CA Paris, Pôle 5 - ch. 8, 17 juillet 2025, n° 25/05053
PARIS
Arrêt
Autre
Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 8
ARRÊT DU 17 JUILLET 2025
(n° / 2025, 11 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 25/05053 - N° Portalis 35L7-V-B7J-CLAKD
Décision déférée à la Cour : Jugement du 18 mars 2025 -Tribunal de commerce d'EVRY - RG n° 2025L00266
APPELANTE
S.A.S. SODAIC, société par actions simplifiée unipersonnelle, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège en cette qualité,
Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de BOBIGNY sous le numéro 530 128 248,
Dont le siège social est situé [Adresse 1]
[Adresse 6]
[Localité 5]
Représentée par Me Me Nathalie LESENECHAL, avocat au barreau de PARIS, toque : D2090,
Assistée de Me Olivier PECHENARD de la SELARL PBM AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : B0899,
INTIMÉES
S.E.L.A.R.L. MJC2A, prise en la personne de Maître [K] [R], en qualité de commissaire à l'exécution du plan et liquidateur judiciaire de la SAS SODAIC,
Immatriculée au registre du commerce et des sociétés d'EVRY sous le numéro 501 184 774,
Dont le siège social est situé [Adresse 3]
[Localité 4]
S.E.L.A.R.L. A & M AJ ASSOCIES, prise en la personne de Maître [F] [N], en qualité d'administrateur judiciaire de la société SODAIC,
Immatriculée au registre du commerce et des sociétés d'EVRY sous le numéro 529 296 295,
Dont le siège social est situé [Adresse 2]
[Localité 4]
Représentées et assistées de Me Julien ANDREZ de la SELARL SEKRI VALENTIN ZERROUK, avocat au barreau de PARIS, toque : P555,
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 1er juillet 2025, en audience publique, par la cour, composée de:
Madame Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT, présidente de chambre,
Madame Constance LACHEZE, conseillère,
Monsieur François VARICHON, conseiller,
qui en ont délibéré.
Un rapport a été présenté à l'audience par Madame Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT dans le respect des conditions prévues à l'article 804 du code de proécdure civile.
Greffier, lors des débats : Madame Liselotte FENOUIL
ARRÊT :
- Contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Constance LACHEZE, conseillère faisant fonction de présidente , et par Liselotte FENOUIL, greffière, présente lors de la mise à disposition.
***
FAITS ET PROCÉDURE:
La SAS Sodaic a pour activités le nettoyage, l'armement commercial, la fouille des cabines d'avion, la maintenance et la blanchisserie. Ses clients sont principalement des compagnies aériennes. Elle emploie environ 330 salariés.
Par jugement du 10 novembre 2017, rendu sur requête du ministère public, le tribunal de commerce d'Evry a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la société Sodaic et désigné la SELARL MJC2A en la personne de Me [R] en qualité de mandataire judiciaire.
Le 31 octobre 2018, le tribunal a arrêté le plan de redressement de la société Sodaic prévoyant le remboursement d'un passif de 4.986.359,21 euros en dix annuités progressives, la SELARL MJC2A, en la personne de Me [R], étant désignée en qualité de de commissaire à l'exécution du plan.
Invoquant des tentatives de recouvrement infructueuses des échéances impayées du plan et le signalement de nouvelles dettes, le commissaire à l'exécution du plan a, le 6 février 2025, saisi le tribunal d'une requête en résolution du plan et, après avoir constaté la cessation des paiements, en ouverture d'une liquidation judiciaire.
Par jugement du 18 mars 2025, le tribunal de commerce d'Evry a déclaré résolu le plan de redressement homologué le 31 octobre 2018, constaté l'état de cessation des paiements, ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'égard de la société Sodaic, fixé provisoirement au 18 septembre 2023 la date de cessation des paiements, nommé la SELARL MJC2A, en la personne de Me [R], en qualité de liquidateur, nommé la SELARL A&M AJ associés, prise en la personne de Me [N], en qualité d'administrateur judiciaire avec la mission d'administrer l'entreprise, autorisé le maintien de l'activité jusqu'au 18 avril 2025, et ce, sous la seule responsabilité de l'administrateur, dit qu'il pourra y mettre fin si l'intérêt public vient à l'exiger et ordonné l'emploi les dépens en frais privilégiés de la liquidation judiciaire.
La société Sodaic a relevé appel de ce jugement, le 23 mars 2025 en intimant la SELARL MJC2A en la personne de Maître [R], ès qualités, et la SELARL A&M AJ Associés en la personne de Maître [N], ès qualités.
Par ordonnance du 11 avril 2025, le délégataire du premier président de la cour d'appel a arrêté l'exécution provisoire attachée au jugement.
Dans ses dernières conclusions n°2, déposées au greffe et notifiées par voie électronique le 16 juin 2025, la société Sodaic demande à la cour:
- d'infirmer le jugement en ce qu'il déclaré le plan résolu, constaté l'état de cessation des paiements, ouvert une liquidation judiciaire et en ses plus amples dispositions,
- statuant à nouveau,
- de déclarer irrecevable pour défaut d'intérêt à agir la SELARL MJ2CA en qualité de liquidateur de la société Sodaic et la SELARL A&M AJ associés en qualité d'administrateur de la société Sodaic, en leur demande de résolution du plan de redressement et d'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire,
- à défaut d'accueillir cette fin de non recevoir, à titre principal, débouter le liquidateur et l'administrateur ès qualités de toutes leurs demandes, fins et conclusions, à titre subsidiaire, si la cour devait estimer que les conditions d'ouverture d'une liquidation judiciaire sont réunies, infirmer le jugement en ce qu'il a fixé la date de maintien d'activité au 18 avril 2025, et statuant à nouveau, autoriser le maintien de l'activité pour une période de trois mois à compter de la date de la décision à intervenir,
- en tout état de cause, débouter le liquidateur et l'administrateur ès qualités de toutes leurs demandes, fins et conclusions, et les condamner aux dépens qui seront comptés en frais privilégiés de procédure collective.
Par dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par voie électronique le 26 juin 2025, la société MJC2A, en la personne de Me [R] en ses qualités de commissaire à l'exécution au plan et de liquidateur judiciaire de la société Sodaic, et la SELARL A&M AJ associés, en la personne de Me [N] en sa qualité d'administrateur judiciaire de la société Sodaic demandent à la cour de débouter la société Sodaic de sa fin de non-recevoir tendant à faire déclarer irrecevable leur demande de résolution du plan et d'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire, confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré résolu le plan de redressement homologué le 31 octobre 2018, constaté l'état de cessation des paiements, ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'égard de la société Sodaic, fixé provisoirement au 18 septembre 2023 la date de cessation des paiements, nommé la Selarl MJC2A, en la personne de Me [R], en qualité de mandataire judiciaire, nommé la Selarl A&M AJ associés, en la personne de Me [N], en qualité d'administrateur judiciaire, avec la mission fixée par l'article L. 641-10 du code de commerce, notamment d'administrer l'entreprise, autoriser le maintien de l'activité pendant une période de trois mois à compter du prononcé de l'arrêt, débouter la société Sodaic de toute prétention, et employer les dépens en frais privilégiés de la procédure collective.
Par avis notifié par voie électronique le 30 mai 2025, le ministère public sollicite l'infirmation de la décision, mais si la cour devait confirmer la liquidation de la société, de maintenir l'activité pour une période de trois mois à compter de sa décision afin de permettre de trouver une solution de cession de l'entreprise.
SUR CE,
Sur la fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir de Me [R] en qualité de commissaire à l'exécution du plan
La société Sodaic soulève le défaut d'intérêt du commissaire à l'exécution du plan à saisir le tribunal pour obtenir la résolution du plan de redressement et l'ouverture d'une procédure collective fondée sur le défaut de paiement d'une créance postérieure à l'arrêté du plan, arguant qu'il n'est pas chargé de représenter les intérêts des créanciers postérieurs à l'arrêté du plan et que cette saisine va au contraire à l'encontre des créanciers du plan.
