CA Pau, 2e ch - sect. 1, 28 juillet 2025, n° 23/03087
PAU
Arrêt
Autre
PhD/CS
Numéro 25/2268
COUR D'APPEL DE PAU
2ème CH - Section 1
ARRÊT DU 28 juillet 2025
Dossier : N° RG 23/03087 - N° Portalis DBVV-V-B7H-IWF4
Nature affaire :
Demande en paiement des loyers et charges et/ou tendant à la résiliation du bail et/ou à l'expulsion
Affaire :
S.C.I. ADELAIDE
C/
[V] [W] épouse [I]
Grosse délivrée le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
A R R Ê T
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 28 juillet 2025, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.
* * * * *
APRES DÉBATS
à l'audience publique tenue le 5 juin 2025, devant :
Philippe DARRACQ, magistrat chargé du rapport,
assisté de M. MAGESTE, greffier présent à l'appel des causes,
Philippe DARRACQ, en application des articles 805 et 907 du Code de Procédure Civile et à défaut d'opposition a tenu l'audience pour entendre les plaidoiries et en a rendu compte à la Cour composée de :
Madame PELLEFIGUES, Président
Monsieur DARRACQ, Conseiller
Madame BAYLAUCQ, Conseiller
qui en ont délibéré conformément à la loi.
dans l'affaire opposant :
APPELANTE :
S.C.I. ADELAIDE SCI ADELAIDE immatriculée au RCS de PAU sous le numéro 534 045 893 Au capital social de 1.000 euros ayant son siège social [Adresse 2]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Me Gilles LEFEBVRE, avocat au barreau de BAYONNE
INTIMEE :
Madame [V] [W] épouse [I]
née le 28 Avril 1965 à [Localité 4]
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Localité 3] / France
Représentée par Me Caroline BIOU, avocat au barreau de PAU
sur appel de la décision
en date du 24 OCTOBRE 2023
rendue par le TRIBUNAL DE COMMERCE DE PAU
FAITS-PROCEDURE -PRETENTIONS et MOYENS DES PARTIES
Mme [V] [H] et M. [O] [I], en liens sentimentaux depuis 2013, se sont mariés le 10 septembre 2016, sous le régime de la séparation de biens.
La SCI Adelaïde, constituée entre M. [I], gérant, (99,99 % du capital), et son fils, a mis à la disposition de Mme [H] des locaux sis à Pau pour l'exercice de son activité de salon de coiffure, sous le statut d'entrepreneur individuel à responsabilité limitée, à compter du 1er juillet 2015.
Par acte d'huissier du 22 mars 2022, la SCI Adelaïde a sommé Mme [H] de payer la somme principale de 37.900 euros représentant les loyers mensuels de 600 euros TTC impayés entre le 1er juillet 2015 et le 31 décembre 2021.
Par ordonnance du 16 mai 2022, le président du tribunal de commerce de Pau a enjoint à Mme [H] de payer la somme de 37.900 euros, outre les frais et dépens.
L'ordonnance a été signifiée le 25 mai 2022.
Mme [H] a formé opposition.
Par jugement du 30 mai 2023, le tribunal de commerce de Pau a rejeté l'exception d'incompétence matérielle soulevée par Mme [H] et constaté que les parties étaient liées par un bail de nature commerciale.
Ce jugement est passé en force de chose jugée.
Par jugement du 24 octobre 2023, le tribunal de commerce a :
- reçu Mme [H] en son opposition
- débouté la SCI Adélaïde de l'ensemble de ses demandes
- condamné la SCI Adélaïde à payer à Mme [H] la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile
- déboutée Mme [H] du surplus de ses demandes
- condamné la SCI Adélaïde aix dépens.
Par déclaration faite au greffe de la cour le 24 novembre 2023, la SCI Adélaïde a relevé appel de ce jugement.
La procédure a été clôturée par ordonnance du 09 mai 2025.
