CA Rennes, ch. etrangers/hsc, 3 juillet 2025, n° 25/00472
RENNES
Ordonnance
Autre
COUR D'APPEL DE RENNES
N° 287/2025 - N° RG 25/00472 - N° Portalis DBVL-V-B7J-WAZ3
JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT
O R D O N N A N C E
articles L 741-10 et suivants du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile
Nous, Sébastien PLANTADE, conseiller à la cour d'appel de RENNES, délégué par ordonnance du premier président pour statuer sur les recours fondés sur les articles L.741-10 et suivants du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, assisté de Patricia IBARA, greffière,
Statuant sur l'appel formé par courriel de la Cimade reçu le 02 Juillet 2025 à 15 heures 03 pour :
M. [R] [T]
né le 01 Février 1977 à [Localité 1] (SYRIE)
de nationalité Syrienne
ayant pour avocat Me Florian DOUARD, avocat au barreau de RENNES
d'une ordonnance rendue le 01 Juillet 2025 à 15 heures 02 par le magistrat en charge des rétentions administratives du Tribunal judiciaire de RENNES qui a rejeté les exceptions d'irrégularité soulevées, le recours formé à l'encontre de l'arrêté de placement en rétention administrative, et ordonné la prolongation du maintien de M. [R] [T] dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire pour une durée maximale de vingt-six jours à compter du 30 juin 2025 à 24 heures ;
En l'absence de représentant de la PREFECTURE D'ILLE ET VILAINE, dûment convoquée, qui a fait parvenir un mémoire par courriel reçu le 03 juillet 2025 régulièrement communiqué aux parties,
En l'absence du procureur général régulièrement avisé, Monsieur Yves DELPERIE, avocat général, ayant fait connaître son avis par écrit déposé le 02 juillet 2025 lequel a été mis à disposition des parties.
En présence de Monsieur [R] [T], assisté de Me Florian DOUARD, avocat,
Après avoir entendu en audience publique le 03 Juillet 2025 à 10 H 00 l'appelant assisté de M. [H] [G], interprète en langue arabe ayant préalablement prêté serment, et son avocat en leurs observations,
Avons mis l'affaire en délibéré et ce jour, avons statué comme suit :
Le 27 juin 2025, Monsieur [R] [T] a fait l'objet d'un arrêté du Préfet d'Ille-et-Vilaine portant remise aux autorités allemandes, en application des conventions internationales ou du droit de l'union européenne, conformément aux dispositions de l'article L621-2 du CESEDA, notifié le 27 juin 2025.
Le 27 juin 2025, Monsieur [R] [T] s'est vu notifier par le Préfet d'Ille-et-Vilaine une décision de placement en rétention administrative, au centre de rétention administrative (CRA) de [Localité 4] pour une durée de quatre jours.
Le 30 juin 2025, les autorités allemandes ont donné leur accord pour la remise de l'étranger.
Par requête en date du 30 juin 2025, Monsieur [R] [T] a contesté la légalité de l'arrêté de placement en rétention administrative.
Par requête motivée en date du 30 juin 2025, reçue le 30 juin 2025 à 16h 18 au greffe du tribunal de Rennes, le représentant du préfet d'Ille-et-Vilaine a saisi le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Rennes d'une demande de prolongation pour une durée de 26 jours de la rétention administrative de Monsieur [R] [T].
Par ordonnance rendue le 01er juillet 2025, le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Rennes a rejeté le recours en annulation de l'arrêté de placement en rétention administrative et ordonné la prolongation du maintien de Monsieur [R] [T] en rétention dans les locaux non pénitentiaires pour un délai maximum de 26 jours, à compter du 30 juin 2025.
Par déclaration reçue au greffe de la Cour le 02 juillet 2025 à 15h 03, Monsieur [R] [T] a formé appel de cette ordonnance.
L'appelant fait valoir, au soutien de sa demande d'infirmation de la décision entreprise, que le Préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation dans sa prise de décision en n'ayant pas pris en compte la situation de l'intéressé, qui a remis son passeport à la préfecture, dispose d'une domiciliation connue de l'administration, ne représente aucune menace pour l'ordre public, disposait d'un droit au séjour en Allemagne, avec des démarches de renouvellement en cours, et subit sa première mesure d'éloignement, écartant tout risque de fuite, et que par ailleurs, la procédure est entachée d'irrégularité liée à la consultation du fichier AGDREF sans preuve rapportée de l'habilitation de l'agent à la consultation dudit fichier, ayant ainsi porté atteinte aux droits de l'intéressé puisque cette consultation a conditionné le placement en retenue puis en rétention administrative.
Le procureur général, suivant avis écrit du 02 juillet 2025 sollicite la confirmation de la décision entreprise.
Comparant à l'audience, Monsieur [R] [T] ne présente pas d'observations, confirmant avoir remis son passeport.
Demandant l'infirmation de la décision entreprise, son conseil soutient les moyens formés par écrit, soulignant que le contrat passé avec le fournisseur d'énergie stipule bien les noms des deux personnes ayant établi l'attestation d'hébergement, que l'intéressé n'a pas exprimé clairement un refus d'être éloigné vers l'Allemagne, alors qu'il a remis son passeport, ne représente pas une menace à l'ordre public, et aurait pu être assigné à résidence. Il est également insisté sur l'irrégularité reconnue par le premier juge de la consultation ab initio du fichier AGDREF par un agent non habilité, qui a nécessairement causé grief, ayant conduit à la chaîne subséquente des privations de liberté. Il est enfin formalisé une demande au titre des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sur l'aide juridictionnelle.
Aux termes d'un mémoire d'appel transmis le 03 juillet 2025 à 02h 18, le représentant du Préfet d'Ille-et-Vilaine, non comparant à l'audience, demande la confirmation de la décision querellée, faisant remarquer que les garanties de représentation présentées par l'intéressé en France sont sujettes à caution, plusieurs attestations d'hébergement différentes et incohérentes ayant été produites, que l'intéressé a expressément déclaré s'opposer à son retour en Allemagne, et que par ailleurs, la situation irrégulière de l'intéressé découlait déjà de la présentation d'un passeport étranger et d'un titre de séjour expiré, la mesure de rétention ayant pu être engagée indépendamment de la consultation du fichier AGDREF, tandis que les diligences auprès des autorités allemandes ont été immédiates.
SUR QUOI :
L'appel est recevable pour avoir été formé dans les formes et délais prescrits.
