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Décisions

CA Aix-en-Provence, ch. 1-4, 3 juillet 2025, n° 21/14233

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

Autre

CA Aix-en-Provence n° 21/14233

3 juillet 2025

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-4

ARRÊT AU FOND

DU 03 JUILLET 2025

N° 2025/ 174

Rôle N° RG 21/14233

N° Portalis DBVB-V-B7F-BIGFA

Compagnie d'assurance SMABTP*

C/

[O] [R]

[P] [N]

S.A.R.L. AQUASET

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Antoine FAIN-ROBERT

Me Barbara BALESTRI

Me Patrick CAGNOL

Décision déférée à la Cour :

Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de [Localité 5] en date du 21 Septembre 2021 enregistré au répertoire général sous le n° 19/07507.

APPELANTE

Compagnie d'assurance SMABTP

demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Antoine FAIN-ROBERT de la SCP ROBERT & FAIN-ROBERT, avocat au barreau de DRAGUIGNAN substituée par Me Mathilde KOUJI-DECOURT, avocat au barreau de DRAGUIGNAN

INTIMES

Madame [O] [R]

demeurant [Adresse 4]

représentée par Me Barbara BALESTRI, avocat au barreau de DRAGUIGNAN

Monsieur [P] [N]

demeurant [Adresse 2]

défaillant

S.A.R.L. AQUASET

demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Patrick CAGNOL de l'ASSOCIATION CM AVOCATS MARSEILLE, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 20 Mai 2025 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, madame Inès BONAFOS, présidente a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Inès BONAFOS, Présidente

Madame Véronique MÖLLER, Conseillère

Monsieur Adrian CANDAU, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Patricia CARTHIEUX.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 03 Juillet 2025.

ARRÊT

Selon devis en date du 29 août 2014, madame [O] [R] a confié la réfection de sa piscine à la société Aquaset, assurée auprès de la SMABTP, moyennant un prix de 37.331,98 € TTC.

[P] [N] est intervenu en qualité de sous-traitant pour le revêtement de la plage et du bassin.

Les travaux ont été réceptionnés le 26 juin 2015.

Se plaignant de désordres, madame [O] [R] a obtenu par ordonnance en date du 8 mars 2017 du Président du tribunal de grande instance de Draguignan la désignation d'un expert judiciaire qui a déposé son rapport le 7 mars 2018.

Par actes d'huissiers en date des 28, 30 octobre et 28 novembre 2019 madame [O] [R] a fait assigner la SARL Aquaset, la SMABTP et [P] [N] devant le tribunal de grande instance de Draguignan en indemnisation de ses préjudices aux fins de :

- Condamner la SARL Aquaset et la SMABTP in solidum à lui verser la somme de 24.040,54 € outre intérêts au taux légal à compter du 8 octobre 2018.

- Les condamner in solidum à lui verser la somme de 5 ,000 € au titre du préjudice subi ;

- Condamner Monsieur [N] [P] à lui verser la somme de 13.404 outre intérêts au taux légal à compter du 8 octobre 2018 au titre des désordres intermédiaires ;

- Condamner la SARL Aquaset, la SMABTP et Monsieur [N] in solidum à lui verser la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens en ce compris les frais d'expertise judiciaire taxés à hauteur de 6.958,09 €.

Par jugement du 21 septembre 2021, le tribunal judiciaire de Draguignan a statué comme suit :

Déclare la SARL Aquaset T responsable du désordre de fissuration du bassin ;

Dit que la SMABTP doit garantir son assurée ;

Condamne in solidum la SARL Aquaset et la SMABTP à payer à [O] [R] la somme de 17.420 € HT au titre de ce désordre qui portera intérêts au taux légal à compter du 8 octobre 2013 :

DIT que [P] [N] devra relever et garantir la SMABTP de cette condamnation à hauteur de 30 % :

Condamne la SARL Aquaset à verser à [O] [R] la somme de 2.000 € au titre du préjudice de jouissance lié à la fissuration du bassin ;

