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Décisions

CA Amiens, ch. économique, 6 mai 2014, n° 12/03341

AMIENS

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

Au Délice Picard (SARL)

Défendeur :

R.

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Saint Schroeder

Conseillers :

M. Bougon, Mme Seurin

Avocats :

Me Lefevre Franquet, Me Broyon, Me Hecart

Tribunal de commerce de Soissons, 15 jui…

15 juin 2012

Exposé des faits

En décembre 2015, M. Z E et Mme D C, épouse E, ont sollicité la SARL Duo Transactions aux fins de trouver un fonds de commerce de bar tabac presse loto à acquérir. Le 23 décembre 2015, ils ont signé une offre d'achat du fonds de commerce «'Le Brazza'» en vente dans le cadre d'une liquidation judiciaire, au prix de 65 000 euros.

La vente a été autorisée par le tribunal de commerce de Périgueux le 5 février 2016 et régularisée par acte notarié le 31 mai 2016.

Le 26 juillet 2016, M. et Mme E ont signé une lettre de mission pour l'établissement de leur futur bilan avec la SA d'Expertise Comptable FIGEC (FIGEC) et ont demandé à ce qu'elle leur transmette le dossier comptable du fonds du 30 septembre 2013 au 30 septembre 2014.

Par exploit d'huissier en date du 2 octobre 2017, M. et Mme E ont fait assigner à jour fixe, selon ordonnance du président du tribunal du 26 septembre 2017, la société Duo Transactions devant le tribunal de commerce de Périgueux aux fins de condamnation en paiement de la somme de 164 617,46 euros en principal.

Par exploit d'huissier en date du 29 novembre 2017, la société Duo Transactions a fait assigner la société Allianz IARD, son assureur, en appel en cause.

Par exploit d'huissier en date du 1er février 2018, la société Allianz IARD a fait assigner la société FIGEC en intervention forcée. Par jugement contradictoire du 21 janvier 2019, le tribunal de commerce de Périgueux a :

- débouté les époux E de l'ensemble de leurs demandes, comme mal fondées,

- mis la société FIGEC hors de cause,

- condamné les époux E sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile à verser aux sociétés Duo Transactions, Allianz IARD et FIGEC, la somme de 1 000 euros à chacun,

- dit que les dépens de l'instance restent à la charge des époux E,

- taxé les frais au titre du présent jugement à la somme de 143,79 euros TTC.

Par déclaration du 22 février 2019, M. et Mme E ont interjeté appel de cette décision à l'encontre de certains des chefs de la décision qu'ils ont expressément énumérés, intimant les sociétés Duo Transactions, Allianz IARD et FIGEC.

PRETENTIONS ET MOYENS :

Aux termes de leurs dernières écritures notifiées par RPVA le 8 octobre 2019, auxquelles la cour se réfère expressément, M. et Mme E demandent à la cour de :

- les déclarer recevables et bien fondés en leur appel,

- infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Périgueux le 21 janvier 2019, en toutes ses dispositions, statuant à nouveau :

- condamner la société Duo Transactions solidairement avec la société Allianz à leur payer la somme de 158 341,63 euros en réparation de leur préjudice financier, assortie des intérêts de droit à compter de l'assignation valant mise en demeure, conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du code civil,

- condamner solidairement la société Duo Transactions et la société Allianz à leur payer la somme de 15 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice moral et de perte de salaire et d'épargne,

- condamner, solidairement avec la société Duo Transactions, la société Allianz, en qualité d'assureur responsabilité civile de la société Duo Transactions, à leur payer la somme de de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

M. et Mme E font notamment valoir que la société Duo Transactions était soumise à des obligations strictes dans son contrat de mandat et qu'elle ne les a pas respectées ; que le tribunal de commerce a inversé la charge de la preuve ; que la société Duo

Transactions n'a pas transmis de nombreuses informations permettant d'évaluer la rentabilité du fonds et de s'engager en pleine connaissance de cause et que la responsabilité de la société Duo Transactions doit en conséquence être engagée.