Le liquidateur et l'administrateur judiciaires répliquent que le commissaire à l'exécution du plan est chargé de veiller à l'exécution du plan, qu'il est ainsi habilité à saisir le tribunal par voie de requête sur le fondement de l'article R.626-48 du même code aux fins de résolution du plan en cas d'inexécution, qu'en l'espèce la requête du 6 février 2025 de Me [R] agissant en qualité de commissaire à l'exécution du plan repose bien sur une inexécution des obligations du plan par la société débitrice qui n'avait pas procédé au règlement de la 6ème annuité à la date requise, ce qui a empêché le commissaire du plan de procéder au règlement des créanciers au 31 janvier 2025, que la société débitrice n'a pas contesté cette inexécution puisqu'elle a proposé un échéancier de règlement au commissaire à l'exécution au plan, que ce défaut d'exécution est toujours à date caractérisé dès lors que la société débitrice n'a procédé à aucun règlement mensuel au titre de la 7ème annuité, que le prononcé d'une procédure de liquidation judiciaire appartient au tribunal de commerce, que le commissaire du plan est parfaitement habilité à faire état de sa position à ce titre, qu'ainsi la cour déboutera la société appelante de sa fin de non recevoir.
Selon l'article L. 626-25 du code de commerce le commissaire à l'exécution du plan nommé par le jugement arrêtant le plan est chargé de veiller à l'exécution du plan et notamment rend compte au président du tribunal et au ministère public du défaut d'exécution du plan.
Il résulte de l'article L. 626-27, II du code de commerce que lorsque le débiteur n'exécute pas ses engagements dans les délais fixés par le plan, ainsi que lorsque la cessation des paiements est constatée au cours de l'exécution du plan, le tribunal est saisi par un créancier, le commissaire à l'exécution du plan ou le ministère public. L'article R. 626-47 du code de commerce prévoit que 'Le commissaire à l'exécution du plan signale, dans un rapport adressé au président du tribunal et au ministère public, l'inexécution du plan de la part du débiteur ou de toute autre personne.'
Eu égard à la mission qui lui est dévolue par la loi à la suite de sa désignation par le jugement ayant arrêté le plan de redressement, le commissaire à l'exécution du plan a bien non seulement qualité pour saisir le tribunal, ce qui n'est pas contesté, mais également intérêt à faire constater par le tribunal l'inexécution du plan et le cas échéant l'existence d'un passif né postérieurement audit plan, à charge pour le tribunal de caractériser ou non un état de cessation des paiements et d'en tirer les conséquences quant à l'ouverture d'une liquidation judiciaire. Il est constant qu'à la date de la requête et encore à hauteur d'appel, les dispositions du plan de redressement n'étaient pas respectées.
Il s'ensuit que le commissaire à l'exécution du plan était parfaitement recevable à saisir le tribunal et que les organes de la procédure sont également recevables à hauteur d'appel à conclure à la confirmation du jugement.
La fin de non recevoir sera rejetée.
- Sur la demande d'infirmation du jugement
Aux termes de l'article L. 626-27 du code de commerce, rendu applicable au redressement judiciaire par l'article L. 631-19 du même code, 'le tribunal qui a arrêté le plan peut, après avis du ministère public, en décider la résolution si le débiteur n'exécute pas ses engagements dans les délais fixés par le plan'.
S'agissant des plans de redressement, l'article L.631-20 du code de commerce dispose que « Par dérogation aux dispositions du troisième alinéa de l'article L. 626-27, lorsque la cessation des paiements du débiteur est constatée au cours de l'exécution du plan, le tribunal qui a arrêté ce dernier décide, après avis du ministère public, sa résolution et ouvre une procédure de liquidation judiciaire. »
- sur la résolution du plan
Le plan de redressement arrêté le 31 octobre 2018 prévoit un apurement du passif selon les modalités suivantes:
- option 1: règlement d'un unique dividende pour solde de tout compte de 12,5% sans intérêts, le 30 juin 2019, aux créanciers qui l'accepteront,
- option 2: règlement à 100% sans intérêt sur une durée de 10 ans en 10 dividendes annuels progressifs (5% à 12,5%) du 30 juin 2019 au 31 janvier 2029, le dividende annuel étant payable par mensualités.
Il est constant que les cinq premières annuités ont été réglées, les difficultés sont apparues au moment de la 6ème annuité (11,5%) d'un montant de 566.612,84 euros, à échéance du 31 janvier 2025, qui n'avait donné lieu qu'à un paiement de 150.000 euros au 31 décembre 2024.
Toutefois, il est désormais acquis aux débats que la société Sodaic a réglé la totalité de la 6ème annuité, bien qu'avec retard.
Les organes de la procédure invoquent désormais le défaut de paiement des mensualités de la 7ème annuité (11,5%) d'un montant de 566.612,84 euros, qui est à échéance du 31 janvier 2026. Ils en déduisent que le non-respect par la société Sodaic de ses engagements est ainsi caractérisé au sens des dispositions de l'article L.626-27 du code de commerce.
Les mensualités non payées, selon les indications non contestées des organes de la procédure, représentent au 31 mai 2025 un montant de 236.088,68 euros.
La société Sodaic objecte que cette 7ème annuité n'est pas encore exigible, que les mensualités ne constituent que de simples modalités de paiement qui n'ont jamais été appliquées par le passé sans que cela pose problème.
Toutefois, le jugement arrêtant le plan de redressement a expressément prévu un paiement des annuités par mensualité du douzième, la circonstance que le commissaire à l'exécution du plan ne répartit les fonds collectés qu'une fois par an étant sans incidence sur l'obligation de régler par mensualités.
Les organes de la procédure sont donc fondés à invoquer à hauteur d'appel l'inexécution de plusieurs mensualités du plan au titre de la 7ème annuité.
Toutefois sachant que la société au travers des six premières annuités a déjà pris en charge 53 % du passif du plan de redressement, que la date de répartition n'est prévue que dans six mois, la cour n'estime pas devoir prononcer la résolution du plan pour non paiement des mensualités du dividende non échu.
- Sur l'état de cessation des paiements
S'il vient d'être jugé qu'il n'y avait pas lieu à résolution du plan au titre du seul retard dans le paiement des mensualités du dividende à échoir, il reste à déterminer si un état de cessation des paiements est survenu en cours d'exécution du plan, lequel justifierait alors l'ouverture d'une liquidation judiciaire.
Le liquidateur et l'administrateur judiciaires soutiennent que la société Sodaic a généré un nouveau passif social de 4.298.291,78 euros ainsi que d'autres créances d'ores et déjà identifiées à hauteur de 941.847,48 euros, auxquels la société ne peut faire face avec un actif disponible de 807.701,78 euros, outre ses charges courantes relatives au paiement de 338 salariés, charges locatives etc., en ce non comprises les mensualités impayées du plan. Ils en déduisent que l'état de cessation des paiements est caractérisé et que l'ouverture d'une liquidation judiciaire s'impose.
La société Sodaic réplique que les organes de la procédure, sur lesquels reposent la charge de la preuve, manquent à caractériser l'existence d'un état de cessation des paiements qu'elle conteste, arguant qu'elle dispose de liquidités suffisantes pour faire face à la 7ème annuité du plan et à ses charges courantes et qu'il n'est pas justifié d'un passif exigible postérieur.
Il convient d'examiner les trois créances invoquées par les organes de la procédure au titre du passif exigible né en cours d'exécution du plan, étant observé qu'ils entendent caractériser l'état de cessation des paiements sans même prendre en compte les mensualités du plan impayées.
- Sur la créance [Localité 7] Humanis
Suite à l'ouverture de la liquidation judiciaire, [Localité 7] Humanis a déclaré une créance de 838.906,58 euros correspondant à des cotisations impayées entre novembre 2019 et mars 2025.
La société Sodaic considère que cette créance doit être retranchée du passif exigible dès lors qu'elle a fait l'objet d'un moratoire et que le défaut de paiement de l'échéance de février 2025 est consécutive à l'ouverture de la liquidation judiciaire.
