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Décisions

CA Aix-en-Provence, retention administrative, 4 août 2025, n° 25/01536

AIX-EN-PROVENCE

Ordonnance

Autre

CA Aix-en-Provence n° 25/01536

4 août 2025

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

CHAMBRE 1-11, Rétention Administrative

ORDONNANCE

DU 04 AOUT 2025

N° RG 25/01536 - N° Portalis DBVB-V-B7J-BPCQ5

Copie conforme

délivrée le 04 Août 2025 par courriel à :

- l'avocat

- le préfet

- le CRA

- le JLD/TJ

- le retenu

- le MP

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance rendue par le magistrat désigné pour le contrôle des mesures d'éloignement et de rétention de [Localité 6] en date du 02 Août 2025 à12h42.

APPELANT

Monsieur [F] [S]

né le 16 Octobre 1984 à [Localité 4] (ALGERIE)

de nationalité Algérienne

comparant en visio conférence en application de l'article L743-7 du CESEDA depuis le centre de rétention administratif de [Localité 6] .

Assisté de Maître Emilie DAUTZENBERG, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, commis d'office.

et de Monsieur [V] [I], interprète en langue arabe, non inscrit sur la liste des experts de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, ayant préalablement prêté serment.

INTIMÉE

LE PREFET DES BOUCHES DU RHONE

Avisé, non représenté

MINISTÈRE PUBLIC

Avisé, non représenté

******

DÉBATS

L'affaire a été débattue en audience publique le 04 Août 2025 devant Madame REPARAZ Paloma, Conseillère à la cour d'appel déléguée par le premier président par ordonnance, assistée de Mme Anastasia LAPIERRE, Greffière,

ORDONNANCE

Par décision réputée contradictoire,

Prononcée par mise à disposition au greffe le 04 Août 2025 à 12h42,

Signée par Madame REPARAZ Paloma, Conseillère et Mme Anastasia LAPIERRE, Greffière,

PROCÉDURE ET MOYENS

Vu les articles L 740-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) ;

Vu l'arrêté portant obligation de quitter le territoire national pris le 06 Avril 2023 par LE PREFET DES BOUCHES DU RHONE, notifié le même jour ;

Vu la décision de placement en rétention prise le 29 Juillet 2025 par LE PREFET DES BOUCHES DU RHONE notifiée le même jour à 10h06 ;

Vu l'ordonnance du 02 Août 2025 rendue par le magistrat désigné pour le contrôle des mesures d'éloignement et de rétention décidant le maintien de Monsieur [F] [S] dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire ;

Vu l'appel interjeté le 02 Août 2025 à 16h22 par Monsieur [F] [S] ;

Monsieur [F] [S] a comparu et a été entendu en ses explications ; il demande à être 'relaché'.

Son avocat a été régulièrement entendu ;

Elle sollicite l'infirmation de l'ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention du 2 août 2025, la remise en liberté de Monsieur [F] [S] et, à titre subsidiaire, une assignation à résidence.

A l'appui de ses prétentions, elle souligne le défaut de diligences de l'administration et l'absence de perspectives d'éloignement. Elle indique que l'administration ne démontre pas qu'un laissez-passer consulaire sera délivré dans les 30 prochains jours, et ce dans le contexte diplomatique actuel entre la France et l'Algérie. Elle ajoute que Monsieur [F] [S] dispose d'une adresse d'hébergement chez sa soeur.

Le représentant de la préfecture n'a pas comparu.

MOTIFS DE LA DÉCISION

La recevabilité de l'appel contre l'ordonnance du magistrat désigné pour le contrôle des mesures d'éloignement et de rétention n'est pas contestée et les éléments du dossier ne font pas apparaître d'irrégularité.

A titre liminaire il convient de rappeler que le premier président de la cour d'appel doit répondre à tous les moyens soulevés expressément à l'appui de l'appel mais uniquement à ceux-là.

La phrase suivante contenue au début de l'acte d'appel : 'S'ajoutent aux moyens développés dans la présente déclaration d'appel, tous les éventuels autres moyens déjà développés dans les conclusions de première instance qui ont pu être déposés ou plaidé devant le JLD, et auxquels la présente déclaration se réfère nécessairement', n'a pas pour conséquence de saisir le premier président de la cour d'appel d'éventuels autres moyens.

Sur la régularité de la saisine du magistrat du siège du tribunal judiciaire

L'article R.742-1 du CESEDA dispose que le magistrat du siège du tribunal judiciaire est saisi aux fins de prolongation de la rétention par simple requête de l'autorité administrative, dans les conditions prévues au chapitre III, avant l'expiration, selon le cas, de la période de quatre jours mentionnée à l'article L.742-1 ou de la période de prolongation ordonnée en application des articles L.742-4, L.742-5, L.742-6 ou L.742-7.

