes bancaires comme Monsieur [C], 'cette unique circonstance de double signature individuelle permet de s'assurer que le centre de décision est en Suisse'. (page 35).
164. Les appelants précisent que ' la société dispose à [Localité 28] d'une direction effective alors qu'elle remunère Monsieur [M] plus de 80.000 francs suisses par an, si effectivement, ce n'est qu'un gérant de paille servant de façade pour la réglementation suisse, ces honoraires paraissent particulièrement élevés pour qu'il ne réalise aucun acte d'autant que ses notes d'honoraires indiquent une intervention du 1er janvier au 31 décembre de chaque année.' (page 37) .
165. Ils ajoutent ' Quant à la préparation des Assemblées Générales notamment, on peut lire que le Conseil d'Administration a pris bonne note des remarques transmises par le cabinet d'expertise comptable dans le cadre de la préparation des Assemblées Générales par courrier préalable.
La préparation des Assemblées Générales n'est pas réalisée à [Localité 31] par [F] [C] ou les employés de RESSOURCETHICA à [Localité 37], les Assemblées Générales sont préparées par le Conseil d'Administration composé de deux membres et prennent appui sur les remarques et commentaires de l'Expert-comptable suisse de la société....
En l'espèce, le Conseil d'Administration est le dirigeant de la société PROPHARMED INTERNATIONAL en Suisse, ce Conseil d'Administration est composé d'un membre unique qui dispose de la signature individuelle, il s'agit de Monsieur Charles [M] ; Monsieur [F] [C] est nommé Directeur Général, il n'est pas membre du Conseil d'Administration.' (page 38).
166. A ce titre, les appelants produisent la pièce n°82 constituée des procès-verbaux des conseils d'administration et assemblées générales des comptes arrêtés au 31 décembre 2017, au 31 décembre 2018 et au 31décembre 2019 de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA et la pièce n°83 constituée des factures 2017/2018 de Monsieur [M], administrateur de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA.
167. Il ressort de la pièce n°82 que les procès-verbaux des assemblées ordinaires de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA au titre des années 2017 à 2019 comportent la mention qu'elles se sont tenues 'En l'Etude de Maitre Charles [M], [Adresse 12]', que ce dernier en sa qualité de président de séance 'a constaté, sur la base de la liste de présence que la totalité des actions de la société sont présents ou représentés... et qu'aucun actionnaire ne s'oppose à sa tenue' et qu'une secrétaire tient le procès-verbal qui a été signé par le président et par elle.
168. Il en résulte ainsi que les assemblées ordinaires de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA des années 2017 à 2019, dont les procès-verbaux sont produits à la présente procédure ne se sont pas tenues au siège social de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA mais à l'adresse professionnelle du cabinet d'avocat de maitre [M] et que la liste des présences de la totalité des actions de la société sont présents ou représentés n'est pas produite à la présente procédure.
169. Il ressort de la pièce n°83 qu'elle est constituée de deux factures établies par Monsieur [M] portant en entête sa qualité d'avocat dénommées 'Note de frais et honoraires' au titre des années 2017 et 2018 pour des prestations intitulées 'Pour services rendus par mon étude'.
170. De ces factures, il ne ressort aucun élément relatif à la nature des prestations réalisées par Monsieur [M], le libellé de la prestation faisant référence à 'des services rendus par mon étude ' à l'adresse [Adresse 12].
En effet, il n'en ressort aucun élément permettant d'identifier la prestation d'administration de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA par Monsieur [M].
171. Pas davantage, il n'en ressort d'élément permettant de distinguer cette prestation de celle d'avocat associé de l'étude d'avocats 'De Pfyffer et Associés, Avocats au barreau de Genève' et de celle d'avocat de 'l'Etude de Maitre Charles [M]', mentionnée dans les procès-verbaux d'assemblées ordinaires de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA, à la même adresse sis [Adresse 12], en l'absence de production du contrat de prestation d'honoraires liant la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA à son administrateur, Monsieur [M] et détaillant ses missions dans le processus décisionnel de ladite société.
172. Les appelants produisent les statuts la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA pour décliner les attributions de son conseil d'Administration qu'ils qualifient 'd'intransmissibles et inaliénables' de la façon suivante :1)Exercer la haute direction de la société et établir les instructions nécessaires, 2) Fixer l'organisation, 3) Fixer les principes de la comptabilité et du contrôle financier ainsi que le plan financier pour autant que celui-ci soit nécessaire à la gestion de la société, Nommer et révoquer les personnes chargées de la gestion et de la représentation, 5) Exercer la haute surveillance sur les personnes chargées de la gestion pour s'assurer notamment qu'elles observent la loi, les statuts, les règlements, et les instructions données, 6) Etablir le rapport annuel, préparer l'Assemblée Générale et exécuter ses décisions. ( page 38 des conclusions)
173. S'agissant ainsi plus particulièrement du rôle effectif de Monsieur [M] dans les processus décisionnels de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA , il convient de souligner que les appelants, qui détaillent les attributions de son conseil d'administration composé d'un membre unique disposant de la signature individuelle, ne produisent aucun document établi par Monsieur [M] ou instruction donnée par ce dernier au directeur général Monsieur [C] pour justifier de l'exercice effectif de ses attributions de membre unique du conseil d'administration. Pas davantage, ils ne contestent l'exercice d'autres mandats d'administration de Monsieur [M] au nombre d'au moins 73 dont 25 actifs.
174. En effet, les appelants demeurent silencieux sur l'exercice de ces mandats et ne produisent aucune pièce justifiant de la réalité de l'exercice effectif des fonctions/missions de Monsieur [M] et ainsi de la réalité de ses actes d'administration depuis 2010, soit depuis plus de 10 ans à la date de l'ordonnance contestée en qualité d'administrateur unique de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA.
175. Tout en soulignant à la fois que le pouvoir de signature de l'administrateur et du directeur général constitue 'cette unique circonstance de double signature individuelle permet de s'assurer que le centre de décision est en Suisse' et que 'le Conseil d'Administration est le dirigeant de la société PROPHARMED INTERNATIONAL en Suisse, ce Conseil d'Administration est composé d'un membre unique qui dispose de la signature individuelle, il s'agit de Monsieur Charles [M]' ( page 38), ils ne produisent aucune pièce, telle des décisions prises par Monsieur [M], et notamment des décisions comportant celle 'd'exercer la haute surveillance sur les personnes chargées de la gestion pour s'assurer notamment qu'elles observent la loi, les statuts, les règlements, et les instructions données', soit en l'occurrence au directeur général Monsieur [C], en application des pouvoirs qui lui sont attribués par les statuts sur les années 2017 et 2018, années de facturation de ses honoraires produites aux débats par les appelants, de nature à remettre en cause le constat du juge des libertés et de la détention selon lequel Monsieur [M] 'compte tenu de ses fonctions d'administrateur de PROPHARMED INTERNATIONAL SA, d'associé du cabinet d'avocats suisse KELLERHALS CARRARD et de son implication dans 73 mandats dont 25 actifs ne gère pas de façon habituelle et permanente la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA'.
176. Ainsi, il ressort tant des pièces annexées à la requête que des pièces produites par les appelants que Monsieur [M], décrit par ces derniers comme le membre unique du conseil d'administration disposant de la signature individuelle, agit comme un administrateur fiduciaire pour répondre aux exigences légales ou réglementaires suisses ce d'autant qu'il n'est pas justifié par les appelants qu'il soit détenteur d'action de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA.
177. Dès lors, il convient de relever que les appelants ne produisent aucune pièce de nature à remettre en cause le constat du juge des libertés et de la détention selon lequel 'le pouvoir décisionnel est présumé être concentré entre les mains de Monsieur [C].'
178. S'agissant des moyens humains affectés à son activité en Suisse, les appelants évoquent dans leurs écritures (pages 26 et 46), un effectif de 4/5 personnes au siège, tel que retenu dans l'ordonnance du juge des libertés et de la détention et précise que la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA 'dispose des moyens humains et matériels permettant de réaliser son objet social, les pièces de l'ordonnance indiquant que la société PROPHARMED INTERNATIONAL dispose de 4/5 salariés, en plus de ses deux dirigeants, son Administrateur suisse et son Directeur Général ivoirien' et que 'l'ancienneté des structures, leur historique rigoureusement relatée et la transparence de ces structures enregistrées auprès de leur greffe respectif n'est pas l'apanage de schéma frauduleux tendant à se soustraire aux obligations déclaratives'.
179. Ils ajoutent que 'En l'espèce, dès sa création en 1983, lors de son acquisition par RESSOURCETHICA en 2009 et depuis cette date, les profits réalisés par la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL sont générés par une activité développée dans les 12 pays d'Afrique au moyen de 91 collaborateurs africains en 2009 qui sont aujourd'hui au nombre de 477 collaborateurs africains en 2019, situés dans tous les pays d'Afrique de l'Ouest et relevant tous de contrat de travail suisse ou de leur pays respectif et en cela dirigés par leur Directeur Général, Monsieur [F] [C] lui-même résident fiscal ivoirien, disposant de la nationalité ivoirienne (et française), d'une activité professionnelle dispensée de la Côte d'Ivoire et en Suisse et d'un domicile en Côte d'Ivoire. Il est inscrit auprès du Consulat de France en Côte d'Ivoire depuis le 13 avril 1991 (près de 20 ans).'
180. Ils précisent enfin que la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA 'est une société de plein exercice, qui dispose depuis 1983 d'une équipe de 7 personnes à temps plein (4/5salariés selon les périodes, de Monsieur [M] Administrateur situé en Suisse et de Monsieur [C], Directeur Général) qui signe des contrats avec les laboratoires pharmaceutiques, et ce conformément aux éléments obtenus par l'Administration fiscale dans le cadre de son droit de communication auprès d'une des sociétés clientes de PROPHARMED INTERNATIONAL, la société SASU DAIICHI SANKYO FRANCE.'
181. Faisant observer que 'les données fournies par la base Money House ne concernent que l'effectif au siège et que l'effectif total de 4 salariés n'est qu'une estimation, comme il est expressément indiqué', ils soulignent que 'les bilans de la société PROPHARMED INTERNATIONAL révèlent que la société disposait au 31 décembre 2017 d'un effectif de 282 salariés (entre ceux du siège et les commerciaux africains, plus les deux mandataires sociaux), 301 au 31 décembre 2018, et 477 au 31 décembre 2019. La société PROPHARMED INTERNATIONAL donne la liste de ses effectifs et leur lieu d'exercice' (page 28 de leurs écritures).
182. A ce titre, ils produisent la pièce n°75 intitulée ' Liste des salariés de PROPHARMED INTERNATIONAL au 31 décembre 2017/2018/2019 '.
183. Il ressort cependant de cette pièce qu'elle est constituée d'un tableau comportant les lieux d'affectation et la fonction de personnes salariées dans différents pays d'Afrique mais ne comportant aucun élément d'identification des salariés exerçant des fonctions au siège social en Suisse de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA.
184. En effet, s'il ressort de ce tableau des affectations d'emploi/fonction, libellées ' siège', toutes ces affectations sont géographiquement situées en Afrique. Ainsi en est-il de Monsieur [C], affecté au siège en République de Côte d'ivoire en qualité de directeur général et de [R] [C] en qualité de KeyAccount Manager, également affectée en côte d'Ivoire. D'autres salariés apparaissent affectés à des fonctions de siège mais sont localisés en Afrique, soit notamment au Sénégal, Burkina Faso ou en Côte d'Ivoire, au Niger, au Cameroun.
185. Ainsi, sur cette liste, contrairement à ce que prétendent les appelants dans leurs écritures, aucun salarié n'apparaît affecté au siège social en Suisse y compris le directeur général Monsieur [C] déclaré basé en Côte d'Ivoire et prenant en charge des missions qui relèvent du siège social en Suisse, le bureau de représentation de Côte d'Ivoire ne constituant pas le siège social.
186. Cette liste comporte ainsi des collaborateurs salariés déployés à l'étranger, en Afrique, les appelants ne produisant aucune extraction d'éléments relatifs, selon leurs propres dires, à l'existence de 4/5 salariés affectés au siège en Suisse.
187. En outre, les appelants qui font état de ' 91 collaborateurs africains en 2009 qui sont aujourd'hui au nombre de 477 collaborateurs africains en 2019, situés dans tous les pays d'Afrique de l'Ouest et relevant tous de contrat de travail suisse ou de leur pays respectif' ne produisent aucun contrat de travail desdits collaborateurs relevant du droit suisse.
188. Ils concluent dans leurs écritures (page 50) que 'L'absence totale de moyens humains en Suisse ou en Afrique aurait pu laisser envisager une présomption de fraude à savoir le non-dépôt en France de déclarations en Impôt sur les Sociétés et en TVA pour un établissement stable établi sur la base d'un centre de direction effective en France. Toutefois, le Juge en relevant des moyens humains suisses, fut ce t'il insuffisant, ne peut conclure à un tel risque de fraude.
En l'espèce, la société PROPHARMED INTERNATIONAL démontre qu'elle emploie des salariés en Suisse au siège mais également sur le continent africain (sous contrat suisse).
L'absence de moyens humains de PROPHARMED INTERNATIONAL en Suisse pour exercer son activité ne résulte pas des pièces produites. Au contraire, les pièces produites à l'appui de l'Ordonnance du Juge des Libertés et de la Détention permettait de s'assurait de ces moyens humains en Suisse et elle sera donc annulée pour en avoir tirée les mauvaises conclusions.'
189. Au titre des pièces produites à cet effet, les appelants versent, en pièce n°114-a, un seul contrat de travail relevant du droit suisse, celui de Mme [A] datant de 1989 pour un emploi de 'secrétaire comptable à mi-temps' à raison de 20 H par semaine à compter du 1 er août 1989.
190. Il convient de relever que cette salariée n'apparaît pas dans la liste des salariés, pièce n°75, et qu'aucune pièce relative à la réalité de son activité et au versement de ses salaires sur la période visée par l'ordonnance n'est produite.
191. Pas davantage, ils ne produisent d'autres contrats de travail relevant du droit suisse pour l'effectif déclaré de 4/5 personnes comme travaillant au siège social en Suisse alors même qu'ils produisent la pièce n°76 dénommée 'Attestation Réviseur suisse PROPHARMED INTERNATIONAL FIDUCIAIRE [J]' en date du 20 octobre 2021 qui fait état de frais de personnel en Suisse sur les années 2017 à 2019 pour des montants de 114 991 CHF en 2017 à 91 137 CHF en 2019.
192. Dès lors, il ressort tant des pièces annexées à la requête que des pièces produites par les appelants que, contrairement à leurs écritures, les appelants ne produisent aucune pièce de nature à remettre en cause le constat du juge des libertés et de la détention selon lequel 'la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL SA semble disposer de moyens humains limités en SUISSE, pour la réalisation de ses activités de représentation, distribution et promotion de produits pharmaceutiques. '
Sur le siège social et les moyens matériels déployés en SUISSE par la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA
193. S'agissant de la localisation du siège social de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA, fixé à la même adresse, sis [Adresse 6], que 12 autres entreprises et la société InterExperts SA réalisant des activités de fiduciaire, bureau de comptabilité, conseiller fiscal, bureau de révision et de gérance de fortune, les appelants contestent toute domiciliation et font valoir que des lieux ont été loués pour une surface de 225 m2 pour une activité réelle et que le juge des libertés et de la détention s'est livré à une analyse erronée de la réalité de l'occupation des lieux par la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA.
194. Ils précisent que 'En outre, selon la motivation de l'Ordonnance du Juge des Libertés et de la détention, qui reprend la thèse de l'Administration fiscale française, la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL ne dispose pas en Suisse des ressources et compétences nécessaires a la promotion des produits pharmaceutiques qui selon elle, continue d'être assurée par les salariés de RESSOURCETHICA ou de PROPHARMED FRANCE et de son Directeur Général qui serait résident fiscal fiançais.
Cette affirmation résulte du fait qu'une société fiduciaire INTEREXPERT aurait la même adresse que le siège social de PROPHARMED INTERNATIONAL, [Adresse 6] a [Localité 28]. Cette adresse commune ferait présumer que PROPHARMED INTERNATIONAL n'aurait pas de locaux à sa disposition et que cette adresse serait une simple boîte aux lettres/domiciliation fictive.
Cette assertion résulterait de la pièce annexe n°5-1 comme quoi la fiduciaire INTEREXPERT est indiquée a la même adresse que celle de la société PROPHARMED INTERNATIONAL.
Or, la conclusion qu'en ont tirée l'Administration et le Juge (adresse de domiciliation et absence de siège réel) ne peut résulter de cette consultation qui procède d'une interrogation manifestement inadaptée et par voie de conséquence d'une réponse inappropriée.
L'Administration a effectué une seconde recherche concernant ce siège a [Localité 28] sur les bases de données de l'Annuaire téléphonique de la Suisse (local.ch). Cette seconde recherche a permis de trouver à l'adresse [Adresse 6] 22 sociétés et la société PROPHARMED INTERNATIONAL y disposait d'une ligne téléphonique propre.
La base de données D&B Global Référence Solution également consultée par l'Administration confirme ce numéro, indique une adresse de messagerie et précise que du personnel salarié est présent a l'adresse répertoriée.
Les éléments ainsi produits permettent de s'assurer que le siège de la société n'était pas fictif et que la société n'était pas domiciliée par la fiduciaire sus indiquée. Toutefois, le Juge des Libertés et de la Détention a considéré qu'il s'agissait également d'une domiciliation (bureau virtuel).
Or, les pièces produites par les requérants et notamment le contrat de location signé en date du 9 octobre 2003 démontrent que la location contractée par la société PROPHARMED INTERNATIONAL, anciennement nommée CIDER PROMOTION INTERNATIONAL S.A., porte sur des locaux de 225 m2 au 5eme étage de l'immeuble sis [Adresse 6], pour un loyer annuel de 57.756 Fr. Suisse (soit 36.963,84 euros en 2003) et des charges locatives annuelles estimées à 3.384 Fr Suisse (soit 2.165,76 euros en 2003)'
195. A ce titre, ils produisent une pièce n°89 intitulée ' Contrat de bail entre HOIRIE [G] et TALEB, et PROPHARMED INTERNATIONAL en date du 9 octobre 2003" et concluent que 'Le caractère fictif du siège ne peut donc résulter des pièces annexées a l'Ordonnance d'autant qu'une ligne téléphonique a été trouvée par l'intermédiaire du site Annuaire téléphonique de Suisse (local.ch) ainsi que les pièces n°110 et 120 intitulées 'Attestation Bailleur COMPTOIR IMMOBILIER sur bail du 1er novembre 2003 au 30 juin 2016 et Courrier de reconduction de bail du 1er novembre 2008 au 31 octobre 2013 et Contrat de bail suisse du 1er juillet 2011 au 30 juin 2016"
196. Cependant, les appelants ne justifient pas de la réalité d'une sous location intervenue à compter de juillet 2016, la pièce n°110 indiquant que ce bureau de 225 m2 a été reloué à la société FRILAB à compter du 1 er juillet 2016 et la pièce n°112 indiquant que la dite société sous loue les bureaux à la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA, faute de produire le bail de sous location signé avec ladite société Frilab.
197. Faute de produire le nom et les contrats des salariés employés au siège en Suisse, ils ne rapportent pas la preuve de la réalité et de la substance du siège social et de la réalité de l'activité de la société en ces lieux.
198. A cet égard, il importe peu qu'ils rapportent la preuve d'équipements matériels, de consommation d'eau et d'électricité ainsi que d'une ligne téléphonique attribuée à la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA, faute de justifier de la réalité de l'occupation des lieux par un effectif de 4/5 personnes et de la réalité de l'activité de cet effectif dont ils prévalent.
199. Dès lors, ils ne sauraient prétendre dans leurs écritures que 'il n'y est aucunement indiqué une quelconque résiliation d'un quelconque bail. Nous ne comprenons pas comment il peut être soutenu le contraire' ( page 43) alors que la pièce n°110 qu'ils produisent, mentionne la relocation des lieux à une autre société, la société Frilab qui atteste en pièce n°112, une sous location au profit de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA sans toutefois que ne soit produit le contrat de sous location.
200. Ainsi, alors que les appelants contestent toute domiciliation de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA au siège d'une société fiduciaire, ils ne contestent pas que la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA dispose d'un siège social situé à la même adresse que celle de 12 autres sociétés et de la société InterExperts SA réalisant des activités de fiduciaire, bureau de comptabilité, conseiller fiscal, bureau de révision et de gérance de fortune et ne rapportent pas la preuve de la réalité et de la substance de l'exercice de ses activités de ladite société à l'adresse de ce siège social.
201. Enfin, les appelants font état, dans leurs écritures (page 14) de ce que "la société PROPHARMED INTERNATIONAL fait l'objet depuis le 11 mars 2022 d'une vérification de comptabilité et à ce jour, aucune proposition de rectification ne lui a été envoyée, l'administration affirmant même que tout redressement sur le fondement du siège de direction effective était abandonné." pour en tirer la conclusion que la société PROPHARMED dispose de moyens suffisants en Suisse et y exerce son activité.
202. Cependant, outre qu'ils ne produisent aucune décision de l'administration fiscale relative à un éventuel abandon de redressement, la vérification de comptabilité étant intervenue en 2022, soit postérieurement à l'ordonnance du juge des libertés et de la détention, elle est sans incidence sur l'examen de cette ordonnance par la juridiction d'appel qui examine les éléments soumis au juge des libertés et de la détention au jour de sa saisine et les éléments produits par les appelants de nature à les contredire au jour de ladite saisine.
203. Dès lors, il convient de relever que les appelants ne produisent aucune pièce de nature à remettre en cause le constat du juge des libertés et de la détention selon lequel 'la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL SA semble disposer de moyens matériels limités en SUISSE, pour la réalisation de ses activités de représentation, distribution et promotion de produits pharmaceutiques.'
Sur les activités et le chiffre d'affaire de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA et les liens capitalistiques avec la société RESSOURCETHICA
204. S'agissant des éléments caractérisant l'existence de présomptions d'agissements frauduleux retenus par le juge des libertés et de la détention, la décision d'autorisation querellée mentionne, par une appréciation pertinente des éléments de la requête accompagnée de pièces qui lui a été présentée et que cette juridiction fait sienne, qu'il ressortait notamment des éléments de l'enquête que :
- l'examen des déclarations d'honoraires ou commissions versés au cours des années 2010 à 2019, souscrites par les laboratoires français, révèle que la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA a perçu un total de 43 166 374 € d'honoraires et commissions sur la période 2010 à 2019 au titre de rémunérations d'agent ou d'agent commercial ou d'agence de promotion commerciale ou distributeur de produits pharmaceutiques ou plus largement de prestataire pour des sociétés ayant notamment pour activité déclarée la fabrication de préparations pharmaceutiques ou de médicaments ou bien encore le commerce de gros de produits pharmaceutiques ;
- la société française EP DIS, filiale du groupe EURAPHARMA, exerce le métier de « Pre-wholesale » (« pré-grossiste ») en tant que distributeur export et dépositaire et est un établissement pharmaceutique agréé par l'ANSM (Agence Nationale de Sécurité des Médicaments) ; Située près de [Localité 34], sur un hub logistique de 11 000 m2, elle gère des flux exports vers une cinquantaine de destinations dans le monde, pour le compte de laboratoires pharmaceutiques clients; Elle est le client le plus important de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA (Pièces 15 et 16) ;
- l'exercice d'un droit de communication adressé à la société SASU DAIICHI SANKYO FRANCE, révèle que la société CIDER PROMOTION INTERNATIONAL (devenue PROPHARMED INTERNATIONAL SA), dans le cadre de son contrat de prestations qui les unit, occupe les fonctions de prestataire de visite médicale indépendant, et à ce titre se doit d'assurer la promotion, au nom et pour le compte du client, de produits pharmaceutiques ainsi que d'effectuer les démarches administratives afférentes auprès du corps médical et pharmaceutique selon un plan d'actions annuel établi par le laboratoire;
- en contrepartie des services de promotion, CIDER PROMOTION INTERNATIONAL, devenue PROPHARMED INTERNATIONAL SA, perçoit une rémunération au taux variable de 11% ou 14% par tranche du chiffre d'affaires net d'avoirs hors taxes, facturé au distributeur (CIDER DISTRIBUTION INTERNATIONAL à [Localité 35]) en charge des ventes sur un territoire correspondant à 14 Etats implantés sur le continent africain (Pièce n°17);
- les services de promotion incluent des prestations de pharmacovigilance comprennent les prestations de signalement des effets indésirables, l'enregistrement, l'évaluation et l'exploitation de ces informations dans un but de prévention et la réalisation de toutes les études et travaux concernant la sécurité des produits (Pièce n°17).
- la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA est détenue à hauteur de 99,99% par la société en commandite par actions de droit français RESSOURCETHICA, sise [Adresse 4] qui a pour gérant et associé commandité la SARL AFRIGESTION sise à la même adresse, elle-même dirigée par M. [O] [C] (Pièces n°9, n°10, n°11, n°12, n°12-1 et n°13) ;
- les décisions de gestion de la SCA RESSOURCETHICA appartiennent uniquement à la SARL AFRIGESTION, gérante de droit de la SCA, elle-même représentée par son gérant unique M. [O] [F] [C];
- la SCA RESSOURCETHICA est détenue à hauteur de 35 % (Pièces n°10, n°11, n°12 et n°12-1) ou 36% par la SA de droit français EURAPHARMA (Pièces n°9 et n°18) ;
- la SCA RESSOURCETHICA mentionne au titre de ses activités exercées celle d'intermédiaire spécialisé dans le commerce d'autres produits spécifiques (Pièces n°9 et n°10) ou de prestations médicales et pharmaceutiques (Pièces n°TI, n°12 et n°12-1) ;
- la SARL AFRIGESTION, gérante de droit de la SCA RESSOURCETHICA, a pour activité déclarée la gérance de sociétés et la fourniture de prestations de gestion au profit d'entreprises implantées en Afrique (Pièces n°9 et n°13);
- selon le groupe EURAPHARMA, RESSOURCETHICA et PROPHARMED, «PROPHARMED», pouvant être entendu comme désignant PROPHARMED INTERNATIONAL SA, exerce une activité de promotion médicale et pharmaceutique en Afrique et dans les CTOM en s'appuyant sur des réseaux de visiteurs médicaux et de délégués pharmaceutiques qui assurent la promotion des produits et les prises de commandes pour le compte des laboratoires (Pièces n°19,n° 20, n°21 et n°24);
- la société EURAPHARMA se présente comme le partenaire de référence des grands laboratoires pharmaceutiques désireux de se développer sur le continent africain, à Madagascar et dans les Collectivités et Territoires d'Outre-Mer (CTOM) ; EURAPHARMA est membre de CFAO, grand groupe d'envergure internationale, qui s'est hissé aux premiers rangs de la distribution spécialisée en Afrique et dans les CTOM (Pièce n°19) ;
- selon son site internet, EURAPHARMA opère dans 23 pays d'Afrique; RESSOURCETHICA - PROPHARMED sont nommés à la rubrique «France» du réseau EURAPHARMA pour une activité de promotion (médicale et pharmaceutique) et à la rubrique « au service des laboratoires», il est indiqué, s'agissant de la promotion médicale et pharmaceutique, que RESSOURCETHICA / PROPHARMED (en Afrique et dans les CTOM) s'appuient sur des réseaux de visiteurs médicaux et de délégués pharmaceutiques qui assurent la promotion des produits et les prises de commandes pour le compte des laboratoires (Pièce n°19) ;
- la SAS PROPHARMED FRANCE, ayant pour sigle « DEPHI » (n° SIREN 338 912 777) qui disposait de son siège social au [Adresse 4] et avait pour associé unique la SCA RESSOURCETHICA (Pièce n°20) a cessé son activité suite à la décision de transmission universelle de patrimoine et la dissolution anticipée de la société PROPHARMED FRANCE SAS, de la société RESSOURCETHICA, société absorbante;
- suite à la publication le 06/01/2017 et à la radiation au greffe du tribunal de commerce de NANTERRE le 29/06/2018 (Pièces n°20 et n°21), il n'existe, depuis le 06/01/2017, aucune entité juridique en activité susceptible de revendiquer le nom de « PROPHARMED» à SURESNES comme dans le reste de la FRANCE (Pièces n°20 et n°21) et la dénomination « PROPHARMED », mentionnée par le groupe EURAPHARMA sur son site internet, est présumée désigner la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL SA.
