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Décisions

CA Paris, Pôle 1 - ch. 11, 19 août 2025, n° 25/04490

PARIS

Ordonnance

Autre

CA Paris n° 25/04490

19 août 2025

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

L. 742-1 et suivants du Code de l'entrée et du séjour

des étrangers et du droit d'asile

ORDONNANCE DU 19 AOUT 2025

(1 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général et de décision : B N° RG 25/04490 - N° Portalis 35L7-V-B7J-CLZKH

Décision déférée : ordonnance rendue le 17 août 2025, à 13h11, par le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Paris

Nous, Guillemette Meunier, présidente de chambre à la cour d'appel de Paris, agissant par délégation du premier président de cette cour, assistée de Valentin Hallot, greffier aux débats et au prononcé de l'ordonnance,

APPELANT :

M. [P] [R]

né le 31 décembre 1975 à [Localité 1], de nationalité malienne

RETENU au centre de rétention : [Localité 2] 1

assisté de Me Ruben Garcia substitué par Me Benjamin Darrot, avocat au barreau de Paris

INTIMÉ :

LE PREFET DE POLICE

représenté par Me Antoine MARCHAND, du cabinet Centaure, avocats au barreau de Paris

MINISTÈRE PUBLIC, avisé de la date et de l'heure de l'audience

ORDONNANCE :

- contradictoire

- prononcée en audience publique

Vu le décret n° 2024-799 du 2 juillet 2024 pris pour l'application du titre VII de la loi n° 2024-42 du 26 janvier 2024 pour contrôler l'immigration, améliorer l'intégration, relatif à la simplification des règles du contentieux ;

Constatant qu'aucune salle d'audience attribuée au ministère de la justice spécialement aménagée à proximité immédiate du lieu de rétention n'est disponible pour l'audience de ce jour.

- Vu l'ordonnance du 17 août 2025 du magistrat du siège du tribunal judiciaire de Paris rejetant les moyens soulevés et ordonnant la prolongation du maintien de M. [P] [R], dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, pour une durée maximale de 30 jours, à compter du 15 août 2025 soit jusqu'au 14 septembre 2025 ;

- Vu l'appel motivé interjeté le 18 août 2025, à 05h59 complété à 06h10, par M. [P] [R] ;

- Après avoir entendu les observations :

- de M. [P] [R], assisté de son avocat, qui demande l'infirmation de l'ordonnance ;

- du conseil du préfet de police tendant à la confirmation de l'ordonnance ;

SUR QUOI,

Sur la notification de la décision rendue par la Cour d'appel en vertu des articles R743-16 et 17 du CESEDA

En vertu de l'article R. 743-7 du CESEDA : « L'ordonnance du magistrat du siège du tribunal judiciaire est rendue dans les quarante-huit heures suivant l'expiration du délai fixé au premier alinéa de l'article L. 741-10 ou, lorsqu'il est saisi en application des articles L. 742-1 et L. 742-4 à L 742-7, suivant sa saisine.

Lorsque les parties sont présentes à l'audience, elle leur est notifiée sur place. Elles en accusent réception. Le magistrat leur fait connaître verbalement le délai d'appel et les modalités selon lesquelles cette voie de recours peut être exercée. Il les informe simultanément que seul l'appel formé par le ministère public peut être déclaré suspensif par le premier président de la cour d'appel ou son délégué.

Lorsque les parties ne sont pas comparantes ou ne sont pas présentes au moment du prononcé de la décision, l'ordonnance leur est notifiée dans les délais les plus brefs et par tous moyens leur permettant d'en accuser réception. Cette notification mentionne le délai d'appel et les modalités selon lesquelles cette voie de recours peut être exercée et indique que seul l'appel interjeté par le ministère public peut être déclaré suspensif par le premier président de la cour d'appel ou son délégué.

Cette notification, qui comprend les mentions prévues au troisième alinéa, est également faite au procureur de la République qui en accuse réception ».

