Livv
Décisions

CA Saint-Denis de la Réunion, ch. civ. tgi, 25 juillet 2025, n° 24/00441

SAINT-DENIS DE LA RÉUNION

Arrêt

Autre

CA Saint-Denis de la Réunion n° 24/0044…

25 juillet 2025

ARRÊT N°

P-C

R.G : N° RG 24/00441 - N° Portalis DBWB-V-B7I-GBIR

COUR D'APPEL DE SAINT - DENIS

ARRÊT DU 25 JUILLET 2025

Chambre civile TGI

Appel d'une décision rendue par le TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE [Localité 9] en date du 19 MARS 2024 suivant déclaration d'appel en date du 16 AVRIL 2024 RG n° 22/00651

APPELANTE :

Madame [Y] [I] [P] [E]

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentant : Me Mélanie THIEFFRY, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION

INTIMÉES :

S.A.R.L. COPRO IMMOBILIER

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représentant : Me Virginie GARNIER, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

S.D.C. [Adresse 8]

c/o SARL COPRO IMMOBILIER - [Adresse 1] -

[Localité 11]

[Localité 5]

Représentant : Me Virginie GARNIER, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

DATE DE CLÔTURE : 13 février 2025

DÉBATS : en application des dispositions de l'article 799 alinéa 3 du code de procédure civile, le conseiller de la mise en état, a autorisé les avocats à déposer leur dossier au greffe de la chambre civile avant le 04 avril 2025.

Le président a avisé les parties que l'affaire était mise en délibéré devant la chambre civile de la Cour composée de :

Président : Monsieur Patrick CHEVRIER, président de chambre

Conseiller : Madame Pauline FLAUSS, conseillère

Conseiller : Madame Sophie PIEDAGNEL, conseillère

qui en ont délibéré,

et que l'arrêt serait rendu le 16 juin 2025, prorogé au 25 juillet 2025 par mise à disposition au greffe.

Arrêt : prononcé publiquement par sa mise à disposition des parties le 25 juillet 2025.

Greffier lors des debats : Madame Sarah HAFEJEE

Greffier lors de la mise a disposition : Madame Falida OMARJEE

LA COUR :

Madame [E] [I] [Y] est propriétaire du lot n° 12 au sein de la résidence [Adresse 7], composée de 67 lots. Son lot consiste en un appartement situé au rez-de-chaussée avec un jardin à usage privatif. Le [Adresse 12] [Adresse 6] est géré par un syndic professionnel, COPRO IMMOBILIER, situé sur la commune de [Localité 10].

Par assignation délivrée le 22 février 2022, Madame [E] a assigné le [Adresse 12] [Adresse 6], représentée par son syndic la SARL COPRO IMMOBILIER et à titre personnel devant la juridiction de céans pour demander notamment l'annulation du procès-verbal de l'assemblée générale du 15 décembre 2021.

Par jugement en date du 19 mars 2024, le tribunal judiciaire a statué en ces termes :

« REJETTE l'intégralité des demandes de Mme [I] [Y] [E],

- CONDAMNE Mme [I] [Y] [E] à payer au [Adresse 12] [Adresse 6], représentée par son syndic la SARL COPRO IMMOBILIER, la somme de 1600 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- CONDAMNE Mme [I] [Y] [E] à payer à la SARL COPRO IMMOBILIER la somme de 1.600 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- CONDAMNE Mme [I] [Y] [E] aux dépens qui pourront être recouvrés directement par Maitre Virginie GARNIER dans les conditions posées par l'article 699 alinéa 2 du code de procédure civile. »

Madame [Y] [E] a interjeté appel par déclaration du 16 avril 2024.

Elle a déposé ses premières conclusions d'appelante le 16 juillet 2024.

Le [Adresse 12] [Adresse 6] (le SDC), représentée par son syndic la SARL COPRO IMMOBILIER et la SARL COPRO IMMOBILIER à titre personnel, ont conclu le 8 octobre 2024.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 13 février 2025.