205. Les appelants, tout ne contestant pas la réalité des liens capitalistiques entretenus entre les sociétés EURAPHARMA, RESSOURCETHICA et PROPHARMED INTERNATIONAL et celle de la perception de commissions et honoraires d'un montant de 43 160 000 € entre 2018 et 2019 de laboratoires français, formulent des observations sur ces éléments pour en contester la pertinence au regard de la présomption d'activité réalisée en majorité depuis la France.
206. Ils déclarent dans leurs écritures (page 25) ' En effet, rien ne démontre que la société PROPHARMED INTERNATIONAL réalise la totalité (voire seulement la majorité) de son Chiffre d'Affaires en France et que celui-ci puisse être déterminé à partir d'une extraction partielle des seules déclarations de commission réalisées par les laboratoires pharmaceutiques français. Si en 9 ans (du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2019), les prestations et livraisons réalisées avec des clients établis en France (soit 11 clients français en 9 ans) se sont élevées à la somme de 43.000.000, soit en moyenne 4.700.000 euros par an, ces chiffres n'ont d'intérêt, pour connaître le lieu d'exercice des activités de la société objet de suspicion de fraude, que rapportés au Chiffre d'Affaires global de la société pendant la même période, s'agissant de ce qui était parfaitement connu de l'Administration d'une entreprise dont l'objet était d'intervenir sur les marchés internationaux.
Or, aucune de ces données (Chiffre d'Affaires global par rapport au Chiffre d'Affaires français réalisé avec les clients français, proportion de clients français par rapport aux clients étrangers) pourtant essentielles afin d'apprécier la réalité du marché de la société PROPHARMED INTERNATIONAL n'a été communiquée pour permettre de soutenir que l'activité de PROPHARMED INTERNATIONAL est réalisée exclusivement (voire majoritairement) avec des clients français.
Il est, à cet égard, justifié que des marchés sont conclus avec des laboratoires étrangers et que l'intégralité du Chiffre d'Affaires de PROPHARMED INTERNATIONAL provient de contrats exécutés en Afrique.'
207. Ils indiquent par ailleurs dans leurs écritures (page 54) que 'Au surplus, l'Administration ne démontre pas en quoi les prestations réalisées en France pour des clients français seraient majoritaires ; .... Si PROPHARMED INTERNATIONAL et RESSOURCETHICA ont des activités similaires, la première intervient sur le marché africain, la seconde sur le marché français alors même qu'elles auraient les mêmes clients français et étrangers, ce qui n'est pas valablement contesté. Sur les chiffres toujours, l'Administration agite le chiffre de 43.000.000 euros de chiffre d'affaires réalisé sur 10 ans avec des clients français, sauf a rappeler notamment que la société suisse a déclaré des résultats largement déficitaires en 2015 et 2016 avec des pertes respectives de 415.407 francs suisses en 2015 et de 1.939.304 francs suisses en 2016.'
208. A cet effet, ils produisent les pièces numéros 117 et 118 constituées des bilans suisses des années 2015 et 2016.
209. Toutefois, outre qu'ils évoquent une facturation à hauteur de 10 M€ à la société française EP DIS en 2018 et 2019, il convient de souligner que les appelants n'explicitent, dans leurs écritures, aucune donnée chiffrée comptable ou financière ou tout autre élément de chiffre d'affaires autres que ceux produits à l'appui de la requête et susceptibles de contredire les constats du juge des libertés et de la détention selon lesquels il pouvait être présumé que :
- la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA peut être considérée comme un prestataire de services indépendant, assurant notamment la promotion, au nom et pour le compte de différents laboratoires français, de produits pharmaceutiques dans de nombreux pays africains ;
- la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA perçoit de manière régulière et habituelle des commissions et honoraires significatifs en provenance de laboratoires pharmaceutiques ou de sociétés grossistes en produits pharmaceutiques installés sur le territoire français et depuis 2011, perçoit des commissions et honoraires à titre prépondérant de l'entité française E.P. DIS, filiale du groupe EURAPHARMA lui-même actionnaire de la société RESSOURCETHICA ;
- la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA peut être considérée, conformément aux informations communiquées par le groupe EURAPHARMA, comme faisant partie de son «réseau France» et comme exerçant une activité de promotion médicale et pharmaceutique à destination de l'Afrique et dans les CTOM en s'appuyant sur des réseaux de visiteurs médicaux et de délégués pharmaceutiques qui assurent la promotion des produits et les prises de commandes pour le compte des laboratoires;
- le pouvoir décisionnel de la SCA RESSOURCETHICA se trouve concentré entre les mains de M. [O] [F] [C] (Pièces n°9,13 et n°25) et les entités françaises SCA RESSOURCETHICA et SARL AFRIGESTION sont présumées exercer une activité similaire ou complémentaire à l'entité de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL SA et disposent également d'un dirigeant commun en la personne de M. [F] [O] [C].
Sur les moyens matériels et humains dont disposerait la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA en France au travers de la société RESSOURCETHICA
210. S'agissant des éléments caractérisant l'existence de présomptions d'agissements frauduleux retenus par le juge des libertés et de la détention, la décision d'autorisation querellée mentionne, par une appréciation pertinente des éléments de la requête accompagnée de pièces qui lui a été présentée et que cette juridiction fait sienne, qu'il ressortait des éléments de l'enquête que :
- il ressort de constatations visuelles opérées au [Adresse 4] qu'il existe une boîte aux lettres portant les mentions « PROPHARMED FRANCE PROPHARMED INTERNATIONAL RESSOURCETHICA / AFRIGESTION / RP MED ETHICA INTERNATIONAL » (Pièce n°23).
- il apparaît en outre que la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA use de l'adresse sise [Adresse 17] afin d'importer des biens en FRANCE (Pièce n°63).
- plusieurs salariés de la société RESSOURCETHICA, domiciliés en FRANCE, se présentent sur leurs profils LinkedIn comme travaillant au sein du réseau au sein de PROPHARMED FRANCE / EURAPHARMA de 2007 à 2016 à [Localité 37], gérant des grands comptes correspondants à des laboratoires français qui versent des honoraires ou des commissions à la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA ou (Pièce n°15),
- une autre salariée, domiciliée en France, se revendique, sur le réseau professionnel LinkedIn, comme directeur administratif et financier de RESSOURCETHICA depuis décembre 2011; Auparavant, elle était responsable comptable puis responsable administratif et financier de PROPHARMED FRANCE;
- ainsi rémunérée comme directrice administrative par la société PROPHARMED FRANCE jusqu'en 2016 puis, à partir de 2017, rémunérée par la société RESSOURCETHICA pour la fonction de directrice administrative et financière, est l'interlocutrice de l'administration fiscale pour la société RESSOURCETHICA et fait état au titre de ses coordonnées de contact de l'adresse courriel à son nom en messagerie '@propharmed-international.ch' et d'un numéro de téléphone portable attribué à DEPHI-PROPHARMED FRANCE ayant pour adresse l'adresse de la société RESSOURCETHICA à [Localité 37];
- ainsi, cette salariée utilise des moyens de communication appartenant à la société suisse CIDER PROMOTION INTERNATIONAL (devenue PROPHARMED INTERNATIONAL SA) dans ses relations avec l'administration fiscale française ;
- une dernière salariée domiciliée en FRANCE, rémunérée jusqu'à la date du 30/06/2019 parmi les salariés déclarés par la SCA RESSOURCETHICA en qualité de responsable Qualité et Certification, indique sur son profil LinkedIn qu'elle a exercé de février 2012 à juin 2019 les fonctions de « Quality & Compliance Officer» (soit Responsable qualité et conformité) chez RESSOURCETHICA à [Localité 37] ;
- à la rubrique Expérience de son profil LinkedIn, elle relate qu'elle a exercé au sein de RESSOURCETHICA, sa fonction de responsable qualité et conformité pour le compte de plusieurs sociétés pharmaceutiques (promotion): BMS, Sanofi, MSD, Acino, Astellas, Allergan, Takeda,... ; et ce pour l'Afrique francophone (plus de 17 pays), au Maroc, en Tunisie et dans les territoires français d'outre-mer (Pièces n°61 et n°61-1) ;
- le contrat de prestations unissant la SASU DAIICHI SANKYO FRANCE et PROPHARMED INTERNATIONAL SA mentionnant que les prestations de promotion relevant du secteur pharmaceutique délivrées par cette dernière sont à destination de 14 Etats implantés sur le continent africain, cette salariée, employée de la société française RESSOURCETHICA pendant 7 ans, est susceptible d'avoir exercé ses fonctions pour le compte de PROPHARMED INTERNATIONAL SA depuis les locaux de RESSOURCETHICA sis à [Localité 37];
- une facture émise le 13/10/2017 par la société SARL WEEMATCH, libellée à la société PROPHARMED INTERNATIONAL sise [Adresse 6] afférente à des travaux d'impression fait apparaître l'adresse de livraison suivante : PROPHARMED FRANCE, à l'attention d'une salariée de la société RESSOURCETHICA et adressée à l'adresse de ladite société ;
- ainsi, il apparaît que l'activité de la société PROPHARMED INTERNATIONAL est réalisée notamment par une salariée de la SCA RESSOURCETHICA au siège de cette dernière à [Localité 37], en la personne de cette dernière salariée, résidente fiscale française.
- enfin, [R] [C], fille de M. [O] [F] [C], directeur général de PROPHARMED INTERNATIONAL SA, indique sur son profil publié sur le réseau social LinkedIn et édité le 10/02/2020, qu'elle est, depuis octobre 2018, «Junior Key Account Manager» (responsable grands comptes - junior) chez RESSOURCETHICA / PROPHARMED INTERNATIONAL - Côte d'ivoire / [Localité 31], tout en mentionnant qu'elle se situe à « [Localité 33], Ile- de-France, France » (Pièces n°42 et n°43) ;
- sur le profil publié sur le même réseau professionnel et édité le 13/10/2020, elle indique avoir exercé la fonction de « Key Account Manager » (responsable grands comptes) jusqu'en septembre 2020 en Côte d'ivoire et à [Localité 31] et qu'elle serait désormais « Head of DIGITAL» (« Responsable département DIGITAL ») depuis septembre 2020 chez Groupe ETHICA à [Localité 33] en France ainsi qu'à [Localité 20] en Côte d'ivoire (Pièces n°42 et n°44);
- [R] [C] est inconnue des services fiscaux français en ne déposant pas de déclaration de ses revenus (Pièce n°46) ; Or, selon la déclaration sociale nominative de l'année 2018 souscrite par la SCA RESSOURCETHICA, [R] [C], résidant à [Localité 15], a été stagiaire rémunérée par SCA RESSOURCETHICA sur la période du 1/2/2018 au 31/07/2018 (Pièce n°40) ;
- [R] [C], Responsable grands comptes - junior chez RESSOURCETHICA/ PROPHARMED INTERNATIONAL jusqu'en septembre 2020 puis Responsable département DIGITAL chez Groupe ETHICA est présumée exercer ou avoir exercé ses fonctions pour le compte de PROPHARMED INTERNATIONAL SA depuis la France où elle est présumée travailler au sein de la société RESSOURCETHICA à [Localité 37].
211. Les appelants indiquent dans leurs écritures (pages 22, 23 et 24) que tous les personnels évoqués sont d'anciens salariés de PROPHARMED FRANCE repris par la société RESSOURCETHICA et que le relevé de la mention de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA sur la boîte aux lettres de RESSOURCETHICA n'est pas pertinent pour démontrer l'usage des moyens de la société RESSOURCETHICA par la société suisse PROPHARMED INTERNATIONAL SA pour exercer ses activités depuis la France.
212. Ils déclarent ainsi 'En ce qui concerne les moyens humains, il est cité Madame XXX, Madame XXXX, Madame XXXXI, Madame XXXX|.
Or, l'Ordonnance procède par erreur en confondant les salariés de PROPHARMED FRANCE et de RESSOURCETHICA. Les deux sociétés sont distinctes de par leur domaine d'intervention et PROPHARMED INTERNATIONAL a conclu des contrats de prestation de services avec PROPHARMED FRANCE et RESSOURCETHICA pour avoir accès a des services administratifs auprès des salariés de ces deux entités françaises.
Jusqu'en 2016, les salaries stigmatisés au sein de RESSOURCETHICA comme étant les moyens humains développant le Chiffre d'Affaires de PROPHARMED INTERNATIONAL étaient des salariés PROPHARMED FRANCE.
Ensuite, ces salariés, une fois la Transmission Universelle de Patrimoine réalisée, sont des salaries de RESSOURCETHICA.
Or, des conventions de prestation de services étaient régulièrement conclues entre les différentes entités pour réaliser les prestations pointées du doigt par l'Administration, prestations qui donnaient lieu a rémunération et qui étaient valablement déclarées au CAC et déclarées dans le Chiffre d'Affaires des deux sociétés françaises.
Ainsi, c'est de manière parfaitement licite que la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL a recours aux services de la société PROPHARMED FRANCE et RESSOURCETHICA et la remunère a ce titre. Le fait que la société PROPHARMED FRANCE ou RESSOURCETHICA prennent en charge pour sa société soeur / filiale suisse les prestations purement administratives répond à une stratégie de groupe et ne peut suffire a démontrer que le cycle de commercialisation est accompli pour partie sur le territoire français. Cette prestation de services assurée par les sociétés françaises est insusceptible de caractériser la moindre présomption de fraude, étant en plus déclarée, comptabilisée et imposée par l'Administration fiscale française auprès de PROPHARMED FRANCE et RESSOURCETHICA.
En outre, qu'une boîte aux lettres avec la mention PROPHARMED INTERNATIONAL apparaisse à l'adresse de [Localité 37] de RESSOURCETHICA n'emporte aucune présomption dès lors que toutes les sociétés composant le groupe RESSOURCETHICA ou l'ayant composé, qu'elles soient établies en France ou l'étranger y sont indiquées. Cette boîte aux lettres comporte la mention de sociétés qui n'existent plus (PROPHARMED FRANCE, RP Med). L'intérêt en l'occurrence était de pouvoir recevoir des échantillons des laboratoires avec lesquels l'une d'elles travaille et de les dispatcher auprès de toutes les filiales du Groupe.'
213. Ainsi, les appelants, au travers de leurs écritures, en invoquant un mécanisme contractuel de prestations de services entre sociétés distinctes au sein du même groupe, reconnaissent et corroborent le constat du juge des libertés et de la détention de l'externalisation, répondant à la stratégie de groupe, d'un nombre important de prestations de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA au profit de la société RESSOURCETHICA qui la détient à 99,99 %, et partage la même direction au travers de la gérance de Monsieur [C] pour RESSOURCETHICA via la société AFRIGESTION, à laquelle il convient d'ajouter la convention de sous-traitance entre la société RESSOURCETHICA et la société de droit des Emirats Arabes Unis, ETHICA INTERNATIONAL dont le président directeur général est Monsieur [C].
214. Dès lors, il convient de relever que les appelants ne remettent pas en cause le constat du juge des libertés et de la détention selon lequel la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA, qui ne dispose d'aucun établissement déclaré sur le territoire français, s'avère pourtant mentionnée sur une boîte aux lettres à l'adresse du siège social de sa société mère, la SCA RESSOURCETHICA, sise [Adresse 4], s'avère également destinataire de biens importés à l'adresse [Adresse 17] et est présumée utiliser notamment le personnel de la société française SCA RESSOURCETHICA afin de réaliser son objet social.
Sur la résidence de Mr [C] et la fixation du centre décisionnel de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA en France
215. S'agissant des éléments caractérisant l'existence de présomptions d'agissements frauduleux retenus par le juge des libertés et de la détention, la décision d'autorisation querellée mentionne, par une appréciation pertinente des éléments de la requête accompagnée des pièces qui lui a été présentée et que cette juridiction fait sienne, qu'il ressortait des éléments de l'enquête que :
- la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA est dirigée par la société française SCA RESSOURCETHICA, son actionnaire à 99,99%, et de manière effective par M. [O] [F] [C], gérant de la SARL AFRIGESTION, elle-même gérante représentante de la SCA RESSOURCETHICA. M. [O] [F] [C] est, par ailleurs, directeur général investi d'un pouvoir de signature individuelle au sein de PROPHARMED INTERNATIONAL SA ( pièces n°1, 9 à 13)
- d'après sa fiche publiée sur le réseau collaboratif Linkedln, [F] [C] revendique être CEO (Chief Executive Officer, soit Directeur Général) de PROPHARMED INTERNATIONAL / RESSOURCETHICA SCA depuis 1999 à Abidjan/Genève/[Localité 31] (Pièce n°26);
- M. [O] [F] [C] et son épouse née [S] [HW] [T] le 04/06/1963 revendiquent diverses adresses sises à l'étranger (USA et Côte d'Ivoire) mais disposent également de plusieurs contrats d'assurance Allianz en France, notamment assurance vie et automobile pour 2 véhicules immatriculés en France, à leurs noms avec pour adressé déclarée par M. [F] [C] une adresse à [Localité 31] : le [Adresse 11], adresse pour laquelle est relevé un contrat d'abonnement d'électricité et des consommations enregistrées ; Ils disposent en outre de lignes téléphoniques actives;
- l'administration fiscale produit de nombreux éléments attestant de la présence régulière de Monsieur [C], non séparé de son épouse Madame [HW] [T] [S] [C] au regard de la déclaration de succession enregistrée le 30/01/2018 indiquant que Madame [HW] [T] [S], non résidente au sens de la réglementation fiscale, et Monsieur [O] [F] [C] demeurant à [Localité 20] (Côte d'IVOIRE), sont mariés sans modification depuis lors de leur régime matrimonial (Pièce n°30);
- Mme [HW] [T] [S], bénéficiaire de la protection universelle maladie en France considère donc qu'elle réside en France, et plus particulièrement à [Localité 31], de manière stable et régulière afin de solliciter la prise en charge de ses frais de santé par la CPAM de [Localité 31] alors que [O] [F] [C] revendique un régime réservé aux expatriés;
- selon l'opérateur téléphonique ORANGE SA, le numéro de téléphone [XXXXXXXX01] correspond à une ligne en service ayant pour nom de titulaire DEPHI-PROPHARMED FRANCE (SIREN 338 912 777) sise [Adresse 4] (Pièce n°35);
- la SAS PROPHARMED FRANCE, ayant pour sigle « DEPHI » (n° SIREN 338 912 777) disposait de son siège social au [Adresse 4] et avait pour associé unique la SCA RESSOURCETHICA, avant de faire l'objet d'une transmission universelle de patrimoine en 2016 au bénéfice de son associé unique (Pièce n°20);
- il en résulte donc que M. [O] [F] [C] est présumé utiliser une ligne téléphonique prise en charge par la SCA RESSOURCETHICA, venant aux droits et obligations de la SAS PROPHARMED FRANCE, alors qu'il ne perçoit aucune rémunération de cette entité;
- l'adresse sise [Adresse 17] est afférente à une villa dénommée « LA SANARYTAINE » acquise le 30/03/2016 par la société civile particulière de droit monégasque PAPATO représentée à l'acte par ses cogérants en la personne de M. [O] [F] [C] et de Mme [HW] [T] [S] (Pièces n°14, n°28 et n°62) ; d'après ENEDIS, un contrat de fourniture d'électricité est en cours à l'adresse susvisée depuis le 31/03/2016 ayant pour titulaire Mme [C] [HW] et des consommations y sont enregistrées (Pièces n°36 et n°36-1);
- ainsi, [O] [F] et [HW] [C] sont gérants d'une société monégasque propriétaire d'une villa sise [Adresse 17] ;
- M. [O] ou [O] [F] [C] dispose notamment de trois comptes bancaires ouverts et non clôturés dans des agences parisiennes dont son épouse s'avère également co-titulaire; cette dernière disposant quant à elle de trois autres comptes bancaires propres ouverts et non clôturés en FRANCE en l'espèce à [Localité 31] et à [Localité 36] (Pièces n°27 et n°38).
216. Les appelants contestent toute résidence en France faisant valoir que Monsieur [C] réside en Côte d'Ivoire et s'y déclare fiscalement domicilié.
Ils précisent dans leurs écritures (page16) 'Alors que les époux [C] réalisaient des déclarations séparées de revenus, l'Administration établirait que la résidence fiscale de Monsieur [C] serait française en s'attachant à révéler des informations sur son épouse dont il est séparé de biens. Selon l'Ordonnance et alors que Administration fiscale française sait pertinemment que Monsieur [C] a la nationalité française et ivoirienne, n'exerce aucune fonction salariée en France et ne dispose d'aucun mandat social rémunéré, est séparé de bien de son épouse avec laquelle il réalise des déclarations distinctes, a deux enfants majeurs, et sans que sa présence en France soit majoritairement avérée, il serait résident fiscal français ce qui impliquerait que le siège de direction effective de la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL soit en France.'
217. Ils ajoutent dans leurs écritures (page 39) ' L'Ordonnance n'indique pas que les fonctions de Directeur Général seraient réalisées a partir de la France. Au contraire, le relevé Air France produit a l'appui de la requête par l'Administration démontre que Monsieur [F] [C] est très peu en France et que son pays de départ est toujours la Côte d'Ivoire.. En outre, Monsieur [F] [C] est rémunéré par la société PROPHARMED INTERNATIONAL et déclare en Côte d'Ivoire ses revenus suisses pour un montant de 66.368.101 [Localité 27] CFA ou 102.012,55 francs Suisses au titre de ses revenus 2016 ; 66.059.641 [Localité 27] CFA ou 113.487 francs Suisses au titre de ses revenus 2017 et 66.184.601 [Localité 27] CFA ou 109.514 francs Suisses au titre de ses revenus 2018. Le pouvoir décisionnel qui semble concentre, pour le Juge des Libertés et de la Détention, entre les mains de Monsieur [F] [C] n'est pas exerce en France, pays dans lequel il ne vit pas et duquel il n'est pas résident. A ce titre, relevons que Monsieur [F] [C] n'est propriétaire d'aucune résidence en France. Il ne dispose pas d'un domicile a [Localité 31], la société RESSOURCETHICA est locataire d'un appartement a [Localité 31] pour ses clients et son Directeur Général notamment. La résidence [Adresse 22] n'est pas habitable conformément a ce qu'indique l'Huissier qui s'est rendu sur place et appartient a une SCI dont Monsieur [F] [C] est associe a 5%.'
218. Cependant, il convient de constater que ces éléments neremettent pas en cause le constat du juge des libertés et la détention selon lequel le couple que Monsieur [C] forme avec Mme [S], épouse [C] , dispose d'une résidence qu'ils ont déclarée à [Localité 31] ainsi que d'une résidence à [Localité 36], témoignant d'une occupation effective et commune ainsi que plusieurs comptes bancaires en France et des contrats d'assurances dont des assurances véhicules immatriculés en France au nom de Monsieur [C] et que des biens sont importés à l'adresse de l'[Adresse 23] à [Localité 36] par la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA.
219. En outre, il ressort de la pièce n°104 produite par les appelants que la résidence sise, [Adresse 11] dont disposent les époux [C] est constituée d'un bien loué par la société RESSOURCETHICA.
220. Dès lors, les appelants ne remettent pas en cause la présomption retenue par le juge des libertés et de la détention que M. [F] [O] [C], avec son épouse, Mme [HW] [T] [S], résident à titre habituel et permanent en FRANCE.
221. Ainsi c'est juste titre que le juge des libertés et de la détention a pu retenir que :
- le centre décisionnel de la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL SA est présumé se situer en FRANCE notamment en la personne de M. [F] [O] [C], susceptible de résider de manière habituelle et permanente sur le territoire national et disposant de la qualité de directeur général et des pouvoirs de gestion et d'engagement de ladite société ;
- que la SCA de droit français RESSOURCETHICA dispose, outre le rôle clé réservé à M. [F] [C] par ailleurs gérant de la SCA au travers de la SARL AFRIGESTION, de salariés et cadres aptes à réaliser, depuis le territoire français, les activités de promotion médicale et pharmaceutique de la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL SA.
- la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL SA semble utiliser notamment les moyens humains et matériels localisés à [Localité 37] et appartenant à la SCA de droit français RESSOURCETHICA ou à la SARL AFRIGESTION, elle- même dirigée par M. [O] [F] [C] et gérante de la SCA précitée pour la réalisation de tout ou partie de son activité de promotion, au nom et pour le compte de laboratoires, de produits pharmaceutiques ainsi que de réalisation des démarches administratives afférentes auprès du corps médical et pharmaceutique.
222. Il résulte de l'ensemble de tous ces éléments, outre ceux relatifs à la fixation du siège social de la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL SA à la même adresse qu'un cabinet fiduciaire en Suisse et à son administration par M. [M], de nationalité suisse et résident en Suisse, avocat titulaire de 73 mandats sociaux dont 25 actifs, à l'insuffisance, attestée par la présence d'un seul salarié déclaré à mi-temps, de moyens humains et matériels d'exploitation en Suisse, conjugués à l'ampleur de l'activité développée, l'externalisation de prestations importantes d'administration et de gestion au profit de la société RESSOURCETHICA, constituent des indices sérieux de nature à présumer que le centre décisionnel de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA est situé en France et que l'activité opérée par la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA semble initiée ou conduite depuis le territoire français, ce d'autant qu'elle ne fournit aucune pièce attestant de la réalité d'une quelconque activité réalisée depuis la Suisse.
223. Ainsi, il a pu être présumé à juste titre par le juge des libertés et de la détention que la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL SA exercerait, depuis la FRANCE, tout ou partie de ses activités de représentation, distribution et promotion de tous produits pharmaceutiques et également pour but d'acquérir, détenir, exploiter et vendre tous droits sur des médicaments, sans souscrire les déclarations fiscales correspondantes et, ainsi, omettrait de passer les écritures comptables y afférentes.
224. En conséquence, sans qu'il soit nécessaire de statuer sur les autres moyens soulevés par les appelants, il convient de constater que l'ensemble des indices visés par l'ordonnance du juge des libertés et de la détention étaient donc de nature à faire présumer que la société de droit suisse la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA exercerait ou a exercé, depuis la FRANCE, tout ou partie de ses activités de représentation, distribution et promotion de tous produits pharmaceutiques et également pour but d'acquérir, détenir, exploiter et vendre tous droits sur des médicaments sans souscrire les déclarations fiscales correspondantes et, ainsi, omettrait de passer les écritures comptables y afférentes en France.
225. La société PROPHARMED INTERNATIONAL SA est ainsi présumée s'être soustraite et/ou se soustraire à l'établissement et au paiement de l'impôt sur les sociétés ou des taxes sur le chiffre d'affaires, en se livrant à des achats ou des ventes sans facture, en utilisant ou en délivrant des factures ou des documents ne se rapportant pas à des opérations réelles ou en omettant sciemment de passer ou de faire passer des écritures ou en passant ou en faisant passer sciemment des écritures inexactes ou fictives dans des documents comptables dont la tenue est imposée par le Code Général des Impôts (articles 54 et 209-1 pour l'IS, et 286 pour la TVA).
226. En conséquence, les moyens soulevés par la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA au titre des présomptions seront rejetés.
