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Décisions

CA Paris, Pôle 1 ch. 1, 17 février 2015, n° 13/13278

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

CDR Creances (SAS), CDR Consortium de réalisation (SA)

Défendeur :

MJA (SELAFA), Maître Didier Courtoux, E.M.J (SELARL), Groupe Bernard T. (SNC), Société Financière Immobilière Bernard T., BT Gestion (SNC), Société Alain Colas Tahiti

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Mazeaud

Avocat :

M. Lernout

Conseillers :

Mme Guihal, Mme Maunand

CA Paris n° 13/13278

16 février 2015

Exposé des faits

M. Bernard T. avait, avec son épouse, organisé ses activités et son patrimoine autour de deux sociétés en nom collectif dont ils étaient les seuls associés : la société FINANCIERE ET IMMOBILIERE BERNARD T. (FIBT) et la société GROUPE BERNARD T. (GBT). Tandis que la première regroupait les divers actifs patrimoniaux des époux T., la seconde détenait la majorité du capital de la société anonyme BERNARD TAPIE FINANCE (BTF SA), elle même détentrice des participations industrielles du groupe et notamment de celle acquise en juillet 1990 et janvier 1991 dans le capital de la société allemande Adidas AG par l'intermédiaire d'une société allemande Bernard Tapie GmBH, constituée à cet effet.

Le prix d'acquisition de 1,6 milliards F avait été financé en totalité par un pool bancaire dont le chef de file était la Société de Banque Occidentale (SdBO), filiale du Crédit lyonnais, par ailleurs créancière tant des époux T. au titre des concours consentis à ces derniers à titre personnel que des sociétés du groupe T. à raison des financements qu'elle leur avait accordés.

M. T. ayant décidé de cesser ses activités industrielles et commerciales, les sociétés GBT, FIBT et BTF SA ont conclu le 10 décembre 1992 avec la SdBO un mémorandum qui prévoyait l'apurement des dettes, notamment par la vente d'ADIDAS, et la transformation des actifs industriels de GBT en actifs patrimoniaux au sein d'une société à constituer, Newco, dont le capital serait partagé entre la banque et le groupe T.. Le 16 décembre 1992, en exécution du mémorandum, BTF SA a donné à la SdBO un mandat de vente des actions de BTF GmBH au prix minimum de 2,085 milliards F, soit 317.856.200 euros. Le 12 février 1993, les titres ont été cédés au prix convenu aux huit acquéreurs présentés par la SdBO parmi lesquels Clinvest, filiale du Crédit lyonnais, et Rice SA, une société de droit luxembourgeois détenue par M. R. Louis D., ainsi que des sociétés off shore. Pour certains cessionnaires, cette acquisition a été faite à l'aide d'un prêt spécifique, dit à recours limité , accordé par le Crédit lyonnais, qui prévoyait notamment qu en cas de revente, la plus value serait partagée à raison d'un tiers pour l'emprunteur et de deux tiers pour la banque. Le même jour, l'ensemble des acquéreurs a consenti une promesse de vente des titres moyennant un prix de 3.498.000.000 F à une société de droit belge détenue par M. Louis D.. L'option a été levée par cette dernière le 22 décembre 1994.

Le mémorandum du 10 décembre 1992 et le protocole signé le 13 mars 1994 avec le Crédit lyonnais pour mettre fin aux relations bancaires des intéressés et solder les comptes du groupe T. ont donné lieu à des différends entre les parties et n'ont pas été exécutés. Les prêts accordés ont été rendus exigibles.

Par des jugements du 30 novembre 1994, le tribunal de commerce de Paris a ouvert des procédures de redressement judiciaire à l'encontre de BTF SA, GBT, FIBT, ainsi que de la société anonyme ALAIN COLAS TAHITI, de la société BERNARD TAPIE GESTION (BTG) et de M. et Mme T.. Le redressement a été converti en liquidation judiciaire à l'égard des époux T. par un jugement du tribunal de commerce du 14 décembre 1994 et à l'égard de l'ensemble des sociétés du groupe, à l'exception de BTF SA, par un arrêt de la cour d'appel de Paris du 31 mai 1995. Suivant jugement du tribunal de commerce du même jour, les opérations de liquidation des époux T. et des sociétés du groupe ont été poursuivies sous patrimoine commun. BTF SA, bénéficiant d'un plan de continuation, a fait l'objet d'une attribution préférentielle à la SdBO, créancier gagiste, par une ordonnance du juge commissaire en date du 25 octobre 1995 moyennant le prix de 500 millions de F et a pris le nom de Compagnie européenne de distribution et de pesage (CEDP).

Le 21 février 1996, les liquidateurs judiciaires ont engagé une action indemnitaire contre la SdBO et le Crédit lyonnais devant le tribunal de commerce de Paris. Ce tribunal a rendu le 7 novembre 1996 un jugement qui condamnait SdBO à payer une provision de 600 millions de francs et qui ordonnait une mesure d'instruction. Sur l'appel de la banque, la cour d'appel de Paris, par un arrêt du 30 septembre 2005, après avoir déclaré les mandataires liquidateurs recevables à agir, ès qualités, en réparation du préjudice subi par GBT, a condamné solidairement la SAS CDR CREANCES, nouvelle dénomination de la SdBO, et le Crédit lyonnais, à payer la somme de 135 millions d'euros pour avoir manqué à leurs obligations de mandataires et pour avoir fait perdre au groupe T., en ne le faisant pas bénéficier de crédits appropriés, une chance de vendre directement les participations Adidas à M. Louis D.. La cour d'appel a réservé sa décision sur la réparation éventuelle du préjudice consécutif à la mise en liquidation judiciaire des entités du groupe T..

Sur les pourvois de CDR CREANCES et du Crédit lyonnais, l'Assemblée plénière de la Cour de cassation, par un arrêt du 9 octobre 2006, a rejeté les moyens qui critiquaient la décision en ce qu'elle avait déclaré recevable l'action des liquidateurs. Elle, a, en revanche, cassé l'arrêt attaqué du chef des condamnations prononcées contre le CDR CREANCES et le Crédit lyonnais, aux motifs, en ce qui concerne la condamnation du Crédit lyonnais, que le mandat n'avait été conclu qu'avec la SdBO et que la cour d'appel n'avait caractérisé ni une fictivité de la SdBO, ni une confusion de patrimoine entre elle et le Crédit lyonnais, ni une éventuelle immixtion de ce dernier dans l'exécution du mandat, et, en ce qui concerne la responsabilité du CDR CREANCES et du Crédit lyonnais, que le mandataire n'était nullement tenu de financer l'opération pour laquelle il s'entremettait.

La cour d'appel de Paris autrement composée, désignée comme cour de renvoi, a été saisie par les liquidateurs et les époux T..

A l'automne 2007, outre cette action, plusieurs contentieux étaient en cours entre, d'une part, les liquidateurs et les époux T., d'autre part, le CDR CREANCES et la SA CDR CONSORTIUM DE REALISATION (anciennement CDR Participations, anciennement Clinvest), sociétés dites de défaisance de certains actifs du Crédit lyonnais. Il s agissait de l action de CDR CREANCES en restitution du prêt octroyé le 30 juin 1992 à la société anonyme ALAIN COLAS TAHITI (ACT) pour la rénovation du navire Phocéa , de l action en responsabilité délictuelle pour soutien abusif et rupture abusive de concours bancaire, et de l'action en responsabilité à raison des conditions dans lesquelles était intervenue la liquidation judiciaire du groupe T..

Le 16 novembre 2007, les liquidateurs judiciaires, les époux T. à titre personnel, CDR CREANCES et CDR CONSORTIUM DE REALISATION (ci après, les sociétés CDR) ont signé un compromis qui prévoyait que ces contentieux, ainsi que ceux portant sur l'ordonnance d'attribution de BTF, donneraient lieu à des désistements d'instance et seraient soumis à l'arbitrage de trois arbitres nommément désignés, MM. M., B. et Estoup, qui seraient tenus par l'autorité de chose jugée des décisions de justice définitives précédemment rendues et statueraient en droit en faisant application de la loi française de fond et des règles de procédure des articles 1460 et suivants du Code de procédure civile alors en vigueur.

Par une sentence rendue à Paris le 7 juillet 2008, le tribunal arbitral a, en substance, dit que les sociétés CDR avaient commis deux fautes consistant dans la violation de l'obligation de loyauté et dans la violation de l'interdiction de se porter contrepartie, les a condamnées solidairement à payer aux mandataires judiciaires, ès qualités, la somme de 240.000.000 euros, outre intérêts, a fixé à 45.000.000 euros le préjudice moral des époux T. et à 8.448.529,29 euros les dépenses engagées sur frais de liquidation. Cette sentence revêtue de l'exequatur a été notifiée aux sociétés CDR par actes d'huissier du 16 juillet 2008.

Trois autres sentences ont été rendues par les arbitres le 27 novembre 2008, dont l'une a statué sur les frais de liquidation et les deux autres sur des requêtes en interprétation de la sentence principale. Elles ont été notifiées par des actes d'huissier du 3 mars 2009.

Les sociétés CDR ont engagé contre ces sentences des recours en annulation, le 28 juin et le 1er juillet 2013. Ces recours ont été déclarés irrecevables comme tardifs par une ordonnance du conseiller de la mise en état du 10 avril 2014 qui, n'ayant pas fait l'objet d'un déféré, est devenue définitive.

Le 25 juillet 2013, les sociétés CDR ont formé contre les sentences des appels nullité.

Par une ordonnance du 10 avril 2014, le conseiller de la mise en état a sursis à statuer sur l'incident d'irrecevabilité de ces appels nullité jusqu'à la décision à intervenir sur l'ouverture du recours en révision.

Enfin, les sociétés CDR, par actes d'huissier du 28 juin 2013, ont assigné en révision des sentences, à titre personnel et ès qualités, les mandataires judiciaires à la liquidation des époux T., des sociétés FIBT, GBT, BTG, ACT, ainsi que ces mêmes personnes physiques et morales, étant précisé qu'à la suite de l'exécution des sentences arbitrales, la quasi totalité du passif a été réglé et que les sociétés GBT et FIBT sont redevenues in bonis , en vertu de jugements de révision de procédure collective rendus par le tribunal de commerce de Paris respectivement le 6 mai 2009 (rectifié par décisions des 13 mai 2009, 4 novembre 2009 et 10 novembre 2010) et le 2 décembre 2009.

Par des conclusions signifiées le 26 juillet 2013, l'ETABLISSEMENT PUBLIC DE FINANCEMENT ET DE RESTRUCTURATION (EPFR), actionnaire unique du CDR, créé pour en assurer le financement, est intervenu volontairement à titre accessoire au soutien des prétentions des sociétés demanderesses.

