CA Lyon, 3e ch. a, 24 juillet 2025, n° 24/07410
LYON
Arrêt
Autre
N° RG 24/07410 - N° Portalis DBVX-V-B7I-P5C3
Décision du
Tribunal de Commerce de LYON
Au fond
du 09 septembre 2024
RG : 2024f741
ch n°
[V]
C/
Société [F] [X]
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE LYON
3ème chambre A
ARRET DU 24 Juillet 2025
APPELANT :
Monsieur [P] [V],
né le [Date naissance 2] 1992 à [Localité 10],
de nationalité française
demeurant [Adresse 5]
[Localité 1]
Représenté par Me Wendkouni Lydie SOALLA, avocat au barreau de LYON, toque : 2198
INTIMEE :
La SELARL [F] [X],
représentée par Maître [F] [X], mandataire judiciaire, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société [14], société par actions simplifiée immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de LYON sous le numéro 812 784 676, dont le siège social est sis [Adresse 3], nommée à
cette fonction par jugement du Tribunal de Commerce de LYON en date du 19 juillet 2023.
sis [Adresse 8]
([Localité 6]
Représentée par Me Romain LAFFLY de la SELARL LX LYON, avocat au barreau de LYON, toque : 938
******
Date de clôture de l'instruction : 20 Mai 2025
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 05 Juin 2025
Date de mise à disposition : 24 Juillet 2025
Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :
- Sophie DUMURGIER, présidente
- Aurore JULLIEN, conseillère
- Viviane LE GALL, conseillère
assistées pendant les débats de Céline DESPLANCHES, greffière
En présence de Mme la Procureure Générale prise en la personne de Monsieur NAGABBO Olivier, avocat général près la Cour d'Appel de LYON.
A l'audience, un membre de la cour a fait le rapport,
Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Sophie DUMURGIER, présidente, et par Céline DESPLANCHES, greffiere, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
* * * *
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
La SASU [14], constituée le 28 juillet 2015, est présidée par son associé unique M. [P] [V] et a pour activité le transport de marchandises avec véhicule de moins de 3,5 tonnes, location de véhicule de tourisme et utilitaire sans chauffeur.
Sur saisine du [11], se prévalant d'une créance en droits de 430 386 euros et en pénalités de 139 949 euros, le tribunal de commerce de Lyon a, par jugement rendu le 19 juillet 2023, prononcé la liquidation judiciaire de la société [14], fixé provisoirement la date de cessation des paiements au 19 janvier 2022 et désigné la SELARL [F] [X], représentée par Me [F] [X], en qualité de liquidateur judiciaire.
Par acte du 9 février 2024, la SELARL [F] [X], ès qualités, a fait assigner M. [V] devant le tribunal de commerce de Lyon afin de voir prononcer à son encontre une mesure de faillite personnelle ou à défaut une interdiction de gérer.
Par jugement réputé contradictoire du 9 septembre 2024, le tribunal de commerce de Lyon a :
- prononcé à l'encontre de M. [P] [V], né le [Date naissance 2] 1992 à [Localité 10] (Tunisie), une faillite personnelle de dix ans,
- ordonné l'exécution provisoire de la présente décision,
- rappelé qu'en application des articles L.128-1 et suivants et R.128-1 et suivants du code de commerce, les condamnations prononcées sur le fondement du livre VI du code de commerce doivent faire l'objet d'une inscription au Fichier national des interdits de gérer, dont la tenue est assurée par le Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce,
- dit que les dépens sont tirés en frais privilégiés de la procédure.
'
Par déclaration reçue au greffe le 25 septembre 2024, M. [V] a interjeté appel de ce jugement portant sur l'ensemble des chefs de la décision expressément critiqués, à l'exclusion de celui afférent aux dépens, en intimant la SELARL [9], ès qualités.
Au terme de conclusions notifiées par voie dématérialisée le 23 décembre 2024, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens au soutien de ses prétentions, l'appelant demande à la cour, au visa de l'article L.653-5 du code de commerce, de :
- infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Lyon en date du 9 septembre 2024, en ce qu'il a :
' prononcé à l'encontre de M. [P] [V], né le [Date naissance 2] 1992 à [Localité 10] (Tunisie), une faillite personnelle de dix ans,
' ordonné l'exécution provisoire de la présente décision,
' rappelé qu'en application des articles L.128-1 et suivants et R.128-1 et suivants du code de commerce, les condamnations prononcées sur le fondement du livre VI du code de commerce doivent faire l'objet d'une inscription au Fichier national des interdits de gérer, dont la tenue est assurée par le Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce,
Et, statuant à nouveau :
A titre principal,
- juger n'y avoir lieu au prononcé d'une interdiction de gérer ou de toute autre sanction personnelle à son encontre,
A titre subsidiaire,
- juger, dans l'hypothèse où une sanction serait retenue à son encontre, que celle-ci sera limitée à une durée d'une année à compter du jugement du tribunal de commerce de Lyon du 9 septembre 2024,
En tout état de cause,
- condamner la SELARL [F] [X], représentée par Me [F] [X], ès qualités, au paiement de la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la SELARL [F] [X], représentée par Me [F] [X], ès qualités, aux entiers dépens de l'instance.
