CA Lyon, 3e ch. a, 24 juillet 2025, n° 21/07567
LYON
Arrêt
Autre
N° RG 21/07567 - N° Portalis DBVX-V-B7F-N4MB
Décision du Tribunal de Commerce de Lyon
Au fond du 22 septembre 2021
S.A.S. E.T.IA. EVALUATION TECHNOLOGIQUE INGENIERIE ET APP LICATIONS
C/
S.A. DEMETER INVESTMENT MANAGERS
ET
N° RG 21/08033 - N° Portalis DBVX-V-B7F-N5SO
Décision du Tribunal de Commerce de LYON
Au fonddu 22 septembre 2021
S.A.S. E.T.I.A. - EVALUATION TECHNOLOGIQUE,INGENIERIE ET APPLICATIONS
C/
S.A. DEMETER INVESTMENT MANAGERS
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE LYON
3ème chambre A
ARRET DU 24 Juillet 2025
APPELANTE :
La société E.T.I.A. ' EVALUATION TECHNOLOGIQUE, INGENIERIE ET APPLICATIONS,
Société par actions simplifiée, immatriculée au RCS de [Localité 6] sous le numéro 351 345 004.Prise en la personne de son président.
Sis [Adresse 5]
[Localité 1]
Représentée par Me Eric DUMOULIN de la SCP DUMOULIN - ADAM, avocat au barreau de LYON, toque : 1411, avocat postulant et de Me Maîtres Nicolas FAGUER, avocat au barreau de PARIS, toque P62, avocat plaidant.
INTIMEE :
DEMETER INVESTMENT MANAGERS,
société anonyme à directoire et conseil de surveillance, au capital de 280.623 euros, immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de Paris sous le numéro 483 279 923, en qualité de société de gestion de Demeter 3 Amorçage, fonds professionnels de capital d'investissement, prise en la personne de ses représentants légaux.Venant aux droits de DEMETER VENTURES, anciennement société anonyme immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de Grenoble sous le numéro 423 843 267, dont le siège social était situé [Adresse 2], à la suite de sa fusion-absorption au profit de DEMETER INVESTMENT MANAGERS,
dont le siège social se situe [Adresse 3],
([Localité 4]
Représentée par Me Santiago MUZIO DE PLACE, avocat au barreau de LYON, toque : 311, avocat postulant et Me Maxime de La Morinerie, avocat au barreau de PARIS, toque P0299, avocat plaidant.
******
Date de clôture de l'instruction : 22 Novembre 2022
Date de mise à disposition : 03 Juillet 2025 puis prorogé au 24 Juillet 2025, les parties en ayant été informées.
Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :
- Sophie DUMURGIER, présidente
- Aurore JULLIEN, conseillère
- Viviane LE GALL, conseillère
assistées pendant les débats de Céline DESPLANCHES, greffière
A l'audience, un membre de la cour a fait le rapport,
Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Sophie DUMURGIER, présidente, et par Céline DESPLANCHES, greffiere, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
* * * *
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
La SA Demeter Ventures, devenue la SA Demeter Investment Managers à la suite d'une fusion-absorption, est un fonds d'investissement ayant pour activité des actions de capital investissement dans des sociétés intervenant dans le secteur énergétique et écologique.
La société Cogebio avait pour activité le développement des technologies de gazéification de biomasse et cogénération d'énergie thermique, jusqu'à sa liquidation judiciaire prononcée le 27 décembre 2018 et clôturée pour insuffisance d'actif le 8 décembre 2021.
La SAS E.T.I.A Evaluation Technologique Ingenierie et Applications, ci après E.T.I.A, est une société spécialisée dans les équipements et les procédés de traitement thermique.
La société Suez Ventures, fonds d'investissement du groupe Suez chargé d'investir dans les activités de gestion de l'eau, du recyclage et de la valorisation des déchets, était actionnaire de la société E.T.I.A jusqu'en 2019.
La société Demeter Ventures et la société Suez Ventures ont souscrit à une première augmentation de capital au sein de la société Cogebio, à hauteur de 500 000 euros chacune en 2013, puis à une seconde en 2016, à l'issue desquelles elles détenaient chacune 19,50 % du capital social de cette société.
Au cours des années 2016 à 2018, les deux fonds d'investissement ont procédé à des apports en compte courant d'un montant total de près de 860 000 euros.
Afin de renforcer les fonds propres de la société Cogebio qui subissait des pertes importantes, les sociétés Demeter Ventures et Suez Ventures se sont rapprochées de la société E.T.I.A Evaluation Technologique Ingenierie et Applications en vue de la cession de leur participation dans la société Cogebio, au début de l'année 2017.
Après signature de deux lettres d'intention les 1er février 2017 et 21 avril 2017, un pacte d'actionnaires a été conclu le 20 juin 2017 entre les sociétés Demeter Ventures, Suez Ventures et E.T.I.A, prévoyant une réduction de capital motivée par les pertes, suivie d'une augmentation de capital d'un montant de 1 299 161,25 euros souscrite principalement par la société E.T.I.A ( 360 000 euros) et les investisseurs historiques ( 400 022 euros chacune), et conférant la majorité à la société E.T.I.A.
Ce pacte contenait en son article III.7 une clause de liquidité incluant une promesse d'achat par la société E.T.I.A de 100 % des titres des sociétés Demeter Ventures et Suez Ventures, pouvant être exercée à tout moment.
Une assemblée générale des actionnaires de la société Cogebio s'est tenue le 20 juin 2017, qui a voté l'augmentation de capital qui a été intégralement souscrite.
Par courrier du 1er août 2018, la société Demeter a notifié à la société E.T.I.A Evaluation Technologique Ingenierie et Applications et à la société Cogebio l'exercice de la promesse d'achat pour l'intégralité des titres détenus dans la société Cogebio, dans les conditions définies par le pacte conclu le 20 juin 2017 mais sans indiquer de prix d'exercice.
Par courriers des 6 et 12 septembre 2018, les sociétés E.T.I.A et Cogebio ont contesté l'exercice par la société Demeter de la promesse d'achat, arguant de l'indétermination du prix de la promesse d'achat et de l'absence d'indication du prix d'exercice dans le courrier de la société Demeter.
La société Cogebio a été placée en redressement judiciaire le 30 octobre 2018, converti en liquidation judiciaire le 27 décembre 2018.
Par courrier du 30 novembre 2018, la société Demeter a réitéré sa demande auprès de la société E.T.I.A en détaillant le calcul du prix d'exercice de la promesse d'achat, fixé à 465 473,60 euros, et, par courrier du 18 janvier 2019, elle l'a mise en demeure de respecter ses engagements contractuels.
Face au refus de règlement de la société E.T.I.A Evaluation Technologique Ingenierie et Applications, la société Demeter Ventures l'a fait assigner devant le tribunal de commerce de Lyon afin d'obtenir sa condamnation à lui payer la somme de 465 473,60 euros correspondant au prix d'exercice de la promesse d'achat, avec intérêts légaux, ainsi qu'une indemnité de procédure.
Par jugement contradictoire du 22 septembre 2021, le tribunal de commerce de Lyon a :
- jugé déterminable le prix de la promesse d'achat,
- jugé que le refus de la société E.T.I.A Evaluation Technologique Ingenierie et Applications de payer le prix d'exercice de la promesse d'achat a engagé sa responsabilité contractuelle,
- débouté la société E.T.I.A Evaluation Technologique Ingenierie et Applications de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
- condamné la société E.T.I.A Evaluation Technologique Ingenierie et Applications à verser à la société Demeter Ventures la somme de 465 476,60 euros correspondant au prix d'exercice de la promesse d'achat, avec intérêts légaux à compter du 1er janvier 2020,
- condamné la société E.T.I.A Evaluation Technologique Ingenierie et Applications à verser à la société Demeter Ventures la somme de 10 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- ordonné l'exécution provisoire de la présente décision,
- condamné la société E.T.I.A Evaluation Technologique Ingenierie et Applications aux entiers dépens de l'instance.
'
Par déclaration reçue au greffe le 13 octobre 2021, la société E.T.I.A Evaluation Technologique Ingenierie et Applications a interjeté appel de ce jugement portant sur l'ensemble des chefs de la décision expressément critiqués, en intimant la société Demeter Ventures.
Par déclaration reçue au greffe le 5 novembre 2021, la société E.T.I.A Evaluation Technologique Ingenierie et Applications a inscrit un deuxième appel contre ce jugement, portant sur l'ensemble des chefs de la décision expressément critiqués, en intimant la SA Demeter Investment Managers, venant aux droits de la société Demeter Ventures, à la suite d'une opération de fusion-absorption, à l'issue de laquelle la société Demeter Ventures a été radiée du registre du commerce et des sociétés, le 28 septembre 2021.
Saisi d'incidents dans chacune des procédures d'appel par la société Demeter Investment Managers, le conseiller de la mise en état, par ordonnances rendues le 7 juin 2022 dans des termes identiques, a :
- dit que ne relève pas du pouvoir juridictionnel du conseiller de la mise en état :
' la fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité des demandes nouvelles en appel,
' la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à agir de la société E.T.I.A,
- débouté en conséquence la société Demeter Investment Managers, venant aux droits de la société Demeter Ventures, de son incident,
- débouté les parties de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la société Demeter Investment Managers, venant aux droits de la société Demeter
Ventures, aux dépens de l'incident.