Déclare [P] [N] responsable des désordres au titre des dallages et des margelles ;

Condamne [P] [N] à verser à [O] [R] la somme de 11 170 € HT au titre de la reprise de ces désordres, somme qui produira intérêt au taux légal à compter du 8 octobre 2018 ;

Condamne in solidum la SARL Aquaset la SMABTP et [P] [N] à payer à [O] [R] la somme de 4.000 € au titre de l'article 700 code de procédure civile ;

Condamne in solidum la SARL Aquaset, SMABTP et [P] [N] aux dépens, ce compris les frais d'expertise Judiciaire taxés à hauteur de 6.958. 09 € .

Dit que la charge finale des dépens et celle de l'indemnité accordée au titre de l'article 700 du code de procédure civile seront répartie au prorata des responsabilités retenues ci-dessus

Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire

Rejette le surplus des demandes.

Par déclaration au greffe du 08/10/2021, la SMABTP a fait appel de ce jugement en ce qu'il a:

Dit que la SMABTP doit garantir son assurée,

Condamné in solidum la SARL Aquaset et la SMABTP à payer à Mme [R] la somme de 17.420 € HT au titre de ce désordre avec intérêts au taux légal à compter du 8.10.2018,

Dit que monsieur [N] devra relever et garantir la SMABTP de cette condamnation à hauteur de 30 %,

Condamné in solidum la SARL Aquaset, la SMABTP et [N] à payer à Mme [R] la somme de 4.000 € au titre de l'article 700 du CPC,

Condamné in solidum la SARL Aquaset, la SMABTP et [N] aux dépens ce compris les frais d'expertise judiciaire taxés à hauteur de 6.958 €,

Dit que la charge finale des dépens et celle de l'indemnité accordée au titre de l'article 700 du CPC seront réparties au prorata des responsabilités retenues ci-dessus,

Rejeté le surplus des demandes.

Par conclusions notifiées le 18/11/2021, la SMABTP, appelante demande à la Cour :

Vu l'article L.242-1 du Code des assurances

Vu l'Annexe I de l'article A243-1 du code des assurances

Vu les articles L.113-3 et L.124-5 du code des assurances

Vu l'article 1383-2 du code civil

Vu les articles 1353 du Code civil et 9 du Code de procédure civil

Vu les articles 1792 et 1231-1 du Code civil

Vu l'article 246 du Code de procédure civile

Infirmer le jugement rendu le 21 septembre 2021 par le Tribunal judiciaire de DRAGUIGNAN mais seulement en ce qu'il :

- Dit que la SMABTP doit sa garantie

- Condamne in solidum la SARL Aquaset et la SMABTP à payer à [O] [R] la somme de 17.420 € HT au titre de ce désordre, qui portera intérêts au taux légal à compter du 8 octobre 2018 ;

- Dit que [P] [N] devra relever et garantir la SMABTP de cette condamnation à hauteur de 30 % ;

- Condamne in solidum la SARL Aquaset, la SMABTP et [P] [N] à payer à [O] [R] la somme de 4.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamne in solidum la SARL Aquaset, la SMABTP et [P] [N] aux dépens ce compris les frais d'expertise judiciaire taxés à hauteur de 6.958, 09 € ;

- Rejette le surplus des demandes ;

Et statuant à nouveau :

A titre principal

Rejeter l'ensemble des demandes présentées à l'encontre de la SMABTP

A titre subsidiaire

Condamner Monsieur [N] à relever et garantir la SMABTP des condamnations qui seraient par extraordinaires mises à sa charge en principal, intérêts, frais irrépétibles et dépens, à hauteur de 90%

Condamner la SARL Aquaset à rembourser à la SMABTP la franchise contractuelle au titre des garanties obligatoires

Déclarer opposables les franchises de la SMABTP s'agissant des garanties facultatives

En tout état de cause

Rejeter toute demande présentée à l'encontre de la SMABTP au titre des garanties facultatives, notamment désordres intermédiaires et préjudice immatériel

Déclarer Madame [R] responsable en ce qu'elle a commis une faute pour ne pas avoir souscrit d'assurance Dommages ouvrage obligatoire et LAISSER à sa charge définitive tout préjudice immatériel allégué.