Aux termes de ses dernières écritures notifiées par RPVA le 21 octobre 2021, auxquelles la cour se réfère expressément, la société Duo Transactions demande à la cour de :

- déclarer M. et Mme E mal fondés en leur appel,

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement dont appel rendu par le tribunal de commerce de Périgueux le 21 janvier 2019,

- juger qu'elle n'a commis aucune faute dans le cadre de sa mission,

- juger que M. et Mme E n'ont subi aucun préjudice en lien avec son intervention et ne le démontrent pas,

- débouter M. et Mme E de toutes leurs demandes, fins et conclusions,

- juger que la société FIGEC ne présente aucune demande à son encontre,

- à titre subsidiaire et dans l'hypothèse extraordinaire où elle serait déclarée responsable d'un prétendu préjudice subi par M. et Mme E,

- juger que la compagnie d'assurances société Allianz IARD devra mobiliser sa garantie, en conséquence,

- condamner la compagnie d'assurances société Allianz IARD à la garantir et à relever indemne, en sa qualité d'assuré, de toute éventuelle condamnation prononcée à son encontre, en application du contrat d'assurance souscrit par elle,

- débouter la compagnie d'assurances société Allianz IARD de toutes ses demandes dirigées contre elle dont notamment celle tendant à dénier sa garantie,

- condamner M. et Mme E et toute partie succombante à lui payer la somme de 8 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- les condamner aux entiers dépens, en ce compris les frais éventuels d'exécution dont distraction pour ceux d'appel au profit de la SCP Taillard en application de l'article 699 du code de procédure civile,

La société Duo Transactions fait notamment valoir que l'action en responsabilité engagée à son encontre est infondée ; que M. et Mme E n'apportent pas la preuve d'une faute, d'un préjudice et d'un lien de causalité ; qu'elle n'a commis aucune faute dans le cadre de sa mission de recherche d'un fonds de commerce et de la cession ; qu'elle n'a pas pu négocier le prix d'achat ou analyser la clientèle du fonds litigieux en raison de la procédure de liquidation judiciaire ; qu'elle a accompagné M. et Mme E dans les démarches et leur a remis tous les documents informatifs ; qu'elle n'avait pas une mission d'expertise comptable ; que M. et Mme E n'ont engagé aucune action en responsabilité à l'encontre du mandataire liquidateur, du notaire et de l'expert comptable pour les prétendus vices qu'elle allègue.

Aux termes de ses dernières écritures notifiées par RPVA le 12 novembre 2019, auxquelles la cour se réfère expressément, la société Allianz IARD demande à la cour de :

- déclarer M. et Mme E mal fondés en leur appel,

- confirmer la décision entreprise en toutes ses dispositions,

- dire M. et Mme E mal fondés en leurs demandes, fins et écritures et les en débouter,

- dire que si la Cour venait à reconnaitre l'existence d'une faute intentionnelle ou dolosive de la part de la société Duo Transactions, elle est fondée à dénier sa garantie et en conséquence, débouter la société Duo Transactions de sa demande de garantie à son égard,

- à titre subsidiaire, si une quelconque condamnation devait intervenir à l'encontre de la concluante, dire que celle ci ne peut intervenir que dans la limite des seules conséquences dommageables des fautes supposées de la société Duo Transactions, à

l'exclusion de toute demande relative aux restitutions d'honoraires de transaction (dont M. et Mme E indiquent qu'ils s'établissaient à hauteur de 12 000 euros TTC) , avec application d'une franchise de 10% (un minimum de 185 euros et un maximum de 915 euros),

- condamner la société FIGEC à la garantir de toutes conséquences de l'action dirigée contre elle par la société Duo Transactions, des demandes dirigées à son égard par M. et Mme E et de l'action dirigée contre son assurée à la requête de M. et Mme E dans la mesure où elle serait tenue à garantir la société Duo Transactions de toute condamnation pouvant intervenir à l'encontre de celle ci, et condamner la société FIGEC à garantir la requérante de toute condamnation pouvant intervenir à son encontre,

- débouter la société FIGEC de sa demande de condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile à son égard,

- condamner tous succombants à lui payer une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner tous succombants aux dépens de l'instance qui pourront être recouvrés, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile, directement par Maître Clément Raimbault, avocat.