Les organes de la procédure relèvent que si en janvier 2025, [Localité 7] Humanis a effectivement proposé une échéancier sur 12 mois, la société Sodaic ne justifie pas de l'acceptation et a fortiori de l'exécution de cet échéancier.
Il ressort de la pièce 24 de l'appelante, que par mail du 10 janvier 2025, portant en objet 'proposition d'échéancier Sodaic', [Localité 7] Humanis (via Mme [E] assistante de gestionnaire recouvrement) a confirmé à M.[P] de la société Sodaic une proposition d'échéancier portant sur un total de 606.514,31 euros, qui correspondait alors au montant de l'arriéré, selon les modalités suivantes: une première échéance de 172.018,82 euros correspondant aux parts salariales obligatoires, puis 11 échéances de 39.499,59 euros. Mme [E] indiquait à la fin de son courriel être en attente de la réponse de la société.
Il n'est pas justifié d'une acceptation de cette proposition par Sodaic dans les deux mois qui ont précédé la résolution du plan et l'ouverture de la liquidation judiciaire le 18 mars 2025, or cette proposition de plan était subordonnée à l'acceptation par la société de régler une première échéance d'un montant substantiel de 172.018,82 euros, les termes du courriel ne permettant pas de retenir que les parties auraient convenu d'un report dans le temps de cette première mensualité.
La société Sodaic qui n'établit pas avoir accepté cette proposition, ni formellement, ni même en pratique en réglant la première échéance, ne peut se retrancher derrière l'ouverture de la liquidation judiciaire, alors qu'elle a disposé de deux mois avant l'ouverture de la liquidation judiciaire pour faire diligence.
A défaut d'échéancier en cours, la créance de 838.906,58 euros s'analyse en du passif exigible au sens de l'article L. 631-1 du code de commerce.
- Sur la créance AG2R La Mondiale: 102.940,90 euros
AG2R la Mondiale a déclaré le 15 mai 2025 une créance de 102.940,90 euros à titre privilégié correspondant aux cotisations impayées des 2ème, 3ème et 4ème trimestres 2024 ainsi que du 1er trimestre 2025.
La société Sodaic expose qu'il n'est aucunement démontré l'existence d'une créance exigible d'AG2R et en tous les cas, pas pour les montants avancés. Elle relève, d'une part, la singularité de cette déclaration qui fait état d'une créance postérieure au jugement de redressement alors qu'il suffisait que l'organisme déclare sa créance au passif de la liquidation judiciaire, d'autre part que la mise en demeure délivrée ne concerne que les 3èmeet 4ème trimestres 2024 pour un total de 5.967,48 euros.
La circonstance qu'AG2R La Mondiale précise dans sa lettre accompagnant son bordereau de déclaration qu'elle dispose d'une créance postérieure au jugement de redressement judiciaire n'affecte en rien sa déclaration de créance et n'est pas de nature à rendre incertaine la créance déclarée au passif de la liquidation judiciaire.
Quant à la mise en demeure du 4 avril 2025, jointe à la déclaration, qui fait état de cotisations estimées à un total de 5.967,48 euros au titre des cotisations des 3ème et 4ème trimestres 2024, elle se réfère à un contrat différent de ceux visés dans la déclaration de créance, de sorte qu'il ne peut à ce stade en être déduit que les montants figurant dans le déclaration sont à minorer à due concurrence.
Cette créance de 102.940,90 euros doit donc être intégrée dans le passif exigible.
- sur les créances de l'Urssaf
Les organes de la procédure soutiennent que nonobstant les recours divers formés par la société Sodaic qui bloquent le recouvrement d'une somme de 3.147.180,50 euros, le montant restant exigible à ce jour s'élève à 1.151.111,28 euros, au titre des périodes suivantes:
- novembre 2024 : 236.242 euros
- décembre 2024: 118.614 euros
- février 2025: 252.097 euros
- mars 2025: 321.329 euros
- avril 2025: 222.829,28 euros
Ils exposent que la société Sodaic a multiplié les impayés des cotisations Urssaf à compter de février 2020 sur ses différents sites d'activité, que la dette de l'Urssaf postérieure à l'adoption du plan s'élève à 4.298.291,78 euros, que figuraient au bilan communiqué par la société débitrice au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2023 des dettes fiscales et sociales à hauteur de 3.703.112 euros, dont une dette de l'Urssaf de moins d'un an s'élevant à 2.344.639 euros, que depuis plusieurs années la société s'emploie à contester, uniquement sur la forme, les mises en demeures et les contraintes au fur et à mesure que des procédures de recouvrement sont mises en 'uvre par l'Urssaf, et ce notamment dans le but d'obtenir les attestations de vigilance nécessaires à la poursuite de son activité de sous-traitance.
Ils insistent sur le fait que la société Sodaic, en procédant aux déclarations sociales nominatives, se reconnaît débitrice des cotisations qu'elle déclare, mais qu'ensuite elle s'abstient de régler les sommes y afférentes, que ces défauts de paiements ont pour conséquence l'application de pénalités et de majorations par l'Urssaf, que la société débitrice a systématiquement contesté ces dettes, ce qui lui permet de suspendre le règlement d'une somme totale de 3.022 .903 euros sur la période de janvier 2020 à juin 2024 alors même que ces montants déclarés et calculés par ses soins ne sont pas contestés par la société.
La société Sodaic réplique que les cotisations des mois d'octobre 2024 à janvier 2025 ont toutes été contestées, et que le montant maximum, au demeurant contesté, qui pourrait relever du passif exigible est de 667.094 euros (122.936 euros en février 2025 + 321.329 euros en mars 2025+ 222.829 euros en avril 2025).
Elle fait valoir que la dette de l'Urssaf qui a motivé la décision du tribunal est contestée devant les juridictions compétentes, que cette dette s'élève à 3.505.674,13 euros dont 1.421.257 euros ont été annulés par quatre décisions rendues par le tribunal judiciaire de Bobigny du 12 juillet 2024, que si elle a été condamnée à payer à l'Urssaf en première instance devant cette juridiction la somme de 989.381 euros, un appel a été interjeté, que le premier président de la cour d'appel a ordonné la suspension de l'exécution provisoire de cette condamnation le 4 juillet 2024, que si le tribunal judiciaire de Bobigny l'a condamnée à payer à l'Urssaf la somme de 31 427 euros à l'Urssaf, un appel est en cours, que la somme de 796.908 euros est actuellement contestée devant le tribunal judiciaire de Bobigny et la somme de 248 087 euros fait actuellement l'objet d'un recours devant la commission de recours amiables, qu'ainsi les créances de l'Urssaf sont contestées et ne peuvent être intégrées au passif exigible
Le ministère public rappelle que l'Urssaf a informé le commissaire à l'exécution du plan d'une dette de 3.626.717 euros afférant pour l'essentiel à des cotisations patronales non payées ou partiellement payées, que ces créances ont fait l'objet de déclarations de la part de la société Sodaic mais n'ont pas été entièrement réglées, que dans la mesure où ces créances ont systématiquement fait l'objet de voies de recours permettant à la société de se voir délivrer des attestations de vigilance jusqu'au 15 mai 2025, la cour pourrait considérer que ces sommes ne sont pas exigibles.
Sur ce la cour,
La cour ne reviendra pas sur les créances de l'Urssaf nées en cours d'exécution du plan jusqu'en octobre 2024, dès lors que celles-ci font l'objet de divers recours et que par voie de conséquence leur intégration à due concurrence dans le passif exigible fait débat, mais concentrera son analyse sur les créances déclarées au titre des cotisations de novembre 2024 à avril 2025, dont les organes de la procédure soutiennent qu'elles constituent du passif exigible.
- période de novembre et décembre 2024
Selon le liquidateur et l'administrateur, le passif exigible est de 354.856 euros (novembre 2024 : 236.242 euros/ décembre 2024: 118.614 euros).