Condamner in solidum tout succombant à payer à la SMABTP la somme de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles.

Condamner in solidum tout succombant aux entiers dépens, distraits au profit de la SCP ROBERT & FAIN-ROBERT conformément aux dispositions des articles 696 et suivant du Code de procédure civile.

Elle expose que l'assurance de responsabilité couvre les travaux ayant fait l'objet d'une ouverture de chantier pendant la période de validité du contrat d'assurance, et que cette notion s'entend comme le commencement effectif des travaux confiés à l'assuré , qu'il en résulte que sa garantie n'était plus due à la date de la réalisation des travaux pour avoir été suspendue le 5/09/2014 et le contrat résilié avec effet au 30/09/2014 , que madame [R] a indiqué elle-même que les travaux ont commencé le 30/09/2014 , que l'effectivité du commencement des travaux avant la date de la suspension de la garantie n'est pas démontrée, que la mention de cette date dans l'acte introductif d'instance constitue un aveu judiciaire confirmé par les déclarations de l'intéressée lors de l'expertise.

S'agissant du désordre n°1 , le caractère décennal n'est pas établi , l'expert n'a pas motivé l'impropriété à destination se contentant de se référer à l'allégation de la demanderesse sans constaté la moindre défaillance d'étanchéité du bassin en partie immergée.;

Monsieur [N] doit sa garantie à hauteur de 90% du fait de l'absence de joint de rupture entre le bassin et la plage.

Enfin, les garanties facultatives du contrat d'assurance ne sont pas applicables au regard de la résiliation du contrat à la date de la réclamation constituée par l'assignation devant le juge des référés conformément à l'article L124-5 du code des assurances.

Elles sont en outre soumises à franchises et madame [R] a commis une faute en ne souscrivant pas une assurance dommages ouvrages.

Par conclusions notifiées le 25/01/2022, la société Aquaset demande à la cour :

Vu les articles 1792 et suivants,

Vu l'article L. 241-1 du Code des assurances

Vu l'article 1383-2 du code civil,

Vu les articles 1231-1 et suivants du Code civil

Vu l'article 1240 suivants du Code civil

- Entendre mesdames et messieurs les Président et Conseillers de la Cour d'appel de céans confirmer le jugement du 21 septembre 2021 du Tribunal Judiciaire de DRAGUIGNAN en ce qu'il a retenu la garantie de la société SMABTP et l'a condamnée in solidum avec Aquaset à verser à madame [R] la somme de 17 420 € H.T.

Condamner la SMABTP, appelante, à payer la somme de 3 000 € à la société AQUASET par application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

Condamner la SMABTP aux entiers dépens, distraits au profit de maître CAGNOL,

- Subsidiairement et en cas d'infirmation même partielle, statuant à nouveau,

Condamner la SMABTP, par application des garanties du contrat d'assurance obligatoire « responsabilité civile décennale » à relever et garantir son assurée, la société Aquaset, de toutes condamnations prononcées à son encontre en réparation du désordre n°1 de nature décennale

Débouter madame [R] de toutes ses demandes, fins et conclusions, tenant à la réparation du désordre allégué n°2,

Débouter madame [R] de toutes ses demandes, fins et conclusions, tenant à la réparation du désordre allégué n°3,

- Très subsidiairement,

Condamner monsieur [N], sous-traitant, à relever et garantir la société AQUASET de toutes condamnations prononcées à son encontre en réparation du désordre n°3 au titre de la responsabilité pour faute prouvée de ce sous-traitant,

Condamner monsieur [N] à payer à la société AQUASET la somme de 3 000 € par application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,

En tout état de cause,

Débouter madame [R] de toutes ses autres demandes dirigées contre la société Aquaset,