Par conclusions déposées et signifiées le 20 novembre 2014 par le Réseau Privé Virtuel Avocats (RPVA), notifiées par acte du Palais au ministère public, les sociétés CDR demandent à la cour de :

- se déclarer compétente,

- déclarer recevable le recours en révision de la société CDR Créances et de la société CDR Consortium de Réalisation à l'encontre de sentences arbitrales rendues le 7 juillet 2008, le 27 novembre 2008 et le 27 novembre 2008 et les rétracter,

- ordonner la réouverture des débats en vue d'un complément d'instruction,

- et statuant à nouveau, déclarer irrecevables et en tout état de cause infondées les demandes de:

* la Selafa M., prise en la personne de Maître Jean Claude Pierrel,

* la Selafa M., prise en la personne de Maître Jean Claude Pierrel, ès qualités de mandataire judiciaire à la liquidation de la SNC Financière Immobilière Bernard T., de la SA Alain Colas Tahiti, de la SNC Groupe Bernard T., de la SNC BT Gestion, de Monsieur Bernard T. et Madame Dominique M. épouse T.,

* la Selarl EMJ prise en la personne de Maître Didier Courtoux,

* Maître Didier Courtoux,

* la Selarl EMJ en la personne de Maître Didier Courtoux, ès qualités de mandataire judiciaire à la liquidation de la SNC Financière Immobilière Bernard T., de la SA Alain Colas Tahiti, de la SNC Groupe Bernard T., de la SNC BT Gestion, de Monsieur Bernard T. et Madame Dominique M. épouse T.,

* Monsieur Bernard T.

* Madame Dominique M., épouse T.

* la société Groupe Bernard T.

* la société Financière Immobilière Bernard T.

* la société BT Gestion

* la société Alain Colas Tahiti et les en débouter en toutes fins qu'elles comportent,

- En conséquence, décharger CDR Créances et CDR Consortium de Réalisation des condamnations prononcées contre elles en principal, frais, intérêts et accessoires par les sentences arbitrales des 7 juillet 2008 et 27 novembre 2008,

- condamner solidairement les liquidateurs judiciaires ès qualités, les sociétés GBT, FIBT, ACT et BT Gestion, Monsieur Bernard T. et Madame Dominique M., épouse T. à :

(i) restituer à CDR Créances et à CDR Consortium de Réalisation la somme de 404.623.082,54 millions d'euros, (ii) rembourser à CDR Créances et à CDR Consortium de Réalisation les coûts de la procédure d'arbitrage, en ce compris les frais et honoraires des arbitres et ceux de leurs conseils, (iii) payer à CDR Créances et à CDR Consortium de Réalisation à titre de dommages et intérêts une somme égale aux intérêts sur les sommes visées au (i) et (ii) ci dessus, calculés sur la base des taux de l'intérêt légal, avec anatocisme, depuis le jour des paiements jusqu'à celui des remboursements, (iv) payer à CDR Créances et à CDR Consortium de Réalisation la somme de 1.000.000 d'euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile,

(v) payer les entiers dépens ;

Les sociétés CDR soutiennent qu'elles sont recevables à agir en révision devant cette cour dès lors que le litige et l'arbitrage sont internes; que d'ailleurs, les parties se sont elles mêmes placées dans le compromis sous le régime de l'arbitrage interne par le visa exprès, pour les modalités des voies de recours, de l'article 1484 ancien du Code de procédure civile, que la sentence du 7 juillet 2008 a été rendue au visa des articles 1479, 515 et 1484 du Code de procédure civile applicables exclusivement à l'arbitrage interne, que les parties défenderesses qui ont elles mêmes admis ce caractère interne ne sont pas recevables à se contredire et qu'enfin l'ensemble des juridictions administratives ou judiciaires qui ont eu à analyser l'arbitrage, l'ont, dans leurs décisions, considéré comme interne.

Elles soulignent que de fait, les parties n'ont jamais été en litige à propos d'une opération économique qui aurait réalisé un transfert de biens, services ou fonds au delà des frontières, que le litige n'a jamais eu pour objet un dénouement économique dans plusieurs Etats et que les sentences n'ont pas dénoué un tel rapport économique mais uniquement le rapport économique purement local entre la SdBO et sa cliente GBT.

Elles ajoutent par ailleurs qu'à supposer même que l'arbitrage soit international, la cour serait nécessairement compétente pour ne pas laisser subsister dans l'ordre juridique français une sentence entachée de fraude, dès lors qu'en tout état de cause, depuis la reddition des sentences et l'expiration du délai d'arbitrage, il n'y a plus de tribunal arbitral et que le compromis, en ce qu'il prévoyait de le constituer, a épuisé ses effets, le tribunal arbitral ne pouvant plus être réuni.

Elles soutiennent d'autre part que l'action en révision est recevable pour avoir été régulièrement introduite par citation du 28 juin 2013, laquelle n'est pas soumise aux exigences de l'article 954 du Code de procédure civile, après qu'elles aient eu connaissance, ayant eu accès à compter du 7 juin 2013 à la procédure pénale en cours, à des faits dissimulés établissant que l'arbitrage a été voulu, organisé et mis en oeuvre dans des conditions frauduleuses à leur détriment dans la mesure où il est alors apparu que les parties adverses et l'un de leurs avocats entretenaient de longue date avec l'un des arbitres, Monsieur Estoup, des relations privilégiées, qui ont été dissimulées et que celui ci a joué un rôle essentiel et décisif dans l'élaboration des sentences qui ont été ainsi rendues contre les sociétés CDR de manière frauduleuse.

Elles relèvent enfin que les nouveaux éléments factuels dont elles ont fait état dans leurs écritures ultérieures ne constituent pas de nouvelles causes de révision mais des preuves complémentaires de la fraude qui a provoqué le recours en révision introduit par citation du 28 juin 2003.

Par des conclusions déposées et signifiées le 10 novembre 2014 par le RPVA et par acte du Palais au ministère public, les époux T. et la SNC Groupe Bernard T. (GBT) demandent à la cour de :

- déclarer l'EPFR irrecevable dans son intervention volontaire accessoire,

- déclarer à titre principal que la cour est incompétente ou qu'elle ne dispose pas du pouvoir juridictionnel pour décider relativement au recours en révision introduit et renvoyer les parties devant le Tribunal arbitral,

- déclarer à titre subsidiaire, irrecevables les causes de révisions invoquées par les sociétés CDR ou l'EPFR qui ne figuraient pas dans l'assignation du 28 juin 2013, irrecevable la citation en révision des sociétés CDR et en tout état de cause infondé le recours en révision introduit,

- dire à titre infiniment subsidiaire, que les sentences ne peuvent être révisées que sur les chefs de jugement ayant effectivement été surpris par la fraude alléguée et ordonner la réouverture des débats pour permettre aux défenderesses de prendre des écritures sur le fond;

- dire que les sociétés CDR ne peuvent opposer aux défenderesses les limites d'indemnisation et renonciations à toutes autres actions consenties par les époux T. et les liquidateurs dans le compromis;

- condamner les sociétés CDR à payer aux défenderesses la somme de 4.000.000.000 d'euros, somme à parfaire, au titre de la violation de leurs obligations de mandataires ;

- condamner, en tout état de cause, solidairement les sociétés à payer aux défenderesses au recours la somme de 5.000.000 d'euros au titre de dommages intérêts, outre une somme de 1.000.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et les entiers dépens de la présente instance.

Les époux T. et la SNC Groupe Bernard T. font valoir que la cour est incompétente ou en tout cas dépourvue de pouvoir juridictionnel pour se prononcer sur le recours en révision dès lors que les sentences visées ont été rendues dans le cadre d'un arbitrage international dans la mesure où l'opération économique à l'origine du litige consistait en un mandat de vente et la cession par une société française, de parts sociales d'une société de droit allemand, cette cession étant expressément soumise par les parties aux termes du mandat au respect du droit allemand et où cette opération a impliqué l'économie d'autres Etats étrangers en particulier dans l'exécution du mandat, le CDR ayant présenté des acquéreurs localisés au Luxembourg, sur l'Île de Jersey et dans les Îles Vierges Britanniques.

Ils ajoutent à cet égard que pour contester le caractère international de l'arbitrage, les sociétés CDR ne peuvent invoquer utilement ni la qualification que les parties ont pu lui donner ni la prétendue autorité qui serait attachée aux décisions de justice dont elle fait état ni le principe de l'estoppel.

Ils relèvent par ailleurs que la cour est incompétente pour connaître du recours en révision dès lors que la reddition des sentences n'empêche pas le tribunal arbitral d'être saisi d'une demande de rétraction, ce que d'ailleurs les sociétés CDR ont fait le 26 juillet 2013 et que celui ci, éventuellement recomposé, le remplacement des arbitres étant au demeurant réservé par le compromis, peut être réuni, ce qui est, en tout état de cause, exclusif d'un déni de justice.

Ils font valoir d'autre part que la nature contractuelle de l'arbitrage fait obstacle à l'intervention volontaire accessoire de l' EPFR, tiers à la procédure arbitrale, ce d'autant plus que si le recours était accueilli par la cour, celle ci serait appelée à se prononcer sur le fond du litige.

Ils soutiennent enfin que les sociétés CDR ne justifient pas d'une cause de révision dans la mesure où d'une part les éléments invoqués au soutien de la fraude alléguée dont il n'est pas démontré qu'ils auraient été ignorés jusqu'au 26 avril 2013, ne sont pas avérés, où d'autre part le fussent ils, ils ne pouvaient pas être de nature à créer un doute raisonnable quant à l'indépendance et l'impartialité de l'arbitre Estoup entraînant une obligation pour celui ci de les révéler et où enfin, ce prétendu défaut d'indépendance et d'impartialité ne peut être constitutif d'une fraude commise par les époux T. ou les liquidateurs ayant eu une influence déterminante sur la décision des arbitres.

Ils considèrent, en conséquence, que l'action engagée de manière abusive par les sociétés CDR laquelle met en péril leur équilibre patrimonial et a donné lieu à une campagne de presse d une violence inouïe' à leur encontre, leur a été préjudiciable et justifie la condamnation des demanderesses au paiement de dommages intérêts réparateurs.