***
Vu les dernières conclusions notifiées le 21 mai 2024 par la SCI Adélaïde qui a demandé à la cour d'infirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris, et, statuant à nouveau, de :
- débouter Mme [H], artisan coiffeur, de ses demandes
- condamner Mme [H], artisan coiffeur, au paiement des arriérés de loyers pour un montant total de 37.900 euros, auquel s'ajoute la somme de 1.200 euros conformément à la signification portant sommation de payer en date du 24 mars 2022, ainsi que 339,69 euros de frais de procédure et de signification d'acte, soit une somme totale de 39.439,69 euros
- y ajouter les intérêts depuis la signification de l'injonction de payer du 25 mai 2022
- y ajouter la condamnation au paiement des loyers actualisés au jour de la décision à intervenir
- condamner Mme [H], artisan coiffeur, au paiement de la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.
Vu les dernières conclusions notifiées le 8 avril 2025 par Mme [H] qui a demandé à la cour de confirmer le jugement entrepris et, à titre subsidiaire, de :
- dire et juger irrecevables car prescrites toute demande de la SCI Adélaïde antérieure au 25 mai 2017
- en conséquence, débouter la SCI Adélaïde de la somme de 11.083,33 euros HT, soit 13.300 euros TTC correspondant aux loyers antérieures au 25 mai 2017
- condamner la SCI Adélaïde à lui payer la somme de 4.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
MOTIFS
Le jugement du tribunal de commerce du 30 mai 2023, statuant sur l'exception d'incompétence matérielle soulevée par Mme [H], a irrévocablement jugé que les parties étaient liées par un bail commercial verbal depuis le 1er juillet 2015.
Pour débouter la requérante de sa demande de paiement des loyers échus entre le 1er juillet 2015 et le 31 décembre 2021, le jugement rendu le 24 octobre 2023, a accueilli le moyen selon lequel la SCI Adélaïde a renoncé à sa créance locative mue par une intention libérale caractérisée par l'absence de toute réclamation pendant sept ans, jusqu'à la séparation du couple courant 2021, et la volonté de M. [I] d'aider alors financièrement sa compagne, devenue son épouse, en mettant à sa disposition ses locaux professionnels concomitamment à la résiliation de son bail intervenu en avril 2015 à l'initiative de son précédent bailleur pour défaut de paiement des loyers en lien avec ses difficultés financières, et en relevant que la sommation de payer du 22 mars 2022 précédait l'assignation en divorce délivrée par M. [I] le 27 avril 2022.
Mais, d'une part, en application de l'article 1353 du code civil, la SCI Adélaïde rapporte la preuve de l'obligation de payer les loyers en exécution du bail commercial verbal liant les parties à effet au 1er juillet 2015.
Il incombe donc à Mme [H], en application du même texte, de rapporter la preuve de sa libération, et, en l'espèce, de démontrer que la bailleresse a renoncé, dans une intention libérale, à sa créance locative née du bail commercial.
Cela posé, l'article 1378 du code civil dispose que les registres et documents que les professionnels doivent tenir ou établir ont, contre leur auteur, la même force probante que les écrits sous signature privée ; mais celui qui s'en prévaut ne peut en diviser les mentions pour n'en retenir que celles qui lui sont favorables.
En l'espèce, les loyers dus par Mme [H] à la SCI Adélaïde sont inscrits dans les bilans comptables des exercices clos au 31 décembre au titre de son activité de salon de coiffure, versés aux débats.
Et, l'attestation comptable établie par Mme [R], également comptable de Mme [H], certifie que la dette locative de Mme [H] est inscrite dans les comptes de la SCI Adélaïde pour un montant de 37.900 euros au 31 décembre 2021, divisée en deux périodes distinctes : 31.300 euros TTC dus jusqu'au 31 décembre 2019 et 6.600 euros TTC dus au titre des années 2020 et 2021.
Mme [H] a repris le paiement des loyers à compter du mois de janvier 2021, à une date contemporaine à la crise conjugale, le couple se séparant en octobre 2021.
