CA Nancy, 5e ch., 20 août 2025, n° 24/00795
NANCY
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Alfonz (SASU)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Beaudier
Conseillers :
M. Beaudier, M. Firon, M. Jobert
Avocats :
Me Delfour, Me Barreau
FAITS ET PROCEDURE
La société Alfonz a pour activité la vente de mobilier intérieur et extérieur, d'accessoires de décoration, et notamment de panneaux en papier froissé, depuis le 2 janvier 2015.
Mme [N] [D] exerce quant à elle sous le nom commercial 'Artysse' et a développé une activité de création et fabrication de panneaux de papiers 'froissés et plissés', depuis le 15 septembre 2021.
Par courrier recommandé du 14 mars 2022, la société Alfonz a mis en demeure Mme [N] [D] de cesser ses productions artistiques, constituant selon elle des actes de concurrence déloyale. Elle l'a également enjoint de lui soumettre une proposition d'indemnisation, afin de réparer un préjudice commercial allégué.
Par courrier en date du 28 avril 2022, Mme [N] [D], par l'intermédiaire de son avocat, a contesté les actes de concurrence déloyale reprochés par la société Alfonz.
Le 30 mars 2023, la société Alfonz a assigné Mme [N] [D] devant le tribunal de commerce de Nancy aux fins de faire cesser les actes allégués de concurrence déloyale et parasitaire et a notamment sollicité la condamnation de celle-ci au paiement de la somme de 80 000 euros au titre du préjudice subi.
Suivant jugement, rendu contradictoirement le 15 janvier 2024, le tribunal de commerce de Nancy a :
- déclaré la société Alfonz mal fondée en sa demande au titre du préjudice économique, l'en a débouté,
- déclaré la société Alfonz mal fondée en sa demande au titre du préjudice d'image, l'en a débouté,
- déclaré Mme [N] [D] mal fondée en sa demande au titre du préjudice moral, l'en débouté,
- condamné la société Alfonz aux entiers dépens de l'instance,
- condamne la société Alfonz à payer à Mme [N] [D] la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Par déclaration du 19 avril 2024, la société Alfonz a interjeté appel du jugement rendu par le tribunal de commerce de Nancy le 15 janvier 2024.
Aux termes de ses dernières conclusions remises au greffe le 13 janvier 2025, la société Alfonz demande à la cour de :
- réformer le jugement du tribunal de commerce de Nancy du 15 janvier 2024, sauf en ce qu'il a débouté Mme [N] [D] de sa demande formée au titre du préjudice moral, et statuant à nouveau,
- débouter Mme [N] [D] de ses demandes et de son appel incident,
- ordonner à Mme [N] [D] de :
* cesser la commercialisation de panneaux de papier froissé,
* modifier son site internet www.artysse.fr, ainsi que tous supports de communication afin d'éviter tout risque de confusion avec les activités de la société Alfonz,
* de manière générale, cesser immédiatement tout agissement visant à entretenir la confusion avec les activités de la société Alfonz,
- et ce, sous astreinte de 500 euros par jour de retard passé un délai de 48 heures suivant la signification du jugement à intervenir,
- condamner Mme [N] [D] à verser à la société Alfonz la somme de 30 000 euros au titre du préjudice économique subi,
- condamner Mme [N] [D] à verser à la société Alfonz la somme de 50 000 euros au titre du préjudice moral et d'image,
- ordonner la publication, aux frais exclusifs de Mme [N] [D], sous astreinte de 500 euros par jour de retard passé un délai de 48 heures suivant la signification du jugement à intervenir, du dispositif ou d'un extrait précis de la décision à intervenir, précédé du titre 'publication judiciaire', dans trois journaux ou revues, édition papier ou numérique, au choix de la requérante et dans la limite de 5 000 euros par insertion,
- autoriser la société Alfonz à procéder à la publication du même extrait du jugement sur le site internet https://www.alfonz.fr/ pendant une durée ininterrompue de 90 jours.
Y ajoutant :
- condamner Mme [N] [D] à verser à la société Alfonz la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner Mme [N] [D] aux dépens.
Aux termes de ses dernières conclusions remises au greffe le 3 mars 2025, Mme [N] [D] demande à la cour de :
- rejeter l'appel de la société Alfonz,
- faire droit à l'appel incident de Mme [D],
- confirmer en conséquence le jugement du tribunal de commerce de Nancy en date du 15 janvier 2024, sauf en ce qu'il a débouté Mme [D] de sa demande au titre de dommages et intérêts pour préjudice moral.