Au terme de ses conclusions d'appelante n°3 notifiées par voie dématérialisée le 22 novembre 2022, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens au soutien de ses prétentions, la SAS E.T.I.A ' Evaluation Technologique Ingénierie et Applications demande à la cour, au visa des articles 1591 et 1169 du code civil, de :
- dire et juger son appel recevable et bien fondé,
- infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Lyon le 22 septembre 2021 en ce qu'il a :
' jugé déterminable le prix de la promesse d'achat,
' jugé que le refus de la société E.T.I.A Evaluation Technologique Ingenierie et Applications de payer le prix d'exercice de la promesse d'achat a engagé sa responsabilité contractuelle,
' débouté la société E.T.I.A Evaluation Technologique Ingenierie et Applications de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
' condamné la société E.T.I.A Evaluation Technologique Ingenierie et Applications à verser à la société Demeter Ventures la somme de 465 476,60 euros correspondant au prix d'exercice de la promesse d'achat, avec intérêts légaux à compter du 1er janvier 2020,
' condamné la société E.T.I.A Evaluation Technologique Ingenierie et Applications à verser à la société Demeter Ventures la somme de 10 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
' ordonné l'exécution provisoire de la présente décision,
' condamné la société E.T.I.A Evaluation Technologique Ingenierie et Applications aux entiers dépens de l'instance,
Statuant à nouveau,
A titre principal,
- dire et juger que le prix d'exercice de la promesse d'achat figurant à l'article III.7.1 du pacte des associés de la société Cogebio n'est ni déterminé ni déterminable,
En conséquence,
- prononcer la nullité de la promesse d'achat figurant à l'article III.7.1 du pacte des associés de la société Cogebio,
- débouter la société Demeter Ventures de l'intégralité de ses demandes,
A titre subsidiaire,
- dire et juger que la perte de toute valeur des titres de la société Cogebio au moment de l'exercice de la promesse d'achat figurant à l'article III.7.1 du pacte des associés de la société Cogebio rend la contrepartie au paiement du prix dérisoire,
En conséquence,
- prononcer la nullité du contrat de vente des titres de la société Cogebio,
- débouter la société Demeter Ventures de l'intégralité de ses demandes,
En tout état de cause :
- condamner la société Demeter Ventures à lui payer la somme de 20 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la société Demeter Ventures aux dépens de l'instance, dont distraction au profit de la SCP Dumoulin ' Adam.
Au terme de conclusions d'appelante n°3 notifiées par voie dématérialisée le 22 novembre 2022 dans la procédure 21/8033, la société E.T.I.A a formé les mêmes demandes contre la société Demeter Investment Managers.
Au terme de conclusions d'intimée n°3 notifiées par voie dématérialisée le 8 novembre 2022, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens au soutien de ses prétentions, la SA Demeter Investment Managers (ci-après la société Demeter), venant aux droits de la société Demeter Ventures, demande à la cour, au visa des articles 1217 et suivants, 1591, 1169, 1179, 1181 et 1589 du code civil et 4, 32, 71, 122, 561, 564, 768 du code de procédure civile, de :
A titre liminaire :
- juger irrecevable la demande de la société E.T.I.A au titre de la nullité de la promesse d'achat, en ce qu'elle constitue une demande nouvelle non formulée en première instance,
- juger irrecevable la demande de la société E.T.I.A au titre de la nullité d'un supposé "contrat de vente", en ce qu'elle constitue une demande nouvelle non formulée en première instance,
- juger irrecevable, pour défaut de droit d'agir, la société E.T.I.A à se prévaloir de la supposée nullité relative de la promesse d'achat,
Par conséquent :
- confirmer le jugement du tribunal de commerce de Lyon du 22 septembre 2021 (RG n°2019J1425) en ce qu'il a jugé (i) déterminable le prix de la promesse d'achat, (ii) que la société E.T.I.A a engagé sa responsabilité contractuelle en refusant de payer le prix d'exercice de la promesse d'achat (iii) et l'a condamnée à verser au FPCI Demeter 3 Amorçage, représenté par sa société de gestion Demeter Investment Managers (venant aux droits de Demeter Ventures), des dommages-intérêts de 465.476,60 euros, avec intérêts légaux à compter du 1er janvier 2020,
A titre principal :
- confirmer le jugement du tribunal de commerce de Lyon du 22 septembre 2021 (RG n°2019J1425) en ce qu'il a jugé (i) déterminable le prix de la promesse d'achat, (ii) que la société E.T.I.A a engagé sa responsabilité contractuelle en refusant de payer le prix d'exercice de la promesse d'achat (iii) et l'a condamnée à verser au FPCI Demeter 3 Amorçage, représenté par sa société de gestion Demeter Investment Managers (venant aux droits de Demeter Ventures), des dommages-intérêts de 465 476,60 euros, avec intérêt légaux à compter du 1er janvier 2020,
A titre subsidiaire :
A supposer l'existence d'une nullité de la promesse d'achat ou du supposé "contrat de vente",
- condamner la société E.T.I.A au paiement de dommages et intérêts de 465 476,60 euros, avec intérêt légaux à compter du 1er janvier 2020, pour violation de l'article IV.8.4 du pacte prévoyant une obligation renforcée de bonne foi en cas d'invalidité d'une stipulation contractuelle du pacte,
En tout état de cause :
- condamner la société E.T.I.A à lui régler la somme de 50 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la société E.T.I.A aux entiers dépens.
La société Demeter Investment Managers a notifié des conclusions identiques dans la procédure 21/8033, par voie dématérialisée le 8 novembre 2022.
Les procédures ont été clôturées par ordonnances du 22 novembre 2022, les débats étant fixés au 7 mai 2025.
'
SUR CE
Sur la jonction des deux procédures d'appel
Si, en application de l'article 907 du code de procédure civile, à moins qu'il ne soit fait application de l'article 905, l'affaire est instruite sous le contrôle d'un magistrat de la chambre à laquelle elle est distribuée, dans les conditions prévues par les articles 780 à 807 du même code, l'article 783 qui donne compétence au juge de la mise en état pour procéder aux jonctions et disjonctions d'instance ne prévoit pas, à la différence de l'article 789, qu'il s'agit d'une compétence exclusive.
En raison du lien de connexité existant entre les instances pendantes sous les n°RG 21/7567 et 21/8033, il est de l'intérêt d'une bonne justice de les juger ensemble et d'ordonner leur jonction en application des dispositions de l'article 367 du code de procédure civile.
Sur la nullité de la promesse d'achat figurant au pacte d'actionnaires
1. Sur la recevabilité de la demande de nullité de la promesse d'achat
a ) Sur la fin de non recevoir tirée de la demande nouvelle en appel
Se fondant sur les dispositions de l'article 564 du code de procédure civile, la société Demeter Investment Managers prétend, qu'en première instance, la société E.T.I.A. s'est contentée de soulever un moyen de défense au fond tiré de l'indétermination du prix aux seules fins de voir rejeter ses demandes et, qu'en cause d'appel, elle formule désormais, pour la première fois, une prétention nouvelle visant à voir prononcer la nullité de la promesse d'achat.
Elle rappelle que la prétention est nouvelle lorsqu'elle diffère de la prétention soumise aux premiers juges par son objet qui, en application de l'article 4 du code de procédure civile, est déterminé par les prétentions respectives des parties énoncées dans le dispositif des conclusions, le tribunal ne statuant que sur les prétentions énoncées au dispositif en application de l'article 768 du même code.
Elle ajoute qu'une prétention se distingue d'un moyen de défense au fond, qui tend simplement à faire rejeter la prétention de l'adversaire selon l'article 71 du code de procédure civile.
Elle considère que la demande présentée à hauteur de cour par l'appelante, aux fins de voir prononcer la nullité de la promesse d'achat, est une prétention et non un moyen de défense au fond dès lors qu'elle ne tend pas simplement au rejet de ses demandes, et qu'admettre sa recevabilité consisterait en une violation de l'effet dévolutif de l'appel.
En réponse aux moyens de défense de l'appelante, elle soutient que la demande ne tend pas aux mêmes fins que celles formulées en première instance qui ne consistaient qu'à solliciter le rejet des demandes de la société Demeter, alors qu'en appel elles visent à obtenir l'anéantissement de la promesse d'achat, la société E.T.I.A. n'ayant pas, contrairement à ce qu'elle affirme, soulevé d'exception de nullité en première instance puisqu'elle n'a pas sollicité la nullité dans le dispositif de ses conclusions.
Elle ajoute que la demande de nullité ne vise pas à faire écarter les prétentions adverses puisque celle-ci est sans effet sur sa demande tendant à voir appliquer l'obligation de renégociation de bonne foi prévue par le pacte d'actionnaires.
La société E.T.I.A. objecte à titre principal que sa demande tendant à voir prononcer la nullité de la promesse d'achat n'est pas nouvelle car elle tend aux mêmes fins que celle formulée en première instance, même si son fondement juridique est différent.
Elle soutient que l'irrecevabilité des demandes nouvelles résultant de l'article 564 du code de procédure civile vise à éviter qu'une prétention en appel ne transforme radicalement le litige, le régime juridique applicable aux prétentions nouvelles ayant simplement pour objet d'empêcher de substituer un droit absolument différent de celui dont on s'était prévalu en première instance, ce qui conduirait à rompre intégralement l'unité du litige.
Elle ajoute qu'il est admis en jurisprudence que la demande de nullité n'est pas qualifiée de nouvelle lorsqu'elle tend, comme en première instance, au rejet des prétentions adverses.
Elle précise, qu'en première instance, elle a conclu au rejet de l'intégralité des demandes de la société Demeter aux motifs que la promesse d'achat était nulle dès lors que le prix d'exercice de la promesse n'était ni déterminé ni déterminable et que la question de la nullité figurait expressément dans ses écritures, en soulignant que la société Demeter ne pouvait l'ignorer puisqu'elle a consacré près de six pages à cette question dans ses écritures, reconnaissant même dans des conclusions d'incident que « E.T.I.A. a soulevé un moyen de défense au fond tiré de la supposée nullité de la Promesse ».
Elle en déduit que sa demande est incontestablement comprise dans les demandes et défenses soumises au premier juge.
A titre subsidiaire, l'appelante soutient que, si sa demande de nullité est considérée comme nouvelle, elle est recevable en application de l'article 564 du code de procédure civile car elle vise à faire écarter les prétentions de la société Demeter, en faisant valoir que cet article n'exige pas que la prétention nouvelle vise à écarter l'intégralité des moyens et prétentions de l'autre partie.
Selon l'article 564 du code de procédure civile, « A peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait ».
L'article 565 du même code précise que « les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises aux premiers juges même si leur fondement juridique est différent ».