S'agissant des voies de recours l'article L743-21 dispose que : « les ordonnances mentionnées au présent chapitre sont susceptibles d'appel devant le premier président de la cour d'appel ou son délégué. L'appel peut être formé par l'étranger, le ministère public et l'autorité administrative. Le premier président de la cour d'appel ou son délégué est saisi sans forme et doit statuer dans les quarante-huit heures de sa saisine.

Sous réserve des dispositions du troisième alinéa, les dispositions du présent chapitre relatives aux attributions et à la procédure suivie devant le magistrat du siège du tribunal judiciaire sont applicables devant la cour d'appel.

L'article L743-22 du CESEDA prévoit que : l'appel n'est pas suspensif. Toutefois, le ministère public peut demander au premier président de la cour d'appel ou à son délégué de déclarer son recours suspensif lorsqu'il lui apparaît que l'intéressé ne dispose pas de garanties de représentation effectives ou en cas de menace grave pour l'ordre public. Dans ce cas, l'appel est accompagné de la demande qui se réfère à l'absence de garanties de représentation effectives ou à la menace grave pour l'ordre public, et transmis au premier président de la cour d'appel ou à son délégué. Celui-ci décide, sans délai, s'il y a lieu de donner à cet appel un effet suspensif, en fonction des garanties de représentation dont dispose l'étranger ou de la menace grave pour l'ordre public, par une ordonnance motivée rendue contradictoirement et qui n'est pas susceptible de recours ».

En outre, l'article R743-20 du CESEDA dispose que : « L'ordonnance du premier président de la cour d'appel ou de son délégué n'est pas susceptible d'opposition.

Le pourvoi en cassation est ouvert à l'étranger, à l'autorité administrative qui l'a placé en rétention et au ministère public ».

Enfin l'article 504 du code de procédure civile précise que : « La preuve du caractère exécutoire ressort du jugement lorsque celui-ci n'est susceptible d'aucun recours suspensif ou qu'il bénéficie de l'exécution provisoire ».

En matière de contentieux de la rétention, il s'induit de la combinaison des articles L743-21 et R743-20 du CESEDA et 504 du code de procédure civile que les décisions rendues par le premier président de la cour d'appel ou son délégué sont exécutoires dès leur prononcé, indépendamment de toute notification, qui n'a vocation qu'à faire courir les voies de recours.

En l'espèce le conseil du retenu conteste la régularité de la procédure eu égard à l'absence de notification de l'ordonnance rendue le 22 juillet 2025 statuant sur l'effet suspensif de l'appel, ordonnance qui n'est pas susceptible de recours selon l'article L743-22 du CESEDA.

Sur ce,

Le conseiller délégué par le Premier Président de la Cour d'appel de Paris constate que l'ordonnance statuant sur les effets suspensifs rendue par le délégué du premier président de la cour d'appel de Paris n'a pas été notifiée à l'intéressé.

Cette ordonnance notifiée indique expressément qu'elle n'est pas susceptible de recours, conformément aux textes en vigueur.

Il est rappelé qu'au terme de l'art L. 743-12 du CESEDA, " en cas de violation des formes prescrites par la loi à peine de nullité ou d'inobservation des formalités substantielles, toute juridiction (') qui est saisie d'une demande d'annulation ou qui relève d'office une telle irrégularité ne peut prononcer la mainlevée de la mesure de placement en rétention que lorsque celle-ci a eu pour effet de porter atteinte aux droits de l'étranger ". Aucune nullité ne peut être formelle, il doit donc être démontré en quoi celle-ci affecte effectivement les droits reconnus à l'étranger.

Il faut donc démontrer que l'irrégularité a causé à la personne une atteinte à ses intérêts " pas de nullité sans grief ".

De même en matière de contentieux administratif, l'ordre administratif, par arrêt d'assemblée du 23 décembre 2011, le Conseil d'État rendait l'arrêt [S] énonçant qu'un vice de procédure n'entraîne l'illégalité d'une décision administrative qu'en deux situations :

soit s'il a été susceptible d'exercer une influence sur le sens de la décision prise,

soit s'il a privé les intéressés d'une garantie.(CE Ass. 23 déc. 2011, [S])

Cette exigence du vice substantiel développé par l'arrêt du CE assemblée 23 décembre 2011 [S]: suppose que seuls les vices de procédure ayant eu une influence sur le contenu de la décision ou ayant privé l'administré d'une garantie entraîne une irrégularité de la décision.