Au terme de conclusions notifiées par voie dématérialisée le 24 février 2025, la SELARL [F] [X], représentée par Me [F] [X], ès qualités, demande à la cour, au visa des articles L. 653-2, L. 653-5, L.653 -8 et L. 654-15 du code de commerce, de :
- juger la SELARL [F] [X], représentée par Me [F] [X], en qualité de liquidateur judiciaire de la société [14], nommée à cette fonction par jugement du tribunal de commerce de Lyon du 19 juillet 2023, recevable et bien fondée en ses demandes, fins et conclusions,
- juger que M. [V] :
' a fait obstacle au bon déroulement de la procédure collective en s'abstenant volontairement de coopérer avec Me [X], ès qualités,
' n'a remis aucun document comptable à Me [X], ès qualités, emportant présomption de défaut de tenue de comptabilité,
' a omis sciemment de déclarer la cessation des paiements dans le délai de 45 jours,
- juger que M. [V] continue d'exercer un mandat social en violation de la mesure de faillite personnelle prononcée à son encontre par le jugement du tribunal de commerce de Lyon du 9 septembre 2024,
En conséquence,
A titre principal :
- confirmer le jugement du tribunal de commerce de Lyon du 9 septembre 2024 en toutes ses dispositions et notamment en ce qu'il a prononcé à l'encontre de M. [V] une mesure de faillite personnelle d'une durée de dix ans,
A titre subsidiaire, si par extraordinaire, la cour réformait le jugement dont appel,
- prononcer à l'encontre de M. [V] une mesure de faillite personnelle, ou à défaut, d'interdiction de gérer, de huit à dix ans,
En toute hypothèse,
- condamner M. [V] à lui verser, ès qualités, la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
Le ministère public, par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 19 mai 2025, a requis la confirmation du jugement déféré qui prononce la condamnation de M. [V] à une mesure de faillite personnelle pour dix ans avec exécution provisoire.
La procédure a été clôturée par ordonnance du 20 mai 2025, les débats étant fixés au 5 juin 2025.
MOTIFS DE LA DÉCISION
A titre liminaire, la cour relève que les demandes de la société intimée qui tendent à ce qu'elle « juge que », qui ne font que reprendre des moyens, ne constituent pas des prétentions au sens de l'article 4 du code de procédure civile. En application de l'article 954 du code de procédure civile, il ne sera donc pas statué sur ces demandes.
Sur les fautes de gestion reprochées au dirigeant
Selon l'article L.653-5 du code de commerce , « Le tribunal peut prononcer la faillite personnelle de toute personne mentionnée à l'article L. 653-1 contre laquelle a été relevé l'un des faits ci-après :
1° Avoir exercé une activité commerciale, artisanale ou agricole ou une fonction de direction ou d'administration d'une personne morale contrairement à une interdiction prévue par la loi ;
2° Avoir, dans l'intention d'éviter ou de retarder l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire, fait des achats en vue d'une revente au-dessous du cours ou employé des moyens ruineux pour se procurer des fonds ;
3° Avoir souscrit, pour le compte d'autrui, sans contrepartie, des engagements jugés trop importants au moment de leur conclusion, eu égard à la situation de l'entreprise ou de la personne morale ;
4° Avoir payé ou fait payer, après cessation des paiements et en connaissance de cause de celle-ci, un créancier au préjudice des autres créanciers ;
5° Avoir, en s'abstenant volontairement de coopérer avec les organes de la procédure, fait obstacle à son bon déroulement ;
6° Avoir fait disparaître des documents comptables, ne pas avoir tenu de comptabilité lorsque les textes applicables en font obligation, ou avoir tenu une comptabilité fictive, manifestement incomplète ou irrégulière au regard des dispositions applicables ;
7° Avoir déclaré sciemment, au nom d'un créancier, une créance supposée.»
En l'espèce, il n'est pas contesté que M. [V] est le dirigeant de la société [14].
Le jugement critiqué retient en premier lieu que M. [V] s'est volontairement abstenu de coopérer avec les organes de la procédure, faisant ainsi obstacle à son bon déroulement, en relevant qu'il ne s'est pas présenté aux convocations qui lui ont été adressées.