Sur le recours en annulation de l'arrêté de placement en rétention administrative
Sur les moyens tirés du défaut d'examen complet de la situation et de l'erreur manifeste d'appréciation :
Selon les dispositions de l'article L621-1 du CESEDA, par dérogation au refus d'entrée à la frontière prévu à l'article L. 332-1, à la décision portant obligation de quitter le territoire français prévue à l'article L. 611-1 et à la mise en 'uvre des décisions prises par un autre État prévue à l'article L. 615-1, l'étranger peut être remis, en application des conventions internationales ou du droit de l'Union européenne, aux autorités compétentes d'un autre État, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas prévus aux articles L. 621-2 à L. 621-7.
L'étranger est informé de cette remise par décision écrite et motivée prise par une autorité administrative définie par décret en Conseil d'État. Il est mis en mesure de présenter des observations et d'avertir ou de faire avertir son consulat, un conseil ou toute personne de son choix.
Suivant les dispositions de l'article L621-2, peut faire l'objet d'une décision de remise aux autorités compétentes d'un Etat membre de l'Union européenne, de la République d'Islande, de la Principauté du Liechtenstein, du Royaume de Norvège ou de la Confédération suisse l'étranger qui, admis à entrer ou à séjourner sur le territoire de cet Etat, a pénétré ou séjourné en France sans se conformer aux dispositions des articles L. 311-1, L. 311-2 et L. 411-1, en application des dispositions des conventions internationales conclues à cet effet avec cet État, en vigueur au 13 janvier 2009.
Il ressort des dispositions de l'article L741-1 du CESEDA que 'L'autorité administrative peut placer en rétention, pour une durée de quatre jours, l'étranger qui se trouve dans l'un des cas prévus à l'article L. 731-1 lorsqu'il ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir un risque de soustraction à l'exécution de la décision d'éloignement et qu'aucune autre mesure n'apparaît suffisante à garantir efficacement l'exécution effective de cette décision.
Le risque mentionné au premier alinéa est apprécié selon les mêmes critères que ceux prévus à l'article L. 612-3 ou au regard de la menace pour l'ordre public que l'étranger représente'.
En outre, selon les dispositions de l'article L 612-3, 'Le risque mentionné au 3° de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants :
1° L'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ;
2° L'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France, sans avoir sollicité la délivrance d'un titre de séjour ;
3° L'étranger s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après l'expiration de son titre de séjour, du document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour, sans en avoir demandé le renouvellement ;
4° L'étranger a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français ;
5° L'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ;
6° L'étranger, entré irrégulièrement sur le territoire de l'un des États avec lesquels s'applique l'acquis de Schengen, fait l'objet d'une décision d'éloignement exécutoire prise par l'un des États ou s'est maintenu sur le territoire d'un de ces États sans justifier d'un droit de séjour ;
7° L'étranger a contrefait, falsifié ou établi sous un autre nom que le sien un titre de séjour ou un document d'identité ou de voyage ou a fait usage d'un tel titre ou document;
8° L'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité, qu'il a refusé de communiquer les renseignements permettant d'établir son identité ou sa situation au regard du droit de circulation et de séjour ou a communiqué des renseignements inexacts, qu'il a refusé de se soumettre aux opérations de relevé d'empreintes digitales ou de prise de photographie prévues au 3° de l'article L. 142-1, qu'il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues aux articles L. 721-6 à L. 721-8, L. 731-1, L. 731-3, L. 733-1 à L. 733-4, L. 733-6, L. 743-13 à L. 743-15 et L. 751-5.'
Par ailleurs, selon les dispositions de l'article L 741-4, 'La décision de placement en rétention prend en compte l'état de vulnérabilité et tout handicap de l'étranger.
Le handicap moteur, cognitif ou psychique et les besoins d'accompagnement de l'étranger sont pris en compte pour déterminer les conditions de son placement en rétention'.
Les dispositions de l'article L 731-1 prévoient en outre que 'L'autorité administrative peut assigner à résidence l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, dans les cas suivants :
['] 4° L'étranger doit être remis aux autorités d'un autre Etat en application de l'article L. 621-1 ;
Par ailleurs, aux termes de l'article 15-1 de la directive dite retour n° 2008/115/CE du Parlement Européen et du Conseil en date du 16 décembre 2008 "À moins que d'autres mesures suffisantes, mais moins coercitives puissent être appliquées efficacement dans un cas particulier, les Etats membres peuvent uniquement placer en rétention le ressortissant d'un pays tiers qui fait l'objet de procédures de retour afin de préparer le retour et/ou de procéder à l'éloignement en particulier lorsque a) il existe un risque de fuite ou b) le ressortissant concerné d'un pays tiers évite ou empêche la préparation du retour ou de la procédure d'éloignement.
Dans son arrêté de placement en rétention administrative en date du 27 juin 2025, le Préfet d'Ille-et-Vilaine expose que faisant l'objet d'un arrêté portant remise aux autorités allemandes, édicté le 27 juin 2025 et notifié le même jour, Monsieur [R] [T] déclare être marié et père de quatre enfants, que sa famille réside au Liban, qu'il ne démontre pas avoir noué en France des liens dont l'intensité serait exclusive de tout autre qu'il conserverait encore dans son pays d'origine, que dans ces conditions, la mesure qui lui est opposée ne porte pas une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale au sens des dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, que si l'intéressé fait état de problèmes de santé liés à des coups de soleil, il peut bénéficier d'un accès à un médecin au centre de rétention et n'a pas fait de démarches visant à obtenir un titre de séjour pour motif médical, qu'il n'invoque aucun élément de nature à ce qu'il puisse être considéré qu'une vulnérabilité ou un handicap quelconque ferait obstacle au placement en rétention. Le Préfet en déduit que l'intéressé ne présente pas des garanties de représentation suffisantes propres à prévenir le risque de fuite en ce que même s'il a remis son passeport et justifié d'une adresse chez un ami à [Localité 3] (35), il a déclaré clairement ne pas vouloir repartir en Allemagne, empêchant d'envisager toute mesure d'assignation à résidence.
