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Décisions

CA Douai, référés, 1 août 2025, n° 25/00049

DOUAI

Ordonnance

Autre

CA Douai n° 25/00049

1 août 2025

République Française

Au nom du Peuple Français

C O U R D ' A P P E L D E D O U A I

RÉFÉRÉ DU PREMIER PRÉSIDENT

ORDONNANCE DU 1er AOUT 2025

N° de Minute : 97/25

N° RG 25/00049 - N° Portalis DBVT-V-B7J-WDPA

DEMANDERESSE :

S.A.R.L. ABC PAYSAGE

dont le siège social est situé [Adresse 1]

[Localité 3]/France

ayant pour avocat Me Delphine CHAMBON, avocat au barreau de Lille

DÉFENDERESSE :

S.C.I. [Adresse 4]

dont le siège social est situé [Adresse 7]

[Localité 2]/FRANCE

ayant pour avocat Me Charlotte DESMON, avocat au barreau de Lille

PRÉSIDENTE : Michèle Lefeuvre, première présidente de chambre désignée par ordonnance du 23 décembre 2024 pour remplacer le premier président empêché

GREFFIER : Christian Berquet

DÉBATS : à l'audience publique du 30 juin 2025

Les parties ayant été avisées à l'issue des débats que l'ordonnance serait prononcée par sa mise à disposition au greffe

ORDONNANCE : contradictoire, prononcée publiquement par mise à disposition au greffe le premier août deux mille vingt cinq, date indiquée à l'issue des débats, par Michèle Lefeuvre, présidente, ayant signé la minute avec Christian Berquet, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire

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EXPOSE DU LITIGE

Par acte authentique du 19 août 2008, la SCI [Adresse 4] a donné à bail à la SARL ABC Paysage des locaux commerciaux dans un ensemble immobilier sis dans la zone industrielle [Adresse 8] à Gondecourt, à l'effet d'exercer des activités d'aménagement et d'entretien d'espaces verts à l'exclusion de toute autre pour une durée de 9 ans à compter du 1er novembre 2007 et moyennant un loyer annuel de 7'800 euros.

A compter du 1er novembre 2016, le bail s'est poursuivi par tacite prolongation. Par acte extrajudiciaire du 18 novembre 2022, la bailleresse a exercé son droit de repentir sur le congé précédemment délivré et a consenti le renouvellement du bail à effet du même jour.

Par acte d'huissier signifié le 8 mars 2023, la société [Adresse 4] a fait assigner la société ABC Paysage devant le juge des référés qui, par ordonnance du 27 juin 2023, confirmée par arrêt de la cour d'appel de Douai en date du 30 mai 2024, a notamment ordonné au preneur de laisser libres les locaux pendant les travaux de désamiantage et de laisser réaliser les travaux de réfection de la toiture et de désamiantage avec astreinte.

Parallèlement, par mémoire en fixation de loyer du 5 avril 2024, notifié par courrier recommandé réceptionné le 7 avril 2023 par la SAEL ABC Paysage, la SCI [Adresse 4] a fait connaître son intention de voir fixer le loyer à la somme annuelle de 28'611 euros HT HC.

Par acte d'huissier du 1er juin 2023, la SCI [Adresse 4] a fait assigner la SARL ABC Paysage, devant le juge des loyers commerciaux près le tribunal judiciaire de Lille aux mêmes fins.

Par jugement du 2 octobre 2023, le juge des loyers commerciaux a avant-dire droit ordonné une expertise dont le rapport a été déposé au greffe le 24 mai 2024, concluant à une valeur locative de 22.080 euros par an HT et hors charges.

La société ABC Paysage a exercé son droit d'option en refusant le renouvellement du bail et a quitté les lieux le 31 mai 2024. La SCI [Adresse 5] l'a ensuite attraite devant le juge des référés par acte du 14 février 2025 aux fins de la voir condamnée à l'indemniser au titre des réparations locatives et en paiement d'indemnités d'occupation.

Par jugement contradictoire du'3 mars 2025, le tribunal judiciaire de'Lille a':

- condamné la SARL ABC Paysage à payer à la SCI [Adresse 4] la somme de 18'386,40 euros HT, au titre des frais engagés avec intérêts au taux légal à compter de la décision';

- dit que les intérêts échus pour plus d'une année entière sur cette créance de restitution produiront eux-mêmes intérêts';

- condamné la SARL ABC Paysage aux dépens, en ce compris les frais d'expertise judiciaire de 2'392,80 euros TTC et les fris de signification de l'assignation du 1er juin 2023, soit la somme de 54,52 euros TTC';

- débouté la SARL ABC Paysage de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile';

- débouté les parties de leurs autres demandes';

- rappelé que l'exécution provisoire est de droit.

Par déclaration adressée au greffe de la cour d'appel de Douai le'18 mars 2025, la SARL ABC Paysage a interjeté appel de cette décision.

Par acte en date du'20 mars 2025, la SARL ABC Paysage a fait assigner la SCI [Adresse 4] devant le premier président de la cour d'appel de Douai aux fins de'voir, suivant ses conclusions récapitulatives et responsives, au visa des articles'L.154-57 et L.145-58 du code de commerce, 1104, 1171, 1199 du code civil, 9, 12, 514-3, 696, 700 et 917 du code de procédure civile':

- ordonner l'arrêt de l'exécution provisoire du jugement rendu le 3 mars 2025 par le juge des loyers commerciaux du tribunal judiciaire de Lille dans l'instance l'opposant à la SCI du [Adresse 6]';

- condamner la SCI [Adresse 4] à lui payer la somme de 2'500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens';

- débouter la SCI du Pont du Bac de l'ensemble de ses demandes.