Pour conclure à l'infirmation du jugement, l'appelant prétend qu'il ne s'est pas désintéressé de la procédure de liquidation judiciaire ouverte à l'égard de la société qu'il dirigeait, mais qu'il s'est trouvé dans une situation personnelle très difficile à la suite de l'ouverture de cette procédure, son épouse, enceinte de jumeaux, ayant d'importants problèmes de santé.
Il fait valoir qu'il devait à cette époque s'occuper de son fils âgé de 18 mois et de son épouse fréquemment hospitalisée, et que, par la suite, ses jumeaux sont nés le [Date naissance 4] 2023 et ont rencontré d'importants problèmes de santé nécessitant leur hospitalisation.
Il précise qu'il était le seul soutien financier de la famille et affirme que son défaut de comparution à l'audience devant le tribunal de commerce, tout comme son absence de réponse aux convocations et demandes du liquidateur judiciaire, ne caractérisent pas un refus de sa part de collaborer avec les organes de la procédure, s'agissant simplement d'un concours de circonstances indépendantes de sa volonté qui l'ont rendu incapable de donner suite aux sollicitations du mandataire ( sic ).
Il ajoute que, depuis lors, il s'est rapproché de Me [X] en tenant à sa disposition l'ensemble des documents concernant la société [14], nécessaires aux opérations de liquidation judiciaire.
Le liquidateur judiciaire approuve le tribunal en ce qu'il a jugé que la faute prévue par l'article L. 653-5 5° est caractérisée, faisant valoir que M. [V] ne s'est jamais présenté à son étude, en dépit de la réception de la convocation qu'il lui avait adressée, cette attitude s'analysant comme un véritable obstacle à l'exercice de sa mission, préjudiciable au bon déroulement de la procédure.
Il considère que les difficultés dont se prévaut l'appelant pour justifier de son absence de collaboration ne sont pas sérieuses, aucun justificatif relatif à l'état de santé de son épouse et de ses enfants n'étant versé aux débats, que contrairement à ce que laisse entendre M. [V], il ne lui est pas reproché un manque de célérité dans ses réponses à ses sollicitations, mais une absence totale de coopération avec les organes de la procédure.
Il ajoute que l'intéressé avait adopté la même attitude lors de la procédure de vérification de comptabilité et qu'il n'avait pas réagi aux envois recommandés, mises en demeure et assignation de l'administration fiscale.
M. [V] ne conteste pas ne pas avoir répondu à la convocation du liquidateur judiciaire ni aux demandes de ce dernier, mais conteste avoir refusé de coopérer avec les organes de la procédure, en expliquant son absence de réponse aux sollicitations de la société intimée par des difficultés familiales dont il ne justifie aucunement et qui, en tout état de cause, ne pouvaient le dispenser de satisfaire à son obligation de coopération avec les organes de la procédure collective.
Il ne justifie pas par ailleurs avoir transmis les documents nécessaires aux opérations de liquidation qui lui avaient été demandés, comme il affirme l'avoir fait, ce qui est contesté par la SELARL [9], ès qualités, et l'absence de collaboration du dirigeant a ainsi entravé inutilement le bon déroulement des opérations.
La première faute de gestion retenue par le tribunal est donc caractérisée.
Le jugement déféré retient, en second lieu, que l'absence de remise par le dirigeant de la comptabilité de son entreprise au mandataire démontre sa carence dans la gestion administrative et comptable de son entreprise.
M. [V] explique que les circonstances précitées sont l'unique cause de l'absence de remise de la comptabilité de la société au liquidateur, en faisant valoir que, depuis sa création, la société [14] a toujours fait établir, déposer et publier ses comptes annuels par son expert-comptable, le cabinet [13] qui était chargé de l'ensemble des déclarations fiscales, sociales et juridiques de l'entreprise.
Il indique que, par mail du 20 décembre 2019, son expert-comptable a annoncé de manière brutale à l'ensemble de ses clients son départ du cabinet [13] et que son successeur n'a jamais repris la comptabilité de la société [14], le cabinet d'expertise comptable l'informant ensuite que la comptabilité de la société serait désormais tenue par le cabinet [7], qui n'a jamais établi les comptes des exercices 2019 à 2022.
Il soutient que c'est dans ce contexte que l'établissement des comptes de la société n'a pas pu être réalisé jusqu'à l'ouverture de la procédure collective.
La société intimée rappelle que la non remise de comptabilité est analysée comme valant présomption de non tenue de comptabilité régulière et relève que l'appelant reconnaît qu'il ne lui a pas communiqué la comptabilité de la société [14].
Elle ajoute qu'en raison de cette carence, elle ignorait quel était le comptable en charge d'établir les comptes et si ceux-ci avaient effectivement été établis.
Elle précise qu'une recherche sur les sites Bodacc et Pappers lui a permis de vérifier que les comptes sociaux ont été déposés pour les exercices 2015 à 2018, mais qu'ils n'étaient pas consultables.
