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Décisions

CA Paris, Pôle 1 ch. 5, 22 août 2025, n° 25/11807

PARIS

Ordonnance

Autre

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Senel

Conseiller :

Senel

T. act. écon. B, du 3 juill. 2025, n° 20…

3 juillet 2025

La SAS LABEL BLUE SKY exerce l'activité de productions, éditions d'oeuvres phonographiques, musicales, audiovisuelles et cinématographiques. A la suite de plusieurs impayés auprès de l'URSSAF, elle s'est vue inscrire un privilège le 24 juin 2024 pour 21 851 euros.

Compte tenu de ces éléments, elle a fait l'objet d'une demande d'ouverture de procédure de liquidation judiciaire à la requête du ministère public, devant le tribunal des activités économiques de [B].

La SAS LABEL BLUE SKY ne s'est pas présentée à la convocation adressée par le tribunal.

Par jugement rendu le 3 juillet 2025, le tribunal des activités économiques de [B], statuant par jugement contradictoire, a :

- Ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'égard de la SAS LABEL BLUE SKY ;

- Nommé M. [V] [J], juge-commissaire ;

- Désigné la SELARL ACTIS MANDATAIRES JUDICIAIRES en la personne de Me [C] [M] [B], mandataire judiciaire liquidateur ;

- Dit n'y avoir lieu à désignation d'un commissaire de justice ;

- Fixé à 18 mois antérieurement au prononcé de ce jugement, soit au 24 juin 2024 la date de cessation des paiements compte tenu de l'ancienneté de l'inscription de privilège ;

- Invité le comité social et économique ou les salariés à désigner, le cas échéant, un représentant au sein de l'entreprise dans les conditions prévues par les articles L. 621-4 et L. 621-6 du code de commerce, et à communiquer le nom et l'adresse de ce représentant au greffe ;

- Fixé à 2 ans le délai au terme duquel la clôture de cette procédure devra être examinée en application de l'article L. 643-9 du code de commerce et invité les parties à se présenter le 01/07/2027 ;

- Fixé le délai de déclaration des créances imparti aux créanciers à deux mois à compter de la publication au Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales du jugement ;

- Fixé le délai de dépôt de la liste des créances par le mandataire à 12 mois à compter de la publication au Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales du jugement ;

- Dit que le jugement est exécutoire de plein droit ;

- Dit que les dépens ainsi que les frais de publicité et de signification à venir seront portés en frais de liquidation judiciaire.

La société LABEL BLUE SKY a interjeté appel de la décision le 9 juillet 2025, aux fins d'annulation ou d'infirmation. Cette affaire a été inscrite sous le numéro de répertoire général 25/12159 et affectée à la chambre 8 du pôle 5 de la cour.

Par actes de commissaire de justice des 18 et 21 juillet 2025, la société LABEL BLUE SKY a fait assigner la société SELARL ACTIS MANDATAIRES JUDICIAIRES en la personne de Me [C] [M] [B], en sa qualité de liquidateur judiciaire, et M. le procureur général près la cour d'appel de [B], en référés devant le premier président de la cour d'appel de [B] au visa des articles L. 631-1 et R. 661-1 du code de commerce, afin :

- d'arrêter l'exécution provisoire du jugement,

- de réserver les dépens au fond.

À l'audience, la société LABEL BLUE SKY a soutenu oralement son assignation, et faisant valoir que les moyens à l'appui de son appel paraissent sérieux, a maintenu sa demande d'arrêt de l'exécution provisoire du jugement, d'autant plus que la dette à l'égard de l'URSAFF a été entièrement réglée et que le tribunal des activités économiques de [B] a rendu le 19 août 2025 une décision ordonnant la poursuite de l'activité en liquidation judiciaire pour une durée de trois mois à compter du jugement d'ouverture, soit jusqu'au 3 octobre 2025, en application de l'article L. 641-10 du code de commerce.

Par écritures déposées à l'audience, auxquelles elle s'est rapportée, la SELARL ACTIS MANDATAIRES JUDICIAIRES, en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société LABEL BLUE SKY, demande au premier président de la cour d'appel de lui donner acte de ce qu'elle s'en rapporte à prudente justice sur la demande d'arrêt de l'exécution provisoire du jugement du tribunal des activités économiques de [B] du 3 juillet 2025 prononçant la liquidation judiciaire de la société LABEL BLUE SKY et de réserver les dépens au fond.

Le ministère public, informé de l'audience, n'a pas formulé d'observation.

L'affaire a été mise en délibéré au 22 août 2025.

MOTIFS

1. Sur la demande d'arrêt de l'exécution provisoire

Aux termes de l'article R. 661-1 du code du commerce, dans sa version en vigueur depuis le 1er janvier 2020, applicable à la présente instance, « les jugements et ordonnances rendus en matière de mandat ad hoc, de conciliation, de sauvegarde, de redressement judiciaire, de rétablissement professionnel et de liquidation judiciaire sont exécutoires de plein droit à titre provisoire.

Toutefois, ne sont pas exécutoires de plein droit à titre provisoire les jugements et ordonnances rendus en application des articles L. 622-8, L. 626-22, du premier alinéa de l'article L. 642-20-1, de l'article L. 651-2, des articles L. 663-1 à L. 663-4 ainsi que les décisions prises sur le fondement de l'article L. 663-1-1 et les jugements qui prononcent la faillite personnelle ou l'interdiction prévue à l'article L. 653-8.

Les dispositions des articles 514-1 et 514-2 du code de procédure civile ne sont pas applicables.