Par conclusions déposées et signifiées par le RPVA le 10 novembre 2014 et signifiées par acte du Palais au ministère public, la société Financière Immobilière Bernard T. (FIBT) demande à la cour de :

- déclarer l'EPFR irrecevable dans son intervention volontaire accessoire,

- déclarer à titre principal que la cour est incompétente ou qu'elle ne dispose pas du pouvoir juridictionnel pour décider relativement au recours en révision introduit et renvoyer les parties devant le Tribunal arbitral,

- déclarer à titre subsidiaire, irrecevables les causes de révisions invoquées par les sociétés CDR ou l'EPFR qui ne figuraient pas dans l'assignation du 28 juin 2013, irrecevable la citation en révision des sociétés CDR et en tout état de cause infondé le recours en révision introduit,

- déclarer à titre principal qu'elle est incompétente ou qu'elle ne dispose pas du pouvoir juridictionnel pour décider relativement au recours en révision introduit et renvoyer les parties devant le Tribunal arbitral,

- déclarer à titre subsidiaire, irrecevables les causes de révisions invoquées par les sociétés CDR ou l'EPFR qui ne figuraient pas dans l'assignation du 28 juin 2013, irrecevable la citation en révision des sociétés CDR et en tout état de cause infondé le recours en révision introduit,

- déclarer, en tout état, de cause infondé le recours en révision introduit par les sociétés CDR,

- condamner solidairement les sociétés CDR et l'EPFR à payer la somme de 200.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile et les entiers dépens ;

- à titre subsidiaire, au cas où par impossible la cour se déclarait compétente et disait le recours recevable, ordonner la réouverture des débats pour lui permettre de prendre des écritures sur le fond;

Elle soutient que la qualification de l'arbitrage qui n'a été tranchée par aucune juridiction, appartient à la cour qui n'est liée ni par les termes de la sentence ni par la volonté des parties, l'interdiction de se contredire au détriment d'autrui étant inapplicable; qu'il s'agit en l'espèce d'un arbitrage international au regard de l'opération économique à l'origine du litige laquelle consistait en un mandat de vente et en la cession par une société française, de parts sociales d'une société de droit allemand, cette cession étant expressément soumise par les parties aux termes du mandat au respect du droit allemand, cette opération impliquant l'économie d'autres Etats étrangers en particulier dans l'exécution du mandat, le CDR ayant présenté des acquéreurs localisés au Luxembourg, sur l'Île de Jersey et dans les Îles Vierges Britanniques.

Elle observe en conséquence que le recours en révision n'est pas ouvert devant la cour et que de plus, le tribunal arbitral peut être à nouveau saisi, la reddition des sentences n'y faisant pas obstacle et que celui ci, éventuellement recomposé, le remplacement des arbitres étant au demeurant réservé par le compromis, peut être réuni, ce qui est, en tout état de cause, exclusif d'un déni de justice.

Elle conclut par ailleurs à l'irrecevabilité de l'intervention volontaire accessoire de l'EPFR tant par l'effet du recours en révision qu'à raison de la nature contractuelle de l'arbitrage.

Elle fait valoir enfin qu'il n'est pas justifié d'une cause de révision dans la mesure où d'une part les éléments invoqués au soutien de la fraude alléguée, ne sont pas avérés, où d'autre part ni les faits relatifs à l'indépendance et l'impartialité de l'arbitre Estoup lors de la constitution du tribunal arbitral ni les faits relatifs au déroulement et à l'élaboration de la sentence, s'ils étaient prouvés, ne constitueraient une fraude au sens de l'article 595.1 du Code de procédure civile, où la thèse de l'arbitrage orienté est incompatible avec la notion de fraude au sens de ce même texte et où enfin, les sentences arbitrales n'ont pas été surprises et qu'en tout état de cause, l'action est tardive, certains éléments de fait allégués étant connus du CDR depuis 2008.

Par conclusions déposées et signifiées par le RPVA le 7 novembre 2014 et signifiées par acte du Palais au ministère public, la Société d'exercice libéral à forme anonyme (Selafa) M. prise en la personne de Monsieur Jean Claude Pierrel mandataire judiciaire, la Société d'exercice libéral à forme anonyme (Selafa) M. prise en la personne de Monsieur Jean Claude Pierrel, mandataire judiciaire, ès qualités de mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire de la SA ALAIN COLAS TAHITI, de la SNC BT GESTION, de Monsieur Bernard T. et Madame Dominique T. née M., Monsieur Didier Courtoux, mandataire judiciaire et la Société d'exercice libéral à responsabilité limitée (Selarl) EMJ prise en la personne de Monsieur Didier Courtoux, mandataire judiciaire, ès qualités de mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire de la SA ALAIN COLAS TAHITI, de la SNC BT GESTION, de Monsieur Bernard T. et Madame Dominique T. née M., (ci après les liquidateurs), demandent à la cour de :

- mettre hors de cause la SELAFA MJA, la SELARL EMJ et Maître Didier COURTOUX, pris chacun à titre personnel,

- déclarer recevable l'intervention volontaire de la SELARL EMJ désignée aux lieu et place de Maître COURTOUX en qualité de mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire de la SA Alain Colas Tahiti, SNC BT GESTION, Monsieur Bernard T. et Madame Dominique T. née M.,

- déclarer l'EPFR irrecevable en son intervention devant la Cour,

- dire que la demande de révision ne comporte aucun moyen de fond et de fait sur la révision des sentences et, en conséquence, déclarer les sociétés CDR irrecevables en leur recours,

- dire que les conditions d'exercice du recours en révision ne sont pas réunies, qu'il s'agit d'un arbitrage international, et que les demandes sont irrecevables, la Cour étant incompétente pour en connaître,

- dire qu'en tout état de cause l'action en révision est prescrite,

- Pour le cas où la cour écarterait les moyens d'irrecevabilité et de prescription, leur donner acte de ce qu'ils s'en rapportent à justice sur les demandes, considérant qu'en l'état, l'action en révision prévue par l'article 595 du Code de procédure civile n'est pas fondée, et qu'aucune preuve pertinente n'est versée aux débats, justifiant cette demande et en conséquence, débouter les sociétés demanderesses de leurs demandes à ce titre,

- A titre subsidiaire et si la Cour devait rétracter les sentences susvisées, statuer à nouveau,

- faire droit aux demandes contenues dans les mémoires déposés par les concluants ès qualités devant le Tribunal Arbitral les 15 février 2008, 30 avril 2008 et 31 mai 2008, qui font partie intégrante et indissociable des présentes conclusions susvisées,

- condamner les sociétés CDR CREANCES et CDR CONSORTIUM DE REALISATION a payer aux concluants, ès qualités, l'intégralité du passif tel qu'il résultait des états dressés par les liquidateurs judiciaires, outre tous frais de la procédure et frais de justice liés à l'arbitrage ainsi qu'à la présente instance,

- donner acte aux concluants de ce qu'ils ne sont plus les liquidateurs judiciaires des sociétés FIBT et GBT, redevenues in bonis ,

- débouter les sociétés demanderesses de l'ensemble de leurs demandes de dommages et intérêts et de restitution formées contre les concluants,

- En tout état de cause recevoir les concluants en leurs demandes portant sur le remboursement par le CDR CREANCES et le CDR CONSORTIUM DE REALISATION à leur payer (sic) le montant des créances payées entre les mains de ces derniers à hauteur de 163 millions d'Euros, la somme de 76 224, 508 Euros au titre du prix des actions de BTF devenue CEDP ainsi que les intérêts sur le prêt hypothécaire',

- les condamner à payer la somme de 400 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile, outre tous les dépens de première instance et d'appel, avec application des dispositions de l'article 699 du même Code ;

Les liquidateurs observent en premier lieu qu'aucune demande n'étant formée contre la SELAFA MJA, la SELARL EMJ et Maître Didier COURTOUX, pris chacun à titre personnel, ceux ci qui n'ont été parties à la procédure d'arbitrage qu'ès qualités, doivent être mis hors de cause et que doit être reçue l'intervention volontaire de la SELARL EMJ désignée par jugement du tribunal de commerce de Paris aux lieu et place de Monsieur Didier COURTOUX, partie à l'arbitrage ès qualités de mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire de la SA ALAIN COLAS TAHITI, de la SNC BT GESTION, de Monsieur Bernard T. et Madame Dominique T. née M..

Déclarant s'en rapporter à justice sur le fait que tant les informations communiquées par les appelantes et la partie intervenante que les pièces versées aux débats par le ministère public, procèdent d'une violation du secret de l'instruction qui les rend irrecevables, ils font valoir par ailleurs que les conditions de recevabilité du recours en révision ne sont pas réunies dès lors que :

- de première part, la citation du 28 juin 2013 ne contient pas l'exposé des moyens de fond en contravention des dispositions de l'article 56 du Code de procédure civile, la référence aux mémoires déposés devant les arbitres étant inopérante au regard des dispositions de l'article 954 du même Code,

- de seconde part le recours relève exclusivement de la compétence du tribunal arbitral en ce que l'arbitrage est international pour avoir porté sur des questions liées à des cessions de titres d'une société allemande au profit final d'une société luxembourgeoise, avec interposition de sociétés off shore' situées dans des paradis fiscaux et contrôlées par le Crédit lyonnais qui leur a donné le moyens d'acheter les titres, et qui a impliqué des mouvements de capitaux transfrontaliers,

- de troisième part, en leur qualité de liquidateurs demandeurs initiaux à la procédure arbitrale, agissant dans l'intérêt des créanciers des sociétés du Groupe Tapie, ils contestent toute participation à la fraude alléguée, ce qu'aucun élément du dossier ne vient, au demeurant, établir,

- de quatrième part, les sentences ayant été rendues à l'unanimité des trois arbitres, le rôle joué par l'un d'eux, fût il acquis à la cause de Monsieur T., ne permet pas de remettre en cause les sentences,

- de cinquième part, aucun des éléments et pièces versés aux débats n'est susceptible de démontrer que la sentence a été surprise par fraude,

- de sixième part, les sociétés CDR qui ont eu, au cours de l'arbitrage, leur attention attirée sur les relations entre un des arbitres et l'un des avocats d'une partie et se sont abstenues d'agir en révision, sont forcloses.

A titre subsidiaire, les liquidateurs sollicitent que dans le cadre de la réouverture des débats, il soit statué sur les demandes telles qu'elles ont été présentées devant le tribunal arbitral aux termes des mémoires qui ont été déposés.

Par conclusions déposées et signifiées par RPVA le 21 octobre 2014 et par acte du Palais au ministère public, l'EPFR demande à la cour de :

- déclarer recevable son intervention volontaire à titre accessoire ;

- déclarer recevable et fondé le recours en révision des sociétés à l'encontre des sentences arbitrales des 7 juillet 2008 et 27 novembre 2008 ;

- Faisant droit à leurs demandes, rétracter lesdites sentences,

- ordonner s'il y a lieu la réouverture des débats en vue d'un complément d'instruction,

Statuant à nouveau, au visa du mémoire en duplique déposé le 30 mai 2008 par les requérantes devant le Tribunal Arbitral,

- déclarer irrecevables et en tout état de cause, infondées les demandes des liquidateurs, des époux T., de la société Groupe Bernard T., de la société Financière Immobilière Bernard T., de la société BT Gestion et de la société Alain Colas Tahiti et les en débouter en toutes fins qu'elles comportent ;

En conséquence,

- décharger CDR Créances et CDR Consortium de Réalisation des condamnations prononcées contre elles en principal, frais, intérêts et accessoires par les sentences arbitrales des 7 juillet 2008 et 27 novembre 2008,

- condamner solidairement les liquidateurs judiciaires ès qualités, les sociétés GBT, FIBT, ACT et BT Gestion, Monsieur Bernard T. et Madame Dominique M., épouse T. à :

(i) restituer à CDR Créances et à CDR Consortium de Réalisation la somme de 404.623.082,54 millions d'euros, (ii) rembourser à CDR Créances et à CDR Consortium de Réalisation les coûts de la procédure d'arbitrage, en ce compris les frais et honoraires des arbitres et ceux de leurs conseils, (iii) payer à CDR Créances et à CDR Consortium de Réalisation à titre de dommages et intérêts une somme égale aux intérêts sur les sommes visées au (i) et (ii) ci dessus, calculés sur la base des taux de l'intérêt légal, avec anatocisme, depuis le jour des paiements jusqu'à celui des remboursements, (iv) payer à CDR Créances et à CDR Consortium de Réalisation la somme de 1.000.000 d'euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile,

(v) payer les entiers dépens ;

L'EPFR fait valoir en premier lieu que les sentences affectent directement ses droits en ce qu'en sa qualité d'établissement public ayant reçu pour mission de gérer le soutien financier apporté par l'Etat au Crédit Lyonnais dans le cadre du cantonnement de ses actifs au sein du CDR, il doit couvrir les pertes qui pourraient être dégagées par le groupe CDR au titre des engagements non chiffrables et que partant il dispose d'un intérêt légitime à intervenir au recours en révision introduit par le CDR.

