Cass. 1re civ., 10 janvier 2018, n° 16-21.391
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
PARTIES
Défendeur :
Marriott (Sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Batut
Avocats :
SCP Ortscheidt, SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 30 juin 2016), rendu sur renvoi après cassation (1re Civ., 18 mars 2015, pourvoi n° 14-13.336, Bull. 2015, I, n° 54), que la société libanaise Jnah Development SAL (la société Jnah) a confié, par contrats du 21 décembre 1994, l'exploitation d'un hôtel lui appartenant, à [...] , à la société américaine Marriott International Hotels Inc. (la société Marriott) ; que des litiges ayant opposé les parties, à la suite de deux procédures d'arbitrage distinctes, sous l'égide de la Chambre de commerce international (la CCI) en application des clauses compromissoires, diligentées respectivement par les sociétés Jnah et Marriott, deux sentences, intitulées « Jnah I » et « Jnah II » ont été rendues le 30 octobre 2003 et le 4 juin 2009 ; qu'au cours de la procédure « Jnah II », la famille X..., détenant 80 % du capital de la société Jnah, les a cédés, les nouveaux acquéreurs approuvant la cession à M. X... « de l'issue du litige » entre les sociétés Marriott et Jnah, et donnant au premier une procuration pour agir au nom de cette dernière ; que M. X..., au nom de la société Jnah, a, le 14 juin 2010, introduit une troisième demande d'arbitrage pour obtenir des dommages-intérêts en réparation du préjudice résultant de la résiliation du contrat par la société Marriott ; que, le 6 avril 2011, la société Jnah, par l'intermédiaire de ses nouveaux actionnaires, et la société Marriott ont conclu une transaction dans laquelle la première s'est engagée, auprès de la seconde, à apporter toute assistance requise dans l'arbitrage « Jnah III », notamment par la production de témoignages, dans le but de convaincre le tribunal arbitral que M. X... n'était pas autorisé à engager la procédure, en contrepartie du versement d'une somme forfaitaire et d'un intéressement au résultat de la sentence à venir conditionné au rejet par le tribunal arbitral des demandes de M. X..., pour incompétence du tribunal arbitral ou défaut de pouvoir de M. X... ; que, par sentence du 3 février 2012, le tribunal arbitral s'est déclaré incompétent concernant cette procédure au motif que la procuration était limitée à celle en cours, « Jnah II », et n'autorisait pas à engager un nouvel arbitrage ; que M. X..., agissant au nom de la société Jnah, a formé un recours en annulation de la sentence ;
Sur les deuxième, quatrième et cinquième branches du premier moyen et la cinquième branche du troisième moyen, ci-après annexés :
Attendu que ces griefs ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Sur le premier moyen, pris en ses première et troisième branches :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de rejeter son recours en annulation alors, selon le moyen :
1°/ que l'ordre public international s'oppose à la reconnaissance et à l'exécution d'une sentence arbitrale fondée sur des témoignages qui ont été fournis moyennant la promesse, par l'une des parties à l'instance arbitrale, d'une rémunération, cette rémunération fût-elle seulement indirecte, en tant qu'elle a été promise à une personne morale avec laquelle les témoins ont des intérêts liés ; qu'en l'espèce, il résultait de la sentence arbitrale « Jnah III » du 3 février 2012 que pour interpréter la procuration consentie par la société Jnah à M. X... et décider que celle-ci n'autorisait pas M. X... à engager une nouvelle procédure d'arbitrage à l'encontre de Marriott, le tribunal arbitral s'était fondé sur les attestations et témoignages de M. B..., président-directeur général de la société Jnah, et de Mme C..., avocate et membre du conseil d'administration de cette société ; qu'il ressort toutefois d'un protocole d'accord transactionnel du 6 avril 2011, dont l'arrêt attaqué relève que la teneur n'a été dévoilée qu'après le prononcé de la sentence arbitrale, que la société Marriott, défenderesse à l'arbitrage « Jnah III », avait promis de verser aux nouveaux actionnaires de la société Jnah une rémunération immédiate de 800 000 dollars US et une rémunération différée de 2 400 000 dollars US conditionnée au résultat favorable de la sentence, tandis que la société Jnah prenait l'engagement de faire produire dans le cadre de la procédure arbitrale des attestations, lettres et témoignages de son dirigeant, M. B..., et de son conseil, Mme C..., en vue de convaincre le tribunal arbitral que M. X... n'était pas autorisé par Jnah à introduire la nouvelle procédure d'arbitrage « Jnah III » ; que tout en constatant que cette promesse de rémunération