***

Aux termes de ses uniques conclusions déposées le 16 juillet 2024, Madame [Y] [E] demande à la cour de :

«REFORMER le jugement rendu par le Tribunal judiciaire de SAINT DENIS en date du 19 mars 2024 sous le numéro RG 22/00651,

- DEBOUTER le syndic de copropriété professionnel, COPRO IMMOBILIER, et le syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 6] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

En conséquence,

- JUGER que le syndic de copropriété professionnel, COPRO IMMOBILIER, a commis une faute de nature délictuelle en n'inscrivant pas les questions de Madame [E] [Y] à l'ordre du jour de l'assemblée générale du 15 décembre 2021,

- ANNULER l'assemblée générale du 15 décembre 2021,

A titre subsidiaire :

- ANNULER les points n° 11 et 12 du procès-verbal de l'assemblée générale du 15 décembre 2021,

En tout état de cause :

- CONDAMNER le syndic de copropriété professionnel, COPRO IMMOBILIER, à verser à Madame [E] [Y] la somme de 3.000 € pour le préjudice moral subi,

- DIRE ET JUGER que l'exécution provisoire est de droit et qu'elle ne saurait être écartée,

- CONDAMNER le syndic de copropriété professionnel, COPRO IMMOBILIER, à verser à Madame [E] [Y] la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les entiers dépens de première instance,

- CONDAMNER le syndic de copropriété professionnel, COPRO IMMOBILIER, à verser à Madame [E] [Y] la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les entiers dépens à hauteur de Cour. »

***

Selon leurs uniques conclusions d'intimés remises le 8 octobre 2024, le SDC et la SARL COPRO IMMOBILIER demandent à la cour de :

« CONFIRMER purement et simplement le jugement du 19 mars 2024 ;

En conséquence, DEBOUTER Madame [Y] [I] [P] [E] de l'intégralité de ses demandes ;

- CONDAMNER Madame [Y] [I] [P] [E] à payer à la SARL COPRO IMMOBILIER et au [Adresse 12] [Adresse 6] la somme de 3000 € chacun en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

CONDAMNER Madame [Y] [I] [P] [E] aux entiers dépens. »

***

Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il convient de se reporter à leurs écritures ci-dessus visées figurant au dossier de la procédure en application de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

La cour rappelle, à titre liminaire, qu'elle n'est pas tenue de statuer sur les demandes de « constatations » ou de « dire et juger » qui ne sont pas, hors les cas prévus par la loi, des prétentions en ce qu'elles ne sont pas susceptibles d'emporter des conséquences juridiques mais constituent, en réalité, les moyens invoqués par les parties au soutien de leurs demandes.

En application des dispositions de l'article 954 du code de procédure civile, elle ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions et n'examine que les moyens développés dans la partie discussion des conclusions présentés au soutien de ces prétentions.

Sur la demande de nullité de l'assemblée générale du 15 décembre 2021 :

Madame [E] sollicite en appel l'annulation de l'assemblée générale du 15 décembre 2021 en soutenant en substance qu'elle avait parfaitement respecté les conditions préalables pour inscrire ses questions de copropriétaire à l'ordre du jour de l'assemblée générale. Mais ces questions n'ont pas été évoquées lors de l'assemblée générale alors qu'aucun motif légitime ne justifie l'absence de prise en compte de sa demande d'inscription. Elle en déduit à titre principal la nullité de l'assemblée générale.

Le tribunal a rejeté ses prétentions en considérant que, si le syndic a effectivement décidé d'ignorer certaines des questions que la requérante souhaitait voir inscrites à l'ordre du jour et qu'il en a retenu trois qu'il a synthétisées de son propre chef au point n° 11, Mme [E] ne tire pas les conséquences juridiques de son constat puisqu'elle ne demande pas l'annulation de l'assemblée générale mais seulement celle du procès-verbal qui ne peut pas l'être pour ce motif. Il en est de même de sa demande d'annulation des points n° 11 et n° 12 du procès-verbal. Il s'ensuit que le tribunal, qui ne peut pas modifier les prétentions des parties, ne peut que rejeter les demandes principales d'annulation formulées par la requérante. A titre surabondant, nonobstant les explications qu'elle fournit, Mme [E] ne démontre pas en quoi le syndic a outrepassé ses pouvoirs et ne démontre pas le conflit d'intérêt allégué.