En première instance, la société E.T.I.A. n'a pas conclu à la nullité de la promesse d'achat incluse dans le pacte d'actionnaires conclu le 20 juin 2017 dans le dispositif des écritures qu'elle a développées oralement devant le tribunal de commerce, mais a sollicité le rejet de l'intégralité des demandes formées par la société Demeter Ventures et notamment de sa demande principale en paiement de la somme de 465 476,60 euros correspondant au prix d'exercice de cette promesse d'achat, en excipant de la nullité de celle-ci.
S'il est admis que la prétention est nouvelle en appel lorsqu'elle diffère de la prétention soumise aux premiers juges par son objet, comme le rappelle la société intimée, ne doit être considérée comme nouvelle uniquement la prétention dont l'objet est de substituer en appel un droit différent de celui dont la partie s'est prévalu en première instance.
Or, en l'espèce, le droit qui sert de fondement à la prétention formulée en appel par la société E.T.I.A. demeure identique à celui qu'elle avait invoqué en première instance puisque cette dernière avait excipé de la nullité de la promesse d'achat pour conclure au rejet de la demande en paiement du prix d'exercice de cette promesse.
En outre, la demande de nullité de la promesse d'achat est formulée aux mêmes fins que la prétention originaire de la société appelante, à savoir le rejet de la demande en paiement présentée par la société Demeter Ventures.
Enfin, la demande en annulation de la promesse d'achat est recevable pour la première fois en appel en application de l'article 565 susvisé, dès lors qu'elle tend à faire écarter la demande principale de la société Demeter Investment Managers, en paiement du prix d'exercice de la promesse d'achat.
La fin de non-recevoir opposée par la société intimée tirée de l'application de l'article 564 du code de procédure civile sera ainsi rejetée, ajoutant au jugement déféré.
b ) Sur la fin de non recevoir tirée du défaut de qualité à agir en nullité de la société E.T.I.A.
Se fondant sur les dispositions des articles 1179 alinéa 2 et 1181 alinéa 1er du code civil, selon lesquels la nullité relative ne peut être demandée que par la partie que la loi entend protéger, la société intimée prétend être seule bénéficiaire de la promesse d'achat à caractère unilatéral et être seule à pouvoir invoquer la nullité relative de cet acte pour indétermination du prix, à l'exclusion du promettant.
Elle se prévaut d'une jurisprudence constante de la Cour de cassation qui considère qu'une cession dont le prix n'est ni déterminé ni déterminable est sanctionnée par une nullité relative destinée à protéger le seul cédant ou bénéficiaire [Cass Com 22 mars 2016 n°14614.218].
Elle fait valoir que les promesses unilatérales d'achat sont, en l'absence de régime juridique spécial, soumises aux conditions de validité du contrat de droit commun, notamment s'agissant de la sanction d'une éventuelle indétermination du prix, le régime de la nullité étant identique.
Elle ajoute que la promesse d'achat consistait en un mécanisme de protection en faveur du créancier de la contrepartie qui devait recevoir le prix de cession et que l'indétermination du prix affecte uniquement la contrepartie pécuniaire que doit recevoir le bénéficiaire et non celle reçue par le promettant, à savoir les titres qui lui ont été définitivement remis.
Elle en déduit que la nullité relative doit protéger les seuls intérêts de la partie dont la contrepartie est affectée par l'indétermination du prix.
La société E.T.I.A. réplique que l'arrêt du 22 mars 2016 dont se prévaut l'intimée ne peut pas être considéré comme posant un principe général transposable à toutes les nullités pour indétermination du prix car il se rapporte uniquement à l'hypothèse des nullités de vente conclues à un vil prix ou moyennant un prix dérisoire, alors que les nullités pour indétermination du prix suivent un régime distinct.
Elle affirme que tant la doctrine que la jurisprudence confirment que les deux parties à l'acte peuvent invoquer la nullité pour indétermination du prix, les tribunaux accueillant sans réserve les actions en nullité pour indétermination du prix exercées par un promettant dans une promesse unilatérale d'achat.
Elle ajoute, qu'en application de l'article 1181 du code civil, en matière de nullité, c'est le débiteur de la prestation caractéristique, qui constitue l'élément essentiel d'un contrat, qui doit être protégé, et que, dans une promesse unilatérale, c'est le promettant débiteur de la prestation caractéristique du contrat de promesse qu'il convient de protéger contre une indéterminabilité du prix car lui seul souscrit un engagement à l'égard de l'autre, à vendre ou acquérir.
Selon l'article 1179 du code civil, la nullité est relative lorsque la règle violée a pour seul objet la sauvegarde d'un intérêt privé.
L'article 1181 du même code énonce que la nullité relative ne peut être demandée que par la partie que la loi entend protéger.
Il n'est pas contesté en l'espèce que la nullité de la promesse d'achat dont la société appelante sollicite le prononcé, fondée sur l'indétermination du prix d'exercice de la promesse, est une nullité relative, ainsi que l'a jugé la Cour de cassation dans l'arrêt invoqué par la société intimée [ Cass 3ème civ 22 mars 2016 n°14-14218 ].
Cependant, et contrairement à ce qu'affirme l'intimée, l'action en nullité de la promesse unilatérale d'achat pour indétermination du prix ne tend pas à la seule protection des intérêts privés des cédants mais également à celle des intérêts du promettant, débiteur de l'obligation de payer le prix d'achat, dont l'exécution est impossible en cas de prix non déterminable.
La fin de non recevoir tirée du défaut de qualité à agir de la société E.T.I.A. sera donc également rejetée, ajoutant au jugement entrepris.
2. Sur le bien fondé de la demande de nullité de la promesse d'achat fondée sur le caractère déterminé ou déterminable du prix d'exercice
La société E.T.I.A. conclut à titre principal à la nullité de la promesse d'achat au motif que le prix d'exercice n'est ni déterminé ni déterminable et prétend que, contrairement à ce qu'a retenu le tribunal, sa responsabilité contractuelle ne peut pas être engagée, aucun manquement contractuel ne pouvant lui être reproché alors qu'elle n'est pas débitrice du prétendu prix d'exercice.
Elle soutient, qu'en application de l'article 1591 du code civil, une cession de droits sociaux à titre onéreux suppose l'existence d'un prix qui doit être déterminé et désigné par les parties et que, selon une jurisprudence constante, l'acte de cession doit indiquer précisément les éléments de référence sur la base desquels les parties ont convenu de fixer le prix de cession, les tribunaux refusant de considérer comme déterminé un prix fixé à partir d'éléments incertains ou difficiles à mettre en 'uvre.
Elle ajoute que le juge ne peut intervenir dans la détermination du prix ni désigner un expert quand les parties n'ont pas prévu ce mode de détermination du prix dans leur contrat.
Elle fait valoir que la formule de prix stipulée à l'article III.7.1.3 du pacte est totalement impraticable, d'une part parce que le calcul du prix dépend d'une donnée centrale, l'endettement net de la société Cogebio, dont la date à prendre en compte n'est pas précisée dans l'acte, ce qui rend le prix totalement indéterminable, et, d'autre part, parce que la définition de 'V' proposée à l'article III.7.1.3 est incohérente car elle aboutirait à augmenter le prix de vente dès lors que la dette nette est supérieure à la dette de référence.
Elle relève que la société Demeter inverse dans son calcul la position de la dette nette et celle de la dette nette de référence, en soustrayant la dette nette de la dette nette de référence au lieu de faire l'inverse comme le commande le pacte, ce qui fausse le calcul puisque dès que la dette nette devient supérieure à la dette nette de référence, le résultat devient négatif, ce qui entraîne une diminution de la valeur de V.
Elle affirme que les termes et conditions du pacte montrent clairement qu'un nouvel accord était nécessaire entre les parties pour déterminer le prix, ce que la société intimée ne peut sérieusement contester alors qu'elle a elle-même eu les plus grandes difficultés à parvenir au prix d'exercice qu'elle proposait de retenir en première instance, n'ayant d'ailleurs indiqué aucun prix dans sa lettre d'exercice d'option du 1er août 2018.
Elle fait enfin valoir que la promesse d'achat ne contient par ailleurs aucun mécanisme de détermination du prix à dire d'expert, l'article III.1.3.5 du Pacte qui évoque une procédure d'expertise n'étant applicable que lorsque des stipulations y renvoient expressément, ce qui n'est pas le cas de l'article III.7.
La société Demeter approuve le tribunal d'avoir retenu qu'en refusant de s'acquitter spontanément du prix d'exercice déterminable, la société E.T.I.A. a engagé sa responsabilité contractuelle.
Elle affirme en premier lieu que l'évolution contradictoire des demandes de la société E.T.I.A. est révélatrice de sa mauvaise foi, considérant qu'elle se comporte dans le cadre de la présente procédure comme un investisseur qui, après avoir réalisé une opération en pleine connaissance de cause, refuse d'assumer ses engagements, alors qu'il est indéniable que si elle avait exercé la promesse d'achat lorsque la société Cogebio était in bonis, l'appelante se serait empressée de défendre la validité de la clause litigieuse qui prévoit un plafond en sa faveur.
Elle soutient, en second lieu, que la société E.T.I.A. fait une analyse volontairement mensongère de la formule de prix de la promesse d'achat pour faire croire qu'elle serait 'impraticable' et qu'elle rendrait strictement impossible toute détermination du prix, alors que les calculs qu'elle présente, qui ont été approuvés par le tribunal, démontrent indiscutablement qu'une augmentation de la dette nette au delà de la dette nette de référence de 876 000 euros a pour conséquence logique de diminuer le prix d'exercice de la promesse d'achat et non l'inverse comme le soutient l'appelante.
Elle estime que le tribunal a justement retenu que l'exercice de la promesse d'achat n'est pas conditionné à la situation financière de la société Cogebio, les cédantes étant libres d'exercer la clause de promesse d'achat indifféremment de toute considération liée à celle-ci et le promettant ajoutant une condition à la promesse d'achat qui n'existe pas, à savoir que celle-ci reposerait sur une « hypothèse de continuation d'exploitation », et souligne que durant la négociation de la promesse d'achat, la société E.T.I.A. a été conseillée par son avocat tout au long de l'opération.