Elle affirme que la comptabilité n'a manifestement plus été tenue depuis 2019, ce qui est corroboré par la proposition de rectification fiscale adressée le 5 juillet 2022 à la société, à la suite de la vérification de comptabilité portant sur les exercices 2019 et 2020, un double défaut de présentation de comptabilité ayant été établi à l'occasion de cette vérification.
Elle relève, qu'en cause d'appel, M. [V] ne verse toujours aucune comptabilité et que les prétendus dysfonctionnements de cabinets d'expertise-comptable qu'il invoque ne sont établis par aucune pièce, en rappelant que la tenue de comptabilité est une obligation qui pèse sur le seul dirigeant.
Les pièces que produit l'appelant ne sont pas des pièces comptables et si les extraits du Bodacc qu'il verse aux débats établissent que les comptes annuels de la société [14] des exercices 2015 à 2018 ont été déposés au greffe du tribunal de commerce de Lyon, à hauteur d'appel, M. [V] n'est toujours pas en mesure de produire les comptes annuels des exercices 2019 à 2022.
La proposition de rectification qui lui a été notifiée le 5 juillet 2022 par l'administration fiscale, à la suite d'une vérification de comptabilité, confirme le défaut de présentation de comptabilité papier ou informatisée des exercices 2019 et 2020.
Or, la tenue de comptes annuels est une obligation imposée par l'article L.123-12 du code de commerce et la jurisprudence considère que le défaut de tenue de comptabilité caractérise une faute de gestion, la non remise de la comptabilité au liquidateur valant présomption de non tenue de comptabilité régulière.
Il est par ailleurs constant en l'espèce que le défaut de tenue de comptabilité reproché au dirigeant social a été commis antérieurement au jugement d'ouverture.
En sa qualité de président de la société, M. [V] est le seul responsable de ces irrégularités et ne saurait se retrancher derrière la prétendue défaillance du cabinet d'expertise-comptable qu'il avait mandaté pour s'exonérer.
Ce manquement caractérisé de M. [V], au regard de sa durée et de ses conséquences sur l'aggravation du passif s'élevant à 921 633,83 euros, ne relève pas d'une simple négligence mais d'une volonté délibéré du dirigeant de ne pas assumer les obligations relevant de sa gestion de droit et il est donc constitutif d'une faute de gestion comme l'a retenu le tribunal.
Les deux fautes de gestion imputables à M. [V] justifiant le prononcé d'une faillite personnelle, il est inutile d'examiner si la troisième faute qui lui est reprochée, d'avoir omis sciemment de demander l'ouverture d'une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire dans le délai de 45 jours à compter de la cessation des paiements, est caractérisée, cette faute ne pouvant être sanctionnée que par une interdiction de gérer.
Sur la sanction prononcée
M. [V] considère que la sanction prononcée par les premiers juges est disproportionnée au regard de la gravité des griefs invoqués par le liquidateur.
Il fait valoir qu'il a 32 ans, qu'il est père de trois enfants et qu'il est le seul soutien financier de sa famille, qu'il a toujours souhaité créer une entreprise dans le secteur du transport dans lequel il a de l'expérience et qu'il n'avait jamais fait l'objet d'une procédure collective, s'étant toujours entouré de professionnels pour l'aider dans la gestion juridique et comptable de sa société.
La SELARL [9], ès qualités, estime que la sanction prononcée est adaptée en faisant valoir, qu'en dépit de la mesure de faillite personnelle prononcée à son encontre, avec exécution provisoire, l'appelant a conservé son mandat social de la société [12], qui a un objet social en tous points similaires à celui de la société [14] et qui a été constituée le 12 mai 2023, alors que la société [14] était déjà en état de cessation des paiements, ce qui laisse envisager un éventuel détournement des actifs ou activité de cette dernière.
La nature des manquements reprochés au dirigeant et leur répétition, mais également le montant de l'insuffisance d'actif auquel ces manquements ont contribué, démontrent les carences de celui-ci dans la gestion d'une société et justifient le prononcé d'une faillite personnelle pour le tenir éloigné de la vie des affaires.
Au regard de la gravité des fautes commises et de la situation de M. [V], la faillite personnelle pour une durée de dix années prononcée par les premiers juges est proportionnée et mérite d'être confirmée.
Sur les dépens et les frais de procédure
M. [V] qui succombe en ses prétentions supportera la charge des dépens d'appel.
Il est par ailleurs équitable de mettre à sa charge une partie des frais de procédure exposés en appel par la société intimée et non compris dans les dépens.
