Cass. soc., 25 octobre 2011, n° 10-15.331
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Bailly
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Angers, 2 février 2010), que la société Clair de Baie (la société) qui avait donné en location-gérance à la société Laumalu deux de ses fonds de commerce qu'elle exploitait, s'est prévalue de la clause résolutoire faute de paiement des loyers ; que le 18 janvier 2007 elle a décidé de reprendre l'exploitation du fonds de commerce situé au Mans et a informé l'ensemble des salariés portés à sa connaissance du transfert à son profit de leur contrat de travail par application de l'article L. 1224-1 du code du travail ; qu'informée par lettre du 26 janvier 2007 de ce que Mme X... s'estimait salariée de la société Lamaulu depuis le 1er février 2005 et qu'elle se tenait à sa disposition, la société lui a répondu par lettre du 16 février 2007 qu'elle considérait qu'aucun contrat de travail la concernant ne lui avait été transféré ;
Attendu que la société fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à Mme X... diverses indemnités, des rappels de salaire et des indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :
1°/ qu'en cas de résiliation du contrat de location-gérance du fonds de commerce, l'impossibilité pour le propriétaire d'en poursuivre l'exploitation en conséquence de sa ruine dispense ce dernier de reprendre les contrats de travail conclus par le locataire gérant qui a refusé de lui restituer les éléments corporels et incorporels du fonds tout en détournant à son profit la clientèle qui y était attachée ; que la société Clair de Baie a soutenu que le fonds de commerce était inexploitable à plus d'un titre, dès lors que tous ses salariés avaient été débauchés par son ancien locataire-gérant, qu'elle n'avait pas pu obtenir restitution des locaux ni des documents commerciaux et comptables indispensables à la poursuite de l'activité et que les clients avaient été détournés au profit d'une société concurrente, la société Isomat ouvertures, qui avait été constituée entre Mme X... et son époux ; qu'en reprochant à la société Clair de Baie d'avoir omis de produire des pièces comptables, au lieu de rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si les éléments corporels et incorporels du fonds de commerce étaient restés entre les mains du locataire-gérant qui s'était approprié la clientèle de la société Clair de Baie au profit d'une société tierce que M. et Mme X... avaient eux-mêmes constituée, la cour d'appel a violé l'article L. 1224-1 du code du travail ;
2°/ que la seule circonstance qu'une partie se contredise au détriment d'autrui n'emporte pas nécessairement le rejet de ses prétentions ; qu'en décidant que la société Clair de Baie ne pouvait pas soutenir que le contrat de travail de Mme X... ne lui avait pas été transféré en raison de la ruine de son fonds de commerce, après avoir sollicité l'application de l'ancien article L. 122-12, alinéa 2, du code du travail dans ses rapports avec les anciens salariés qui ont été licenciés pour avoir refusé de travailler à son service, la cour d'appel a violé l'article L. 1224-1 du code du travail ;
3°/ que la déclaration d'une partie ne peut être retenue contre elle comme constituant un aveu que si elle porte sur des points de fait et non sur des points de droit ; qu'en considérant, pour écarter le moyen que la société Clair de Baie tirait de la ruine de son fonds de commerce, que la société Clair de Baie a reconnu que les contrats de travail conclus par le locataire-gérant du fonds de commerce lui avaient été transférés par un courrier qu'elle avait adressé aux salariés avant de procéder à leur licenciement pour avoir refusé de reprendre leur emploi à son service, la cour d'appel a violé l'article 1356 du code civil ;
Mais attendu qu'ayant constaté, par motifs propres et adoptés et sans avoir à suivre les parties dans le détail de leur argumentation, que le fonds loué était encore exploitable au jour de sa restitution, la cour d'appel en a déduit, à bon droit, que son propriétaire était tenu de poursuivre les contrats de travail des salariés qui y étaient attachés ; que le moyen, non fondé en sa première branche et inopérant en ses deuxième et troisième branches comme critiquant des motifs surabondants, ne peut être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Clair de Baie aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Clair de Baie à payer à Mme X... la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq octobre deux mille onze.