Il observe, en outre, qu'une telle intervention, en l'absence de tout texte interdisant l'intervention d'un tiers à un recours en révision en matière d'arbitrage, est d'autant plus compatible avec la nature contractuelle de l'arbitrage que celle ci n'est qu'accessoire.

Il souligne par ailleurs que la cour d'appel de Paris est compétente pour connaître d'un tel recours dès lors que les sentences attaquées relèvent d'un arbitrage interne, ce qui résulte de ce que l'arbitrage T. ne répond pas aux critères de la définition économique de l'arbitrage international, qu'avant la présente instance ni les parties ni les arbitres ne doutaient de la nature interne de l'arbitrage, que les parties défenderesses avant de se contredire l'ont toujours soutenu et que les juridictions tant administratives que judiciaires ont déclaré que l'arbitrage avait une telle nature.

Il ajoute qu'à supposer même que l'arbitrage soit qualifié d'international, le recours en révision serait ouvert devant la cour d'appel en application du principe général du droit fraus omnia corrumpit alors que le tribunal arbitral n'est plus constitué, ne peut plus être réuni et ne peut être recomposé, la saisine conditionnelle et subsidiaire du tribunal arbitral aux fins de rétractation non plus que le principe compétence compétence n étant de nature à faire obstacle à la compétence de la cour qui dispose d'une compétence résiduelle pour connaître d'un recours en révision.

Il fait valoir enfin que les faits nouveaux révélés postérieurement aux sentences justifient la demande de révision du CDR dès lors que Monsieur Pierre Estoup a gravement manqué à ses obligations d'indépendance et d'impartialité, que celui ci a exercé une influence décisive sur les sentences et que l'arbitrage a été orienté ce qui résulte des irrégularités multiples qui ont affecté tant le processus de recours à l'arbitrage que la procédure arbitrale elle même, caractérisées notamment par la violation du principe de la contradiction et la production de fausses pièces.

Vu les conclusions signifiées le 24 juin 2014 par huissier audiencier par le ministère public en faveur de la recevabilité du recours motif pris d'une part du caractère interne de l'arbitrage en ce qu'il a porté sur les conditions du mandat de vente consenti à la SdBo et non sur la cession d'Adidas, dans un contexte purement interne, aucun flux au dessus d'une frontière ne pouvant être identifié d'autre part de la révélation aux parties demanderesses par l'accès au dossier pénal le 7 juin 2013, de faits constitutifs d'une fraude civile ;

Vu les assignations délivrées selon les modalités de l'article 659 du Code de procédure civile le 28 juin 2013 à la société anonyme Alain Colas Tahiti et à la société en nom collectif BT Gestion;

Motifs

SUR QUOI,

- Sur la demande de mise hors de cause de la Selafa M., de la Selarl EMJ et de Monsieur Didier Courtoux, pris chacun à titre personnel.

Considérant que la Société d'exercice libéral à forme anonyme (Selafa) MJA, la Société d'exercice libéral à responsabilité limitée (Selarl) EMJ prise en la personne de Monsieur Didier Courtoux et ce dernier, mandataires judiciaires, sollicitent justement leur mise hors de cause en ce qu'ils ont été attraits chacun personnellement alors qu'aucune demande n'est formée contre eux à ce titre et qu'ils ne sont parties à la procédure d'arbitrage qu'ès qualités ;

- Sur l'intervention volontaire de la Selarl EMJ désignée aux lieu et place de Monsieur Courtoux en qualité de mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire de la SA Alain Colas Tahiti, de la SNC BT GESTION, de Monsieur Bernard T. et de Madame Dominique M. épouse T..

Considérant que la Selarl EMJ a été désignée, par jugement du tribunal de commerce de Paris, aux lieu et place de Monsieur Didier Courtoux partie, à l'arbitrage ès qualités de mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire de la SA Alain Colas Tahiti, de la SNC BT GESTION, de Monsieur Bernard T. et de Madame Dominique M. épouse T. ;

qu'il convient de lui donner acte de son intervention volontaire ;

- Sur la perte de qualité des liquidateurs judiciaires pour représenter les sociétés FIBT et GBT.

Considérant que la Selafa M. et Monsieur Didier COURTOUX ont été attraits à la procédure ès qualités de liquidateurs à la liquidation judiciaire des sociétés FIBT et GBT ;

que toutefois, ces dernières sont redevenues in bonis en vertu de jugements de révision de procédure collective rendus par le tribunal de commerce de Paris respectivement le 6 mai 2009 (rectifié par décisions des 13 mai 2009, 4 novembre 2009 et 10 novembre 2010) et le 2 décembre 2009 ;

qu'il convient, en conséquence, de constater que la Selafa M. et Monsieur Didier COURTOUX n'ont plus qualité pour représenter les sociétés FIBT et GBT lesquelles, présentes à l'instance, agissent par leurs représentants légaux ;

- Sur l'exception d'incompétence et la fin de non recevoir tirées du défaut de pouvoir juridictionnel de la cour pour connaître du recours en révision des sentences arbitrales litigieuses.

Considérant que les parties défenderesses opposent aux sociétés CDR, l'exception d'incompétence et la fin de non recevoir tirées du défaut de pouvoir juridictionnel de cette cour pour connaître d'un recours en révision des sentences arbitrales litigieuses à raison du caractère international de l'arbitrage ;

qu'elles font valoir que le contentieux arbitral concernait principalement l'affaire Adidas et qu'il portait sur des fautes commises par la SdBO dans l'exécution d'un mandat de vente qui s'insérait dans une opération économique unique constituée du mandat et de la cession des parts sociales de BTF GmBH, que cette opération ne se dénouait pas en France dès lors que la société dont le capital était cédé, était allemande et que la vente obéissait aux règles de forme et de fond du droit allemand, et qu'en outre l'acquisition des parts sociales par des sociétés étrangères donnait lieu à des flux financiers transfrontaliers;

Considérant qu'aux termes de l'article 1492 du Code de procédure civile : Est international l'arbitrage qui met en cause les intérêts du commerce international' ;

que pour être ainsi qualifié, le litige soumis à l'arbitre doit, indépendamment de la qualité ou de la nationalité des parties, de la qualification qu'elles lui ont donnée, de la loi applicable au fond ou à l'arbitrage, porter sur une opération qui ne se dénoue pas économiquement dans un seul Etat, une telle opération devant réaliser un transfert de biens, de services, de fonds, de technologie ou de personnel à travers les frontières;

Considérant que les arbitres ont été saisis non pas en vertu d'une stipulation du mandat de vente des parts sociales de la société de droit allemand BTF GmBH laquelle n'est - pas plus que son actionnaire principal BTF partie à l'arbitrage, ni de la promesse d'achat ni du contrat de vente lui même, mais en application d'un compromis conclu le 16 novembre 2007 entre, d'une part, le CDR et le CDR CREANCES, d'autre part, les liquidateurs du groupe T., ainsi que M. et Mme T., afin de résoudre de manière globale et définitive les contentieux opposant les parties devant diverses juridictions étatiques, à savoir :

- l'action en responsabilité contre le Crédit Lyonnais et la SdBO dans l'affaire Adidas pour violation de l'obligation de loyauté et violation de l'interdiction pour un mandataire de se porter contrepartie,

- l'action en responsabilité contre le CDR et le CDR CREANCES pour soutien abusif et pour rupture abusive de crédits,

- le rejet de la créance de la SdBO au titre du solde d'un prêt consenti à la SA Alain Colas Tahiti en raison de l'illicéité de la cause du prêt;

Considérant que ces différends portent sur le dénouement des multiples liens financiers tissés en France entre une banque française et ses clients français et sur les manquements allégués de la première à ses obligations à l'égard des seconds et que leur solution, quelle qu'elle soit, n'emportera pas de flux financier ou de transfert de valeurs au travers des frontières ;

que leur arbitrage ne met donc pas en cause les intérêts du commerce international ;

qu'il est, à cet égard, indifférent, d'une part que certaines des fautes imputées à la banque concernent son rôle dans la cession des actions détenues dans le capital d'une société étrangère par une société du groupe, d'ailleurs non partie à l'arbitrage, d'autre part, que dans la notification de la sentence, il ait été fait référence aux dispositions applicables en matière d'arbitrage international, la qualification de l'arbitrage ne dépendant pas de la volonté des parties;

qu'il s'ensuit l'arbitrage étant interne, que la voie de la révision est ouverte, conformément aux dispositions de l'article 1491 du Code de procédure civile dans sa rédaction applicable à la date de la sentence, devant la cour d'appel qui eût été compétente pour connaître des autres recours contre la sentence;

- Sur la recevabilité de l'intervention volontaire à titre accessoire de l'EPFR.

Considérant que l'article 1491 du Code de procédure civile dans sa rédaction en vigueur à la date de la sentence dispose que le recours en révision est ouvert contre la sentence dans les cas et sous les conditions prévus pour les jugements' ;

Que si l'article 554 du même code relatif à l'intervention en cause d'appel, ouvre celle ci aux personnes qui y ont intérêt et qui n'ont été ni parties ni représentées en première instance ou qui y ont figuré en une autre qualité, ces dispositions générales n'autorisent les interventions volontaires ou forcées au cours d'une instance en révision, que sous réserve qu'elles respectent les conditions de recevabilité que commande l'instance principale ;

qu'en l'espèce, le caractère conventionnel de la procédure arbitrale fait obstacle à ce que l'EPFR qui n'a pas été partie au compromis, soit admis en qualité de tiers, fût il intéressé et fût ce pour conforter la position d'une partie sans élever lui même de prétentions propres, à intervenir dans le présent recours en révision ;

que son intervention à titre accessoire sera déclarée irrecevable ;

- Sur les exceptions tirées de la méconnaissance des dispositions de l'article 56 du Code de procédure civile et de l'article 954 du même code.

Considérant que l'article 56 du Code de procédure civile dispose que l assignation contient, à peine de nullité, outre les mentions prescrites pour les actes d'huissier de justice :

1°[...]