Il sera ainsi condamné à lui verser, ès qualités, la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Confirme en toutes ses dispositions soumises à la cour le jugement rendu le 9 septembre 2024 par le tribunal de commerce de Lyon,
Y ajoutant,
Condamne M. [P] [V] aux dépens d'appel,
Condamne M. [V] à payer à la SELARL [9], ès qualités, la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
La greffière La présidente
Décision du
Tribunal de Commerce de LYON
Au fond
du 09 septembre 2024
RG : 2024f741
ch n°
[V]
C/
Société [F] [X]
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE LYON
3ème chambre A
ARRET DU 24 Juillet 2025
APPELANT :
Monsieur [P] [V],
né le [Date naissance 2] 1992 à [Localité 10],
de nationalité française
demeurant [Adresse 5]
[Localité 1]
Représenté par Me Wendkouni Lydie SOALLA, avocat au barreau de LYON, toque : 2198
INTIMEE :
La SELARL [F] [X],
représentée par Maître [F] [X], mandataire judiciaire, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société [14], société par actions simplifiée immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de LYON sous le numéro 812 784 676, dont le siège social est sis [Adresse 3], nommée à
cette fonction par jugement du Tribunal de Commerce de LYON en date du 19 juillet 2023.
sis [Adresse 8]
([Localité 6]
Représentée par Me Romain LAFFLY de la SELARL LX LYON, avocat au barreau de LYON, toque : 938
******
Date de clôture de l'instruction : 20 Mai 2025
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 05 Juin 2025
Date de mise à disposition : 24 Juillet 2025
Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :
- Sophie DUMURGIER, présidente
- Aurore JULLIEN, conseillère
- Viviane LE GALL, conseillère
assistées pendant les débats de Céline DESPLANCHES, greffière
En présence de Mme la Procureure Générale prise en la personne de Monsieur NAGABBO Olivier, avocat général près la Cour d'Appel de LYON.
A l'audience, un membre de la cour a fait le rapport,
Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Sophie DUMURGIER, présidente, et par Céline DESPLANCHES, greffiere, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
* * * *
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
La SASU [14], constituée le 28 juillet 2015, est présidée par son associé unique M. [P] [V] et a pour activité le transport de marchandises avec véhicule de moins de 3,5 tonnes, location de véhicule de tourisme et utilitaire sans chauffeur.
Sur saisine du [11], se prévalant d'une créance en droits de 430 386 euros et en pénalités de 139 949 euros, le tribunal de commerce de Lyon a, par jugement rendu le 19 juillet 2023, prononcé la liquidation judiciaire de la société [14], fixé provisoirement la date de cessation des paiements au 19 janvier 2022 et désigné la SELARL [F] [X], représentée par Me [F] [X], en qualité de liquidateur judiciaire.
Par acte du 9 février 2024, la SELARL [F] [X], ès qualités, a fait assigner M. [V] devant le tribunal de commerce de Lyon afin de voir prononcer à son encontre une mesure de faillite personnelle ou à défaut une interdiction de gérer.
Par jugement réputé contradictoire du 9 septembre 2024, le tribunal de commerce de Lyon a :
- prononcé à l'encontre de M. [P] [V], né le [Date naissance 2] 1992 à [Localité 10] (Tunisie), une faillite personnelle de dix ans,
- ordonné l'exécution provisoire de la présente décision,
- rappelé qu'en application des articles L.128-1 et suivants et R.128-1 et suivants du code de commerce, les condamnations prononcées sur le fondement du livre VI du code de commerce doivent faire l'objet d'une inscription au Fichier national des interdits de gérer, dont la tenue est assurée par le Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce,
- dit que les dépens sont tirés en frais privilégiés de la procédure.
'
Par déclaration reçue au greffe le 25 septembre 2024, M. [V] a interjeté appel de ce jugement portant sur l'ensemble des chefs de la décision expressément critiqués, à l'exclusion de celui afférent aux dépens, en intimant la SELARL [9], ès qualités.
Au terme de conclusions notifiées par voie dématérialisée le 23 décembre 2024, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens au soutien de ses prétentions, l'appelant demande à la cour, au visa de l'article L.653-5 du code de commerce, de :
- infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Lyon en date du 9 septembre 2024, en ce qu'il a :
' prononcé à l'encontre de M. [P] [V], né le [Date naissance 2] 1992 à [Localité 10] (Tunisie), une faillite personnelle de dix ans,
' ordonné l'exécution provisoire de la présente décision,
' rappelé qu'en application des articles L.128-1 et suivants et R.128-1 et suivants du code de commerce, les condamnations prononcées sur le fondement du livre VI du code de commerce doivent faire l'objet d'une inscription au Fichier national des interdits de gérer, dont la tenue est assurée par le Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce,
Et, statuant à nouveau :
A titre principal,
- juger n'y avoir lieu au prononcé d'une interdiction de gérer ou de toute autre sanction personnelle à son encontre,
A titre subsidiaire,
- juger, dans l'hypothèse où une sanction serait retenue à son encontre, que celle-ci sera limitée à une durée d'une année à compter du jugement du tribunal de commerce de Lyon du 9 septembre 2024,
En tout état de cause,
- condamner la SELARL [F] [X], représentée par Me [F] [X], ès qualités, au paiement de la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la SELARL [F] [X], représentée par Me [F] [X], ès qualités, aux entiers dépens de l'instance.