A cette fin et à peine d'irrecevabilité, selon l'article R.743-2 du même code, la requête est motivée, datée et signée, selon le cas, par l'étranger ou son représentant ou par l'autorité administrative qui a ordonné le placement en rétention, à savoir le préfet de département ou de police à Paris en application de l'article R.741-1. Dans ce cas la requête est accompagnée de toutes pièces justificatives utiles, notamment une copie du registre prévu à l'article L.744-2.

Ce dernier énonce qu'il est tenu, dans tous les lieux de rétention, un registre mentionnant l'état civil des personnes retenues, ainsi que les conditions de leur placement ou de leur maintien en rétention. Le registre mentionne également l'état civil des enfants mineurs accompagnant ces personnes ainsi que les conditions de leur accueil. L'autorité administrative tient à la disposition des personnes qui en font la demande les éléments d'information concernant les date et heure du début du placement de chaque étranger en rétention, le lieu exact de celle-ci ainsi que les date et heure des décisions de prolongation.

Selon les dispositions de l'article L. 743-9 du CESEDA le magistrat du siège du tribunal judiciaire, saisi aux fins de prolongation de la rétention, rappelle à l'étranger les droits qui lui sont reconnus et s'assure, d'après les mentions figurant au registre prévu à l'article L. 744-2 émargé par l'intéressé, que celui-ci a été, dans les meilleurs délais suivant la notification de la décision de placement en rétention, pleinement informé de ses droits et placé en état de les faire valoir à compter de son arrivée au lieu de rétention. Le juge tient compte des circonstances particulières liées notamment au placement en rétention simultané d'un nombre important d'étrangers pour l'appréciation des délais relatifs à la notification de la décision, à l'information des droits et à leur prise d'effet.

Il résulte de la combinaison de ces textes que le registre doit être mis à jour et que la non-production d'une copie actualisée, permettant un contrôle de l'effectivité de l'exercice des droits reconnus à l'étranger au cours de la mesure de rétention, constitue une fin de non-recevoir. Celle-ci doit être accueillie sans que celui qui l'invoque ait à justifier d'un grief dès lors que le juge ne peut s'assurer que l'étranger a été en mesure d'exercer les droits qui lui sont reconnus par les articles L. 744-4 et suivants du CESEDA.

Le paragraphe IV de l'annexe de l'arrêté du 6 mars 2018 portant autorisation du registre de rétention et d'un traitement automatisé de données à caractère personnel dénommé «logiciel de gestion individualisée des centres de rétention administrative» (LOGICRA) prévoit notamment que sont enregistrées dans les traitements au titre des données à caractère personnel concernant la fin de la rétention et l'éloignement les informations suivantes :

1° Demande de laissez-passer consulaire, consulat saisi, date de la demande d'identification ou de présentation consulaire, type de présentation, motif de non-présentation, date de l'entretien, moyen de transport utilisé, résultat de l'entretien, délivrance du laissez-passer consulaire, date de délivrance, date et fin de validité du laissez-passer consulaire ;

2° Réservation du moyen de transport national et international : date prévisionnelle de départ, moyen de transport utilisé, pays de destination, demande de routing, escorte;

3° Fin de la rétention: date et motif de la fin de rétention.

En l'espèce l'appelant soulève le défaut d'actualisation du registre de rétention dans la mesure où les diligences consulaires n'y sont pas mentionnées.

Toutefois les diligences consulaires effectuées par l'administration ne constituent nullement des droits au sens des articles L. 744-4 et suivants du CESEDA, dont le défaut de mention dans le registre de rétention rendrait irrecevable la requête en prolongation de la mesure de rétention, s'agissant au surplus d'une question de fond en application de l'article L741-3 du même code.

Pour le surplus l'intéressé ne précise pas quelles sont les pièces utiles qui seraient manquantes

En conséquence il y aura lieu de rejeter la fin de non-recevoir tirée du défaut de mention des diligences consulaires dans le registre de rétention et de production de pièces utiles.

Sur le défaut de diligences et l'absence de perspectives d'éloignement

Aux termes de l'article L741-3 du CESEDA, "Un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L'administration exerce toute diligence à cet effet."

Il appartient au magistrat, en application de l'article L. 741-3 du CESEDA de rechercher concrètement les diligences accomplies par l'administration pour permettre que l'étranger ne soit maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. Cela induit, sauf circonstances insurmontables, la production de pièces par l'administration qui établissent ces diligences, en fonction de la situation de l'étranger.

Par ailleurs, il convient de rappeler que la réalisation d'actes sans véritable effectivité, tels que des relances auprès des consulats n'est pas requis dès lors que l'administration ne dispose d'aucun pouvoir de contrainte sur les autorités consulaires ;

En outre, l'article 15§4 de la directive " retour " précise que " lorsqu'il apparaît qu'il n'existe plus de perspective raisonnable d'éloignement pour des considérations d'ordre juridique ou autres ou que les conditions énoncées au paragraphe ne sont plus réunies, la rétention ne se justifie plus et la personne concernée est immédiatement remise en liberté ".