2° L'objet de la demande avec un exposé des moyens en fait et en droit' ;

que l'article 954 du même Code énonce que la partie qui conclut à l infirmation du jugement doit expressément énoncer les moyens qu'elle invoque sans pouvoir procéder par voie de référence à ses conclusions de première instance' ;

Considérant qu'en l'espèce, la citation initiale des sociétés CDR développe précisément les moyens qui fondent en fait et en droit l'action des sociétés demanderesses ;

que par ailleurs, si elle vise sur le fond le mémoire en duplique déposé le 30 mai 2008 devant le tribunal arbitral et qui fait partie intégrante de la présente citation', il ne peut être considéré que celle ci serait irrégulière pour contrevenir aux textes précités ;

qu'en effet, il convient de relever qu'en l'espèce, les dispositions de l'article 954 relatives à la procédure d'appel, voie ordinaire de recours, à supposer même qu'elles soient applicables à une action en révision, voie extraordinaire de recours, d'une sentence arbitrale, sont satisfaites dès lors d'une part que les sociétés CDR indiquent expressément que, parties défenderesses devant le tribunal arbitral, elles ne peuvent répondre par avance aux demandes que les destinataires de la citation seront susceptibles de former devant la cour dans le cadre de l'instance au fond consécutive à la rétractation des sentences, d'autre part que, pour autant que les demandes présentées [par ceux ci] seraient identiques à celles présentées devant le tribunal arbitral', elles renvoient à cet effet, aux arguments qu'elles avaient présentés dans leur mémoire en duplique déposé le 30 mai 2008", que ce mémoire a été intégré dans les dernières écritures des sociétés CDR, et qu'enfin, il a été fait connaître aux parties par le conseiller de la mise en état, lors de la fixation de l'affaire, que le fond serait, le cas échéant, abordé à une audience ultérieure, conformément à l'article 601 du Code de procédure civile, ce qui est exclusif de tout grief ;

que le moyen doit être rejeté ;

- Sur la régularité de la production des pièces issues de la procédure pénale.

Considérant que les liquidateurs opposent de manière inopérante aux sociétés CDR que le secret de l'instruction garanti par l'article 11 du code de procédure pénale, leur interdit pour caractériser la fraude qu'elles allèguent de se prévaloir des pièces tirées de l'information pénale en cours alors que d'une part celles ci ont été versées aux débats par le ministère public et ont été soumises à la libre discussion des parties lesquelles ont été invitées, de surcroît, par lettre du conseiller de la mise en état du 15 mai 2014, dans le cadre d'un incident de communication de pièces, à adresser au ministère public toutes demandes de production de documents provenant d'autres procédures, d'autre part que le secret de l'instruction n'est pas opposable au ministère public dès lors que ce dernier a agi dans l'exercice de la mission que la loi lui attribue en matière de recours en révision, les dispositions de l'article 600 du Code de procédure civile exigeant pour des motifs d'ordre public qu'un tel recours en ce qu'il tend à remettre en cause une décision de justice passée en force de chose jugée, lui soit communiqué et qu'il lui revient, dans ce cas, d'apprécier l'opportunité de transmettre au juge une procédure judiciaire de nature à l'éclairer;

- Sur la régularité de la citation au regard de l'article 598 du Code de procédure civile.

Considérant qu'aux termes de l'article 598 du Code de procédure civile, le recours en révision doit être formé par citation laquelle doit viser les causes de révision qui sont invoquées ;

Considérant qu'aux termes de l'article 594 du même Code, la révision ne peut être demandée que par les personnes qui ont été parties ou représentées au jugement et pour les causes limitativement énumérées à l'article 595 soit :

1. S il se révèle, après le jugement, que la décision a été surprise par la fraude de la partie au profit de laquelle elle a été rendue ;

2. Si, depuis le jugement, il a été recouvré des pièces décisives qui avaient été retenues par le fait d'une autre partie ;

3. S'il a été jugé sur des pièces reconnues ou judiciairement déclarées fausses depuis le jugement;

4. S'il a été jugé sur des attestations, témoignages ou serments judiciairement déclarés faux depuis le jugement';

Considérant qu'en l'espèce, la citation du 28 juin 2013 délivrée par les sociétés CDR dénoncée au ministère public fait état de ce que le dossier de l'instruction pénale en cours auquel elles ont eu accès à compter du 7 juin 2013, a déjà permis la révélation de faits dissimulés établissant que l'arbitrage a été voulu, organisé et mis en oeuvre dans des conditions frauduleuses au bénéfice des destinataires de la présente citation' ;

qu'il y est indiqué d'une part qu''Il est apparu notamment que (i) ceux ci et l'un de leurs avocats entretenaient de longue date avec l'un des arbitres, Monsieur Pierre Estoup, des relations privilégiées qui ont été dissimulées, et (ii) que celui ci a joué un rôle essentiel et décisif dans l'élaboration des Sentences, qui ont été ainsi rendues contre les requérantes de manière frauduleuse', d'autre part qu'au nombre des irrégularités susceptibles d avoir été commises dans l'organisation et la conduite de l'arbitrage(...) il apparaît déjà que la déclaration d'indépendance de l'arbitre Pierre Estoup est un faux au regard de l'obligation de révélation renforcée exigée par le Compromis, de même que les déclarations de celui ci et de l'un des avocats des destinataires de la présente citation quand ils ont nié avoir une relation d'affaires';

qu'enfin sont énumérés par les Sociétés CDR les faits qui selon elles ont été d ores et déjà établis et correspondent aux cas visés à l'article 595 du Code de procédure civile et constituent une fraude caractérisée dans l'organisation de l'arbitrage, puis dans son déroulement et l'élaboration des Sentences' ;

Considérant que la citation du 28 juin 2013, fait référence,'sans préjudice des autres révélations que la poursuite de l'instruction en cours pourra faire émerger', à onze séries de faits, à savoir:

1. Monsieur l arbitre Pierre Estoup était déjà intervenu au bénéfice de Monsieur Bernard T. dans le cadre de procédures pénales qui le concernaient (....).

2. Monsieur l'arbitre Pierre Estoup était intervenu à l'occasion des procédures engagées à l'initiative, avec le soutien et dans l'intérêt de Monsieur Bernard T., par les actionnaires minoritaires de la société CEDP, anciennement dénommée Bernard T. Finance (....).

3. Monsieur Bernard T. s'était exprimé le 10 juin 1993 dans une dédicace à Monsieur 1 arbitre Pierre Estoup dans les termes suivants :

Pour le président Pierre Estoup, en témoignage de mon infinie reconnaissance. Votre soutien a changé le cours de mon destin. Je vous remercie d'avoir eu l'intelligence et le coeur de chercher la vérité cachée derrière les clichés et les apparences. Avec toute mon affection' (....).

4. Le numéro de téléphone portable de Monsieur Pierre Estoup figure dans le répertoire du téléphone portable de Monsieur Bernard T. ; les agendas retrouvés ou non déchirés de Monsieur Pierre Estoup mentionnent l'adresse et le numéro de téléphone de Monsieur Bernard T. ainsi qu'un rendez vous avec lui (D.1428 (pièce parquet n°90, D1433 (pièce parquet n°90, Scellé Thionville 4 pièce parquet n°92).

5. En 2006, au cours de la procédure devant la Cour de cassation, Maître Maurice Lantourne rencontrait Pierre Estoup pour commencer à préparer l'arbitrage, il lui transmettait les « pièces essentielles » de la thèse de Bernard T. (....).

6. À l'initiative de Maître Maurice Lantourne, Monsieur l'arbitre Pierre Estoup a été désigné arbitre dans de multiples arbitrages. L'une de ces désignations est intervenue le jour même de l'audience des plaidoiries devant le Tribunal arbitral le 5 juin 2008 (....). 7. Dans le cadre de l'organisation et du déroulement de l'arbitrage, Monsieur l'arbitre Pierre Estoup communiquait unilatéralement avec Maître Maurice Lantourne (....). Quand l'arbitrage a fait l'objet de critiques, l'avocat de Bernard T. a adressé à Pierre Estoup des arguments de défense des Sentences (....).

8. Le Tribunal arbitral se réunissait dans les locaux d'une société dirigée par un ancien président du Tribunal de commerce de Paris, lui même mis en examen en 2012 pour escroquerie et tentative d'escroquerie en bande organisée pour son rôle dans une autre procédure où il siégeait comme arbitre (D1726/7 Pièce parquet n°65)).

9. Monsieur Pierre Estoup préparait tous les documents de la procédure (ordonnances, comptes rendus d'audience, courriers sous la signature du président du Tribunal Arbitral). Il préparait pour ses co arbitres toutes les notes de synthèse et de présentation des arguments des parties. Il y prenait position ouvertement contre les requérants (« quel crédit peut on attacher aux arguments développés par le CDR »), et se disant « objectif », il cantonnait sa présentation à ce qu'il jugeait lui même être les

« seuls faits constants et déterminants pour la motivation de notre sentence sans me perdre dans un fatras de faits et d'arguments sans intérêt » (....).

10. Les fautes qui ont justifié la totalité de la condamnation du CDR ont été analysées sur la seule base d'écrits émanant en tout ou partie secrètement de Bernard T. et de Maurice Lantourne. Si Pierre M. et Jean Denis B. l'avaient su, la Sentence aurait nécessairement été radicalement différente (....).

11. Le montant de la condamnation du CDR par les Sentences a été déterminé grâce à des informations fournies non contradictoirement à Pierre Estoup à l'initiative de Bernard T.. L'acceptation par Pierre M. et Jean Denis B. du montant hors norme des condamnations prononcées a été obtenue sur la base d'informations gravement erronées fournies par Pierre Estoup et/ou Maître Maurice Lantourne (.....)' ;

Considérant que la circonstance que les sociétés CDR aient fait état dans leurs dernières écritures de faits nouveaux révélés par l'instruction n'est pas de nature à affecter la régularité de la citation précitée qui vise expressément la fraude et articule des faits de nature à caractériser cette cause de révision ;

que la fin de non recevoir tirée de ce que la citation serait irrégulière pour méconnaître les dispositions de l'article 598 du Code de procédure civile doit être, en conséquence, écartée ;

- Sur le délai de forclusion.