Elle affirme qu'il n'existe aucun obstacle à la détermination du prix contenu dans la promesse d'achat de titres en indiquant que le 31 décembre précédant la notification de l'exercice de la promesse d'achat doit être retenu comme date de calcul de l'endettement net, la société Cogebio arrêtant ses comptes à cette date et la promesse stipulant que la détermination du prix doit s'effectuer dans la continuité des principes comptables appliqués par la société, et en précisant que les parties s'étaient entendues pour retenir cette date de référence lors de la négociation du pacte.
Elle ajoute que l'augmentation de l'endettement net n'a pas pour conséquence l'augmentation du prix d'exercice de la promesse d'achat et que la formule de détermination du prix est fixée en fonction de critères précis puisque le calcul du prix s'obtient en fonction d'un multiple de chiffre d'affaires qui n'est pas contesté, retraité d'un écart de dette nette aisément déterminable, qui sont objectifs puisque le calcul du prix ne dépend pas d'un accord ultérieur des parties.
Elle estime que l'unique difficulté réside dans la mention, erronée, d'une dette nette de référence au 31 décembre 2016 de 876 000 euros alors qu'elle s'est élevée selon les documents comptables officiels de la société Cogebio à 1 138 789 euros, en précisant avoir accepté de prendre comme dette nette de référence la somme de 876 000 euros, soit la valeur la plus favorable pour le promettant, permettant à ce dernier une économie de 78 048,33 euros.
Selon l'article 1591 du code civil, le prix de la vente doit être déterminé par les parties, ces dispositions légales n'imposant toutefois pas que l'acte porte en lui-même indication du prix, mais seulement que ce prix soit déterminable et qu'il ne dépende pas de la seule volonté de l'une des parties ni d'un accord ultérieur entre elles.
Le pacte d'associés signé le 20 juin 2017 par les parties stipule, dans la clause de liquidité du titre III, article III.7.1, dénommé « Promesse d'achat par E.T.I.A. portant sur les titres détenus par les Investisseurs Historiques », en son paragraphe 3 :
« Le prix de chaque Titre Promis (le « Prix d'Exercice ») sera déterminé sur la base de la valorisation de 100% des Titres de la Société (la « Valorisation de la Société ») telle que déterminée conformément à ce qui suit.
« CA » : le chiffre d'affaires moyen sur les 2 dernières années précédant la date d'exercice de la Promesse d'Achat ; étant entendu que le chiffre d'affaires correspond au chiffre d'affaires facturé par la Société, résultant de la vente de produits ou services liés à l'activité de la Société, notamment le GAZCLEAN (procédé de gazéification de biomasse), le procédé de carbonisation par four discontinu et le bruleur bicombustible gaz naturel/syngaz développés par la Société.
« V » : la valeur de 100% des Titres augmentée de la partie de la dette nette au-delà de la dette nette de référence indiquée dans la situation comptable au 31 décembre 2016, soit huit cent soixante-seize mille (876.000) euros, étant entendu que la « Dette Nette » correspond à l'ensemble des dettes du bilan moins le total de l'actif circulant du bilan, dans la continuité des principes comptables appliqués par la Société.
Si CA inférieur ou égal à Vmin/0,7, alors V sera égal à Vmin
Si CA supérieur ou égal à Vmax/0,7, alors V sera égal à V max
Si CA compris entre Vmin/07 et Vmax/07, alors V sera égal à 0,7 x CA
V-min est la valeur minimale de la Société calculée de sorte que les Titres détenus par le FPCI Demeter 3 Amorçage et Suez Venture soient valorisés (à endettement net égal à celui de référence) à la date d'exercice de la Promesse d'Achat à 350.000 € chacun ;
V-max sera calculé de sorte que les Titres détenus par le FPCI Demeter 3 Amorçage et Suez Venture soient valorisés (à endettement net égal à celui de référence) à la date d'exercice de la Promesse d'Achat à 1.800.000 € chacun. (')
Prix d'Exercice = V/nombre d'actions existantes à la Date d'Exercice » .
Le tribunal a considéré que la partie de la dette nette au delà de la dette nette de référence correspondait à la valeur d'exercice de l'endettement, sans que la date de valorisation de l'endettement net ne soit toutefois précisée dans l'acte, en précisant qu'il est d'usage comptable de considérer la variation de deux valeurs par différence, chronologiquement, entre la valeur initiale et la valeur finale.
Il a retenu que la formule « augmentée de la partie de la dette nette au-delà de la dette nette de référence » signifiait manifestement que la valeur V est augmentée de la variation d'endettement, positive ou négative, la valeur de référence étant la valeur initiale, de sorte que la valeur de V évolue de façon cohérente par rapport à l'endettement de la société.
Or, non seulement la valeur de la dette de référence mentionnée dans la clause de liquidité est erronée, comme le reconnaît la société intimée, mais l'absence de précision de la date de valorisation de la dette nette ne permet pas de déterminer la valeur V, la date de l'endettement net à prendre en compte pouvant être celle de l'exercice de l'option par le cédant, ou celle de la fin du mois précédant l'exercice de l'option ou encore la date de paiement du prix par le promettant, ou la date de clôture des comptes de l'exercice précédant l'exercice de l'option ou le paiement du prix.
La société intimée prétend que la partie de la dette nette au delà de la dette nette de référence devait être valorisée au 31 décembre 2017, date de fin de l'exercice au cours duquel elle a exercé son option, ce qui ne résulte pas clairement des dispositions de l'article III.7.1.3 ni des dispositions de la promesse d'achat, aucune référence à la date de fin d'exercice comptable n'étant faite dans le contrat.
Au contraire, l'article III.7.1.3 renvoie à deux reprises à la date d'exercice de la promesse d'achat.
S'il résulte des échanges intervenus entre les parties que l'augmentation de l'endettement de la société Cogebio devait diminuer le prix de cession, il n'en demeure pas moins que la date de valorisation de cet endettement n'est pas prévue par le pacte d'actionnaires qu'elles ont conclu, alors que la lettre d'intention du 1er février 2017, qui mentionnait déjà la formule de calcul de «CA » et « V » prévoyait expressément que les modalités exactes de détermination et les définitions du chiffre d'affaires et de l'endettement net seraient décidées d'un commun accord entre les parties lors de la réalisation de l'opération, ce que la promesse d'achat n'a pas précisé.
La fixation du prix d'exercice de la promesse d'achat dépend donc d'une donnée qui n'est pas déterminée par celle-ci, ce qui rend en conséquence le prix indéterminé et indéterminable et justifie l'annulation de de la promesse d'achat en application de l'article 1591 du code civil.
Sur la violation par la société E.T.I.A. de son obligation renforcée de bonne foi en cas d'invalidité d'une stipulation contractuelle
Dans l'hypothèse d'une annulation de la promesse d'achat, la société Demeter Investment Managers engage la responsabilité contractuelle de la société appelante en se fondant sur les dispositions de l'article IV.8.4 du pacte d'actionnaires prévoyant que les parties doivent se comporter en contractants de bonne foi, ce qui implique qu'elles s'obligent à pallier les effets d'une éventuelle invalidité des stipulations de l'acte, et en reprochant à la société E.T.I.A. de ne pas avoir remédié à la cause de nullité.
Elle relève que la société E.T.I.A. qui affirme que l'article IV.8.4 ne s'appliquerait que « sous réserve que la clause soit préalablement déclarée nulle », n'avait jamais contesté l'application de cet article et estime que cette interprétation est erronée car l'article IV.8.4 a pour objet, dans une logique d'anticipation, de contraindre les parties à négocier de bonne foi pour remédier amiablement à une éventuelle cause de nullité et éviter l'émergence d'un contentieux, l'objectif de la clause étant que « le Pacte poursuive ses effets sans discontinuité ».
L'article IV.8.4 du pacte d'actionnaires litigieux énonce que « dans l'éventualité où l'une quelconque des stipulations du pacte serait déclarée nulle ou sans effet de quelque façon et pour quelque motif que ce soit, l'annulation n'aura aucun effet sur la validité des autres stipulations du pacte et les parties s'engagent à se concerter pour remédier à la cause de nullité constatée, de sorte que, sauf impossibilité, le pacte poursuive ses effets sans discontinuité ».
Or la société intimée qui conclut à la parfaite validité de la promesse d'achat ne saurait reprocher à la société E.T.I.A. d'avoir manqué à ses obligations contractuelles en ne l'ayant pas concertée pour remédier à la cause de nullité qu'elle avait constatée, alors qu'elle ne reconnaissait pas cette cause de nullité et que la nullité de la promesse d'achat n'a été déclarée que par le présent arrêt.
La promesse d'achat étant nulle et aucun manquement contractuel de la société E.T.I.A. n'étant caractérisé, la société Demeter Investment Managers sera déboutée de sa demande en paiement de la somme de 465 476,60 euros majorée des intérêts légaux, infirmant le jugement déféré en toutes ses dispositions.
Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile
La société Demeter Investment Managers qui succombe en ses prétentions sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel.
Il est par ailleurs équitable de mettre à sa charge une partie des frais de procédure exposés par la société E.T.I.A. et non compris dans les dépens.
Elle sera ainsi condamnée à lui verser la somme de 7 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant publiquement, contradictoirement et dans les limites de sa saisine,
Ordonne la jonction des procédures d'appel pendantes sous les numéros RG 21/7567 et 21/8033,
Rejette les fins de non-recevoir opposées par la société Demeter Investment Managers à la demande de nullité de la promesse d'achat figurant au pacte d'actionnaires conclu par les parties,
Infirme en toutes ses dispositions soumises à la cour le jugement rendu le 22 septembre 2021 par le tribunal de commerce de Lyon,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Prononce la nullité de la promesse d'achat figurant à l'article III.7.1. du pacte d'actionnaires conclu le 20 juin 2017 par les sociétés Demeter Ventures et E.T.I.A Evaluation Technologique Ingenierie et Applications,
Déboute la société Demeter Investment Managers de l'ensemble de ses demandes,
Condamne la société Demeter Investment Managers aux dépens de première instance et d'appel et dit que les dépens pourront être recouvrés directement, conformément aux dispositions de l=article 699 du code de procédure civile, par la SCP Dumoulin-Adam, avocat,
Condamne la société Demeter Investment Managers à payer à la SAS E.T.I.A Evaluation Technologique Ingenierie et Applications la somme de 7 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
La Greffière, La Présidente,
Décision du Tribunal de Commerce de Lyon
Au fond du 22 septembre 2021
S.A.S. E.T.IA. EVALUATION TECHNOLOGIQUE INGENIERIE ET APP LICATIONS
C/
S.A. DEMETER INVESTMENT MANAGERS
ET
N° RG 21/08033 - N° Portalis DBVX-V-B7F-N5SO
Décision du Tribunal de Commerce de LYON
Au fonddu 22 septembre 2021
S.A.S. E.T.I.A. - EVALUATION TECHNOLOGIQUE,INGENIERIE ET APPLICATIONS
C/
S.A. DEMETER INVESTMENT MANAGERS
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE LYON
3ème chambre A
ARRET DU 24 Juillet 2025
APPELANTE :
La société E.T.I.A. ' EVALUATION TECHNOLOGIQUE, INGENIERIE ET APPLICATIONS,
Société par actions simplifiée, immatriculée au RCS de [Localité 6] sous le numéro 351 345 004.Prise en la personne de son président.