Sur le contrôle du juge
227. Les appelants font valoir que 'le juge des libertés et de la détention n'a pas procédé à un véritable examen des pièces et s'est livré à une appréciation erronée.'
228. Les motifs et le dispositif de l'ordonnance rendue en application de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales sont réputés établis par le juge qui l'a rendue et signée et cette présomption ne porte pas atteinte aux principes d'impartialité et d'indépendance du juge qui statue sur requête, dans le cadre d'une procédure non contradictoire (Com., 28 mai 2013, pourvoi n° 12-16.317 ; Com., 3 mai 2018, pourvoi n° 16-25.068).
229. En l'espèce, outre l'analyse précise et détaillée des pièces que la présente juridiction a fait sienne, les appelants n'établissent pas en quoi le juge des libertés et de la détention se soit dispensé de contrôler les pièces qui étaient soumises à son appréciation avant de rendre l'ordonnance autorisant les opérations de visite et de saisie.
230. Dès lors, le moyen sera rejeté.
Sur la présentation des éléments de la requête par la DNEF
231. En application de l'article L16B du LPF, il appartient à l'administration fiscale à l'appui de sa demande d'autorisation de visite, de produire tous les éléments d'information en sa possession de nature à justifier la visite.
232. Les appelants font valoir qu'en l'espèce, le juge des libertés et de la détention s'est fondé sur une présentation biaisée et erronée faite par la DNEF avec des éléments erronés en omettant des pièces de nature à remettre en cause la présomption de fraude retenue aux fins d'autorisation de l'opération de visite et de saisie telles notamment toutes les pièces relatives à l'activité en Afrique et la réalité du processus décisionnel en Suisse.
233. Cependant, outre que la DNEF a produit toutes les pièces justifiant des indices de nature à présumer une fraude, les appelants ne justifient, ni ne caractérisent en quoi la DNEF aurait présenté les éléments en sa possession de façon biaisée ou erronée alors qu'elle ne conteste pas les constatations matérielles de la DNEF quant à la consistance et nature de ses statuts, de sa direction par Monsieur [C], de son administration unique par un avocat suisse dont elle ne justifie pas de la réalité de l'activité, et pas davantage de la consistance de son organisation, de ses moyens humains et matériels en Suisse, de ses liens contractuels privilégiés, caractérisés par des contrats de prestations avec la société basée en France RESSOURCETHICA, qui la détient capitalistiquement à 99,99 % , soit presque en totalité, elle-même géré par la société AFRIGESTION SARL dont le gérant unique est Monsieur [C].
234. Dès lors, ce moyen sera écarté.
235. En conséquence, et sans qu'il soit nécessaire de statuer sur les autres moyens soulevés par les parties, l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de PARIS en date du1er février 2021, sera confirmée en toutes ses dispositions.
Sur l'article 700 du code de procedure civile
236. Conformément aux dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, les sociétés PROPHARMED INTERNATIONAL SA et SCA RESSOURCETHICA, Monsieur [F] [C], Madame [HW] [S] épouse [C], Madame [R] [C], et Monsieur [AL] [Y] succombant en leurs demandes, seront condamnés à payer la somme de 2.000 € à la DNEF au titre de ses frais irrépétibles et non compris dans les dépens.
Sur les dépens
237. Les sociétés PROPHARMED INTERNATIONAL SA et SCA RESSOURCETHICA, Monsieur [F] [C], Madame [HW] [S] épouse [C], Madame [R] [C], et Monsieur [AL] [Y], succombant en leurs prétentions, sont tenus aux dépens.
PAR CES MOTIFS :
Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Déclarons la note en délibéré adressée par les appelants le 3 juillet 2025 et la note en délibéré en réponse du 4 juillet 2025 de la DNEF irrecevables ;
Confirmons en toutes ses dispositions l'ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de PARIS en date du 1er février 2021 ;
Condamnons les sociétés PROPHARMED INTERNATIONAL SA et SCA RESSOURCETHICA, Monsieur [F] [C], Madame [HW] [S] épouse [C], Madame [R] [C], et Monsieur [AL] [Y] à payer à la Direction Nationale des Enquêtes Fiscales la somme de DEUX MILLE EUROS (2000 euros) au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Rejetons le surplus des demandes ;
Condamnons les sociétés PROPHARMED INTERNATIONAL SA et SCA RESSOURCETHICA, Monsieur [F] [C], Madame [HW] [S] épouse [C], Madame [R] [C], et Monsieur [AL] [Y] aux dépens.
LE GREFFIER
Véronique COUVET
LE DÉLÉGUÉ DU PREMIER PRESIDENT
Karima ZOUAOUI
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 15
ORDONNANCE DU 11 JUILLET 2025
(n°26, 52 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 24/03672 - N° Portalis 35L7-V-B7I-CI67G
Décision déférée : Sur saisine après cassation partielle en date du 11 octobre 2023 d'une ordonnance rendue par le magistrat délégué du Premier Président de la Cour d'appel de PARIS le 30 mars 2022, saisi sur appel d'une ordonnance rendue le 1er février 2021 par le Juge des libertés et de la détention près le Tribunal judiciaire de PARIS
Nature de la décision : Contradictoire
Nous, Mme Karima ZOUAOUI, Présidente de chambre à la Cour d'appel de PARIS, déléguée par le Premier Président de ladite Cour pour exercer les attributions résultant de l'article L. 16B du Livre des procédures fiscales, modifié par l'article 164 de la loi n° 2008-776 du 04 août 2008 ;
Assistée de M. Valentin HALLOT, Greffier lors des débats et de Mme Véronique COUVET, Greffier lors de la mise à disposition ;
Après avoir appelé à l'audience publique du 12 mars 2025 :
LA SOCIÉTÉ PROPHARMED INTERNATIONAL S.A. société de droit suisse
Prise en la personne de son Directeur général
Élisant domicile au cabinet de Me Jacques BELLICHACH
[Adresse 13]
[Localité 14]
Monsieur [O] [F] [C]
Né le [Date naissance 3] 1957 à [Localité 21] (ALGÉRIE)
Élisant domicile au cabinet de Me Jacques BELLICHACH
[Adresse 13]
[Localité 14]
Madame [HW] [S] épouse [C]
Née le [Date naissance 2] 1963 à [Localité 30]
Élisant domicile au cabinet de Me Jacques BELLICHACH
[Adresse 13]
[Localité 14]
LA SOCIÉTÉ RESSOURCETHICA S.C.A.
Prise en la personne de son gérant
Élisant domicile au cabinet de Me Jacques BELLICHACH
[Adresse 13]
[Localité 14]
Madame [R] [C]
Née le [Date naissance 8] 1994 à [Localité 24]
Élisant domicile au cabinet de Me Jacques BELLICHACH
[Adresse 13]
[Localité 14]
Monsieur [AL] [Y]
Né le [Date naissance 7] 1997 à [Localité 32]
Élisant domicile au cabinet de Me Jacques BELLICHACH
[Adresse 13]
[Localité 14]
Représentés par Me Jacques BELLICHACH, avocat au barreau de PARIS, toque : G0334
Assistés de Me Marie PELTIER-FEAT de la SELARL F.E.A.T. SOCIÉTÉ D'AVOCAT, avocat au barreau de TOULON
DEMANDEURS À LA SAISINE APRÈS CASSATION
APPELANTS INITIAUX
et
LA DIRECTION NATIONALE D'ENQUÊTES FISCALES
[Adresse 10]
[Adresse 10]
[Localité 19]
Représentée par Me Jean DI FRANCESCO de la SCP URBINO ASSOCIÉS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0137
Assistée de Me Nicolas NEZONDET, de la SCP URBINO ASSOCIÉS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0137
DÉFENDERESSE À LA SAISINE APRÈS CASSATION
INTIMEE INITIALE
Et après avoir entendu publiquement, à notre audience du 12 mars 2025, l'avocat des demandeurs à la saisine après cassation et l'avocat de la défenderesse à la saisine après cassation
Les débats ayant été clos avec l'indication que l'affaire était mise en délibéré au 11 juin 2025, prorogé au 9 juillet 2025 puis prorogé à nouveau au 11 juillet suivant pour mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
Avons rendu l'ordonnance ci-après :
1. Le 1er février 2021, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Paris a rendu, en application des articles L.16B et R. 16B-1 du livre des Procédures Fiscales (ci-après, "LPF"), une ordonnance d'autorisation d'opérations de visite et de saisie à l'encontre de la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL SA.
2. L'ordonnance a autorisé les opérations de visite et de saisie dans les lieux suivants :
- locaux et dépendances susceptibles d'être occupés par M. [O] [F] [C] et/ou Madame [HW] [S], sis [Adresse 11] ;
- locaux et dépendances, sis [Adresse 18] susceptibles d'être occupés par Madame [R] [C] et/ou Monsieur [AL] [Y] et/ou l'entreprise individuelle [Y] [AL].
3. L'ordonnance a fait droit à la requête de la Direction Nationale des Enquêtes Fiscales (ci-après, "DNEF") en date du 27 janvier 2021 au motif que la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL SA exercerait depuis la France tout ou partie de son activité de promotion de produits pharmaceutiques sans souscrire les déclarations fiscales correspondantes et ainsi omettrait de passer les écritures comptables afférentes.
4. Pour autoriser les enquêteurs de la Direction Nationale des Enquêtes Fiscales à procéder à la visite des locaux et dépendances susvisés, l'ordonnance retient pour l'essentiel que :
- la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL SA, dirigée par Monsieur [O] [F] [C], intervient dans le secteur pharmaceutique. Elle dispose également d'un bureau de représentation en côte d'ivoire ;
- depuis le 28/11/2003, la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL SA dispose de son siège social [Adresse 6] à [Localité 28] en Suisse ;
- la consultation des données issues du site internet d'accès public " moneyhouse.ch " fait ressortir que 12 entreprises actives sont répertoriées à l'adresse du siège social de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA ;
- la société InterExperts SA réalisant des activités de fiduciaire, bureau de comptabilité, conseiller fiscal, bureau de révision et de gérance de fortune est également indiquée à l'adresse [Adresse 6] à [Localité 28] en Suisse ;
- l'adresse du siège social de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA sise [Adresse 6] à [Localité 28] en Suisse est citée dans les " Panama Papers " ;
- sur la base de données économiques D&B, l'entité PROPHARMED INTERNATIONAL SA disposerait d'un effectif de 4 personnes ;
- ainsi, il peut être présumé que la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA :
- dispose de moyens d'exploitation limités à l'adresse de son siège social qui a d'ailleurs été citée dans l'enquête d'investigation dite des " Panama Papers " ;
- utilise ou a utilisé les services d'une société fiduciaire suisse ;
- dispose d'un administrateur domicilié en Suisse en la personne de [B] [M] ;
- il peut être présumé que [B] [M], compte tenu de ses fonctions d'administrateur de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA, d'associé du cabinet d'avocats suisse KELLERHALS CARRARD et de son implication dans 73 mandats dont 25 actifs, ne gère pas de façon habituelle et permanente la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA ;
- dès lors, la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA semble disposer de moyens humains et matériels limités en Suisse pour la réalisation de ses activités de représentation, distribution et promotion de produits pharmaceutiques et le pouvoir décisionnel de ladite société est présumé être concentré entre les mains de Monsieur [O] [F] [C] ;
- selon l'examen des déclarations d'honoraires ou commissions versées au cours des années 2010 à 2019, souscrites par les laboratoires français, l'entité de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL SA a perçu des honoraires ou des commissions pour un total de plus de 43 160 000 euros ;
- il peut être présumé que l'entité PROPHARMED INTERNATIONAL SA peut être considérée comme un prestataire de services indépendant, assurant notamment la promotion, au nom et pour le compte de différents laboratoires français, de produits pharmaceutiques dans de nombreux pays africains ;
- la dénomination " PROPHARMED ", mentionnée par le groupe EURAPHARMA sur son site internet est présumée désigner l'entité de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL SA ;
- la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA :
-- perçoit de manière régulière et habituelle des commissions et honoraires significatifs en provenance de laboratoires pharmaceutiques ou de sociétés grossistes en produits pharmaceutiques installés sur le territoire français ;
' depuis 2011, perçoit des commissions et honoraires à titre prépondérant de l'entité française E.P.DIS, filiale du groupe EURAPHARMA lui-même actionnaire de la société RESSOURCETHICA ;
-- peut être considérée, conformément aux informations communiquées par le groupe EURAPHARMA, comme faisant partie de son " réseau France " et comme exerçant une activité de promotion médicale et pharmaceutique à destination de l'Afrique et dans les collectivités territoriales d'Outre mer (CTOM) en s'appuyant sur des réseaux de visiteurs médicaux et de délégués pharmaceutiques qui assurent la promotion des produits et les prises de commandes pour le compte des laboratoires ;
- la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL SA, qui ne dispose d'aucun établissement déclaré sur le territoire français, s'avère pourtant mentionnée sur une boîte aux lettres du siège social de sa société mère, la SCA RESSOURCETHICA, sise [Adresse 4] et s'avère également destinataire de biens importés à l'adresse [Adresse 17]. ;
- Madame [D] [F], épouse de Monsieur [O] [F], qui déclare avoir travaillé pour les entités EURAPHARMA et PROPHARMED France, est susceptible d'avoir également exercé des fonctions pour le compte de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA depuis les locaux de RESSOURCETHICA à [Localité 37] ;
- Madame [ZU] [I] épouse [Z], domiciliée en France, était rémunérée comme directrice administrative par la société PROPHARMED France jusqu'en 2016. A partir de 2017, elle est rémunérée par la société RESSOURCETHICA pour la fonction de directrice administrative et financière ;
- Madame [ZU] [Z] utilise des moyens de communications appartenant à la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL SA dans ses relations avec l'administration française ;
- Madame [X] [E], employée de la société française RESSOURCETHICA pendant 7 ans, est susceptible d'avoir exercé ses fonctions pour le compte de la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL SA depuis les locaux de RESSOURCETHICA à [Localité 37] ;
- il apparaît que l'activité de la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL SA est réalisée notamment par une salariée de la SCA RESSOURCETHICA au siège de cette dernière à [Localité 37] en la personne d'[L] [W], résidente fiscale française, figurant parmi les salariés de la SCA RESSOURCETHICA en qualité de Responsable Grands Comptes ;
- [R] [C], responsable grands comptes - junior chez RESSOURCETHICA / PROPHARMED INTERNATIONAL SA jusqu'en septembre 2020 puis Responsable département DIGITAL chez GROUPE ETHICA - est présumée exercer ou avoir exercé ses fonctions pour le compte de PROPHARMED INTERNATIONAL SA depuis la France où elle est présumée travailler au sein de la société RESSOURCETHICA à [Localité 37] ;
- il résulte de ce tout qui précède que la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL SA est présumée utiliser notamment le personnel de la société française SCA RESSOURCETHICA afin de réaliser son objet social ;
- il peut être présumé qu'en 2006-2007, le directeur général de CIDER PROMOTION INTERNATIONAL (devenue la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA) exerçait déjà son activité en France dans la région parisienne ;
- les entités françaises SCA RESSOURCETHICA et SARL AFRIGESTION sont présumées exercer une activité similaire ou complémentaire à l'entité de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL SA et disposent également d'un dirigeant commun en la personne de Monsieur [O] [F] [C] ;
- la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL SA est dirigée par la société française SCA RESSOURCETHICA, son actionnaire à 99,99%, et de manière effective par Monsieur [O] [F] [C], gérant de la SARL AFRIGESTION elle-même représentante de la SCA RESSOURCETHICA. Monsieur [C] est directeur général investi d'un pouvoir de signature individuelle au sein de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA ;
- Monsieur [C], dirigeant de PROPHARMED INTERNATIONAL/ RESSOURCETHICA SCA, se déclare domicilié à l'étranger et son épouse [HW] [S], indique être séparée et partie à l'étranger en 2015 ;
- Monsieur [C] semble toujours être marié à Madame [S] [HW] et ils sont notamment tous les deux titulaires d'une adresse commune à [Localité 31] sise [Adresse 11] dans le [Localité 5] (revendiquée en 2020 comme adresse en France par Madame [HW] [C]), ainsi que de contrats d'assurance et d'assurance vie rattachés à cette adresse. Ils disposent en outre de lignes téléphoniques actives et de véhicules sur le territoire français ;
- Monsieur [C] est présumé utiliser une ligne téléphonique prise en charge par la SCA RESSOURCETHICA, venant aux droits et obligations de la SAS PROPHARMED France, alors qu'il ne perçoit aucune rémunération de cette entité ;
- Madame [HW] [S] considère qu'elle réside en France et plus particulièrement à [Localité 31], de manière stable et régulière, afin de solliciter la prise en charge de ses frais de santé par la CPAM de [Localité 31] alors que Monsieur [C] revendique un régime réservé aux expatriés ;
- Monsieur et Madame [C] sont gérants d'une société monégasque propriétaire d'une villa sise [Adresse 16]. L'examen du contrat d'électricité au nom de [HW] [C] laisse présumer que cette dernière y réside ;
- Monsieur et Madame [C] sont titulaires de comptes bancaires ouverts et non clôturés sur le territoire français et sont donc susceptibles d'y être présents de manière habituelle à l'adresse [Adresse 11] ainsi qu'au [Adresse 17] ;
- Monsieur et Madame [C] disposent de résidences identiques en France témoignant d'une occupation effective et commune, de comptes bancaires ouverts en France, de lignes téléphoniques utilisées à titre personnel gérées par des opérateurs français et de véhicules automobiles immatriculés en France, ce qui laisse présumer qu'ils résident à titre habituel et permanent en France ;
- ainsi, il peut être considéré que le centre décisionnel de la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL SA est présumé se situer en France notamment en la personne de Monsieur [C], susceptible de résider de manière habituelle et permanente sur le territoire national et disposant de la qualité de directeur général et des pouvoirs de gestion et d'engagement de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA ;
- ainsi, il résulte de tout ce qui précède que la SCA de droit français RESSOURCETHICA dispose, outre le rôle clé réservé à Monsieur [C] par ailleurs gérant de la SCA au travers de la SARL AFRIGESTION, de salariés et cadres aptes à réaliser, depuis le territoire français, les activités de promotion médicale et pharmaceutique de la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL SA ;
- il peut être considéré que la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL SA semble utiliser notamment les moyens humains et matériels localisés à [Localité 37] et appartement à la SCA RESSOURCETHICA ou à la SARL AFRIGESTION, elle-même dirigée par Monsieur [C] et gérante de la SCA précitée pour la réalisation de tout ou partie de son activité de promotion, au nom et pour le compte de laboratoires, de produits pharmaceutiques ainsi que de la réalisation des démarches administratives afférentes auprès du corps médicale et pharmaceutique.
5. L'ordonnance retient ainsi que la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL SA est présumée s'être soustraite et/ou se soustraire à l'établissement et au paiement des impôts sur les bénéfices ou des taxes sur le chiffre d'affaires, en se livrant à des achats ou des ventes sans facture, en utilisant ou en délivrant des factures ou des documents ne se rapportant pas à des opérations réelles ou en omettant sciemment de passer ou de faire passer des écritures ou en passant ou en faisant passer sciemment des écritures inexactes ou fictives dans des documents comptables dont la tenue est imposée par le Code général des impôts (articles 54 et 209-I pour l'IS et 286 pour la TVA).
6. Les opérations de visite et de saisies se sont déroulées le 04 février 2021 dans les locaux et dépendances sis [Adresse 18].
PROCEDURE
7. Le 19 février 2021, les sociétés PROPHARMED INTERNATIONAL SA et SCA RESSOURCETHICA, Monsieur [F] [C], Madame [HW] [S] épouse [C], Madame [R] [C], et Monsieur [AL] [Y] ont interjeté appel de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Paris du 3 févier 2021.
8. Les appelants demandaient au délégué du premier président de la cour d'appel de Paris de :
à titre principal :
- annuler l'ordonnance rendue le 1er février 2021 par le juge des libertés et de la détention de [Localité 31] ;
- annuler les opérations de visite et de saisies réalisées le 4 février 2021 par la DNEF dans les locaux des époux [C] ;
- ordonner la restitution aux sociétés susmentionnées de l'ensemble des documents saisis sans possibilité pour la DNEF d'en garder une copie ;
à titre subsidiaire :
- annuler la saisie des pièces n°106 à 108, opérée dans le cadre de la visite domiciliaire réalisée le 4 février 2021 au domicile de Monsieur [F] [C] ;
- dire que la copie des pièces devra être détruite et qu'elle ne pourra en aucun cas être utilisée par l'administration dans un quelconque dossier que ce soit.
9. La DNEF demandait au délégué du premier président de la cour d'appel de Paris de :
- déclarer irrecevable le recours en demande d'annulation de la saisie des pièces ;
- confirmer l'ordonnance du juge des libertés et de la détention de [Localité 31] du 1er février 2021;
- rejeter toutes autres demandes, fins et conclusions ;
- condamner les appelants au paiement de la somme de 2000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'en tous les dépens.
10. L'affaire a été audiencée pour être plaidée le 29 septembre 2021 puis le 27 octobre 2021, date à laquelle elle a été renvoyée au 16 février 2022 et mise en délibérée pour être rendue le 30 mars 2022.
11. Par ordonnance rendue le 30 mars 2022, le magistrat délégué a :
- déclaré irrecevable la demande d'annulation de la saisie des pièces lors des opérations de visite domiciliaire du 4 février 2021 ;
- confirmé en toutes ses dispositions l'ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Paris du 1er février 2021 ;
- déclaré régulières les opérations de visite et de saisies subséquentes effectuées le 4 février 2021 dans les locaux et dépendances mentionnés dans l'ordonnance du juge des libertés et de la détention ;
- rejeté toute autre demande ;
- accordé la somme de 1700 € à l'administration fiscale à charge pour les parties appelantes au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- mis les dépens à la charge des parties appelantes.
12. La société PROPHARMED INTERNATIONAL SA, Monsieur [O] [C], Madame [HW] [S] épouse [C], la société RESSOURCETHICA, Madame [R] [C], Monsieur [AL] [Y] ont formé un pourvoi contre l'ordonnance rendue par le premier président de la cour d'appel le 30 mars 2022.
13. Les demandeurs ont fait grief à l'ordonnance d'avoir confirmé en toutes ses dispositions l'ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Paris en date du 1er février 2021 et déclaré en conséquence régulières les opérations de visite et de saisie subséquentes effectuées le 4 février 2021, alors qu'elles auraient, notamment, violé le règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation des données et abrogeant la directive 95/46/CE ( ci-après, " RGPD "), jugeant ces dispositions inapplicables aux infractions fiscales et par conséquent, à la procédure mise en 'uvre par l'article L. 16B du LPF.
14. La Cour de cassation, par arrêt du 11 octobre 2023, au visa des articles 2 et 23 du RGPD, de l'article 48 de la loi n°78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, et de l'article L. 16B du LPF, a cassé et annulé, sauf en ce qu'elle déclare irrecevable la demande d'annulation de la saisie des pièces lors des opérations de visite domiciliaire du 4 février 2021, l'ordonnance rendue le 30 mars 2022 , entre les parties, par le premier président de la cour d'appel de Paris.
15. La Cour de cassation a jugé que le premier président n'a pas donné de base légale à sa décision, par des motifs impropres à établir qu'étaient réunies les conditions de la limitation prévue à l'article 23 du RGPD et mise en 'uvre à l'article 48 de la loi n°78-17 du 6 janvier 1978, à l'obligation de fournir à la personne concernée les informations prévues à l'article 14 du RGPD.
16. En conséquence, dans le dispositif de son arrêt, la Cour de cassation a remis, sauf sur le point déclaré irrecevable, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cette ordonnance et les renvoie devant la juridiction du premier président de la cour d'appel de Paris autrement composée renvoyé les parties devant le premier président de la cour d'appel afin qu'il soit à nouveau statué sur le fond.
17. L'affaire a été audiencée pour être plaidée le 09 octobre 2024 puis renvoyée à la demande des parties à l'audience du 12 mars 2025.
18. Par conclusions d'appel récapitulatives et responsives déposées au greffe de la cour d'appel de Paris le 9 octobre 2024, la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA, Monsieur [O] [C], Madame [HW] [S] épouse [C], la société RESSOURCETHICA, Madame [R] [C], Monsieur [AL] [Y], appelants, demandent au délégué du premier président de la cour d'appel de Paris :
- d'annuler l'ordonnance rendue le 1er février 2021 par le juge des libertés et de la détention du Tribunal judiciaire de Paris ;
- de condamner la DNEF à verser à la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA la somme de 1000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
19. Par conclusions récapitulatives déposées au greffe de la cour d'appel de Paris le 24 octobre 2024, la DNEF en réplique demande au premier président de la cour d'appel de:
- confirmer l'ordonnance du juge des libertés et de la détention de [Localité 31] du 1er février 2021;
- rejeter toutes demandes, fins et conclusions ;
- condamner les appelants au paiement de la somme de 2 000€ au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, outre les entiers dépens.
MOTIFS DE LA DECISION
Moyens des parties
20. A l'appui de leur demande d'annulation de l'ordonnance du 1er février 2021 rendue par le juge des libertés et de la détention de [Localité 31], la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA, Monsieur [O] [C], Madame [HW] [S] épouse [C], la société RESSOURCETHICA, Madame [R] [C], Monsieur [AL] [Y], appelants, font valoir en premier lieu la violation du règlement général sur les données personnelles (règlement (UE) 2016/679). Ils allèguent d'une part un manquement à une obligation d'information à l'égard des personnes dont des données ont été traitées, et d'autre part une transmission de ces informations à des tiers non autorisés.
21. Ils soutiennent qu'il appartient au juge de l'autorisation de contrôler si l'administration s'est conformée aux obligations résultant du RGPD et le cas échéant, aux limitations à ces obligations résultant du droit national. Ils font valoir que le RGPD s'applique à la procédure de l'article L. 16B et implique que les personnes physiques dont les informations sont traitées en soient informées, conformément à l'article 14 du règlement précité, ce qui n'a pas été le cas en l'espèce.
22. Pour les appelants, 19 pièces produites à l'appui de la requête " qui concernaient les personnes physiques reprises dans le cadre de l'ordonnance querellée, n'ont fait l'objet d'aucun contrôle par le juge des libertés et de la détention. Aucunes des pièces listées ci-dessous ne portent la mention de PROPHARMED INTERNATIONAL. " (pièces 6, 7, 22, 30, 38, 41, 44, 46, 50, 50-1, 51, 52, 53, 54, 55, 59, 60, 61-1, 61).
23. Ils estiment que " le contrôle de proportionnalité du juge aurait dû faire apparaître que {certaines pièces} (') révèlent des informations personnelles qui sont sans intérêt pour la procédure de visite domiciliaire de la société PROPHARMED INTERNATIONAL ".
24. Ils indiquent que " l'ordonnance du juge des libertés et de la détention motive les droits de visite et de saisie par le biais de trois traitements généraux créés par la DGFiP (ADONIS, SIR, FICOBA) dont certaines pièces du dossier sont issues et cela ne respecte pas les règles posées par les textes susvisés. Ainsi, la requête et les pièces communiquées sur lesquelles se fonde l'ordonnance résultent elles-mêmes de traitements sui generis mis en 'uvre par la DNEF pour les besoins spécifiques de son enquête à l'encontre des appelantes. Ces traitements portent sur des données issues de traitements généraux précités créés et des données issues de recherches sur des bases de données ou des sources d'accès public, tels que des moteurs de recherches, des réseaux sociaux professionnels ou d'autres bases de données " (pièces 22, 41, 43, 54, 59, 61, 6 et 7).
