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Décisions

CA Paris, Pôle 1 ch. 1, 3 juillet 2012, n° 11/01974

PARIS

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Demandeur :

SCP MONGRELET CLAUDE & FABRICE

Défendeur :

BOUYGUES BÂTIMENT ILE DE FRANCE (S.A)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

GUIHAL

Conseillers :

DALLERY, CARON-DEGLISE

Avocats :

TAZE BERNARD, PERRAUT, HARDOUIN, DENIZE

CA Paris n° 11/01974

2 juillet 2012

Exposé des faits

Par contrat du 24 mars 2004, la société BOUYGUES BATIMENT ILE DE FRANCE (BOUYGUES) a confié à la SCP MONGRELET une mission de géomètre expert pour l'implantation de deux bâtiments à édifier à Gennevilliers.

Un différend étant survenu entre les parties, BOUYGUES, se prévalant de la clause compromissoire stipulée par le contrat, a saisi M. B. de Léry d'une demande d'arbitrage.

L'arbitre unique statuant comme amiable compositeur a rendu le 14 juin 2010 à Saint-Maurice, une sentence qui a fixé à 92.426,08 euros, outre intérêts, la somme due à BOUYGUES par la SCP MONGRELET.

Cette dernière a formé un recours contre la sentence.

Par conclusions du 29 août 2011, elle en sollicite l'annulation, ainsi que la condamnation de BOUYGUES à lui payer la somme de 4.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile. Elle invoque l'irrégularité de la désignation de l'arbitre (article 1484 2° du code de procédure civile), la méconnaissance par l'arbitre de sa mission (article 1484 3° du code de procédure civile) et la violation de l'ordre public (article 1484 6° du code de procédure civile).

Par conclusions du 1er juillet 2011, BOUYGUES demande le rejet du recours et la condamnation de la SCP MONGRELET à lui payer la somme de 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

SUR QUOI :

Sur le moyen tiré de l'irrégularité de la désignation de l'arbitre (article 1484 2° et 6° du code de procédure civile) :

La SCP MONGRELET fait valoir que la clause compromissoire énumérait une liste d'arbitres sans prévoir l'ordre dans lequel ils devaient être sollicités et que, dès lors, BOUYGUES ne pouvait imposer unilatéralement l'une quelconque des personnes figurant sur cette liste en méconnaissance du principe d'ordre public d'égalité des parties dans la désignation des arbitres.

Considérant que le contrat de louage d'ouvrage conclu entre les parties le 24 mars 2004 stipule :

article 22 : Il est expressément prévu que toutes les contestations survenues à l occasion des présentes seront soumises à l'arbitrage';

article 23 L arbitrage auquel se soumettent les soussignés par application de l article précédent sera confié à l'arbitre ci-après désigné, lequel aura les pouvoirs d'amiable compositeur. L'arbitre aura la faculté de se faire assister à titre consultatif de tout technicien de son choix ou de se substituer tel autre arbitre qu'il désignera, ce que les parties acceptent formellement dès à présent.

La partie qui soumettra un litige à l'arbitrage, tel que prévu ci-dessus, devra avertir l'arbitre et l'autre partie par lettre recommandée avec accusé de réception de son intention en précisant l'objet du différend.

(...)

Est désigné comme arbitre :

M. Jean-Pierre B. d.

M. Jacques A. C.

M. Philippe G.

M. Gilbert P.

M. Michel V.';

Considérant que BOUYGUES a adressé sa demande d'arbitrage à M. B. de Léry qui a rendu la sentence entreprise en dépit des protestations formulées par la SCP MONGRELET contre la désignation unilatérale de l'arbitre unique;

Considérant que le principe de l'égalité des parties dans la désignation des arbitres est d'ordre public; qu'on ne peut y renoncer qu'après la naissance du litige;

Considérant que la clause compromissoire litigieuse prévoit que les contestations seront tranchées par un arbitre unique; qu'elle dresse une liste de cinq personnes susceptibles d'être désignées en cette qualité sans fixer aucun critère de choix entre elles, le seul ordre d'énumération de leurs noms, correspondant d'ailleurs à l'ordre alphabétique, ne pouvant s'analyser comme un tel critère; que, dès lors, la désignation d'un arbitre sur cette liste ne pouvait être laissée à la discrétion du seul demandeur à l'arbitrage mais devait résulter, après la naissance du litige, d'un accord des parties et, à défaut, d'une décision du juge d'appui;

Considérant que la sentence rendue par un arbitre irrégulièrement désigné doit être annulée;

Considérant que BOUYGUES, qui succombe, ne saurait bénéficier des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile; qu'elle sera condamnée sur ce fondement à payer la somme de 4.500 euros à la SCP MONGRELET;

Dispositif

PAR CES MOTIFS :

Annule la sentence rendue entre les parties le 14 juin 2010.

Déboute la société BOUYGUES BATIMENT ILE DE FRANCE de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne la société BOUYGUES BATIMENT ILE DE FRANCE à payer à la SCP MONGRLET la somme de 4.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne la société BOUYGUES BATIMENT ILE DE FRANCE aux dépens et admet Me Taze-Bernard, avocat, au bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile.

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