Sis [Adresse 5]
[Localité 1]
Représentée par Me Eric DUMOULIN de la SCP DUMOULIN - ADAM, avocat au barreau de LYON, toque : 1411, avocat postulant et de Me Maîtres Nicolas FAGUER, avocat au barreau de PARIS, toque P62, avocat plaidant.
INTIMEE :
DEMETER INVESTMENT MANAGERS,
société anonyme à directoire et conseil de surveillance, au capital de 280.623 euros, immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de Paris sous le numéro 483 279 923, en qualité de société de gestion de Demeter 3 Amorçage, fonds professionnels de capital d'investissement, prise en la personne de ses représentants légaux.Venant aux droits de DEMETER VENTURES, anciennement société anonyme immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de Grenoble sous le numéro 423 843 267, dont le siège social était situé [Adresse 2], à la suite de sa fusion-absorption au profit de DEMETER INVESTMENT MANAGERS,
dont le siège social se situe [Adresse 3],
([Localité 4]
Représentée par Me Santiago MUZIO DE PLACE, avocat au barreau de LYON, toque : 311, avocat postulant et Me Maxime de La Morinerie, avocat au barreau de PARIS, toque P0299, avocat plaidant.
******
Date de clôture de l'instruction : 22 Novembre 2022
Date de mise à disposition : 03 Juillet 2025 puis prorogé au 24 Juillet 2025, les parties en ayant été informées.
Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :
- Sophie DUMURGIER, présidente
- Aurore JULLIEN, conseillère
- Viviane LE GALL, conseillère
assistées pendant les débats de Céline DESPLANCHES, greffière
A l'audience, un membre de la cour a fait le rapport,
Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Sophie DUMURGIER, présidente, et par Céline DESPLANCHES, greffiere, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
* * * *
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
La SA Demeter Ventures, devenue la SA Demeter Investment Managers à la suite d'une fusion-absorption, est un fonds d'investissement ayant pour activité des actions de capital investissement dans des sociétés intervenant dans le secteur énergétique et écologique.
La société Cogebio avait pour activité le développement des technologies de gazéification de biomasse et cogénération d'énergie thermique, jusqu'à sa liquidation judiciaire prononcée le 27 décembre 2018 et clôturée pour insuffisance d'actif le 8 décembre 2021.
La SAS E.T.I.A Evaluation Technologique Ingenierie et Applications, ci après E.T.I.A, est une société spécialisée dans les équipements et les procédés de traitement thermique.
La société Suez Ventures, fonds d'investissement du groupe Suez chargé d'investir dans les activités de gestion de l'eau, du recyclage et de la valorisation des déchets, était actionnaire de la société E.T.I.A jusqu'en 2019.
La société Demeter Ventures et la société Suez Ventures ont souscrit à une première augmentation de capital au sein de la société Cogebio, à hauteur de 500 000 euros chacune en 2013, puis à une seconde en 2016, à l'issue desquelles elles détenaient chacune 19,50 % du capital social de cette société.
Au cours des années 2016 à 2018, les deux fonds d'investissement ont procédé à des apports en compte courant d'un montant total de près de 860 000 euros.
Afin de renforcer les fonds propres de la société Cogebio qui subissait des pertes importantes, les sociétés Demeter Ventures et Suez Ventures se sont rapprochées de la société E.T.I.A Evaluation Technologique Ingenierie et Applications en vue de la cession de leur participation dans la société Cogebio, au début de l'année 2017.
Après signature de deux lettres d'intention les 1er février 2017 et 21 avril 2017, un pacte d'actionnaires a été conclu le 20 juin 2017 entre les sociétés Demeter Ventures, Suez Ventures et E.T.I.A, prévoyant une réduction de capital motivée par les pertes, suivie d'une augmentation de capital d'un montant de 1 299 161,25 euros souscrite principalement par la société E.T.I.A ( 360 000 euros) et les investisseurs historiques ( 400 022 euros chacune), et conférant la majorité à la société E.T.I.A.
Ce pacte contenait en son article III.7 une clause de liquidité incluant une promesse d'achat par la société E.T.I.A de 100 % des titres des sociétés Demeter Ventures et Suez Ventures, pouvant être exercée à tout moment.
Une assemblée générale des actionnaires de la société Cogebio s'est tenue le 20 juin 2017, qui a voté l'augmentation de capital qui a été intégralement souscrite.
Par courrier du 1er août 2018, la société Demeter a notifié à la société E.T.I.A Evaluation Technologique Ingenierie et Applications et à la société Cogebio l'exercice de la promesse d'achat pour l'intégralité des titres détenus dans la société Cogebio, dans les conditions définies par le pacte conclu le 20 juin 2017 mais sans indiquer de prix d'exercice.
Par courriers des 6 et 12 septembre 2018, les sociétés E.T.I.A et Cogebio ont contesté l'exercice par la société Demeter de la promesse d'achat, arguant de l'indétermination du prix de la promesse d'achat et de l'absence d'indication du prix d'exercice dans le courrier de la société Demeter.
La société Cogebio a été placée en redressement judiciaire le 30 octobre 2018, converti en liquidation judiciaire le 27 décembre 2018.
Par courrier du 30 novembre 2018, la société Demeter a réitéré sa demande auprès de la société E.T.I.A en détaillant le calcul du prix d'exercice de la promesse d'achat, fixé à 465 473,60 euros, et, par courrier du 18 janvier 2019, elle l'a mise en demeure de respecter ses engagements contractuels.
Face au refus de règlement de la société E.T.I.A Evaluation Technologique Ingenierie et Applications, la société Demeter Ventures l'a fait assigner devant le tribunal de commerce de Lyon afin d'obtenir sa condamnation à lui payer la somme de 465 473,60 euros correspondant au prix d'exercice de la promesse d'achat, avec intérêts légaux, ainsi qu'une indemnité de procédure.
Par jugement contradictoire du 22 septembre 2021, le tribunal de commerce de Lyon a :
- jugé déterminable le prix de la promesse d'achat,
- jugé que le refus de la société E.T.I.A Evaluation Technologique Ingenierie et Applications de payer le prix d'exercice de la promesse d'achat a engagé sa responsabilité contractuelle,
- débouté la société E.T.I.A Evaluation Technologique Ingenierie et Applications de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
- condamné la société E.T.I.A Evaluation Technologique Ingenierie et Applications à verser à la société Demeter Ventures la somme de 465 476,60 euros correspondant au prix d'exercice de la promesse d'achat, avec intérêts légaux à compter du 1er janvier 2020,
- condamné la société E.T.I.A Evaluation Technologique Ingenierie et Applications à verser à la société Demeter Ventures la somme de 10 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- ordonné l'exécution provisoire de la présente décision,
- condamné la société E.T.I.A Evaluation Technologique Ingenierie et Applications aux entiers dépens de l'instance.
'
Par déclaration reçue au greffe le 13 octobre 2021, la société E.T.I.A Evaluation Technologique Ingenierie et Applications a interjeté appel de ce jugement portant sur l'ensemble des chefs de la décision expressément critiqués, en intimant la société Demeter Ventures.
Par déclaration reçue au greffe le 5 novembre 2021, la société E.T.I.A Evaluation Technologique Ingenierie et Applications a inscrit un deuxième appel contre ce jugement, portant sur l'ensemble des chefs de la décision expressément critiqués, en intimant la SA Demeter Investment Managers, venant aux droits de la société Demeter Ventures, à la suite d'une opération de fusion-absorption, à l'issue de laquelle la société Demeter Ventures a été radiée du registre du commerce et des sociétés, le 28 septembre 2021.
Saisi d'incidents dans chacune des procédures d'appel par la société Demeter Investment Managers, le conseiller de la mise en état, par ordonnances rendues le 7 juin 2022 dans des termes identiques, a :
- dit que ne relève pas du pouvoir juridictionnel du conseiller de la mise en état :
' la fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité des demandes nouvelles en appel,
' la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à agir de la société E.T.I.A,
- débouté en conséquence la société Demeter Investment Managers, venant aux droits de la société Demeter Ventures, de son incident,
- débouté les parties de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la société Demeter Investment Managers, venant aux droits de la société Demeter
Ventures, aux dépens de l'incident.