25. Ils soutiennent que l'article 4 de l'arrêté du 5 avril 2022 prévoit que les données relatives au " dossier fiscal des particuliers " (ADONIS) soient archivées " au début de la 4e année suivant l'année d'imposition " et que l'article 3 de l'arrêté du 14 juin 1982 relatif au système FICOBA, dans sa version en vigueur lors de la fermeture des comptes, prévoyait une durée de conservation de trois ans après clôture du compte des personnes physiques " alors qu'en l'espèce, les données rapportées s'agissant de Madame [S] remontent à plus de quatre ans et celles issues du système FICOBA sont encore antérieures ' (pièces 30 et 38).
26. Ils arguent que la volumétrie et la diversité des données personnelles collectées au cas particulier révèlent que la Direction Nationale d'Enquêtes Fiscales a procédé à un traitement de masse, collectant des données personnelles publiquement accessibles, sans disposer de fondement légal.
27. Ils concluent que le traitement ainsi effectué est illicite et qu'il en est par conséquent de même des pièces produites par l'administration.
28. Ils font valoir qu'il résulte des délibérations de la Commission Nationale de l'Informatique et des Libertés (ci-après, " CNIL ") ainsi que de la jurisprudence que lorsque l'administration demande la communication de données à caractère personnel sur la base d'une disposition législative, elle doit veiller à ne pas causer une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée des intéressés, et qu'en l'espèce, " cet équilibre n'a pas été respecté ".
29. Ils considèrent que : " les données en question non seulement constituent des données à caractère personnel mais elles révèlent, pour partie, des informations concernant la vie privée des personnes ".
30. Ils estiment que le juge des libertés et de la détention n'a pas effectué de contrôle de proportionnalité, a méconnu le droit au respect de la vie privée des personnes physiques dont certains renseignements figuraient dans les pièces produites à l'appui de la requête.
31. Ils soutiennent, au visa de la loi modifiée du 6 juin 1978 et de la jurisprudence et de la position de la CNIL, une obligation d'information à l'égard des personnes dont les données sont traitées et qu'en cas de manquement, les éléments de preuve ont été collectés de façon déloyale et donc sont illicites.
32. Ils font valoir qu'en l'espèce, " plusieurs modalités de collecte des données ont été utilisées (directement auprès des personnes pour les traitements tels qu'ADONIS, FICOBA, SIR ; indirectement pour les traitements sui generis de la DNEF) et que l'ensemble de ces traitements relève, selon les finalités, du règlement ou de la directive susvisés ".
33. Ils arguent que les personnes concernées par ces traitements " n'ont pu exercer leurs droits, notamment celui essentiel de saisir la Commission Nationale de l'Informatique et des Libertés, de contacter le Délégué à la Protection des Données (ci-après, " DPD ") ou d'exercer leur droit à l'oubli puisqu'elles n'ont pas bénéficié de l'information nécessaire à cette fin ".
34. Pour les appelants, la communication de données à des tiers non autorisés constitue une violation du principe de confidentialité et en l'espèce, des données personnelles issues des traitements ADONIS, FICOBA et SIR ont été communiquées à l'employeur des personnes concernées ainsi qu'à d'autres entités privées qui en ont été informés et que ces manquements " concernent a minima 19 pièces sur les 79 annexées à l'ordonnance ".
35. Ils ajoutent que ces pièces ne font aucune référence à la société dont la fraude est présumée et que les pièces fournies n'entrent pas dans l'exception de l'article 23 précité et que le traitement des informations y figurant impliquait l'obligation d'information prévue à l'article 14 du RGPD.
36. Ils concluent à l'annulation de l'ordonnance rendue sur le fondement de pièces d'origine illicite, en violation de la vie privée et de l'inviolabilité du domicile.
37. En deuxième lieu, les appelants contestent l'existence d'une présomption de fraude.
38. Ils contestent que le centre décisionnel de la société PROPHARMED INTERNATIONAL soit situé en France. Ils soutiennent que :
- Monsieur [C] a la nationalité française et ivoirienne, n'exerce aucune fonction salariée en France et ne dispose d'aucun mandat social rémunéré, est séparé de biens de son épouse avec laquelle il réalise des déclarations distinctes ;
- " le pouvoir décisionnel qui semble concentré, pour le juge des libertés et de la détention, entre les mains de Monsieur [F] [C] n'est pas exercé en France, pays dans lequel il ne vit pas et duquel il n'est pas résident. A ce titre, relevons que Monsieur [F] [C] n'est propriétaire d'aucune résidence en France. Il ne dispose pas d'un domicile à [Localité 31], la société RESSOURCETHICA est locataire d'un appartement à [Localité 31] pour ses clients et son Directeur Général notamment " ;
- la résidence sise [Adresse 23] n'est pas habitable selon le constat d'huissier produit et appartient à une SCI dont Monsieur [C] est associé à 5% (pièces n°100 et 102) ;
- l'ordonnance n'indique pas que les fonctions de directeur général seraient effectuées depuis la France alors que Monsieur [C] déclare en Côte d'Ivoire ses revenus suisses et qu'il ne réside pas en France ;
- la société PROPHARMED INTERNATIONAL n'a pas de dirigeant résident fiscal français; Au terme d'un examen de situation fiscale personnelle (ci-après, " ESFP "), Monsieur [C] a reçu un avis d'absence de redressement (pièce n°121) et, en l'absence de dirigeant fiscal français, la société PROPHARMED INTERNATIONAL ne peut avoir son siège de direction effective en France ;
- la société PROPHARMED INTERNATIONAL fait l'objet depuis le 11 mars 2022 d'une vérification de comptabilité et qu'à ce jour, aucune proposition de vérification ne lui a été envoyée " l'administration affirmant même que tout redressement sur le fondement du siège de direction effective était abandonné " (pièces n°123 et 124) ;
- le centre décisionnel ne peut être présumé en France au motif du logement de fonction du directeur général au sens de la jurisprudence dès lors que la société PROPHARMED INTERNATIONAL dispose en Suisse d'un président suisse, d'un directeur général ivoirien, d'organes de décision (Conseils d'Administration et Assemblées Générales) situés en Suisse et d'un commissaire aux comptes de nationalité suisse ;
- le fait, pour une société étrangère, d'être détenue par une société française et dont le gérant serait domicilié en France ne suffit pas, en l'absence d'autres éléments, à présumer que son centre décisionnel se trouve en France et donc à caractériser la fraude prévue par l'article L. 16B dès lors que son dirigeant se rend régulièrement au siège de la société et qu'elle y a du personnel permanent en Suisse et sur les territoires des consommateurs finaux ;
- dès lors que la résidence fiscale du centre décisionnel est querellée, que le " centre décisionnel n'est pas résident fiscal français déclaré comme tel au terme de ses propres déclarations souscrites en France et qu'il démontre au contraire qu'il est résident fiscal étranger, aucune présomption de fraude mise en place par un centre décisionnel français ne peut être retenue " (CA [Localité 31], Pôle 5, Chambre 12, 2 février 2022, n°21/10621).
39. Ils soutiennent que le centre décisionnel de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA est situé en Suisse en soulignant que :
- les deux dirigeants de la société ne sont pas résidents fiscaux français, Monsieur [M] (administrateur) est suisse et Monsieur [C] est ivoirien (pièces n°70 et 81) ;
- la société PROPHARMED INTERNATIONAL dispose d'une direction effective à [Localité 28] en la personne de Monsieur [H] qu'elle rémunère plus de 80 000 francs par an (pièce n°83) ;
- Monsieur [C] se rend régulièrement en Suisse ;
- les conseils d'administration et assemblées générales se tiennent en Suisse ;
- tous les procès-verbaux produits indiquent une adresse de tenue des assemblées générales au domicile professionnel du président, les dates et heures des tenues sont notées avec un secrétaire qui est suisse (pièce n°82) ;
- les statuts de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA prévoient que la société est administrée par un Conseil d'Administration composé d'un ou plusieurs membres et qu'il peut prendre des décisions sur toutes les affaires qui ne sont pas attribuées à l'assemblée générale par la loi ou les statuts (pièce n°2 produite à l'appui de la requête) ;
- le conseil d'administration est le dirigeant de la société PROPHARMED INTERNATIONAL en Suisse, ce conseil d'administration est composé d'un membre unique qui dispose de la signature individuelle, il s'agit de Monsieur Charles [M]. Monsieur [F] [C] est nommé Directeur Général, il n'est pas membre du Conseil d'Administration ;
- Monsieur [F] [C] est rémunéré par la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA et déclare en Côte d'Ivoire ses revenus suisses pour un montant de 66.368.101 [Localité 27] CFA ou 102.012,55 francs Suisses au titre de ses revenus 2016, 66.059.641 [Localité 27] CFA ou 113.487 francs Suisses au titre de ses revenus 2017 et 66.184.601 [Localité 27] CFA ou 109.514 francs Suisses au titre de ses revenus 2018 (pièce 81);
- la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA n'a d'autre choix que de nommer une fiduciaire conformément à l'article 727 du Code des obligations suisse et de ses statuts ;
- en l'espèce, la présence d'un président suisse, Monsieur [M], ayant la capacité d'engager la société PROPHARMED INTERNATIONAL car disposant de la signature individuelle et étant membre unique du conseil d'administration enlève toute présomption de fraude ;
- " le fait que [F] [C] soit directeur général de PROPHARMED INTERNATIONAL, filiale et gérant de RESSOURCETHICA société mère, n'est pas un élément permettant de présumer une fraude alors même que Monsieur [F] [C] aurait des attaches en France ".
40. Ils font valoir que la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA disposait, de moyens matériels en Suisse pour exercer son activité en soutenant que :
- la société disposait de locaux en Suisse ; Ils contestent que le bail de la société PROPHARMED INTERNATIONAL pour son siège social [Adresse 6] ait été résilié le 31 octobre 2008 comme le soutient l'administration. Le bail a pris effet le 1 novembre 2003 et était toujours en vigueur le 31 octobre 2008 (pièces n°110, 89, 120). Le bail a été résilié en juin 2016 et une sous-location est ensuite intervenue à la même date à la même adresse, avec le paiement d'un loyer du 2003 à 2021 (pièces n°111 et 111-a) ;
- la société faisait appel à un expert-comptable suisse, déposait ses comptes en Suisse et le recours à une société fiduciaire est une obligation légale ;
- la société dispose à [Localité 28] de moyens matériels, d'immobilisations et est titulaire de contrats de maintenances, factures d'eau, électricité etc. (pièces n°112, 113, 114) :
- la société avait une ligne téléphonique en Suisse (pièce n°95) ;
- la société dispose d'une adresse mail en Suisse et d'un nom de domaine en Suisse (pièce n°57) ;
- la société dispose d'une plaque sur l'immeuble de son siège social (pièce n°93) ;
- " l'ordonnance ne soutient ni n'allègue que la société PROPHARMED INTERNATIONAL serait propriétaire d'un quelconque actif corporel ou incorporel en France ".
41. Les appelants font valoir que la société PROPHARMED INTERNATIONAL disposait, en Suisse, des moyens humains nécessaires à son activité et contestent le recours au personnel de la société RESSOURCETHICA à cette fin. Ils soutiennent que :
- la société suisse avait des employés suisses " conformément à ce qui est mentionné dans la base de données Dun et Badstreet " (pièce n°3-2) ;
- le commissaire aux comptes suisse indique le montant des salaires perçus par les salariés suisses, il s'agit d'un montant de 91.137 francs suisses (pièces n°76 et 114-a) ;
- " les services dispensés par la société suisse aux laboratoires français et étrangers qui sont les clients de PROPHARMED INTERNATIONAL le sont par des employés de PROPHARMED INTERNATIONAL développés sur le territoire africain, salariés sous contrat de droit suisse " (pièces n°76, 75, 81, 80) ;
- la société suisse faisait appel à du personnel français de sa société mère en fonction support, par l'intermédiaire de conventions de prestations de services rémunérées. Cette rémunération est déclarée en France (pièces n°84, 85, 86). Les fonctions exercées par ce personnel français sont des fonctions administratives, d'ordre comptable, financier qui ne correspondent pas au secteur d'activité de PROPHARMED INTERNATIONAL ;
- " le fait d'avoir recours à des sociétés extérieures est inhérent à la dynamique de groupe et des prestations dispensées par un siège social à sa filiale et n'implique pas la réalisation par la société mère du chiffre d'affaires de la filiale " ;
- Madame [ZU] [Z] exerce les fonctions de directeur administratif et financier pour la société PROPHARMED INTERNATIONAL (pièce n°115), dans le cadre du contrat de prestations de services conclu entre PROPHARMED FRANCE et PROPHARMED INTERNATIONAL puis RESSOURCETHICA et PROPHARMED INTERNATIONAL (pièces n°84 et 85) ;
- le personnel de RESSOURCETHICA ne réalise pas l'objet social de PROPHARMED INTERNATIONAL auprès des laboratoires français mais " des fonctions support inhérentes à toute logique de groupe " ;
- les salariés de RESSOURCETHICA ne pallient pas l'insuffisance de moyens en Suisse; Les salariés de RESSOURCETHICA rendent des prestations de nature administrative à PROPHARMED INTERNATIONAL qui a une activité commerciale de commissionnaire;
- le fait que la société mère française prenne en charge pour sa filiale suisse les prestations purement administratives répond à une stratégie de groupe et ne peut suffire à démontrer que le cycle de commercialisation est accompli en partie sur le territoire français (Cour d'Appel, Aix en Provence, 5 avril 2018, n°17/13311).
42. Ils indiquent que Madame [Z], Madame [F], Madame [E], Madame [W] et Monsieur [K] étaient salariés de la société PROPHARMED France et que la société PROPHARMED FRANCE a été dissoute par décision de l'associé unique du 17 novembre 2016 au terme d'une transmission universelle de patrimoine prenant effet le 1er janvier 2016 et enregistrée au RCS de [Localité 29]. Ils ajoutent que la transmission universelle a été réalisée au profit de l'associé unique, la société RESSOURCETHICA.
43. Précisant que " la promotion des produits pharmaceutiques passait d'abord par la conclusion de contrat avec des laboratoires pharmaceutiques, que ces laboratoires commissionnaient la société prestataire sur la base des ventes réalisées de ses produits et que ces ventes étaient conclues grâce à des visiteurs médicaux qui rencontraient les médecins, les pharmaciens et les personnels des hôpitaux sur le territoire dévolu par le contrat (en l'espèce l'Afrique de l'ouest)' professionnels de santé qui commandaient ensuite les produits pharmaceutiques des laboratoires en question ", ils considèrent que cette explication " aurait permis de se rendre compte que l'activité salariée de Madame [Z] et de Monsieur [K] notamment, employés de PROPHARMED FRANCE d'abord et de RESSOURCETHICA ensuite, ne permettait pas, de [Localité 37], de développer cette activité. Bien évidemment, [F] [C], dirigeant de droit de la société PROPHARMED INTERNATIONAL et résidant en Côte d'Ivoire a le pouvoir d'engager cette société mais son travail est réalisé en Afrique avec ses commerciaux qui sont employés de la société suisse, lesquels développent le chiffre d'affaire de la société PROPHARMED INTERNATIONAL sur le marché africain ", ils soutiennent l'absence de relation de la société PROPHARMED INTERNATIONAL avec la France.
44. Ils contestent que la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL ne dispose pas en Suisse des ressources et compétences nécessaires à la promotion des produits pharmaceutiques et que son activité continue d'être assurée par les salariés de RESSOURCETHICA ou de PROPHARMED FRANCE et de son directeur général qui serait résident fiscal français en soutenant que :
- la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA est effectivement domiciliée en Suisse, en produisant un contrat de bail en date du 9 octobre 2003 relatif aux locaux sis [Adresse 6] à [Localité 28] (pièce n°89) ;
- la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA dispose d'une ligne téléphonique à l'adresse sise [Adresse 6] à [Localité 28] ;
- les bilans de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA révèlent que la société disposait au 31 décembre 2017 d'un effectif de 282 salariés (entre ceux du siège et les commerciaux africains, plus les deux mandataires sociaux), 301 au 31 décembre 2018, et 477 au 31 décembre 2019. La société PROPHARMED INTERNATIONAL communique la liste de ses effectifs et leur lieu d'exercice (pièce n°75) ;
- la société PROPHARMED INTERNATIONAL dispose d'une adresse de messagerie en Suisse et d'un nom de domaine PROPHARMED INTERNATIONAL appartenant à CIDER PROMOTION INTERNATIONAL SA (ancien nom de la société PROPHARMED INTERNATIONAL) et le nom de [P] [A] (salariée de PROPHARMED INTERNATIONAL) apparaît sur ce nom de domaine ainsi que l'adresse du siège [Adresse 6] à [Localité 28], sachant que ce nom de domaine a été enregistré le 11 septembre 2007 pour la première fois, soit avant que RESSOURCETHICA ne rachète cette filiale ;
- si les sociétés les sociétés PROPHARMED INTERNATIONAL et PROPHARMED FRANCE et RESSOURCETHICA ont des activités similaires (la promotion des produits des laboratoires pharmaceutiques), cette circonstance n'est pas déterminante car leurs territoires d'intervention sont différents ;
- le fait que les sociétés RESSOURCETHICA et PROPHARMED INTERNATIONAL aient un dirigeant commun est inhérent à la logique du groupe ;
- la réalité de l'activité, en Suisse de l'administrateur de PROPHARMED INTERNATIONAL, de son directeur général et de ses salariés en Suisse et en Afrique.
45. Les appelants concluent que l'ordonnance confond les salariés de PROPHARMED FRANCE et de RESSOURCETHICA. Ils indiquent que :
- les deux sociétés sont distinctes de par leur domaine d'intervention et PROPHARMED INTERNATIONAL a conclu des contrats de prestation de services avec PROPHARMED FRANCE et RESSOURCETHICA pour avoir accès à des services administratifs auprès des salariés de ces deux entités françaises ;
- jusqu'en 2016, " les salariés stigmatisés de RESSOURCETHICA comme étant les moyens humains développant le chiffre d'affaires de PROPHARMED INTERNATIONAL étaient des salariés de PROPHARMED France " ;
- ces salariés, une fois la transmission universelle de patrimoine réalisée, sont des salariés de RESSOURCETHICA, alors que des conventions de prestation de services étaient régulièrement conclues entre les différentes entités pour réaliser les prestations mises en cause par l'administration.
46. Ils estiment que le fait qu'une boîte aux lettres avec la mention " PROPHARMED INTERNATIONAL " apparaisse à l'adresse de RESSOURCETHICA à [Localité 37] n'emporte aucune présomption dès lors que toutes les sociétés composant le groupe RESSOURCETHICA ou l'ayant composé, qu'elles soient établies en France ou l'étranger, y sont indiquées.
47. Ils font valoir que la société PROPHARMED INTERNATIONAL dispose des moyens humains et matériels, en Suisse, permettant de réaliser son objet social, les pièces de l'ordonnance en cause indiquant que la société PROPHARMED INTERNATIONAL dispose de 4/5 salariés, en plus de ses deux dirigeants, son administrateur suisse et son directeur général ivoirien. Ils estiment que la société PROPHARMED INTERNATIONAL démontre qu'elle emploie des salariés en Suisse au siège mais également sur le continent africain (sous contrat de droit suisse).
48. Ils soutiennent, s'agissant des liens entre les sociétés EURAPHARMA, PROPHARMED INTERNATIONAL et RESSOURCETHICA, que :
- la société EURAPHARMA est associée de RESSOURCETHICA et détient 35% des parts ;
- la société française EURAPHARMA fait apparaître que celle-ci est " l'actionnaire de 23 sociétés en Afrique et notamment du premier grossiste répartiteur grâce à ses sociétés LABOREX qui est le leader dans la distribution de médicaments et produits parapharmaceutiques pour les pharmacies et les établissements agrées sur le territoire. Ainsi, chaque pays africain dispose d'une société appelée LABOREX qui est une filiale d'EURAPHARMA, pôle santé du groupe CFAO et EURAPHARMA est associée de RESSOURCETHICA à 35%. ".
49. Ils indiquent, s'agissant de l'activité de la société PROPHARMED INTERNATIONAL que la société perçoit des commissions par des laboratoires français pour son activité développée sur le territoire africain par le biais de son directeur général ivoirien et de ses 477 salariés de nationalité africaine répartis sur l'ensemble de l'Afrique de l'Ouest.
50. Ils considèrent qu'il n'est ni rapporté ni allégué la mise en place par la société RESSOURCETHICA d'un schéma frauduleux tendant à localiser ses bénéfices à l'étranger, et la structuration juridique reprise dans l'ordonnance de 2021 provient d'une situation de fait datant de puis de 12 ans.
51. Ils arguent que la présence d'une société travaillant à l'international au sein d'un groupe est " classique et parfaitement licite ".
52. Ils estiment que l'ordonnance querellée ne réalise aucune description, même succincte, de l'activité de PROPHARMED INTERNATIONAL et ne donne aucune indication sur la réalité économique, matérielle et légale du secteur concerné (les visiteurs médicaux) et de la nature de l'activité visée par les présomptions de fraude.
53. Ils indiquent qu'aucun élément présenté par l'administration ne démontre que la société PROPHARMED INTERNATIONAL réalise la totalité de son chiffre d'affaires en France et conteste que celui-ci puisse être déterminé à partir d'une extraction partielle des seules déclarations de commission réalisées par les laboratoires pharmaceutiques français.
54. Ils soutiennent que le fait que la société PROPHARMED INTERNATIONAL ait facturé en 2018 et 2019 une somme globale de 10.000.000 euros à la société EP DIS (implantée en France) ne suffit pas à établir la présomption alléguée.
55. Ils font valoir que certains contrats ont été signés avant que la société RESSOURCETHICA ne soit propriétaire de PROPHARMED INTERNATIONAL.
56. Ils contestent que la société PROPHARMED INTERNATIONAL ait été domiciliée en Suisse en raison de la fiscalité du pays.
57. Ils expliquent en ce sens que des contrats, conclus intuitu personae entre PROPHARMED INTERNATIONAL et ses clients français, sont antérieurs à 2009, date d'acquisition par RESSOURCETHICA de PROPHARMED INTERNATIONAL, que les conditions de révision de ces contrats au profit de la société RESSOURCETHICA seraient coûteuses et que la volonté de ne pas modifier le lieu d'implantation et la société prestataire de services, à savoir PROPHARMED INTERNATIONAL, résulte de l'économie et de la rémunération attachée à ces contrats historiques conclus par la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL.
58. Ils concluent que les moyens attribués à PROPHARMED INTERNATIONAL (équipe de 4/5 personnes, plus deux dirigeants, l'un suisse et l'autre ivoirien), apparaissent suffisants pour effectuer cette activité développée au moyen de 622 salariés officiant en Afrique.
59. En troisième lieu, les appelants soulèvent l'absence d'action ou d'omission entrant dans le champ de l'article L. 16B du LPF. Ils font valoir que :
- la société PROPHARMED INTERNATIONAL est seulement soumise au droit suisse et dépose régulièrement ses écritures comptables en suisse ;
- l'administration française peut avoir accès aux informations comptables de la société PROPHARMED INTERNATIONAL par l'effet des conventions bilatérales d'assistance administrative ;
- l'absence de dépôt de déclarations fiscales en France ne saurait à elle seule constituer une présomption d'absence de comptabilité justifiant la mise en 'uvre de la procédure de l'article L. 16B.
60. Ils considèrent que le juge des libertés et de la détention a commis une erreur de droit en retenant l'existence d'un établissement stable en France de la société PROPHARMED INTERNATIONAL alors qu'il est uniquement relevé que l'un des deux dirigeants a des avoirs en France et une insuffisance de moyens matériels et humains en Suisse. Ils soutiennent qu'à défaut " d'avoir repris les faits lui permettant de conclure à une absence totale de moyens humains et matériels en Suisse et à la présence d'un dirigeant unique résident fiscal français, elle ne pouvait conclure à la présomption d'un établissement stable en France par un centre décisionnel situé en France ".
61. Les appelants font valoir que la société PROPHARMED n'avait pas à déposer de comptabilité en France car elle n'y possède aucun établissement stable. Ils soutiennent que:
- la qualification d'un établissement stable ne repose pas sur la nationalité des clients de la société et dès lors, le fait que PROPHARMED INTERNATIONAL ait à déposer des déclarations en France ne peut résulter de la nationalité de ses clients ;
- le juge des libertés et de la détention a voulu faire application d'une jurisprudence du Conseil d'État pour qualifier un établissement stable d'une société de nationalité étrangère (CE, Ass. Plén. 11 déc. 2020, n°420174), qui ne permet pas de qualifier un établissement stable en France à l'égard de la société PROPHARMED INTERNATIONAL " qui s'entremet de manière transparente entre des laboratoires français (et étrangers) et des clients situés sur le continent africain " ;
- la société PROPHARMED INTERNATIONAL n'a pas d'établissement stable en France du fait qu'elle est le commissionnaire transparent de sociétés françaises ;
- le territoire d'intervention de la société PROPHARMED INTERNATIONAL est l'Afrique, PROPHARMED INTERNATIONAL conclut des contrats avec des clients français et étrangers qui précisent les territoires d'intervention, qui sont extérieurs à la France (pièce n°116) ;
- aucune prestation d'intermédiation n'est réalisée en France par la société PROPHARMED INTERNATIONAL pour le compte de ses clients français ou étrangers ;
- le fait d'avoir des clients français est insuffisant pour établir une présomption de prestation d'intermédiation sur le territoire français, démentie d'ailleurs par les termes du contrat obtenu dans le cadre du droit de communication par l'administration et ceux transmis par les présente ;
- la cour d'appel de Paris a jugé qu'une société de droit étranger qui a des clients français mais qui intervient sur des territoires étrangers contredit l'affirmation du juge des libertés et de la détention de présomption de prestation de consultant sur le territoire français (cour d'appel Paris, pole 5, chambre 15, 2 février 2022, n°21/10621) alors qu'en l'espèce, le juge des libertés et de la détention a relevé un contrat entre la société PROPHARMED INTERNATIONAL et la société DAIKO, annexé à la requête, qui indiquait un territoire d'intervention au Bénin, Burkina Faso, Cameroun, Centrafrique, Congo RDC, Côte d'Ivoire, Gabon, Mali, Niger, Sénégal, Tchad, Togo en Guinée, et Mauritanie et non en France ;
- la cour d'appel de Rennes a considéré que le fait que des sociétés filiales d'une même société mère aient des activités similaires n'est pas déterminant, les requérants expliquant que l'une exerce son activité en France et l'autre à l'international (CA Rennes, 8 déc. 2020, n°19/05184) ;
- en l'espèce, la société PROPHARMED INTERNATIONAL a des clients français mais ne réalise aucune prestation en France pour ces clients, " l'administration ne démontre pas en quoi les prestations réalisées en France pour des clients français seraient majoritaires ", si les sociétés PROPHARMED INTERNATIONAL et RESSOURCETHICA ont des activités similaires, la première intervient sur le marché africain, la seconde sur le marché français " alors même qu'elles auraient les mêmes clients français et étrangers " ;
- " l'administration agite le chiffre de 43.000.000 euros de chiffre d'affaires réalisé sur 10 ans avec des clients français, sauf à rappeler notamment que la société suisse a déclaré des résultats largement déficitaires en 2015 et 2016 avec des pertes respectives de 415.407 francs suisse en 2015 et de 1.939.304 francs suisses en 2016 ".
62. Ils arguent que, sans moyens matériels et humains en France, la société PROPHARMED INTERNATIONAL ne peut pas avoir d'établissement stable en France et qu'en 2022, la société RESSOURCETHICA a licencié ses salariés et ses bureaux de [Localité 37] ont été fermés.
63. La DNEF, dans ses écritures du 24 octobre 2024 et à l'audience a répliqué en concluant à la confirmation de l'ordonnance et au rejet de toutes les demandes.