La société Sodaic soutient que ces sommes n'ont pas à figurer dans le passif exigible, dès lors que la commission de recours amiable a été saisie et qu'elle n'a pas reçu notification des décisions qui auraient été rendues à ce titre les 25 et 28 mars 2025.
La société Sodaic justifie effectivement avoir saisi la commission de recours amiable les 12 février et 7 mars 2025 pour contester les mises en demeure qui lui ont été adressées au titre des cotisations sur ces périodes (pièce 13).
Dans un courrier du 4 avril 2025 adressé à Maître [R], l'Urssaf indique que la commission de recours a notifié à la société Sodaic ses décisions respectivement les 25 et 28 mars 2025. La société Sodaic conteste avoir reçu ces notifications et les notifications ne sont pas produites. La société Sodaic a saisi le tribunal judiciaire de Bobigny le 27 mai 2025 ' sur rejet implicite de la commission de recours amiable' pour contester ces mises en demeure.
Dans ce contexte, ces créances contestées ne seront pas prises en compte au titre du passif exigible.
- période de janvier 2025( à échéance du 15 février 2025)
Selon les organes de la procédure, il reste dû à l'Urssaf un montant de 119.073 euros à la suite de la modification par la société Sodaic du télépaiement de 211.135 euros qu'elle avait initié pour le réduire à 92.062 euros.
Le 19 mars 2025, l'Urssaf a notifié une mise en demeure pour un montant de 125.114 euros, après déduction de la somme de 92.062 euros déjà réglée.
Il n'a pas été formé de recours au titre de cette période de cotisation, la société Sodaic arguant seulement que, du fait de l'ouverture de la liquidation judiciaire le 18 mars 2025, elle n'a pu procéder à une contestation.
Le moyen de défense pris de l'ouverture de la liquidation judiciaire n'est pas pertinent, la société Sodaic ne justifiant pas avoir développé une contestation spécifique à cette créance et n'étayant pas davantage devant la cour une telle contestation.
La somme de 119.073 euros sera donc prise en compte pour apprécier le passif exigible.
- période de février 2025 (à échéance du 15 mars 2025)
Selon Maître [R] et Maître [N], il est dû à ce titre un montant de 252.097 euros, suite au rejet du paiement par la banque.
La société Sodaic soutient que cette somme ne constitue pas du passif exigible, dès lors qu'elle avait versé l'intégralité des cotisations afférentes au mois de février mais que Maître [N] a annulé ce règlement.
Dès lors qu'il est constant que ces cotisations n'ont pas été payées pour la période considérée et que la créance n'est pas utilement discutée dans son montant, puisque la société Sodaic soutient qu'elle en avait prévu le paiement, cette créance sera prise en compte dans le passif exigible à hauteur de 252.097 euros.
- période de mars 2025( à échéance du 15 avril 2025)
- période d'avril 2025 (à échéance du 15 mai 2025)
Les organes de la procédure visent au titre de ces périodes les créances respectives de 321.329 euros et de 222.829 ,98 euros, qui ne font pas l'objet de contestations particulières, la société Sodaic exposant seulement que leur non paiement tient à la désorganisation consécutive à l'ouverture injustifiée de la liquidation judiciaire.
Ces montants sont à intégrer dans le passif exigible.
Ainsi à date, la créance de l'Urssaf à retenir au titre du passif exigible s'élève à 915.328,98 euros.
En conclusion le passif exigible né au cours de l'exécution du plan ressort à 1.857.176,46 euros (838.906,58+102.940,90+915.328,98 euros).
- Sur l'actif disponible
Les organes de la procédure font état d'un solde de compte bancaire de 807.701,78 euros, comme étant le seul élément d'actif disponible.
La société Sodaic argue d'une trésorerie disponible au 31 juillet 2025 de 2.643.000 euros, comprenant un solde de 928.000 euros sur la banque Themis au 30 juin 2025 dont il est justifié (pièce 37), un encours clients de 647.000 euros selon balance âgée au 30 juin 2025 et une facturation des clients en juin 2025 (base mai 2025) de 1.068.000 euros.
Toutefois, les simples listes des encours clients selon la balance âgée et les ventes de mai 2025 qui auraient donné lieu à facturation en juin 2025, et encore moins la liste des ventes prévues en juin 2025, ne suffisent à démontrer l'imminence des rentrées de fonds permettant de faire face quasi immédiatement au passif d'ores et déjà exigible. Ces encours clients ne s'analysent donc pas en de l'actif disponible.
En conséquence, l'actif disponible à prendre en compte se limite au 30 juin 2025 à 928.000 euros, soit un montant très insuffisant pour faire face à un passif exigible de 1.857.176,46 euros.
L'état de cessation des paiements en cours d'exécution du plan de redressement étant caractérisé, la résolution du plan et l'ouverture d'une liquidation judiciaire s'impose au regard de l'article L. 631-20 du code de commerce, étant surabondamment relevé que le défaut de paiement des cotisations sociales a pour conséquence que l'Urssaf ne délivre pas l'attestation de vigilance dont la société Sodaic a impérativement besoin pour poursuivre son activité auprès de ses clients que sont les compagnies aériennes, et que l'attestation dont elle disposait est arrivée à expiration.
A ces motifs, le jugement sera confirmé en ce qu'il a constaté la cessation des paiements, résolu le plan de redressement et ouvert la liquidation judiciaire de la société Sodaic. Il le sera également en ce qu'il a désigné les organes de la procédure et fixé la date de cessation des paiements au 18 septembre 2023.
- Sur le maintien de l'activité
La société Sodaic sollicite subsidiairement le maintien de son activité pour une période d'au moins 3 mois, afin de faciliter la cession de l'entreprise et de limiter le nombre des licenciements.
Les organes de la procédure et le ministère public concluent dans le même sens et sollicitent le maintien de l'activité pour une durée de trois mois à compter de l'arrêt à intervenir afin de rechercher une solution de reprise.
Il résulte des articles L. 641-10 et R. 641-18 du code de commerce que si dans le cadre de la liquidation judiciaire la cession totale ou partielle de l'entreprise est envisageable ou si l'intérêt public ou celui des créanciers l'exige, le maintien de l'activité peut être autorisé pour une durée maximale de trois mois, cette autorisation pouvant être prolongée une fois, pour la même période à la demande du ministère public.
La cession de cette entreprise, qui compte plus de 300 salariés, étant envisagée, il y a lieu d'autoriser la poursuite d'activité pour une durée de trois mois à compter du présent arrêt, sous la responsabilité de la SELARL A&M AJ associés, en la personne de Maître [N], en qualité d'administrateur judiciaire, qui est maintenue dans ses fonctions durant cette période. Le jugement sera infirmé en ce qu'il a autorisé le maintien de l'activité jusqu'au 18 avril 2025.
- Sur les dépens
Les dépens seront employés en frais privilégiés de liquidation judiciaire.
PAR CES MOTIFS,
Déboute la société Sodaic de sa fin de non recevoir tirée du défaut d'intérêt du commissaire à l'exécution du plan à saisir le tribunal, et déclare recevables la SELARL MJC2A en la personne de Maître [R], agissant en qualité de commissaire à l'exécution du plan, puis de liquidateur judiciaire de la société Sodaic, et la SELARL A&M AJ Associés en la personne de Maître [N], agissant en qualité d'administrateur judiciaire de la société Sodaic, en leurs demandes de confirmation de la résolution du plan de redressement et d'ouverture de la liquidation judiciaire de la société Sodaic,
Confirme le jugement sauf sur la durée de la poursuite d'activité autorisée,
Statuant à nouveau de ce chef et y ajoutant,
Autorise la poursuite d'activité de la société Sodaic pour une durée de trois mois à compter du présent arrêt, sous la responsabilité de la SELARL A&M AJ associés, en la personne de Maître [N], en qualité d'administrateur judiciaire, maintenu à cette fonction pendant la durée de la poursuite d'activité,
Ordonne l'emploi des dépens en frais privilégiés de liquidation judiciaire.
