CA Rennes, référés civ., 19 août 2025, n° 25/03974
RENNES
Ordonnance
Autre
EXPOSÉ DU LITIGE
Le 18 mai 2022, M. [M] [I], maçon de métier, et Mme [H] [G] sa conjointe ont signé une proposition commerciale portant sur une commande de menuiseries pour un montant de 74.819,25 euros TTC passée auprès de la société "123 PVC ALU" domiciliée [Adresse 1]. Ces menuiseries étaient destinées à équiper leur maison d'habitation en cours de construction.
Le 20 septembre 2022, la société "Alu Gold", dont le siège social est au Portugal, cédait sa marque "123 PVC ALU" à la société Green Terra immatriculée au registre du commerce et des sociétés d'Orléans depuis le 1er avril 2022.
Le 27 octobre 2022, M. [I] a procédé au paiement d'un acompte d'un montant de 29.927,70 €.
N'ayant été livré que des coffres à volets roulants et non des menuiseries, M. [I] a entrepris des démarches amiables au cours desquelles, après de multiples relances, il lui était finalement signifié que :
- il avait signé son devis avec la "marque 123 PVC ALU" qui était détenue par la société "Alu Gold" dirigée par M. [S] [D], située au Portugal et qui était dotée d'une succursale en France dirigée par M. [P] [N],
- celle-ci avait été fermée et la société Green Terra avait été créée par M. [N] et M. [T] pour racheter la marque "123 PVC ALU",
- M. [I] devait se tourner vers la maison mère au Portugal pour obtenir le remboursement de son acompte.
Après l'échec des démarches amiables, M. [I] a, par acte du 29 mars 2024, fait assigner :
1) la société Alu Gold exerçant sous le nom commercial "123 PVC ALU" domiciliée [Adresse 6],
2) et la SAS Green Terra exerçant sous le nom commercial "123 PCV ALU" immatriculée au registre du commerce et des sociétés d'Orléans le 1er avril 2022,
devant le tribunal judiciaire de Saint-Nazaire aux fins de remboursement de l'acompte et de paiement d'une indemnité de 5.000 € pour pratiques commerciales déloyales, outre les frais irrépétibles et les dépens.
Les défenderesses ne se sont pas constituées.
Par jugement réputé contradictoire du 9 janvier 2025, le tribunal judiciaire de Saint-Nazaire a :
- déclaré irrecevables les demandes formulées par M. [M] [I] à l'encontre de la société commerciale étrangère Alu Gold, comme n'étant pas dans la cause,
- condamné la SAS Green Terra, déduction faite du prix des coffres de volets roulants, à payer à M. [M] [I] la somme de 27.497,74 € au titre de l'acompte versé le 27 octobre 2022,
- rejeté la demande de dommages et intérêts formulée par M. [M] [I],
- condamné la SAS Green Terra à payer à M. [M] [I] la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la SAS Green Terra aux dépens,
- rejeté toutes autres demandes plus amples ou contraires des parties,
- rappelé l'exécution provisoire de sa décision.
La SASU Green Terra a interjeté appel le 25 avril 2025.
Par acte du 7 juillet 2025, la SAS Green Terra a fait assigner M. [I] devant la juridiction du premier président de la cour d'appel de Rennes en lui demandant d'arrêter l'exécution provisoire dudit jugement et de condamner l'intimé aux dépens ainsi qu'au paiement d'une somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
A l'audience du 22 juillet 2025, la SAS Green Terra, développant les termes de ses conclusions remises le 18 juillet 2025, auxquelles il est renvoyé s'agissant des moyens qui y sont formulés, demande à la juridiction du premier président de :
- la déclarer recevable et bien fondée en ses demandes, fins et prétentions,
- juger que les conditions d'application de l'article 514-3 du code de procédure civile sont réunies,
- ordonner l'arrêt de l'exécution provisoire du jugement du tribunal judiciaire de Saint-Nazaire du 9 janvier 2025 dans l'attente de la décision à intervenir concernant l'appel dudit jugement,
- condamner M. [M] [I] à lui payer la somme de 3.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- réserver les dépens et dire que ceux-ci subiront le sort des dépens de l'instance principale.
M. [I] développant les termes de ses conclusions remises le 17 juillet 2025, auxquelles il est renvoyé s'agissant des moyens qui y sont formulés, demande à la juridiction du premier président de :
- débouter la SAS Green Terra de ses demandes,
- y additant,
- la condamner à lui verser à lui une somme de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- la condamner également aux dépens.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Aux termes de l'article 514-3 du code de procédure civile, en cas d'appel, le premier président peut être saisi afin d'arrêter l'exécution provisoire de la décision lorsqu''il existe un moyen sérieux d'annulation ou de réformation et que l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives. La demande de la partie qui a comparu en première instance sans faire valoir d'observations sur l'exécution provisoire n'est recevable que si, outre l'existence d'un moyen sérieux d'annulation ou de réformation, l'exécution provisoire risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives qui se sont révélées postérieurement à la décision de première instance. Enfin, en cas d'opposition, le juge qui a rendu la décision peut, d'office ou à la demande d'une partie, arrêter l'exécution provisoire de droit lorsqu'elle risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives.
Il appartient à la partie qui entend se prévaloir de ces dispositions de rapporter la preuve de ce que les conditions cumulatives qu'elles prévoient sont satisfaites. Si l'une fait défaut, la demande doit être rejetée.
Par ailleurs, le deuxième alinéa de cet article prévoit que la demande de la partie qui a comparu en première instance sans faire valoir d'observations sur l'exécution provisoire n'est recevable que si, outre l'existence d'un moyen sérieux d'annulation ou de réformation, l'exécution provisoire risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives qui se sont révélées postérieurement à la décision de première instance.
En l'espèce, cette fin de non-recevoir n'est pas soulevée par M. [I] et au demeurant, elle n'aurait en tout état de cause pas eu lieu de s'appliquer dès lors que la SAS Green Terra n'a pas comparu devant le juge de première instance.
S'agissant de la condition des conséquences manifestement excessives attachées à l'exécution provisoire, ainsi qu'il l'est soutenu par M. [I], la société Green Terra n'établit pas en quoi l'exécution provisoire de la décision dont appel apparaîtrait manifestement excessive : elle ne produit pas son bilan, ni ses comptes détaillés et se contente d'un courrier de son cabinet d'expert-comptable qui est en lien contractuel avec elle, rendant ce témoignage inopérant, tandis qu'il ne contient aucune description chiffrée de l'activité de la société, rendant au surplus sa teneur dépourvue d'effet probatoire.
La SAS Green Terra échoue donc sur le point lié aux conséquences manifestement excessives de l'exécution provisoire.
L'une des conditions visées au texte précité n'étant pas satisfaite, la demande d'arrêt de l'exécution provisoire doit être rejetée.
La requérante qui échoue en ses prétentions supportera la charge des dépens.
Enfin, les circonstances de l'espèce ne justifient pas qu'il soit application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Statuant par ordonnance rendue contradictoirement,
Rejetons la demande d'arrêt de l'exécution provisoire dont est assortie le jugement rendu le 9 janvier 2025 par le tribunal judiciaire de Saint-Nazaire,
Condamnons la société Green Terra aux dépens,
Rejetons les demandes fondées sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.