La société Allianz IARD fait notamment valoir que M. et Mme E sont de mauvaise foi à l'égard de la société Duo Transactions qui leur a présenté plusieurs fonds de commerce parmi lesquels ils ont librement choisi ; que M. et Mme E ont été informés de l'état du fonds et de l'existence d'une procédure collective ; que M. et Mme E n'établissent pas que le prix a été évalué par la société Duo Transactions ; que la société Duo Transactions a respecté sa mission et n'a commis aucune faute, de sorte que sa responsabilité ne peut être engagée ; que les sommes demandées par M. et Mme E ne sont pas justifiées ; qu'elle ne peut être tenue à garantie qu'à raison des conséquences dommageables des fautes de l'assuré, à condition qu'elles soient prouvées et à l'exclusion des frais et honoraires.

Aux termes de ses dernières écritures notifiées par RPVA le 22 octobre 2021, auxquelles la cour se réfère expressément, la société FIGEC demande à la cour de :

- confirmer le jugement du tribunal de commerce de Périgueux du 21 janvier 2019 à tout le moins en ses dispositions le concernant,

- confirmer sa mise hors de cause,

- confirmer la condamnation de M. et Mme E à lui payer 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- confirmer la condamnation de M. et Mme E aux dépens de première instance, y ajoutant,

- condamner M. et Mme E et/ou la Compagnie Allianz à lui payer une indemnité complémentaire de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour avoir été attrait devant la cour par M. et Mme E alors même qu'ils n'avaient pas conclu contre lui devant le tribunal,

- condamner M. et Mme E aux entiers dépens d'appel.

La société FIGEC fait notamment valoir qu'elle a été étrangère à la présentation, la négociation et la cession du fonds de commerce litigieux ; qu'elle doit être maintenue hors de cause ; que la preuve d'une faute, d'un préjudice et d'un lien de causalité n'est pas rapportée pour mettre en jeu sa responsabilité civile professionnelle.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 8 novembre 2021 et le dossier a été fixé à l'audience du 22 novembre 2021.

Le 8 novembre 2021, les époux E ont transmis des conclusions par RPVA auxquelles il a été répondu le 16 novembre 2021 par la société Allianz.

Les époux E ont de nouveau conclu le 17 novembre 2021.

Pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens des parties, il y a lieu de se référer au jugement entrepris et aux conclusions déposées.

Motifs

#1 principe de la contradiction

MOTIFS DE LA DECISION :

L'article 15 du code de procédure civile dispose : 'Les parties doivent se faire connaître mutuellement en temps utile les moyens de fait sur lesquels elles fondent leurs prétentions, les éléments de preuve qu'elles produisent et les moyens de droit qu'elles invoquent, afin que chacune soit à même d'organiser sa défense'.

Aux termes de l'article 16 du même code, 'Le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui même le principe de la contradiction.

Il ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles ci ont été à même d'en débattre contradictoirement'.

Il résulte de ces textes que la cour d'appel doit s'assurer que les conclusions et pièces ont été communiquées, comme le prévoit l'article 135 du code de procédure civile, de sorte que le principe de la contradiction a bien été respecté .

En l'espèce les époux E ont déposé des conclusions par voie électronique le 8 novembre 2021, date de l'ordonnance de clôture dont il avait été avisé.

La teneur de ces dernières écritures nécessitait pour les intimées un délai pour en prendre connaissance et éventuellement y répondre.

Il en résulte que la communication par les appelants de leurs conclusions n'ayant pas été faite en temps utile, au sens de l'article 15 du code de procédure civile pour permettre aux intimées d'en prendre connaissance et, le cas échéant, d'y répliquer, le respect du principe de la contradiction prévu par l'article 16 du même code doit conduire au rejet de ces conclusions et pièces.

La cour statuera au vu des conclusions déposées par les appelants le 8 octobre 2019, et des pièces communiquées jusqu'à cette même date.

Les époux E reprochent à l'agent immobilier de ne leur avoir communiqué aucun élément concernant les causes de la liquidation judiciaire du précédent exploitant, la communication des trois derniers bilans, qui est obligatoire en matière d'acquisition de fonds de commerce, le livre des recettes, documents comptables pour apprécier l'amplitude des recettes au quotidien, selon les activités, les conditions des relations avec l'administration des douanes au titre de la vente de tabac, avec la Française des Jeux au titre de l'activité loto, et avec le brasseur pour les boissons, un projet de bail et une analyse de la clientèle.

M. et Mme E affirment n'avoir reçu aucune information ni conseils concernant la configuration des éléments corporels et les éléments incorporels du fonds de commerce, et conséquemment au titre du juste prix à proposer au regard de la situation objective et réelle dudit fonds.