Au terme de ses conclusions d'appelante n°3 notifiées par voie dématérialisée le 22 novembre 2022, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens au soutien de ses prétentions, la SAS E.T.I.A ' Evaluation Technologique Ingénierie et Applications demande à la cour, au visa des articles 1591 et 1169 du code civil, de :
- dire et juger son appel recevable et bien fondé,
- infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Lyon le 22 septembre 2021 en ce qu'il a :
' jugé déterminable le prix de la promesse d'achat,
' jugé que le refus de la société E.T.I.A Evaluation Technologique Ingenierie et Applications de payer le prix d'exercice de la promesse d'achat a engagé sa responsabilité contractuelle,
' débouté la société E.T.I.A Evaluation Technologique Ingenierie et Applications de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
' condamné la société E.T.I.A Evaluation Technologique Ingenierie et Applications à verser à la société Demeter Ventures la somme de 465 476,60 euros correspondant au prix d'exercice de la promesse d'achat, avec intérêts légaux à compter du 1er janvier 2020,
' condamné la société E.T.I.A Evaluation Technologique Ingenierie et Applications à verser à la société Demeter Ventures la somme de 10 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
' ordonné l'exécution provisoire de la présente décision,
' condamné la société E.T.I.A Evaluation Technologique Ingenierie et Applications aux entiers dépens de l'instance,
Statuant à nouveau,
A titre principal,
- dire et juger que le prix d'exercice de la promesse d'achat figurant à l'article III.7.1 du pacte des associés de la société Cogebio n'est ni déterminé ni déterminable,
En conséquence,
- prononcer la nullité de la promesse d'achat figurant à l'article III.7.1 du pacte des associés de la société Cogebio,
- débouter la société Demeter Ventures de l'intégralité de ses demandes,
A titre subsidiaire,
- dire et juger que la perte de toute valeur des titres de la société Cogebio au moment de l'exercice de la promesse d'achat figurant à l'article III.7.1 du pacte des associés de la société Cogebio rend la contrepartie au paiement du prix dérisoire,
En conséquence,
- prononcer la nullité du contrat de vente des titres de la société Cogebio,
- débouter la société Demeter Ventures de l'intégralité de ses demandes,
En tout état de cause :
- condamner la société Demeter Ventures à lui payer la somme de 20 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la société Demeter Ventures aux dépens de l'instance, dont distraction au profit de la SCP Dumoulin ' Adam.
Au terme de conclusions d'appelante n°3 notifiées par voie dématérialisée le 22 novembre 2022 dans la procédure 21/8033, la société E.T.I.A a formé les mêmes demandes contre la société Demeter Investment Managers.
Au terme de conclusions d'intimée n°3 notifiées par voie dématérialisée le 8 novembre 2022, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens au soutien de ses prétentions, la SA Demeter Investment Managers (ci-après la société Demeter), venant aux droits de la société Demeter Ventures, demande à la cour, au visa des articles 1217 et suivants, 1591, 1169, 1179, 1181 et 1589 du code civil et 4, 32, 71, 122, 561, 564, 768 du code de procédure civile, de :
A titre liminaire :
- juger irrecevable la demande de la société E.T.I.A au titre de la nullité de la promesse d'achat, en ce qu'elle constitue une demande nouvelle non formulée en première instance,
- juger irrecevable la demande de la société E.T.I.A au titre de la nullité d'un supposé "contrat de vente", en ce qu'elle constitue une demande nouvelle non formulée en première instance,
- juger irrecevable, pour défaut de droit d'agir, la société E.T.I.A à se prévaloir de la supposée nullité relative de la promesse d'achat,
Par conséquent :
- confirmer le jugement du tribunal de commerce de Lyon du 22 septembre 2021 (RG n°2019J1425) en ce qu'il a jugé (i) déterminable le prix de la promesse d'achat, (ii) que la société E.T.I.A a engagé sa responsabilité contractuelle en refusant de payer le prix d'exercice de la promesse d'achat (iii) et l'a condamnée à verser au FPCI Demeter 3 Amorçage, représenté par sa société de gestion Demeter Investment Managers (venant aux droits de Demeter Ventures), des dommages-intérêts de 465.476,60 euros, avec intérêts légaux à compter du 1er janvier 2020,
A titre principal :
- confirmer le jugement du tribunal de commerce de Lyon du 22 septembre 2021 (RG n°2019J1425) en ce qu'il a jugé (i) déterminable le prix de la promesse d'achat, (ii) que la société E.T.I.A a engagé sa responsabilité contractuelle en refusant de payer le prix d'exercice de la promesse d'achat (iii) et l'a condamnée à verser au FPCI Demeter 3 Amorçage, représenté par sa société de gestion Demeter Investment Managers (venant aux droits de Demeter Ventures), des dommages-intérêts de 465 476,60 euros, avec intérêt légaux à compter du 1er janvier 2020,
A titre subsidiaire :
A supposer l'existence d'une nullité de la promesse d'achat ou du supposé "contrat de vente",
- condamner la société E.T.I.A au paiement de dommages et intérêts de 465 476,60 euros, avec intérêt légaux à compter du 1er janvier 2020, pour violation de l'article IV.8.4 du pacte prévoyant une obligation renforcée de bonne foi en cas d'invalidité d'une stipulation contractuelle du pacte,
En tout état de cause :
- condamner la société E.T.I.A à lui régler la somme de 50 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la société E.T.I.A aux entiers dépens.
La société Demeter Investment Managers a notifié des conclusions identiques dans la procédure 21/8033, par voie dématérialisée le 8 novembre 2022.
Les procédures ont été clôturées par ordonnances du 22 novembre 2022, les débats étant fixés au 7 mai 2025.
'
SUR CE
Sur la jonction des deux procédures d'appel
Si, en application de l'article 907 du code de procédure civile, à moins qu'il ne soit fait application de l'article 905, l'affaire est instruite sous le contrôle d'un magistrat de la chambre à laquelle elle est distribuée, dans les conditions prévues par les articles 780 à 807 du même code, l'article 783 qui donne compétence au juge de la mise en état pour procéder aux jonctions et disjonctions d'instance ne prévoit pas, à la différence de l'article 789, qu'il s'agit d'une compétence exclusive.
En raison du lien de connexité existant entre les instances pendantes sous les n°RG 21/7567 et 21/8033, il est de l'intérêt d'une bonne justice de les juger ensemble et d'ordonner leur jonction en application des dispositions de l'article 367 du code de procédure civile.
Sur la nullité de la promesse d'achat figurant au pacte d'actionnaires
1. Sur la recevabilité de la demande de nullité de la promesse d'achat
a ) Sur la fin de non recevoir tirée de la demande nouvelle en appel
Se fondant sur les dispositions de l'article 564 du code de procédure civile, la société Demeter Investment Managers prétend, qu'en première instance, la société E.T.I.A. s'est contentée de soulever un moyen de défense au fond tiré de l'indétermination du prix aux seules fins de voir rejeter ses demandes et, qu'en cause d'appel, elle formule désormais, pour la première fois, une prétention nouvelle visant à voir prononcer la nullité de la promesse d'achat.
Elle rappelle que la prétention est nouvelle lorsqu'elle diffère de la prétention soumise aux premiers juges par son objet qui, en application de l'article 4 du code de procédure civile, est déterminé par les prétentions respectives des parties énoncées dans le dispositif des conclusions, le tribunal ne statuant que sur les prétentions énoncées au dispositif en application de l'article 768 du même code.
Elle ajoute qu'une prétention se distingue d'un moyen de défense au fond, qui tend simplement à faire rejeter la prétention de l'adversaire selon l'article 71 du code de procédure civile.
Elle considère que la demande présentée à hauteur de cour par l'appelante, aux fins de voir prononcer la nullité de la promesse d'achat, est une prétention et non un moyen de défense au fond dès lors qu'elle ne tend pas simplement au rejet de ses demandes, et qu'admettre sa recevabilité consisterait en une violation de l'effet dévolutif de l'appel.
En réponse aux moyens de défense de l'appelante, elle soutient que la demande ne tend pas aux mêmes fins que celles formulées en première instance qui ne consistaient qu'à solliciter le rejet des demandes de la société Demeter, alors qu'en appel elles visent à obtenir l'anéantissement de la promesse d'achat, la société E.T.I.A. n'ayant pas, contrairement à ce qu'elle affirme, soulevé d'exception de nullité en première instance puisqu'elle n'a pas sollicité la nullité dans le dispositif de ses conclusions.
Elle ajoute que la demande de nullité ne vise pas à faire écarter les prétentions adverses puisque celle-ci est sans effet sur sa demande tendant à voir appliquer l'obligation de renégociation de bonne foi prévue par le pacte d'actionnaires.
La société E.T.I.A. objecte à titre principal que sa demande tendant à voir prononcer la nullité de la promesse d'achat n'est pas nouvelle car elle tend aux mêmes fins que celle formulée en première instance, même si son fondement juridique est différent.
Elle soutient que l'irrecevabilité des demandes nouvelles résultant de l'article 564 du code de procédure civile vise à éviter qu'une prétention en appel ne transforme radicalement le litige, le régime juridique applicable aux prétentions nouvelles ayant simplement pour objet d'empêcher de substituer un droit absolument différent de celui dont on s'était prévalu en première instance, ce qui conduirait à rompre intégralement l'unité du litige.
Elle ajoute qu'il est admis en jurisprudence que la demande de nullité n'est pas qualifiée de nouvelle lorsqu'elle tend, comme en première instance, au rejet des prétentions adverses.
Elle précise, qu'en première instance, elle a conclu au rejet de l'intégralité des demandes de la société Demeter aux motifs que la promesse d'achat était nulle dès lors que le prix d'exercice de la promesse n'était ni déterminé ni déterminable et que la question de la nullité figurait expressément dans ses écritures, en soulignant que la société Demeter ne pouvait l'ignorer puisqu'elle a consacré près de six pages à cette question dans ses écritures, reconnaissant même dans des conclusions d'incident que « E.T.I.A. a soulevé un moyen de défense au fond tiré de la supposée nullité de la Promesse ».
Elle en déduit que sa demande est incontestablement comprise dans les demandes et défenses soumises au premier juge.
A titre subsidiaire, l'appelante soutient que, si sa demande de nullité est considérée comme nouvelle, elle est recevable en application de l'article 564 du code de procédure civile car elle vise à faire écarter les prétentions de la société Demeter, en faisant valoir que cet article n'exige pas que la prétention nouvelle vise à écarter l'intégralité des moyens et prétentions de l'autre partie.
Selon l'article 564 du code de procédure civile, « A peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait ».
L'article 565 du même code précise que « les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises aux premiers juges même si leur fondement juridique est différent ».
En première instance, la société E.T.I.A. n'a pas conclu à la nullité de la promesse d'achat incluse dans le pacte d'actionnaires conclu le 20 juin 2017 dans le dispositif des écritures qu'elle a développées oralement devant le tribunal de commerce, mais a sollicité le rejet de l'intégralité des demandes formées par la société Demeter Ventures et notamment de sa demande principale en paiement de la somme de 465 476,60 euros correspondant au prix d'exercice de cette promesse d'achat, en excipant de la nullité de celle-ci.