Considérant que, suivant l'article 595 du Code de procédure civile, le recours en révision n'est recevable que si son auteur n'a pu, sans faute de sa part, faire valoir la cause qu'il invoque avant que la décision ne soit passée en force de chose jugée;

qu'en outre, aux termes de l'article 596 du même code, pour être recevable, ce recours doit être introduit dans un délai de deux mois, lequel court à compter du jour où la partie a eu connaissance de la cause de révision qu'elle invoque ;

Considérant qu'il appartient aux sociétés CDR de démontrer qu'elles ont eu connaissance des faits constitutifs, selon elles, d'une fraude, moins de deux mois avant la délivrance de la citation du 28 juin 2013, ce que contestent les parties défenderesses ;

Considérant que ces dernières font état, en premier lieu, des éléments tirés de l'audit accordé aux sociétés CDR par les liquidateurs pour la liquidation des frais dont ils demandaient le remboursement et sur lesquels le tribunal arbitral avait sursis à statuer dans la sentence du 7 juillet 2008 ;

Considérant que cet audit, confié au cabinet White and Case, avait conduit à la découverte d'un document intitulé Mémoire d honoraires daté du 6 juillet 1999 adressé par Monsieur Lantourne aux liquidateurs et relatif à des prestations accomplies dans le cadre d'un dossier référencé Aff. BT /N/Réf.: 9700130 ML/CL', correspondant à l'un des dossiers de l'affaire Adidas T., en cours, à cette époque, devant les juridictions judiciaires, lesdites prestations accomplies par Monsieur Lantourne ayant consisté aux termes de ce Mémoire d une part en un rendez vous avec M. Estoup, le 30 juin 1999 d'autre part en une note à Me Lienard, le 30 juin 1999 et enfin en une note à Monsieur Estoup, le 3 juillet 1999 ;

Considérant, toutefois, qu'à la demande d'éclaircissements adressée par les sociétés CDR à tous les acteurs de la procédure d'arbitrage par lettres des 3 et 8 octobre 2008,

• Monsieur Lantourne avait répondu que le Mémoire d honoraires du 6 juillet 1999 aurait été imputé à tort, par suite d'une erreur matérielle, vraisemblablement commise par son secrétariat, au dossier T. n°9700130, ce mémoire se rapportant en réalité à des prestations accomplies dans le cadre d'une autre affaire dénommée Challenge/Or Brun datant de 1999 dans laquelle il était intervenu en qualité de conseil, M. Estoup ayant été lui même désigné en qualité d'arbitre;

• pour sa part, Monsieur Estoup avait indiqué par courrier confidentiel du 29 octobre 2008, n'avoir délivré ni consultation ni avis et n'avoir participé à aucun arbitrage à la requête des liquidateurs, des époux T. ou des sociétés du groupe, révélant toutefois avoir participé en qualité d'arbitre, outre l'arbitrage Challenge Santini Consorts M. à deux autres arbitrages dans lesquels Monsieur Lantourne était également conseil d'une des parties (arbitrages Cogifer/ITP en 2001 et BC Editions / Publicis en 2002) puis précisé par une lettre du 6 novembre 2008 n'avoir pas trouvé trace dans ses archives d un rendez vous le 30 juin 1999 mais être en possession d'une note relative au dossier Challenge Santini Consorts M.' ;

Considérant que si les parties demanderesses se sont alors interrogées sur la possibilité pour elles de demander la récusation de l'arbitre Estoup et ont sollicité, à cet effet, deux consultations de professeurs de droit, les éléments qui avaient été alors recueillis ne pouvaient être regardés comme déterminants;

qu'en effet, compte tenu des renseignements obtenus dont les sociétés CDR n'avaient pas de motif de suspecter la sincérité ni de moyen de les contredire, se posait alors la seule question du manquement éventuel de Monsieur Estoup à son obligation de révélation dans la mesure où ce dernier avait également reconnu, dans sa lettre du 29 octobre 2008, avoir participé en qualité d'arbitre à trois arbitrages dans lesquels Monsieur Lantourne était intervenu en qualité de conseil, toutes circonstances qu'il avait omis de porter à la connaissance des parties dans l'arbitrage Crédit Lyonnais/T. ;

que d'ailleurs, la teneur des avis délivrés par les professeurs J. et Train consultés par le CDR confirme qu'il s'agissait exclusivement d'apprécier l'opportunité d'un recours en récusation de l'arbitre Estoup, ces praticiens relevant de manière concordante qu'en l'état des dénégations opposées par les intéressés, la difficulté d'établir la réalité des relations entre cet arbitre et Monsieur Lantourne, en l'absence de preuve formelle, rendait incertaine une telle initiative ;

Considérant, en deuxième lieu, que FIBT soutient que l'audit précité avait permis aux sociétés CDR de connaître dès le mois d'octobre 2008 le volume d'affaires ayant existé entre l'arbitre Estoup et Monsieur C., l'un des conseils de Monsieur T. ;

Considérant, toutefois, que l'audit ne portait que sur les frais de la liquidation judiciaire et sur les documents relatifs aux procédures arbitrales décrites par Monsieur Estoup dans ses lettres des 29 octobre et 6 novembre 2008, en réponse aux demandes d'information des sociétés CDR ; que rien ne vient accréditer le fait que Monsieur Estoup aurait présenté à l'auditeur, Monsieur M., l'ensemble de ses pièces comptables sur les dix années précédentes, alors que Monsieur Estoup dans son audition du 22 octobre 2013 (pièce du ministère public n°96 D.2113 page 25) fait référence à la seule comptabilité relative à l'arbitrage Challenge Santini Consorts M. à laquelle était censé se rapporter le Mémoire d honoraires du 6 juillet 1999;

Considérant qu'en troisième lieu, les parties défenderesses invoquent un courrier (pièce ministère public S02 page 56) adressé le 15 novembre 2007 (en réalité 20 novembre 2007), par l'un des conseils des sociétés CDR, Monsieur Gilles A., au tribunal arbitral pour lui faire part de sa surprise qu une note de synthèse préparée par l un des demandeurs ait été adressée à tous les arbitres avant même la signature du compromis ;

Considérant, toutefois, que cette déloyauté n'était pas suffisante à caractériser une fraude dès lors que d'une part, il était, alors, ignoré du CDR que cette note avait servi à l'arbitre Estoup pour rédiger un projet d'acte de mission et que d'autre part, dans son courrier en réponse du 22 novembre 2007 (pièce ministère public 90 S2 page 93), le président du tribunal arbitral avait fait connaître à son conseil que les mémoires ou notes de synthèse ne pourront être déposés qu après l homologation du compromis par le tribunal de commerce de Paris (...)', ce dont il se déduisait que la note établie par Monsieur Lantourne ne serait pas prise en considération, ainsi que l'avait demandé Monsieur A., dans sa lettre du 20 novembre 2007 ;

Considérant, en quatrième lieu, que les parties défenderesses font valoir que dans un article paru en 2010 dans un ouvrage d'hommage, un praticien du droit de l'arbitrage avait écrit Ce n est d ailleurs pas étonnant qu'à l'occasion de la sentence arbitrale rendue le 7 juillet 2008 dans l'affaire opposant le Consortium de réalisation aux Consorts T., l'hypothèse d'un recours en révision contre la sentence litigieuse ait surgi. Cette possibilité n'est toujours pas complètement exclue si l'on en croit les rumeurs qui font état des faits nouveaux, susceptibles de fonder un tel recours' ;

Considérant, toutefois, qu'il ne peut être déduit de cette assertion fondée sur des éléments vagues et invérifiables que le CDR avait déjà connaissance d'une fraude et qu'en s'abstenant d'agir en temps utile, il était forclos à la date de la citation du 28 juin 2013 ;

Considérant, en cinquième lieu, que FIBT soutient que l'action en révision est encore tardive en ce qu'elle se fonde sur le caractère prétendument mensonger des lettres du 18 mai 2001 et du 8 mars 2005 dans lesquelles Monsieur Louis D. déclarait que la SdBO lui avait offert d'emblée d'acheter les actions Adidas au prix de quatre milliards quatre cents millions de francs (soit un milliard trois cents millions de deutsche marks)- et donc très au dessus du prix de 2,085 milliards de francs, figurant dans le mandat-, lettres qui avaient convaincu le tribunal arbitral de la déloyauté de la banque ; que FIBT fait valoir que Monsieur F., directeur général de Clinvest, ayant qualifié, lors d'une réunion tenue le 12 novembre 2001 avec le Crédit Lyonnais et le CDR, de faux le courrier de Monsieur Louis D. du 18 mai 2001, les parties demanderesses ne peuvent prétendre avoir découvert à l'occasion des investigations pénales que ces courriers seraient mensongers ;

Mais considérant que contrairement à ce que prétend FIBT, la citation du 28 juin 2013 ne se fonde pas sur l'usage par les arbitres de ces pièces en sorte que le moyen est inopérant au regard de la fin de non recevoir invoquée ;

Considérant qu'il est avéré que ce n'est qu'à compter du 7 juin 2013, que les sociétés CDR s'étant constituées parties civiles dans l'information pénale ouverte des chefs d'usage abusif des pouvoirs sociaux et recel, faux par simulation d'acte, détournement de fonds publics, complicité de ces délits, recel de ces délits et d'escroquerie en bande organisée, ont eu accès à des pièces décisives ;

qu'en effet, elles ont pu prendre notamment connaissance, à cette occasion, objectivement, au delà des rumeurs dont certains organes de presse avaient pu se faire l écho, des éléments suivants :

- un ouvrage saisi le 14 mai 2013 au domicile de la fille de Monsieur Estoup, intitulé Librement écrit par Monsieur T. et comportant une dédicace pour le président Estoupe (sic) aux termes de laquelle l'auteur manifeste à celui ci [son] infinie reconnaissance , l assure que [son] soutien a changé le cours de [son] destin', le remercie d avoir eu l intelligence et le coeur de chercher la vérité derrière les clichés et les apparences' et lui témoigne de [son] affection ;

- un agenda de l'année 2006 saisi au domicile de Monsieur Estoup le 29 janvier 2013 mentionnant à la date du mercredi 30 août 15h T. (scellé Thionville D.1691);

- deux courriers saisis le 29 janvier 2013 au domicile de Monsieur Estoup (pièce ministère public 60 D1690), rédigés par Monsieur Lantourne à l'intention de ce dernier, le premier daté du 17 mars 2000, accompagné du mémoire en réplique déposé en appel par le conseil de l'administrateur ad hoc de la CEDP (anciennement BTF) dont les actionnaires minoritaires avaient contesté avec succès devant la commission des opérations de bourse, l'offre publique de retrait obligatoire engagée par le CDR, le second daté du 23 mars 2000, lui indiquant que l'affaire avait été plaidée le même jour devant la cour et qu'il le tiendrait informé de la suite qui lui serait donnée ;

- des notes d'honoraires établies par Monsieur Estoup entre 1997 et 2006 (saisie du 29 janvier 2013 pièce ministère public 92 scellés Thionville 8 et 9) attestant de l'existence d'un important courant d'affaires au cours de cette période entre Monsieur Estoup et Monsieur Francis C., l'un des avocats de Monsieur T.;

- deux procès verbaux d'audition des 28 mai 2013 et 21 juin 2013 de Monsieur Francis C. aux termes desquels ce dernier, reconnaissait avoir été avocat de Monsieur T. dans le cadre d'une requête en confusion de peine et conseil de l'Association des Petits Porteurs pour l'Annulation de la Vente Litigieuse d'Adidas (APPAVLA) présidée par Monsieur Jean B., regroupant des actionnaires minoritaires de la CEDP (anciennement BTF) qui avaient selon lui le même intérêt juridique que M. T.', indiquait avoir été en contact régulier avec son confrère Lantourne dans le cadre des dossiers T. de 1997 à 2004, admettait que depuis 1997, il avait régulièrement consulté Monsieur Estoup notamment à propos des contentieux engagés par les petits porteurs (pièce ministère public 90 D.2297) et enfin envisageait que l'avis de ce dernier ait pu être sollicité à propos de la confusion des peines demandée par Monsieur T.;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Monsieur Estoup avait, non seulement omis de déclarer ses liens avec deux conseils de Monsieur T., avec ce dernier ainsi qu'avec une association de petits porteurs proche des intérêts de cette partie, mais qu'il avait, de concert avec Monsieur Lantourne, expressément nié toute relation avec ce dernier dans les contentieux de Monsieur T., lorsque la découverte du mémoire d'honoraires du 6 juillet 1999 avait suscité les interrogations des sociétés CDR ; que ces dernières n'avaient aucun moyen, avant que les perquisitions et auditions menées par les services enquêteurs révèlent des faits et pièces dissimulés par les protagonistes, d'étayer ce qui n'était, alors, que de simples soupçons ;

que dans ces conditions, les sociétés CDR qui ont délivré la citation le 28 juin 2013 et agi dans le délai de deux mois de la révélation des faits dont elles n'ont eu connaissance, sans faute de leur part, qu'à compter du 7 juin 2013, ne peuvent se voir opposer le délai de forclusion de l'article 596 du Code de procédure civile ;

- Sur l'existence de la fraude.