Statuant de nouveau sur ce point :
- condamner la société Alfonz au paiement de la somme de 30 000 euros au titre de dommages et intérêts pour préjudice moral, financier et d'image.
Y ajoutant,
- condamner la société Alfonz au paiement de la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre au paiement des entiers dépens, en ce compris les frais du constat d'huissier du 3 juin 2023.
Pour un plus ample exposé des moyens et des prétentions des parties, la cour renvoie expressément à leurs conclusions visées ci-dessus.
Vu l'ordonnance de clôture en date du 3 avril 2025 ;
MOTIFS :
- Sur la violation du principe de la contradiction :
En application de l'article 16 du code de procédure civile, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction.
Il ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement.
Il ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations.
Au soutien de son appel, la société Alfonz fait grief au tribunal de commerce de Nancy d'avoir violé le principe du contradictoire, en affirmant dans son jugement qu'elle ne pouvait revendiquer un droit privatif sur le procédé de fabrication de ses produits (technique dite du 'plissé froissé') sur le constat d'une exposition sur le thème 'intention papier' qui s'est tenue avant sa création, le 10 mai 2024. Elle fait valoir que la tenue de cette exposition n'a jamais été débattue, ni même évoquée par les parties aux cours des débats.
La société Alfonz relève également que le tribunal a rejeté ses demandes, après avoir considéré que les illustrations reproduites par 'Artysse' sont communes à la quasi-totalité des vendeurs en ligne, à l'instar de 'Esty', 'Wallandgo' et 'monde sauvage', alors que la visualisation des sites mentionnés n'a fait l'objet en première instance d'aucun débat contradictoire, et que l'existence de des derniers n'a même également jamais été mentionnée par Mme [N] [D].
Aux termes de l'article 954 du code de procédure civile, applicable à la procédure d'appel avec représentation obligatoire, Les conclusions comprennent distinctement un exposé des faits et de la procédure, une discussion des prétentions et des moyens et un dispositif dans lequel l'appelant indique s'il demande l'annulation ou l'infirmation du jugement et énonce, s'il conclut à l'infirmation, les chefs du dispositif du jugement critiqués, et dans lequel l'ensemble des parties récapitule leurs prétentions. Si, dans la discussion, des moyens nouveaux par rapport aux précédentes conclusions sont invoqués au soutien des prétentions, ils sont présentés de manière formellement distincte.
La cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.
Force est de constater en l'espèce que la société Alfonz n'a pas soulevé dans ses conclusions d'appel, notifiées le 13 janvier 2025, la nullité du jugement rendu le 15 janvier 2024 par le tribunal de commerce de Nancy, au motif que celui-ci n'aurait pas observer lui-même le principe de la contradiction, en fondant sa décision sur des éléments étrangers aux débats. Aux termes du dispositif de celles-ci, elle a en effet conclu uniquement la réformation de ce dernier.
En tout état de cause, il convient de relever que par l'effet dévolutif de l'appel, la cour est saisie de l'entier litige, et que la société Alfons a fait valoir ses observations, tant sur les sites internet incriminés, que sur les conséquences à tirer de l' exposition en date du 10 mai 2024 sur l'originalité du procédé de fabrication alléguée par l'appelante.
- Sur la responsabilité de Mme [N] [D] :
Aux termes de l'article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.
Il résulte de ce texte qu'en raison du principe de la liberté d'exploitation non contrefaisante, corollaire de la liberté de commerce et d'industrie, en l'absence de tout droit privatif, le seul fait de commercialiser des produits identiques à ceux distribués par un concurrent n'est pas fautif et le fait de copier un produit concurrent qui n'est pas protégé par des droits de propriété intellectuelle ne constitue pas en soit un acte de concurrence déloyale.
Toutefois, l'action en concurrence déloyale est ouverte à celui qui ne peut se prévaloir d'un droit privatif, à condition de rapporter la preuve d'une faute commise par un concurrent. Hors de toute protection légale, la reproduction servile ou l'imitation de produit constitue un acte de concurrence déloyale, dès l'instant qu'existe un risque de confusion entre les produits dans l'esprit des acheteurs.
