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Décisions

CA Pau, 2e ch - sect. 1, 24 juillet 2025, n° 24/00297

PAU

Arrêt

Autre

CA Pau n° 24/00297

24 juillet 2025

PhD/CS

Numéro 25/2250

COUR D'APPEL DE PAU

2ème CH - Section 1

ARRET DU 24 juillet 2025

Dossier : N° RG 24/00297 - N° Portalis DBVV-V-B7I-IXZQ

Nature affaire :

Demande en paiement des loyers et charges et/ou tendant à la résiliation du bail et/ou à l'expulsion

Affaire :

S.C.I. LES JARDINS DE BERRAIN

C/

S.E.L.A.R.L. MJPA

S.A.R.L. IRRINO

Grosse délivrée le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R E T

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 24 juillet 2025, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l'audience publique tenue le 03 Juin 2025, devant :

Philippe DARRACQ, magistrat chargé du rapport,

assisté de Mme SAYOUS, Greffier présent à l'appel des causes,

Philippe DARRACQ, en application des articles 805 et 907 du Code de Procédure Civile et à défaut d'opposition a tenu l'audience pour entendre les plaidoiries, en présence de Jeanne PELLEFIGUESet en a rendu compte à la Cour composée de :

Madame Jeanne PELLEFIGUES, Présidente

Monsieur Philippe DARRACQ, Conseiller

Madame Joëlle GUIROY, Conseillère

qui en ont délibéré conformément à la loi.

dans l'affaire opposant :

APPELANTE :

S.C.I. LES JARDINS DE BERRAIN

[Adresse 7]

[Localité 5]

Représentée par Me Antoine TUGAS de la SELARL TUGAS & BRUN, avocat au barreau de DAX

INTIMEES :

S.E.L.A.R.L. MJPA SELARL MJPA prise en la personne de Maître [C] [R] Es qualité de « Mandataire judiciaire » de la « SARL IRRINO »

[Adresse 1]

[Localité 3]

Assignée en intervention forcée

S.A.R.L. IRRINO

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Muriel GASSER, avocat au barreau de BAYONNE

sur appel de la décision

en date du 09 JANVIER 2024

rendue par le PRESIDENT DU TJ DE [Localité 6]

FAITS-PROCEDURE -PRETENTIONS et MOYENS DES PARTIES

Par acte sous seing privé du 1er juin 2019, la SCI les jardins de Berrain a donné à bail commercial à la société Irrino (sarl) divers locaux sis à Saint Jean de Luz, moyennant un loyer annuel de 60.000 euros HT.

Le 7 août 2023, la bailleresse a fait délivrer un commandement de payer, visant la clause résolutoire, la somme de 72.301,85 euros au titre des loyers et charges.

Suivant exploit du 20 septembre 2023, la SCI les jardins de Berrain a fait assigner la société Irrino par devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Bayonne en constatation de la résiliation du bail, expulsion et provision.

Par ordonnance du 9 janvier 2024, le juge des référés a :

- débouté la SCI les jardins de Berrain de l'ensemble de ses demandes

- débouté la société Irrino de l'ensemble de ses demandes

- condamné la SCI les jardins de Berrain aux dépens.

Par déclaration faite au greffe de la cour le 24 janvier 2024, la SCI les jardins de Berrain a relevé appel de cette ordonnance.

La société Irrino a fait été placée en liquidation judiciaire suivant jugement du tribunal de commerce de Bayonne en date du 15 avril 2024.

Suivant exploit du 26 juillet 2024, la SCI les jardins de Berrain a fait assigner en intervention forcée la selarl MJPA, prise en la personne de Me [R], en qualité de liquidateur judiciaire de la société Irrino.

La selarl MJPA ès qualitès, assignée à personne, n'a pas constitué avocat.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 14 mai 2025.

***

Vu les dernières conclusions notifiées le 20 février 2024 par la SCI les jardins de Berrain qui a demandé à la cour d'infirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle l'a déboutée de ses demandes et condamnée aux dépens, et statuant à nouveau, de :

- constater l'acquisition de la clause résolutoire avec effet a compter du 7 septembre 2023 du bail liant les parties

- dire et juger qu'a compter du 7 septembre 2023, la société Irrino est devenue occupante sans droit ni titre du local commercial loué

- ordonner, à défaut de libération volontaire des lieux dans un délai de 30 jours a compter

de la décision a intervenir, l'expulsion de la société Irrino et de tous occupants, au besoin

avec le concours de la force publique, des locaux commerciaux loués

- l'autoriser, à defaut de départ volontaire, à faire procéder a la séquestration des objets mobiliers présents dans les locaux , conformément aux dispositions des articles L 433-1 du code des procédures civiles d'exécution, avec, au besoin, l'assistance de la force publique.

