CA Paris, Pôle 2 ch. 1, 2 juillet 2014, n° 14/11802
PARIS
Arrêt
Infirmation
PARTIES
Demandeur :
Me Dufour, DUFOUR IOSCA (SELARL)
Défendeur :
M. I
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Bichard
Avoués :
Me Chiffaut-Moliard, Me Patrimonio
Vu la sentence rendue le 6 décembre 2013 par Maître Bernard Vatier, ancien bâtonnier, agissant en qualité d'arbitre unique désigné par M. Le bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de Paris, sur le fondement de l'article 21 de la loi du 31 décembre 1971 modifiée, dans le cadre du litige opposant M. Jean Baptiste I. à M. Sebastien Dufour et la Selarl Cabinet d'avocats Dufour I. et qui a :
- constaté le retrait de M. I. de la Selarl Dufour I. à compter du 9 septembre 2013
- ordonné en tant que de besoin à la société Dufour Iosca de restituer à M. I. tout dossier personnel ou tout objet personnel qui n'aurait pas donné lieu à reprise par ce dernier,
- dit que le soussigné reste compétent pour statuer sur toute difficulté éventuelle née de cette obligation de restitution,
- ordonné que le changement de dénomination sociale soit effectif au plus tard au 31 décembre 2013 et dit qu'aucun document émanant de la société Dufour Iosca destiné aux tiers ne pourra plus porter le nom de I. à compter du 1er janvier 2014,
- dit que le soussigné reste compétent pour statuer sur toute difficulté éventuelle liée au retrait du nom I. ainsi ordonné,
- fait injonction au gérant de la société de convoquer une assemblée pour qu'elle se tienne dans le mois de la présente décision afin d'approuver les comptes 2012 et de fixer les rémunérations versées aux associés pour 2012 et pour la période du 1er janvier 2013 au 8 septembre 2013,
- déclaré irrecevable la demande d'autorisation d'exercer séparément,
- désigné en qualité d'expert sur le fondement de l'article 1843-4 du code civil l'expert M. Dominique M., avec pour mission d'évaluer les parts détenues par M. I. dans la Selarl Dufour I.,
- fixé à 5 000 euros le montant de la provision à consigner par la société Dufour Iosca dans la quinzaine de la notification de la décision rendue,
- condamné la société Dufour Iosca à verser une provision de 30 000 euros à valoir sur le prix des parts,
- renvoyé la cause à l'audience du 3 février 2014,
- réservé toute autre demande,
- ordonné l'exécution provisoire .
Vu les recours exercés à l'encontre de cette décision par les parties les 6 et 10 janvier 2014.
Vu la requête afin de rendre exécutoire ladite sentence déposée par M. Jean Baptiste I., enregistrée au greffe de cette cour le 21 février 2014 .
Vu la décision rendue le 28 février 2014, au visa des articles 502, 1488 et 1498 du code de procédure civile, 16, 152 et 179-7 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991, ordonnant que la formule exécutoire soit apposée sur la minute de la sentence dont s'agit et qu'elle en soit revêtue .
Vu l'assignation afin de rétractation de l'ordonnance du 28 février 2014 délivrée à l'encontre de M. Jean Baptiste I. à la diligence de M. Sebastien Dufour et de la Selarl Cabinet d'avocats Dufour I., autorisés par ordonnance du 6 juin 2014 .
Vu les dispositions de l'article 496 alinéa 2 du code de procédure civile .
Entendues à l'audience du 18 juin 2014 les parties en leurs observations conformes à leurs écritures.
Motifs
SUR QUOI
1 bâtonnier
Considérant que la décision rendue par le bâtonnier en règlement des différends entre avocats à l'occasion de leur exercice professionnel, est prévue par l'article 21 de la loi du 31 décembre 1971 modifiée et les articles 179-1 et suivants du décret du 27 novembre 1991 ;
que si la loi du 31 décembre 1971, en son article 7, qualifie d arbitrage l intervention du bâtonnier dans les contentieux nés d'un contrat de collaboration libérale d'avocat, en revanche le décret du 27 novembre 1991 ne fait nullement référence à la procédure arbitrale ;
2 code de procédure civile
Considérant en l'espèce que la décision du bâtonnier dont s'agit vise expressément ces deux textes ;
qu' elle ne fait aucunement mention de la procédure prévue aux articles 1442 et suivants du code de procédure civile en matière d'arbitrage interne ;
que de surcroît le contentieux opposant M. Jean Baptiste I. à M. Sébastien Dufour et la Selarl Dufour I. ne concerne pas un contrat de collaboration libérale, mais deux associés de ladite société ;
que M. Jean Baptiste I. ne peut dés lors utilement opposer à M. Sebastien Dufour et à la Selarl Cabinet d'avocats Dufour I. les dispositions de l'article 1499 du code de procédure civile qui énoncent que l'ordonnance qui, en matière d'arbitrage interne, accorde l'exequatur, n'est susceptible d'aucun recours ;
3 tribunal de grande instance
Considérant que M. Sebastien Dufour et la Selarl Cabinet d'avocats Dufour I. concluent à la rétractation de l'ordonnance dont s'agit aux motifs qu'elle a été prise en violation des dispositions de l'article 179-7 du décret du 27 novembre 1991 ;
qu'ils soutiennent que seul le président du tribunal de grande instance de Paris pouvait ainsi rendre exécutoire la sentence prononcée le 6 décembre 2013 par le délégué du bâtonnier ;
4 formule exécutoire
Considérant, alors que même exécutoire de droit à titre provisoire ainsi que le prévoit l'article 153 du décret du 27 novembre 1991 qui, au demeurant, ne concerne pas le présent contentieux, la décision du bâtonnier ne constitue pas une décision à laquelle la loi attache les effets d'un jugement de sorte qu'elle ne peut être exécutée que sur présentation d'une expédition revêtue de la formule exécutoire ;
que l'article 179-7 du décret du 27 novembre 1991 réserve exclusivement au président du tribunal de grande instance et en l'absence de recours, le pouvoir de la rendre exécutoire ;
que la seule prévision par ce texte de conditions tenant tant à la compétence du juge, qu'à l'absence de l'exercice préalable des voies de recours, ne méconnaît en rien l'exigence au regard des dispositions de l'article 6-1 de la convention européenne des droits de l'homme, du droit à obtenir l'exécution des décisions provisoires ;
5 débiteur défaillant
que par ailleurs elle n'est pas davantage contraire aux dispositions de l'article L 111-1 du code des procédures civiles d'exécution qui énoncent que tout créancier peut, dans les conditions prévues par la loi, contraindre son débiteur défaillant à exécuter ses obligations à son égard ;
6 formule exécutoire
Considérant que le premier président n'ayant pas le pouvoir d'apposer la formule exécutoire sur la sentence qui lui était soumise, il convient en conséquence de rétracter notre ordonnance du 28 février 2014 ;
7 code de procédure civile
Considérant que la présente décision, eu égard à l'équité, ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Dispositif
PAR CES MOTIFS
Rétractons notre ordonnance du 28 février 2014 ordonnant que la formule exécutoire soit apposée sur la minute de la sentence rendue le 6 décembre 2013 par le délégué du bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de Paris dans le contentieux opposant M. Jean Baptiste I. à M. Sébastien Dufour et la Selarl Dufour I. afin qu'elle en soit revêtue .
Disons n'y avoir lieu à faire application des dispositions de l'article 700 du code procédure civile.
Laissons les dépens à la charge de M. Jean Baptiste I. .