La société Alfonz rappelle qu'elle a débuté son activité dans la vente d'objets de décoration et qu'elle s'est spécialisée dans la confection et la vente de panneaux de papiers froissés. Il n'est pas discuté qu'elle ne dispose en l'espèce d'aucun droit de propriété intellectuelle sur la technique de fabrication de ces derniers, de sorte qu'il lui appartient d'apporter la preuve d'un faute commise par Mme [N] [D] dans le cadre de la commercialisation de ses propres panneaux de décoration.
L'imitation d'un produit non protégé par un concurrent devient fautive lorsqu'elle révèle une volonté de ce dernier de créer une confusion dans l'esprit du consommateur entre deux produits, ou lorsqu'il est démontré un défaut de précautions élémentaires qui auraient permis à ce dernier de l'empêcher.
Au soutien d'un procès-verbal en date du 11 mars 2022, lequel décrit les objets mis en vente par Mme [N] [D] sur son site internet 'Artysse', la société Alfonz prétend que cette dernière a imité son concept de papier froissé, qu'elle avait personnellement développé depuis 2021, afin d'obtenir un vieillissement artificiel des images reproduites sur des panneaux décoratifs qui sont mis en vente sur son propre site. L'appelante fait valoir que l'accumulation des similarités techniques et artistiques des panneaux commercialisés par l'intimée est nécessairement volontaire, celle-ci ayant pour but et pour effet de créer une confusion auprès des acheteurs avec ces propres panneaux. Elle considère que l'imitation de ces produits par Mme [N] [D] constitue un acte de concurrence déloyale par un détournement de clientèle.
Mme [N] [D] soutient en défense qu'elle utiliserait pour la confection de ses propres panneaux décoratifs la technique dite du 'papier plissé froissé' qui est différente de celle du 'papier froissé' revendiquée par la société Alfonz. Cependant, l'intimée ne verse aux débats aucun élément démontrant la spécificité de son procédé de fabrication par l'ajout d'une étape supplémentaire de plissement des images reproduites sur ses propres panneaux. La comparaison visuelle de ces derniers avec ceux réalisés par la société Alfons ne fait apparaître aucune différence notable et ne permet pas de les distinguer à l'oeil nu par l'utilisation d'un mode de fabrication singulier.
La technique utilisée du 'papier plissé froissé' par Mme [N] [D] n'est pas de nature à dissiper tout risque de confusion avec les produits fabriqués par la société Alfonz dans la mesure où leur aspect visuel visuel, caractéristique essentielle de ces derniers, est identique L'obtention d'un 'un touché proche du tissu' par l'application de la technique du 'papier plissé froissé' est en effet indifférente, étant observé que l'intimée ne justifie pas faire la promotion cette caractéristique tactile auprès de ses clients pour mettre en valeur ses créations et souligner leur originalité par rapport aux modèles présentés par ses concurrents.
Les produits commercialisés respectivement par les parties sont donc similaires, et ceux réalisés par Mme [N] [D] ne se distinguent pas par l'utilisation revendiquée de la technique du papier plissé froissé', dont l'originalité n'est pas démontrée. Les images reproduites sur les panneaux décoratifs réalisés respectivement par les parties sont en effet similaires et présentent des caractéristiques communes ( couleurs pastel obtenues et aspect vieilli). Il convient d'observer à cet égard que le catalogue diffusé sur internet par l'intimée, en vue de la promotion de ses oeuvres, ne revendique pas l'utilisation d'un mode de fabrication spécifique et différent permettant de les démarquer de ceux proposés par la concurrence, dont la société Alfonz. .
En revanche, la société Alfons qui ne dispose d'aucun droit de propriété sur la technique consistant à reproduire des images sur des panneaux décoratifs après froissement du papier, ne rapporte pas la preuve que Mme [N] [D] aurait intentionnellement imiter ses propres panneaux, dans le but de créer une confusion auprès de sa clientèle, et ainsi de la détourner à son profit. La consultation des catalogues diffusés par internet par les autres concurrents, ayant pour activité la vente d'objets similaire de décoration d'intérieur, révèle en effet que la confection de panneaux reproduisant des images plissées ou froissées préalablement, en vue d'obtenir un aspect vieilli ou artisanal, est très répandue. A titre d'exemple, il est justifié par l'intimée que la société Redcartel qui a été créée en 2014, soit avant la société Alfonz, commercialise des ouvrages décoratifs en papier recyclé semblables à ceux présentés par cette dernière dans son catalogue de vente.