Contrairement à ce que soutient Mme [H], l'inscription de la créance/dette locative dans les bilans des parties contredit toute remise de la dette locative, celle-ci devant se traduire par une charge pour le bailleur et un produit pour le locataire, étant ici observé que, sur le plan fiscal, l'abandon de créance, sans contrepartie, peut être fiscalement imposé à concurrence de 60 % à la charge, non pas du bailleur, mais du locataire bénéficiaire de l'avantage consenti.
Il se déduit des documents comptables versés aux débats, opposables entre les parties, que l'absence de réclamation des loyers pendant plusieurs années ne vaut pas renonciation de la bailleresse à sa créance, ce que Mme [H] a admis en inscrivant la dette locative dans ses propres comptes.
Par conséquent, Mme [H] ne peut s'exonérer de son obligation en invoquant une remise de dette consentie à titre de libéralité par la bailleresse.
sur la prescription de la demande
L'action en paiement des loyers commerciaux est soumise à la prescription quinquennale de l'article 2224 du code civil, sinon de l'article L110-4 du code de commerce, le tribunal de commerce ayant retenu, dans son jugement du 30 mai 2023, que Mme [H] était commerçante.
Mme [H] fait valoir à bon droit que le premier acte interruptif de la prescription de l'action en paiement des loyers antérieurs au 31 décembre 2021 résulte de la signification de l'ordonnance d'injonction de payer signifiée le 25 mai 2022.
Il s'ensuit que l'action en paiement des loyers échus avant le 25 mai 2017 est prescrite.
La SCI Adélaïde n'a pas conclu sur le moyen tiré de la prescription, ni contesté que sa créance était éteinte à concurrence de la somme de 13.300 euros.
Par conséquent, la demande en paiement sera déclarée irrecevable au titre des loyers antérieurs au 25 mai 2017.
Il ressort du décompte des loyers dus au 31 décembre 2021, non contesté pour le surplus par Mme [H], que la créance locative s'élève à la somme de : 37.900 - 13.300 = 24.600 euros.
Infirmant le jugement entrepris, Mme [H], entrepreneur individuel à responsabilité limitée, sera condamnée à payer cette somme à la SCI Adélaïde, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 25 mai 2022.
La SCI Adélaïde sera déboutée de sa demande de paiement de la somme complémentaire « de 1.200 euros conformément à la signification portant sommation de payer du 24 mars 2022 », cette somme n'ayant aucun fondement juridique et ne résultant pas de la sommation.
La SCI Adélaïde sera également déboutée de sa demande de « condamnation au paiement des loyers actualisés au jour de la décision à intervenir » dès lors que cette demande est abstraite et indéterminée.
La cour rappelle que, l'entrepreneur individuel à responsabilité limitée engage son patrimoine affecté à son activité selon la déclaration d'affectation prévue à l'article L526-7 du code de commerce, dans sa rédaction applicable à la date du choix du statut d'entrepreneur individuel fait par Mme [H].
Mme [H], entrepreneur individuel à responsabilité limitée, sera condamnée aux dépens de première instance, en ce compris le coût de la signification de l'ordonnance d'injonction de payer, et d'appel.
Les parties seront déboutées de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
INFIRME en toutes ses dispositions le jugement entrepris rendu le 24 octobre 2023,
et, statuant à nouveau,
DECLARE irrecevable comme prescrite la demande de paiement des loyers antérieurs au 25 mai 2017,
CONDAMNE Mme [H], entrepreneur individuel à responsabilité limitée, à payer à la SCI Adélaïde la somme de 24.600 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 25 mai 2022,
DEBOUTE la SCI Adélaïde du surplus de sa demande non prescrite,
CONDAMNE Mme [H], entrepreneur individuel à responsabilité limitée, aux dépens de première instance, en ce inclus le coût de la signification de l'ordonnance d'injonction de payer, et d'appel,
DEBOUTE les parties de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur DARRACQ, Conseiller suite à l'empêchement de Madame PELLEFIGUES, Présidente, et par Madame Catherine SAYOUS, greffier suivant les dispositions de l'article 456 du Code de Procédure Civile.