64. S'agissant de la décision de la Cour de cassation du 11 octobre 2023, l'administration fiscale considère que, si elle doit respecter les règles du RGPD lorsqu'elle produit, pour justifier sa demande, des données issues de bases de données ou de sites d'accès public, elle n'a cependant pas l'obligation de fournir à la personne concernée les informations prévues à l'article 14 de ce règlement si sont réunies les conditions de l'exception prévue au paragraphe 5 de ce texte ou des limitations prévues à l'article 23 telles que mises en 'uvre par l'article 48 de la loi du 6 janvier 1978.
65. S'agissant de la violation alléguée des règles relatives à la protection des données personnelles, l'administration fiscale considère qu'il convient de distinguer deux types de traitements de données (direct et indirect) mis en 'uvre par l'administration fiscale lorsqu'elle a préparé la requête aux fins d'autorisation de procéder à une visite domiciliaire.
66. D'une part, sur les données collectées directement auprès des contribuables, soumises à l'article 13 du RGPD, la DNEF estime que l'obligation d'information est satisfaite par le renvoi au site internet gouvernemental de l'administration fiscale et qu'en conséquence, les informations extraites sont licites et ne peuvent entraîner l'annulation de l'ordonnance comme l'a jugé la Cour d'appel de Paris (CA Paris, 3 mars 2021, n°19/09947). En outre, selon elle, les appelants ne peuvent remettre en cause le format adopté pour informer les personnes concernées de leurs droits, information qui peut intervenir par voie électronique aux termes de l'article 12 du RGPD.
67. D'autre part, s'agissant des données collectées indirectement auprès des contribuables, la DNEF soutient que le paragraphe 5 de l'article 14 du RGPD prévoit deux séries d'exceptions, notamment lorsque l'obligation d'information nécessiterait, pour son débiteur, de déployer des efforts disproportionnés (article 14, paragraphe 5, b).
68. Elle estime qu'elle n'a en outre pas l'obligation de fournir à la personne concernée les informations prévues à l'article 14 de ce règlement si sont réunies les conditions des limitations prévues à l'article 23. Selon l'administration, cette obligation ne s'applique pas car :
- aux termes de l'article 23 du RGPD, transposé en droit interne aux alinéa 4 et 5 de l'article 48 de la loi du 6 janvier 1978, dans la mesure où elle est susceptible de rendre impossible ou de compromettre gravement la réalisation des objectifs du traitement ;
- aux termes de l'article 23 du RGPD, l'Etat membre peut limiter la portée de cette obligation lorsqu'une telle limitation respecte l'essence des libertés et droits fondamentaux et qu'elle constitue une mesure nécessaire et proportionnée dans une société démocratique pour garantir la prévention et la détection des infractions pénales, les enquêtes et les poursuites en la matière et d'autres objectifs importants d'intérêt public général d'un état membre, notamment un intérêt économique ou financier important, y compris dans les domaines monétaire, budgétaire et fiscal.
69. Elle considère qu'en l'espèce, la préparation de la requête a conduit à appréhender les données de sociétés en relation d'affaires avec PROPHARMED INTERNATIONAL, notamment les salariés de RESSOURCETHICA sans que ces derniers n'aient à recevoir d'informations sur la collecte de données en cours sauf à compromettre la mise en 'uvre de la visite domiciliaire.
70. S'agissant de la violation alléguée du principe de proportionnalité, l'administration fiscale soutient qu'aucun texte n'impose le recours à d'autres modes de preuves ou procédures, l'existence de présomption de fraude suffisant à mettre en 'uvre la procédure de l'article L. 16B du LPF.
71. S'agissant du " traitement de masse " des données personnelles, l'administration fiscale soutient être fondée à rassembler des données lorsqu'elle prépare une requête aux fins d'autoriser une visite domiciliaire, qu'elle est également fondée à recueillir des informations tirées de la consultation de sites d'accès publics, et qu'elle n'a procédé à aucune collecte d'informations qui soit automatique, massive, préalable et en dehors de toute suspicion de fraude mais a procédé à des consultations ciblées sur des sites publics.
72. Sur la résidence fiscale de Monsieur [C], l'administration fiscale soutient que:
- les éléments retenus par le juge des libertés et de la détention ne visent pas à établir la résidence fiscale de Monsieur [C] mais permettent de présumer de la présence régulière de ce dernier sur le territoire national et en conséquence, du centre décisionnel de la société PROPHARMED INTERNATIONAL en France ;
- l'avis de redressement du 4 mai 2023 (pièce n°23) ne contredit pas l'argumentation de l'administration entendant attester de la résidence régulière de Monsieur [C] en France. L'administration ajoute que l'existence des présomptions s'apprécie à l'aune des éléments soumis au juge de l'autorisation et non d'éléments postérieurs ;
73. Sur la localisation, en France, du centre décisionnel de PROPHARMED INTERNATIONAL, l'administration fiscale fait valoir que :
- la société PROPHARMED INTERNATIONAL est dirigée par la société française RESSOURCETHICA SCA, son actionnaire à 99,99% et de manière effective par Monsieur [C] ;
- le contrat de travail produit en pièce n°115 devant la cour d'appel avant le renvoi après cassation (pièce depuis retirée de la liste des pièces des appelants et produite par l'administration en pièce n°5) concerne Madame [ZU] [Z] qui travaille en France pour RESSOURCETHICA et PROPHARMED France. Les appelants ne démentent pas que Madame [Z] était salariée de ces dernières mais qu'elle travaillait pour PROPHARMED INTERNATIONAL. Selon l'administration, le recours à des sociétés tierces pour réaliser des prestations de services confirme que la société PROPHARMED INTERNATIONAL n'a pas de consistance en Suisse ;
- l'absence de salariés au sein de la société RESSOURCETHICA depuis 2022 ne remet pas en cause les présomptions pour les années antérieures ;
74. Sur la caractérisation des conditions posées par l'article L. 16B du LPF, l'administration fiscale soutient que :
- l'ordonnance du juge des libertés et de la détention fait référence à des " moyens humains et matériels limités en Suisse " ;
- la chambre commerciale de la Cour de cassation rappelle que l'article L. 16B du LPF exige de simples présomptions (Cass. Com. 9 mars 2010, n°09-13.829) ;
- les appelants ne contestent pas les éléments retenus par le juge des libertés et de la détention permettant de présumer que la présence de Monsieur [U] [M] au poste d'administrateur de la société PROPHARMED INTERNATIONAL visait seulement à satisfaire l'exigence formelle de présence d'un administrateur de nationalité suisse ;
- les appelants ne contestent pas les éléments retenus par le juge des libertés et de la détention permettant de présumer que le pouvoir décisionnel de la société était concentré entre les mains de Monsieur [C] ;
- sur la période postérieure à juin 2016, la société ne justifie pas d'une occupation effective des locaux sis en Suisse et il ressort des éléments retenus par le juge de l'autorisation que la société PROPHARMED INTERNATIONAL utilise notamment le personnel de la société française RESSOURCETHICA afin de réaliser son objet social auprès des laboratoires français ;
75. Sur la prétendue absence d'acte ou d'omission entrant dans le champ de l'article L. 16B du LPF, l'administration fiscale soutient que :
- l'administration fiscale n'est pas tenue de solliciter les autorités fiscales suisses dans le cadre de l'assistante administrative internationale ;
- il résulte de la jurisprudence de la Cour de cassation que pouvaient être relevées des présomptions relevant des articles 1741 (fraude fiscale) ou 1743 (délit comptable) du CGI pour la mise en 'uvre de l'article L. 16B du LPF (Cass. Com. 10 fév. 1998, n°95-30.221; Cass. Com. 20 nov. 2019, n°18-15.423) ;
- l'ordonnance citée par l'appelante a été annulée par la Chambre commerciale de la Cour de cassation le 15 février 2023 (Cass. Com. 15 fév. 2023, n°20-20.600) ;
- il n'est pas reproché à PROPHARMED INTERNATIONAL de ne pas tenir de comptabilité en France mais que les opérations développées par cette dernière en France n'ont pas donné à une passation d'écritures comptables régulières par cette succursale, la qualification juridique sur le fond n'intervient que postérieurement dans le cadre d'une éventuelle procédure devant le juge de l'impôt.
76. Par courriel adressé par message RPVA le 3 juillet 2025, le conseil des appelants a adressé à la juridiction une note en cours de délibéré 'compte tenu des récentes jurisprudences des juges du fond sur ce même type de dossier' pour réitérer sa demande d'annulation de l'ordonnance.
77. Par courriel adressé par message RPVA le 4 juillet 2025, le conseil de la DNEF a demandé à la juridiction d'écarter cette note en application de l'article 445 du code de procédure civile au motif qu'aucune note en délibéré n'a été sollicité par la juridiction. Sur le fond, elle a fait également état d'une jurisprudence récente et réitérer sa demande de confirmation de l'ordonnance.
Sur ce, le magistrat délégué :
Sur les notes adressées par les parties en cours de délibéré
78. En application de l'article 444 du code de procédure civile, "le président peut ordonner la réouverture des débats. Il doit le faire chaque fois que les parties n'ont pas été à même de s'expliquer contradictoirement sur les éclaircissements de droit ou de fait qui leur avaient été demandés.
En cas de changement survenu dans la composition de la juridiction, il y a lieu de reprendre les débats".
79. En application de l'article 445 du code de procédure civile, "après la clôture des débats, les parties ne peuvent déposer aucune note à l'appui de leurs observations, si ce n'est en vue de répondre aux arguments développés par le ministère public, ou à la demande du président dans les cas prévus aux articles 442 et 444".
80. En l'espèce, aucune note en délibéré de la part des parties à la procédure n'a été sollicitée par la présente juridiction après la clôture des débats et le ministère public n'est pas intervenu à la procédure.
81. En conséquence, les deux notes adressées en délibéré, après la clôture des débats, sans aucune demande du président, seront déclarées irrecevables.
Sur l'illicéité des pièces visées par les appelants
82. Les appelants concluent à l'illicéité des pièces annexées à la requête soumise au juge des libertés et de la détention pour obtenir l'autorisation d'effectuer une visite domiciliaire aux motifs tirés de la violation du Règlement (UE) 2016/679 relatif à la protection des données personnelles des personnes physiques, de la disproportion dans le contrôle du juge, du traitement de masse des données personnelles et de leur communication à des tiers.
Sur la violation du Règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil, du 27 avril 2016, relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données (Règlement général sur la protection des données"RGPD")
83. Les appelants font grief à la DNEF, en annexant 64 pièces à sa requête, dont 19 pièces relatives à des personnes physiques et provenant soit de traitements généraux crées par l'administration fiscale soit de traitements sui generis de données issues de recherches sur des bases de données ou des sources d'accès public, pour les besoins spécifiques de son enquête à l'égard de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA, d'avoir violé le Règlement général sur la protection des données, dans la mesure où elle n'aurait pas rempli son obligation d'information dans le cadre de la collecte directe et de la collecte indirecte de données personnelles de personnes physiques.
Ils concluent au caractère illicite de ces 19 pièces dont ils dressent la liste sur les 64 pièces annexées à la requête et en conséquence à l'annulation de l'ordonnance fondée sur des pièces illicites.
84. Ils soutiennent qu'en l'espèce, ces 19 pièces, concernant des personnes physiques, ont été reprises dans le cadre de l'ordonnance querellée sans faire l'objet d'aucun contrôle par le juge des libertés et de la détention au motif qu'aucune d'entre elles ne porte la mention PROPHARMED INTERNATIONAL et dont certaines sont sans intérêt pour la procédure de visite domiciliaire de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA.
85. Ils font ainsi valoir que la collecte, la communication et l'usage de ces 19 pièces par la DNEF constitutives de traitement relevant de l'application du RGPD ainsi que l'usage qui en a été fait par le juge des libertés et de la détention ne respectent pas la vie privée et ne sont ni équilibrés ni proportionnés.
86. La DNEF réplique, s'agissant des données qu'elle collecte directement et traite dans des fichiers comme le fichier ADONIS, fichier d'accès au dossier fiscal des particuliers, créé par l'arrêté du 5 avril 2002 dont l'information est accessible au public, que cet arrêté prévoit la durée de conservation des données et que les autres informations ont fait l'objet d'une information complémentaire sur le site gouvernemental impots.gouv.fr, qui est accessible librement par toute personne équipée d'une connexion internet.
87. Elle soulignent que figurent en bas de la page d'accueil du site internet gouvernemental d'une part une page relative à la "Confidentialité / Informations personnelles" où il y est précisé notamment les mentions obligatoires (pièce n°2) et d'autre part, et surtout, sur la page précitée, est disponible un document PDF de 45 pages, intitulé "CONFIDENTIALITÉ ET PROTECTION DES DONNÉES", qui rappelle l'ensemble des mentions informatives requises de manière détaillée (pièce n° 3) et notamment, la durée de conservation des données, aux finalités des traitements, ... ainsi la déclinaison des informations relatives à chaque catégorie de traitements et des mentions sur les différents fichiers utilisés par l'Administration fiscale (FICOBA, ADONIS, ').
88. Elle soutient que l'administration fiscale a fait le choix d'un document d'une quarantaine de pages en ligne, accessible à tous sur un site gouvernemental, comportant les informations obligatoires à porter à la connaissance des contribuables en matière de protection des données, recense l'ensemble des nombreux traitements réalisés par la Direction Générale des Finances publiques, que c'est d'ailleurs sur ce site que les personnes physiques et les personnes morales effectuent leurs formalités fiscales, notamment la déclaration de revenus annuelle, opération durant laquelle le contribuable peut consulter une notice de deux pages intitulée « Document de présentation du traitement des données dans le cadre de la déclaration de revenu » (pièce n° 4), cette notice étant accessible au début de la déclaration fiscale en ligne.
89. En conséquence, elle conclut que l'administration fiscale a respecté son obligation d'information auprès des personnes concernées dans le cadre de la collecte directe de données et que les informations extraites des fichiers sont donc parfaitement licites et ne peuvent entraîner l'annulation de l'ordonnance.
90. S'agissant des données qu'elle collecte indirectement, comme les extraits de profils LinkedIn relatifs aux salariés de la société RESSOURCETHICA, elle conclut à l'application de l'article 14 paragraphe 5 du RGPD au motif qu 'il est évident que lorsque l'Administration fiscale prépare une requête aux fins de solliciter une autorisation pour mener une visite domiciliaire (et collecte ainsi, à cette fin, des données personnelles), il n'est pas question d'avertir les personnes citées dans la requête de la préparation d'une telle opération, au risque d'en compromettre gravement la réalisation'.
Elle ajoute que 'La préparation de la requête a immanquablement conduit à appréhender les données de sociétés en relation d'affaires avec PROPHARMED INTERNATIONAL, à savoir les salariés de RESSOURCETHICA, sans que ces derniers n'aient à recevoir d'information sur la collecte de données en cours, sauf à compromettre la mise en oeuvre de la visite domiciliaire. '
91. En conséquence, elle fait valoir qu'il est inexact d'indiquer que l'administration fiscale a manqué à l'obligation d'informer les personnes concernées dans le cadre de la collecte indirecte de données et que les informations extraites des fichiers sont donc parfaitement licites et ne peuvent entraîner l'annulation de l'ordonnance.
92. Selon l'article 2 du Règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil, du 27 avril 2016, relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, et abrogeant la directive 95/46/CE (règlement général sur la protection des données, "RGPD"), 'le présent règlement ne s'applique pas au traitement de données à caractère personnel effectué :
a) dans le cadre d'une activité qui ne relève pas du champ d'application du droit de l'Union ;
b) par les États membres dans le cadre d'activités qui relèvent du champ d'application du chapitre 2 du titre V du traité sur l'Union européenne ;
c) par une personne physique dans le cadre d'une activité strictement personnelle ou domestique ;
d) par les autorités compétentes à des fins de prévention et de détection des infractions pénales, d'enquêtes et de poursuites en la matière ou d'exécution de sanctions pénales, y compris la protection contre des menaces pour la sécurité publique et la prévention de telles menaces.'
93. L'article L. 16B du livre des procédures fiscales a pour objectif de rechercher la preuve des agissements selon lesquels un contribuable se soustrait à l'établissement ou au paiement des impôts sur le revenu ou sur les bénéfices ou des taxes sur le chiffre d'affaires en se livrant à des achats ou à des ventes sans facture, en utilisant ou en délivrant des factures ou des documents ne se rapportant pas à des opérations réelles ou en omettant sciemment de passer ou de faire passer des écritures ou en passant ou en faisant passer sciemment des écritures inexactes ou fictives dans des documents comptables dont la tenue est imposée par le code général des impôts.
94. La réalisation de l'objectif ainsi poursuivi est atteinte par une décision prise par l'autorité judiciaire, à la demande de l'administration fiscale, qui autorise les agents de l'administration des impôts à effectuer des visites en tous lieux, même privés, où les pièces et documents s'y rapportant sont susceptibles d'être détenus ou d'être accessibles ou disponibles et procéder à leur saisie, quel qu'en soit le support.
95. Ces visites sont autorisées par une ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire dans le ressort duquel sont situés les lieux à visiter, rendue non contradictoirement. L'ordonnance est exécutoire au seul vu de la minute et est notifiée verbalement et sur place au moment de la visite, à l'occupant des lieux ou à son représentant qui en reçoit copie intégrale contre récépissé ou émargement au procès-verbal prévu au IV du même article. L'ordonnance peut faire l'objet d'un appel devant le Premier président de la cour d'appel dans le ressort de laquelle le juge a autorisé la mesure.
96. Le traitement de données à caractère personnel mis en oeuvre par l'administration fiscale aux fins d'obtenir l'autorisation de procéder à des opérations de visite et saisie sur le fondement de l'article L.. 16B du livre des procédures fiscales, qui a pour finalité d'obtenir le droit de procéder à une mesure d'enquête pouvant donner lieu à la constatation d'une infraction ou d'un manquement à la législation fiscale, dans le but de percevoir l'impôt et de lutter contre la fraude fiscale, entre dans le champ d'application matériel du RGPD.
97. Selon l'article 13 dudit règlement, 'lorsque des données à caractère personnel sont collectées directement auprès de la personne concernée, les informations à lui fournir sont les suivantes : identité du responsable de traitement, coordonnées du délégué à la protection des données, finalités et base juridique du traitement, intérêts légitimes poursuivis par le responsable lorsque le traitement est fondé sur cette base légale, destinataire des données et éventuelle possibilité de transferts, durée de conservation, possibilité d'en demander l'accès, la rectification ou l'effacement, droit d'introduire une réclamation auprès d'une autorité de contrôle, conséquences éventuelles de la non-fourniture de ces données, existence éventuelle d'une prise de décision automatisée, informations relatives à une autre finalité éventuelle.'
98. Selon le paragraphe 5 de l'article 14 dudit règlement, relatif aux informations à fournir lorsque les données à caractère personnel n'ont pas été collectées auprès de la personne concernée, "les paragraphes 1 à 4 du même article ne s'appliquent pas lorsque et dans la mesure où : b) la fourniture de telles informations se révèle impossible ou exigerait des efforts disproportionnés, (...) ou dans la mesure où l'obligation visée au paragraphe 1 du présent article est susceptible de rendre impossible ou de compromettre gravement la réalisation des objectifs dudit traitement."
99. Dès lors, le juge des libertés et de la détention, saisi d'une requête sur le fondement de l'article L.16B du LPF, doit notamment vérifier si, dans le litige qui lui est soumis, le responsable du traitement est tenu de fournir à la personne concernée les informations prévues à son article 14 ou si sont réunies les conditions des exceptions ou limitations à cette obligation d'information qu'il prévoit.
100. En l'espèce, s'agissant des 19 pièces pour lesquelles les appelants soulèvent l'illicéité pour défaut de traitement conforme au RGPD par l'administration fiscale, il convient de relever qu'elles sont composées des informations provenant à la fois de bases de données traitées par l'administration fiscale telles ADONIS ou FICOBA (attestations sur compte fiscal, n°30, 46, 51, 53, 55, 60 et fichiers Ficoba pièce n°38 et Canopée pièce n°50-1) et de sites d'accès public tels les éléments relatifs aux activités de Monsieur [M], avocat, de nationalité suisse et résident suisse, administrateur de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA ( pièces 6 et 7), les profils LinkedIn de salariés de la société RESSOURCETHICA ( pièces n° 22, 41, 44, 54, 59, 61-1, 61,) une attestation de constat visuel (pièce n°50) et une information légale (pièce n°52).
101. S'agissant des pièces composées des informations provenant de bases de données traitées par l'administration fiscale telles ADONIS ou FICOBA (attestations sur compte fiscal, n°30, 46, 51, 53, 55, 60 et fichiers Ficoba pièce 38 et Canopée pièce 50-1), il convient de constater que la DNEF justifie du respect des dispositions de l'article 13 du RGPD avec la production, notamment, de la notice relative à la confidentialité et la protection des données, mise à disposition des contribuables lors de leur déclaration de revenus en ligne et du document de présentation du traitement des données sur le site internet de la DGFIP et ainsi lors de la collecte directe de leurs données. (pièces n°3 et 4 de la DNEF).
102. Dès lors, les pièces composées d'attestations sur compte fiscal, n°30, 46, 51, 53, 55, 60 et les fichiers Ficoba, pièce n°38 et Canopée pièce n°50-1, provenant de traitement de données collectées directement par l'administration avec l'information prévue par l'article 13 du RGPD pour les contribuables, sont donc licites.
103. S'agissant des pièces composées des informations provenant de sites d'accès public tels les éléments relatifs aux activités de Monsieur [M], avocat, de nationalité suisse et résident suisse, administrateur de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA (pièces 6 et 7), les profils LinkedIn de salariés de la société RESSOURCETHICA (pièces 22, 41, 44, 54, 59, 61-1, 61,) il convient de constater qu'elles relèvent des dispositions de l'article 14 du RGPD en ce qu'elles n'ont pas été collectées directement par l'administration fiscale.
104. La DNEF qui ne conteste pas avoir collecté ces informations indirectement, reconnaît l'application de l'article 14 du RGPD mais invoque le paragraphe 5 dudit article qui dispose 'les paragraphes 1 à 4 du même article ne s'appliquent pas lorsque et dans la mesure où : b) la fourniture de telles informations se révèle impossible ou exigerait des efforts disproportionnés, (...) ou dans la mesure où l'obligation visée au paragraphe 1 du présent article est susceptible de rendre impossible ou de compromettre gravement la réalisation des objectifs dudit traitement'.
105. Si l'article 14 du RGPD soumet le responsable du traitement à l'obligation de fournir un certain nombre d'informations à la personne concernée lorsque les données à caractère personnel n'ont pas été collectées auprès d'elle, il résulte du paragraphe 5 de ce texte que cette obligation ne s'applique pas dans la mesure où elle est susceptible de rendre impossible ou de compromettre gravement la réalisation des objectifs dudit traitement.
106. Tel est bien le cas en l'espèce. La DNEF, qui a sollicité une autorisation d'une visite domiciliaire, auprès du juge des libertés et de la détention, pour rechercher si la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA recourait au personnel de la société RESSOURCETHICA, justifie de la nécessité de ne pas informer lesdits salariés afin de ne pas compromettre la mise en oeuvre de la visite domiciliaire, lesdits salariés étant susceptibles d'en informer leur employeur, la société RESSOURCETHICA détenant 99,99 % de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA.
107. Leur employeur, la société en commandite par action, RESSOURCETHICA, dont la gérance est assurée par la société AFRIGESTION dont le gérant unique est Monsieur [C], détient 99,99 % du capital de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA dont la direction générale est également assurée par Monsieur [C].
108. Ces liens étroits entre les deux sociétés ne garantissent pas que les salariés auraient gardé le secret et n'auraient pas informé leur employeur, la société RESSOURCETHICA, si l'administration fiscale les avait informés du traitement de leur profil sur LinkedIn. Bien au contraire, ces liens rendent hautement probables le fait que la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA aurait été informée par les salariés concernés.
109. En effet, d'anciennes salariées de la société PROPHARMED FRANCE absorbée par la société RESSOURCETHICA, et visées par les pièces n°54, 59, 61, 61-1, ayant des fonctions de responsable commercial et marketing, de responsable administratif et financier et de responsable qualité et conformité au sein de la société RESSOURCETHICA, si elles avaient fait l'objet d'une information par l'administration fiscale du traitement de leur profil LinkedIn, dans le cadre d'une enquête fondée sur l'article L.16B, étaient susceptibles d'en informer leur employeur, la société RESSOURCETHICA.
110. Il en est de même, de Monsieur [M], visé par les pièces n° 6 et 7, en raison de sa fonction d'administrateur unique de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA, qui, s'il avait fait l'objet d'une information par l'administration fiscale du traitement de sites internet comportant mention de ses mandats d'administrateurs, dans le cadre d'une enquête fondée sur l'article L.16B, était susceptible d'en informer Monsieur [C], directeur général de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA.
111.Il en est de même de Madame [R] [C], visée par la pièce n°44, exerçant des fonctions au sein de la société la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA qui, si elle avait fait l'objet d'une information par l'administration fiscale du traitement de son profil LinkedIn dans le cadre d'une enquête fondée sur l'article L.16B, était susceptible d'en informer, Monsieur [C], en raison de leurs liens familiaux.
112. Tel est également le cas de Monsieur [Y], visé par la pièce n°52, compagnon de Mme [R] [C], qui, s'il avait fait l'objet d'une information par l'administration fiscale du traitement des informations tirées du site 'infolegale.fr', dans le cadre d'une enquête fondée sur l'article L.16B, était susceptible d'en informer Mme [R] [C].
113. Enfin, s'agissant de la pièce n°50, outre qu'il ne saurait être fait grief à l'administration d'avoir produit, au soutien de sa demande, des attestations établies par ses agents, dès lors qu'elle peut se fonder, pour rechercher la preuve d'une fraude fiscale, sur des éléments régulièrement constatés par elle, le traitement, à supposer établi, des informations recueillies par constat visuel d'un de ces agents au domicile personnel de Monsieur [Y] et produites à l'appui d'une requête sur le fondement de l'article L. 16B du LPF, relève de l'exception prévue par l'article 14 paragraphe 5 dans la mesure où leur communication préalable aux opérations de visite à Monsieur [Y], compagnon de Mme [R] [C], est susceptible de rendre impossible ou de compromettre gravement la réalisation des objectifs dudit traitement.
114. Ainsi, l'exception B prévue à l'article 14, paragraphe 5, du RGPD s'applique en l'espèce, dès lors que la communication de l'information prévue au paragraphe 1 du même article aux personnes visées par ces 19 pièces, avant le déroulement des opérations de visite et saisies induirait un risque de dépérissement, voire de disparition des preuves et, par suite remettrait en cause l'efficacité desdites opérations, pour ne pas dire leur intérêt, qui repose sur l'absence d'information préalable des personnes physiques visées par lesdites visites domiciliaires et, partant, cette communication compromettrait gravement la réalisation de l'objectif poursuivi par l'article L. 16B du livre des procédures fiscales rappelé ci-dessus de lutter efficacement contre la fraude fiscale.
115. Ainsi, il convient de constater que la DNEF n'avait pas l'obligation de fournir aux personnes visées par les pièces n° 6, 7, 22, 41, 44, 54, 59, 61-1, 61, les informations prévues à l'article 14 de ce règlement, les conditions de l'exception prévue au paragraphe 5 de ce texte étant réunies.
116. En conséquence, l'administration a pu produire, auprès du juge des libertés et de la détention les pièces n° 6, 7, 22, 30, 38, 41, 44, 46, 50, 50-1, 51, 52, 53, 54, 55, 59, 60, 61-1, 61 à l'appui de sa requête ainsi que l'ensemble des autres pièces, soit au total 64 pièces et aucune origine illicite desdites pièces produites tirée d'une violation du RGPD ne peut être soulevée en l'espèce.