donnait à la société Jnah un intérêt à ce que le tribunal arbitral décidât que M. X... n'avait pas qualité ou n'avait pas été autorisé à engager la procédure « Jnah III », la cour d'appel a néanmoins écarté le moyen d'annulation tiré de la contrariété à l'ordre public international de la reconnaissance de la sentence arbitrale provoquée dans de telles conditions au motif « qu'il n'(était) pas démontré que les personnes ayant témoigné à la demande de la société Marriott devant le tribunal arbitral, à savoir M. B..., président-directeur général de la société Jnah, et Mme C..., avocate libanaise des nouveaux actionnaires de la société Jnah ayant pris part à la rédaction des actes de cession et de procuration litigieux, aient personnellement perçu des sommes d'argent de façon à les déterminer à témoigner dans un sens favorable à la société Marriott » ; qu'en se prononçant de la sorte, cependant que la souscription concomitante d'une promesse de Marriott de verser à la société Jnah une importante rémunération indexée sur le résultat de la sentence arbitrale à venir et d'un engagement réciproque de cette dernière de faire témoigner devant les arbitres son président et son avocat à l'appui de Marriott suffisaient, eu égard aux liens professionnels et patrimoniaux unissant les témoins à la société bénéficiaire de cette promesse de rémunération, à caractériser un pacte de subornation de témoins constitutif d'une fraude procédurale, la cour d'appel a violé les articles 1520, 5°, 1464, alinéa 3, et 1506, 3°, du code de procédure civile, ensemble la règle fraus omnia corrumpit ;
2°/ que la rétention par une partie d'une information décisive qui aurait dû être connue du tribunal arbitral caractérise une fraude procédurale qui doit être sanctionnée au regard de l'ordre public international de procédure par l'annulation de la sentence ; qu'il ressortait de l'accord transactionnel conclu le 6 avril 2011 entre Marriott et la société Jnah, dont l'arrêt attaqué relève que la teneur n'avait été dévoilée sur ordre de la cour d'appel de Beyrouth qu'après le prononcé de la sentence arbitrale « Jnah III », que la société Marriott avait promis de rémunérer la société Jnah, en contrepartie de l'engagement de cette dernière de faire produire, dans le cadre de la procédure arbitrale en cours, des attestations, lettres et témoignages de son président-directeur général, M. B..., et de son conseil, Mme C..., en vue de convaincre le tribunal arbitral que M. X... n'était pas autorisé par Jnah à introduire la nouvelle procédure d'arbitrage « Jnah III » ; que, pour juger néanmoins que les demandeurs au recours en annulation échouaient à faire la preuve de la fraude invoquée, la cour d'appel énonce que « le 13 avril 2011, M. B... a adressé au secrétaire général de la cour d'arbitrage de la CCI un courrier dans lequel, en sa qualité de président-directeur général de la société Jnah, il désavouait l'initiative prise par M. X..., ancien actionnaire de la société, d'engager une nouvelle procédure arbitrale », de sorte que « le tribunal ne pouvait ignorer que le témoignage de M. B..., tout comme celui de Mme C..., avocate des nouveaux actionnaires, seraient, quel que soit l'intérêt particulier que les intéressés étaient susceptibles d'en retirer, a priori favorables à la thèse soutenue par la société Marriott », puis ajoute « que Me C..., pour ce qui la concerne, n'a pas systématiquement soutenu un point de vue conforme à la thèse de la société Marriott, en témoigne la discussion préalable sur la révocation ou l'expiration de la procuration donnée à M. X... » ; qu'en se déterminant par de tels motifs, cependant que le respect le plus élémentaire des droits de la défense et de la loyauté procédurale commandait à tout le moins que le tribunal arbitral fût pleinement informé des conditions financières de cet accord et du détail des engagements contractés par Jnah en vue de convaincre ce tribunal arbitral que M. X... n'était pas qualifié ou habilité à initier la procédure « Jnah III », afin que les arbitres fussent mis en mesure d'apprécier en connaissance de cause la sincérité et la valeur probatoire des témoignages recueillis, la cour d'appel a de ce chef violé les articles 1520, 5°, 1464, alinéa 3, et 1506, 3°, du code de procédure civile, ensemble la règle fraus omnia corrumpit ;