S'il est admis que la prétention est nouvelle en appel lorsqu'elle diffère de la prétention soumise aux premiers juges par son objet, comme le rappelle la société intimée, ne doit être considérée comme nouvelle uniquement la prétention dont l'objet est de substituer en appel un droit différent de celui dont la partie s'est prévalu en première instance.
Or, en l'espèce, le droit qui sert de fondement à la prétention formulée en appel par la société E.T.I.A. demeure identique à celui qu'elle avait invoqué en première instance puisque cette dernière avait excipé de la nullité de la promesse d'achat pour conclure au rejet de la demande en paiement du prix d'exercice de cette promesse.
En outre, la demande de nullité de la promesse d'achat est formulée aux mêmes fins que la prétention originaire de la société appelante, à savoir le rejet de la demande en paiement présentée par la société Demeter Ventures.
Enfin, la demande en annulation de la promesse d'achat est recevable pour la première fois en appel en application de l'article 565 susvisé, dès lors qu'elle tend à faire écarter la demande principale de la société Demeter Investment Managers, en paiement du prix d'exercice de la promesse d'achat.
La fin de non-recevoir opposée par la société intimée tirée de l'application de l'article 564 du code de procédure civile sera ainsi rejetée, ajoutant au jugement déféré.
b ) Sur la fin de non recevoir tirée du défaut de qualité à agir en nullité de la société E.T.I.A.
Se fondant sur les dispositions des articles 1179 alinéa 2 et 1181 alinéa 1er du code civil, selon lesquels la nullité relative ne peut être demandée que par la partie que la loi entend protéger, la société intimée prétend être seule bénéficiaire de la promesse d'achat à caractère unilatéral et être seule à pouvoir invoquer la nullité relative de cet acte pour indétermination du prix, à l'exclusion du promettant.
Elle se prévaut d'une jurisprudence constante de la Cour de cassation qui considère qu'une cession dont le prix n'est ni déterminé ni déterminable est sanctionnée par une nullité relative destinée à protéger le seul cédant ou bénéficiaire [Cass Com 22 mars 2016 n°14614.218].
Elle fait valoir que les promesses unilatérales d'achat sont, en l'absence de régime juridique spécial, soumises aux conditions de validité du contrat de droit commun, notamment s'agissant de la sanction d'une éventuelle indétermination du prix, le régime de la nullité étant identique.
Elle ajoute que la promesse d'achat consistait en un mécanisme de protection en faveur du créancier de la contrepartie qui devait recevoir le prix de cession et que l'indétermination du prix affecte uniquement la contrepartie pécuniaire que doit recevoir le bénéficiaire et non celle reçue par le promettant, à savoir les titres qui lui ont été définitivement remis.
Elle en déduit que la nullité relative doit protéger les seuls intérêts de la partie dont la contrepartie est affectée par l'indétermination du prix.
La société E.T.I.A. réplique que l'arrêt du 22 mars 2016 dont se prévaut l'intimée ne peut pas être considéré comme posant un principe général transposable à toutes les nullités pour indétermination du prix car il se rapporte uniquement à l'hypothèse des nullités de vente conclues à un vil prix ou moyennant un prix dérisoire, alors que les nullités pour indétermination du prix suivent un régime distinct.
Elle affirme que tant la doctrine que la jurisprudence confirment que les deux parties à l'acte peuvent invoquer la nullité pour indétermination du prix, les tribunaux accueillant sans réserve les actions en nullité pour indétermination du prix exercées par un promettant dans une promesse unilatérale d'achat.
Elle ajoute, qu'en application de l'article 1181 du code civil, en matière de nullité, c'est le débiteur de la prestation caractéristique, qui constitue l'élément essentiel d'un contrat, qui doit être protégé, et que, dans une promesse unilatérale, c'est le promettant débiteur de la prestation caractéristique du contrat de promesse qu'il convient de protéger contre une indéterminabilité du prix car lui seul souscrit un engagement à l'égard de l'autre, à vendre ou acquérir.
Selon l'article 1179 du code civil, la nullité est relative lorsque la règle violée a pour seul objet la sauvegarde d'un intérêt privé.
L'article 1181 du même code énonce que la nullité relative ne peut être demandée que par la partie que la loi entend protéger.
Il n'est pas contesté en l'espèce que la nullité de la promesse d'achat dont la société appelante sollicite le prononcé, fondée sur l'indétermination du prix d'exercice de la promesse, est une nullité relative, ainsi que l'a jugé la Cour de cassation dans l'arrêt invoqué par la société intimée [ Cass 3ème civ 22 mars 2016 n°14-14218 ].
Cependant, et contrairement à ce qu'affirme l'intimée, l'action en nullité de la promesse unilatérale d'achat pour indétermination du prix ne tend pas à la seule protection des intérêts privés des cédants mais également à celle des intérêts du promettant, débiteur de l'obligation de payer le prix d'achat, dont l'exécution est impossible en cas de prix non déterminable.
La fin de non recevoir tirée du défaut de qualité à agir de la société E.T.I.A. sera donc également rejetée, ajoutant au jugement entrepris.
2. Sur le bien fondé de la demande de nullité de la promesse d'achat fondée sur le caractère déterminé ou déterminable du prix d'exercice
La société E.T.I.A. conclut à titre principal à la nullité de la promesse d'achat au motif que le prix d'exercice n'est ni déterminé ni déterminable et prétend que, contrairement à ce qu'a retenu le tribunal, sa responsabilité contractuelle ne peut pas être engagée, aucun manquement contractuel ne pouvant lui être reproché alors qu'elle n'est pas débitrice du prétendu prix d'exercice.
Elle soutient, qu'en application de l'article 1591 du code civil, une cession de droits sociaux à titre onéreux suppose l'existence d'un prix qui doit être déterminé et désigné par les parties et que, selon une jurisprudence constante, l'acte de cession doit indiquer précisément les éléments de référence sur la base desquels les parties ont convenu de fixer le prix de cession, les tribunaux refusant de considérer comme déterminé un prix fixé à partir d'éléments incertains ou difficiles à mettre en 'uvre.
Elle ajoute que le juge ne peut intervenir dans la détermination du prix ni désigner un expert quand les parties n'ont pas prévu ce mode de détermination du prix dans leur contrat.
Elle fait valoir que la formule de prix stipulée à l'article III.7.1.3 du pacte est totalement impraticable, d'une part parce que le calcul du prix dépend d'une donnée centrale, l'endettement net de la société Cogebio, dont la date à prendre en compte n'est pas précisée dans l'acte, ce qui rend le prix totalement indéterminable, et, d'autre part, parce que la définition de 'V' proposée à l'article III.7.1.3 est incohérente car elle aboutirait à augmenter le prix de vente dès lors que la dette nette est supérieure à la dette de référence.
Elle relève que la société Demeter inverse dans son calcul la position de la dette nette et celle de la dette nette de référence, en soustrayant la dette nette de la dette nette de référence au lieu de faire l'inverse comme le commande le pacte, ce qui fausse le calcul puisque dès que la dette nette devient supérieure à la dette nette de référence, le résultat devient négatif, ce qui entraîne une diminution de la valeur de V.
Elle affirme que les termes et conditions du pacte montrent clairement qu'un nouvel accord était nécessaire entre les parties pour déterminer le prix, ce que la société intimée ne peut sérieusement contester alors qu'elle a elle-même eu les plus grandes difficultés à parvenir au prix d'exercice qu'elle proposait de retenir en première instance, n'ayant d'ailleurs indiqué aucun prix dans sa lettre d'exercice d'option du 1er août 2018.
Elle fait enfin valoir que la promesse d'achat ne contient par ailleurs aucun mécanisme de détermination du prix à dire d'expert, l'article III.1.3.5 du Pacte qui évoque une procédure d'expertise n'étant applicable que lorsque des stipulations y renvoient expressément, ce qui n'est pas le cas de l'article III.7.
La société Demeter approuve le tribunal d'avoir retenu qu'en refusant de s'acquitter spontanément du prix d'exercice déterminable, la société E.T.I.A. a engagé sa responsabilité contractuelle.
Elle affirme en premier lieu que l'évolution contradictoire des demandes de la société E.T.I.A. est révélatrice de sa mauvaise foi, considérant qu'elle se comporte dans le cadre de la présente procédure comme un investisseur qui, après avoir réalisé une opération en pleine connaissance de cause, refuse d'assumer ses engagements, alors qu'il est indéniable que si elle avait exercé la promesse d'achat lorsque la société Cogebio était in bonis, l'appelante se serait empressée de défendre la validité de la clause litigieuse qui prévoit un plafond en sa faveur.
Elle soutient, en second lieu, que la société E.T.I.A. fait une analyse volontairement mensongère de la formule de prix de la promesse d'achat pour faire croire qu'elle serait 'impraticable' et qu'elle rendrait strictement impossible toute détermination du prix, alors que les calculs qu'elle présente, qui ont été approuvés par le tribunal, démontrent indiscutablement qu'une augmentation de la dette nette au delà de la dette nette de référence de 876 000 euros a pour conséquence logique de diminuer le prix d'exercice de la promesse d'achat et non l'inverse comme le soutient l'appelante.
Elle estime que le tribunal a justement retenu que l'exercice de la promesse d'achat n'est pas conditionné à la situation financière de la société Cogebio, les cédantes étant libres d'exercer la clause de promesse d'achat indifféremment de toute considération liée à celle-ci et le promettant ajoutant une condition à la promesse d'achat qui n'existe pas, à savoir que celle-ci reposerait sur une « hypothèse de continuation d'exploitation », et souligne que durant la négociation de la promesse d'achat, la société E.T.I.A. a été conseillée par son avocat tout au long de l'opération.
Elle affirme qu'il n'existe aucun obstacle à la détermination du prix contenu dans la promesse d'achat de titres en indiquant que le 31 décembre précédant la notification de l'exercice de la promesse d'achat doit être retenu comme date de calcul de l'endettement net, la société Cogebio arrêtant ses comptes à cette date et la promesse stipulant que la détermination du prix doit s'effectuer dans la continuité des principes comptables appliqués par la société, et en précisant que les parties s'étaient entendues pour retenir cette date de référence lors de la négociation du pacte.