117. Cette branche du moyen sera en conséquence rejetée.
Sur la proportionnalité du contrôle du juge
118. En l'espèce, les appelants concluent à l'absence de contrôle de proportionnalité quant à l'autorisation de la visite domiciliaire en ce que le juge des libertés et de la détention a violé le principe de proportionnalité en retenant des pièces illicites de nature à porter atteinte à la vie privée de salariés de la société RESSOURCETHICA, de Madame [R] [C], de Monsieur [Y], outre l'inviolabilité de leur domicile, et de Madame [HW] [S] épouse [C].
119. Ils concluent, s'agissant des salariés de la société RESSOURCETHICA que des informations personnelles ont été révélées de même que des données personnelles issues des traitements ADONIS, FICOBA et SIR communiquées à leur employeur et d'autres entités privées.
120. Ils concluent que, s'agissant de Madame [R] [C] et de Monsieur [Y], l'attestation établie et signée le 12 janvier 2021 par Monsieur [N] [V], Inspecteur des Finances Publiques, à partir d'opérations visuelles opérées le 11 janvier 2021 dans le hall d'entrée sis [Adresse 18] concernant Madame [C] [R], pièce n°50, et les informations recueillies sur l'activité de Monsieur [Y], qui révèlent des informations personnelles, sont sans intérêt pour la procédure de visite domiciliaire de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA.
121. Ils concluent, s'agissant de Mme [S] épouse [C], que ses données personnelles et fiscales, ainsi révélées, portent atteinte à sa vie privée et sont sans intérêt pour la procédure de visite domiciliaire de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA.
122. Ils font valoir en page 11 de leurs écritures 'l'Article 4 de l'Arrêté du 5 avril 2002 prévoit que les données relatives au 'dossier fiscal des particuliers' (ADONIS) soient archivées 'au début de la 4eme année suivant l'année d'imposition', et l'Article 3 de l'Arrêté du 14 juin 1982 relatif au système FICOBA, dans sa version en vigueur lors de la fermeture des comptes, prévoyait une durée de conservation de trois ans après la clôture du compte des personnes physiques'.
123. Ils concluent qu''en l'espèce, les données relatées au titre de Madame [S] remontent a plus de 4 ans et celles de FICOBA sont encore plus anciennes...... Il est argué que la volumétrie et la diversité des données personnelles collectées au cas particulier révèlent que la Direction Nationale d'Enquêtes Fiscales a procédé a un traitement de masse, collectant des données personnelles publiquement accessibles, sans en posséder le fondement légal. Le traitement ainsi effectue est donc illicite et il en est par conséquent de même des pièces produites par l'Administration.'
124. S'agissant de ce point de la conservation des données des fichiers ADONIS et FICOBA relatifs à Mme [S] épouse [C], la DNEF rappelle que l'article 3 de l'arrêté du 14 juin 1982 (fichier FICOBA) indique que « Ces données sont conservées dix ans révolus après l'enregistrement de la clôture du compte que le titulaire soit une personne physique ou une personne morale » (dernière modification par l'arrêté du 26 octobre 2020, soit avant l'ordonnance du 1er février 2021) et que l'article 4 de l'arrêté du 5 avril 2002 (fichier ADONIS) indique que « Toutefois, un délai de conservation prolongé, égal à la durée prévue par les textes justifiant cette prolongation, leur est appliqué dans les cas suivants : / - l'avis d'imposition peut faire l'objet d'une reprise après le délai général de prescription ; / (') / - la période d'imposition a donné lieu à une imposition supplémentaire, une imposition primitive pénalisée ou imposée tardivement ».
125. Elle ajoute qu''il est encore précisé à l'article 4 que : « De même, les données visées au I de l'article 3 peuvent être conservées au-delà du délai fixé par le I du présent article à l'initiative du service en charge du dossier concerné, notamment en cas de contentieux sur l'assiette et le recouvrement de l'impôt, de contrôle en cours » (dernière modification par l'arrêté du 27 février 2006) ".
126. Elles souligne que ces fichiers sont « alimentés » au fur et à mesure du temps par les données que les contribuables déclarent à l'administration fiscale et qu'ainsi les durées de conservation des données de Mme [S] épouse [C] ont été respectées.
127. Pour le reste, la DNEF relève que, dans leurs développements relatifs au manquement allégué de l'administration fiscale à l'obligation d'information de l'article 14 du RGPD, les appelants semblent faire valoir que la production des données personnelles de personnes physiques serait disproportionnée dans le cadre d'une suspicion de fraude visant la société PROPHARMED. '
128. Elle rétorque que, 'contrairement à ce qu'indiquent les appelants, ces données concernent des personnes en lien avec la société PROPHARMED (dirigeants, salariés, '), ou des personnes physiques liées à des sociétés en relation d'affaires ou en relation capitalistique avec la société PROPHARMED et que ces données personnelles sont donc pertinentes pour évoquer les suspicions de fraude visant PROPHARMED'.
129. Elle déclare que 'Dès lors qu'existent des présomptions d'agissements de fraude, la procédure de visite domiciliaire était justifiée en ce qu'elle permettait de rechercher la preuve de ces agissements et ainsi d'accéder à des documents de gestion quotidienne de l'entreprise ou relatifs à l'organisation interne, que le contribuable n'a pas l'obligation de remettre dans le cadre d'une procédure de contrôle classique'.
130. Elle en conclut qu'il ne peut être reproché à l'administration d'avoir fait usage de la procédure prévue par l'article L.16 B du Livre des procédures fiscales, au détriment d'une procédure de contrôle inopiné ou de droit de communication.
131. Il convient de rappeler que les dispositions de l'article L.16B du livre des procédures fiscales qui énoncent que les agents de l'administration disposent d'un droit de visite et de saisie visent à conforter les présomptions selon lesquelles un contribuable s'est soustrait frauduleusement à l'établissement ou au paiement de l'impôt. Cette mesure, prévue par cette même disposition, est encadrée par des règles de fond et procédurales et, notamment, ces visites sont autorisées par une ordonnance du juge des libertés et de la détention, qui même si elle est rendue non contradictoirement, peut faire l'objet d'un appel devant le premier président de la cour d'appel, de même que le déroulement des opérations de visite et de saisie, la décision du premier président de la cour d'appel pouvant faire l'objet d'un pourvoi.
132. Il résulte des dispositions de l'article L. 16B du livre des procédures fiscales et de la jurisprudence constante que le juge des libertés et de la détention peut autoriser des visites mêmes dans des lieux privés, où des pièces et documents s'y rapportant sont susceptibles d'être détenus ou d'être accessibles ou disponibles et procéder à leur saisie, quel qu'en soit le support.
133. En outre, il est de jurisprudence établie qu'aucun texte n'impose au juge de vérifier si l'administration pouvait recourir à d'autres procédures moins intrusives (Cass. com., 26 octobre 2010, n° 09-70.509). En outre, l'article L. 16B du livre des procédures fiscales n'exige pas que les agissements présumés revêtent un caractère de gravité particulière (Cass. crim., 10 septembre 2003, n° 02-82.999).
134. Il convient également de rappeler qu'en exerçant son contrôle in concreto sur le dossier présenté par l'administration fiscale, le juge des libertés et de la détention exerce de fait un contrôle de proportionnalité. En cas de refus, il peut inviter l'administration fiscale à avoir recours à d'autres moyens d'enquête moins intrusifs (droit de communication, vérification de comptabilité...). En autorisant les opérations de visite et de saisie, le juge des libertés et de la détention a entendu accorder à l'administration ces modes d'investigations plus intrusifs en fonction du dossier présenté.
135. Ainsi, cconformément à la jurisprudence constante, le juge des libertés et de la détention s'est référé, en les analysant, aux éléments d'information fournis par l'administration fiscale et a souverainement apprécié l'existence des présomptions d'agissements frauduleux, visés à l'article L. 16B du Livre des procédures fiscales, justifiant la mesure autorisée.
136. Si l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales (CESDH) dispose que "Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance", c'est sous réserve qu' "Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui."
137. En l'espèce, les appelants ne caractérisent en rien la disproportion des informations recueillies s'agissant de Madame [S] épouse [C] qui déclare une adresse en France ainsi que son époux Monsieur [C], de Monsieur [Y], compagnon de Mme [R] [C] qui travaille pour la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA dont son père est le directeur général et ainsi ne caractérisent pas une violation des dispositions de l'article 8 précité de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales (CESDH) dont ils auraient été victimes.
138. Pas davantage, ils ne justifient de la disproportion de la mesure à l'égard de salariés de la société RESSOURCETHICA pour lesquels il est présumé qu'ils travaillent pour le compte de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA en France.
139. De même, ils n'établissent pas que l'administration fiscale aurait conservé et utilisé les données fiscales personnelles de Mme [S] au delà des délais prescrits pour la durée des fichiers ADONIS et FICOBA.
140. Il s'infère de ce qui précède qu'il n'y a pas eu violation des dispositions de l'article 8 de la CESDH et ainsi de la vie privée des salariés de la société RESSOURCETHICA, de Mme [S] épouse [C], de Mme [R] [C] et de Monsieur [Y] et que la mesure ordonnée conformément aux dispositions de l'article L. 16B du Livre des procédures fiscales précité n'a pas été disproportionnée eu égard au but poursuivi rappelé ci-dessus.
141. En conséquence, l'administration a pu produire, auprès du juge des libertés et de la détention les pièces n°6, 7, 22, 30, 38, 41, 44, 46, 50, 50-1, 51, 52, 53, 54, 55, 59, 60, 61-1, 61 à l'appui de sa requête ainsi que l'ensemble des autres pièces, soit au total 64 pièces et aucune origine illicite desdites pièces produites tirée d'une atteinte disproportionnée à la vie privée et l'inviolabilité du domicile ne peut être soulevée en l'espèce.
142. Cette branche du moyen sera rejetée.
Sur le traitement de masse des données invoqué par les appelants
143. Les appelants font état, en page 10 de leurs écritures, 'de la volumétrie et la diversité des données personnelles collectées au cas particulier révèlent que la Direction Nationale d'Enquêtes Fiscales a procédé à un traitement de masse, collectant des données personnelles publiquement accessibles, sans en posséder le fondement légal. Le traitement ainsi effectué est donc illicite et il en est par conséquent de même des pièces produites par l'Administration'.
144. En premier lieu, il convient de rappeler que l'administration fiscale est fondée à rassembler des données lorsqu'elle prépare une requête aux fins de solliciter une autorisation de procéder à une visite domiciliaire sur le fondement de l'article L. 16B du Livre des procédures fiscales.
145. En l'espèce, il convient de constater que les pièces produites par la DNEF proviennent de consultations de sites internet d'accès public, comme le site LinkedIn comportant des données renseignées volontairement et directement par des personnes ayant un lien direct ou indirect avec la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA, de confrontations avec des documents détenus légalement par l'administration fiscale tels les fichiers ADONIS ou CANOPEE ou résultant des constatations de ses agents ou encore de l'exercice régulier de son droit de communication.
146. En second lieu, il convient de relever que les appelants qui contestent la liceité des pièces visant des personnes physiques clairement identifiées en raison de leur lien direct ou indirect avec la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA, ne caractérisent pas un traitement de masse de données, la DNEF justifiant d'avoir ciblé ses recherches sur ladite société en consultant manuellement dans le cadre d'une démarche ciblée des sites d'accès publics.
147. En effet, procédant par affirmation, ils ne rapportent pas la preuve de ce que la DNEF aurait procédé en l'espèce à une collecte d'informations automatique, massive, préalable et en dehors de toute suspicion de fraude de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA.
148. En conséquence, cette branche du moyen tiré de l'illiceité d'un traitement de masse des données personnelles mis en oeuvre par la DNEF sera rejetée.
Sur la communication des données à des tiers
149. Les appelant font valoir que 'la communication de données à des tiers non autorisés constitue une violation du principe de confidentialité. En outre, elle est susceptible de relever des délits réprimant les manquements aux obligations de sécurité des données personnelles prévues à l'Article 226-17 du Code Pénal d'une part, et de la divulgation à des tiers portant atteinte à l'intimité de la vie privée de la personne concernée (Article 226-22 du même code) d'autre part. Or, en l'espèce, des données personnelles issues des traitements ADONIS, FICOBA et SIR ont été communiquées à l'employeur des personnes concernées ainsi qu'à d'autres entités privées qui en ont été informés de ces informations'.
150. Il convient de relever que les appelants n'identifient pas les entités privées dont ils font état à l'exception de la société RESSOURCETHICA, employeur de personnes physiques concernées par les données et partie appelante et qu'ils n'identifient pas davantage 'les tiers'. En outre, se référant à des dispositions pénales, ils procèdent par suppositions sans en tirer de conséquence légale et ne justifient pas du fondement du principe de confidentialité dont ils se prévalent.
151. En premier lieu, il convient de rappeler que le juge des libertés et de la détention ne peut être considéré comme un tiers non autorisé au sens des articles 5 (1) (f) du RGPD et 4(6°) de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978.
152. En second lieu, la communication de données personnelles à des tiers non autorisés par la notification de l'ordonnance d'autorisation, à la supposer établie, est sans incidence sur la légalité de cette ordonnance, qui lui est antérieure.
153. Cette branche du moyen sera en conséquence rejetée. En conséquence, le moyen tiré de l'illicéité des pièces sera rejeté en toutes ses branches.
Sur le bien-fondé des présomptions retenues par le juge des libertés et de la détention
154. L'article L.16B. I du livre des procédures fiscales dispose 'Lorsque l'autorité judiciaire, saisie par l'administration fiscale, estime qu'il existe des présomptions qu'un contribuable se soustrait à l'établissement ou au paiement des impôts sur le revenu ou sur les bénéfices ou des taxes sur le chiffre d'affaires ou souscrit des déclarations inexactes en vue de bénéficier de crédits d'impôt prévus au profit des entreprises passibles de l'impôt sur le revenu ou sur les bénéfices en se livrant à des achats ou à des ventes sans facture, en utilisant ou en délivrant des factures ou des documents ne se rapportant pas à des opérations réelles ou en omettant sciemment de passer ou de faire passer des écritures ou en passant ou en faisant passer sciemment des écritures inexactes ou fictives dans des documents comptables dont la tenue est imposée par le code général des impôts, elle peut, dans les conditions prévues au II, autoriser les agents de l'administration des impôts, ayant au moins le grade d'inspecteur et habilités à cet effet par le directeur général des finances publiques, à rechercher la preuve de ces agissements, en effectuant des visites en tous lieux, même privés, où les pièces et documents s'y rapportant sont susceptibles d'être détenus ou d'être accessibles ou disponibles et procéder à leur saisie, quel qu'en soit le support.'
155. Ainsi, il convient de rappeler que l'article L. 16B du livre des procédures fiscales n'exige que de simples présomptions de la commission de fraude, en particulier de ce qu'une société étrangère exercerait depuis la FRANCE tout ou partie de son activité par laquelle elle serait soumise aux obligations fiscales et comptables prévues par le code général des impôts en matière d'impôt sur les bénéfices et/ou de taxes sur le chiffre d'affaires (Cass. Com., 15 février 2023, n°20-20.599).
156. Il convient également de rappeler qu'à ce stade de l'enquête fiscale, en application des dispositions de l'article L.16 B du livre des procédures fiscales, il n'y a pas lieu pour le juge des libertés et de la détention de déterminer si tous les éléments constitutifs des manquements recherchés étaient réunis, mais, en l'espèce, ce juge, dans le cadre de ses attributions, ne doit rechercher que l'existence des présomptions simples des agissements prohibés et recherchés. L'élément intentionnel de la fraude n'a donc pas à être rapporté à ce stade de la procédure (Cass. Com. 7 décembre 2010, n°10-10.923 ; Cass. Com. 15 février 2023, n°21-13.288).
157. En outre, en l'espèce, il ne ressort ni de la requête, ni de l'ordonnance que la DNEF reproche à la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA de s'être implantée en SUISSE pour bénéficier d'un régime fiscal plus avantageux et d'y tenir sa comptabilité, mais a fait état, devant le juge des libertés et de la détention, de l'existence d'une présomption d'une activité exercée à partir du territoire national français, d'où il pouvait être présumé que la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA ne respectait pas ses obligations comptables en France, dans la mesure où était relevée dans l'ordonnance l'absence de toute déclaration fiscale relative à son activité. Les conditions de mise en oeuvre de l'article L16B du livre des procédures fiscales étaient donc remplies
158. Par ailleurs, les appelants soutiennent que le juge des libertés et de la détention n'a pas caractérisé l'existence d'un établissement stable en France. Il convient de rappeler que la jurisprudence constante affirme que la discussion de l'existence d'un établissement stable en FRANCE relève de la compétence du juge de l'impôt, et non de la compétence du juge des libertés et de la détention saisi d'une demande fondée sur l'article L. 16 B du LPF ni de celle du premier président statuant en appel (Cass. Com., 2010-06-29, n° 09-15.706).
159. Il convient enfin de souligner que, sauf pour les appelants à apporter la preuve de l'illicéité des pièces fournies par l'administration, ce qui n'a pas été retenu en l'espèce, il est de jurisprudence constante qu'en se référant et en analysant les seuls éléments d'information fournis par l'administration, le juge apprécie souverainement l'existence des présomptions de fraude justifiant la mesure autorisée.
160. Dès lors, il convient d'examiner les éléments constitutifs des indices, notamment relatifs à la fixation du centre décisionnel et à l'activité de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA en France et l'insuffisance des moyens d'exploitation en Suisse, caractérisant l'existence de présomptions de soustraction à l'établissement et au paiement de l'impôt retenue par le juge des libertés et de la détention à l'encontre de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA.
Sur la direction et les moyens humains et matériels en SUISSE de la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL SA,
161. En l'espèce, s'agissant des éléments caractérisant l'existence de présomptions d'agissements frauduleux retenus par le juge des libertés et de la détention, la décision d'autorisation querellée mentionne, par une appréciation pertinente de la requête accompagnée de pièces qui lui a été présentée et que cette juridiction fait sienne, qu'il ressortait des éléments de l'enquête que :
- initialement dénommée à sa création, le 18 octobre 1983, société DISPHARM SA, puis CIDER PROMOTION INTERNATIONAL SA du 29/04/2003 jusqu'à la date du 18/06/2007 (Pièces n°1, n°3-1 et n°17), la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL SA est inscrite depuis au Service du Registre du Commerce de l'Etat du canton de GENÈVE, sous le numéro CHE-103.340.154 (Pièce n°1) ;
- la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA a pour objet social la représentation, la distribution et la promotion de tous produits pharmaceutiques et également pour but d'acquérir, détenir, exploiter et vendre tous droits sur des médicaments (Pièces n°1 et n°2);
- la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA dispose d'un bureau de représentation en Côte D'IVOIRE sis [Adresse 9] (Pièce n°3-1) ;
- le siège social de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA depuis le 28/11/2003, est fixé [Adresse 6] en Suisse (Pièces n°1, n°3, n°3-2, n°4, n°10, n°11, n°12 et n°12-1) ;
- la consultation des données issues du site internet d'accès public « moneyhouse.ch » fait ressortir que 12 entreprises actives sont répertoriées à l'adresse du siège social de PROPHARMED INTERNATIONAL S.A. sise [Adresse 6] à [Localité 28] en Suisse (Pièce n°4); Selon la base « yellow.local.ch », 24 personnes s'avèrent répertoriées à l'adresse susvisée (Pièce n°5) ; la société InterExperts SA réalisant des activités de fiduciaire, bureau de comptabilité, conseiller fiscal, bureau de révision et de gérance de fortune apparaît domiciliée notamment à la même adresse, [Adresse 6] (Pièce n°5-1) ;
- ainsi, le siège social de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA est fixé à la même adresse, sis [Adresse 6] que 12 autres entreprises et la société InterExperts SA réalisant des activités de fiduciaire, bureau de comptabilité, conseiller fiscal, bureau de révision et de gérance de fortune;
- selon la base de données économiques D&B, la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA disposerait d'un effectif de 4 personnes (Pièce n°3-2) ;
- la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA est détenue à hauteur de 99,99% par la société en commandite par actions de droit français RESSOURCETHICA, sise [Adresse 4] qui a pour gérant et associé commandité la SARL AFRIGESTION sise à la même adresse, elle-même dirigée par M. [O] [C] (Pièces n°9, n°10, n°11, n°12, n°12-1, n°13, n°27 et n°30);
- conformément à l'article 20 des statuts du 29/04/2003 de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA, la majorité des membres du conseil d'administration doit être de nationalité suisse et avoir son domicile en SUISSE (Pièce n°2) ;
- la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA a pour directeur général, depuis le 06/10/2009, M. [F] [C] et M. Charles [M] en est l'administrateur depuis le 28/06/2010 (Pièce n°1); Ils disposent tous les deux d'un pouvoir de signature individuelle (Pièces n°1 et 3) ;
- M. Charles [M], de nationalité suisse, administrateur de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA, est domicilié en Suisse dans la ville de [Localité 26] (en allemand « [Localité 25] ») (Pièces n°1, n°3, n°6 et n°6-1) ;
- selon la base « Monetas.ch », Monsieur [M] est répertorié notamment à [Localité 25] (ou [Localité 26]), [Localité 38] et [Localité 28] au titre de 73 mandats sociaux dont 25 actifs avec la qualité de chef de succursale de 6 personnes morales (dont PROPHARMED INTERNATIONAL SA),chef adjoint de succursale de 8 autres entités distinctes, directeur adjoint s'agissant de 6 autres sociétés, et directeur de succursale pour 2 personnes morales (Pièces n°6 et n°6-1 n°7) ;
- d'après la même base de données, Charles [M] est répertorié comme associé de l'étude d'avocats KELLERHALS CARRARD [Localité 28] SNC (Pièce n°7), ce cabinet d'avocats étant qualifié par le site internet 'magazine-decideurs.com' comme le second plus grand cabinet de suisse en nombre d'avocats, se positionnant sur les dossiers tant locaux qu'internationaux et se concentrant notamment sur les domaines du commercial, du fiscal et de la propriété intellectuelle (Pièce n°8) ;
- ainsi, la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA dispose depuis juin 2010 d'un administrateur, de nationalité suisse et domicilié en SUISSE, associé du Cabinet KELLERHALS CARRARD, satisfaisant à l'exigence statutaire de présence d'un administrateur de nationalité suisse également domicilié en SUISSE (Pièces n°1, n°2, n°3, n°6, n°6-1, n°7 et n°8);
- ainsi, il peut être présumé que Charles [M], compte tenu de ses fonctions d'administrateur de PROPHARMED INTERNATIONAL SA, d'associé du cabinet d'avocats suisse KELLERHALS CARRARD et de son implication dans 73 mandats dont 25 actifs, ne gère pas de façon habituelle et permanente la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL SA pour laquelle le pouvoir décisionnel de ladite société peut être présumé concentré entre les mains de M. [O] [F] [C].
162. S'agissant de l'administration de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA par Monsieur [M], il convient de relever que, conformément aux exigences de la loi suisse relatives à l'établissement d'une société en Suisse qui prescrit une représentation par une personne domiciliée en Suisse, soit un administrateur pour une société anonyme, la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA dispose d'un administrateur en la personne de Monsieur [M] depuis 2010.
163. Dans leurs écritures, les appelants contestent que l'administration de Monsieur [M] soit une administration fiduciaire et font valoir que, ce dernier disposant du pouvoir de signature individuelle sur les comptes bancaires comme Monsieur [C], 'cette unique circonstance de double signature individuelle permet de s'assurer que le centre de décision est en Suisse'. (page 35).
164. Les appelants précisent que ' la société dispose à [Localité 28] d'une direction effective alors qu'elle remunère Monsieur [M] plus de 80.000 francs suisses par an, si effectivement, ce n'est qu'un gérant de paille servant de façade pour la réglementation suisse, ces honoraires paraissent particulièrement élevés pour qu'il ne réalise aucun acte d'autant que ses notes d'honoraires indiquent une intervention du 1er janvier au 31 décembre de chaque année.' (page 37) .
165. Ils ajoutent ' Quant à la préparation des Assemblées Générales notamment, on peut lire que le Conseil d'Administration a pris bonne note des remarques transmises par le cabinet d'expertise comptable dans le cadre de la préparation des Assemblées Générales par courrier préalable.
La préparation des Assemblées Générales n'est pas réalisée à [Localité 31] par [F] [C] ou les employés de RESSOURCETHICA à [Localité 37], les Assemblées Générales sont préparées par le Conseil d'Administration composé de deux membres et prennent appui sur les remarques et commentaires de l'Expert-comptable suisse de la société....
En l'espèce, le Conseil d'Administration est le dirigeant de la société PROPHARMED INTERNATIONAL en Suisse, ce Conseil d'Administration est composé d'un membre unique qui dispose de la signature individuelle, il s'agit de Monsieur Charles [M] ; Monsieur [F] [C] est nommé Directeur Général, il n'est pas membre du Conseil d'Administration.' (page 38).
166. A ce titre, les appelants produisent la pièce n°82 constituée des procès-verbaux des conseils d'administration et assemblées générales des comptes arrêtés au 31 décembre 2017, au 31 décembre 2018 et au 31décembre 2019 de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA et la pièce n°83 constituée des factures 2017/2018 de Monsieur [M], administrateur de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA.
167. Il ressort de la pièce n°82 que les procès-verbaux des assemblées ordinaires de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA au titre des années 2017 à 2019 comportent la mention qu'elles se sont tenues 'En l'Etude de Maitre Charles [M], [Adresse 12]', que ce dernier en sa qualité de président de séance 'a constaté, sur la base de la liste de présence que la totalité des actions de la société sont présents ou représentés... et qu'aucun actionnaire ne s'oppose à sa tenue' et qu'une secrétaire tient le procès-verbal qui a été signé par le président et par elle.
168. Il en résulte ainsi que les assemblées ordinaires de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA des années 2017 à 2019, dont les procès-verbaux sont produits à la présente procédure ne se sont pas tenues au siège social de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA mais à l'adresse professionnelle du cabinet d'avocat de maitre [M] et que la liste des présences de la totalité des actions de la société sont présents ou représentés n'est pas produite à la présente procédure.
169. Il ressort de la pièce n°83 qu'elle est constituée de deux factures établies par Monsieur [M] portant en entête sa qualité d'avocat dénommées 'Note de frais et honoraires' au titre des années 2017 et 2018 pour des prestations intitulées 'Pour services rendus par mon étude'.
170. De ces factures, il ne ressort aucun élément relatif à la nature des prestations réalisées par Monsieur [M], le libellé de la prestation faisant référence à 'des services rendus par mon étude ' à l'adresse [Adresse 12].
En effet, il n'en ressort aucun élément permettant d'identifier la prestation d'administration de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA par Monsieur [M].
171. Pas davantage, il n'en ressort d'élément permettant de distinguer cette prestation de celle d'avocat associé de l'étude d'avocats 'De Pfyffer et Associés, Avocats au barreau de Genève' et de celle d'avocat de 'l'Etude de Maitre Charles [M]', mentionnée dans les procès-verbaux d'assemblées ordinaires de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA, à la même adresse sis [Adresse 12], en l'absence de production du contrat de prestation d'honoraires liant la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA à son administrateur, Monsieur [M] et détaillant ses missions dans le processus décisionnel de ladite société.