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Elle avance qu'il existe des moyens sérieux d'annulation ou de réformation de la décision contestée puisque'le premier juge a refusé d'appliquer l'article L.145-58 du code de commerce au titre duquel le propriétaire souhaitant se soustraire à l'indemnité d'éviction doit supporter les frais de l'instance, alors que le bailleur est l'instigateur de la procédure en renouvellement corrélative à son repentir et a omis de statuer sur sa demande reconventionnelle en compensation des créances de part et d'autre. Elle conteste l'interprétation faite par le premier juge de la notion de frais qui suppose un paiement effectif et considère qu'aucun honoraire de résultat n'est dû puisque le résultat n'a jamais été atteint et que la convention d'honoraire ne peut lui être opposable et subsidiairement, présentent les caractéristiques de la force majeure exonératoire, puisqu'exorbitants et imprévisibles, qu'en toutes hypothèses,cet honoraire aurait dû être modéré, la SCI bailleresse tirant un grand avantage financier de la procédure engagée.

Par ailleurs, elle soutient qu'il existe des conséquences manifestement excessives découlant de l'exécution provisoire de la décision en raison de sa fragilité financière qui ne cesse de s'accroître depuis la décision contestée, sa survie étant compromise.

Aux termes de ses conclusions responsives n°2, la SCI [Adresse 4], au visa de l'article 514-3 alinéa 2 du code de procédure civile, demande au premier président de':

- juger mal fondée la demande d'arrêt de l'exécution provisoire formulée par la société ABC Paysage en l'absence de démonstration de l'existence de conséquences manifestement excessives survenus postérieurement au 3 mars 2025 et l'absence de moyens sérieux de réformation';

- en conséquence, débouter la société ABC Paysage de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions';

- condamner la société ABC Paysage à lui payer la somme de 2'500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

Elle avance qu'il n'existe aucune conséquence manifestement excessive postérieure au jugement contesté puisque'aucune pièce comptable démontrant les difficultés financières de la société appelante n'est versée aux débats alors que la saisie-attribution pratiquée le 19 mars 2025, pour un montant de 68'923,61 euros a été fructueuse en totalité et les condamnations ont été recouvrées, que la société ABC Paysage a décidé de restituer les locaux par l'exercice de son droit d'option.

Elle argue qu'il n'existe aucun moyen sérieux de réformation du jugement en ce que l'article L.145-57 du code de commerce est applicable dans la mesure où elle a consenti au renouvellement du bail commercial avant l'introduction de l'instance en fixation judiciaire du loyer, que l'honoraire de résultat est exigible puisqu'il est de jurisprudence constante que les frais de l'instance visés à l'article L.145-7 du code de commerce comprennent les dépens afférents à l'instance mais aussi les frais non taxables au sens de l'article 700 du code de procédure civile incluant les honoraires facturés par l'avocat à son client suivant une convention d'honoraires acceptée sans réserve et que l'honoraire de résultat facturé par l'avocat à son client bailleur ne revêt aucunement les caractéristiques de la force majeure.

SUR CE

Aux termes de l'article 514-3 du code de procédure civile, en cas d'appel, le premier président peut être saisi afin d'arrêter l'exécution provisoire de la décision lorsqu'il existe un moyen sérieux d'annulation ou de réformation et que l'exécution risque d'entrainer des conséquences manifestement excessives.

L'article 514-3 alinéa 2 ajoute que la demande de la partie qui a comparu en première instance sans faire valoir d'observations sur l'exécution provisoire n'est recevable que si, outre l'existence d'un moyen sérieux d'annulation ou de réformation, l'exécution provisoire risque d'entrainer des conséquences manifestement excessives qui se sont révélées postérieurement à la décision de première instance.

La société ABC Paysage, qui n'établit pas avoir formé en première instance des observations

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relatives à l'exécution provisoire de la décision rendue, doit donc justifier d'éléments qui se sont révélés postérieurement au 3 mars 2025.

Il ressort des pièces produites que par suite de l'exécution forcée du jugement par le biais d'une saisie-attribution dénoncée le 26 mars 2025 et non contestée, la SCI [Adresse 5] a obtenu en cours de procédure, suivant les dispositions de l'article L211-2 du code des procédures civiles d'exécution, l'attribution immédiate de la créance saisie s'élevant à 25.208,44 euros.

Dans la mesure où la société ABC Paysage ne se prévaut au titre des conséquences manifestement excessives que des difficultés financières résultant de cette saisie, comme l'atteste son expert-comptable, ce seul moyen tenant à l'exécution de la décision ne peut être retenu comme ayant été révélé postérieurement à la décision.

Dès lors, sa demande d'arrêt de l'exécution provisoire doit être décalrée irrecevable.

Il ne parait pas inéquitable de laisser à la charge de la SCI [Adresse 5] les frais irrépétibles de la procédure. Sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile sera en conséquence rejetée.

PAR CES MOTIFS

Statuant par ordonnance contradictoire,

Décalre irrecevable la demande d'arrêt de l'exécution provisoire assortissant le jugement du 3 mars 2025 du tribunal judiciaire de Lille formée par la société ABC Paysage,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société ABC Paysage aux dépens de la présente instance.

Le greffier La présidente

C. BERQUET M. LEFEUVRE

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