Débouter la SMABTP de toutes ses autres demandes dirigées contre la société Aquaset,

Condamner tout succombant, à payer à la société Aquaset la somme de 3 000 € par application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,

Condamner tout succombant aux entiers dépens distraits au profit de maître CAGNOL,

Sur la nature des désordres, elle retient que l'expert a considéré que le désordre n°1 était de nature décennale, qu'il est imputable aux travaux directement réalisés par Aquaset et qu'il n'était pas apparent au jour de la réception, que le désordres n°2 n'est pas établi, les défauts d'horizontalité étant inférieur aux normes acceptables, que le désordre n°3 n'est pas de nature décennale, était apparent à la réception et est imputable à monsieur [N] ;

Sur la garantie de la SMABTP, elle expose que le contrat souscrit le 01/01/2008 couvre les chantiers ouverts entre le 01/01/2014 et le 31/12/2014, que le devis ayant été accepté le 29/08/2014, les travaux ont commencé entre le 08/09/2014 et le 11/09/2014, que la garantie est acquise, s'agissant d'une assurance de responsabilité obligatoire et le fait générateur ayant commencé à une période de validité de la police , où la garantie n'était pas suspendue , que le prétendu aveu judiciaire de madame [R] outre qu'il n'est pas univoque, ne lui est pas opposable , que la concluante a déclaré pendant l'expertise que le chantier avait démarré le 08/09/2014, que les travaux ont nécessité la démolition préalable de l'existant, que la chronologie des travaux est confirmée par les pièces produites et le témoignage de monsieur [Y] , que 63% des travaux étant réalisés au 30/09/2014,ils n'ont pu commencer après le 15/09/2014.

Elle demande la confirmation de la condamnation de monsieur [N] à l'indemnisation au titre du désordre n°3 sur le fondement de l'article 1240 du code civil.

En outre, ce désordre apparent à la réception n'a pas été dénoncé dans l'année de celle-ci.

Enfin, elle peut prétendre à une action en responsabilité contractuelle contre monsieur [N] dans l'hypothèse où la sienne serait retenue à l'égard de la maîtrise d'ouvrage.

Par conclusions notifiées le 14/02/2022, madame [O] [R] demande à la Cour :

Vu les articles 1792 et suivants du Code civil,

Vu l'article 1240 du Code civil,

Vu les articles L.113-6 et L.124-3 du Code des assurances,

A titre principal

Confirmer le jugement entrepris,

Condamner la SMABTP à verser à madame [O] [R] la somme de 3.000,00 euros au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens,

A titre subsidiaire

Infirmer partiellement le jugement entrepris en ce qu'il a débouté madame [R] du surplus de ses demandes ET STATUANT DE NOUVEAU :

S'agissant du désordre de nature décennale,

Dire et juger que les désordres affectant le bassin de la piscine sont de nature décennale,

Dire et juger que ces désordres sont imputables aux travaux exécutés par la SARL AQUASET

Dire et juger que la SARL Aquaset engage sa responsabilité de nature décennale à l'égard de madame [R]

Dire et juger que madame [R] dispose d'une action directe à l'encontre de la Compagnie SMABTP, assureur de la SARL AQUASET lors de l'exécution des travaux,

Dire et juger que la garantie de la SMABTP doit être mobilisée au bénéfice de madame [R],

En conséquence,

Condamner la SARL Aquaset et la Compagnie SMABTP, in solidum, au paiement à madame [R] de la somme de 24.040,54 €, outre intérêts au taux légal à compter du 8 octobre 2018, date de dépôt du rapport d'expertise judiciaire,

Condamner la SARL Aquaset et la Compagnie SMABTP, in solidum, au paiement d'une somme de 10.000,00 € au titre du préjudice de jouissance subi par Madame [R]

S'agissant des désordres intermédiaires,

Dire et juger que monsieur [N] [P] a commis des fautes dans l'exécution des travaux qui lui ont été confiés en sous-traitance,