Le Greffier Le Président
Numéro 25/2268
COUR D'APPEL DE PAU
2ème CH - Section 1
ARRÊT DU 28 juillet 2025
Dossier : N° RG 23/03087 - N° Portalis DBVV-V-B7H-IWF4
Nature affaire :
Demande en paiement des loyers et charges et/ou tendant à la résiliation du bail et/ou à l'expulsion
Affaire :
S.C.I. ADELAIDE
C/
[V] [W] épouse [I]
Grosse délivrée le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
A R R Ê T
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 28 juillet 2025, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.
* * * * *
APRES DÉBATS
à l'audience publique tenue le 5 juin 2025, devant :
Philippe DARRACQ, magistrat chargé du rapport,
assisté de M. MAGESTE, greffier présent à l'appel des causes,
Philippe DARRACQ, en application des articles 805 et 907 du Code de Procédure Civile et à défaut d'opposition a tenu l'audience pour entendre les plaidoiries et en a rendu compte à la Cour composée de :
Madame PELLEFIGUES, Président
Monsieur DARRACQ, Conseiller
Madame BAYLAUCQ, Conseiller
qui en ont délibéré conformément à la loi.
dans l'affaire opposant :
APPELANTE :
S.C.I. ADELAIDE SCI ADELAIDE immatriculée au RCS de PAU sous le numéro 534 045 893 Au capital social de 1.000 euros ayant son siège social [Adresse 2]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Me Gilles LEFEBVRE, avocat au barreau de BAYONNE
INTIMEE :
Madame [V] [W] épouse [I]
née le 28 Avril 1965 à [Localité 4]
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Localité 3] / France
Représentée par Me Caroline BIOU, avocat au barreau de PAU
sur appel de la décision
en date du 24 OCTOBRE 2023
rendue par le TRIBUNAL DE COMMERCE DE PAU
FAITS-PROCEDURE -PRETENTIONS et MOYENS DES PARTIES
Mme [V] [H] et M. [O] [I], en liens sentimentaux depuis 2013, se sont mariés le 10 septembre 2016, sous le régime de la séparation de biens.
La SCI Adelaïde, constituée entre M. [I], gérant, (99,99 % du capital), et son fils, a mis à la disposition de Mme [H] des locaux sis à Pau pour l'exercice de son activité de salon de coiffure, sous le statut d'entrepreneur individuel à responsabilité limitée, à compter du 1er juillet 2015.
Par acte d'huissier du 22 mars 2022, la SCI Adelaïde a sommé Mme [H] de payer la somme principale de 37.900 euros représentant les loyers mensuels de 600 euros TTC impayés entre le 1er juillet 2015 et le 31 décembre 2021.
Par ordonnance du 16 mai 2022, le président du tribunal de commerce de Pau a enjoint à Mme [H] de payer la somme de 37.900 euros, outre les frais et dépens.
L'ordonnance a été signifiée le 25 mai 2022.
Mme [H] a formé opposition.
Par jugement du 30 mai 2023, le tribunal de commerce de Pau a rejeté l'exception d'incompétence matérielle soulevée par Mme [H] et constaté que les parties étaient liées par un bail de nature commerciale.
Ce jugement est passé en force de chose jugée.
Par jugement du 24 octobre 2023, le tribunal de commerce a :
- reçu Mme [H] en son opposition
- débouté la SCI Adélaïde de l'ensemble de ses demandes
- condamné la SCI Adélaïde à payer à Mme [H] la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile
- déboutée Mme [H] du surplus de ses demandes
- condamné la SCI Adélaïde aix dépens.
Par déclaration faite au greffe de la cour le 24 novembre 2023, la SCI Adélaïde a relevé appel de ce jugement.
La procédure a été clôturée par ordonnance du 09 mai 2025.