Elle ajoute que l'augmentation de l'endettement net n'a pas pour conséquence l'augmentation du prix d'exercice de la promesse d'achat et que la formule de détermination du prix est fixée en fonction de critères précis puisque le calcul du prix s'obtient en fonction d'un multiple de chiffre d'affaires qui n'est pas contesté, retraité d'un écart de dette nette aisément déterminable, qui sont objectifs puisque le calcul du prix ne dépend pas d'un accord ultérieur des parties.
Elle estime que l'unique difficulté réside dans la mention, erronée, d'une dette nette de référence au 31 décembre 2016 de 876 000 euros alors qu'elle s'est élevée selon les documents comptables officiels de la société Cogebio à 1 138 789 euros, en précisant avoir accepté de prendre comme dette nette de référence la somme de 876 000 euros, soit la valeur la plus favorable pour le promettant, permettant à ce dernier une économie de 78 048,33 euros.
Selon l'article 1591 du code civil, le prix de la vente doit être déterminé par les parties, ces dispositions légales n'imposant toutefois pas que l'acte porte en lui-même indication du prix, mais seulement que ce prix soit déterminable et qu'il ne dépende pas de la seule volonté de l'une des parties ni d'un accord ultérieur entre elles.
Le pacte d'associés signé le 20 juin 2017 par les parties stipule, dans la clause de liquidité du titre III, article III.7.1, dénommé « Promesse d'achat par E.T.I.A. portant sur les titres détenus par les Investisseurs Historiques », en son paragraphe 3 :
« Le prix de chaque Titre Promis (le « Prix d'Exercice ») sera déterminé sur la base de la valorisation de 100% des Titres de la Société (la « Valorisation de la Société ») telle que déterminée conformément à ce qui suit.
« CA » : le chiffre d'affaires moyen sur les 2 dernières années précédant la date d'exercice de la Promesse d'Achat ; étant entendu que le chiffre d'affaires correspond au chiffre d'affaires facturé par la Société, résultant de la vente de produits ou services liés à l'activité de la Société, notamment le GAZCLEAN (procédé de gazéification de biomasse), le procédé de carbonisation par four discontinu et le bruleur bicombustible gaz naturel/syngaz développés par la Société.
« V » : la valeur de 100% des Titres augmentée de la partie de la dette nette au-delà de la dette nette de référence indiquée dans la situation comptable au 31 décembre 2016, soit huit cent soixante-seize mille (876.000) euros, étant entendu que la « Dette Nette » correspond à l'ensemble des dettes du bilan moins le total de l'actif circulant du bilan, dans la continuité des principes comptables appliqués par la Société.
Si CA inférieur ou égal à Vmin/0,7, alors V sera égal à Vmin
Si CA supérieur ou égal à Vmax/0,7, alors V sera égal à V max
Si CA compris entre Vmin/07 et Vmax/07, alors V sera égal à 0,7 x CA
V-min est la valeur minimale de la Société calculée de sorte que les Titres détenus par le FPCI Demeter 3 Amorçage et Suez Venture soient valorisés (à endettement net égal à celui de référence) à la date d'exercice de la Promesse d'Achat à 350.000 € chacun ;
V-max sera calculé de sorte que les Titres détenus par le FPCI Demeter 3 Amorçage et Suez Venture soient valorisés (à endettement net égal à celui de référence) à la date d'exercice de la Promesse d'Achat à 1.800.000 € chacun. (')
Prix d'Exercice = V/nombre d'actions existantes à la Date d'Exercice » .
Le tribunal a considéré que la partie de la dette nette au delà de la dette nette de référence correspondait à la valeur d'exercice de l'endettement, sans que la date de valorisation de l'endettement net ne soit toutefois précisée dans l'acte, en précisant qu'il est d'usage comptable de considérer la variation de deux valeurs par différence, chronologiquement, entre la valeur initiale et la valeur finale.
Il a retenu que la formule « augmentée de la partie de la dette nette au-delà de la dette nette de référence » signifiait manifestement que la valeur V est augmentée de la variation d'endettement, positive ou négative, la valeur de référence étant la valeur initiale, de sorte que la valeur de V évolue de façon cohérente par rapport à l'endettement de la société.
Or, non seulement la valeur de la dette de référence mentionnée dans la clause de liquidité est erronée, comme le reconnaît la société intimée, mais l'absence de précision de la date de valorisation de la dette nette ne permet pas de déterminer la valeur V, la date de l'endettement net à prendre en compte pouvant être celle de l'exercice de l'option par le cédant, ou celle de la fin du mois précédant l'exercice de l'option ou encore la date de paiement du prix par le promettant, ou la date de clôture des comptes de l'exercice précédant l'exercice de l'option ou le paiement du prix.
La société intimée prétend que la partie de la dette nette au delà de la dette nette de référence devait être valorisée au 31 décembre 2017, date de fin de l'exercice au cours duquel elle a exercé son option, ce qui ne résulte pas clairement des dispositions de l'article III.7.1.3 ni des dispositions de la promesse d'achat, aucune référence à la date de fin d'exercice comptable n'étant faite dans le contrat.
Au contraire, l'article III.7.1.3 renvoie à deux reprises à la date d'exercice de la promesse d'achat.
S'il résulte des échanges intervenus entre les parties que l'augmentation de l'endettement de la société Cogebio devait diminuer le prix de cession, il n'en demeure pas moins que la date de valorisation de cet endettement n'est pas prévue par le pacte d'actionnaires qu'elles ont conclu, alors que la lettre d'intention du 1er février 2017, qui mentionnait déjà la formule de calcul de «CA » et « V » prévoyait expressément que les modalités exactes de détermination et les définitions du chiffre d'affaires et de l'endettement net seraient décidées d'un commun accord entre les parties lors de la réalisation de l'opération, ce que la promesse d'achat n'a pas précisé.
La fixation du prix d'exercice de la promesse d'achat dépend donc d'une donnée qui n'est pas déterminée par celle-ci, ce qui rend en conséquence le prix indéterminé et indéterminable et justifie l'annulation de de la promesse d'achat en application de l'article 1591 du code civil.
Sur la violation par la société E.T.I.A. de son obligation renforcée de bonne foi en cas d'invalidité d'une stipulation contractuelle
Dans l'hypothèse d'une annulation de la promesse d'achat, la société Demeter Investment Managers engage la responsabilité contractuelle de la société appelante en se fondant sur les dispositions de l'article IV.8.4 du pacte d'actionnaires prévoyant que les parties doivent se comporter en contractants de bonne foi, ce qui implique qu'elles s'obligent à pallier les effets d'une éventuelle invalidité des stipulations de l'acte, et en reprochant à la société E.T.I.A. de ne pas avoir remédié à la cause de nullité.
Elle relève que la société E.T.I.A. qui affirme que l'article IV.8.4 ne s'appliquerait que « sous réserve que la clause soit préalablement déclarée nulle », n'avait jamais contesté l'application de cet article et estime que cette interprétation est erronée car l'article IV.8.4 a pour objet, dans une logique d'anticipation, de contraindre les parties à négocier de bonne foi pour remédier amiablement à une éventuelle cause de nullité et éviter l'émergence d'un contentieux, l'objectif de la clause étant que « le Pacte poursuive ses effets sans discontinuité ».
L'article IV.8.4 du pacte d'actionnaires litigieux énonce que « dans l'éventualité où l'une quelconque des stipulations du pacte serait déclarée nulle ou sans effet de quelque façon et pour quelque motif que ce soit, l'annulation n'aura aucun effet sur la validité des autres stipulations du pacte et les parties s'engagent à se concerter pour remédier à la cause de nullité constatée, de sorte que, sauf impossibilité, le pacte poursuive ses effets sans discontinuité ».
Or la société intimée qui conclut à la parfaite validité de la promesse d'achat ne saurait reprocher à la société E.T.I.A. d'avoir manqué à ses obligations contractuelles en ne l'ayant pas concertée pour remédier à la cause de nullité qu'elle avait constatée, alors qu'elle ne reconnaissait pas cette cause de nullité et que la nullité de la promesse d'achat n'a été déclarée que par le présent arrêt.
La promesse d'achat étant nulle et aucun manquement contractuel de la société E.T.I.A. n'étant caractérisé, la société Demeter Investment Managers sera déboutée de sa demande en paiement de la somme de 465 476,60 euros majorée des intérêts légaux, infirmant le jugement déféré en toutes ses dispositions.
Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile
La société Demeter Investment Managers qui succombe en ses prétentions sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel.
Il est par ailleurs équitable de mettre à sa charge une partie des frais de procédure exposés par la société E.T.I.A. et non compris dans les dépens.
Elle sera ainsi condamnée à lui verser la somme de 7 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant publiquement, contradictoirement et dans les limites de sa saisine,
Ordonne la jonction des procédures d'appel pendantes sous les numéros RG 21/7567 et 21/8033,
Rejette les fins de non-recevoir opposées par la société Demeter Investment Managers à la demande de nullité de la promesse d'achat figurant au pacte d'actionnaires conclu par les parties,
Infirme en toutes ses dispositions soumises à la cour le jugement rendu le 22 septembre 2021 par le tribunal de commerce de Lyon,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Prononce la nullité de la promesse d'achat figurant à l'article III.7.1. du pacte d'actionnaires conclu le 20 juin 2017 par les sociétés Demeter Ventures et E.T.I.A Evaluation Technologique Ingenierie et Applications,
Déboute la société Demeter Investment Managers de l'ensemble de ses demandes,
Condamne la société Demeter Investment Managers aux dépens de première instance et d'appel et dit que les dépens pourront être recouvrés directement, conformément aux dispositions de l=article 699 du code de procédure civile, par la SCP Dumoulin-Adam, avocat,
Condamne la société Demeter Investment Managers à payer à la SAS E.T.I.A Evaluation Technologique Ingenierie et Applications la somme de 7 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
La Greffière, La Présidente,