Au terme de conclusions notifiées par voie dématérialisée le 24 février 2025, la SELARL [F] [X], représentée par Me [F] [X], ès qualités, demande à la cour, au visa des articles L. 653-2, L. 653-5, L.653 -8 et L. 654-15 du code de commerce, de :
- juger la SELARL [F] [X], représentée par Me [F] [X], en qualité de liquidateur judiciaire de la société [14], nommée à cette fonction par jugement du tribunal de commerce de Lyon du 19 juillet 2023, recevable et bien fondée en ses demandes, fins et conclusions,
- juger que M. [V] :
' a fait obstacle au bon déroulement de la procédure collective en s'abstenant volontairement de coopérer avec Me [X], ès qualités,
' n'a remis aucun document comptable à Me [X], ès qualités, emportant présomption de défaut de tenue de comptabilité,
' a omis sciemment de déclarer la cessation des paiements dans le délai de 45 jours,
- juger que M. [V] continue d'exercer un mandat social en violation de la mesure de faillite personnelle prononcée à son encontre par le jugement du tribunal de commerce de Lyon du 9 septembre 2024,
En conséquence,
A titre principal :
- confirmer le jugement du tribunal de commerce de Lyon du 9 septembre 2024 en toutes ses dispositions et notamment en ce qu'il a prononcé à l'encontre de M. [V] une mesure de faillite personnelle d'une durée de dix ans,
A titre subsidiaire, si par extraordinaire, la cour réformait le jugement dont appel,
- prononcer à l'encontre de M. [V] une mesure de faillite personnelle, ou à défaut, d'interdiction de gérer, de huit à dix ans,
En toute hypothèse,
- condamner M. [V] à lui verser, ès qualités, la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
Le ministère public, par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 19 mai 2025, a requis la confirmation du jugement déféré qui prononce la condamnation de M. [V] à une mesure de faillite personnelle pour dix ans avec exécution provisoire.
La procédure a été clôturée par ordonnance du 20 mai 2025, les débats étant fixés au 5 juin 2025.
MOTIFS DE LA DÉCISION
A titre liminaire, la cour relève que les demandes de la société intimée qui tendent à ce qu'elle « juge que », qui ne font que reprendre des moyens, ne constituent pas des prétentions au sens de l'article 4 du code de procédure civile. En application de l'article 954 du code de procédure civile, il ne sera donc pas statué sur ces demandes.
Sur les fautes de gestion reprochées au dirigeant
Selon l'article L.653-5 du code de commerce , « Le tribunal peut prononcer la faillite personnelle de toute personne mentionnée à l'article L. 653-1 contre laquelle a été relevé l'un des faits ci-après :
1° Avoir exercé une activité commerciale, artisanale ou agricole ou une fonction de direction ou d'administration d'une personne morale contrairement à une interdiction prévue par la loi ;
2° Avoir, dans l'intention d'éviter ou de retarder l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire, fait des achats en vue d'une revente au-dessous du cours ou employé des moyens ruineux pour se procurer des fonds ;
3° Avoir souscrit, pour le compte d'autrui, sans contrepartie, des engagements jugés trop importants au moment de leur conclusion, eu égard à la situation de l'entreprise ou de la personne morale ;
4° Avoir payé ou fait payer, après cessation des paiements et en connaissance de cause de celle-ci, un créancier au préjudice des autres créanciers ;
5° Avoir, en s'abstenant volontairement de coopérer avec les organes de la procédure, fait obstacle à son bon déroulement ;
6° Avoir fait disparaître des documents comptables, ne pas avoir tenu de comptabilité lorsque les textes applicables en font obligation, ou avoir tenu une comptabilité fictive, manifestement incomplète ou irrégulière au regard des dispositions applicables ;
7° Avoir déclaré sciemment, au nom d'un créancier, une créance supposée.»
En l'espèce, il n'est pas contesté que M. [V] est le dirigeant de la société [14].
Le jugement critiqué retient en premier lieu que M. [V] s'est volontairement abstenu de coopérer avec les organes de la procédure, faisant ainsi obstacle à son bon déroulement, en relevant qu'il ne s'est pas présenté aux convocations qui lui ont été adressées.
Pour conclure à l'infirmation du jugement, l'appelant prétend qu'il ne s'est pas désintéressé de la procédure de liquidation judiciaire ouverte à l'égard de la société qu'il dirigeait, mais qu'il s'est trouvé dans une situation personnelle très difficile à la suite de l'ouverture de cette procédure, son épouse, enceinte de jumeaux, ayant d'importants problèmes de santé.