Liselotte FENOUIL
Greffière
Constance LACHEZE,
Conseillère faisant fonction de présidente
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 8
ARRÊT DU 17 JUILLET 2025
(n° / 2025, 11 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 25/05053 - N° Portalis 35L7-V-B7J-CLAKD
Décision déférée à la Cour : Jugement du 18 mars 2025 -Tribunal de commerce d'EVRY - RG n° 2025L00266
APPELANTE
S.A.S. SODAIC, société par actions simplifiée unipersonnelle, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège en cette qualité,
Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de BOBIGNY sous le numéro 530 128 248,
Dont le siège social est situé [Adresse 1]
[Adresse 6]
[Localité 5]
Représentée par Me Me Nathalie LESENECHAL, avocat au barreau de PARIS, toque : D2090,
Assistée de Me Olivier PECHENARD de la SELARL PBM AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : B0899,
INTIMÉES
S.E.L.A.R.L. MJC2A, prise en la personne de Maître [K] [R], en qualité de commissaire à l'exécution du plan et liquidateur judiciaire de la SAS SODAIC,
Immatriculée au registre du commerce et des sociétés d'EVRY sous le numéro 501 184 774,
Dont le siège social est situé [Adresse 3]
[Localité 4]
S.E.L.A.R.L. A & M AJ ASSOCIES, prise en la personne de Maître [F] [N], en qualité d'administrateur judiciaire de la société SODAIC,
Immatriculée au registre du commerce et des sociétés d'EVRY sous le numéro 529 296 295,
Dont le siège social est situé [Adresse 2]
[Localité 4]
Représentées et assistées de Me Julien ANDREZ de la SELARL SEKRI VALENTIN ZERROUK, avocat au barreau de PARIS, toque : P555,
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 1er juillet 2025, en audience publique, par la cour, composée de:
Madame Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT, présidente de chambre,
Madame Constance LACHEZE, conseillère,
Monsieur François VARICHON, conseiller,
qui en ont délibéré.
Un rapport a été présenté à l'audience par Madame Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT dans le respect des conditions prévues à l'article 804 du code de proécdure civile.
Greffier, lors des débats : Madame Liselotte FENOUIL
ARRÊT :
- Contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Constance LACHEZE, conseillère faisant fonction de présidente , et par Liselotte FENOUIL, greffière, présente lors de la mise à disposition.
***
FAITS ET PROCÉDURE:
La SAS Sodaic a pour activités le nettoyage, l'armement commercial, la fouille des cabines d'avion, la maintenance et la blanchisserie. Ses clients sont principalement des compagnies aériennes. Elle emploie environ 330 salariés.
Par jugement du 10 novembre 2017, rendu sur requête du ministère public, le tribunal de commerce d'Evry a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la société Sodaic et désigné la SELARL MJC2A en la personne de Me [R] en qualité de mandataire judiciaire.
Le 31 octobre 2018, le tribunal a arrêté le plan de redressement de la société Sodaic prévoyant le remboursement d'un passif de 4.986.359,21 euros en dix annuités progressives, la SELARL MJC2A, en la personne de Me [R], étant désignée en qualité de de commissaire à l'exécution du plan.
Invoquant des tentatives de recouvrement infructueuses des échéances impayées du plan et le signalement de nouvelles dettes, le commissaire à l'exécution du plan a, le 6 février 2025, saisi le tribunal d'une requête en résolution du plan et, après avoir constaté la cessation des paiements, en ouverture d'une liquidation judiciaire.
Par jugement du 18 mars 2025, le tribunal de commerce d'Evry a déclaré résolu le plan de redressement homologué le 31 octobre 2018, constaté l'état de cessation des paiements, ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'égard de la société Sodaic, fixé provisoirement au 18 septembre 2023 la date de cessation des paiements, nommé la SELARL MJC2A, en la personne de Me [R], en qualité de liquidateur, nommé la SELARL A&M AJ associés, prise en la personne de Me [N], en qualité d'administrateur judiciaire avec la mission d'administrer l'entreprise, autorisé le maintien de l'activité jusqu'au 18 avril 2025, et ce, sous la seule responsabilité de l'administrateur, dit qu'il pourra y mettre fin si l'intérêt public vient à l'exiger et ordonné l'emploi les dépens en frais privilégiés de la liquidation judiciaire.
La société Sodaic a relevé appel de ce jugement, le 23 mars 2025 en intimant la SELARL MJC2A en la personne de Maître [R], ès qualités, et la SELARL A&M AJ Associés en la personne de Maître [N], ès qualités.
Par ordonnance du 11 avril 2025, le délégataire du premier président de la cour d'appel a arrêté l'exécution provisoire attachée au jugement.
Dans ses dernières conclusions n°2, déposées au greffe et notifiées par voie électronique le 16 juin 2025, la société Sodaic demande à la cour:
- d'infirmer le jugement en ce qu'il déclaré le plan résolu, constaté l'état de cessation des paiements, ouvert une liquidation judiciaire et en ses plus amples dispositions,
- statuant à nouveau,
- de déclarer irrecevable pour défaut d'intérêt à agir la SELARL MJ2CA en qualité de liquidateur de la société Sodaic et la SELARL A&M AJ associés en qualité d'administrateur de la société Sodaic, en leur demande de résolution du plan de redressement et d'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire,
- à défaut d'accueillir cette fin de non recevoir, à titre principal, débouter le liquidateur et l'administrateur ès qualités de toutes leurs demandes, fins et conclusions, à titre subsidiaire, si la cour devait estimer que les conditions d'ouverture d'une liquidation judiciaire sont réunies, infirmer le jugement en ce qu'il a fixé la date de maintien d'activité au 18 avril 2025, et statuant à nouveau, autoriser le maintien de l'activité pour une période de trois mois à compter de la date de la décision à intervenir,
- en tout état de cause, débouter le liquidateur et l'administrateur ès qualités de toutes leurs demandes, fins et conclusions, et les condamner aux dépens qui seront comptés en frais privilégiés de procédure collective.
Par dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par voie électronique le 26 juin 2025, la société MJC2A, en la personne de Me [R] en ses qualités de commissaire à l'exécution au plan et de liquidateur judiciaire de la société Sodaic, et la SELARL A&M AJ associés, en la personne de Me [N] en sa qualité d'administrateur judiciaire de la société Sodaic demandent à la cour de débouter la société Sodaic de sa fin de non-recevoir tendant à faire déclarer irrecevable leur demande de résolution du plan et d'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire, confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré résolu le plan de redressement homologué le 31 octobre 2018, constaté l'état de cessation des paiements, ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'égard de la société Sodaic, fixé provisoirement au 18 septembre 2023 la date de cessation des paiements, nommé la Selarl MJC2A, en la personne de Me [R], en qualité de mandataire judiciaire, nommé la Selarl A&M AJ associés, en la personne de Me [N], en qualité d'administrateur judiciaire, avec la mission fixée par l'article L. 641-10 du code de commerce, notamment d'administrer l'entreprise, autoriser le maintien de l'activité pendant une période de trois mois à compter du prononcé de l'arrêt, débouter la société Sodaic de toute prétention, et employer les dépens en frais privilégiés de la procédure collective.
Par avis notifié par voie électronique le 30 mai 2025, le ministère public sollicite l'infirmation de la décision, mais si la cour devait confirmer la liquidation de la société, de maintenir l'activité pour une période de trois mois à compter de sa décision afin de permettre de trouver une solution de cession de l'entreprise.
SUR CE,
Sur la fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir de Me [R] en qualité de commissaire à l'exécution du plan
La société Sodaic soulève le défaut d'intérêt du commissaire à l'exécution du plan à saisir le tribunal pour obtenir la résolution du plan de redressement et l'ouverture d'une procédure collective fondée sur le défaut de paiement d'une créance postérieure à l'arrêté du plan, arguant qu'il n'est pas chargé de représenter les intérêts des créanciers postérieurs à l'arrêté du plan et que cette saisine va au contraire à l'encontre des créanciers du plan.