En appel, Madame [E] expose qu'elle avait adressé au Syndic une demande d'inscription par lettre recommandée avec accusé réception en date du 1er octobre 2021, portant sur les huit questions suivantes :

« 1) Concernant les dégâts des eaux au niveau de mon faux plafond survenu le 17 janvier 2021 et la mise en cause du moteur de climatisation non-conforme du propriétaire du lot 16 ' a) D'établir un constat avec le propriétaire du lot 16 lors de son intervention sur les lieux le 18 janvier 2021, b) D'établir un constat du syndic lors de son intervention le 19 janvier 2021,

2) Concernant le problème récurrent d'évacuation des eaux usées du lot 16 avant mars 2021, d'établir un constat lors de la visite du syndic et du lot 16 en mars 2021,

3) Concernant l'évacuation des eaux usées du lot 16 dévié dans le conduit pluvial depuis juin 2021 au risque d'hygiène, de santé publique et environnement avec approbation du syndic,

4) Concernant le problème des locations saisonnières du lot 16 à but commercial sachant que le lot 16 n'est pas conforme aux normes de l'urbanisme ' hygiène et qui m'occasionne des préjudices financiers ' santé,

5) De résoudre tous les travaux illicites litigieux du lot 16 et détérioration de mon toit privatif et je demande l'intervention d'un expert ' huissier,

6) De nommer un concierge bénévole concernant tous les actes d'incivilité visant principalement la présence des locations saisonnières,

7) De mettre en cause une carence professionnelle du syndic à titre individuel et la responsabilité in solidum du syndic avec le conseil syndical concernant les divers troubles anormaux cités ci-dessus,

8) La révocation de Monsieur [E] [R], propriétaire du lot 16 du conseil syndical pour tous les malfaçons et abus de pouvoir. »

Selon l'appelante, ses huit questions sont passées à trois dans le procès-verbal de l'assemblée générale. A titre d'exemple, il n'a aucunement été soumis à l'ordre du jour la question les travaux illicites du lot 16, la nomination d'un concierge bénévole pour les locations saisonnières ou encore la question d'une carence professionnelle du syndic qui s'est permis d'éluder lui-même une question portant sur le respect de ses propres obligations professionnelles. Il est d'autant plus étrange que les questions portant sur le lot 16 ont été partiellement éludées par le syndic alors que le propriétaire dudit lot est membre du conseil syndical, chargé d'assister le syndic de ses différentes missions. Selon l'appelante, il y a un conflit d'intérêt indiscutable.

Enfin, les questions de Madame [E] ont toutes été rassemblées sous une même question alors même qu'elles étaient relatives à plusieurs sujets différents.

Madame [E] plaide qu'en n'inscrivant pas ses questions, l'assemblée générale n'a pas été en mesure de voter les questions posées de façon éclairée. En effet, d'une part, les questions portées à l'ordre du jour ont été sélectionnées et groupées par le syndic de copropriétaires. De sorte que l'assemblée générale n'a pas eu toutes les informations nécessaires au vote. D'autre part, les questions sélectionnées par le syndic ont entrainées la mise à l'ordre du jour d'une question portant sur les effets personnels des parties, considérées comme communes, occupées par Madame [E].

D'autre part, les questions sélectionnées par le syndic ont entrainées la mise à l'ordre du jour d'une question portant sur les effets personnels des parties, considérées comme communes, occupées par Madame [E]. Or, la conclusion de la question est la suivante :

« ['] demande à ce que le syndic fasse un dossier avec un conciliateur de justice en rappelant les fais et les décisions également prises de faire dégager les parties communes par la résidence pour ensuite imputer les frais à Madame [E] [Y] ». Sans la sélection du syndic, Madame [E] [Y] aurait pu obtenir la réalisation de différents actes permettant de faire constater les nombreux troubles qu'elle subit quotidiennement sans que le syndicat des copropriétaires ne s'attardent sur les petits aménagements décoratifs de son extérieur. Or, l'absence des questions soulevées par Madame [E] a influé immanquablement sur le vote d'autres questions, dont celle en n° 12.

Les intimés répliquent qu'aucune demande d'annulation de l'assemblée générale ou de certaines des résolutions prises lors de celle-ci n'est susceptible de prospérer en appel dès lors qu'il s'agirait d'une demande nouvelle en appel, proscrite par les dispositions de l'article 564 du code de procédure civile. Selon eux, dans ses conclusions d'appel Madame [E] tente de modifier ses demandes en sollicitant à titre principal l'annulation de l'assemblée générale du 15 décembre 2021 et à titre subsidiaire l'annulation des points n° 11 et 12 du procès-verbal de l'assemblée générale du 15 décembre 2021.

Contrairement à ce que croit pouvoir prétendre Madame [E] dans ses écritures, sa demande nouvelle d'annulation de l'assemblée générale ne tend nullement aux mêmes fins que sa demande initiale d'annulation du procès-verbal d'assemblée générale en première instance. Il s'agit de deux demandes parfaitement distinctes, n'ayant nullement le même objet. Comme cela a été précédemment rappelé, la demande d'annulation du procès-verbal d'assemblée générale vise à sanctionner l'irrégularité formelle du procès-verbal.