Il ressort de l'examen de la procédure et des pièces produites à l'audience que la situation de Monsieur [R] [T] a été examinée de manière suffisamment approfondie par le Préfet d'Ille-et-Vilaine, qui a élaboré une décision circonstanciée, motivée en droit et en fait, et n'a pas commis d'erreur d'appréciation, ayant légitimement considéré que l'intéressé ne présentait pas des garanties de représentation suffisantes pour prévenir le risque de fuite, conformément aux dispositions 4) de l'article L 612-3 précité selon la motivation de la décision querellée de placement en rétention administrative, dans la mesure où nonobstant les garanties de représentation présentées, l'intéressé a déclaré expressément dans son audition du 27 juin 2025 ne pas vouloir retourner en Allemagne et préférer rester en France, pays dans lequel il ne peut justifier d'un droit au séjour, ces éléments traduisant suffisamment un risque de fuite apprécié par le Préfet pour ne pas envisager une mesure d'assignation à résidence.
À cet égard le Préfet a donc ainsi justifié sa décision sans commettre d'erreur d'appréciation quant à l'opportunité de la mesure puisque le risque de fuite est caractérisé, alors que le Préfet a examiné par ailleurs de manière précise la situation de l'intéressé au titre de son état de santé et de son éventuelle vulnérabilité, ayant apprécié au vu des déclarations de Monsieur [T], qui n'a pas fait valoir d'élément permettant de le considérer comme une personne vulnérable, et en l'absence de toute pièce produite à ce titre, que l'état de l'intéressé en fonction des éléments dont il disposait ne s'opposait pas à un placement en rétention administrative.
Le recours en annulation contre l'arrêté de placement sera ainsi rejeté.
Sur la régularité de la procédure
Sur le moyen tiré de la consultation irrégulière du fichier AGDREF
Selon les dispositions de l'article L142-1 du CESEDA, afin de mieux garantir le droit au séjour des personnes en situation régulière et de lutter contre l'entrée et le séjour irréguliers des étrangers en France, peuvent être relevées, mémorisées et faire l'objet d'un traitement automatisé de données à caractère personnel dans les conditions prévues par le règlement (UE) 2016/679 du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l'égard des traitements des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données et par la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, les empreintes digitales ainsi qu'une photographie des ressortissants étrangers :
1° Qui sollicitent la délivrance, auprès d'un consulat ou à la frontière extérieure des Etats parties à la convention signée à Schengen le 19 juin 1990, d'un visa afin de séjourner en France ou sur le territoire d'un autre Etat partie à ladite convention ; ces empreintes et cette photographie sont obligatoirement relevées en cas de délivrance d'un visa ;
2° Qui, non ressortissants d'un Etat membre de l'Union européenne, de la République d'Islande, de la Principauté du Liechtenstein, du Royaume de Norvège ou de la Confédération suisse, sollicitent la délivrance d'un titre de séjour en application de l'article L. 411-1 ;
3° Qui sont en situation irrégulière en France, qui font l'objet d'une décision d'éloignement du territoire français ou qui, ayant été contrôlés à l'occasion du franchissement de la frontière en provenance d'un pays tiers aux Etats parties à la convention signée à Schengen le 19 juin 1990, ne remplissent pas les conditions d'entrée prévues à l'article 6 du règlement (UE) 2016/399 du Parlement européen et du Conseil du 9 mars 2016 concernant un code de l'Union relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes (code frontières Schengen) ou à l'article L. 311-1 ;
4° Qui bénéficient de l'aide au retour prévue par l'article L. 711-2. R611-5 CESEDA ;
Selon les dispositions de l'article R142-11, le ministre chargé de l'immigration est autorisé à mettre en 'uvre sur le fondement du 2° de l'article L. 142-1, un traitement automatisé de données à caractère personnel dénommé " Application de gestion des dossiers des ressortissants étrangers en France " (AGDREF2), ayant pour finalités de garantir le droit au séjour des ressortissants étrangers en situation régulière et de lutter contre l'entrée et le séjour irréguliers en France des ressortissants étrangers.
Aux termes des dispositions de l'article R142-15, outre les agents chargés de la mise en 'uvre du traitement et ceux de l'Agence nationale des titres sécurisés chargés de la fabrication des titres, ont accès, à raison de leurs attributions et dans la limite du besoin d'en connaître, à la totalité ou à une partie des données à caractère personnel et informations enregistrées dans le traitement automatisé mentionné à l'article R. 142-11 et dans le composant électronique prévu aux articles R. 414-5 et R. 431-1 :
1° Les agents chargés de la réglementation des étrangers, ainsi que de celle relative à l'accès à la nationalité française et aux demandes de visa, et de leur mise en 'uvre, et relevant des services centraux des ministères de l'intérieur (la direction générale des étrangers en France, direction générale de la police nationale, direction générale de la gendarmerie nationale, direction des libertés publiques et des affaires juridiques, délégation générale à l'outre-mer), des affaires étrangères (direction des Français à l'étranger et de l'administration consulaire), du budget (direction générale des douanes et droits indirects), individuellement désignés et spécialement habilités par le directeur ou le chef de service dont ils relèvent ;
2° Les agents chargés de l'application de la réglementation des étrangers, y compris dans le cadre de la procédure d'évaluation prévue par l'article R. 221-11 du code de l'action sociale et des familles, ainsi que de celle relative à l'accès à la nationalité française, dans les préfectures et les sous-préfectures, individuellement désignés et spécialement habilités par le préfet et, à [Localité 2], par le préfet de police ;
3° Les agents des missions diplomatiques et des postes consulaires chargés des visas, individuellement désignés et spécialement habilités par le chef de la mission ou par le chef de poste dont ils relèvent ;
4° Les agents des services de la police nationale, de la gendarmerie nationale et des douanes chargés du contrôle aux frontières, individuellement désignés et spécialement habilités respectivement par le directeur national de la police aux frontières, par le directeur général de la gendarmerie nationale ou par le directeur régional des douanes ou, le cas échéant, le directeur général des douanes et droits indirects ;
5° Au titre de la gestion des lieux de rétention administrative, de l'exécution des décisions d'éloignement ou de leur mission de vérification du droit de circulation ou de séjour sur le territoire français prévue par les articles L. 812-1 et L. 813-1, les agents des services déconcentrés de la police nationale et ceux des unités de la gendarmerie nationale, individuellement désignés et spécialement habilités, selon le cas :
a) par le chef du service territorial de la police nationale et, dans les départements de [Localité 2], des Hauts-de-Seine, de la Seine-[Localité 5] et du Val-de-Marne, par les directeurs de la préfecture de police chargés de l'ordre public et de la circulation, de la sécurité de proximité de l'agglomération parisienne et du renseignement ;
b) par le directeur général de la gendarmerie nationale, le commandant du groupement de gendarmerie interdépartemental de [Localité 2], les commandants de groupement de gendarmerie départementale, les commandants de région de gendarmerie ou les commandants des gendarmeries spécialisées.