Le liquidateur et l'administrateur judiciaires répliquent que le commissaire à l'exécution du plan est chargé de veiller à l'exécution du plan, qu'il est ainsi habilité à saisir le tribunal par voie de requête sur le fondement de l'article R.626-48 du même code aux fins de résolution du plan en cas d'inexécution, qu'en l'espèce la requête du 6 février 2025 de Me [R] agissant en qualité de commissaire à l'exécution du plan repose bien sur une inexécution des obligations du plan par la société débitrice qui n'avait pas procédé au règlement de la 6ème annuité à la date requise, ce qui a empêché le commissaire du plan de procéder au règlement des créanciers au 31 janvier 2025, que la société débitrice n'a pas contesté cette inexécution puisqu'elle a proposé un échéancier de règlement au commissaire à l'exécution au plan, que ce défaut d'exécution est toujours à date caractérisé dès lors que la société débitrice n'a procédé à aucun règlement mensuel au titre de la 7ème annuité, que le prononcé d'une procédure de liquidation judiciaire appartient au tribunal de commerce, que le commissaire du plan est parfaitement habilité à faire état de sa position à ce titre, qu'ainsi la cour déboutera la société appelante de sa fin de non recevoir.
Selon l'article L. 626-25 du code de commerce le commissaire à l'exécution du plan nommé par le jugement arrêtant le plan est chargé de veiller à l'exécution du plan et notamment rend compte au président du tribunal et au ministère public du défaut d'exécution du plan.
Il résulte de l'article L. 626-27, II du code de commerce que lorsque le débiteur n'exécute pas ses engagements dans les délais fixés par le plan, ainsi que lorsque la cessation des paiements est constatée au cours de l'exécution du plan, le tribunal est saisi par un créancier, le commissaire à l'exécution du plan ou le ministère public. L'article R. 626-47 du code de commerce prévoit que 'Le commissaire à l'exécution du plan signale, dans un rapport adressé au président du tribunal et au ministère public, l'inexécution du plan de la part du débiteur ou de toute autre personne.'
Eu égard à la mission qui lui est dévolue par la loi à la suite de sa désignation par le jugement ayant arrêté le plan de redressement, le commissaire à l'exécution du plan a bien non seulement qualité pour saisir le tribunal, ce qui n'est pas contesté, mais également intérêt à faire constater par le tribunal l'inexécution du plan et le cas échéant l'existence d'un passif né postérieurement audit plan, à charge pour le tribunal de caractériser ou non un état de cessation des paiements et d'en tirer les conséquences quant à l'ouverture d'une liquidation judiciaire. Il est constant qu'à la date de la requête et encore à hauteur d'appel, les dispositions du plan de redressement n'étaient pas respectées.
Il s'ensuit que le commissaire à l'exécution du plan était parfaitement recevable à saisir le tribunal et que les organes de la procédure sont également recevables à hauteur d'appel à conclure à la confirmation du jugement.
La fin de non recevoir sera rejetée.
- Sur la demande d'infirmation du jugement
Aux termes de l'article L. 626-27 du code de commerce, rendu applicable au redressement judiciaire par l'article L. 631-19 du même code, 'le tribunal qui a arrêté le plan peut, après avis du ministère public, en décider la résolution si le débiteur n'exécute pas ses engagements dans les délais fixés par le plan'.
S'agissant des plans de redressement, l'article L.631-20 du code de commerce dispose que « Par dérogation aux dispositions du troisième alinéa de l'article L. 626-27, lorsque la cessation des paiements du débiteur est constatée au cours de l'exécution du plan, le tribunal qui a arrêté ce dernier décide, après avis du ministère public, sa résolution et ouvre une procédure de liquidation judiciaire. »
- sur la résolution du plan
Le plan de redressement arrêté le 31 octobre 2018 prévoit un apurement du passif selon les modalités suivantes:
- option 1: règlement d'un unique dividende pour solde de tout compte de 12,5% sans intérêts, le 30 juin 2019, aux créanciers qui l'accepteront,
- option 2: règlement à 100% sans intérêt sur une durée de 10 ans en 10 dividendes annuels progressifs (5% à 12,5%) du 30 juin 2019 au 31 janvier 2029, le dividende annuel étant payable par mensualités.
Il est constant que les cinq premières annuités ont été réglées, les difficultés sont apparues au moment de la 6ème annuité (11,5%) d'un montant de 566.612,84 euros, à échéance du 31 janvier 2025, qui n'avait donné lieu qu'à un paiement de 150.000 euros au 31 décembre 2024.
Toutefois, il est désormais acquis aux débats que la société Sodaic a réglé la totalité de la 6ème annuité, bien qu'avec retard.
Les organes de la procédure invoquent désormais le défaut de paiement des mensualités de la 7ème annuité (11,5%) d'un montant de 566.612,84 euros, qui est à échéance du 31 janvier 2026. Ils en déduisent que le non-respect par la société Sodaic de ses engagements est ainsi caractérisé au sens des dispositions de l'article L.626-27 du code de commerce.
Les mensualités non payées, selon les indications non contestées des organes de la procédure, représentent au 31 mai 2025 un montant de 236.088,68 euros.
La société Sodaic objecte que cette 7ème annuité n'est pas encore exigible, que les mensualités ne constituent que de simples modalités de paiement qui n'ont jamais été appliquées par le passé sans que cela pose problème.
Toutefois, le jugement arrêtant le plan de redressement a expressément prévu un paiement des annuités par mensualité du douzième, la circonstance que le commissaire à l'exécution du plan ne répartit les fonds collectés qu'une fois par an étant sans incidence sur l'obligation de régler par mensualités.
Les organes de la procédure sont donc fondés à invoquer à hauteur d'appel l'inexécution de plusieurs mensualités du plan au titre de la 7ème annuité.
Toutefois sachant que la société au travers des six premières annuités a déjà pris en charge 53 % du passif du plan de redressement, que la date de répartition n'est prévue que dans six mois, la cour n'estime pas devoir prononcer la résolution du plan pour non paiement des mensualités du dividende non échu.
- Sur l'état de cessation des paiements
S'il vient d'être jugé qu'il n'y avait pas lieu à résolution du plan au titre du seul retard dans le paiement des mensualités du dividende à échoir, il reste à déterminer si un état de cessation des paiements est survenu en cours d'exécution du plan, lequel justifierait alors l'ouverture d'une liquidation judiciaire.
Le liquidateur et l'administrateur judiciaires soutiennent que la société Sodaic a généré un nouveau passif social de 4.298.291,78 euros ainsi que d'autres créances d'ores et déjà identifiées à hauteur de 941.847,48 euros, auxquels la société ne peut faire face avec un actif disponible de 807.701,78 euros, outre ses charges courantes relatives au paiement de 338 salariés, charges locatives etc., en ce non comprises les mensualités impayées du plan. Ils en déduisent que l'état de cessation des paiements est caractérisé et que l'ouverture d'une liquidation judiciaire s'impose.
La société Sodaic réplique que les organes de la procédure, sur lesquels reposent la charge de la preuve, manquent à caractériser l'existence d'un état de cessation des paiements qu'elle conteste, arguant qu'elle dispose de liquidités suffisantes pour faire face à la 7ème annuité du plan et à ses charges courantes et qu'il n'est pas justifié d'un passif exigible postérieur.
Il convient d'examiner les trois créances invoquées par les organes de la procédure au titre du passif exigible né en cours d'exécution du plan, étant observé qu'ils entendent caractériser l'état de cessation des paiements sans même prendre en compte les mensualités du plan impayées.
- Sur la créance [Localité 7] Humanis
Suite à l'ouverture de la liquidation judiciaire, [Localité 7] Humanis a déclaré une créance de 838.906,58 euros correspondant à des cotisations impayées entre novembre 2019 et mars 2025.
La société Sodaic considère que cette créance doit être retranchée du passif exigible dès lors qu'elle a fait l'objet d'un moratoire et que le défaut de paiement de l'échéance de février 2025 est consécutive à l'ouverture de la liquidation judiciaire.