***
Vu les dernières conclusions notifiées le 21 mai 2024 par la SCI Adélaïde qui a demandé à la cour d'infirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris, et, statuant à nouveau, de :
- débouter Mme [H], artisan coiffeur, de ses demandes
- condamner Mme [H], artisan coiffeur, au paiement des arriérés de loyers pour un montant total de 37.900 euros, auquel s'ajoute la somme de 1.200 euros conformément à la signification portant sommation de payer en date du 24 mars 2022, ainsi que 339,69 euros de frais de procédure et de signification d'acte, soit une somme totale de 39.439,69 euros
- y ajouter les intérêts depuis la signification de l'injonction de payer du 25 mai 2022
- y ajouter la condamnation au paiement des loyers actualisés au jour de la décision à intervenir
- condamner Mme [H], artisan coiffeur, au paiement de la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.
Vu les dernières conclusions notifiées le 8 avril 2025 par Mme [H] qui a demandé à la cour de confirmer le jugement entrepris et, à titre subsidiaire, de :
- dire et juger irrecevables car prescrites toute demande de la SCI Adélaïde antérieure au 25 mai 2017
- en conséquence, débouter la SCI Adélaïde de la somme de 11.083,33 euros HT, soit 13.300 euros TTC correspondant aux loyers antérieures au 25 mai 2017
- condamner la SCI Adélaïde à lui payer la somme de 4.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
MOTIFS
Le jugement du tribunal de commerce du 30 mai 2023, statuant sur l'exception d'incompétence matérielle soulevée par Mme [H], a irrévocablement jugé que les parties étaient liées par un bail commercial verbal depuis le 1er juillet 2015.
Pour débouter la requérante de sa demande de paiement des loyers échus entre le 1er juillet 2015 et le 31 décembre 2021, le jugement rendu le 24 octobre 2023, a accueilli le moyen selon lequel la SCI Adélaïde a renoncé à sa créance locative mue par une intention libérale caractérisée par l'absence de toute réclamation pendant sept ans, jusqu'à la séparation du couple courant 2021, et la volonté de M. [I] d'aider alors financièrement sa compagne, devenue son épouse, en mettant à sa disposition ses locaux professionnels concomitamment à la résiliation de son bail intervenu en avril 2015 à l'initiative de son précédent bailleur pour défaut de paiement des loyers en lien avec ses difficultés financières, et en relevant que la sommation de payer du 22 mars 2022 précédait l'assignation en divorce délivrée par M. [I] le 27 avril 2022.
Mais, d'une part, en application de l'article 1353 du code civil, la SCI Adélaïde rapporte la preuve de l'obligation de payer les loyers en exécution du bail commercial verbal liant les parties à effet au 1er juillet 2015.
Il incombe donc à Mme [H], en application du même texte, de rapporter la preuve de sa libération, et, en l'espèce, de démontrer que la bailleresse a renoncé, dans une intention libérale, à sa créance locative née du bail commercial.
Cela posé, l'article 1378 du code civil dispose que les registres et documents que les professionnels doivent tenir ou établir ont, contre leur auteur, la même force probante que les écrits sous signature privée ; mais celui qui s'en prévaut ne peut en diviser les mentions pour n'en retenir que celles qui lui sont favorables.
En l'espèce, les loyers dus par Mme [H] à la SCI Adélaïde sont inscrits dans les bilans comptables des exercices clos au 31 décembre au titre de son activité de salon de coiffure, versés aux débats.
Et, l'attestation comptable établie par Mme [R], également comptable de Mme [H], certifie que la dette locative de Mme [H] est inscrite dans les comptes de la SCI Adélaïde pour un montant de 37.900 euros au 31 décembre 2021, divisée en deux périodes distinctes : 31.300 euros TTC dus jusqu'au 31 décembre 2019 et 6.600 euros TTC dus au titre des années 2020 et 2021.
Mme [H] a repris le paiement des loyers à compter du mois de janvier 2021, à une date contemporaine à la crise conjugale, le couple se séparant en octobre 2021.
