Cass. 1re civ., 6 juin 2012, n° 11-18.252
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
PARTIES
Défendeur :
Société du Domaine de la Petite Vennerie (Sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Charruault
Avocats :
SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Tiffreau, Corlay et Marlange
Sur le moyen unique, pris en ses branches réunies :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 18 mars 2011), que par acte authentique dressé le 7 juillet 2006 par M. X..., notaire, M. et Mme Y...ont cédé cinquante parts qu'ils détenaient dans la SCEA du Domaine de Rocheboeuf à la société du Domaine de la Petite Vennerie ; qu'un litige étant né entre les parties, cette dernière a mis en oeuvre la clause compromissoire insérée à l'acte ; que, par sentence rendue le 5 novembre 2009, un tribunal arbitral a dit qu'il a été mis fin régulièrement à la convention de mise à disposition des parcelles D n° 799 et ZC n° 28, les propriétaires de ces parcelles étant fondés à les reprendre à la date du 1er novembre 2008, que M. et Mme Y...devront restituer la somme de 26 000 euros à la société Domaine de la Petite Vennerie, qu'il y a lieu de surseoir à statuer sur la contestation concernant les terres louées à la SCEA du Domaine de Rocheboeuf qui ont fait l'objet d'une reprise unilatérale par les bailleurs postérieurement à l'acte de cession du 7 juillet 2006 jusqu'au prononcé des arrêts de la cour d'appel ;
Attendu que M. et Mme Y...font grief à l'arrêt de rejeter leur recours en annulation, alors, selon le moyen :
1°/ qu'en matière d'arbitrage interne, hors le cas de refus de signer de l'un des arbitres mentionné par les autres, la sentence qui n'est pas signée par tous les arbitres doit être annulée, même en l'absence de grief ; que l'apposition de signatures complémentaires par les arbitres non signataires ne suffit pas à purger le vice affectant la sentence ; qu'en disant le contraire, la cour d'appel a violé ensemble les articles 1473, 1480 et 1484-5 (anciens) du code de procédure civile ;
2°/ qu'en matière d'arbitrage interne, comme en toute matière, le principe de la contradiction doit être respecté ; qu'en l'espèce il est constant que les parties, auxquelles les arbitres avaient annoncé la tenue d'une seconde audience, n'ont pas été informées de la date jusqu'à laquelle elles pouvaient déposer des écritures et apporter des éléments de preuve pour étayer leur position si bien qu'elles n'ont pas été mises en mesure d'assurer la défense de leurs intérêts ; qu'en retenant néanmoins que le principe du contradictoire avait été respecté aux motifs inopérants que les « parties ont été traitées de la même manière et ont eu un égal accès à la juridiction arbitrale, que la sentence a été rendue au vu des conclusions et pièces régulièrement communiqués », la cour d'appel a violé le principe de la contradiction, ensemble les articles 1484 (ancien) et 16 du code de procédure civile et l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;
3°/ que l'arbitre fixe la date à laquelle l'affaire sera mise en délibéré ; qu'après cette date, aucune demande ne peut être formée, ni aucun moyen soulevé ; aucune observation ne peut être présentée ni aucune pièce produite, si ce n'est à la demande de l'arbitre ; qu'en l'espèce il est constant que les parties, auxquelles les arbitres avaient annoncé la tenue d'une seconde audience, n'ont pas été informées de la date du délibéré jusqu'à laquelle elles pouvaient déposer des écritures et apporter des éléments de preuve pour étayer leur position si bien qu'elles n'ont pas été mises en mesure d'assurer la défense de leurs intérêts ; qu'en disant que le principe de la contradiction avait été respecté tout en constatant que les parties n'avaient pas été prévenues de la date du délibéré, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légale de ses propres constatations et violé le principe de la contradiction, ensemble les articles 1468, 1484 (anciens) et 16 du code de procédure civile et l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;
4°/ que le principe de la contradiction doit être respecté ; que le défaut de respect de ce principe, en matière d'arbitrage, conduit à prononcer la nullité de la sentence sans qu'il soit nécessaire de démontrer que ce vice a causé un grief ; qu'en refusant de prononcer la nullité de la sentence au motif inopérant que le grief des époux Y...ne serait pas précis, la cour d'appel a violé le principe de la contradiction, ensemble les articles 1460, 1468, 1484 (anciens) et 16 du code de procédure civile et l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;
5°/ que nul ne peut se contredire au détriment d'autrui ; qu'en l'espèce il est constant que les arbitres s'étaient engagés à entendre les parties après remise des pièces, créant ainsi l'illusion qu'un débat était engagé et que l'ensemble des pièces transmises seraient contradictoirement étudiées ; qu'en rendant néanmoins la sentence sans tenir de seconde audience ni informer les parties de la date du délibéré, la cour d'appel a violé le principe selon lequel nul ne peut se contredire au détriment d'autrui (estoppel), ensemble les articles 1484 (ancien) et 16 du code de procédure civile et l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;
6°/ qu'en matière d'arbitrage interne, comme en toute matière, le principe de la contradiction doit être respecté ; que si les parties peuvent renoncer aux débats oraux, encore faut-il que leur soit proposée une telle renonciation ; qu'en l'espèce il est constant qu'aucun débat oral n'a eu lieu sans qu'il soit proposé aux parties d'y renoncer ; qu'il en résultait l'irrespect du principe de la contradiction par les arbitres ; qu'en disant le contraire, la cour d'appel a violé le principe de la contradiction, ensemble les articles 1460, 1484 (ancien) et 16 du code de procédure civile et l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;
Mais attendu qu'ayant relevé qu'il n'était pas établi que le tribunal arbitral eût prévu un calendrier de procédure, que les parties assistées de leurs conseils lui ont fait part des points de contestation les opposant, qu'elles ont été traitées également, que la sentence, signée par tous les arbitres, a été rendue au vu des conclusions et pièces régulièrement communiquées, la cour d'appel en a justement déduit que les arbitres n'avaient pas violé le principe de la contradiction ; que le moyen, qui manque en fait dans sa première branche et est irrecevable en sa cinquième comme nouveau et mélangé de fait, ne peut être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. et Mme Y...aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. et Mme Y...et les condamne à payer à M. X...la somme de 3 000 euros ;