Tel n'est pas le cas de la demande d'annulation de l'assemblée générale ou de certaines de ses résolutions.

Une telle demande serait en tout état de cause tardive pour n'avoir pas été introduite dans le délai de 2 mois à compter de la notification du procès-verbal d'assemblée générale en application de l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965.

Ceci étant exposé,

Aux termes de l'article 564 du code de procédure civile, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.

En l'espèce, il résulte clairement de mentions du jugement querellé que Madame [E] a fait assigner le SDC et son syndic aux fins d'annulation du procès-verbal de l'assemblée générale et d'engagement de la responsabilité de la société COPRO IMMO.

Le premier juge a d'ailleurs précisé que Madame [E] ne tirait pas les conséquences juridiques de son constat puisqu'elle ne demandait pas l'annulation de l'assemblée générale mais seulement celle du procès-verbal.

Ainsi, il est manifeste que l'appelante a modifié sa prétention en appel par rapport à sa demande initiale.

S'agissant de deux actions distinctes, l'une tendant à annuler l'acte rédigé lors de l'assemblée générale, l'autre tendant à annuler l'assemblée générale elle-même, il convient de juger que la demande formée en appel est nouvelle et irrecevable.

Sur la demande subsidiaire d'annulation des points n° 11 et n° 12 du PV :

L'appelante demande subsidiairement l'annulation des points n° 11 et 12 du procès-verbal de l'assemblée générale du 15 décembre 2021. Madame [E] prétend qu'une résolution peut être exceptionnellement annulée, dans la mesure où la question « écartée » aurait eu une influence sur le vote de la résolution adoptée (Cassation 3e civile 12 mars 2008, n° 07 - 14792). En conséquence, si la cour rejette l'annulation de l'assemblée générale, il conviendra de prononcer l'annulation des résolutions n° 11 et 12 du procès-verbal. Elle ajoute qu'aucun projet de résolution n'était requis en l'espèce car ce n'est prévu que pour des cas spécifiques prévus au 7° et 8° l'article 11 du décret n° 67-223 du 17 mars 1967, soit pour les questions portant sur le budget prévisionnel ou pour les demandes en justice.

Les intimés font valoir que, si le syndic doit mettre à l'ordre du jour les questions soumises par les copropriétaires ou par le conseil syndical, encore faut-il que la demande comporte le projet de résolution permettant de donner lieu à un vote, conformément à l'article 10 du décret n° 67 ' 223 du 17 mars 1967. Le courrier de Madame [E] n'était qu'une succession de griefs à l'égard principalement du propriétaire de l'appartement n° 16 et dans une moindre mesure du syndic, sans pour autant comporter de véritable texte de résolution susceptible d'être effectivement votée en assemblée générale. Le syndic a donc répercuté comme il a pu les questions de Madame [E] dans la convocation à l'assemblée générale et force est de constater, à la lecture du procès-verbal, que celle-ci a eu toute latitude pour faire valoir observation puisqu'il est expressément rappelé que : « Mme [E] indique les différentes demandes qu'elle a faites et reprend lecture du courrier qu'elle avait adressé. »

C'est d'ailleurs une réalité qu'elle ne peut ignorer puisqu'elle était scrutatrice lors de l'assemblée générale et à, à ce titre, le procès-verbal d'assemblée générale.

Ceci étant exposé,

La lecture des huit questions rappelées plus haut, révèle d'abord que Madame [E] souhaitait évoquer les difficultés qu'elle rencontre en raison de désordres et de désagréments résultant exclusivement du lot N° 16 situé au-dessus de son lot.

L'ordre du jour figurant dans la convocation à l'assemblée générale litigieuse (pièce n° 5 de l'appelante) intègre bien les questions posées par Madame [E] tout en les synthétisant en trois parties : « Eclaircissement au sujet de l'évacuation des eaux usées de l'appartement n° 16 situé au-dessus du sien ; Pratique de locations saisonnières sur la résidence ; Autorisation pour l'installation de moteurs de climatisation. »

Ces trois thèmes permettaient d'aborder les questions n° 1, n° 2, n° 3, n° 4 mais pas de traiter les quatre autres questions relatives en substance à des travaux illicites litigieux du lot 16 et détérioration du toit privatif (n° 5), la nomination d'un concierge bénévole concernant tous les actes d'incivilité visant principalement la présence des locations saisonnières (n° 6), La mise en cause de la carence professionnelle du syndic (n° 7) et la révocation de Monsieur [E] [R], propriétaire du lot 16 du conseil syndical (n° 8).

