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Décisions

CA Aix-en-Provence, 23 mars 2007, n° 04/13292

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Demandeur :

SpA Maco Apparel (Sté)

Défendeur :

DANA (SARL)

T. com. Arles, du 11 mars 2004.

11 mars 2004

État du Litige

La SARL DANA, détaillant en vêtements en Arles à l’enseigne Universal Jean’s, a passé commande par l’intermédiaire de l’agent CROSSROAD le 1er mars 2002 à la société par actions de droit italien (SpA) MACO APPAREL sise à Florence de 446 pièces vestimentaires de marque GUESS, commande confirmée le 14 juin 2002 pour un montant net de 11 872,70 € puis reconfirmée le 30 octobre 2002 par la société MACO APPAREL.

Agissant pour le compte de celle-ci, la SA FIDUCIAIRE DE DISTRIBUTION INTERNATIONALE a proposé par courrier du 4 novembre 2002 trois modalités de règlement à la société DANA qui a opté pour l’une d’elles à savoir la remise de trois chèques bancaires d’un montant respectif de 3 958 € pour le premier et de 3 957,70 € pour les deux autres.

En raison d’une dette que la société DANA aurait contractée envers la société CALVIN K. 

JEAN’S WEAR EUROPE laquelle appartient comme la société MACO APPAREL au groupe de droit italien FINGEN SpA, les services de ce groupe ont décidé de bloquer la commande de vêtements GUESS.

Alors que la marchandise devait être livrée entre le 1er décembre 2002 et le 31 mars 2003 la SA FIDUCIAIRE DE DISTRIBUTION INTERNATIONALE, sur l’ordre du fournisseur, a avisé le 13 janvier 2003 la société DANA de l’annulation de sa commande et lui a retourné les trois chèques.

N’ayant pas été livrée de cette marchandise destinée à être commercialisée pour la saison printemps été 2003 et invoquant la brusque rupture d’une relation commerciale établie la SARL DANA a attrait par exploit du 15 mai 2003 la SpA MACO APPAREL devant le Tribunal de commerce d’Arles aux fins d’indemnisation du préjudice qu’elle estime avoir subi.

Statuant au contradictoire des parties par jugement du 11 mars 2004 la juridiction consulaire arlésienne a écarté l’exception de compétence au bénéfice du Tribunal de Florence soulevée par la SpA MACO APPAREL et condamné celle-ci aux dépens ainsi qu’à payer avec exécution provisoire une indemnité d’un montant de 20 000 € ainsi qu’une somme de 500 € au titre de l’article 700 du NCPC.

La SpA MACO APPAREL a interjeté appel de ce jugement par déclaration enregistrée céans le 14 juin 2004 et la Cour, par arrêt n° 364 du 8 septembre 2006, a confirmé au contradictoire des parties la compétence du Tribunal de commerce d’Arles mais a relevé d’office le moyen tiré de l’application de la Convention de Vienne du 11 avril 1980 sur les contrats de vente internationale de marchandises, rouvrant les débats afin que les parties concluent à nouveau.

Aux termes de ses écritures dernières en date après réouverture des débats, ici tenues pour expressément reprises, déposées et notifiées le 15 janvier 2007, la SpA MACO APPAREL demande à la Cour de:

Vu la Loi italienne,

Vu l’article 48 du Nouveau Code de Procédure Civile français,

Vu la Convention de Vienne en date du 11 avril 1980, et plus précisément les articles 53, 59, 71 et 73,

Vu les pièces versées aux débats et notamment les conditions générales de vente acceptées par la SARL DANA,

- Recevoir la société MACO APPAREL en son appel,

- Le dire bien fondé,

- Réformer en toutes ses dispositions le jugement entrepris,

- Débouter la SARL DANA de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- Dire et juger que les juridictions françaises sont incompétentes pour trancher le présent litige,

- Condamner la SARL DANA à verser à la société MACO APPAREL la somme de 2.000 € sur le fondement de l’article 700 du N.C.P.C.

- Condamner la SARL DANA aux entiers dépens ...

Aux termes de ses écritures dernières en date après réouverture des débats, ici tenues pour

expressément reprises, notifiées et déposées le 12 janvier 2007 la SARL DANA demande à la Cour de:

Vu la Convention de Vienne de 1980,

Vu subsidiairement les articles 1134, 1147 du Code civil et L 442-6-1,5° du Code de commerce, Confirmer le jugement du Tribunal de Commerce d’Arles en son principe,

Dire que la société MACO APPAREL a rompu de manière abusive unilatérale la commande litigieuse mais également, sans préavis et de façon abusive, les relations commerciales établies avec la société DANA,

Réformer le jugement entrepris sur l’appréciation du préjudice et fixer celui-ci à la somme de:

- 26.118 euros pour préjudice matériel direct résultant de la rupture de la commande litigieuse (saison printemps-été 2003)

- 52.236 euros pour préjudice matériel indirect (une année = deux saisons): rupture des relations commerciales

Débouter MACO APPAREL de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

Condamner la SA MACO APPAREL à payer à SARL DANA la somme de 2000 € sur le fondement de l’article 700 du NCPC

Condamner MACO APPAREL aux entiers dépens ...