- condamner la société Irrino à lui payer une provision de 87 064,42 euros au titre des loyers échus et impayés, taxes foncières, factures d'eau, de gaz et électricité, selon décompte arrete au 5 janvier 2024 inclus, outre intérêts,

- fixer l'indemnité d'occupation due par la société Irrino à la date de résiliation du bail

jusqu'au départ effectif des lieux au montant du loyer mensuel courant (3600 euros/mois), et condamner en tant que de besoin la société Irrino au paiement de cette indemnité jusqu'à la libération effective et complète des locaux et la restitution des clés

- débouter la société Irrino de l'ensemble de ses demandes, 'ns et prétentions

- condamner la société Irrino à lui payer la somme de 3000 euros an titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de première instance, en ce compris le coût du commandement de payer ainsi qu'aux entiers dépens en cause d'appel.

Vu l'assignation en intervention forcée de la selarl MJPA ès qualités délivrée le 26 juillet 2024 par la SCI les jardins de Berrain qui a demandé à la cour de :

- constater l'acquisition de la clause résolutoire avec effet a compter du 7 septembre 2023 du bail liant les parties

- dire et juger qu'a compter du 7 septembre 2023, la société Irrino est devenue occupante sans droit ni titre du local commercial loué

- ordonner, à défaut de libération volontaire des lieux dans un délai de 30 jours a compter

de la décision a intervenir, l'expulsion de la société Irrino et de tous occupants, au besoin

avec le concours de la force publique, des locaux commerciaux loués

- l'autoriser, à defaut de départ volontaire, à faire procéder a la séquestration des objets mobiliers présents dans les locaux , conformément aux dispositions des articles L 433-1 du code des procédures civiles d'exécution, avec, au besoin, l'assistance de la force publique.

- condamner la selarl MJPA ès qualités à lui payer une provision de 109.329,31 euros au titre des loyers échus et impayés, taxes foncières, factures d'eau, de gaz et électricité, selon décompte arrete au 5 janvier 2024 inclus, outre intérêts

- fixer l'indemnité d'occupation due par la société Irrino à la date de résiliation du bail

jusqu'au départ effectif des lieux au montant du loyer mensuel courant (3600 euros/mois), et condamner en tant que de besoin la selarl MJPA ès qualités au paiement de cette indemnité jusqu'à la libération effective et complète des locaux et la restitution des clés

- débouter la société Irrino et la selarl MJPA ès qualités de l'ensemble de ses demandes, 'ns et prétentions

- condamner selarl MJPA ès qualités à lui payer la somme de 3000 euros an titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de première instance, en ce compris le coût du commandement de payer ainsi qu'aux entiers dépens en cause d'appel.

* Vu les dernières conclusions notifiées le 18 mars 2024 par la société Irrino qui a demandé à la cour de :

A TITRE PRINCIPAL :

- confirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a débouté la SCI les jardins de Berrain de l'ensemble de ses demandes et l'a condamnée aux dépens

SUR APPEL RECONVENTIONNEL :

- infirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle l'a déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive, de sa demande de dommages et intérêts en réparation des préjudices subis et de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,

et, statuant à nouveau, de :

- condamner la SCI les jardins de Berrain à lui payer la provision de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive

- condamner la SCI les jardins de Berrain à lui payer la provision de 26.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices subis

- condamner la SCI les jardins de Berrain à lui payer la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

A TITRE SUBSIDIAIRE :

- prononcer la suspension des effets de la clause résolutoire

- lui accorder des délais de paiement sur une période de 2 ans au sujet de la dette des charges.

MOTIFS

La selarl MJPA ès qualités ayant été assignée à personne, le présent arrêt sera réputé contradictoire.

Par ailleurs, le jugement d'ouverture de la liquidation judiciaire de la société Irrino prononcé le 19 avril 2024 a produit des effets légaux dont il faut tirer les conséquences juridiques sur l'évolution du litige en appel.

sur la constatation de la clause résolutoire

Il résulte des dispositions de l'article L622-21 du code de commerce, applicable à la liquidation judiciaire en vertu de l'article L641-3 du même code, que le jugement d'ouverture interrompt ou interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance n'est pas mentionnée au I de l'article L622-17 et tendant à la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent ou à la résolution d'un contrat pour défaut de paiement d'une somme d'argent.