Mais attendu que l'arrêt relève qu'il n'est pas démontré que les personnes ayant témoigné à la demande de la société Marriott devant le tribunal arbitral, en l'occurrence M. B..., président-directeur général de la société Jnah, et Mme C..., avocat des nouveaux actionnaires de cette société, aient personnellement perçu des sommes d'argent de façon à les déterminer à témoigner dans un sens favorable à la société Marriott ; qu'il retient que le tribunal arbitral savait que la société Jnah, postérieurement à son changement d'actionnariat, était opposée à l'engagement d'une procédure arbitrale en son nom par M. X... depuis que M. B... avait adressé au secrétaire général de la cour d'arbitrage de la CCI une lettre dans laquelle il désavouait l'initiative prise par ce dernier d'engager une nouvelle procédure d'arbitrage, de sorte qu'il ne pouvait ignorer que ces témoignages seraient, quel que soit l'intérêt particulier que les intéressés pouvaient en retirer, a priori favorables à la thèse soutenue par la société Marriott ; qu'il ajoute que Mme C... n'a pas systématiquement soutenu un point de vue conforme à la thèse de la société Marriott ; que de ces énonciations et constatations, la cour d'appel a souverainement déduit que M. X... ne rapportait pas la preuve de l'existence de manoeuvres frauduleuses commises par la société Marriott ; que le moyen ne peut être accueilli ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que M. X... fait le même grief à l'arrêt alors, selon le moyen, que, quelle que soit la procédure choisie, le tribunal arbitral garantit l'égalité des parties et respecte le principe de la contradiction ; qu'afin que la procédure soit effectivement contradictoire et respectueuse de l'égalité des armes, la circonstance que des témoignages ont été obtenus moyennant la promesse d'une rétribution directe ou indirecte souscrite par l'une des parties à l'instance arbitrale doit être portée à la connaissance de toutes les parties, de sorte que ces dernières puissent articuler des demandes de rejet des témoignages en cause ou à tout le moins contester leur validité, leur sincérité ou leur valeur probante ; qu'en l'espèce, il résultait d'un accord transactionnel du 6 avril 2011 régulièrement versé aux débats, dont l'arrêt attaqué relève que la teneur n'a été dévoilée qu'après le prononcé de la sentence arbitrale, que la société Marriott, défenderesse à l'arbitrage « Jnah III », avait promis de verser aux nouveaux actionnaires de la société Jnah une rémunération immédiate de 800 000 dollars US et une rémunération différée de 2 400 000 dollars US conditionnée au résultat favorable de la sentence, en contrepartie de l'engagement de la société Jnah de faire produire dans le cadre de la procédure arbitrale des attestations, lettres et témoignages de son président-directeur général, M. B..., et de son conseil, Mme C..., en vue de convaincre le tribunal arbitral que M. X... n'était pas autorisé par Jnah à introduire la nouvelle procédure d'arbitrage « Jnah III » ; que, pour juger que la communication intégrale de cet accord transactionnel avec le détail de ses conditions financières n'aurait pas placé les demandeurs à la saisine dans une position différente s'agissant de l'exercice de leur défense, la cour d'appel retient que « la société Jnah et M. X... ne démontrent pas que M. B... et Me C... auraient personnellement reçu de la société Marriott des avantages financiers de façon à les déterminer à témoigner dans son intérêt », qu'au surplus, les demandeurs à la saisine ne pouvaient ignorer que ces personnes, liées aux nouveaux actionnaires de la société Jnah qui était défavorable à l'engagement d'une nouvelle procédure arbitrale par M. X..., soutiendraient une position a priori favorable à la thèse défendue par la société Marriott » et « que les parties ont eu la possibilité de procéder à un contre-interrogatoire » ; qu'en se prononçant par de tels motifs, impropres à écarter l'atteinte portée au contradictoire et aux droits de la défense, dès lors que la connaissance des conditions financières de cet accord et du détail des engagements contractés en vue de convaincre le tribunal arbitral que M. X... n'était pas qualifié ou habilité à initier la procédure aurait, à tout le moins, permis au demandeur à l'arbitrage de former un incident pour s'opposer à la déposition des témoins en cause et, subsidiairement d'articuler des moyens tendant à solliciter le rejet de leur témoignage, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1510 et 1520, 4° et 5°, du code de procédure civile ;
Mais attendu que M. X... ayant soutenu, devant la cour d'appel, que le tribunal arbitral n'avait pas eu connaissance de l'existence de la transaction du 6 avril 2011, le moyen, qui invoque une violation des principes de la contradiction et de l'égalité des parties en raison du défaut de communication de ce document à son endroit, est inopérant ; qu'il ne peut être accueilli ;
Sur troisième moyen, pris en ses quatre premières branches, qui est recevable :
Attendu que M. X... fait le même grief à l'arrêt alors, selon le moyen :