172. Les appelants produisent les statuts la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA pour décliner les attributions de son conseil d'Administration qu'ils qualifient 'd'intransmissibles et inaliénables' de la façon suivante :1)Exercer la haute direction de la société et établir les instructions nécessaires, 2) Fixer l'organisation, 3) Fixer les principes de la comptabilité et du contrôle financier ainsi que le plan financier pour autant que celui-ci soit nécessaire à la gestion de la société, Nommer et révoquer les personnes chargées de la gestion et de la représentation, 5) Exercer la haute surveillance sur les personnes chargées de la gestion pour s'assurer notamment qu'elles observent la loi, les statuts, les règlements, et les instructions données, 6) Etablir le rapport annuel, préparer l'Assemblée Générale et exécuter ses décisions. ( page 38 des conclusions)
173. S'agissant ainsi plus particulièrement du rôle effectif de Monsieur [M] dans les processus décisionnels de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA , il convient de souligner que les appelants, qui détaillent les attributions de son conseil d'administration composé d'un membre unique disposant de la signature individuelle, ne produisent aucun document établi par Monsieur [M] ou instruction donnée par ce dernier au directeur général Monsieur [C] pour justifier de l'exercice effectif de ses attributions de membre unique du conseil d'administration. Pas davantage, ils ne contestent l'exercice d'autres mandats d'administration de Monsieur [M] au nombre d'au moins 73 dont 25 actifs.
174. En effet, les appelants demeurent silencieux sur l'exercice de ces mandats et ne produisent aucune pièce justifiant de la réalité de l'exercice effectif des fonctions/missions de Monsieur [M] et ainsi de la réalité de ses actes d'administration depuis 2010, soit depuis plus de 10 ans à la date de l'ordonnance contestée en qualité d'administrateur unique de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA.
175. Tout en soulignant à la fois que le pouvoir de signature de l'administrateur et du directeur général constitue 'cette unique circonstance de double signature individuelle permet de s'assurer que le centre de décision est en Suisse' et que 'le Conseil d'Administration est le dirigeant de la société PROPHARMED INTERNATIONAL en Suisse, ce Conseil d'Administration est composé d'un membre unique qui dispose de la signature individuelle, il s'agit de Monsieur Charles [M]' ( page 38), ils ne produisent aucune pièce, telle des décisions prises par Monsieur [M], et notamment des décisions comportant celle 'd'exercer la haute surveillance sur les personnes chargées de la gestion pour s'assurer notamment qu'elles observent la loi, les statuts, les règlements, et les instructions données', soit en l'occurrence au directeur général Monsieur [C], en application des pouvoirs qui lui sont attribués par les statuts sur les années 2017 et 2018, années de facturation de ses honoraires produites aux débats par les appelants, de nature à remettre en cause le constat du juge des libertés et de la détention selon lequel Monsieur [M] 'compte tenu de ses fonctions d'administrateur de PROPHARMED INTERNATIONAL SA, d'associé du cabinet d'avocats suisse KELLERHALS CARRARD et de son implication dans 73 mandats dont 25 actifs ne gère pas de façon habituelle et permanente la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA'.
176. Ainsi, il ressort tant des pièces annexées à la requête que des pièces produites par les appelants que Monsieur [M], décrit par ces derniers comme le membre unique du conseil d'administration disposant de la signature individuelle, agit comme un administrateur fiduciaire pour répondre aux exigences légales ou réglementaires suisses ce d'autant qu'il n'est pas justifié par les appelants qu'il soit détenteur d'action de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA.
177. Dès lors, il convient de relever que les appelants ne produisent aucune pièce de nature à remettre en cause le constat du juge des libertés et de la détention selon lequel 'le pouvoir décisionnel est présumé être concentré entre les mains de Monsieur [C].'
178. S'agissant des moyens humains affectés à son activité en Suisse, les appelants évoquent dans leurs écritures (pages 26 et 46), un effectif de 4/5 personnes au siège, tel que retenu dans l'ordonnance du juge des libertés et de la détention et précise que la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA 'dispose des moyens humains et matériels permettant de réaliser son objet social, les pièces de l'ordonnance indiquant que la société PROPHARMED INTERNATIONAL dispose de 4/5 salariés, en plus de ses deux dirigeants, son Administrateur suisse et son Directeur Général ivoirien' et que 'l'ancienneté des structures, leur historique rigoureusement relatée et la transparence de ces structures enregistrées auprès de leur greffe respectif n'est pas l'apanage de schéma frauduleux tendant à se soustraire aux obligations déclaratives'.
179. Ils ajoutent que 'En l'espèce, dès sa création en 1983, lors de son acquisition par RESSOURCETHICA en 2009 et depuis cette date, les profits réalisés par la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL sont générés par une activité développée dans les 12 pays d'Afrique au moyen de 91 collaborateurs africains en 2009 qui sont aujourd'hui au nombre de 477 collaborateurs africains en 2019, situés dans tous les pays d'Afrique de l'Ouest et relevant tous de contrat de travail suisse ou de leur pays respectif et en cela dirigés par leur Directeur Général, Monsieur [F] [C] lui-même résident fiscal ivoirien, disposant de la nationalité ivoirienne (et française), d'une activité professionnelle dispensée de la Côte d'Ivoire et en Suisse et d'un domicile en Côte d'Ivoire. Il est inscrit auprès du Consulat de France en Côte d'Ivoire depuis le 13 avril 1991 (près de 20 ans).'
180. Ils précisent enfin que la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA 'est une société de plein exercice, qui dispose depuis 1983 d'une équipe de 7 personnes à temps plein (4/5salariés selon les périodes, de Monsieur [M] Administrateur situé en Suisse et de Monsieur [C], Directeur Général) qui signe des contrats avec les laboratoires pharmaceutiques, et ce conformément aux éléments obtenus par l'Administration fiscale dans le cadre de son droit de communication auprès d'une des sociétés clientes de PROPHARMED INTERNATIONAL, la société SASU DAIICHI SANKYO FRANCE.'
181. Faisant observer que 'les données fournies par la base Money House ne concernent que l'effectif au siège et que l'effectif total de 4 salariés n'est qu'une estimation, comme il est expressément indiqué', ils soulignent que 'les bilans de la société PROPHARMED INTERNATIONAL révèlent que la société disposait au 31 décembre 2017 d'un effectif de 282 salariés (entre ceux du siège et les commerciaux africains, plus les deux mandataires sociaux), 301 au 31 décembre 2018, et 477 au 31 décembre 2019. La société PROPHARMED INTERNATIONAL donne la liste de ses effectifs et leur lieu d'exercice' (page 28 de leurs écritures).
182. A ce titre, ils produisent la pièce n°75 intitulée ' Liste des salariés de PROPHARMED INTERNATIONAL au 31 décembre 2017/2018/2019 '.
183. Il ressort cependant de cette pièce qu'elle est constituée d'un tableau comportant les lieux d'affectation et la fonction de personnes salariées dans différents pays d'Afrique mais ne comportant aucun élément d'identification des salariés exerçant des fonctions au siège social en Suisse de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA.
184. En effet, s'il ressort de ce tableau des affectations d'emploi/fonction, libellées ' siège', toutes ces affectations sont géographiquement situées en Afrique. Ainsi en est-il de Monsieur [C], affecté au siège en République de Côte d'ivoire en qualité de directeur général et de [R] [C] en qualité de KeyAccount Manager, également affectée en côte d'Ivoire. D'autres salariés apparaissent affectés à des fonctions de siège mais sont localisés en Afrique, soit notamment au Sénégal, Burkina Faso ou en Côte d'Ivoire, au Niger, au Cameroun.
185. Ainsi, sur cette liste, contrairement à ce que prétendent les appelants dans leurs écritures, aucun salarié n'apparaît affecté au siège social en Suisse y compris le directeur général Monsieur [C] déclaré basé en Côte d'Ivoire et prenant en charge des missions qui relèvent du siège social en Suisse, le bureau de représentation de Côte d'Ivoire ne constituant pas le siège social.
186. Cette liste comporte ainsi des collaborateurs salariés déployés à l'étranger, en Afrique, les appelants ne produisant aucune extraction d'éléments relatifs, selon leurs propres dires, à l'existence de 4/5 salariés affectés au siège en Suisse.
187. En outre, les appelants qui font état de ' 91 collaborateurs africains en 2009 qui sont aujourd'hui au nombre de 477 collaborateurs africains en 2019, situés dans tous les pays d'Afrique de l'Ouest et relevant tous de contrat de travail suisse ou de leur pays respectif' ne produisent aucun contrat de travail desdits collaborateurs relevant du droit suisse.
188. Ils concluent dans leurs écritures (page 50) que 'L'absence totale de moyens humains en Suisse ou en Afrique aurait pu laisser envisager une présomption de fraude à savoir le non-dépôt en France de déclarations en Impôt sur les Sociétés et en TVA pour un établissement stable établi sur la base d'un centre de direction effective en France. Toutefois, le Juge en relevant des moyens humains suisses, fut ce t'il insuffisant, ne peut conclure à un tel risque de fraude.
En l'espèce, la société PROPHARMED INTERNATIONAL démontre qu'elle emploie des salariés en Suisse au siège mais également sur le continent africain (sous contrat suisse).
L'absence de moyens humains de PROPHARMED INTERNATIONAL en Suisse pour exercer son activité ne résulte pas des pièces produites. Au contraire, les pièces produites à l'appui de l'Ordonnance du Juge des Libertés et de la Détention permettait de s'assurait de ces moyens humains en Suisse et elle sera donc annulée pour en avoir tirée les mauvaises conclusions.'
189. Au titre des pièces produites à cet effet, les appelants versent, en pièce n°114-a, un seul contrat de travail relevant du droit suisse, celui de Mme [A] datant de 1989 pour un emploi de 'secrétaire comptable à mi-temps' à raison de 20 H par semaine à compter du 1 er août 1989.
190. Il convient de relever que cette salariée n'apparaît pas dans la liste des salariés, pièce n°75, et qu'aucune pièce relative à la réalité de son activité et au versement de ses salaires sur la période visée par l'ordonnance n'est produite.
191. Pas davantage, ils ne produisent d'autres contrats de travail relevant du droit suisse pour l'effectif déclaré de 4/5 personnes comme travaillant au siège social en Suisse alors même qu'ils produisent la pièce n°76 dénommée 'Attestation Réviseur suisse PROPHARMED INTERNATIONAL FIDUCIAIRE [J]' en date du 20 octobre 2021 qui fait état de frais de personnel en Suisse sur les années 2017 à 2019 pour des montants de 114 991 CHF en 2017 à 91 137 CHF en 2019.
192. Dès lors, il ressort tant des pièces annexées à la requête que des pièces produites par les appelants que, contrairement à leurs écritures, les appelants ne produisent aucune pièce de nature à remettre en cause le constat du juge des libertés et de la détention selon lequel 'la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL SA semble disposer de moyens humains limités en SUISSE, pour la réalisation de ses activités de représentation, distribution et promotion de produits pharmaceutiques. '
Sur le siège social et les moyens matériels déployés en SUISSE par la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA
193. S'agissant de la localisation du siège social de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA, fixé à la même adresse, sis [Adresse 6], que 12 autres entreprises et la société InterExperts SA réalisant des activités de fiduciaire, bureau de comptabilité, conseiller fiscal, bureau de révision et de gérance de fortune, les appelants contestent toute domiciliation et font valoir que des lieux ont été loués pour une surface de 225 m2 pour une activité réelle et que le juge des libertés et de la détention s'est livré à une analyse erronée de la réalité de l'occupation des lieux par la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA.
194. Ils précisent que 'En outre, selon la motivation de l'Ordonnance du Juge des Libertés et de la détention, qui reprend la thèse de l'Administration fiscale française, la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL ne dispose pas en Suisse des ressources et compétences nécessaires a la promotion des produits pharmaceutiques qui selon elle, continue d'être assurée par les salariés de RESSOURCETHICA ou de PROPHARMED FRANCE et de son Directeur Général qui serait résident fiscal fiançais.
Cette affirmation résulte du fait qu'une société fiduciaire INTEREXPERT aurait la même adresse que le siège social de PROPHARMED INTERNATIONAL, [Adresse 6] a [Localité 28]. Cette adresse commune ferait présumer que PROPHARMED INTERNATIONAL n'aurait pas de locaux à sa disposition et que cette adresse serait une simple boîte aux lettres/domiciliation fictive.
Cette assertion résulterait de la pièce annexe n°5-1 comme quoi la fiduciaire INTEREXPERT est indiquée a la même adresse que celle de la société PROPHARMED INTERNATIONAL.
Or, la conclusion qu'en ont tirée l'Administration et le Juge (adresse de domiciliation et absence de siège réel) ne peut résulter de cette consultation qui procède d'une interrogation manifestement inadaptée et par voie de conséquence d'une réponse inappropriée.
L'Administration a effectué une seconde recherche concernant ce siège a [Localité 28] sur les bases de données de l'Annuaire téléphonique de la Suisse (local.ch). Cette seconde recherche a permis de trouver à l'adresse [Adresse 6] 22 sociétés et la société PROPHARMED INTERNATIONAL y disposait d'une ligne téléphonique propre.
La base de données D&B Global Référence Solution également consultée par l'Administration confirme ce numéro, indique une adresse de messagerie et précise que du personnel salarié est présent a l'adresse répertoriée.
Les éléments ainsi produits permettent de s'assurer que le siège de la société n'était pas fictif et que la société n'était pas domiciliée par la fiduciaire sus indiquée. Toutefois, le Juge des Libertés et de la Détention a considéré qu'il s'agissait également d'une domiciliation (bureau virtuel).
Or, les pièces produites par les requérants et notamment le contrat de location signé en date du 9 octobre 2003 démontrent que la location contractée par la société PROPHARMED INTERNATIONAL, anciennement nommée CIDER PROMOTION INTERNATIONAL S.A., porte sur des locaux de 225 m2 au 5eme étage de l'immeuble sis [Adresse 6], pour un loyer annuel de 57.756 Fr. Suisse (soit 36.963,84 euros en 2003) et des charges locatives annuelles estimées à 3.384 Fr Suisse (soit 2.165,76 euros en 2003)'
195. A ce titre, ils produisent une pièce n°89 intitulée ' Contrat de bail entre HOIRIE [G] et TALEB, et PROPHARMED INTERNATIONAL en date du 9 octobre 2003" et concluent que 'Le caractère fictif du siège ne peut donc résulter des pièces annexées a l'Ordonnance d'autant qu'une ligne téléphonique a été trouvée par l'intermédiaire du site Annuaire téléphonique de Suisse (local.ch) ainsi que les pièces n°110 et 120 intitulées 'Attestation Bailleur COMPTOIR IMMOBILIER sur bail du 1er novembre 2003 au 30 juin 2016 et Courrier de reconduction de bail du 1er novembre 2008 au 31 octobre 2013 et Contrat de bail suisse du 1er juillet 2011 au 30 juin 2016"
196. Cependant, les appelants ne justifient pas de la réalité d'une sous location intervenue à compter de juillet 2016, la pièce n°110 indiquant que ce bureau de 225 m2 a été reloué à la société FRILAB à compter du 1 er juillet 2016 et la pièce n°112 indiquant que la dite société sous loue les bureaux à la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA, faute de produire le bail de sous location signé avec ladite société Frilab.
197. Faute de produire le nom et les contrats des salariés employés au siège en Suisse, ils ne rapportent pas la preuve de la réalité et de la substance du siège social et de la réalité de l'activité de la société en ces lieux.
198. A cet égard, il importe peu qu'ils rapportent la preuve d'équipements matériels, de consommation d'eau et d'électricité ainsi que d'une ligne téléphonique attribuée à la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA, faute de justifier de la réalité de l'occupation des lieux par un effectif de 4/5 personnes et de la réalité de l'activité de cet effectif dont ils prévalent.
199. Dès lors, ils ne sauraient prétendre dans leurs écritures que 'il n'y est aucunement indiqué une quelconque résiliation d'un quelconque bail. Nous ne comprenons pas comment il peut être soutenu le contraire' ( page 43) alors que la pièce n°110 qu'ils produisent, mentionne la relocation des lieux à une autre société, la société Frilab qui atteste en pièce n°112, une sous location au profit de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA sans toutefois que ne soit produit le contrat de sous location.
200. Ainsi, alors que les appelants contestent toute domiciliation de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA au siège d'une société fiduciaire, ils ne contestent pas que la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA dispose d'un siège social situé à la même adresse que celle de 12 autres sociétés et de la société InterExperts SA réalisant des activités de fiduciaire, bureau de comptabilité, conseiller fiscal, bureau de révision et de gérance de fortune et ne rapportent pas la preuve de la réalité et de la substance de l'exercice de ses activités de ladite société à l'adresse de ce siège social.
201. Enfin, les appelants font état, dans leurs écritures (page 14) de ce que "la société PROPHARMED INTERNATIONAL fait l'objet depuis le 11 mars 2022 d'une vérification de comptabilité et à ce jour, aucune proposition de rectification ne lui a été envoyée, l'administration affirmant même que tout redressement sur le fondement du siège de direction effective était abandonné." pour en tirer la conclusion que la société PROPHARMED dispose de moyens suffisants en Suisse et y exerce son activité.
202. Cependant, outre qu'ils ne produisent aucune décision de l'administration fiscale relative à un éventuel abandon de redressement, la vérification de comptabilité étant intervenue en 2022, soit postérieurement à l'ordonnance du juge des libertés et de la détention, elle est sans incidence sur l'examen de cette ordonnance par la juridiction d'appel qui examine les éléments soumis au juge des libertés et de la détention au jour de sa saisine et les éléments produits par les appelants de nature à les contredire au jour de ladite saisine.
203. Dès lors, il convient de relever que les appelants ne produisent aucune pièce de nature à remettre en cause le constat du juge des libertés et de la détention selon lequel 'la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL SA semble disposer de moyens matériels limités en SUISSE, pour la réalisation de ses activités de représentation, distribution et promotion de produits pharmaceutiques.'
Sur les activités et le chiffre d'affaire de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA et les liens capitalistiques avec la société RESSOURCETHICA
204. S'agissant des éléments caractérisant l'existence de présomptions d'agissements frauduleux retenus par le juge des libertés et de la détention, la décision d'autorisation querellée mentionne, par une appréciation pertinente des éléments de la requête accompagnée de pièces qui lui a été présentée et que cette juridiction fait sienne, qu'il ressortait notamment des éléments de l'enquête que :
- l'examen des déclarations d'honoraires ou commissions versés au cours des années 2010 à 2019, souscrites par les laboratoires français, révèle que la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA a perçu un total de 43 166 374 € d'honoraires et commissions sur la période 2010 à 2019 au titre de rémunérations d'agent ou d'agent commercial ou d'agence de promotion commerciale ou distributeur de produits pharmaceutiques ou plus largement de prestataire pour des sociétés ayant notamment pour activité déclarée la fabrication de préparations pharmaceutiques ou de médicaments ou bien encore le commerce de gros de produits pharmaceutiques ;
- la société française EP DIS, filiale du groupe EURAPHARMA, exerce le métier de « Pre-wholesale » (« pré-grossiste ») en tant que distributeur export et dépositaire et est un établissement pharmaceutique agréé par l'ANSM (Agence Nationale de Sécurité des Médicaments) ; Située près de [Localité 34], sur un hub logistique de 11 000 m2, elle gère des flux exports vers une cinquantaine de destinations dans le monde, pour le compte de laboratoires pharmaceutiques clients; Elle est le client le plus important de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA (Pièces 15 et 16) ;
- l'exercice d'un droit de communication adressé à la société SASU DAIICHI SANKYO FRANCE, révèle que la société CIDER PROMOTION INTERNATIONAL (devenue PROPHARMED INTERNATIONAL SA), dans le cadre de son contrat de prestations qui les unit, occupe les fonctions de prestataire de visite médicale indépendant, et à ce titre se doit d'assurer la promotion, au nom et pour le compte du client, de produits pharmaceutiques ainsi que d'effectuer les démarches administratives afférentes auprès du corps médical et pharmaceutique selon un plan d'actions annuel établi par le laboratoire;
- en contrepartie des services de promotion, CIDER PROMOTION INTERNATIONAL, devenue PROPHARMED INTERNATIONAL SA, perçoit une rémunération au taux variable de 11% ou 14% par tranche du chiffre d'affaires net d'avoirs hors taxes, facturé au distributeur (CIDER DISTRIBUTION INTERNATIONAL à [Localité 35]) en charge des ventes sur un territoire correspondant à 14 Etats implantés sur le continent africain (Pièce n°17);
- les services de promotion incluent des prestations de pharmacovigilance comprennent les prestations de signalement des effets indésirables, l'enregistrement, l'évaluation et l'exploitation de ces informations dans un but de prévention et la réalisation de toutes les études et travaux concernant la sécurité des produits (Pièce n°17).
- la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA est détenue à hauteur de 99,99% par la société en commandite par actions de droit français RESSOURCETHICA, sise [Adresse 4] qui a pour gérant et associé commandité la SARL AFRIGESTION sise à la même adresse, elle-même dirigée par M. [O] [C] (Pièces n°9, n°10, n°11, n°12, n°12-1 et n°13) ;
- les décisions de gestion de la SCA RESSOURCETHICA appartiennent uniquement à la SARL AFRIGESTION, gérante de droit de la SCA, elle-même représentée par son gérant unique M. [O] [F] [C];
- la SCA RESSOURCETHICA est détenue à hauteur de 35 % (Pièces n°10, n°11, n°12 et n°12-1) ou 36% par la SA de droit français EURAPHARMA (Pièces n°9 et n°18) ;
- la SCA RESSOURCETHICA mentionne au titre de ses activités exercées celle d'intermédiaire spécialisé dans le commerce d'autres produits spécifiques (Pièces n°9 et n°10) ou de prestations médicales et pharmaceutiques (Pièces n°TI, n°12 et n°12-1) ;
- la SARL AFRIGESTION, gérante de droit de la SCA RESSOURCETHICA, a pour activité déclarée la gérance de sociétés et la fourniture de prestations de gestion au profit d'entreprises implantées en Afrique (Pièces n°9 et n°13);
- selon le groupe EURAPHARMA, RESSOURCETHICA et PROPHARMED, «PROPHARMED», pouvant être entendu comme désignant PROPHARMED INTERNATIONAL SA, exerce une activité de promotion médicale et pharmaceutique en Afrique et dans les CTOM en s'appuyant sur des réseaux de visiteurs médicaux et de délégués pharmaceutiques qui assurent la promotion des produits et les prises de commandes pour le compte des laboratoires (Pièces n°19,n° 20, n°21 et n°24);
- la société EURAPHARMA se présente comme le partenaire de référence des grands laboratoires pharmaceutiques désireux de se développer sur le continent africain, à Madagascar et dans les Collectivités et Territoires d'Outre-Mer (CTOM) ; EURAPHARMA est membre de CFAO, grand groupe d'envergure internationale, qui s'est hissé aux premiers rangs de la distribution spécialisée en Afrique et dans les CTOM (Pièce n°19) ;
- selon son site internet, EURAPHARMA opère dans 23 pays d'Afrique; RESSOURCETHICA - PROPHARMED sont nommés à la rubrique «France» du réseau EURAPHARMA pour une activité de promotion (médicale et pharmaceutique) et à la rubrique « au service des laboratoires», il est indiqué, s'agissant de la promotion médicale et pharmaceutique, que RESSOURCETHICA / PROPHARMED (en Afrique et dans les CTOM) s'appuient sur des réseaux de visiteurs médicaux et de délégués pharmaceutiques qui assurent la promotion des produits et les prises de commandes pour le compte des laboratoires (Pièce n°19) ;
- la SAS PROPHARMED FRANCE, ayant pour sigle « DEPHI » (n° SIREN 338 912 777) qui disposait de son siège social au [Adresse 4] et avait pour associé unique la SCA RESSOURCETHICA (Pièce n°20) a cessé son activité suite à la décision de transmission universelle de patrimoine et la dissolution anticipée de la société PROPHARMED FRANCE SAS, de la société RESSOURCETHICA, société absorbante;
- suite à la publication le 06/01/2017 et à la radiation au greffe du tribunal de commerce de NANTERRE le 29/06/2018 (Pièces n°20 et n°21), il n'existe, depuis le 06/01/2017, aucune entité juridique en activité susceptible de revendiquer le nom de « PROPHARMED» à SURESNES comme dans le reste de la FRANCE (Pièces n°20 et n°21) et la dénomination « PROPHARMED », mentionnée par le groupe EURAPHARMA sur son site internet, est présumée désigner la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL SA.
205. Les appelants, tout ne contestant pas la réalité des liens capitalistiques entretenus entre les sociétés EURAPHARMA, RESSOURCETHICA et PROPHARMED INTERNATIONAL et celle de la perception de commissions et honoraires d'un montant de 43 160 000 € entre 2018 et 2019 de laboratoires français, formulent des observations sur ces éléments pour en contester la pertinence au regard de la présomption d'activité réalisée en majorité depuis la France.
206. Ils déclarent dans leurs écritures (page 25) ' En effet, rien ne démontre que la société PROPHARMED INTERNATIONAL réalise la totalité (voire seulement la majorité) de son Chiffre d'Affaires en France et que celui-ci puisse être déterminé à partir d'une extraction partielle des seules déclarations de commission réalisées par les laboratoires pharmaceutiques français. Si en 9 ans (du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2019), les prestations et livraisons réalisées avec des clients établis en France (soit 11 clients français en 9 ans) se sont élevées à la somme de 43.000.000, soit en moyenne 4.700.000 euros par an, ces chiffres n'ont d'intérêt, pour connaître le lieu d'exercice des activités de la société objet de suspicion de fraude, que rapportés au Chiffre d'Affaires global de la société pendant la même période, s'agissant de ce qui était parfaitement connu de l'Administration d'une entreprise dont l'objet était d'intervenir sur les marchés internationaux.
Or, aucune de ces données (Chiffre d'Affaires global par rapport au Chiffre d'Affaires français réalisé avec les clients français, proportion de clients français par rapport aux clients étrangers) pourtant essentielles afin d'apprécier la réalité du marché de la société PROPHARMED INTERNATIONAL n'a été communiquée pour permettre de soutenir que l'activité de PROPHARMED INTERNATIONAL est réalisée exclusivement (voire majoritairement) avec des clients français.
Il est, à cet égard, justifié que des marchés sont conclus avec des laboratoires étrangers et que l'intégralité du Chiffre d'Affaires de PROPHARMED INTERNATIONAL provient de contrats exécutés en Afrique.'
207. Ils indiquent par ailleurs dans leurs écritures (page 54) que 'Au surplus, l'Administration ne démontre pas en quoi les prestations réalisées en France pour des clients français seraient majoritaires ; .... Si PROPHARMED INTERNATIONAL et RESSOURCETHICA ont des activités similaires, la première intervient sur le marché africain, la seconde sur le marché français alors même qu'elles auraient les mêmes clients français et étrangers, ce qui n'est pas valablement contesté. Sur les chiffres toujours, l'Administration agite le chiffre de 43.000.000 euros de chiffre d'affaires réalisé sur 10 ans avec des clients français, sauf a rappeler notamment que la société suisse a déclaré des résultats largement déficitaires en 2015 et 2016 avec des pertes respectives de 415.407 francs suisses en 2015 et de 1.939.304 francs suisses en 2016.'
208. A cet effet, ils produisent les pièces numéros 117 et 118 constituées des bilans suisses des années 2015 et 2016.
209. Toutefois, outre qu'ils évoquent une facturation à hauteur de 10 M€ à la société française EP DIS en 2018 et 2019, il convient de souligner que les appelants n'explicitent, dans leurs écritures, aucune donnée chiffrée comptable ou financière ou tout autre élément de chiffre d'affaires autres que ceux produits à l'appui de la requête et susceptibles de contredire les constats du juge des libertés et de la détention selon lesquels il pouvait être présumé que :
- la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA peut être considérée comme un prestataire de services indépendant, assurant notamment la promotion, au nom et pour le compte de différents laboratoires français, de produits pharmaceutiques dans de nombreux pays africains ;
- la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA perçoit de manière régulière et habituelle des commissions et honoraires significatifs en provenance de laboratoires pharmaceutiques ou de sociétés grossistes en produits pharmaceutiques installés sur le territoire français et depuis 2011, perçoit des commissions et honoraires à titre prépondérant de l'entité française E.P. DIS, filiale du groupe EURAPHARMA lui-même actionnaire de la société RESSOURCETHICA ;
- la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA peut être considérée, conformément aux informations communiquées par le groupe EURAPHARMA, comme faisant partie de son «réseau France» et comme exerçant une activité de promotion médicale et pharmaceutique à destination de l'Afrique et dans les CTOM en s'appuyant sur des réseaux de visiteurs médicaux et de délégués pharmaceutiques qui assurent la promotion des produits et les prises de commandes pour le compte des laboratoires;
- le pouvoir décisionnel de la SCA RESSOURCETHICA se trouve concentré entre les mains de M. [O] [F] [C] (Pièces n°9,13 et n°25) et les entités françaises SCA RESSOURCETHICA et SARL AFRIGESTION sont présumées exercer une activité similaire ou complémentaire à l'entité de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL SA et disposent également d'un dirigeant commun en la personne de M. [F] [O] [C].