Considérant que l'existence de la fraude peut être examinée tant au regard des faits révélés par l'information pénale avant l'introduction du recours en révision que des éléments matériels nouveaux mis au jour par les investigations ultérieures dès lors qu'ils viennent corroborer ceux visés dans la citation du 28 juin 2013;

• Le mémoire d'honoraires du 6 juillet 1999

Considérant qu'en réponse à la demande d'informations du CDR sur le Mémoire d honoraires du 6 juillet 1999 découvert en 2008, Messieurs Lantourne et Estoup ont fait état d'une erreur d'imputation comptable ; que toutefois, les investigations effectuées dans le cadre de l'information pénale ont fait apparaître non seulement que cette explication était mensongère mais encore que pour conforter l'erreur prétendue de référence et de facturation et dissimuler la réalité de leurs relations antérieurement à l'arbitrage à propos de l' affaire T. , qu ils avaient formellement réfutées dans leurs courriers au CDR (lettres Lantourne des 8 octobre, 24 et 30 octobre 2008, lettres Estoup des 29 octobre et 6 novembre 2008), ils avaient usé de manoeuvres dolosives;

qu'en effet, entendus respectivement le 29 octobre 2013 (pièce 90 D2564 page 9) et le 30 octobre 2013 (pièce 106 D.2563 page 9) par les services de police, Monsieur Pierre Antoine Regnie, co arbitre aux côtés de Monsieur Estoup, et Monsieur Raymond Maxime L. président du tribunal arbitral dans l'arbitrage Challenge Santini M. , auquel devaient, selon Monsieur Lantourne et Monsieur Estoup, s'appliquer le Mémoire d honoraires du 6 juillet 1999 et le rendez vous du 30 juin 1999, ont formellement exclu toute relation de ces prestations et événement avec ledit arbitrage, indiquant notamment qu'une seule note de synthèse avait été adressée par Monsieur Lantourne le 4 mai 1999 dont tous les membres du tribunal arbitral étaient en possession lors de leur réunion du 18 mai 1999 ;

qu'il résulte, par ailleurs, de l'audition des membres du personnel du cabinet de Monsieur Lantourne et notamment de Madame Nathalie V. et de Madame Céline L. (auditions des 15 et 24 avril 2014 pièce ministère public 90 D.2556 et D.2565) que dans un dossier comme celui de Monsieur Bernard T., toutes les factures étaient visées par Monsieur Maurice Lantourne', que c est lui même qui déterminait le montant, la personne à facturer ainsi que les prestations à facturer' (feuillet 1729) , que les factures étaient toujours validées par Maître Lantourne ; que s'agissant particulièrement du mémoire d'honoraires du 6 juillet 1999 rédigé par Madame L., cette dernière a précisé que Monsieur Lantourne est venu me voir et m a indiqué qu il fallait facturer dans le dossier BT les prestations qui sont indiquées sur le mémoire ainsi que le montant pour chacune d'elles (...) J'ai tapé ce que Monsieur Lantourne m'a dit de taper' ; qu'interprétant les mentions portées sur le mémoire d'honoraires du 6 juillet 1999, elle a considéré que le 30 juin 1999, il y a eu un rendez vous avec Monsieur Estoup et il a fait une note à Monsieur Lienard...le 3 juillet 1999, Monsieur Lantourne a rédigé une note à Monsieur Estoup, toujours pour le dossier BT' ; qu'interrogée sur une erreur éventuelle d'imputation commise par le secrétariat, Madame V. l'excluait formellement;

que l'absence de toute confusion comptable se trouve corroborée par les propos de Monsieur Lienard, conseil de Monsieur T. dans des procédures pénales (OM, banqueroute), lequel devait finalement admettre, bien qu'affirmant que cette consultation n'aurait pas eu lieu en définitive et disant ne pouvoir se souvenir si cette note lui avait été transmise, avoir proposé à Monsieur Lantourne de consulter Monsieur Estoup et avoir à cet effet demandé à son confrère de préparer une note pour la bonne compréhension de ce magistrat, ce qu'il s'était toutefois abstenu d'indiquer dans la lettre rédigée par lui le 20 octobre 2008 à la demande de son confrère qui devait la produire auprès des sociétés CDR en réponse aux demandes de renseignements de ces dernières (lettre du 28 juin 2013 pièce n°78 D.1981 et audition du 7 octobre 2013);

que c'est donc, dans un but dolosif, pour accréditer que la note à Monsieur Estoup, le 3 juillet 1999" portée sur la note d'honoraires référencée Aff. BT /N/Réf.: 9700130 ML/CL était en réalité une note transmise dans l'arbitrage Or Brun Santini M. , que Monsieur Lantourne devait produire en octobre 2008 à l'avocat du CDR, une note blanche (pièce n°69 D.1794), sans en tête, ni datée ni signée et dépourvue de courrier d'accompagnement, tandis que Monsieur Estoup, de son côté, devait remettre, lors de son interrogatoire du 5 novembre 2013 (D.2254), copie de la même note dont il se déclarait incapable lui aussi de remettre le courrier à laquelle elle était jointe ;

• La préparation de l'arbitrage

Considérant qu'alors que le compromis d'arbitrage a été signé le 16 novembre 2007, l'agenda de Monsieur Estoup porte à la date du 30 août 2006 la mention 15h T. ; qu il a été constaté que le 31 août 2006 un collaborateur du cabinet Friedfranck dont Monsieur Maurice Lantourne était un des associés a rédigé une note à l'intention de Monsieur T., en faveur du recours à un arbitrage (Scellé n°49 doc. 42) puis le 5 septembre 2006 un courrier à Monsieur Estoup accompagné de nombreuses pièces de fond et de procédure extraites du contentieux relatif à la cession Adidas, alors pendant devant la Cour de cassation (Scellé 49 doc n°43), le relevé de diligences établi à cette occasion révélant que cet envoi avait été précédé d'un point avec ML ;

que le 12 septembre 2006, ce même collaborateur au sein du cabinet Friedfranck, dont la fiche de travail mentionne le 8 septembre 2006 RDV ESTOUP , a rédigé, au nom de Monsieur Lantourne, une nouvelle note sur le dossier Adidas (scellé 49 doc n°45), le relevé de diligences du même jour de cet avocat énonçant 1;00 Courriers à Me Piwnica, M. Estoup et BT. ce qui atteste que Monsieur Estoup et Monsieur Bernard T. étaient tous deux destinataires de cette note ;

• Les relations avec les associations de petits porteurs

Considérant qu'outre la proximité précédemment relevée de Monsieur Estoup avec Monsieur C., l'un des avocats de Monsieur T., par ailleurs conseil de l'APPAVLA, les courriers des 17 mars 2000 (pièce n°60 D.1690/2) et 23 mars 2000 (pièce n°60 D.1690/8) que Monsieur Lantourne a adressés à Monsieur Estoup, révèlent que ces derniers étaient en contact régulier et que le second a été tenu informé de l'évolution du litige opposant la banque aux actionnaires minoritaires de la CEDP (anciennement BTF) dont les intérêts défendus par l'APPAVLA et son président Jean B. étaient, ainsi qu'il a été dit, étroitement liés à ceux de Monsieur T.;

Considérant par ailleurs que si Monsieur Estoup dénie avoir rencontré Monsieur T. le 30 août 2006 et reçu les deux notes établies à son intention, son activisme en faveur de la promotion des intérêts de Monsieur T. et de ses sociétés se trouve confirmé par le rendez vous organisé avec Monsieur C., président de l'Association des Petits Porteurs Actifs (APPAC) et son conseil Monsieur Frédérik Carel C. (dont les coordonnées téléphoniques ont été retrouvées sur l'agenda 2006 de Monsieur Estoup) lesquels s'ils divergent sur la date de cette rencontre située par l'un en 2004 (pièce n°70 D.1815/4) et par l'autre en 2003 (pièce n°90 D.2101/4), s'accordent sur le but poursuivi par Monsieur Estoup qui était de convaincre l'APPAC d'intervenir au soutien des intérêts de Monsieur T. dans son différend avec le Crédit Lyonnais à propos de la vente d'Adidas à laquelle l'APPAC était totalement étrangère;

• La proximité personnelle de l'arbitre Estoup avec Monsieur T.