La société Duo Transactions réplique qu'elle a respecté sa mission au regard de la situation du fonds de commerce, dont la liquidation judiciaire avait été prononcée.

Suivant acte en date du 11 décembre 2015, M. et Mme E ( les mandants) ont conclu avec la société Duo Transactions (la mandataire) une convention dans les termes suivants : '...Dans l'hypothèse où le mandant serait intéressé par l'une des affaires proposées ci dessous, le mandant confère au mandataire, qui accepte, le mandat de négocier l'acquisition de celle ci pour son compte lors d'une éventuelle transaction...'.

Suit un tableau comportant une liste de 'Bar tabac loto' à vendre, comprenant, outre le numéro de mandat et l'adresse, le prix de vente de chaque bien.

Conformément à l'article L.111-1 du Code de la consommation, dans sa version applicable au présent litige, la société Duo Transactions était tenue de communiquer aux époux E, notamment, les caractéristiques essentielles du bien proposé, ainsi que son prix.

De façon plus générale, la société Duo Transactions avait pour obligation de donner à ses mandants les informations essentielles sur les affaires présentées. S'agissant de la vente d'un fonds de commerce, elle n'était pas tenue d'un devoir de conseil et de mise en garde en ce qui concerne l'opportunité économique de l'opération à laquelle elle prêtait son concours, mais elle avait l'obligation de se renseigner lui même, pour informer correctement ses clients sur les éléments essentiels du bien vendu.

Cette obligation d'information est d'autant plus nécessaire en l'espèce que l'agent immobilier, en sa qualité de professionnel, ne pouvait ignorer que la cession de gré à gré dans le cadre de la réalisation des actifs du débiteur en liquidation judiciaire est parfaite dès l'ordonnance du juge commissaire qui l'autorise et que le cessionnaire ne peut refuser de régulariser la vente autorisée en retirant son offre.

La société Duo Transactions prétend avoir remis aux époux E une attestation du chiffre d'affaires H. T réalisés durant la période du 1er octobre 2014 au 30 juin 2015, un rapport sur les comptes annuels au titre de l'exercice du 1 octobre 2013 au 30 septembre 2014 et le procès verbal d'inventaire établi le 16 octobre 2015, ce que contestent à juste titre les appelants, dès lors qu'il n'est pas justifié par la société Duo Transactions de la remise de ces documents antérieurement à la proposition d'achat formulée par les époux E le 23 décembre 2015, et que le cabinet Figec, expert comptable affirme pour sa part sans être contredit que les époux E ne l'ont sollicité pour avoir communication des bilans du fonds au 30 septembre 2013 et au 30 septembre 2014 que postérieurement à la cession.

S'agissant en particulier de l'attestation du chiffre d'affaires H. T réalisés durant la période du 1er octobre 2014 au 30 juin 2015, la cabinet Figec précise qu'il s'agit d'une attestation ancienne du Cabinet puisqu'en date du 30 juillet 2015 et faite non pas à l'intention des futurs acquéreurs, mais pour le précédent gérant.

Par ailleurs, le dossier 'B' constitué par la société Duo Transactions figurant en pièce n°11 du dossier remis par les époux E est également postérieur à l'offre d'achat, et à l'ordonnance du juge commissaire en date du 5 février 2016 autorisant la vente, puisqu'il contient plusieurs documents postérieures, et notamment des attestations des époux E du 22 février 2016, un certificat médical du 13 février 2016, une lettre du bailleur des locaux du 24 février 2016.

#2 fonds de commerce

Il n'est donc pas établi que la société Duo Transactions ait communiqué aux époux E les informations indispensables que ceux ci étaient en droit d'obtenir avant de s'engager irrévocablement à l'acquisition du fonds de commerce.

La société Duo Transactions a de ce seul fait engagé sa responsabilité envers les appelants.

Il ressort cependant des éléments du dossier que les époux E n'ignoraient pas que le fonds de commerce était vendu dans le cadre d'une liquidation judiciaire, et qu'ils ont pu s'informer de la situation de l'établissement lors de la visite qu'ils ont effectuée accompagnés d'un salarié de l'étude du liquidateur judiciaire.

En outre, le prix du fonds de commerce réglé par les appelants est très inférieur au montant initialement investi par le précédent exploitant lors de son achat, le fonds acquis en 2005 pour la somme de 300.000 euros ayant été acheté par les époux E pour

65.000 euros.