Il fait valoir qu'il devait à cette époque s'occuper de son fils âgé de 18 mois et de son épouse fréquemment hospitalisée, et que, par la suite, ses jumeaux sont nés le [Date naissance 4] 2023 et ont rencontré d'importants problèmes de santé nécessitant leur hospitalisation.
Il précise qu'il était le seul soutien financier de la famille et affirme que son défaut de comparution à l'audience devant le tribunal de commerce, tout comme son absence de réponse aux convocations et demandes du liquidateur judiciaire, ne caractérisent pas un refus de sa part de collaborer avec les organes de la procédure, s'agissant simplement d'un concours de circonstances indépendantes de sa volonté qui l'ont rendu incapable de donner suite aux sollicitations du mandataire ( sic ).
Il ajoute que, depuis lors, il s'est rapproché de Me [X] en tenant à sa disposition l'ensemble des documents concernant la société [14], nécessaires aux opérations de liquidation judiciaire.
Le liquidateur judiciaire approuve le tribunal en ce qu'il a jugé que la faute prévue par l'article L. 653-5 5° est caractérisée, faisant valoir que M. [V] ne s'est jamais présenté à son étude, en dépit de la réception de la convocation qu'il lui avait adressée, cette attitude s'analysant comme un véritable obstacle à l'exercice de sa mission, préjudiciable au bon déroulement de la procédure.
Il considère que les difficultés dont se prévaut l'appelant pour justifier de son absence de collaboration ne sont pas sérieuses, aucun justificatif relatif à l'état de santé de son épouse et de ses enfants n'étant versé aux débats, que contrairement à ce que laisse entendre M. [V], il ne lui est pas reproché un manque de célérité dans ses réponses à ses sollicitations, mais une absence totale de coopération avec les organes de la procédure.
Il ajoute que l'intéressé avait adopté la même attitude lors de la procédure de vérification de comptabilité et qu'il n'avait pas réagi aux envois recommandés, mises en demeure et assignation de l'administration fiscale.
M. [V] ne conteste pas ne pas avoir répondu à la convocation du liquidateur judiciaire ni aux demandes de ce dernier, mais conteste avoir refusé de coopérer avec les organes de la procédure, en expliquant son absence de réponse aux sollicitations de la société intimée par des difficultés familiales dont il ne justifie aucunement et qui, en tout état de cause, ne pouvaient le dispenser de satisfaire à son obligation de coopération avec les organes de la procédure collective.
Il ne justifie pas par ailleurs avoir transmis les documents nécessaires aux opérations de liquidation qui lui avaient été demandés, comme il affirme l'avoir fait, ce qui est contesté par la SELARL [9], ès qualités, et l'absence de collaboration du dirigeant a ainsi entravé inutilement le bon déroulement des opérations.
La première faute de gestion retenue par le tribunal est donc caractérisée.
Le jugement déféré retient, en second lieu, que l'absence de remise par le dirigeant de la comptabilité de son entreprise au mandataire démontre sa carence dans la gestion administrative et comptable de son entreprise.
M. [V] explique que les circonstances précitées sont l'unique cause de l'absence de remise de la comptabilité de la société au liquidateur, en faisant valoir que, depuis sa création, la société [14] a toujours fait établir, déposer et publier ses comptes annuels par son expert-comptable, le cabinet [13] qui était chargé de l'ensemble des déclarations fiscales, sociales et juridiques de l'entreprise.
Il indique que, par mail du 20 décembre 2019, son expert-comptable a annoncé de manière brutale à l'ensemble de ses clients son départ du cabinet [13] et que son successeur n'a jamais repris la comptabilité de la société [14], le cabinet d'expertise comptable l'informant ensuite que la comptabilité de la société serait désormais tenue par le cabinet [7], qui n'a jamais établi les comptes des exercices 2019 à 2022.
Il soutient que c'est dans ce contexte que l'établissement des comptes de la société n'a pas pu être réalisé jusqu'à l'ouverture de la procédure collective.
La société intimée rappelle que la non remise de comptabilité est analysée comme valant présomption de non tenue de comptabilité régulière et relève que l'appelant reconnaît qu'il ne lui a pas communiqué la comptabilité de la société [14].
Elle ajoute qu'en raison de cette carence, elle ignorait quel était le comptable en charge d'établir les comptes et si ceux-ci avaient effectivement été établis.
Elle précise qu'une recherche sur les sites Bodacc et Pappers lui a permis de vérifier que les comptes sociaux ont été déposés pour les exercices 2015 à 2018, mais qu'ils n'étaient pas consultables.
