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Décisions

CA Paris, Pôle 1 ch. 1, 17 décembre 2013, n° 12/13053

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

M. O

Défendeur :

SERMAPLUS (S.A.R.L)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

ACQUAVIVA

Avocats :

FRERING, AUNAY, NEOUZE, DELATTRE

CA Paris n° 12/13053

16 décembre 2013

Exposé des faits

Suivant acte sous seing privé du 4 mars 2010, la S. A.R. L. SERMAPLUS et Monsieur Denis O., exploitant agricole, ont conclu, conformément aux règles et usages du commerce intereuropéen des pommes de terre (RUCIP), un contrat de vente de pommes de terre intitulé « Contrat annuel de livraison de pommes de terre » aux termes duquel le premier s'est obligé à livrer à vendre à la seconde « la récolte de 10/11 hectares de pommes de terre de la RUCIP MONILIA, soit environ 500 tonnes pour la campagne 2010-2011 », cultivées sur la parcelle Valmont, la période de livraison étant fixée au mois de janvier 2011 et le prix convenu de 102 euros HT par tonne, prix départ en big bags.

Après que des difficultés sont survenues entre les parties en ce qui concerne tant le planning d'enlèvement de la marchandise que la mise à disposition des quantités contractuellement prévues, la société SERMAPLUS a, par télécopie du 1er février 2011, pris acte de ce que Monsieur O. ne lui avait livré que 315,556 tonnes de pommes de terre et l'a mis en demeure de lui livrer le tonnage restant soit 188,444 tonnes dans un délai de cinq jours.

Faute pour Monsieur O. de s'être exécuté, la société SERMAPLUS a, par requête en date du 4 juillet 2011, saisi, en application de l'article 11 du contrat, la commission d'arbitrage RUCIP de Paris.

Par une sentence rendue à Paris le 25 janvier 2012, cette commission composée de Monsieur Pierre M. et de Monsieur Pierre H., arbitres et de Monsieur Yves Roussineau, président, a condamné Monsieur Denis O. à payer à la société SERMAPLUS :

- la somme de 23.931,03 euros correspondant au prix de la marchandise restant à livrer,

- la somme de 669,76 euros correspondant au prix versé par la société SERMAPLUS aux fins d'obtention de l'attestation de prix délivrée par courtier assermenté,

- la somme de 632,28 euros correspondant aux frais d'huissier,

- la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- la somme de 3.868 euros correspondant au remboursement de la provision versée pour les frais d'arbitrage.

Par ordonnance du 3 mai 2012, le président du tribunal de grande instance de Paris a rendu exécutoire cette sentence.

Par déclaration du 15 juin 2012, Monsieur O. a formé un recours en annulation à l'encontre de ladite sentence.

Vu les conclusions de Monsieur O. signifiées par RPVA le 13 septembre 2012 aux termes desquelles il demande à la cour d'annuler la sentence entreprise, de condamner la société SERMAPLUS au paiement de la somme de 30.000 euros outre le solde du prix convenu sur toutes les réfactions opérées et de la somme de 6.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Vu les conclusions de la société SERMAPLUS signifiées par RPVA le 8 novembre 2012 aux termes desquelles elle demande à la cour :

à titre principal :

de déclarer le recours irrecevable, de débouter Monsieur O. de ses demandes,

à titre subsidiaire :

de déclarer le recours en annulation infondé, de condamner Monsieur O. à lui verser la somme de 40.604,15 euros à titre de dommages intérêts

en toute hypothèse, de condamner Monsieur O. à lui verser la somme de 6.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

La liquidation judiciaire de Monsieur O. a été prononcée par le tribunal de grande instance du Havre par jugement du 5 juillet 2013.

L'exécution provisoire attachée à cette décision a été arrêtée par la cour d'appel de Rouen par ordonnance de référé du 9 octobre 2013.

Motifs

SUR QUOI,

- Sur le moyen unique d'annulation tiré de l'irrégularité de la composition du tribunal arbitral.

Monsieur O. fait valoir qu'il existe un doute objectif sur l'impartialité des arbitres dès lors qu'ils sont tous trois des négociants de pommes de terre, ayant des liens professionnels entre eux mais aussi avec la société LES ETABLISSEMENTS L., dont SERMAPLUS est une filiale, Monsieur Roussineau étant co gérant d'une société de négoce Europlant ayant pour client la société L., Monsieur M. étant représentant de Meijer France auprès des établissements L., et tous deux étant ou ayant été membres du conseil d'administration de la FEDEPOM dont le conseil d'administration est présidé et le poste de trésorier occupé par un membre de la famille L.. Il considère en conséquence que les arbitres n'ont pas satisfait à leur obligation de révélation spontanée de ces liens d'intérêt.

La société SERMAPLUS considère pour sa part que Monsieur O. a eu connaissance en temps utile de ce que SERMAPLUS est la filiale de la société LES ETABLISSEMENTS L. et que n'ayant pas formulé de réserve ni exercé son droit de récusation devant le tribunal arbitral, il n'est

plus recevable à invoquer ce moyen dont, au surplus, il ne rapporte pas la preuve.

Considérant que le grief pour être recevable doit être soulevé, chaque fois qu'il est possible, devant le tribunal arbitral lui même ;

Qu'ensuite de sa saisine par la S. A.R. L. SERMAPLUS, le comité français RUCIP a invité, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, chacune des parties à faire choix d'un arbitre sur la liste des arbitres agréés par le comité laquelle précise pour chacun des trois arbitres désignés, le nom de son employeur ;

Que, pendant l'instance arbitrale, Monsieur O. qui n'a pas émis la moindre réserve, s'est abstenu d'interroger les arbitres sur leurs liens éventuels avec la société SERMAPLUS alors que le règlement de la Chambre arbitrale de Paris auquel il avait nécessairement adhéré en acceptant son arbitrage, prévoit un délai de récusation de 15 jours après la notification de la désignation de l'arbitre, et que s'agissant d'un arbitrage corporatif, il ne pouvait ignorer que les arbitres ou certains d'entre eux pouvaient avoir des liens professionnels, étant relevé d'une part que la composition du conseil d'administration de la FEDEPOM, organisme représentatif est une information notoire dans la profession et d'autre part que Monsieur O. affirme sans en rapporter aucun élément de preuve que la société EUROPLANT dont Monsieur Roussineau est le co gérant, est cliente de L. et que la société Meijer France dont Monsieur M. est le préposé, est représentant auprès de cette dernière ;

qu'il convient en conséquence de rejeter le moyen et le recours qui ne tend en réalité sous couvert de l'irrégularité de la composition du tribunal arbitral qu'à obtenir la révision de la sentence au fond, interdite au juge de l'annulation ;

Considérant que Monsieur O. qui succombe et supporte les dépens ne peut prétendre à une indemnité en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

qu'il sera condamné sur ce même fondement à payer une somme de 3.000 euros à la S. A.R. L. SERMAPLUS ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

Rejette le recours en annulation formé par Monsieur Denis O. à l'encontre de la sentence rendue à Paris le 25 janvier 2012 par la commission d'arbitrage RUCIP statuant au premier degré dans le litige l'opposant à la SARL SERMAPLUS.

Condamne Monsieur Denis O. aux dépens qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du Code de procédure civile ainsi qu'au paiement d'une somme de 3.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du même Code.

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