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Décisions

Cass. 1re civ., 10 juillet 1990, n° 88-13.877

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

L et B Cassia Associés (Sté)

Défendeur :

Société de droit de l'Etat de Sharjah Pia Investments Ltd

Cass. 1re civ. n° 88-13.877

9 juillet 1990

Attendu, selon les énonciations de l'arrêt attaqué (Paris, 26 février 1988), qu'un différend est survenu entre la société libanaise "L et B Cassia Associés" (la société Cassia) le "Board of Control for cricket in Pakistan" (BCCP) d'une part, et la société Pia Investments Limited ayant son siège dans l'émirat arabe de Sharjah (la société Pia) d'autre part, au sujet de l'exécution d'un contrat d'architecte relatif à l'extension du stade de Karachi ; que ce "contract agreement", indiqué comme étant fait dans cette ville mais non daté, ne comportait que les initiales des parties en bas de page ; que la société Cassia, en se prévalant de la clause compromissoire qui y était insérée, a saisi la cour d'arbitrage de la Chambre de commerce internationale d'une demande d'arbitrage ; que par une sentence préliminaire, rendue à Paris, le 25 septembre 1986, contre laquelle un recours en annulation a été formé le 2 janvier 1987 par la société Pia, l'arbitre s'est déclaré compétent pour connaître du litige en ce qui concerne les défendeurs qui déniaient l'existence d'une convention d'arbitrage ; que la cour d'appel de Paris, par un arrêt irrévocable du 7 juillet 1987, a rejeté un recours en annulation d'une autre sentence du 18 janvier 1987 par laquelle l'arbitre avait refusé de surseoir à statuer ; que l'arrêt attaqué a annulé la sentence préliminaire sur le fondement du 1° de l'article 1502 du nouveau Code de procédure civile ;

Sur le premier et le deuxième moyens réunis :

Attendu que la société Cassia fait grief à cet arrêt d'avoir déclaré recevable le recours en annulation alors, selon le premier moyen, que la cour d'appel, en décidant que la société Pia, qui avait saisi l'arbitre d'une demande reconventionnelle, demeurait recevable à opposer l'absence de toute convention d'arbitrage dès lors que cette demande était assortie de réserves, a violé l'article 1492 du nouveau Code de procédure civile et les principes régissant l'arbitrage international ; alors, selon le deuxième moyen, qu'il y avait sur l'existence de la convention d'arbitrage chose "virtuellement" jugée par l'arrêt du 7 juillet 1987, si bien qu'en décidant qu'il n'y avait pas identité d'objet, la cour d'appel a encore violé l'article 1351 du Code civil ; Mais attendu, d'une part, que la cour d'appel a retenu que la société Pia avait contesté le pouvoir juridictionnel de l'arbitre dès la saisine de celui-ci et que la présentation par elle, le 4 mai 1987, d'un mémoire en défense contenant une demande reconventionnelle sous les plus expresses réserves et pour éviter qu'une décision soit rendue à son encontre sur le seul fondement des prétentions adverses, ne peut être tenue pour une renonciation à son exception d'incompétence ; qu'il résulte de ces constatations que la société Pia, en présentant une demande reconventionnelle postérieurement au refus de l'arbitre de surseoir à statuer, n'a pas adopté, contrairement à ce que soutient le pourvoi, deux attitudes procédurales inconciliables dans une même instance où l'arbitre ne tient son pouvoir que d'une commune volonté des parties dont l'expression était l'objet même du litige ; Attendu, d'autre part, qu'en faisant allusion à ce que les parties seraient convenues d'avoir recours à l'arbitrage, l'arrêt du 7 juillet 1987 qui, avait déjà dit, dans ses motifs, que la société Cassia n'avait pas renoncé à son exception d'incompétence, s'est borné à tenir pour acquis ce qui avait été décidé par la sentence du 25 septembre 1986 ayant, dès cette date, l'autorité de la chose jugée ; qu'ainsi, l'arrêt précité n'a pas tranché la question de la compétence de l'arbitre dont la cour d'appel n'était pas saisie ;

Sur le troisième moyen :

Attendu qu'il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir annulé la sentence préliminaire alors qu'en déduisant l'absence de preuve de la volonté des parties de recourir à l'arbitrage de celle d'un accord définitif des parties, au regard des lois pakistanaise et française, sur le contenu même du "contract agreement" dans lequel elle était insérée, il aurait méconnu le principe de l'autonomie de la clause compromissoire en matière d'arbitrage international, duquel il résulte que les conditions de formation de cette clause doivent s'apprécier abstraction faite de celles du contrat principal et par référence aux seuls usages du commerce international ; Mais attendu qu'en matière d'arbitrage international, l'autonomie de la clause compromissoire trouve sa limite dans l'existence, en la forme, de la convention principale qui contiendrait la clause invoquée ; que cette existence doit nécessairement s'apprécier d'après la loi qui selon les principes du droit international privé, régit la forme de la convention ; que l'arrêt attaqué, après avoir rappelé le principe d'autonomie, a légitimement apprécié l'existence de la clause compromissoire en fonction d'une loi étatique désignée par la règle de conflit sans encourir les griefs du moyen qui, dès lors, n'est pas davantage fondé ; Sur le quatrième moyen, pris en ses diverses branches :

Attendu qu'il est encore reproché à la cour d'appel, pour annuler la sentence, d'une part, d'avoir fait application de la loi pakistanaise comportant des exigences de forme plus strictes que celles de la loi française du for et dit que le contrat était régi par la loi pakistanaise alors que celui-ci, qui avait pour objet la conception de plans, était localisé au Liban, siège du cabinet d'architecte où, aussi, ont été versés les honoraires ; d'autre part, d'avoir refusé au "contract agreement" la force probante d'un écrit au motif que les parties y avaient seulement apposé leur paraphe ; enfin, de ne pas avoir répondu aux conclusions de la société Cassia qui tendaient à prouver l'existence de l'accord par les réponses faites à l'arbitre par le dirigeant commun du BCCP et de la société Pia ; Mais attendu, d'abord, que la cour d'appel, qui a relevé l'absence d'indication par les parties de la loi à laquelle elles entendaient soumettre leurs relations, était bien fondée à estimer qu'en raison des indices, retenues par elle, découlant du lieu de fourniture des prestations architecturales et du "paraphe" du contrat, celui-ci était localisé au Pakistan dont la loi régissait ainsi, à la fois, les conditions de fond et de forme ; que contrairement à ce que soutient le moyen, la preuve de l'existence du contrat et de la convention d'arbitrage a été examinée par la cour d'appel tant au regard de la loi française du for que de la loi pakistanaise ; qu'ensuite, les deux derniers griefs du moyen ne tendent qu'à remettre vainement en discussion les appréciations souveraines par lesquelles la cour d'appel a retenu le caractère équivoque de la signification des initiales apposées par les parties sur l'écrit ainsi que la suffisance des éléments de preuve ;

PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ;

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