Il faut donc une atteinte aux droits de la personne.

Etant précisé que les irrégularités portant ou non atteinte aux droits de la personne relèvent de l'appréciation souveraine des juges du fond ( Cass. 1re civ., 15 oct. 2020, n° 20-15.691. - Cass. 1re civ., 10 févr. 2021, n° 19-25.224. Cass. 1re civ., 3 mars 2021, n° 19-23.581 ).

Ainsi, bien que la notification de l'ordonnance statuant sur l'effet suspensif du 22 juillet 2025 n'ait pas été notifiée, il n'en demeure pas moins que cette absence de formalité n'a pas eu pour effet de porter substantiellement atteinte aux droits de l'étranger qui a porté à l'audience de ce jour, toutes les contestations sur la régularité de la procédure avec l'assistance de son conseil.

Par ailleurs, le 22 juillet 2025 lors du prononcé de l'ordonnance suspensive, il n'était en mesure d'effectuer aucun exercice des droits pour contester ladite ordonnance à laquelle la loi accorde un effet exécutoire insusceptible de recours.

Le moyen d'irrégularité sera donc rejeté.

Sur le moyen tiré de l'absence de registre actualisé et conforme et l'irrecevabilité de la requête à défaut de copie actualisée du registre du CRA

Ce moyen manque en fait en ce qu'une copie du registre figure effectivement en procédure respectant, dans les termes de celle-ci, les exigences de l'article L 744-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile concernant les mentions exigibles, l'article stipulant " Il est tenu, dans tous les lieux recevant des personnes placées ou maintenues au titre du présent titre, un registre mentionnant l'état civil de ces personnes ainsi que les conditions de leur placement ou de leur maintien. Le registre mentionne également l'état civil des enfants mineurs accompagnant ces personnes ainsi que les conditions de leur accueil. L'autorité administrative tient à la disposition des personnes qui en font la demande les éléments d'information concernant les date et heure du début du placement de chaque étranger en rétention, le lieu exact de celle-ci ainsi que les date et heure des décisions de prolongation.

Il sera rappelé que le caractère " utile " s'apprécie in concreto, comme le retient à juste titre le premier juge, que le document est conforme aux dispositions légales précitées. En l'espèce, le registre fait mention de la décision du juge des libertés et de la détention du 21 juillet 2025, de l'appel suspensif du parquet interjeté le même jour suivi de l'arrêt d ela cour d'appel, et de l'arrêt de la cour d'appel en date du 23 juillet 2025.

Force est de constater que le registre communiqué par la préfecture comporte toutes les mentions ainsi que toutes les indications permettant au juge d'exercer pleinement son contrôle le moyen ne saurait prospérer.

En l'absence de toute illégalité de la décision de placement en rétention, et à défaut d'autres moyens présentés en appel, il y a lieu de confirmer l'ordonnance critiquée.

Il convient de confirmer l'ordonnance querellée.

PAR CES MOTIFS

CONFIRMONS l'ordonnance

ORDONNONS la remise immédiate au procureur général d'une expédition de la présente ordonnance.

Fait à [Localité 2] le 19 août 2025 à

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

REÇU NOTIFICATION DE L'ORDONNANCE ET DE L'EXERCICE DES VOIES DE RECOURS : Pour information : L'ordonnance n'est pas susceptible d'opposition.

Le pourvoi en cassation est ouvert à l'étranger, à l'autorité administrative qui a prononcé le maintien en zone d'attente ou la rétention et au ministère public.

Le délai de pourvoi en cassation est de deux mois à compter de la notification.

Le pourvoi est formé par déclaration écrite remise au secrétariat greffe de la Cour de cassation par l'avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation constitué par le demandeur.

Le préfet ou son représentant L'intéressé L'avocat de l'intéressé

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