Par dérogation aux dispositions de l'article 514-3 du code de procédure civile, le premier président de la cour d'appel, statuant en référé, ne peut arrêter l'exécution provisoire des décisions mentionnées aux deux premiers alinéas du présent article que lorsque les moyens à l'appui de l'appel paraissent sérieux. L'exécution provisoire des décisions prises sur le fondement de l'article L. 663-1-1 peut être arrêtée, en outre, lorsque l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives. Dès le prononcé de la décision du premier président arrêtant l'exécution provisoire, le greffier de la cour d'appel en informe le greffier du tribunal.

En cas d'appel du ministère public d'un jugement mentionné aux articles L. 645-11, L. 661-1, à l'exception du jugement statuant sur l'ouverture de la procédure de sauvegarde ou de redressement judiciaire, L. 661-6 et L. 661-11, l'exécution provisoire est arrêtée de plein droit à compter du jour de cet appel. Le premier président de la cour d'appel peut, sur requête du procureur général, prendre toute mesure conservatoire pour la durée de l'instance d'appel ».

En l'espèce, comme le fait valoir la société LABEL BLUE SKY, les moyens à l'appui de son appel contre le jugement ayant ouvert une procédure de liquidation judiciaire à son égard, apparaissent sérieux.

En effet, pour ordonner une telle mesure, requise par le ministère public, le tribunal a notamment estimé que :

- le nombre de salariés et le chiffre d'affaires sont inconnus, la situation active et passive de la SAS à associé unique LABEL BLUE SKY est indéterminée hormis l'existence d'inscriptions de privilèges, objet de la requête du ministère public ;

- l'entreprise, manifestement dans l'impossibilité de faire face à son passif exigible, avec son actif disponible, se trouve en conséquence en état de cessation des paiements ;

- un redressement ne peut être envisagé pour les motifs suivants :

existence d'un passif exigible,

le débiteur ne se manifeste pas.

Or, aux termes de l'article L. 631-1 du code de commerce, dans sa version en vigueur depuis le 15 mai 2022, applicable à la présente instance, « Il est institué une procédure de redressement judiciaire ouverte à tout débiteur mentionné aux articles L. 631-2 ou L. 631-3 qui, dans l'impossibilité de faire face au passif exigible avec son actif disponible, est en cessation des paiements. Le débiteur qui établit que les réserves de crédit ou les moratoires dont il bénéficie de la part de ses créanciers lui permettent de faire face au passif exigible avec son actif disponible n'est pas en cessation des paiements.

Cette condition s'apprécie, s'il y a lieu, pour le seul patrimoine engagé par l'activité ou les activités professionnelles.

La procédure de redressement judiciaire est destinée à permettre la poursuite de l'activité de l'entreprise, le maintien de l'emploi et l'apurement du passif. Elle donne lieu à un plan arrêté par jugement à l'issue d'une période d'observation et, le cas échéant, à la constitution de classes de parties affectées, conformément aux dispositions des articles L. 626-29 et L. 626-30. La demande prévue au quatrième alinéa de l'article L. 626-29 peut être formée par le débiteur ou l'administrateur judiciaire».

Cette notion nécessite de définir ce que sont le passif exigible et l'actif disponible. L'actif disponible correspond à la trésorerie de la société débitrice immédiatement disponible ou disponible à bref délai (chèque de banque à encaisser, crédit de TVA, prix de vente séquestré chez un notaire, concours bancaire utilisable etc).

Le passif exigible comprend le paiement qu'un créancier est en droit d'exiger immédiatement.

Comme le fait valoir la société LABEL BLUE SKY, l'état de cessation des paiements dans la décision dont appel, n'est pas caractérisé.

La société LABEL BLUE SKY démontre dans le cadre de la présente instance en produisant un relevé de situation comptable du 10 juillet 2025 ainsi qu'une attestation de fourniture des déclarations sociales et de paiement des cotisations et contributions sociales du 7 juillet 2025 que, s'il y a eu des retards de paiement entre janvier 2024 et avril 2024, à l'origine de l'inscription prise, l'intégralité des cotisations 2024 est désormais réglée de sorte que cette inscription peut ainsi être radiée, et qu'il n'existe au jour dudit relevé plus aucune créance exigible de l'URSSAF.

Par ailleurs, sur requête du liquidateur judiciaire aux fins d'autoriser la poursuite rétroactive de l'activité de la société LABEL BLUE SKY pour une durée de trois mois à compter de la liquidation judiciaire prononcée le 3 juillet 2025, le tribunal des activités économiques de [B] a rendu le 19 août 2025 une décision ordonnant le maintien de l'activité en liquidation judiciaire pour une durée de trois mois à compter du jugement d'ouverture, soit jusqu'au 3 octobre 2025, en application des articles L. 641-10 et R. 641-18 du code de commerce.

2. Sur les autres demandes

Au regard de l'issue du litige, chacune des parties conservera la charge des dépens par elle exposés dans le cadre de la présente instance.

PAR CES MOTIFS,

ORDONNONS l'arrêt de l'exécution provisoire attachée au jugement rendu le 3 juillet 2025 par le tribunal des activités économiques de [B], sur requête du ministère public, à l'égard de la SAS LABEL BLUE SKY ;

LAISSONS à chacune des parties la charge des dépens par elle exposés dans le cadre de la présente instance.

Ordonnance rendue par Julien SENEL, Conseiller agissant par délégation du Premier Président de cette Cour, assisté de Soufiane HASSAOUI, greffier présent lors de la mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

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