1°/ que les parties ne peuvent, devant le juge de l'annulation, soutenir une position incompatible avec les exceptions ou moyens qu'elles
ont soutenus avec succès devant le tribunal arbitral ; qu'en l'espèce, les demandeurs au recours en annulation faisaient valoir que la société Marriott était irrecevable à soutenir devant le juge de l'annulation que le dispositif de la sentence du 3 février 2012 par lequel le tribunal arbitral avait décliné sa compétence devait être requalifié en une décision d'irrecevabilité des demandes pour défaut de qualité de M. X..., dès lors cette société avait, dès le commencement de la procédure arbitrale, excipé à titre principal de l'incompétence du tribunal arbitral ; qu'il ressortait, en effet, du paragraphe 18 de la sentence que « le 12 avril 2011, le Cabinet Crowell & Moring a adressé un courrier au tribunal pour l'informer que Marriott avait récemment eu connaissance d'informations qui imposaient que le tribunal procède à la bifurcation de cette procédure afin de déterminer s'il avait compétence à l'égard des parties et des demandes de cette procédure, compétence dont il ne disposait pas selon Marriott », ces informations tenant, ainsi que le souligne la sentence, à une limitation prétendue de la portée de la procuration et de la cession de droits consentie en faveur de M. X... au seul arbitrage « Jnah II » ; qu'il ressortait ensuite de deux autres mémoires datés du 14 juillet et du 21 octobre 2011, tous deux intitulés « Mémoire sur la compétence », que Marriott avait conclu que « si le tribunal décide que M. X... n'a pas la capacité requise pour débuter l'arbitrage, il doit décliner sa compétence et mettre fin à la procédure. (
). Il n'est pas demandé au tribunal de traiter une simple question de capacité dissociable en quelque sorte de la question de compétence », car « les questions de savoir si Jnah a jamais consenti à ce que M. X... énonce les demandes en son nom dans cet arbitrage – et celle de savoir si Marriott a jamais consenti à ce que soient arbitrées des demandes avec toute autre partie que Jnah – sont fondamentales au regard de la compétence de ce tribunal », puis enfin que « tous les éléments de preuve extrinsèques confirment l'interprétation des stipulations de la Procuration donnée par Marriott plus haut : l'objet de la Procuration était limité à Jnah II et aux procédures incidentes qui en découleraient. (
) Dans la mesure où rien ne permet à M. X... d'invoquer la clause d'arbitrage Marriott-Jnah pour engager Jnah III au nom de Jnah, le tribunal devrait mettre fin à Jnah III pour incompétence » ; qu'en affirmant néanmoins que les moyens dont les parties ont saisi le tribunal arbitral, à titre principal, n'ont à aucun moment eu trait à la question de l'étendue de son pouvoir juridictionnel et n'ont donc pas introduit un débat sur la compétence, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de la sentence et des deux mémoires susvisés, en violation de l'article 1134 du code civil ;
2°/ qu'il n'entre pas dans les pouvoirs du juge de l'annulation de restituer aux questions soumises par les parties aux arbitres leur véritable
qualification, un tel pouvoir, à le supposer acquis, n'appartenant qu'aux arbitres ; qu'en l'espèce, pour juger que la sentence arbitrale n'avait pas tranché une question de compétence, mais une question de recevabilité de l'action portée devant les arbitres, la cour d'appel a jugé qu'il lui appartenait, dans le cadre de son office de juge de l'annulation, « de restituer aux questions soumises par les parties aux arbitres leur véritable qualification » ; qu'en s'estimant ainsi investie d'un pouvoir de requalification des moyens
soulevés devant les arbitres qui n'aurait pu appartenir qu'à ces derniers, la cour d'appel a violé l'article 1520, 1°, du code de procédure civile ;
3°/ qu'il n'entre pas dans les pouvoirs du juge de l'annulation de modifier, sous couvert de requalification, la chose jugée par les arbitres,
telle qu'elle est exprimée par un chef exprès du dispositif de leur sentence, quand bien même il estimerait devoir relever une discordance entre le dispositif et les motifs ; qu'en l'espèce, pour juger que la sentence arbitrale n'avait pas tranché une question de compétence, mais une question de recevabilité de l'action portée devant les arbitres, la cour d'appel a relevé qu'après avoir mentionné dans un paragraphe conclusif que « pour les raisons susmentionnées, la majorité du tribunal estime que la procuration ne confère pas de pouvoir à M. X... pour introduire ou poursuivre cette procédure », la sentence énonçait dans son dispositif que « la majorité du tribunal conclut que le tribunal n'a pas compétence concernant cette procédure de façon définitive », puis a considéré qu'il lui appartenait, dans le cadre de son office de juge de l'annulation, de restituer aux questions soumises par les parties aux arbitres leur véritable qualification, « particulièrement en présence de la contradiction ainsi relevée dans la sentence » ; qu'en se déterminant de la sorte, la cour d'appel a modifié, sous couvert de requalification, la teneur d'un chef exprès du dispositif de la sentence arbitrale, entachant par là sa décision d'une violation de l'article 1520, 1°, du code de procédure civile et d'un excès de pouvoir ;