Dire et juger que ses fautes sont à l'origine de désordres de nature intermédiaires, qui affectent les margelles du bassin, les mosaïques du bassin et le revêtement des plages de la piscine,

Dire et juger que Monsieur [N] [P] engage à ce titre sa responsabilité délictuelle à l'égard de madame [R],

En conséquence,

Condamner monsieur [N] [P] à payer à madame [R] la somme de 13.404,00 € outre intérêts au taux légal à compter du 8 octobre 2018, date de dépôt du rapport d'expertise judiciaire,

En tout état de cause,

Condamner la SARL Aquaset, la SMABTP et monsieur [N], in solidum, à payer à madame [O] [R] la somme de 5.000 euros au titre des frais irrépétibles,

Les condamner aux entiers dépens en ce compris les frais d'expertise judiciaire, taxés à la somme de 6.958,09 €.

Elle expose qu'il a été relevé par les experts trois types de désordres :

- Fissuration et perte d'eau, s'accompagnant de la défectuosité du système de filtration, désordre de nature décennale, imputable à la SARL Aquaset

- Défaut d'horizontalité et bosses affectant le carrelage, désordre de nature esthétique qualifié d'intermédiaire, également imputable à monsieur [N]

- non-conformité du carrelage des plages de la piscine (dimensionnement de 5 dalles, joints non conformes ou inachevés constitués de sable grossier, défauts d'alignement) , désordre qualifié d'intermédiaire ,

Elle expose, en ce qui concerne la garantie de la SMABTP, madame [R] estime que l'assureur de la SARL Aquaset ne rapporte pas la preuve de la résiliation du contrat d'assurance dans les formes prévues par la loi et les travaux ont commencé le 08/09/2014, date de versement d'un acompte de 10350€, qu'au 30/09/2014, le chantier était achevé à hauteur de 63%.

La SMABTP se prévaut d'une exclusion de garantie relative au système de filtration, qui n'est pas affecté en l'espèce, les désordres consistant en une fissuration généralisée du bassin.

Au titre du préjudice matériel elle sollicite :

- 21804€ travaux de reprise des désordres du bassin,

- des factures estivales d'eau de 2014 et 2015,

- nettoyage de piscine pour 780€.

- 6354€ et 7050€ au titre des travaux de reprise de la plage.

Monsieur [N] a reçu notification de la déclaration d'appel et des conclusions d'appelant par procès-verbal de recherche infructueuse du 13 décembre 2021.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 28/04/2025.

Motivation

* Sur le contrat liant la société Aquaset et madame [R]

Le 18 juillet 2014, la société Aquaset a adressé à madame [R] une offre contrat de travaux de construction d'une piscine pour un montant de 31109,98€ HT soit 37331,98 euros TTC.

Les travaux sont les suivants :

- Terrassement :

Dépose et évacuation de la piscine existante, nettoyage de l'excavation, dépose de l'abri de piscine et repose en fin de travaux, dépose des margelles nettoyage

- piscine traditionnelle :

Fourniture d'une piscine -finition avec enduit de mortier hydrofuge chargé en résine de synthèse en 2 couches, revêtement Emaux de verre, escalier roman 3M, mise en place de la filtration dont le système existant n'est pas modifié, projecteur si possible

- divers :

Margelle-repose de margelle existante en pierre reconstituée de type Fabemi série espace ou similaire jointement au mortier, margelle cassée en sus

- filtre option non comptabilisée :

Filtre, sable, gravier, changement de filtre.

Le procès-verbal de réception de travaux en date du 26/06/2015 mentionne en dessous des signatures qu'il reste à rectifier 4 coups sur le dallage dimension pas dispo pour l'instant 60x60 (hors marché).

* sur les expertises :

Le rapport d'expertise à l'initiative de l'assureur de madame [R], la Macif, en date du 24/10/2016 suite à une déclaration de sinistre en date du 01/04/2016, constate, s'agissant du bassin, la fissuration horizontale de la piscine sur trois côtés, un niveau d'eau 10 cm en dessous de son niveau théorique.