De plus, l'article 15-5 du code de procédure pénale dispose que « seuls les personnels spécialement et individuellement habilités à cet effet peuvent procéder à la consultation de traitement au cours d'une enquête ou d'une instruction. La réalité de cette habilitation spéciale et individuelle peut être contrôlée à tout moment par un magistrat, à son initiative ou à la demande d'une personne intéressée. L'absence de la mention de cette habilitation sur les différentes pièces de procédure résultant de la consultation de ces traitements n'emporte pas, par elle-même, nullité de la procédure ».
Il est admis que la seule mention de cette habilitation en procédure suffit à en établir la preuve (C.Cass Crim 03 avril 2024 n°23-85.513).
Toutefois, la Cour de Cassation a estimé (Crim 26 novembre 2024 n°24-81.450) qu'il appartenait à la Chambre de l'instruction, le cas échéant en ordonnant un supplément d'information, de vérifier la réalité de l'habilitation spéciale et individuelle de l'agent ayant procédé aux consultations.
Enfin, selon une jurisprudence récente (Civ.1ère 23-23.860 du 04 juin 2025), il est indiqué que si c'est à tort que le premier président n'a pas recherché, comme il le lui était demandé, si l'agent du service de police ayant consulté le fichier des personnes recherchées était expressément habilité à cet effet, l'ordonnance n'encourt pas pour autant la censure, dès lors que le premier président a constaté que, indépendamment de cette consultation, d'autres éléments figurant à la procédure, notamment des échanges avec la préfecture avaient permis de déterminer que l'étranger se trouvait en situation irrégulière sur le territoire national et faisait l'objet d'une mesure d'éloignement et de fonder les procédures de garde à vue et de rétention.
En l'espèce, il ressort de l'examen de la procédure que dans le cadre d'un contrôle routier opéré le 26 juin 2025 à 18h 20, les services de police en patrouille motorisée ont procédé au contrôle des occupants d'un véhicule de marque Skoda. L'officier de police judiciaire le major [V] [I] a demandé au conducteur du véhicule de présenter son permis de conduire et le certificat d'immatriculation du véhicule, et ce dernier a présenté un titre de séjour allemand périmé au nom de [R] [T], né en Syrie, ainsi qu'un passeport syrien. Une consultation du fichier AGDREF a permis de constater que l'intéressé n'avait pas de titre de séjour en France et que son titre de séjour allemand avait expiré. Dès lors, un placement en retenue sur le fondement des dispositions des articles L812-1 et suivants a été ordonné.
Selon un procès-verbal ultérieur du 26 juin 2025, établi à 19h05, l'officier de police judiciaire brigadier-chef [W] [J], agent expressément habilité à la consultation des fichiers FAED, FAED, VISABIO, EURODAC et SBNA, a informé le Procureur de la République qu'il serait procédé à la consultation desdits fichiers via la comparaison des empreintes digitales de l'intéressé. Selon le procès-verbal suivant, la consultation des fichiers mentionnés a été opérée par un autre agent expressément habilité, le brigadier-chef de police [S] [Y] et a révélé une fiche positive à EURODAC.
Il s'ensuit, au regard de l'ensemble de ces éléments que si la preuve de l'habilitation de l'officier de police judiciaire [V] [I] pour la consultation du fichier AGDREF n'est pas rapportée, pour autant il ne s'ensuit aucune irrégularité faisant grief à l'intéressé dès lors qu'il est établi par ailleurs qu'un agent habilité [S] [Y] a procédé à la consultation du fichier EURODAC, qui a permis d'apprécier la situation administrative de l'intéressé sur le territoire français. En tout état de cause, indépendamment de la consultation querellée du fichier AGDREF, il ressort de la présentation par Monsieur [T], au moment du contrôle routier, de son passeport syrien et de son titre de séjour allemand à la date de validité expirée, que la situation irrégulière de l'intéressé sur le territoire national était avérée, justifiant les décisions subséquentes de placement en retenue et de placement en rétention administrative.
Par suite, le moyen sera rejeté comme étant inopérant.
Sur le fond :
Il ressort de l'examen de la procédure que nonobstant la remise d'un passeport et la production d'une attestation d'hébergement, Monsieur [R] [T] ne présente pas des garanties de représentation suffisantes propres à prévenir le risque de fuite, ayant fait part de son refus express d'être éloigné vers l'Allemagne, pays qui lui a offert une protection subsidiaire et ayant accepté sa remise. Dans ces conditions, la prolongation de la rétention administrative est seule de nature à pouvoir assurer l'exécution de la mesure d'éloignement, d'autant plus qu'aucun certificat médical n'est produit contre-indiquant le maintien en rétention de l'intéressé.
Enfin, en conformité avec les dispositions de l'article L. 741-3 du CESEDA, cette prolongation est strictement motivée par l'attente de l'organisation du départ de l'intéressé. Monsieur [T] étant en possession d'un document de voyage valide, après la demande de réadmission opérée le 27 juin 2025, une demande de réservation de vol a été adressée par le Préfet le 30 juin 2025 auprès de la division nationale de l'éloignement de la direction nationale de la police aux frontières.
En conséquence, c'est à bon droit que la requête entreprise a été accueillie par le premier juge et il y a lieu d'ordonner la prolongation de la rétention administrative de Monsieur [R] [T] à compter du 30 juin 2025, pour une période d'un délai maximum de 26 jours dans des locaux non pénitentiaires.
La décision dont appel est donc confirmée.
La demande sur le fondement des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 sur l'aide juridictionnelle sera rejetée.
PAR CES MOTIFS :
Statuant publiquement,
Déclarons l'appel recevable,
Confirmons l'ordonnance du magistrat du siège du tribunal judiciaire de Rennes en date du 01er juillet 2025,
Rejetons la demande formée au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sur l'aide juridictionnelle,
Laissons les dépens à la charge du trésor public.
Fait à [Localité 4], le 03 Juillet 2025 à 14 heures.
LE GREFFIER, PAR DÉLÉGATION, LE CONSEILLER,
Notification de la présente ordonnance a été faite ce jour à Monsieur [R] [T], à son avocat et au préfet,
Le Greffier,
Cette ordonnance est susceptible d'un pourvoi en cassation dans les deux mois suivant la présente notification et dans les conditions fixées par les articles 973 et suivants du code de procédure civile.