Contrairement à ce que soutient Mme [H], l'inscription de la créance/dette locative dans les bilans des parties contredit toute remise de la dette locative, celle-ci devant se traduire par une charge pour le bailleur et un produit pour le locataire, étant ici observé que, sur le plan fiscal, l'abandon de créance, sans contrepartie, peut être fiscalement imposé à concurrence de 60 % à la charge, non pas du bailleur, mais du locataire bénéficiaire de l'avantage consenti.
Il se déduit des documents comptables versés aux débats, opposables entre les parties, que l'absence de réclamation des loyers pendant plusieurs années ne vaut pas renonciation de la bailleresse à sa créance, ce que Mme [H] a admis en inscrivant la dette locative dans ses propres comptes.
Par conséquent, Mme [H] ne peut s'exonérer de son obligation en invoquant une remise de dette consentie à titre de libéralité par la bailleresse.
sur la prescription de la demande
L'action en paiement des loyers commerciaux est soumise à la prescription quinquennale de l'article 2224 du code civil, sinon de l'article L110-4 du code de commerce, le tribunal de commerce ayant retenu, dans son jugement du 30 mai 2023, que Mme [H] était commerçante.
Mme [H] fait valoir à bon droit que le premier acte interruptif de la prescription de l'action en paiement des loyers antérieurs au 31 décembre 2021 résulte de la signification de l'ordonnance d'injonction de payer signifiée le 25 mai 2022.
Il s'ensuit que l'action en paiement des loyers échus avant le 25 mai 2017 est prescrite.
La SCI Adélaïde n'a pas conclu sur le moyen tiré de la prescription, ni contesté que sa créance était éteinte à concurrence de la somme de 13.300 euros.
Par conséquent, la demande en paiement sera déclarée irrecevable au titre des loyers antérieurs au 25 mai 2017.
Il ressort du décompte des loyers dus au 31 décembre 2021, non contesté pour le surplus par Mme [H], que la créance locative s'élève à la somme de : 37.900 - 13.300 = 24.600 euros.
Infirmant le jugement entrepris, Mme [H], entrepreneur individuel à responsabilité limitée, sera condamnée à payer cette somme à la SCI Adélaïde, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 25 mai 2022.
La SCI Adélaïde sera déboutée de sa demande de paiement de la somme complémentaire « de 1.200 euros conformément à la signification portant sommation de payer du 24 mars 2022 », cette somme n'ayant aucun fondement juridique et ne résultant pas de la sommation.
La SCI Adélaïde sera également déboutée de sa demande de « condamnation au paiement des loyers actualisés au jour de la décision à intervenir » dès lors que cette demande est abstraite et indéterminée.
La cour rappelle que, l'entrepreneur individuel à responsabilité limitée engage son patrimoine affecté à son activité selon la déclaration d'affectation prévue à l'article L526-7 du code de commerce, dans sa rédaction applicable à la date du choix du statut d'entrepreneur individuel fait par Mme [H].
Mme [H], entrepreneur individuel à responsabilité limitée, sera condamnée aux dépens de première instance, en ce compris le coût de la signification de l'ordonnance d'injonction de payer, et d'appel.
Les parties seront déboutées de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
INFIRME en toutes ses dispositions le jugement entrepris rendu le 24 octobre 2023,
et, statuant à nouveau,
DECLARE irrecevable comme prescrite la demande de paiement des loyers antérieurs au 25 mai 2017,
CONDAMNE Mme [H], entrepreneur individuel à responsabilité limitée, à payer à la SCI Adélaïde la somme de 24.600 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 25 mai 2022,
DEBOUTE la SCI Adélaïde du surplus de sa demande non prescrite,
CONDAMNE Mme [H], entrepreneur individuel à responsabilité limitée, aux dépens de première instance, en ce inclus le coût de la signification de l'ordonnance d'injonction de payer, et d'appel,
DEBOUTE les parties de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur DARRACQ, Conseiller suite à l'empêchement de Madame PELLEFIGUES, Présidente, et par Madame Catherine SAYOUS, greffier suivant les dispositions de l'article 456 du Code de Procédure Civile.
Le Greffier Le Président