* * *

Motifs de la Décision

Sur la compétence

Nonobstant l’arrêt n° 364 du 8 septembre 2006 qui a tranché ce point, la société MACO APPAREL persiste à soutenir, non plus dans le dispositif, mais dans le corps de ses écritures l’incompétence du Tribunal de commerce d’Arles au profit du Tribunal de Florence à la faveur de la clause d’attribution de compétence figurant à l’article 25 de ses conditions générales de vente.

Il n’y a pas à y revenir et la Cour invite les parties à se reporter en tant que de besoin aux termes de sa précédente décision tant en ses motifs qu’en son dispositif.

Sur le fond

Ainsi que la Cour l’a déjà relevé du chef de l’établissement de la compétence, la société MACO APPAREL ne justifie pas que les conditions générales de vente dont elle se prévaut soient opposables à sa co-contractante n’étant en l’espèce pas attachées au document de commande souscrit par la société DANA et aucune mention de ce document n’indiquant une lecture ou une approbation par celle-ci des dites conditions.

De même la société MACO APPAREL soutient aussi que ces conditions auraient été approuvées lors d’une commande précédente passée par la société DANA mais le document qu’elle produit, revêtu d’une signature illisible qu’elle prétend celle du gérant social de DANA, ne concerne aucune société identifiée mais indique Nouveau Client Sud Est 23 rue du Mail 00000 Paris F, mention qui ne permet à l’évidence aucun rapprochement utile. Elle ne démontre donc toujours pas, même par emprunt, l’opposabilité des conditions générales de vente qu’elle invoque.

Mais quand bien même celles-ci eussent-elles été opposables et eussent-elles fait loi contractuelle des parties que la rédaction même des articles 10 et 15 de ces conditions ne permettrait pas d’en tirer les effets qu’invoque la société MACO APPAREL dès lors d’une part qu’elle ne justifie d’aucun protêt d’un titre de créance et que, d’autre part, le terme la société employé dans chacun des deux articles ne peut, en raison de l’individualité des personnes morales telle qu’elle existe tant en droit français qu’italien, concerner l’ensemble du Groupe FINGEN SpA qui n’est pas co-contractant mais seulement la société MACO APPAREL SpA laquelle n’a en l’espèce subi aucun incident de paiement.

Pour les raisons déjà indiquées la société MACO APPAREL ne rapporte pas la preuve de l’acceptation par sa co-contractante et de l’opposabilité de ses conditions générales de vente aussi les rapports entre les parties sont-ils régis par la Convention de Vienne du 11 avril 1980 puisqu’il s’agit d’une vente internationale de marchandises conclue entre professionnels demeurant dans deux États ayant ratifié cette Convention.

La commande ayant été acceptée par la société MACO APPAREL au sens de l’article 18 de cette Convention puisque cette société avait adressé un avis de confirmation le 30 octobre 2002 et que la société DANA avait réciproquement accepté les modalités de paiement proposées, le contrat était donc formé.

Les raisons qu’avance la société MACO APPAREL pour justifier soit un différé de l’exécution du contrat soit sa résolution n’entrent pas dans les prévisions des articles 71 à 73 de la Convention de Vienne. La dette de la société DANA vis-à-vis de la société CALVIN K. JEAN’S WEAR n’est à elle seule pas révélatrice d’une grave insuffisance de solvabilité. Quant à l’inexécution alléguée d’une livraison dans un contrat à livraisons successives il ne peut, au sens de la Convention, s’agir que du même contrat et non de celui passé avec une autre société. En le résiliant abusivement la société MACO APPAREL a donc commis une contravention essentielle au contrat au sens de l’article 25 de la Convention et les dommages- intérêts doivent dès lors être appréciés à hauteur de la perte subie et du gain manqué selon l’article 74 de la Convention.

Compte tenu de ce que la résolution du contrat n’a été portée à la connaissance de l’acheteur que le 13 janvier 2003 et donc dans un temps qui ne permettait pas à celui-ci d’approvisionnement palliatif pour la saison il ne peut lui être fait grief de n’avoir pas pris les mesures raisonnables pour limiter la perte au sens de l’article 77 de la Convention. Compte tenu du montant de la commande et des marges bénéficiaires de la profession le manque à gagner est de 26 118,94 € et il était normalement prévisible lors de la conclusion du contrat par la partie en défaut. La demande indemnitaire à hauteur de 26 118 € sera donc accueillie.

Le préjudice matériel indirect réclamé par la société DANA n’entre en revanche pas dans les prévisions de la Convention. Il est en outre dépourvu de justification puisque la saison perdue est indemnisée à hauteur de la marge de profit et que, pour la saison suivante, la société DANA disposait d’un temps suffisant pour prendre des mesures raisonnables afin d’éviter la perte.

Il apparaît conforme à l’équité de condamner la société MACO APPAREL au paiement d’une somme de 2 000 € sur le fondement de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile.

La société MACO APPAREL qui succombe supportera les entiers dépens.

* * *

Par ces Motifs

LA COUR, statuant publiquement et contradictoirement en matière commerciale par arrêt interlocutoire,

Réforme pour partie quant au fond la décision entreprise et, statuant à nouveau,

Condamne la société par actions de droit italien MACO APPAREL à payer à la SARL DANA la somme principale de 26 118 € à titre de dommages et intérêts ainsi que la somme de 2 000 € au titre de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile;

Rejette toute autre demande;

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