Communication de la présente ordonnance a été faite ce même jour au procureur général.
Le Greffier,
N° 287/2025 - N° RG 25/00472 - N° Portalis DBVL-V-B7J-WAZ3
JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT
O R D O N N A N C E
articles L 741-10 et suivants du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile
Nous, Sébastien PLANTADE, conseiller à la cour d'appel de RENNES, délégué par ordonnance du premier président pour statuer sur les recours fondés sur les articles L.741-10 et suivants du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, assisté de Patricia IBARA, greffière,
Statuant sur l'appel formé par courriel de la Cimade reçu le 02 Juillet 2025 à 15 heures 03 pour :
M. [R] [T]
né le 01 Février 1977 à [Localité 1] (SYRIE)
de nationalité Syrienne
ayant pour avocat Me Florian DOUARD, avocat au barreau de RENNES
d'une ordonnance rendue le 01 Juillet 2025 à 15 heures 02 par le magistrat en charge des rétentions administratives du Tribunal judiciaire de RENNES qui a rejeté les exceptions d'irrégularité soulevées, le recours formé à l'encontre de l'arrêté de placement en rétention administrative, et ordonné la prolongation du maintien de M. [R] [T] dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire pour une durée maximale de vingt-six jours à compter du 30 juin 2025 à 24 heures ;
En l'absence de représentant de la PREFECTURE D'ILLE ET VILAINE, dûment convoquée, qui a fait parvenir un mémoire par courriel reçu le 03 juillet 2025 régulièrement communiqué aux parties,
En l'absence du procureur général régulièrement avisé, Monsieur Yves DELPERIE, avocat général, ayant fait connaître son avis par écrit déposé le 02 juillet 2025 lequel a été mis à disposition des parties.
En présence de Monsieur [R] [T], assisté de Me Florian DOUARD, avocat,
Après avoir entendu en audience publique le 03 Juillet 2025 à 10 H 00 l'appelant assisté de M. [H] [G], interprète en langue arabe ayant préalablement prêté serment, et son avocat en leurs observations,
Avons mis l'affaire en délibéré et ce jour, avons statué comme suit :
Le 27 juin 2025, Monsieur [R] [T] a fait l'objet d'un arrêté du Préfet d'Ille-et-Vilaine portant remise aux autorités allemandes, en application des conventions internationales ou du droit de l'union européenne, conformément aux dispositions de l'article L621-2 du CESEDA, notifié le 27 juin 2025.
Le 27 juin 2025, Monsieur [R] [T] s'est vu notifier par le Préfet d'Ille-et-Vilaine une décision de placement en rétention administrative, au centre de rétention administrative (CRA) de [Localité 4] pour une durée de quatre jours.
Le 30 juin 2025, les autorités allemandes ont donné leur accord pour la remise de l'étranger.
Par requête en date du 30 juin 2025, Monsieur [R] [T] a contesté la légalité de l'arrêté de placement en rétention administrative.
Par requête motivée en date du 30 juin 2025, reçue le 30 juin 2025 à 16h 18 au greffe du tribunal de Rennes, le représentant du préfet d'Ille-et-Vilaine a saisi le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Rennes d'une demande de prolongation pour une durée de 26 jours de la rétention administrative de Monsieur [R] [T].
Par ordonnance rendue le 01er juillet 2025, le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Rennes a rejeté le recours en annulation de l'arrêté de placement en rétention administrative et ordonné la prolongation du maintien de Monsieur [R] [T] en rétention dans les locaux non pénitentiaires pour un délai maximum de 26 jours, à compter du 30 juin 2025.
Par déclaration reçue au greffe de la Cour le 02 juillet 2025 à 15h 03, Monsieur [R] [T] a formé appel de cette ordonnance.
L'appelant fait valoir, au soutien de sa demande d'infirmation de la décision entreprise, que le Préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation dans sa prise de décision en n'ayant pas pris en compte la situation de l'intéressé, qui a remis son passeport à la préfecture, dispose d'une domiciliation connue de l'administration, ne représente aucune menace pour l'ordre public, disposait d'un droit au séjour en Allemagne, avec des démarches de renouvellement en cours, et subit sa première mesure d'éloignement, écartant tout risque de fuite, et que par ailleurs, la procédure est entachée d'irrégularité liée à la consultation du fichier AGDREF sans preuve rapportée de l'habilitation de l'agent à la consultation dudit fichier, ayant ainsi porté atteinte aux droits de l'intéressé puisque cette consultation a conditionné le placement en retenue puis en rétention administrative.
Le procureur général, suivant avis écrit du 02 juillet 2025 sollicite la confirmation de la décision entreprise.
Comparant à l'audience, Monsieur [R] [T] ne présente pas d'observations, confirmant avoir remis son passeport.
Demandant l'infirmation de la décision entreprise, son conseil soutient les moyens formés par écrit, soulignant que le contrat passé avec le fournisseur d'énergie stipule bien les noms des deux personnes ayant établi l'attestation d'hébergement, que l'intéressé n'a pas exprimé clairement un refus d'être éloigné vers l'Allemagne, alors qu'il a remis son passeport, ne représente pas une menace à l'ordre public, et aurait pu être assigné à résidence. Il est également insisté sur l'irrégularité reconnue par le premier juge de la consultation ab initio du fichier AGDREF par un agent non habilité, qui a nécessairement causé grief, ayant conduit à la chaîne subséquente des privations de liberté. Il est enfin formalisé une demande au titre des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sur l'aide juridictionnelle.
Aux termes d'un mémoire d'appel transmis le 03 juillet 2025 à 02h 18, le représentant du Préfet d'Ille-et-Vilaine, non comparant à l'audience, demande la confirmation de la décision querellée, faisant remarquer que les garanties de représentation présentées par l'intéressé en France sont sujettes à caution, plusieurs attestations d'hébergement différentes et incohérentes ayant été produites, que l'intéressé a expressément déclaré s'opposer à son retour en Allemagne, et que par ailleurs, la situation irrégulière de l'intéressé découlait déjà de la présentation d'un passeport étranger et d'un titre de séjour expiré, la mesure de rétention ayant pu être engagée indépendamment de la consultation du fichier AGDREF, tandis que les diligences auprès des autorités allemandes ont été immédiates.
SUR QUOI :
L'appel est recevable pour avoir été formé dans les formes et délais prescrits.