Il s'ensuit que l'action introduite par le bailleur, avant le jugement d'ouverture de la liquidation judiciaire du preneur, en vue de faire constater l'acquisition de la clause résolutoire pour défaut de paiement des loyers ou des charges échus antérieurement au jugement d'ouverture de la procédure ne peut, dès lors qu'elle n'a donné lieu à aucune décision passée en force de chose jugée, être poursuivie après ce jugement qui suspend les effets du commandement de payer visant la clause résolutoire ainsi que ceux, le cas échéant, de la décision non passée en force de chose jugée, serait-elle exécutoire par provision, constatant la résiliation du bail.

En l'espèce, il est constant que l'action en constatation de la résiliation du bail est exclusivement fondée sur le défaut de paiement des loyers et charges dus en vertu du bail.

Par conséquent, infirmant l'ordonnance entreprise, il sera dit n'y avoir lieu à référé et la bailleresse sera déboutée de sa demande de constatation de la résiliation du bail.

sur la demande de provision

En droit, l'instance en cours, qui aux termes de l'article L622-22 du code de commerce est interrompue jusqu'à ce que le créancier poursuivant ait procédé à la déclaration de sa créance, est celle qui tend à obtenir de la juridiction saisie du principal une décision définitive sur l'existence et le montant de cette créance.

Tel n'est pas le cas de l'instance en référé, qui tend à obtenir une condamnation provisionnelle de sorte que la créance faisant l'objet d'une telle instance doit être soumise à la procédure de vérification des créances et à la décision du juge-commissaire.

S'agissant de la dette locative due à la date du jugement d'ouverture de la liquidation judiciaire, déclarée au passif pour la somme de 109.329,31 euros, il sera dit n'y avoir lieu à référé et la bailleresse sera déboutée de sa demande de provision.

La SCI les jardins de Berrain sera invitée à suivre la procédure de vérification des créances au titre de sa créance locative antérieure au jugement d'ouverture.

S'agissant de la dette locative postérieure au jugement d'ouverture de la liquidation judiciaire, la société Irrino est tenue de payer à leurs échéances les loyers et charges en exécution du bail dont la poursuite est utile à la liquidation judiciaire.

Cependant, la SCI les jardins de Berrain n'a pas saisi la cour d'une demande de paiement provisionnel des loyers et charges postérieurs, mais seulement d'indemnités d'occupation provisionnelles, lesquelles ne sont pas dues dès lors que la résiliation du bail n'a pas été constatée.

La société SCI les jardins de Berrain sera déboutée de sa demande d'indemnités d'occupation provisionnelle.

sur les demandes indemnitaires de la société Irrino

Le jugement d'ouverture de la liquidation judiciaire a dessaisi la société Irrino de l'exercice de ses droits patrimoniaux au profit du liquidateur judiciaire, en application de l'article L641-9 du code de commerce.

La selarl MJPA ès qualités n'ayant pas entendu poursuivre les actions indemnitaires engagées par la société Irrino, celle-ci sera déclarée irrecevables en ses demandes de dommages et intérêts.

Chaque partie conservera à sa charge ses dépens d'appel et de première instance.

Les parties seront déboutées de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile

PAR CES MOTIFS

La cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort,

CONSTATE que la société Irrino a été placée en liquidation judiciaire suivant jugement du 19 avril 2024,

CONSTATE que la SCI les jardins de Berrain ne peut plus poursuivre la constatation de la résiliation du bail ni le paiement provisionnel de sa créance locative antérieure au jugement de liquidation judiciaire,

INFIRME l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions,

et statuant à nouveau,

DIT n'y avoir lieu à référé sur la constatation de la résiliation du bail et la demande de provision,

DEBOUTE la SCI les jardins de Berrain de sa demande de constatation de la résiliation du bail liant les parties et de provision à valoir sur la créance locative antérieure au jugement de liquidation judiciaire,

INVITE la SCI les jardins de Berrain à suivre la procédure de vérification des créances au titre de sa créance de loyers et charges antérieurs au jugement d'ouverture,

DEBOUTE la SCI les jardins de Berrain de sa demande d'indemnités d'occupation provisionnelle,

DECLARE irrecevables les demandes de dommages et intérêts formées par la société Irrino,

DIT que les parties conserveront à leur charge leurs dépens de première instance et d'appel,

DEBOUTE les parties de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile,

Le présent arrêt a été signé par Monsieur DARRACQ, Conseiller suite à l'empêchement de Madame PELLEFIGUES, Président, et par Madame Catherine SAYOUS, greffier suivant les dispositions de l'article 456 du Code de Procédure Civile.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

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