Il est justifié également qu'il existe sur le marché de nombreux articles similaires qui sont produits par d'autres concurrents, lesquels présentent des caractéristiques techniques ou artistiques similaires, à l'instar des sociétés Limah concept Store, La Redoute, The Cool Republic, Dawer, Miacasia, Leroy Merlin, Castorama, qui sont citées en exemples par Mme [N] [D] à l'appui de captures d'écran effectuées depuis leur site internet.
Il en va de même des autres sites internet 'l'autre monde', 'l'autre maison' 'Esty, Wallandgo' et 'le monde sauvage', examinés par le tribunal de commerce de Nancy qui proposent à la vente des reproductions sur des panneaux décoratifs de divers paysages et animaux, analogues aux thèmes repris par la société Alfons. L'examen des reproductions concernées confirment l'absence d'originalité, tant des images utilisées, que des thèmes exploités par l'appelante. Le fait que 'le monde sauvage' et 'l'autre maison' aient travaillé avec la société Alfonz est sans import sur ce constant, sachant qu'il n'est pas prouvé que les articles exposés sur ces sites seraient des créations originales de l'appelante, comme elle le prétend.
La société Alfonz ne rapporte pas non plus la preuve que Mme [N] [D] aurait créé par l'intermédiaire de M. [U] [S], co-fondateur d' 'Artysse' le site internet Wallandgo dans le dessein de détourner sa clientèle. Ce dernier est en effet le site de M. [F] [V], entrepreneur individuel depuis le 2 novembre 1983, exerçant sous le nom commercial 'Wallangdo', lequel n'a aucun lien institutionnel avec l'intimée. Enfin, il est constant que la technique de décoration dite du 'papier froissé' a été présentée à l'occasion d'une exposition à la galerie des arts de [Localité 4], intitulée 'intention papier', qui s'est tenue le 10 mai 2014. Cet exemple démontre que la société Alfons, ayant débuté son activité en 2016, ne peut revendiquer la paternité du processus de fabrication de ses panneaux. Ses oeuvres ne présentent aucune originalité en comparaison de celles fabriquées par ses concurrents souvent à une échelle industrielle. La vente par Mme [N] [D] de panneaux décoratifs aux caractéristiques similaires ne présente dans ces conditions aucun caractère fautif pouvant constituer un acte de concurrence déloyale.
Il n'est pas discuté en outre que la société Alfonz ne détient également aucun droit de propriété sur les images qu'elle sélectionne pour la confection de ses panneaux décoratifs. Elle ne conteste pas utiliser, comme Mme [N] [D], des images libres de droit d'auteur qui sont tirées de banques gratuites de photos ou tombées dans le domaine public. Elle ne démontre dans ces conditions aucune faute commise par l'intimée dans le choix des images reproduites pour la confection de ses panneaux muraux. Ces images sont en effet accessibles par l'ensemble des concurrents, oeuvrant dans le même secteur de la décoration intérieure, ne présentant aucune originalité. Ainsi leur exploitation par Mme [N] [D] n'apparaît pas en soi susceptible de créer un risque de confusion pour les acheteurs. Il n'est donc démontré aucune faute quant à leur utilisation par l'intimée, la société Alfonz n'étant titulaire d'aucun droit d'usage exclusif sur celles-ci. .
Il n'est pas démontré au surplus que Mme [N] [D] aurait délibérément choisi des illustrations semblables à celles choisies par la société Alfonz (paysages, natures mortes, portraits, animaux etc...) pour la création de ses propres panneaux décoratifs. L'intimée relève à juste titre sur ce point que les images sélectionnées sont utilisées par tous les producteurs concurrents. Le seul choix des images présentant des personnages ou des thèmes analogues n'apparaît pas de nature à créer un risque particulier de confusion avec les produits commercialisés par la société Alfonz.
Notamment, la société Alfonz reproche à Mme [N] [D] de l'avoir intentionnellement imité, en reproduisant sur ses panneaux de vieux portraits photographiques, vendus sur son catalogue édité en 2023, alors qu'elle venait selon elle tout juste d'exploiter ce type de photographies pour la production de ses oeuvres artistiques. Il est justifié toutefois par la consultation des autres sites internet des autres concurrents, dont les extraits sont reproduits par Mme [N] [D], que l'utilisation de ce type d' illustrations, en l'occurrence tombées dans le domaine public, sont également très répandues au sein des autres concurrents. Elles ne présentent au surplus aucune originalité, permettant de les confondre avec les exemplaires vendus par la société Alfonz sur son site internet.