Il appartient au juge judiciaire d'apprécier, l'existence ou non d'une perspective raisonnable d'éloignement.

En l'espèce, si les relations diplomatiques entre la France et l'Algérie sont actuellement dégradées, elles restent évolutives, circonstance empêchant de considérer après trente jours de rétention, la durée légale maximum de la mesure étant de trois mois, qu'il n'existe pas de perspectives d'éloignement, les relations diplomatiques avec l'Algérie étant fluctuantes, il n'est pas établi qu'il n'existe pas de perspectives d'éloignement.

Dès lors, les moyens de l'appelant sont rejetés.

Sur la prolongation de rétention

Il convient de relever que:

- Monsieur [F] [S] a fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français sans délai le 6 avril 2023, qui lui a été notifiée le même jour,

- s'il prétend disposer d'une adresse d'hébergement chez sa soeur et produit la copie du verso de la carte d'identité d'une personne disposant d'une adresse à [Localité 6], ce document n'est pas suffisant pour garantir sa représentation,

- il ne présente pas de passeport en cours de validité,

- il s'est soustrait à l'exécution de plusieurs mesures d'éloignement en ce qu'il a été éloigné de manière forcée vers l'Algérie le 14 avril 2019 et il a refusé d'embarquer sur les vols à destination de l'Algérie les 19 septembre et 6 octobre 2022,

- il a été condamné par le tribunal correctionnel d'Aix-en-Provence le 20 mars 2024 et le 19 mars 2025 pour des faits de vol en état de récidive légale,

Il s'ensuit que Monsieur [F] [S] ne présente pas de garantie effective de représentation et que le risque de soustraction à la mesure d'éloignement est particulièrement pregnant et que malgré les diligences accomplies il n'a pas été possible de pouvoir procéder à l'exécution de ladite mesure d'éloignement dans les délais.

Dès lors, les moyens de l'appelant sont rejetés.

Sur l'assignation à résidence

Monsieur [F] [S] sollicite à titre subsidiaire la mise en place d'une assignation à résidence.

Selon l'article L743-13 du CESEDA le magistrat du siège du tribunal judiciaire ne peut ordonner l'assignation à résidence de l'étranger que lorsque celui-ci dispose de garanties de représentation effectives et qu'après remise à un service de police ou à une unité de gendarmerie de l'original du passeport et de tout document justificatif de son identité, en échange d'un récépissé valant justification de l'identité et sur lequel est portée la mention de la décision d'éloignement en instance d'exécution.

Lorsque l'étranger s'est préalablement soustrait à l'exécution d'une décision mentionnée à l'article L. 700-1, à l'exception de son 4°, l'assignation à résidence fait l'objet d'une motivation spéciale.

En l'espèce, Monsieur [F] [S], sans domicile fixe, ne justifie d'aucune garantie de représentation en ce qu'il ne possède pas de passeport en cours de validité ni de lieu de résidence, de telle sorte qu'il ne remplit pas les conditions de l'assignation à résidence.

Par conséquent, il y a lieu de confirmer l'ordonnance du 2 août 2025.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement par décision réputée contradictoire en dernier ressort, après débats en audience publique,

Confirmons l'ordonnance du magistrat désigné pour le contrôle des mesures d'éloignement et de rétention en date du 02 Août 2025.

Les parties sont avisées qu'elles peuvent se pourvoir en cassation contre cette ordonnance dans un délai de 2 mois à compter de cette notification, le pourvoi devant être formé par déclaration au greffe de la Cour de cassation, signé par un avocat au conseil d'Etat ou de la Cour de cassation.

Le greffier Le président

Reçu et pris connaissance le :

Monsieur [F] [S]

Assisté d'un interprète

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-11, Rétentions Administratives

[Adresse 7]

Téléphone : [XXXXXXXX02] - [XXXXXXXX03] - [XXXXXXXX01]

Courriel : [Courriel 5]

Aix-en-Provence, le 04 Août 2025

À

- LE PREFET DES BOUCHES DU RHONE

- Monsieur le directeur du centre de rétention administrative de [Localité 6]

- Monsieur le procureur général

- Monsieur le greffier du Juge des libertés et de la détention de MARSEILLE

- Maître Emilie DAUTZENBERG

NOTIFICATION D'UNE ORDONNANCE

J'ai l'honneur de vous notifier l'ordonnance ci-jointe rendue le 04 Août 2025, suite à l'appel interjeté par :

Monsieur [F] [S]

né le 16 Octobre 1984 à [Localité 4]

de nationalité Algérienne

Je vous remercie de m'accuser réception du présent envoi.

Le greffier,

VOIE DE RECOURS

Nous prions Monsieur le directeur du centre de rétention administrative de bien vouloir indiquer au retenu qu'il peut se pourvoir en cassation contre cette ordonnance dans un délai de 2 mois à compter de cette notification, le pourvoi devant être formé par déclaration au greffe de la Cour de cassation.

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