Les organes de la procédure relèvent que si en janvier 2025, [Localité 7] Humanis a effectivement proposé une échéancier sur 12 mois, la société Sodaic ne justifie pas de l'acceptation et a fortiori de l'exécution de cet échéancier.
Il ressort de la pièce 24 de l'appelante, que par mail du 10 janvier 2025, portant en objet 'proposition d'échéancier Sodaic', [Localité 7] Humanis (via Mme [E] assistante de gestionnaire recouvrement) a confirmé à M.[P] de la société Sodaic une proposition d'échéancier portant sur un total de 606.514,31 euros, qui correspondait alors au montant de l'arriéré, selon les modalités suivantes: une première échéance de 172.018,82 euros correspondant aux parts salariales obligatoires, puis 11 échéances de 39.499,59 euros. Mme [E] indiquait à la fin de son courriel être en attente de la réponse de la société.
Il n'est pas justifié d'une acceptation de cette proposition par Sodaic dans les deux mois qui ont précédé la résolution du plan et l'ouverture de la liquidation judiciaire le 18 mars 2025, or cette proposition de plan était subordonnée à l'acceptation par la société de régler une première échéance d'un montant substantiel de 172.018,82 euros, les termes du courriel ne permettant pas de retenir que les parties auraient convenu d'un report dans le temps de cette première mensualité.
La société Sodaic qui n'établit pas avoir accepté cette proposition, ni formellement, ni même en pratique en réglant la première échéance, ne peut se retrancher derrière l'ouverture de la liquidation judiciaire, alors qu'elle a disposé de deux mois avant l'ouverture de la liquidation judiciaire pour faire diligence.
A défaut d'échéancier en cours, la créance de 838.906,58 euros s'analyse en du passif exigible au sens de l'article L. 631-1 du code de commerce.
- Sur la créance AG2R La Mondiale: 102.940,90 euros
AG2R la Mondiale a déclaré le 15 mai 2025 une créance de 102.940,90 euros à titre privilégié correspondant aux cotisations impayées des 2ème, 3ème et 4ème trimestres 2024 ainsi que du 1er trimestre 2025.
La société Sodaic expose qu'il n'est aucunement démontré l'existence d'une créance exigible d'AG2R et en tous les cas, pas pour les montants avancés. Elle relève, d'une part, la singularité de cette déclaration qui fait état d'une créance postérieure au jugement de redressement alors qu'il suffisait que l'organisme déclare sa créance au passif de la liquidation judiciaire, d'autre part que la mise en demeure délivrée ne concerne que les 3èmeet 4ème trimestres 2024 pour un total de 5.967,48 euros.
La circonstance qu'AG2R La Mondiale précise dans sa lettre accompagnant son bordereau de déclaration qu'elle dispose d'une créance postérieure au jugement de redressement judiciaire n'affecte en rien sa déclaration de créance et n'est pas de nature à rendre incertaine la créance déclarée au passif de la liquidation judiciaire.
Quant à la mise en demeure du 4 avril 2025, jointe à la déclaration, qui fait état de cotisations estimées à un total de 5.967,48 euros au titre des cotisations des 3ème et 4ème trimestres 2024, elle se réfère à un contrat différent de ceux visés dans la déclaration de créance, de sorte qu'il ne peut à ce stade en être déduit que les montants figurant dans le déclaration sont à minorer à due concurrence.
Cette créance de 102.940,90 euros doit donc être intégrée dans le passif exigible.
- sur les créances de l'Urssaf
Les organes de la procédure soutiennent que nonobstant les recours divers formés par la société Sodaic qui bloquent le recouvrement d'une somme de 3.147.180,50 euros, le montant restant exigible à ce jour s'élève à 1.151.111,28 euros, au titre des périodes suivantes:
- novembre 2024 : 236.242 euros
- décembre 2024: 118.614 euros
- février 2025: 252.097 euros
- mars 2025: 321.329 euros
- avril 2025: 222.829,28 euros
Ils exposent que la société Sodaic a multiplié les impayés des cotisations Urssaf à compter de février 2020 sur ses différents sites d'activité, que la dette de l'Urssaf postérieure à l'adoption du plan s'élève à 4.298.291,78 euros, que figuraient au bilan communiqué par la société débitrice au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2023 des dettes fiscales et sociales à hauteur de 3.703.112 euros, dont une dette de l'Urssaf de moins d'un an s'élevant à 2.344.639 euros, que depuis plusieurs années la société s'emploie à contester, uniquement sur la forme, les mises en demeures et les contraintes au fur et à mesure que des procédures de recouvrement sont mises en 'uvre par l'Urssaf, et ce notamment dans le but d'obtenir les attestations de vigilance nécessaires à la poursuite de son activité de sous-traitance.
Ils insistent sur le fait que la société Sodaic, en procédant aux déclarations sociales nominatives, se reconnaît débitrice des cotisations qu'elle déclare, mais qu'ensuite elle s'abstient de régler les sommes y afférentes, que ces défauts de paiements ont pour conséquence l'application de pénalités et de majorations par l'Urssaf, que la société débitrice a systématiquement contesté ces dettes, ce qui lui permet de suspendre le règlement d'une somme totale de 3.022 .903 euros sur la période de janvier 2020 à juin 2024 alors même que ces montants déclarés et calculés par ses soins ne sont pas contestés par la société.
La société Sodaic réplique que les cotisations des mois d'octobre 2024 à janvier 2025 ont toutes été contestées, et que le montant maximum, au demeurant contesté, qui pourrait relever du passif exigible est de 667.094 euros (122.936 euros en février 2025 + 321.329 euros en mars 2025+ 222.829 euros en avril 2025).
Elle fait valoir que la dette de l'Urssaf qui a motivé la décision du tribunal est contestée devant les juridictions compétentes, que cette dette s'élève à 3.505.674,13 euros dont 1.421.257 euros ont été annulés par quatre décisions rendues par le tribunal judiciaire de Bobigny du 12 juillet 2024, que si elle a été condamnée à payer à l'Urssaf en première instance devant cette juridiction la somme de 989.381 euros, un appel a été interjeté, que le premier président de la cour d'appel a ordonné la suspension de l'exécution provisoire de cette condamnation le 4 juillet 2024, que si le tribunal judiciaire de Bobigny l'a condamnée à payer à l'Urssaf la somme de 31 427 euros à l'Urssaf, un appel est en cours, que la somme de 796.908 euros est actuellement contestée devant le tribunal judiciaire de Bobigny et la somme de 248 087 euros fait actuellement l'objet d'un recours devant la commission de recours amiables, qu'ainsi les créances de l'Urssaf sont contestées et ne peuvent être intégrées au passif exigible
Le ministère public rappelle que l'Urssaf a informé le commissaire à l'exécution du plan d'une dette de 3.626.717 euros afférant pour l'essentiel à des cotisations patronales non payées ou partiellement payées, que ces créances ont fait l'objet de déclarations de la part de la société Sodaic mais n'ont pas été entièrement réglées, que dans la mesure où ces créances ont systématiquement fait l'objet de voies de recours permettant à la société de se voir délivrer des attestations de vigilance jusqu'au 15 mai 2025, la cour pourrait considérer que ces sommes ne sont pas exigibles.
Sur ce la cour,
La cour ne reviendra pas sur les créances de l'Urssaf nées en cours d'exécution du plan jusqu'en octobre 2024, dès lors que celles-ci font l'objet de divers recours et que par voie de conséquence leur intégration à due concurrence dans le passif exigible fait débat, mais concentrera son analyse sur les créances déclarées au titre des cotisations de novembre 2024 à avril 2025, dont les organes de la procédure soutiennent qu'elles constituent du passif exigible.
- période de novembre et décembre 2024
Selon le liquidateur et l'administrateur, le passif exigible est de 354.856 euros (novembre 2024 : 236.242 euros/ décembre 2024: 118.614 euros).