La société Alfonz soutient encore que Mme [N] [D] aurait imité les titres de ses panneaux et cite à titre d'exemples : 'la famille tigres' au lieu de 'tigreaux', 'le colibri' au lieu de 'nectar de colibri', 'le touareg' au lieu de 'portrait touareg', 'la pinède- tryptique' au lieu de 'tryptique pinède', 'la nuit du toucan' au lieu de 'toucan noir', ou encore 'colibri et passiflore' au lieu de 'colibri passiflore'. Mme [N] [D] justifie cependant que les titres ainsi choisis s'inspirent des noms originaux des oeuvres qui ont été donnés par leurs auteurs. Ces titres se bornent généralement à décrire le thème de la peinture concernée, présentant un caractère purement descriptif du contenu de la représentation. La société Alfonz ne justifie pas dans ses conditions que l'intimée aurait délibérément imité le titre de oeuvres, afin de créer un risque de confusion avec ceux donnés à ses propres reproductions, lesquels reprennent aussi les standards de présentation utilisés par les autres concurrents, à savoir la description objective du contenu de la peinture ou de la photographie, sans aucune indication du nom de l'artiste ou de leur date de création qui permettrait de les personnaliser. .
La société Alfonz ne démontre pas davantage que Mme [N] [D] aurait copié ses propres techniques de fabrication dans le but de créer un risque de confusion avec les panneaux décoratifs qu'elle commercialise, et dont elle fait la promotion sur son site internet. En premier lieu, elle ne verse aux débats aucun élément technique de nature à démonter que l'apposition d'un pinçon à l'arrière des panneaux constituerait un élément artistique singularisant ses créations. Mme [N] [D] affirme sur ce point que l'utilisation d'un poinçon constitue une nécessité technique, étant selon elle l'un des seuls moyens d'afficher la marque du papier, sans qu'elle ne figure sur le dessin. Il ne ressort pas au surplus du catalogue édité annuellement par l'intimée qu'elle aurait fait l'apanage auprès de ses clients de ce poinçon qui ne constitue pas une marque de fabrique de la société Alfonz en vue de créer volontairement une confusion.
La société Alfonz fait grief à Mme [N] [D] de produire des panneaux décoratifs sous la forme de 'dyptique' ou de 'tryptique', et de poser comme elle des baguettes au dos de ces derniers pour permettre leur accrochage mural. Elle soutient également que l'intéressé a sciemment imité le principe de l'étiquetage d'un certificat d'authenticité sur ses tableaux, afin encore d'accentuer la confusion déjà existante avec ses propres productions. Il est cependant justifié par l'intimée que l'impression panneaux, sous forme de 'dyptiques' ou de 'tryptiques', est très répandue sur le marché de la décoration et que les autres concurrents, à l'instar de Mme [N] [D], proposent à la vente des produits similaires (Castorama et La Redoute).
Il en va de même de l'apposition de baguettes de fixation au dos du panneau, lesquelles sont largement utilisés pour leur suspension, ou encore de l'établissement d'un certificat d'authenticité. Ce mode d'étiquetage est commun à de nombreux autres objets décoratifs. Au surplus, l'intimée relève à juste titre que les certificats d'authenticité apposés sur ses propres panneaux reprend les éléments essentiels de fabrication utilisées, à la différence de ceux affichés par la société Alfonz qui font mention seulement le cas échéant d'une collaboration avec un artiste désigné. Il n'existe par conséquent aucun risque de confusion pour les acheteurs.
La société Alfonz fait valoir que Mme [N] [D] utilise sur son site internet des slogans, tels que 'faites entrer l'art dans vos intérieurs avec cette sublime peinture', analogues aux siens ('quand l'art mural décoratif s'invite dans votre intérieur'), ce qui est de nature pour elle à créer auprès des acheteurs en ligne un risque volontaire de confusion avec ses productions artistiques. Mme [N] [D] relève à juste titre que l'utilisation de l'expression revendiquée par la société Alfonz pour faire la promotion des ses produits ne présente aucune originalité qui permettrait de la distinguer des autres expressions courantes employées par ses autres concurrents. Il est constant en effet que ces derniers utilisent des formules analogues, telles que 'comment faire entrer l'art dans votre intérieur' (artshee.com), 'faîte entre l'art dans votre maison' (BnBHome) 'comment intégrer l'art dans votre intérieur '' (Blog Oknoplast). Il n'est justifié en conséquence d'aucune faute imputable à l'intimée dans l'utilisation d'un slogan publicitaire, en l'espèce similaires à ceux repris par les autres vendeurs d'objets de décoration intérieure. Il n'est démontré ainsi aucune faute commise par Mme [N] [D] dans l' emprunt du slogan litigieux pour faire la promotion de ses produits. .