4°/ que l'objet du litige arbitral est déterminé par les prétentions respectives des parties dans les limites de la convention d'arbitrage ; qu'en l'espèce, les demandeurs au recours en annulation rappelaient que Marriott avait, dès le commencement de l'instance arbitrale, excipé à titre principal de l'incompétence du tribunal arbitral ; qu'il ressortait, en effet, du paragraphe 18 de la sentence que « le 12 avril 2011, le Cabinet Crowell & Moring a adressé un courrier au tribunal pour l'informer que Marriott avait récemment eu connaissance d'informations qui imposaient que le tribunal procède à la bifurcation de cette procédure afin de déterminer s'il avait compétence à l'égard des parties et des demandes de cette procédure, compétence dont il ne disposait pas selon Marriott », ces informations tenant, ainsi que le souligne la sentence, à une limitation prétendue de la portée de la procuration et de la cession de droits consentie en faveur de M. X... au seul arbitrage « Jnah II » ; qu'il ressortait ensuite de deux autres mémoires datés du 14 juillet et du 21 octobre 2011, tous deux intitulés « Mémoire sur la compétence », que Marriott avait conclu que « si le tribunal
décide que M. X... n'a pas la capacité requise pour débuter l'arbitrage, il doit décliner sa compétence et mettre fin à la procédure. (
). Il n'est pas demandé au tribunal de traiter une simple question de capacité dissociable en quelque sorte de la question de compétence », car « les questions de savoir si Jnah a jamais consenti à ce que M. X... énonce les demandes en son nom dans cet arbitrage – et celle de savoir si Marriott a jamais consenti à ce que soient arbitrées des demandes avec toute autre partie que Jnah – sont fondamentales au regard de la compétence de ce tribunal », puis enfin que « tous les éléments de preuve extrinsèques confirment l'interprétation des stipulations de la Procuration donnée par Marriott plus haut : l'objet de la Procuration était limité à Jnah II et aux procédures incidentes qui en découleraient. (
) Dans la mesure où rien ne permet à M. X... d'invoquer la clause d'arbitrage Marriott-Jnah pour engager Jnah III au nom de Jnah, le tribunal devrait mettre fin à Jnah III pour incompétence » ; que, pour juger que la sentence arbitrale n'avait pas tranché une question de compétence, mais une question de recevabilité de l'action portée devant les arbitres, la cour d'appel a énoncé que les moyens dont les parties ont saisi le tribunal arbitral, à titre principal, n'ont à aucun moment eu trait à la question de l'étendue de son pouvoir juridictionnel et n'ont donc pas introduit un débat sur la compétence ; qu'en se prononçant de la sorte, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de la sentence et des deux mémoires susvisés, en violation de l'article 1134 du code civil ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui devait, par application de l'article 125 du code de procédure civile, relever d'office la fin de non-recevoir résultant de l'absence d'ouverture d'une voie de recours, était tenue d'analyser la décision rendue par le tribunal arbitral afin de lui restituer, le cas échéant, son exacte qualification, sans s'arrêter aux dénominations retenues par les arbitres ou proposées par les parties ;
Et attendu qu'ayant retenu, par une interprétation rendue nécessaire par les contradictions et ambiguïtés de la sentence arbitrale et des mémoires de la société Marriot, que les moyens dont les parties avaient saisi le tribunal arbitral ne portaient pas sur l'étendue de son pouvoir juridictionnel mais sur les pouvoirs dont M. X... disposait pour le saisir, au nom de la société Jnah, d'une nouvelle requête en arbitrage, la cour d'appel en a exactement déduit que le tribunal arbitral avait statué sur une question relative, non à l'étendue de sa compétence, mais à la recevabilité de la demande d'arbitrage, laquelle ne pouvait être contestée à l'occasion d'un recours en annulation ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, le condamne ainsi que la société Jnah Development SAL à payer à la société Marriott la somme de 5 000 euros et rejette leur demande ;