Toutefois, Madame [E] était présente lors de l'assemblée générale (pièce n° 6). Elle a été désignée comme scrutatrice de séance. Et, en particulier, elle a pu reprendre la lecture de son courrier en recensant l'ensemble de ses demandes.

Le procès-verbal mentionne la teneur des débats qui ont abouti à des plaintes dirigées contre Madame [E] en raison de ses comportements critiqués par les autres copropriétaires.

A cet égard, rien n'aurait pu empêcher Madame [E] de traiter des points qui n'avaient pas été repris par le Syndic dans la convocation à l'assemblée générale car ses demandes étaient régulières.

Or, celle-ci, bien que présente et s'exprimant librement sur les points conflictuels avec le propriétaire du lot n° 16, se nommant aussi [E], n'a pas évoqué les quatre dernières questions omises dans l'ordre du jour. A ce titre, elle ne peut invoquer le refus du Syndic de les soumettre à l'assemblée générale alors quelle ne justifie d'aucune opposition ni d'aucune tentative vaine de les aborder lors de l'assemblée générale.

En conséquence, Madame [E] échoue à démontrer la nullité du procès-verbal en ses points n° 11 et n° 12.

Enfin, le fait que n'ont pas été posées les autres questions portant notamment sur la qualité de la mission du syndic, n'a donc donné lieu à aucune mention du procès-verbal susceptible d'en provoquer la nullité, même partielle.

Sa demande de nullité partielle du procès-verbal doit être rejetée.

Le jugement sera donc confirmé de ce chef.

Sur la responsabilité du Syndic :

Madame [E] affirme que le Syndic de la copropriété a commis une faute engageant sa responsabilité. Elle soutient que le refus d'inscription d'une question à l'ordre du jour de l'assemblée générale régulièrement notifiée au syndic par un copropriétaire a principalement pour conséquence de constituer une faute du syndic et de l'exposer de la part du copropriétaire lésé à une action en réparation sur le terrain de la responsabilité civile délictuelle (Cass, 3e civile 29 mai 2002, n° 00 ' 17296). La faute du syndic de copropriété est constituée dès lors qu'il a outrepassé ses pouvoirs et qu'il n'a pas respecté le droit acquis inaliénable de Madame [E] [Y], copropriétaire, de voir inscrire la question de son choix à l'ordre du jour d'une assemblée générale tel que prévu à l'article 10 du décret du 17 mars 1967. Elle a été lésée dans l'exercice de ses droits de copropriétaires puisque les questions concernées directement son lot ainsi que sa sérénité au sein de la résidence. Ce manquement est d'autant plus préjudiciable qu'il lui a imposé de nombreuses démarches, contraignantes en matière de droit de la copropriété : contestation du procès-verbal d'assemblée générale dans un délai strict, saisine du tribunal judiciaire dans un délai strict, assistance d'un avocat, etc.

Ces nombreuses démarches, imposées par le comportement délibéré du syndic, ont immanquablement causées un tracas administratif, lui-même constitutif d'un préjudice moral. De surcroit, les questions sélectionnées par le syndic ont conduit ce dernier a porté une question portant sur les petits aménagements décoratifs de Madame [E] de son extérieur. Et cette question a fait l'objet d'une mention conduisant le syndic a engagé une procédure de conciliation dont les frais lui seront imputés. Madame [E] est sans emploi et souffre d'une agoraphobie sévère. Elle tente comme elle peut d'agrémenter et d'améliorer son espace de vie, dont l'espace extérieur, avec quelques plantes décoratives. Ses moyens sont modestes et elle n'a jamais cherché à porter atteinte aux droits des autres copropriétaires, contrairement à Monsieur [E] [R]. D'ailleurs, une procédure de référé expertise est actuellement en cours à l'encontre de ce dernier, tant pour parer aux dégâts causés par ses aménagements que pour parer au manquement du syndic de copropriété. Les conséquences de cette nouvelle procédure lui causent aussi de nombreux tracas, tant sur le plan moral que sur le plan financier. Enfin, l'assemblée générale a été l'occasion pour certains individus de s'emporter physiquement à l'encontre de cette dernière puisque Monsieur [H] a porté son pied devant le visage de Madame [E]. Cette scène a été particulièrement troublante et a fait l'objet d'une main courante.