En conclusion, compte tenu de l'absence d'originalité des procédés techniques décrits ci-dessus, et en tout état de cause de l'absence de droit de propriété sur ces derniers, la société Alfonz ne rapporte pas la preuve d'une faute commise par Mme [N] [D] dans le cadre de leur utilisation et se sa volonté délibérée de créer un risque de confusion avec ses propres productions.
Il est constant que le parasitisme est défini comme l'ensemble des comportements par lesquels un agent économique s'immisce dans le sillage d'un autre afin de tirer profit, sans rien dépenser, de ses efforts et de son savoir-faire ou de profiter indûment ou de la notoriété acquise ou des investissements consentis. Il résulte des dispositions de l'article 1240 du code civil que parasitisme en matière commerciale suppose la démonstration d'une faute intentionnelle.
La société Alfonz fait valoir qu'elle développé d'importants investissements afin d'asseoir sa notoriété et de développer le concept du 'papier froissé' en France et à l'étranger. Elle fait grief à Mme [N] [D], sous couvert de la promotion de la marque concurrente 'Artysse', de s'être volontairement placée dans son sillage et de profiter de manière indue de ses investissements, en particulier en matière de publicité sur internet et dans les différents salons d'exposition en vue de promouvoir son savoir-faire.
Il n'est pas démontré cependant que Mme [N] [D] se serait immiscée dans le sillage de la société Alfonz, afin de tirer profit de la notoriété auprès du public des produits conçus par l'appelante. La société Alfonz ne rapporte pas la preuve qu'elle aurait créé et utilisé un compte 'instagram' dénommé 'AKTE2" en vue de suivre en toute discrétion le développement de son activité commerciale et de copier ses créations. Il n'est versé aucun élément aux débats de nature à établir que Mme [N] [D] aurait profité de la réputation des produits vendus par la société Alfonz en vue d'asseoir la promotion de ses propres créations.
La société Alfonz ne prouve en conclusion aucun acte positif de captation parasitaire commis par Mme [N] [D] auprès de ses clients qui achètent ses produits sur internet.
Il convient par conséquent de confirmer le jugement entrepris, en ce qu'il a débouté la société Alfonz de toutes ses demandes.
- Sur la demande de dommages-intérêts formée par Mme [N] [D] :
Mme [N] [D] ne démontre pas que l'action engagée par la société Alfons devant le tribunal de commerce de Nancy, sur le fondement de la concurrence déloyale, aurait dégénéré en abus du droit d'ester en justice. Elle ne justifie d'aucun acte d'intimidation commis par celle-ci dans le cadre de l'exercice cette action.
Il convient en conséquence de confirmer le jugement entrepris, en ce qu'il a débouté Mme [N] [D] de sa demande formée au titre de la réparation d'un préjudice moral.
- Sur les demandes accessoires :
Il convient de confirmer le jugement entrepris, en ces dispositions relatives aux dépens et à l'application de l'article 700 du code de procédure civile.
La société Alfonz est déboutée de sa demande formée au titre des frais irrépétibles de procédure exposés en cause d'appel.
La société Alfonz est condamnée aux entiers frais et dépens de l'appel, ainsi qu'à payer à Mme [N] [D] la somme de 4 000 euros au titre de l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
LA COUR, statuant par arrêt contradictoire prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450 alinéa 2 du Code de procédure civile,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant :
Déboute la société Alfonz de sa demande formée au titre de l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la société Alfonz aux dépens ;
Condamne la société Alfonz à payer à Mme [N] [D] la somme de 4 000 euros au titre de l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par M.Olivier BEAUDIER, Conseiller à la cinquième chambre commerciale, à la Cour d'Appel de NANCY, et par Madame Christelle CLABAUX-DUWIQUET, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.