Sur les moyens matériels et humains dont disposerait la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA en France au travers de la société RESSOURCETHICA
210. S'agissant des éléments caractérisant l'existence de présomptions d'agissements frauduleux retenus par le juge des libertés et de la détention, la décision d'autorisation querellée mentionne, par une appréciation pertinente des éléments de la requête accompagnée de pièces qui lui a été présentée et que cette juridiction fait sienne, qu'il ressortait des éléments de l'enquête que :
- il ressort de constatations visuelles opérées au [Adresse 4] qu'il existe une boîte aux lettres portant les mentions « PROPHARMED FRANCE PROPHARMED INTERNATIONAL RESSOURCETHICA / AFRIGESTION / RP MED ETHICA INTERNATIONAL » (Pièce n°23).
- il apparaît en outre que la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA use de l'adresse sise [Adresse 17] afin d'importer des biens en FRANCE (Pièce n°63).
- plusieurs salariés de la société RESSOURCETHICA, domiciliés en FRANCE, se présentent sur leurs profils LinkedIn comme travaillant au sein du réseau au sein de PROPHARMED FRANCE / EURAPHARMA de 2007 à 2016 à [Localité 37], gérant des grands comptes correspondants à des laboratoires français qui versent des honoraires ou des commissions à la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA ou (Pièce n°15),
- une autre salariée, domiciliée en France, se revendique, sur le réseau professionnel LinkedIn, comme directeur administratif et financier de RESSOURCETHICA depuis décembre 2011; Auparavant, elle était responsable comptable puis responsable administratif et financier de PROPHARMED FRANCE;
- ainsi rémunérée comme directrice administrative par la société PROPHARMED FRANCE jusqu'en 2016 puis, à partir de 2017, rémunérée par la société RESSOURCETHICA pour la fonction de directrice administrative et financière, est l'interlocutrice de l'administration fiscale pour la société RESSOURCETHICA et fait état au titre de ses coordonnées de contact de l'adresse courriel à son nom en messagerie '@propharmed-international.ch' et d'un numéro de téléphone portable attribué à DEPHI-PROPHARMED FRANCE ayant pour adresse l'adresse de la société RESSOURCETHICA à [Localité 37];
- ainsi, cette salariée utilise des moyens de communication appartenant à la société suisse CIDER PROMOTION INTERNATIONAL (devenue PROPHARMED INTERNATIONAL SA) dans ses relations avec l'administration fiscale française ;
- une dernière salariée domiciliée en FRANCE, rémunérée jusqu'à la date du 30/06/2019 parmi les salariés déclarés par la SCA RESSOURCETHICA en qualité de responsable Qualité et Certification, indique sur son profil LinkedIn qu'elle a exercé de février 2012 à juin 2019 les fonctions de « Quality & Compliance Officer» (soit Responsable qualité et conformité) chez RESSOURCETHICA à [Localité 37] ;
- à la rubrique Expérience de son profil LinkedIn, elle relate qu'elle a exercé au sein de RESSOURCETHICA, sa fonction de responsable qualité et conformité pour le compte de plusieurs sociétés pharmaceutiques (promotion): BMS, Sanofi, MSD, Acino, Astellas, Allergan, Takeda,... ; et ce pour l'Afrique francophone (plus de 17 pays), au Maroc, en Tunisie et dans les territoires français d'outre-mer (Pièces n°61 et n°61-1) ;
- le contrat de prestations unissant la SASU DAIICHI SANKYO FRANCE et PROPHARMED INTERNATIONAL SA mentionnant que les prestations de promotion relevant du secteur pharmaceutique délivrées par cette dernière sont à destination de 14 Etats implantés sur le continent africain, cette salariée, employée de la société française RESSOURCETHICA pendant 7 ans, est susceptible d'avoir exercé ses fonctions pour le compte de PROPHARMED INTERNATIONAL SA depuis les locaux de RESSOURCETHICA sis à [Localité 37];
- une facture émise le 13/10/2017 par la société SARL WEEMATCH, libellée à la société PROPHARMED INTERNATIONAL sise [Adresse 6] afférente à des travaux d'impression fait apparaître l'adresse de livraison suivante : PROPHARMED FRANCE, à l'attention d'une salariée de la société RESSOURCETHICA et adressée à l'adresse de ladite société ;
- ainsi, il apparaît que l'activité de la société PROPHARMED INTERNATIONAL est réalisée notamment par une salariée de la SCA RESSOURCETHICA au siège de cette dernière à [Localité 37], en la personne de cette dernière salariée, résidente fiscale française.
- enfin, [R] [C], fille de M. [O] [F] [C], directeur général de PROPHARMED INTERNATIONAL SA, indique sur son profil publié sur le réseau social LinkedIn et édité le 10/02/2020, qu'elle est, depuis octobre 2018, «Junior Key Account Manager» (responsable grands comptes - junior) chez RESSOURCETHICA / PROPHARMED INTERNATIONAL - Côte d'ivoire / [Localité 31], tout en mentionnant qu'elle se situe à « [Localité 33], Ile- de-France, France » (Pièces n°42 et n°43) ;
- sur le profil publié sur le même réseau professionnel et édité le 13/10/2020, elle indique avoir exercé la fonction de « Key Account Manager » (responsable grands comptes) jusqu'en septembre 2020 en Côte d'ivoire et à [Localité 31] et qu'elle serait désormais « Head of DIGITAL» (« Responsable département DIGITAL ») depuis septembre 2020 chez Groupe ETHICA à [Localité 33] en France ainsi qu'à [Localité 20] en Côte d'ivoire (Pièces n°42 et n°44);
- [R] [C] est inconnue des services fiscaux français en ne déposant pas de déclaration de ses revenus (Pièce n°46) ; Or, selon la déclaration sociale nominative de l'année 2018 souscrite par la SCA RESSOURCETHICA, [R] [C], résidant à [Localité 15], a été stagiaire rémunérée par SCA RESSOURCETHICA sur la période du 1/2/2018 au 31/07/2018 (Pièce n°40) ;
- [R] [C], Responsable grands comptes - junior chez RESSOURCETHICA/ PROPHARMED INTERNATIONAL jusqu'en septembre 2020 puis Responsable département DIGITAL chez Groupe ETHICA est présumée exercer ou avoir exercé ses fonctions pour le compte de PROPHARMED INTERNATIONAL SA depuis la France où elle est présumée travailler au sein de la société RESSOURCETHICA à [Localité 37].
211. Les appelants indiquent dans leurs écritures (pages 22, 23 et 24) que tous les personnels évoqués sont d'anciens salariés de PROPHARMED FRANCE repris par la société RESSOURCETHICA et que le relevé de la mention de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA sur la boîte aux lettres de RESSOURCETHICA n'est pas pertinent pour démontrer l'usage des moyens de la société RESSOURCETHICA par la société suisse PROPHARMED INTERNATIONAL SA pour exercer ses activités depuis la France.
212. Ils déclarent ainsi 'En ce qui concerne les moyens humains, il est cité Madame XXX, Madame XXXX, Madame XXXXI, Madame XXXX|.
Or, l'Ordonnance procède par erreur en confondant les salariés de PROPHARMED FRANCE et de RESSOURCETHICA. Les deux sociétés sont distinctes de par leur domaine d'intervention et PROPHARMED INTERNATIONAL a conclu des contrats de prestation de services avec PROPHARMED FRANCE et RESSOURCETHICA pour avoir accès a des services administratifs auprès des salariés de ces deux entités françaises.
Jusqu'en 2016, les salaries stigmatisés au sein de RESSOURCETHICA comme étant les moyens humains développant le Chiffre d'Affaires de PROPHARMED INTERNATIONAL étaient des salariés PROPHARMED FRANCE.
Ensuite, ces salariés, une fois la Transmission Universelle de Patrimoine réalisée, sont des salaries de RESSOURCETHICA.
Or, des conventions de prestation de services étaient régulièrement conclues entre les différentes entités pour réaliser les prestations pointées du doigt par l'Administration, prestations qui donnaient lieu a rémunération et qui étaient valablement déclarées au CAC et déclarées dans le Chiffre d'Affaires des deux sociétés françaises.
Ainsi, c'est de manière parfaitement licite que la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL a recours aux services de la société PROPHARMED FRANCE et RESSOURCETHICA et la remunère a ce titre. Le fait que la société PROPHARMED FRANCE ou RESSOURCETHICA prennent en charge pour sa société soeur / filiale suisse les prestations purement administratives répond à une stratégie de groupe et ne peut suffire a démontrer que le cycle de commercialisation est accompli pour partie sur le territoire français. Cette prestation de services assurée par les sociétés françaises est insusceptible de caractériser la moindre présomption de fraude, étant en plus déclarée, comptabilisée et imposée par l'Administration fiscale française auprès de PROPHARMED FRANCE et RESSOURCETHICA.
En outre, qu'une boîte aux lettres avec la mention PROPHARMED INTERNATIONAL apparaisse à l'adresse de [Localité 37] de RESSOURCETHICA n'emporte aucune présomption dès lors que toutes les sociétés composant le groupe RESSOURCETHICA ou l'ayant composé, qu'elles soient établies en France ou l'étranger y sont indiquées. Cette boîte aux lettres comporte la mention de sociétés qui n'existent plus (PROPHARMED FRANCE, RP Med). L'intérêt en l'occurrence était de pouvoir recevoir des échantillons des laboratoires avec lesquels l'une d'elles travaille et de les dispatcher auprès de toutes les filiales du Groupe.'
213. Ainsi, les appelants, au travers de leurs écritures, en invoquant un mécanisme contractuel de prestations de services entre sociétés distinctes au sein du même groupe, reconnaissent et corroborent le constat du juge des libertés et de la détention de l'externalisation, répondant à la stratégie de groupe, d'un nombre important de prestations de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA au profit de la société RESSOURCETHICA qui la détient à 99,99 %, et partage la même direction au travers de la gérance de Monsieur [C] pour RESSOURCETHICA via la société AFRIGESTION, à laquelle il convient d'ajouter la convention de sous-traitance entre la société RESSOURCETHICA et la société de droit des Emirats Arabes Unis, ETHICA INTERNATIONAL dont le président directeur général est Monsieur [C].
214. Dès lors, il convient de relever que les appelants ne remettent pas en cause le constat du juge des libertés et de la détention selon lequel la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA, qui ne dispose d'aucun établissement déclaré sur le territoire français, s'avère pourtant mentionnée sur une boîte aux lettres à l'adresse du siège social de sa société mère, la SCA RESSOURCETHICA, sise [Adresse 4], s'avère également destinataire de biens importés à l'adresse [Adresse 17] et est présumée utiliser notamment le personnel de la société française SCA RESSOURCETHICA afin de réaliser son objet social.
Sur la résidence de Mr [C] et la fixation du centre décisionnel de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA en France
215. S'agissant des éléments caractérisant l'existence de présomptions d'agissements frauduleux retenus par le juge des libertés et de la détention, la décision d'autorisation querellée mentionne, par une appréciation pertinente des éléments de la requête accompagnée des pièces qui lui a été présentée et que cette juridiction fait sienne, qu'il ressortait des éléments de l'enquête que :
- la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA est dirigée par la société française SCA RESSOURCETHICA, son actionnaire à 99,99%, et de manière effective par M. [O] [F] [C], gérant de la SARL AFRIGESTION, elle-même gérante représentante de la SCA RESSOURCETHICA. M. [O] [F] [C] est, par ailleurs, directeur général investi d'un pouvoir de signature individuelle au sein de PROPHARMED INTERNATIONAL SA ( pièces n°1, 9 à 13)
- d'après sa fiche publiée sur le réseau collaboratif Linkedln, [F] [C] revendique être CEO (Chief Executive Officer, soit Directeur Général) de PROPHARMED INTERNATIONAL / RESSOURCETHICA SCA depuis 1999 à Abidjan/Genève/[Localité 31] (Pièce n°26);
- M. [O] [F] [C] et son épouse née [S] [HW] [T] le 04/06/1963 revendiquent diverses adresses sises à l'étranger (USA et Côte d'Ivoire) mais disposent également de plusieurs contrats d'assurance Allianz en France, notamment assurance vie et automobile pour 2 véhicules immatriculés en France, à leurs noms avec pour adressé déclarée par M. [F] [C] une adresse à [Localité 31] : le [Adresse 11], adresse pour laquelle est relevé un contrat d'abonnement d'électricité et des consommations enregistrées ; Ils disposent en outre de lignes téléphoniques actives;
- l'administration fiscale produit de nombreux éléments attestant de la présence régulière de Monsieur [C], non séparé de son épouse Madame [HW] [T] [S] [C] au regard de la déclaration de succession enregistrée le 30/01/2018 indiquant que Madame [HW] [T] [S], non résidente au sens de la réglementation fiscale, et Monsieur [O] [F] [C] demeurant à [Localité 20] (Côte d'IVOIRE), sont mariés sans modification depuis lors de leur régime matrimonial (Pièce n°30);
- Mme [HW] [T] [S], bénéficiaire de la protection universelle maladie en France considère donc qu'elle réside en France, et plus particulièrement à [Localité 31], de manière stable et régulière afin de solliciter la prise en charge de ses frais de santé par la CPAM de [Localité 31] alors que [O] [F] [C] revendique un régime réservé aux expatriés;
- selon l'opérateur téléphonique ORANGE SA, le numéro de téléphone [XXXXXXXX01] correspond à une ligne en service ayant pour nom de titulaire DEPHI-PROPHARMED FRANCE (SIREN 338 912 777) sise [Adresse 4] (Pièce n°35);
- la SAS PROPHARMED FRANCE, ayant pour sigle « DEPHI » (n° SIREN 338 912 777) disposait de son siège social au [Adresse 4] et avait pour associé unique la SCA RESSOURCETHICA, avant de faire l'objet d'une transmission universelle de patrimoine en 2016 au bénéfice de son associé unique (Pièce n°20);
- il en résulte donc que M. [O] [F] [C] est présumé utiliser une ligne téléphonique prise en charge par la SCA RESSOURCETHICA, venant aux droits et obligations de la SAS PROPHARMED FRANCE, alors qu'il ne perçoit aucune rémunération de cette entité;
- l'adresse sise [Adresse 17] est afférente à une villa dénommée « LA SANARYTAINE » acquise le 30/03/2016 par la société civile particulière de droit monégasque PAPATO représentée à l'acte par ses cogérants en la personne de M. [O] [F] [C] et de Mme [HW] [T] [S] (Pièces n°14, n°28 et n°62) ; d'après ENEDIS, un contrat de fourniture d'électricité est en cours à l'adresse susvisée depuis le 31/03/2016 ayant pour titulaire Mme [C] [HW] et des consommations y sont enregistrées (Pièces n°36 et n°36-1);
- ainsi, [O] [F] et [HW] [C] sont gérants d'une société monégasque propriétaire d'une villa sise [Adresse 17] ;
- M. [O] ou [O] [F] [C] dispose notamment de trois comptes bancaires ouverts et non clôturés dans des agences parisiennes dont son épouse s'avère également co-titulaire; cette dernière disposant quant à elle de trois autres comptes bancaires propres ouverts et non clôturés en FRANCE en l'espèce à [Localité 31] et à [Localité 36] (Pièces n°27 et n°38).
216. Les appelants contestent toute résidence en France faisant valoir que Monsieur [C] réside en Côte d'Ivoire et s'y déclare fiscalement domicilié.
Ils précisent dans leurs écritures (page16) 'Alors que les époux [C] réalisaient des déclarations séparées de revenus, l'Administration établirait que la résidence fiscale de Monsieur [C] serait française en s'attachant à révéler des informations sur son épouse dont il est séparé de biens. Selon l'Ordonnance et alors que Administration fiscale française sait pertinemment que Monsieur [C] a la nationalité française et ivoirienne, n'exerce aucune fonction salariée en France et ne dispose d'aucun mandat social rémunéré, est séparé de bien de son épouse avec laquelle il réalise des déclarations distinctes, a deux enfants majeurs, et sans que sa présence en France soit majoritairement avérée, il serait résident fiscal français ce qui impliquerait que le siège de direction effective de la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL soit en France.'
217. Ils ajoutent dans leurs écritures (page 39) ' L'Ordonnance n'indique pas que les fonctions de Directeur Général seraient réalisées a partir de la France. Au contraire, le relevé Air France produit a l'appui de la requête par l'Administration démontre que Monsieur [F] [C] est très peu en France et que son pays de départ est toujours la Côte d'Ivoire.. En outre, Monsieur [F] [C] est rémunéré par la société PROPHARMED INTERNATIONAL et déclare en Côte d'Ivoire ses revenus suisses pour un montant de 66.368.101 [Localité 27] CFA ou 102.012,55 francs Suisses au titre de ses revenus 2016 ; 66.059.641 [Localité 27] CFA ou 113.487 francs Suisses au titre de ses revenus 2017 et 66.184.601 [Localité 27] CFA ou 109.514 francs Suisses au titre de ses revenus 2018. Le pouvoir décisionnel qui semble concentre, pour le Juge des Libertés et de la Détention, entre les mains de Monsieur [F] [C] n'est pas exerce en France, pays dans lequel il ne vit pas et duquel il n'est pas résident. A ce titre, relevons que Monsieur [F] [C] n'est propriétaire d'aucune résidence en France. Il ne dispose pas d'un domicile a [Localité 31], la société RESSOURCETHICA est locataire d'un appartement a [Localité 31] pour ses clients et son Directeur Général notamment. La résidence [Adresse 22] n'est pas habitable conformément a ce qu'indique l'Huissier qui s'est rendu sur place et appartient a une SCI dont Monsieur [F] [C] est associe a 5%.'
218. Cependant, il convient de constater que ces éléments neremettent pas en cause le constat du juge des libertés et la détention selon lequel le couple que Monsieur [C] forme avec Mme [S], épouse [C] , dispose d'une résidence qu'ils ont déclarée à [Localité 31] ainsi que d'une résidence à [Localité 36], témoignant d'une occupation effective et commune ainsi que plusieurs comptes bancaires en France et des contrats d'assurances dont des assurances véhicules immatriculés en France au nom de Monsieur [C] et que des biens sont importés à l'adresse de l'[Adresse 23] à [Localité 36] par la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA.
219. En outre, il ressort de la pièce n°104 produite par les appelants que la résidence sise, [Adresse 11] dont disposent les époux [C] est constituée d'un bien loué par la société RESSOURCETHICA.
220. Dès lors, les appelants ne remettent pas en cause la présomption retenue par le juge des libertés et de la détention que M. [F] [O] [C], avec son épouse, Mme [HW] [T] [S], résident à titre habituel et permanent en FRANCE.
221. Ainsi c'est juste titre que le juge des libertés et de la détention a pu retenir que :
- le centre décisionnel de la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL SA est présumé se situer en FRANCE notamment en la personne de M. [F] [O] [C], susceptible de résider de manière habituelle et permanente sur le territoire national et disposant de la qualité de directeur général et des pouvoirs de gestion et d'engagement de ladite société ;
- que la SCA de droit français RESSOURCETHICA dispose, outre le rôle clé réservé à M. [F] [C] par ailleurs gérant de la SCA au travers de la SARL AFRIGESTION, de salariés et cadres aptes à réaliser, depuis le territoire français, les activités de promotion médicale et pharmaceutique de la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL SA.
- la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL SA semble utiliser notamment les moyens humains et matériels localisés à [Localité 37] et appartenant à la SCA de droit français RESSOURCETHICA ou à la SARL AFRIGESTION, elle- même dirigée par M. [O] [F] [C] et gérante de la SCA précitée pour la réalisation de tout ou partie de son activité de promotion, au nom et pour le compte de laboratoires, de produits pharmaceutiques ainsi que de réalisation des démarches administratives afférentes auprès du corps médical et pharmaceutique.
222. Il résulte de l'ensemble de tous ces éléments, outre ceux relatifs à la fixation du siège social de la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL SA à la même adresse qu'un cabinet fiduciaire en Suisse et à son administration par M. [M], de nationalité suisse et résident en Suisse, avocat titulaire de 73 mandats sociaux dont 25 actifs, à l'insuffisance, attestée par la présence d'un seul salarié déclaré à mi-temps, de moyens humains et matériels d'exploitation en Suisse, conjugués à l'ampleur de l'activité développée, l'externalisation de prestations importantes d'administration et de gestion au profit de la société RESSOURCETHICA, constituent des indices sérieux de nature à présumer que le centre décisionnel de la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA est situé en France et que l'activité opérée par la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA semble initiée ou conduite depuis le territoire français, ce d'autant qu'elle ne fournit aucune pièce attestant de la réalité d'une quelconque activité réalisée depuis la Suisse.
223. Ainsi, il a pu être présumé à juste titre par le juge des libertés et de la détention que la société de droit suisse PROPHARMED INTERNATIONAL SA exercerait, depuis la FRANCE, tout ou partie de ses activités de représentation, distribution et promotion de tous produits pharmaceutiques et également pour but d'acquérir, détenir, exploiter et vendre tous droits sur des médicaments, sans souscrire les déclarations fiscales correspondantes et, ainsi, omettrait de passer les écritures comptables y afférentes.
224. En conséquence, sans qu'il soit nécessaire de statuer sur les autres moyens soulevés par les appelants, il convient de constater que l'ensemble des indices visés par l'ordonnance du juge des libertés et de la détention étaient donc de nature à faire présumer que la société de droit suisse la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA exercerait ou a exercé, depuis la FRANCE, tout ou partie de ses activités de représentation, distribution et promotion de tous produits pharmaceutiques et également pour but d'acquérir, détenir, exploiter et vendre tous droits sur des médicaments sans souscrire les déclarations fiscales correspondantes et, ainsi, omettrait de passer les écritures comptables y afférentes en France.
225. La société PROPHARMED INTERNATIONAL SA est ainsi présumée s'être soustraite et/ou se soustraire à l'établissement et au paiement de l'impôt sur les sociétés ou des taxes sur le chiffre d'affaires, en se livrant à des achats ou des ventes sans facture, en utilisant ou en délivrant des factures ou des documents ne se rapportant pas à des opérations réelles ou en omettant sciemment de passer ou de faire passer des écritures ou en passant ou en faisant passer sciemment des écritures inexactes ou fictives dans des documents comptables dont la tenue est imposée par le Code Général des Impôts (articles 54 et 209-1 pour l'IS, et 286 pour la TVA).
226. En conséquence, les moyens soulevés par la société PROPHARMED INTERNATIONAL SA au titre des présomptions seront rejetés.
Sur le contrôle du juge
227. Les appelants font valoir que 'le juge des libertés et de la détention n'a pas procédé à un véritable examen des pièces et s'est livré à une appréciation erronée.'
228. Les motifs et le dispositif de l'ordonnance rendue en application de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales sont réputés établis par le juge qui l'a rendue et signée et cette présomption ne porte pas atteinte aux principes d'impartialité et d'indépendance du juge qui statue sur requête, dans le cadre d'une procédure non contradictoire (Com., 28 mai 2013, pourvoi n° 12-16.317 ; Com., 3 mai 2018, pourvoi n° 16-25.068).
229. En l'espèce, outre l'analyse précise et détaillée des pièces que la présente juridiction a fait sienne, les appelants n'établissent pas en quoi le juge des libertés et de la détention se soit dispensé de contrôler les pièces qui étaient soumises à son appréciation avant de rendre l'ordonnance autorisant les opérations de visite et de saisie.
230. Dès lors, le moyen sera rejeté.
Sur la présentation des éléments de la requête par la DNEF
231. En application de l'article L16B du LPF, il appartient à l'administration fiscale à l'appui de sa demande d'autorisation de visite, de produire tous les éléments d'information en sa possession de nature à justifier la visite.
232. Les appelants font valoir qu'en l'espèce, le juge des libertés et de la détention s'est fondé sur une présentation biaisée et erronée faite par la DNEF avec des éléments erronés en omettant des pièces de nature à remettre en cause la présomption de fraude retenue aux fins d'autorisation de l'opération de visite et de saisie telles notamment toutes les pièces relatives à l'activité en Afrique et la réalité du processus décisionnel en Suisse.
233. Cependant, outre que la DNEF a produit toutes les pièces justifiant des indices de nature à présumer une fraude, les appelants ne justifient, ni ne caractérisent en quoi la DNEF aurait présenté les éléments en sa possession de façon biaisée ou erronée alors qu'elle ne conteste pas les constatations matérielles de la DNEF quant à la consistance et nature de ses statuts, de sa direction par Monsieur [C], de son administration unique par un avocat suisse dont elle ne justifie pas de la réalité de l'activité, et pas davantage de la consistance de son organisation, de ses moyens humains et matériels en Suisse, de ses liens contractuels privilégiés, caractérisés par des contrats de prestations avec la société basée en France RESSOURCETHICA, qui la détient capitalistiquement à 99,99 % , soit presque en totalité, elle-même géré par la société AFRIGESTION SARL dont le gérant unique est Monsieur [C].
234. Dès lors, ce moyen sera écarté.
235. En conséquence, et sans qu'il soit nécessaire de statuer sur les autres moyens soulevés par les parties, l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de PARIS en date du1er février 2021, sera confirmée en toutes ses dispositions.
Sur l'article 700 du code de procedure civile
236. Conformément aux dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, les sociétés PROPHARMED INTERNATIONAL SA et SCA RESSOURCETHICA, Monsieur [F] [C], Madame [HW] [S] épouse [C], Madame [R] [C], et Monsieur [AL] [Y] succombant en leurs demandes, seront condamnés à payer la somme de 2.000 € à la DNEF au titre de ses frais irrépétibles et non compris dans les dépens.
Sur les dépens
237. Les sociétés PROPHARMED INTERNATIONAL SA et SCA RESSOURCETHICA, Monsieur [F] [C], Madame [HW] [S] épouse [C], Madame [R] [C], et Monsieur [AL] [Y], succombant en leurs prétentions, sont tenus aux dépens.
PAR CES MOTIFS :
Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Déclarons la note en délibéré adressée par les appelants le 3 juillet 2025 et la note en délibéré en réponse du 4 juillet 2025 de la DNEF irrecevables ;
Confirmons en toutes ses dispositions l'ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de PARIS en date du 1er février 2021 ;
Condamnons les sociétés PROPHARMED INTERNATIONAL SA et SCA RESSOURCETHICA, Monsieur [F] [C], Madame [HW] [S] épouse [C], Madame [R] [C], et Monsieur [AL] [Y] à payer à la Direction Nationale des Enquêtes Fiscales la somme de DEUX MILLE EUROS (2000 euros) au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Rejetons le surplus des demandes ;
Condamnons les sociétés PROPHARMED INTERNATIONAL SA et SCA RESSOURCETHICA, Monsieur [F] [C], Madame [HW] [S] épouse [C], Madame [R] [C], et Monsieur [AL] [Y] aux dépens.
LE GREFFIER
Véronique COUVET
LE DÉLÉGUÉ DU PREMIER PRESIDENT
Karima ZOUAOUI