La société Sodaic soutient que ces sommes n'ont pas à figurer dans le passif exigible, dès lors que la commission de recours amiable a été saisie et qu'elle n'a pas reçu notification des décisions qui auraient été rendues à ce titre les 25 et 28 mars 2025.
La société Sodaic justifie effectivement avoir saisi la commission de recours amiable les 12 février et 7 mars 2025 pour contester les mises en demeure qui lui ont été adressées au titre des cotisations sur ces périodes (pièce 13).
Dans un courrier du 4 avril 2025 adressé à Maître [R], l'Urssaf indique que la commission de recours a notifié à la société Sodaic ses décisions respectivement les 25 et 28 mars 2025. La société Sodaic conteste avoir reçu ces notifications et les notifications ne sont pas produites. La société Sodaic a saisi le tribunal judiciaire de Bobigny le 27 mai 2025 ' sur rejet implicite de la commission de recours amiable' pour contester ces mises en demeure.
Dans ce contexte, ces créances contestées ne seront pas prises en compte au titre du passif exigible.
- période de janvier 2025( à échéance du 15 février 2025)
Selon les organes de la procédure, il reste dû à l'Urssaf un montant de 119.073 euros à la suite de la modification par la société Sodaic du télépaiement de 211.135 euros qu'elle avait initié pour le réduire à 92.062 euros.
Le 19 mars 2025, l'Urssaf a notifié une mise en demeure pour un montant de 125.114 euros, après déduction de la somme de 92.062 euros déjà réglée.
Il n'a pas été formé de recours au titre de cette période de cotisation, la société Sodaic arguant seulement que, du fait de l'ouverture de la liquidation judiciaire le 18 mars 2025, elle n'a pu procéder à une contestation.
Le moyen de défense pris de l'ouverture de la liquidation judiciaire n'est pas pertinent, la société Sodaic ne justifiant pas avoir développé une contestation spécifique à cette créance et n'étayant pas davantage devant la cour une telle contestation.
La somme de 119.073 euros sera donc prise en compte pour apprécier le passif exigible.
- période de février 2025 (à échéance du 15 mars 2025)
Selon Maître [R] et Maître [N], il est dû à ce titre un montant de 252.097 euros, suite au rejet du paiement par la banque.
La société Sodaic soutient que cette somme ne constitue pas du passif exigible, dès lors qu'elle avait versé l'intégralité des cotisations afférentes au mois de février mais que Maître [N] a annulé ce règlement.
Dès lors qu'il est constant que ces cotisations n'ont pas été payées pour la période considérée et que la créance n'est pas utilement discutée dans son montant, puisque la société Sodaic soutient qu'elle en avait prévu le paiement, cette créance sera prise en compte dans le passif exigible à hauteur de 252.097 euros.
- période de mars 2025( à échéance du 15 avril 2025)
- période d'avril 2025 (à échéance du 15 mai 2025)
Les organes de la procédure visent au titre de ces périodes les créances respectives de 321.329 euros et de 222.829 ,98 euros, qui ne font pas l'objet de contestations particulières, la société Sodaic exposant seulement que leur non paiement tient à la désorganisation consécutive à l'ouverture injustifiée de la liquidation judiciaire.
Ces montants sont à intégrer dans le passif exigible.
Ainsi à date, la créance de l'Urssaf à retenir au titre du passif exigible s'élève à 915.328,98 euros.
En conclusion le passif exigible né au cours de l'exécution du plan ressort à 1.857.176,46 euros (838.906,58+102.940,90+915.328,98 euros).
- Sur l'actif disponible
Les organes de la procédure font état d'un solde de compte bancaire de 807.701,78 euros, comme étant le seul élément d'actif disponible.
La société Sodaic argue d'une trésorerie disponible au 31 juillet 2025 de 2.643.000 euros, comprenant un solde de 928.000 euros sur la banque Themis au 30 juin 2025 dont il est justifié (pièce 37), un encours clients de 647.000 euros selon balance âgée au 30 juin 2025 et une facturation des clients en juin 2025 (base mai 2025) de 1.068.000 euros.
Toutefois, les simples listes des encours clients selon la balance âgée et les ventes de mai 2025 qui auraient donné lieu à facturation en juin 2025, et encore moins la liste des ventes prévues en juin 2025, ne suffisent à démontrer l'imminence des rentrées de fonds permettant de faire face quasi immédiatement au passif d'ores et déjà exigible. Ces encours clients ne s'analysent donc pas en de l'actif disponible.
En conséquence, l'actif disponible à prendre en compte se limite au 30 juin 2025 à 928.000 euros, soit un montant très insuffisant pour faire face à un passif exigible de 1.857.176,46 euros.
L'état de cessation des paiements en cours d'exécution du plan de redressement étant caractérisé, la résolution du plan et l'ouverture d'une liquidation judiciaire s'impose au regard de l'article L. 631-20 du code de commerce, étant surabondamment relevé que le défaut de paiement des cotisations sociales a pour conséquence que l'Urssaf ne délivre pas l'attestation de vigilance dont la société Sodaic a impérativement besoin pour poursuivre son activité auprès de ses clients que sont les compagnies aériennes, et que l'attestation dont elle disposait est arrivée à expiration.
A ces motifs, le jugement sera confirmé en ce qu'il a constaté la cessation des paiements, résolu le plan de redressement et ouvert la liquidation judiciaire de la société Sodaic. Il le sera également en ce qu'il a désigné les organes de la procédure et fixé la date de cessation des paiements au 18 septembre 2023.
- Sur le maintien de l'activité
La société Sodaic sollicite subsidiairement le maintien de son activité pour une période d'au moins 3 mois, afin de faciliter la cession de l'entreprise et de limiter le nombre des licenciements.
Les organes de la procédure et le ministère public concluent dans le même sens et sollicitent le maintien de l'activité pour une durée de trois mois à compter de l'arrêt à intervenir afin de rechercher une solution de reprise.
Il résulte des articles L. 641-10 et R. 641-18 du code de commerce que si dans le cadre de la liquidation judiciaire la cession totale ou partielle de l'entreprise est envisageable ou si l'intérêt public ou celui des créanciers l'exige, le maintien de l'activité peut être autorisé pour une durée maximale de trois mois, cette autorisation pouvant être prolongée une fois, pour la même période à la demande du ministère public.
La cession de cette entreprise, qui compte plus de 300 salariés, étant envisagée, il y a lieu d'autoriser la poursuite d'activité pour une durée de trois mois à compter du présent arrêt, sous la responsabilité de la SELARL A&M AJ associés, en la personne de Maître [N], en qualité d'administrateur judiciaire, qui est maintenue dans ses fonctions durant cette période. Le jugement sera infirmé en ce qu'il a autorisé le maintien de l'activité jusqu'au 18 avril 2025.
- Sur les dépens
Les dépens seront employés en frais privilégiés de liquidation judiciaire.
PAR CES MOTIFS,
Déboute la société Sodaic de sa fin de non recevoir tirée du défaut d'intérêt du commissaire à l'exécution du plan à saisir le tribunal, et déclare recevables la SELARL MJC2A en la personne de Maître [R], agissant en qualité de commissaire à l'exécution du plan, puis de liquidateur judiciaire de la société Sodaic, et la SELARL A&M AJ Associés en la personne de Maître [N], agissant en qualité d'administrateur judiciaire de la société Sodaic, en leurs demandes de confirmation de la résolution du plan de redressement et d'ouverture de la liquidation judiciaire de la société Sodaic,
Confirme le jugement sauf sur la durée de la poursuite d'activité autorisée,
Statuant à nouveau de ce chef et y ajoutant,
Autorise la poursuite d'activité de la société Sodaic pour une durée de trois mois à compter du présent arrêt, sous la responsabilité de la SELARL A&M AJ associés, en la personne de Maître [N], en qualité d'administrateur judiciaire, maintenu à cette fonction pendant la durée de la poursuite d'activité,
Ordonne l'emploi des dépens en frais privilégiés de liquidation judiciaire.
Liselotte FENOUIL
Greffière
Constance LACHEZE,
Conseillère faisant fonction de présidente