La piscine ne peut être utilisée la filtration étant désamorcée.

Le désordre trouve son origine dans un défaut de reprise de bétonnage de l'arase béton des voiles périphériques qui génère une fuite importante dont l'eau est évacuée par le dispositif de pompage du puit drainant. Cet expert évalue les travaux de reprises du bassin y compris nettoyage piscine à la somme de 14100€ HT soit 16920€ TTC ;

L'expert constate ensuite un défaut d'horizontalité, des bosses affectant le carrelage constituant une gêne à caractère esthétique.

Il évalue les travaux de reprise à la somme de 5295€ HT soit 6354€ TTC ;

L'expert constate enfin un défaut de finition des joints de carrelage de la plage.

Il s'agit d'un défaut de pose. Les travaux de reprise sont évalués à 5875€ HT soit 7050€ TTC

En ce qui concerne le rapport de l'expert judiciaire, monsieur [F] désigné par ordonnance du juge des référés du 08/03/2017, ses conclusions sont les suivantes :

Les parois du bassin étant fissurées, il n'est pas étanche, est ainsi impropre à sa destination et le restera tant que les travaux de reprise ne seront pas réalisés.

Le défaut d'horizontalité et de planéité du bassin, la différence de niveau entre les deux skimmers, restent dans les normes acceptables.

Les défauts du carrelage posé par monsieur [N], sous-traitant de la société Aquaset, sont d'ordre esthétique et apparents à la réception n'ont pas fait l'objet de réserve.

L'expert évalue le montant des travaux de reprise à la somme de 28854 euros TTC.

* sur la nature, l'imputabilité du désordre de fissuration horizontale du bassin

Le jugement du tribunal judiciaire de Draguignan en date du 21/09/2021 a retenu la qualification de de désordre de nature décennale au visa de l'article 1792 du code civil s'agissant de la fissuration du bassin , qualification qu'il convient de confirmer au regard du rapport de l'expert judiciairement désigné, monsieur [F] , comme de celui mandaté par la Macif, qui mentionne expressément que compte tenu de la fuite consécutive à ce désordre, le bassin n'est pas étanche , le système de filtration ne peut fonctionner et la piscine ne peut être utilisée, ce qui est contraire à sa destination.

En ce qui concerne l'imputabilité du désordre, l'expert judiciaire relève dans son rapport principalement que le ferraillage réalisé après les intempéries ayant entrainé le soulèvement de la coque n'a pas été rendu solidaire de celui de la partie basse, que la zone de fissuration apparue en mars 2016 correspond à la reprise du bétonnage.

Il relève ensuite qu'il n'a pas été mis 'uvre de joint de rupture entre la plage et le bassin alors que ce joint a pour but de protéger le bassin des mouvements de dilatation de la plage et des désordres consécutifs.

Il précise que l'absence de ce joint de rupture est contributive des fissures horizontales en partie haute du bassin.

Toutefois il ne ressort pas de l'analyse de l'expert que cette absence de joint soit la cause prépondérante du désordre de nature à justifier de lui imputer le désordre à hauteur de 90% comme le demande la SMABTP.

En effet, il est relevé par les deux experts intervenus une défaillance lors de la réalisation des travaux après l'impact des intempéries ayant soulevé partiellement la piscine en octobre 2014, l'expert mandaté par la Macif caractérisant expressément une fissuration traversante du voile béton au niveau de la reprise de bétonnage.

Ainsi, il y a lieu de confirmer la décision du premier juge en ce qu'elle impute le sinistre à l'absence de joint de rupture à titre secondaire et à hauteur de 30%.

En ce qui concerne le préjudice matériel, aucun élément produit par les parties ne permet de procéder à une évaluation différente de ce préjudice que celle retenue par le premier juge à hauteur 17420€HT ;

S'agissant du préjudice résultant du trouble de jouissance, il est acquis qu'en l'absence de réalisation des travaux la piscine est inutilisable.