#3 perte de chance

Sur cette somme de 65.000 euros, 5.000 euros étaient destinés à l'achat des éléments corporels, de sorte que les appelants ne peuvent sérieusement prétendre avoir ignoré lors de la vente que le stock de tabac était inexistant, ce dont d'X ils avaient pu se convaincre lors de la visite organisée par l'agent immobilier.

Ainsi, le défaut d'informations données par l'agence immobilière antérieurement à la vente n'est pas exclusivement à l'origine du préjudice subi par les époux E, lesquels ont agi avec légèreté en acceptant de se porter acquéreur d'un bien dont il ne pouvait ignorer les difficultés financières.

Ce préjudice, qui ne saurait être équivalent à la valeur du fonds perdu s'analyse en une perte de chance, et plus précisément, d'une perte de chance de ne pas contracter.

Au regard des élements du dossier, de la connaissance qu'avaient les acquéreurs de la situation du fonds acheté, cette perte de chance doit être fixée à 20 % du prix d'achat du fonds comprenant les honoraires de l'agent, sans que soient inclus dans l'évaluation de ce préjudice le montant total des sommes engagées par les époux E dans le cadre de l'acquisition de ce fonds, dont la nécessité n'est pas établie, pas plus que les loyers et charges impayés, faute de lien de causalité démontré entre le défaut d'information imputable à l'agent immobilier et ce non paiment.

Il convient en conséquence d'allouer aux époux E la somme de 15.000 euros (75.000 x 20%) à titre de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice constitué par la perte de chance de ne pas avoir contracté.

Faute pour les appelants de rapporter la preuve qu'ils ont subi un préjudice moral et de perte de salaire et d'épargne, distinct de celui réparé par l'allocation des dommages intérêts pour perte de chance, ils seront déboutés de ce chef de demande.

Dès lors qu'il n'est pas établi que la faute commise par la SARL Duo Transactions ait été intentionnelle ou dolosive, la compagnie Allianz doit sa garantie à son assurée, sans pouvoir opposer l'exclusion du montant des frais et honoraires, qui ne figure pas dans le document contractuel produit aux débats.

Elle sera donc condamnée in solidum avec la société Duo Transactions à indemniser les époux E.

La compagnie Allianz sera en outre condamnée à relever indemne la société Duo Transactions des condamnations prononcées contre elle à hauteur de la somme de 14.815 euros, la franchise contractuelle étant déduite.

Aucune faute n'étant démontrée à l'encontre du Cabinet Figec, dont l'intervention est postérieure à l'acquisition du bien par les époux E, sa mise hors de cause sera confirmée.

Compte tenu de la décision intervenue, les dépens de première instance et d'appel seront laissés in solidum à la charge de la SARL Duo Transactions et de la compagnie Allianz.

Il est équitable d'allouer à M. et Mme E la somme de 3.500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, que la SARL Duo Transactions et de la compagnie Allianz seront condamnées in solidum à lui payer.

Les époux E n'ayant formulé aucune demande à l'encontre du cabinet Figec, le jugement déféré sera infirmé en ce qu'il les a condamnés à verser une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et il sera alloué au cabinet Figec la somme de 3.000 euros que la compagnie Allianz sera condamnée à lui verser sur le même fondement.

Dispositif

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, Rejette des débats les conclusions des époux E du 8 novembre 2021

Infirme le jugement du tribunal de commerce de Périgueux en date du 21 janvier 2019 toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a mis hors de cause le cabinet Figec ;

Statuant à nouveau,

Condamne in solidum la SARL Duo Transactions et de la SA Allianz IARD à payer à M. Z E et Mme D C épouse E la somme de

15.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice constitué par la perte de chance de ne pas avoir contracté, outre 3.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la SA Allianz IARD à relever indemne la société Duo Transactions des condamnations prononcées contre elle à hauteur de la somme de 14.815 euros ;

Condamne la SA Allianz IARD à payer à la société d'expertise comptable FIGEC la somme de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Déboute les époux E de leurs autres demandes de dommages et intérêts et les autres parties du surplus de leurs prétentions ; Condamne in solidum la SARL Duo Transactions et de la SA Allianz IARD aux dépens de première instance et d'appel.

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