Elle affirme que la comptabilité n'a manifestement plus été tenue depuis 2019, ce qui est corroboré par la proposition de rectification fiscale adressée le 5 juillet 2022 à la société, à la suite de la vérification de comptabilité portant sur les exercices 2019 et 2020, un double défaut de présentation de comptabilité ayant été établi à l'occasion de cette vérification.
Elle relève, qu'en cause d'appel, M. [V] ne verse toujours aucune comptabilité et que les prétendus dysfonctionnements de cabinets d'expertise-comptable qu'il invoque ne sont établis par aucune pièce, en rappelant que la tenue de comptabilité est une obligation qui pèse sur le seul dirigeant.
Les pièces que produit l'appelant ne sont pas des pièces comptables et si les extraits du Bodacc qu'il verse aux débats établissent que les comptes annuels de la société [14] des exercices 2015 à 2018 ont été déposés au greffe du tribunal de commerce de Lyon, à hauteur d'appel, M. [V] n'est toujours pas en mesure de produire les comptes annuels des exercices 2019 à 2022.
La proposition de rectification qui lui a été notifiée le 5 juillet 2022 par l'administration fiscale, à la suite d'une vérification de comptabilité, confirme le défaut de présentation de comptabilité papier ou informatisée des exercices 2019 et 2020.
Or, la tenue de comptes annuels est une obligation imposée par l'article L.123-12 du code de commerce et la jurisprudence considère que le défaut de tenue de comptabilité caractérise une faute de gestion, la non remise de la comptabilité au liquidateur valant présomption de non tenue de comptabilité régulière.
Il est par ailleurs constant en l'espèce que le défaut de tenue de comptabilité reproché au dirigeant social a été commis antérieurement au jugement d'ouverture.
En sa qualité de président de la société, M. [V] est le seul responsable de ces irrégularités et ne saurait se retrancher derrière la prétendue défaillance du cabinet d'expertise-comptable qu'il avait mandaté pour s'exonérer.
Ce manquement caractérisé de M. [V], au regard de sa durée et de ses conséquences sur l'aggravation du passif s'élevant à 921 633,83 euros, ne relève pas d'une simple négligence mais d'une volonté délibéré du dirigeant de ne pas assumer les obligations relevant de sa gestion de droit et il est donc constitutif d'une faute de gestion comme l'a retenu le tribunal.
Les deux fautes de gestion imputables à M. [V] justifiant le prononcé d'une faillite personnelle, il est inutile d'examiner si la troisième faute qui lui est reprochée, d'avoir omis sciemment de demander l'ouverture d'une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire dans le délai de 45 jours à compter de la cessation des paiements, est caractérisée, cette faute ne pouvant être sanctionnée que par une interdiction de gérer.
Sur la sanction prononcée
M. [V] considère que la sanction prononcée par les premiers juges est disproportionnée au regard de la gravité des griefs invoqués par le liquidateur.
Il fait valoir qu'il a 32 ans, qu'il est père de trois enfants et qu'il est le seul soutien financier de sa famille, qu'il a toujours souhaité créer une entreprise dans le secteur du transport dans lequel il a de l'expérience et qu'il n'avait jamais fait l'objet d'une procédure collective, s'étant toujours entouré de professionnels pour l'aider dans la gestion juridique et comptable de sa société.
La SELARL [9], ès qualités, estime que la sanction prononcée est adaptée en faisant valoir, qu'en dépit de la mesure de faillite personnelle prononcée à son encontre, avec exécution provisoire, l'appelant a conservé son mandat social de la société [12], qui a un objet social en tous points similaires à celui de la société [14] et qui a été constituée le 12 mai 2023, alors que la société [14] était déjà en état de cessation des paiements, ce qui laisse envisager un éventuel détournement des actifs ou activité de cette dernière.
La nature des manquements reprochés au dirigeant et leur répétition, mais également le montant de l'insuffisance d'actif auquel ces manquements ont contribué, démontrent les carences de celui-ci dans la gestion d'une société et justifient le prononcé d'une faillite personnelle pour le tenir éloigné de la vie des affaires.
Au regard de la gravité des fautes commises et de la situation de M. [V], la faillite personnelle pour une durée de dix années prononcée par les premiers juges est proportionnée et mérite d'être confirmée.
Sur les dépens et les frais de procédure
M. [V] qui succombe en ses prétentions supportera la charge des dépens d'appel.
Il est par ailleurs équitable de mettre à sa charge une partie des frais de procédure exposés en appel par la société intimée et non compris dans les dépens.
Il sera ainsi condamné à lui verser, ès qualités, la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Confirme en toutes ses dispositions soumises à la cour le jugement rendu le 9 septembre 2024 par le tribunal de commerce de Lyon,
Y ajoutant,
Condamne M. [P] [V] aux dépens d'appel,
Condamne M. [V] à payer à la SELARL [9], ès qualités, la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
La greffière La présidente