Madame [R] demande à titre principal la confirmation du jugement de première instance qui lui alloue de ce chef une somme de 2000€ à la date du jugement

Il y a lieu d'allouer cette somme à madame [R].

* Sur la garantie par La SMABTP

En ce qui concerne la garantie de l'assureur SMABTP, une attestation d'assurance en date du 01/12/2013 atteste que la société Aquaset est assurée auprès de la SMABTP pour la période du 01/01/2014 au 31/12/2014 pour les activités de construction de piscines traditionnelles en béton au titre de la garantie obligatoire de responsabilité décennale et de la garantie de responsabilité du sous-traitant en cas de dommages de nature décennale ;

L'article L2141-1 du code des assurances dispose que toute personne physique ou morale, dont la responsabilité décennale peut être engagée sur le fondement de la présomption établie par les articles 1792 et suivants du code civil, doit être couverte par une assurance.

A l'ouverture de tout chantier, elle doit justifier qu'elle a souscrit un contrat d'assurance la couvrant pour cette responsabilité. Tout candidat à l'obtention d'un marché public doit être en mesure de justifier qu'il a souscrit un contrat d'assurance le couvrant pour cette responsabilité.

Tout contrat d'assurance souscrit en vertu du présent article est, nonobstant toute stipulation contraire, réputé comporter une clause assurant le maintien de la garantie pour la durée de la responsabilité décennale pesant sur la personne assujettie à l'obligation d'assurance.

La Cour de cassation juge qu'il résulte des dispositions d'ordre public de ce texte et de l'article A 243-1 que l'assurance responsabilité décennale couvre les travaux ayant fait l'objet d'une ouverture de chantier, c'est-à-dire d'un commencement des travaux, pendant la période de validité du contrat d'assurance.

Pour dénier sa garantie, l'assureur se prévaut d'une mise en demeure adressée à la société Aquaset de payer ses cotisations mentionnant qu'à défaut de régularisation de l'impayé, la garantie serait suspendue à compter du 15/09/2014 à 24heures.

Se prévalant des dispositions de l'article 1383-2 du code civil, il considère que madame [R] a reconnu dans l'assignation délivrée devant le juge des référés et devant l'expert que la date de commencement des travaux est le 30 septembre 2014.

L'aveu est la déclaration par laquelle une personne reconnaît pour vrai un fait de nature à produire contre elle des conséquences juridiques.

Il peut être judiciaire ou extrajudiciaire.

Il est constant que si l'aveu judiciaire est irrévocable c'est sauf erreur de fait commise par l'auteur de l'aveu à qui il incombe de prouver cette erreur.

Il est acquis que la nouvelle structure en béton était posée lors de la survenance des violents orages qui l'ont endommagé le 12/10/2014 et donc 12 jours après la résiliation du contrat d'assurance et qu'à cette date les travaux étaient largement mis en 'uvre.

Il est produit une fiche d'intervention de l'entreprise chez madame [R] le 11/09/2014, une fiche chantier rénovation piscine [R] du 11/09/2014 au 20/03/2015, la facture du 02/06/2015 qui indique une conception le 30/09/2014 avec un avancement des travaux à 63% et un acompte exigible en octobre 2014.

Il ressort du compte client édité le 02/06/2015 par la SARL Aquaset que madame [R] a payé un acompte de 10350€ le 08/09/2014, le 30/09/2014 un acompte de 9000€ exigible le 26/09/2014 et que la somme de 21 687€ était exigible au 31/10/2014, ce qui est cohérent avec la facture précitée exigible en octobre 2014 et les factures suivantes.

Une attestation d'un voisin de madame [R], monsieur [M] (qui joint sa CNI mentionnant son adresse à Val) témoigne le 26/09/2018 que les travaux ont débuté le lundi 08 septembre 2024, qu'il a eu monsieur [Y] (sarl Aquaset) au téléphone le 10 septembre 2014 au sujet des travaux car il a observé que la coque avait été découpée partiellement et non enlevée totalement.