Le Syndic de la copropriété fait valoir en réplique que, contrairement à ce que l'appelante soutient dans ses écritures non seulement aucune violence de quelque nature que ce soit ne lui a été infligée lors de cette assemblée générale, mais elle-même s'est montrée particulièrement agressive avec les autres copropriétaires. De surcroît, l'agressivité relatée par les copropriétaires qui ont fourni les attestations versées aux débats, a également été constatée par le commissaire de justice (page 3 du constat) : « En préambule, il convient de noter que Mme [E] a été très agressive et insultante à l'égard de Mr [F] tout au long de mes opérations. » Il ressort enfin des termes mêmes du procès-verbal d'assemblée générale l'appelante s'est introduite sans autorisation dans l'appartement de Monsieur [R] [E] pour prendre des photographies et qu'elle importune régulièrement les locataires de la résidence, lesquels s'en plaignent auprès de leurs propriétaires. Ainsi, Madame [E] a largement participé à la création d'une ambiance des moins sereine lors de l'assemblée générale.

Sur ce,

Vu l'article 1240 du code civil ;

Au-delà du débat sur les griefs réciproques existant entre certains copropriétaires et les reproches formulés contre Madame [E] par ceux-ci, il convient de rechercher si le Syndic de copropriété a commis une faute de nature à causer directement un dommage à Madame [E].

Or, l'omission de certaines questions de l'appelante est incontestable, notamment pour les questions n° 7 et n° 8 de Madame [E], mettant en cause la qualité professionnelle du syndic et sa responsabilité in solidum avec le conseil syndical concernant les divers troubles anormaux qu'elle a énoncés, outre la question de la révocation de Monsieur [E] [R], propriétaire du lot 16 du conseil syndical pour tous les malfaçons et abus de pouvoir.

Mais la SARL COPRO IMMOBILIER ne répond pas pour expliquer les raisons de cette omission qui résulte d'ailleurs de l'absence de mention de débats au tour de ces questions dans le procès-verbal de l'assemblée générale.

Ainsi, Madame [E] établit la faute du Syndic qui lui a causé nécessairement un préjudice direct résultant de l'absence de quatre des ses questions dans la convocation et l'ordre du jour de l'assemblée générale.

Le jugement querellé sera infirmé en ce qu'il a débouté Madame [E] de sa demande dirigée contre le Syndic de copropriété.

Le préjudice subi par Madame [E] à raison de cette faute sera réparé par l'allocation d'une indemnité de 2.000,00 euros au titre de son préjudice moral, à la charge de la SARL COPRO IMMOBILIER.

Sur les dépens et les frais irrépétibles :

Madame [E] supportera les dépens et les frais irrépétibles du Syndicat de copropriétaires mais la SARL COPRO IMMOBILER supportera ses propres dépens ainsi qu'une partie des frais irréptibles de Madame [E] en première instance et en appel

PAR CES MOTIFS

La cour,

DECLARE IRRECEVABLE la demande nouvelle en appel d'annulation de l'assemblée générale du 15 décembre 2021 ;

INFIRME le jugement entreprise en ce qu'il a débouté Madame [Y] [E] de sa demande de dommages et intérêts dirigée contre la SARL COPRO IMMOBILIER et l'a condamnée à payer les dépens et les frais irrépétibles de la SARL COPRO IMMOBILIER à titre personnel ;

CONFIRME le jugement entrepris sur le surplus de ses dispositions soumises à la cour ;

Statuant à nouveau du chef infirmé,

CONDAMNE la SARL COPRO IMMOBILIER à payer à Madame [Y] [E] la somme de 2.000,00 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral ;

CONDAMNE Madame [Y] [E] aux dépens du Syndicat de copropriétaires ;

CONDAMNE Madame [Y] [E] à payer au [Adresse 12] [Adresse 6] la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

LAISSE la SARL COPRO IMMOBILIER supporter ses propres dépens à titre personnel ;

CONDAMNE la SARL COPRO IMMOBILIER à payer à Madame [Y] [E] une indemnité de 1.000,00 euros en application de l'article 700 Du code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Patrick CHEVRIER, Président de chambre, et par Falida OMARJEE, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT

© LIVV - 2025

 

[email protected]

CGUCGVMentions légalesPlan du site