Sur le recours en annulation de l'arrêté de placement en rétention administrative
Sur les moyens tirés du défaut d'examen complet de la situation et de l'erreur manifeste d'appréciation :
Selon les dispositions de l'article L621-1 du CESEDA, par dérogation au refus d'entrée à la frontière prévu à l'article L. 332-1, à la décision portant obligation de quitter le territoire français prévue à l'article L. 611-1 et à la mise en 'uvre des décisions prises par un autre État prévue à l'article L. 615-1, l'étranger peut être remis, en application des conventions internationales ou du droit de l'Union européenne, aux autorités compétentes d'un autre État, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas prévus aux articles L. 621-2 à L. 621-7.
L'étranger est informé de cette remise par décision écrite et motivée prise par une autorité administrative définie par décret en Conseil d'État. Il est mis en mesure de présenter des observations et d'avertir ou de faire avertir son consulat, un conseil ou toute personne de son choix.
Suivant les dispositions de l'article L621-2, peut faire l'objet d'une décision de remise aux autorités compétentes d'un Etat membre de l'Union européenne, de la République d'Islande, de la Principauté du Liechtenstein, du Royaume de Norvège ou de la Confédération suisse l'étranger qui, admis à entrer ou à séjourner sur le territoire de cet Etat, a pénétré ou séjourné en France sans se conformer aux dispositions des articles L. 311-1, L. 311-2 et L. 411-1, en application des dispositions des conventions internationales conclues à cet effet avec cet État, en vigueur au 13 janvier 2009.
Il ressort des dispositions de l'article L741-1 du CESEDA que 'L'autorité administrative peut placer en rétention, pour une durée de quatre jours, l'étranger qui se trouve dans l'un des cas prévus à l'article L. 731-1 lorsqu'il ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir un risque de soustraction à l'exécution de la décision d'éloignement et qu'aucune autre mesure n'apparaît suffisante à garantir efficacement l'exécution effective de cette décision.
Le risque mentionné au premier alinéa est apprécié selon les mêmes critères que ceux prévus à l'article L. 612-3 ou au regard de la menace pour l'ordre public que l'étranger représente'.
En outre, selon les dispositions de l'article L 612-3, 'Le risque mentionné au 3° de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants :
1° L'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ;
2° L'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France, sans avoir sollicité la délivrance d'un titre de séjour ;
3° L'étranger s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après l'expiration de son titre de séjour, du document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour, sans en avoir demandé le renouvellement ;
4° L'étranger a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français ;
5° L'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ;
6° L'étranger, entré irrégulièrement sur le territoire de l'un des États avec lesquels s'applique l'acquis de Schengen, fait l'objet d'une décision d'éloignement exécutoire prise par l'un des États ou s'est maintenu sur le territoire d'un de ces États sans justifier d'un droit de séjour ;
7° L'étranger a contrefait, falsifié ou établi sous un autre nom que le sien un titre de séjour ou un document d'identité ou de voyage ou a fait usage d'un tel titre ou document;
8° L'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité, qu'il a refusé de communiquer les renseignements permettant d'établir son identité ou sa situation au regard du droit de circulation et de séjour ou a communiqué des renseignements inexacts, qu'il a refusé de se soumettre aux opérations de relevé d'empreintes digitales ou de prise de photographie prévues au 3° de l'article L. 142-1, qu'il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues aux articles L. 721-6 à L. 721-8, L. 731-1, L. 731-3, L. 733-1 à L. 733-4, L. 733-6, L. 743-13 à L. 743-15 et L. 751-5.'
Par ailleurs, selon les dispositions de l'article L 741-4, 'La décision de placement en rétention prend en compte l'état de vulnérabilité et tout handicap de l'étranger.
Le handicap moteur, cognitif ou psychique et les besoins d'accompagnement de l'étranger sont pris en compte pour déterminer les conditions de son placement en rétention'.
Les dispositions de l'article L 731-1 prévoient en outre que 'L'autorité administrative peut assigner à résidence l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, dans les cas suivants :
['] 4° L'étranger doit être remis aux autorités d'un autre Etat en application de l'article L. 621-1 ;
Par ailleurs, aux termes de l'article 15-1 de la directive dite retour n° 2008/115/CE du Parlement Européen et du Conseil en date du 16 décembre 2008 "À moins que d'autres mesures suffisantes, mais moins coercitives puissent être appliquées efficacement dans un cas particulier, les Etats membres peuvent uniquement placer en rétention le ressortissant d'un pays tiers qui fait l'objet de procédures de retour afin de préparer le retour et/ou de procéder à l'éloignement en particulier lorsque a) il existe un risque de fuite ou b) le ressortissant concerné d'un pays tiers évite ou empêche la préparation du retour ou de la procédure d'éloignement.
Dans son arrêté de placement en rétention administrative en date du 27 juin 2025, le Préfet d'Ille-et-Vilaine expose que faisant l'objet d'un arrêté portant remise aux autorités allemandes, édicté le 27 juin 2025 et notifié le même jour, Monsieur [R] [T] déclare être marié et père de quatre enfants, que sa famille réside au Liban, qu'il ne démontre pas avoir noué en France des liens dont l'intensité serait exclusive de tout autre qu'il conserverait encore dans son pays d'origine, que dans ces conditions, la mesure qui lui est opposée ne porte pas une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale au sens des dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, que si l'intéressé fait état de problèmes de santé liés à des coups de soleil, il peut bénéficier d'un accès à un médecin au centre de rétention et n'a pas fait de démarches visant à obtenir un titre de séjour pour motif médical, qu'il n'invoque aucun élément de nature à ce qu'il puisse être considéré qu'une vulnérabilité ou un handicap quelconque ferait obstacle au placement en rétention. Le Préfet en déduit que l'intéressé ne présente pas des garanties de représentation suffisantes propres à prévenir le risque de fuite en ce que même s'il a remis son passeport et justifié d'une adresse chez un ami à [Localité 3] (35), il a déclaré clairement ne pas vouloir repartir en Allemagne, empêchant d'envisager toute mesure d'assignation à résidence.
Il ressort de l'examen de la procédure et des pièces produites à l'audience que la situation de Monsieur [R] [T] a été examinée de manière suffisamment approfondie par le Préfet d'Ille-et-Vilaine, qui a élaboré une décision circonstanciée, motivée en droit et en fait, et n'a pas commis d'erreur d'appréciation, ayant légitimement considéré que l'intéressé ne présentait pas des garanties de représentation suffisantes pour prévenir le risque de fuite, conformément aux dispositions 4) de l'article L 612-3 précité selon la motivation de la décision querellée de placement en rétention administrative, dans la mesure où nonobstant les garanties de représentation présentées, l'intéressé a déclaré expressément dans son audition du 27 juin 2025 ne pas vouloir retourner en Allemagne et préférer rester en France, pays dans lequel il ne peut justifier d'un droit au séjour, ces éléments traduisant suffisamment un risque de fuite apprécié par le Préfet pour ne pas envisager une mesure d'assignation à résidence.