Il apparaît des éléments précités que le démarrage du chantier est intervenu au plus tard le 11/09/2014 soit antérieurement à la date d'effet de la suspension de la garantie dont se prévaut l'assureur.

De plus, il résulte de l'article R. 113-1 du code des assurance que la mise en demeure prévue au deuxième alinéa de l'article L. 113-3 résulte de l'envoi d'une lettre recommandée, adressée à l'assuré, ou à la personne chargée du paiement des primes, à leur dernier domicile connu de l'assureur.

Or , alors qu'il lui incombe de rapporter la preuve de la date d'envoi des lettres recommandées, l'assureur se prévaut de deux mises en demeure, celle précitée en date du 15 septembre 2014, et également une mise en demeure de résiliation adressée à la société Aquaset avec effet au 30 septembre 2014 à défaut de régularisation de l'incident de paiement, mais ne produit pour aucune des deux les justificatifs des conditions d'envoi de ces courriers et en particulier des cachets de la poste en faisant foi ,les courriers précités mentionnant les seuls codes-barres non déchiffrables par la juridiction à défaut de la production du bordereau d'envoi ou du suivi du courrier .

Par voie de conséquence, à défaut de preuve de la résiliation du contrat d'assurance pour défaut de paiement des cotisations avant le commencement des travaux, il y a lieu de confirmer la décision du premier juge en ce qu'il dit la garantie décennale de l'assureur mobilisable s'agissant des travaux de reprise du bassin.

La franchise contractuelle du contrat d'assurance dont se prévaut la SMABTP est opposable à l'assurée mais non aux tiers bénéficiaire, madame [R], s'agissant de l'assurance garantie décennale obligatoire bien que les conditions générales de la police ne soient pas produites.

Ensuite l'absence d'assurance dommage ouvrage n'étant pas en lien de causalité direct et certain avec le préjudice dont il est demandé réparation qui a pour origine et est imputable à la seule défaillance de la société Aquaset et de son sous-traitant , la SMABTP ,qui a fait le choix de contester sa garantie y compris après le dépôt des rapports d'expertise et assume les risques de cette décision, sera déboutée de sa demande de rejet de toute demande au titre des garanties facultatives notamment désordres intermédiaires et préjudice immatériel.

Sur les désordres de la plage de la piscine

Le premier juge a imputé à monsieur [N] les désordres portant sur les dallages et margelles aux abords de la piscine formant plage et à condamner celui-ci au paiement du coût des travaux de reprise soit 11170 euros HT soit 13404€ TTC à l'exclusion de la SARL Aquaset et de son assureur la SMABTP.

Monsieur [N] qui n'a pas constitué avocat ne conteste pas cette condamnation ;

La SARL Aquaset conclut au principal à la confirmation du jugement de première instance.

Madame [R] conclut au principal à la confirmation du jugement de première instance.

Il y a lieu de confirmer le jugement de première instance de ce chef

Sur les autres demandes

Le jugement de première instance étant pour l'essentiel confirmé dans ses dispositions déférées à la Cour, il n'y a pas lieu de le réformer s'agissant des condamnations au titre des dépens et de l'application de l'article 700 du code de procédure civile.

Partie perdante l'appelante sera condamnée aux dépens de la procédure d'appel.

L'équité commande en outre de condamner la SMABTP à payer à madame [R] une somme de 2500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ces motifs

Statuant publiquement, par arrêt par défaut et par mise à disposition au greffe le 07 juillet 2025 :

Confirme le jugement du tribunal judiciaire de Draguignan en date du 21 septembre 2021 en toutes ses dispositions déférées à la Cour.

Y ajoutant,

Condamne la SMABTP à payer à madame [O] [R] la somme de 2500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne la SMABTP aux dépens de la procédure d'appel dont distraction au profit des avocats en ayant fait l'avance.

Signé par Madame Inès BONAFOS, Présidente et Mme [O] GAYE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La greffière La présidente

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