À cet égard le Préfet a donc ainsi justifié sa décision sans commettre d'erreur d'appréciation quant à l'opportunité de la mesure puisque le risque de fuite est caractérisé, alors que le Préfet a examiné par ailleurs de manière précise la situation de l'intéressé au titre de son état de santé et de son éventuelle vulnérabilité, ayant apprécié au vu des déclarations de Monsieur [T], qui n'a pas fait valoir d'élément permettant de le considérer comme une personne vulnérable, et en l'absence de toute pièce produite à ce titre, que l'état de l'intéressé en fonction des éléments dont il disposait ne s'opposait pas à un placement en rétention administrative.
Le recours en annulation contre l'arrêté de placement sera ainsi rejeté.
Sur la régularité de la procédure
Sur le moyen tiré de la consultation irrégulière du fichier AGDREF
Selon les dispositions de l'article L142-1 du CESEDA, afin de mieux garantir le droit au séjour des personnes en situation régulière et de lutter contre l'entrée et le séjour irréguliers des étrangers en France, peuvent être relevées, mémorisées et faire l'objet d'un traitement automatisé de données à caractère personnel dans les conditions prévues par le règlement (UE) 2016/679 du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l'égard des traitements des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données et par la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, les empreintes digitales ainsi qu'une photographie des ressortissants étrangers :
1° Qui sollicitent la délivrance, auprès d'un consulat ou à la frontière extérieure des Etats parties à la convention signée à Schengen le 19 juin 1990, d'un visa afin de séjourner en France ou sur le territoire d'un autre Etat partie à ladite convention ; ces empreintes et cette photographie sont obligatoirement relevées en cas de délivrance d'un visa ;
2° Qui, non ressortissants d'un Etat membre de l'Union européenne, de la République d'Islande, de la Principauté du Liechtenstein, du Royaume de Norvège ou de la Confédération suisse, sollicitent la délivrance d'un titre de séjour en application de l'article L. 411-1 ;
3° Qui sont en situation irrégulière en France, qui font l'objet d'une décision d'éloignement du territoire français ou qui, ayant été contrôlés à l'occasion du franchissement de la frontière en provenance d'un pays tiers aux Etats parties à la convention signée à Schengen le 19 juin 1990, ne remplissent pas les conditions d'entrée prévues à l'article 6 du règlement (UE) 2016/399 du Parlement européen et du Conseil du 9 mars 2016 concernant un code de l'Union relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes (code frontières Schengen) ou à l'article L. 311-1 ;
4° Qui bénéficient de l'aide au retour prévue par l'article L. 711-2. R611-5 CESEDA ;
Selon les dispositions de l'article R142-11, le ministre chargé de l'immigration est autorisé à mettre en 'uvre sur le fondement du 2° de l'article L. 142-1, un traitement automatisé de données à caractère personnel dénommé " Application de gestion des dossiers des ressortissants étrangers en France " (AGDREF2), ayant pour finalités de garantir le droit au séjour des ressortissants étrangers en situation régulière et de lutter contre l'entrée et le séjour irréguliers en France des ressortissants étrangers.
Aux termes des dispositions de l'article R142-15, outre les agents chargés de la mise en 'uvre du traitement et ceux de l'Agence nationale des titres sécurisés chargés de la fabrication des titres, ont accès, à raison de leurs attributions et dans la limite du besoin d'en connaître, à la totalité ou à une partie des données à caractère personnel et informations enregistrées dans le traitement automatisé mentionné à l'article R. 142-11 et dans le composant électronique prévu aux articles R. 414-5 et R. 431-1 :
1° Les agents chargés de la réglementation des étrangers, ainsi que de celle relative à l'accès à la nationalité française et aux demandes de visa, et de leur mise en 'uvre, et relevant des services centraux des ministères de l'intérieur (la direction générale des étrangers en France, direction générale de la police nationale, direction générale de la gendarmerie nationale, direction des libertés publiques et des affaires juridiques, délégation générale à l'outre-mer), des affaires étrangères (direction des Français à l'étranger et de l'administration consulaire), du budget (direction générale des douanes et droits indirects), individuellement désignés et spécialement habilités par le directeur ou le chef de service dont ils relèvent ;
2° Les agents chargés de l'application de la réglementation des étrangers, y compris dans le cadre de la procédure d'évaluation prévue par l'article R. 221-11 du code de l'action sociale et des familles, ainsi que de celle relative à l'accès à la nationalité française, dans les préfectures et les sous-préfectures, individuellement désignés et spécialement habilités par le préfet et, à [Localité 2], par le préfet de police ;
3° Les agents des missions diplomatiques et des postes consulaires chargés des visas, individuellement désignés et spécialement habilités par le chef de la mission ou par le chef de poste dont ils relèvent ;
4° Les agents des services de la police nationale, de la gendarmerie nationale et des douanes chargés du contrôle aux frontières, individuellement désignés et spécialement habilités respectivement par le directeur national de la police aux frontières, par le directeur général de la gendarmerie nationale ou par le directeur régional des douanes ou, le cas échéant, le directeur général des douanes et droits indirects ;
5° Au titre de la gestion des lieux de rétention administrative, de l'exécution des décisions d'éloignement ou de leur mission de vérification du droit de circulation ou de séjour sur le territoire français prévue par les articles L. 812-1 et L. 813-1, les agents des services déconcentrés de la police nationale et ceux des unités de la gendarmerie nationale, individuellement désignés et spécialement habilités, selon le cas :
a) par le chef du service territorial de la police nationale et, dans les départements de [Localité 2], des Hauts-de-Seine, de la Seine-[Localité 5] et du Val-de-Marne, par les directeurs de la préfecture de police chargés de l'ordre public et de la circulation, de la sécurité de proximité de l'agglomération parisienne et du renseignement ;
b) par le directeur général de la gendarmerie nationale, le commandant du groupement de gendarmerie interdépartemental de [Localité 2], les commandants de groupement de gendarmerie départementale, les commandants de région de gendarmerie ou les commandants des gendarmeries spécialisées.
De plus, l'article 15-5 du code de procédure pénale dispose que « seuls les personnels spécialement et individuellement habilités à cet effet peuvent procéder à la consultation de traitement au cours d'une enquête ou d'une instruction. La réalité de cette habilitation spéciale et individuelle peut être contrôlée à tout moment par un magistrat, à son initiative ou à la demande d'une personne intéressée. L'absence de la mention de cette habilitation sur les différentes pièces de procédure résultant de la consultation de ces traitements n'emporte pas, par elle-même, nullité de la procédure ».
Il est admis que la seule mention de cette habilitation en procédure suffit à en établir la preuve (C.Cass Crim 03 avril 2024 n°23-85.513).
Toutefois, la Cour de Cassation a estimé (Crim 26 novembre 2024 n°24-81.450) qu'il appartenait à la Chambre de l'instruction, le cas échéant en ordonnant un supplément d'information, de vérifier la réalité de l'habilitation spéciale et individuelle de l'agent ayant procédé aux consultations.
Enfin, selon une jurisprudence récente (Civ.1ère 23-23.860 du 04 juin 2025), il est indiqué que si c'est à tort que le premier président n'a pas recherché, comme il le lui était demandé, si l'agent du service de police ayant consulté le fichier des personnes recherchées était expressément habilité à cet effet, l'ordonnance n'encourt pas pour autant la censure, dès lors que le premier président a constaté que, indépendamment de cette consultation, d'autres éléments figurant à la procédure, notamment des échanges avec la préfecture avaient permis de déterminer que l'étranger se trouvait en situation irrégulière sur le territoire national et faisait l'objet d'une mesure d'éloignement et de fonder les procédures de garde à vue et de rétention.
En l'espèce, il ressort de l'examen de la procédure que dans le cadre d'un contrôle routier opéré le 26 juin 2025 à 18h 20, les services de police en patrouille motorisée ont procédé au contrôle des occupants d'un véhicule de marque Skoda. L'officier de police judiciaire le major [V] [I] a demandé au conducteur du véhicule de présenter son permis de conduire et le certificat d'immatriculation du véhicule, et ce dernier a présenté un titre de séjour allemand périmé au nom de [R] [T], né en Syrie, ainsi qu'un passeport syrien. Une consultation du fichier AGDREF a permis de constater que l'intéressé n'avait pas de titre de séjour en France et que son titre de séjour allemand avait expiré. Dès lors, un placement en retenue sur le fondement des dispositions des articles L812-1 et suivants a été ordonné.
Selon un procès-verbal ultérieur du 26 juin 2025, établi à 19h05, l'officier de police judiciaire brigadier-chef [W] [J], agent expressément habilité à la consultation des fichiers FAED, FAED, VISABIO, EURODAC et SBNA, a informé le Procureur de la République qu'il serait procédé à la consultation desdits fichiers via la comparaison des empreintes digitales de l'intéressé. Selon le procès-verbal suivant, la consultation des fichiers mentionnés a été opérée par un autre agent expressément habilité, le brigadier-chef de police [S] [Y] et a révélé une fiche positive à EURODAC.
Il s'ensuit, au regard de l'ensemble de ces éléments que si la preuve de l'habilitation de l'officier de police judiciaire [V] [I] pour la consultation du fichier AGDREF n'est pas rapportée, pour autant il ne s'ensuit aucune irrégularité faisant grief à l'intéressé dès lors qu'il est établi par ailleurs qu'un agent habilité [S] [Y] a procédé à la consultation du fichier EURODAC, qui a permis d'apprécier la situation administrative de l'intéressé sur le territoire français. En tout état de cause, indépendamment de la consultation querellée du fichier AGDREF, il ressort de la présentation par Monsieur [T], au moment du contrôle routier, de son passeport syrien et de son titre de séjour allemand à la date de validité expirée, que la situation irrégulière de l'intéressé sur le territoire national était avérée, justifiant les décisions subséquentes de placement en retenue et de placement en rétention administrative.
Par suite, le moyen sera rejeté comme étant inopérant.
Sur le fond :
Il ressort de l'examen de la procédure que nonobstant la remise d'un passeport et la production d'une attestation d'hébergement, Monsieur [R] [T] ne présente pas des garanties de représentation suffisantes propres à prévenir le risque de fuite, ayant fait part de son refus express d'être éloigné vers l'Allemagne, pays qui lui a offert une protection subsidiaire et ayant accepté sa remise. Dans ces conditions, la prolongation de la rétention administrative est seule de nature à pouvoir assurer l'exécution de la mesure d'éloignement, d'autant plus qu'aucun certificat médical n'est produit contre-indiquant le maintien en rétention de l'intéressé.
Enfin, en conformité avec les dispositions de l'article L. 741-3 du CESEDA, cette prolongation est strictement motivée par l'attente de l'organisation du départ de l'intéressé. Monsieur [T] étant en possession d'un document de voyage valide, après la demande de réadmission opérée le 27 juin 2025, une demande de réservation de vol a été adressée par le Préfet le 30 juin 2025 auprès de la division nationale de l'éloignement de la direction nationale de la police aux frontières.
En conséquence, c'est à bon droit que la requête entreprise a été accueillie par le premier juge et il y a lieu d'ordonner la prolongation de la rétention administrative de Monsieur [R] [T] à compter du 30 juin 2025, pour une période d'un délai maximum de 26 jours dans des locaux non pénitentiaires.
La décision dont appel est donc confirmée.
La demande sur le fondement des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 sur l'aide juridictionnelle sera rejetée.
PAR CES MOTIFS :
Statuant publiquement,
Déclarons l'appel recevable,
Confirmons l'ordonnance du magistrat du siège du tribunal judiciaire de Rennes en date du 01er juillet 2025,
Rejetons la demande formée au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sur l'aide juridictionnelle,
Laissons les dépens à la charge du trésor public.
Fait à [Localité 4], le 03 Juillet 2025 à 14 heures.
LE GREFFIER, PAR DÉLÉGATION, LE CONSEILLER,
Notification de la présente ordonnance a été faite ce jour à Monsieur [R] [T], à son avocat et au préfet,
Le Greffier,
Cette ordonnance est susceptible d'un pourvoi en cassation dans les deux mois suivant la présente notification et dans les conditions fixées par les articles 973 et suivants du code de procédure civile.
Communication de la présente ordonnance a été faite ce même jour au procureur général.
Le Greffier,