Considérant que la preuve de la proximité de Monsieur Estoup avec Monsieur T. dont il détenait d'ailleurs dans son agenda, l'adresse et les coordonnées téléphoniques, se trouve caractérisée par les termes de la dédicace précitée (pièce 59 D1689) datée du 10 juin 1998, de l'ouvrage saisi le 14 mai 2013 ;

qu'en effet, la personnalisation et le contenu de cette adresse qui fait référence à un appui concret et décisif interdisent de la ramener à une formule d'envoi banale usitée par un auteur désireux, comme prétendu, d'honorer un destinataire inconnu étant relevé à cet égard que la coquille affectant le nom patronymique de l'intéressé orthographié Estoupe ne peut être regardée comme déterminante alors que les coordonnées téléphoniques de Monsieur Estoup figurent avec cette même orthographe dans la liste des contacts enregistrés sur le téléphone portable de Monsieur T.;

Considérant que cette proximité s'évince également des propres déclarations de Monsieur T. qui, ayant, aux termes d'un protocole d'accord du 4 mai 2000 créé avec Monsieur André G. connu en détention, une société de partenariat ( joint venture ) de droit malaisien dénommée Superior Ventures Limited dont le capital devait d'ailleurs être abondé par les profits escomptés du procès intenté au Crédit Lyonnais sur l affaire BTF/Adidas après apurement des dettes', indique lors d'une déposition reçue le 26 juin 2013 (pièce 74 D.1913 page 7) que son conseil, Monsieur C. aurait fait appel à Monsieur Estoup pour que ce dernier se renseigne sur sa moralité , ce dont ce dernier aurait attesté favorisant ainsi son entreprise avec son partenaire;

Considérant que la dissimulation de ces liens anciens, étroits et répétés participe de l'accomplissement du dessein ourdi par l'arbitre de concert avec Monsieur T. et son représentant, de favoriser au cours de l'arbitrage les intérêts de cette partie ;

• L'attitude de Monsieur Estoup au cours de l'arbitrage

Considérant que cette volonté s'évince de plus fort de l'attitude, au cours de l'arbitrage, de Monsieur Estoup qui fort de sa grande pratique de ce mode de règlement des litiges dont il se dit lui même un vieux routier (lettre du 19 janvier 2008 aux co arbitres (pièce 90 scellé 35) ainsi que de l autorité attachée à son ancienne qualité de haut magistrat, s'est employé, à seule fin d'orienter la solution de l'arbitrage dans le sens favorable aux intérêts d'une partie, à exercer au sein du tribunal arbitral, un rôle prépondérant et à marginaliser ses co arbitres poussés à l'effacement par facilité, excès de confiance, parti pris voire incompétence ainsi qu'il résulte de leurs auditions et de la teneur du courrier adressé par l'un d'eux à l'intéressé (pièce ministère public n°38 D.1551) ;

que c'est ainsi, que Monsieur Estoup a préparé (annexe à la lettre du 14 novembre 2007 pièce 80 scellé 35) un projet d'acte de mission qui, s'il ne devait pas, en définitive, être signé, prévoyait, à son initiative, d'écarter au prétexte de sécurité juridique , ce qui ne pouvait profiter qu aux intérêts des clients de Monsieur Lantourne, toute autorité aux motifs définitifs de l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 30 septembre 2005 prononçant sur le différend relatif à la vente Adidas alors que les parties l'avaient expressément retenue dans le projet de compromis (point 7.1) qui allait être signé le 16 novembre 2007 ;

que par ailleurs, les similitudes manifestes entre, d'une part ce projet d'acte de mission rédigé par Monsieur Estoup le 13 novembre 2007 lequel énumère les questions de droit à soumettre au tribunal, d'autre part, la note de synthèse (D.2464 page 3) que Monsieur Lantourne avait remise à l'arbitre, avant même non seulement que le compromis d'arbitrage soit signé et ait été homologué par le tribunal de commerce mais encore que le conseil de la partie adverse en soit rendu lui même destinataire par un courriel du 14 novembre 2007 (pièces n° 90 D.2467/1 et S2) et que le tribunal arbitral ait organisé une réunion pour fixer la liste des points litigieux à résoudre (lettre M. du 22 novembre 2007 pièce n°90 scellé 2), sont révélatrices de la proximité des intéressés, la présentation du litige reflétant leur communauté de vue dans l'appréhension de celui ci;

que si ce projet d'acte de mission ne devait pas être concrétisé, il n'en demeure pas moins que Monsieur Estoup a soumis à ses co arbitres le 29 mai 2008 (pièce 88 Scellé reconstitué ouvert S.40) une liste de questions à résoudre par le tribunal arbitral destinées à circonscrire le débat laquelle reprend pour l'essentiel les questions figurant dans le projet, ce qui ne pouvait qu'orienter la réflexion du tribunal dans le sens souhaité par les clients de Monsieur Lantourne;

Considérant que cette même volonté d'agir en faveur des intérêts de cette partie est également révélée par la tentative de Monsieur Estoup de déterminer l'indemnisation des demandeurs à l'arbitrage par référence aux conditions financières de la transaction conclue par le CDR avec les actionnaires minoritaires de la CEDP (anciennement BTF) qui avaient souhaité intervenir dans la procédure arbitrale;

qu'en effet, ainsi que cela résulte des courriers adressés le 27 mars 2008 à l'administrateur ad hoc de la CEDP puis le 19 mai 2008 à un avocat au barreau de Riom par le président de l'APPAVLA, Monsieur Jean B., celui ci avait informé Monsieur Estoup, à l'occasion de deux conversations téléphoniques, de la transaction conclue le 21 mars 2007 par les minoritaires avec le CDR et avait entrepris des démarches à la demande confidentielle de Monsieur Estoup, membre du tribunal arbitral' pour faire signer à ceux ci une autorisation de levée de la confidentialité du protocole transactionnel d'avril 2007 ;

que la teneur de ces courriers doit être rapprochée de l'initiative précisément prise par le tribunal arbitral, aux termes d'un procès verbal d'audience du 28 avril 2008 (pièce 90 scellé 37) rédigé par Monsieur Estoup, d'interroger les parties , alors que cette question n'avait pas été évoquée fût ce de manière hypothétique dans la procédure, sur l'existence d'une transaction pouvant être intervenue au cours des deux dernière années' ;

que s'il est constant que dans sa sentence du 7 juillet 2008, le tribunal arbitral a constaté le commun accord des parties pour considérer que la communication de cette transaction n'était pas nécessaire à la solution du litige, les démarches entreprises par l'arbitre Estoup illustrent sa volonté de mettre par artifice dans le débat, en vue de servir les intérêts qu'il entendait promouvoir, des informations recueillies personnellement hors de la procédure;

Considérant que cette volonté d'infléchir l'opinion des co arbitres ne s'est jamais démentie tout au long dans l'instance arbitrale dans la conduite de laquelle Monsieur Estoup a joué un rôle moteur et a exercé une influence déterminante ;

qu'ainsi, alors même qu'il n'était pas le président du tribunal arbitral, l'arbitre Estoup qui se présente comme le mécanicien de la machine dont le capitaine aurait été sur le pont , a rédigé, ce qu il a admis, (pièce 38 D.1551) toutes les ordonnances de procédure et le procès verbal des audiences ainsi que l'ensemble des correspondances adressées aux parties sous la signature du président du tribunal arbitral, (pièces 87 scellé ouvert S32), décidé du calendrier de l'arbitrage et même écrit directement aux parties ;

que Monsieur Estoup a fait part à ses co arbitres de son opinion négative sur la qualité des écritures du CDR présentées comme un mélange de fait et de droit..assez difficile à ordonner ainsi que de ses appréciations sévères sur l'attitude de la banque dont les fautes lui paraissaient évidentes , ce qui, selon lui, était de nature à priver les arguments du CDR de toute crédibilité ;

qu'il s'est également chargé de la préparation d'un exposé des seuls faits constants et déterminants pour la motivation de notre sentence' ;

que d'autre part, avant même l'audience de plaidoirie, il a fait connaître que, dès réception du mémoire en réplique du CDR, il serait en mesure de terminer la première partie de la sentence et entreprendre la rédaction de la motivation proprement dite' , ce qui témoigne d'une opinion arrêtée

qu'il entendait faire partager par le tribunal;

qu'en outre, après avoir adressé à ses co arbitres le 12 juin 2008 une dernière note, il leur a fait parvenir un projet de sentence prononçant tant sur le préjudice matériel que sur le préjudice moral alors même qu'il n'était pas chargé de la rédaction relative à ce dernier chef de demande; qu'il a, du reste, adressé à Monsieur B., sur ce point, une note non sollicitée de trois pages (pièce 87 scellé ouvert reconstitué S32) dont l'identité de rédaction avec la sentence finale ne peut qu'être relevée ;

que Monsieur B. a, d'ailleurs, reconnu que Monsieur Estoup qui souhaitait que le préjudice moral soit fixé à cinquante millions de francs, entendait par là à tout prix faire aboutir sa thèse (pièce parquet 90 D.2522 page 22) ;

qu'à cet effet, Monsieur Estoup, n'a pas hésité à faire valoir auprès de ses co arbitres (audition de Monsieur B. pièce parquet 63 D.1722), alors même que l'hypothèse d'une sous évaluation du passif n'était pas envisagée par le mémoire des liquidateurs, que ces derniers avaient peur que le montant qui [leur] avait été communiqué soit inférieur à la réalité'; que Monsieur Estoup se faisait ainsi l'écho de la thèse précisément soutenue par Monsieur Lantourne pour le compte des époux T. et accréditait l'idée qu'une partie des sommes allouées au titre du préjudice moral serait affectée à l'apurement de ce passif supplémentaire, ce dont ses co arbitres se sont convaincus (auditions de Monsieur M. pièce parquet 90 D.2518 et de Monsieur B. pièce 90 D.2522), le président du tribunal arbitral ayant d'ailleurs indiqué expressément lors de son audition, interrogé sur le montant très important et inhabituel du préjudice moral que c était pour payer le passif ;

Considérant qu'il est, ainsi, démontré que Monsieur Estoup, au mépris de l'exigence d'impartialité qui est de l'essence même de la fonction arbitrale, a, en assurant une mainmise sans partage sur la procédure arbitrale, en présentant le litige de manière univoque puis en orientant délibérément et systématiquement la réflexion du tribunal en faveur des intérêts de la partie qu'il entendait favoriser par connivence avec celle ci et son conseil, exercé une influence déterminante et a surpris par fraude la décision du tribunal arbitral ;

qu'à cet égard, la circonstance que la sentence ait été rendue à l'unanimité des trois arbitres est inopérante dès lors qu'il est établi que l'un d'eux a circonvenu les deux autres dans un dessein frauduleux ;

que pour le même motif, le fait que certaines des parties défenderesses n'aient pas participé à la fraude, est sans emport dès lors que celle ci affecte les sentences dans leur essence même et atteint l'ensemble de leurs dispositions ;

que le recours en révision dont les conditions se trouvent réunies doit être, en conséquence, accueilli ;

qu'il convient d'ordonner la rétraction de la sentence arbitrale rendue le 7 juillet 2008 ainsi que celle des trois sentences du 27 novembre 2008 qui en sont la suite et la conséquence ;

Considérant qu'il convient, afin qu'il soit à nouveau statué en fait et en droit, d'enjoindre aux parties de conclure sur le fond, selon les modalités précisées au dispositif de la présente décision et de renvoyer les débats, sur ce point, à une audience ultérieure ;

- Sur la demande de dommages intérêts pour procédure abusive.

Considérant que les époux T. et la SNC Groupe Bernard T. font valoir que par un recours en révision manifestement irrecevable et infondé, en droit comme en fait les demandeurs ont agi de manière abusive et que cette attitude procédurale scandaleuse leur cause un préjudice personnel qui doit être réparé par l'allocation de dommages intérêts ;

Considérant qu'au regard du sens de l'arrêt qui a accueilli le recours en révision, leur demande ne peut qu'être rejetée ;

Considérant enfin que les demandes d'indemnité formées en application de l'article 700 du Code de procédure civile et les dépens doivent être réservés en fin de cause ;

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

Donne acte à la SELARL EMJ désignée aux lieu et place de Monsieur COURTOUX en qualité de mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire de la SA ALAIN COLAS TAHITI, SNC BT GESTION, Monsieur Bernard T. et Madame Dominique M. D. épouse T. de son intervention volontaire;

Met hors de cause la SELAFA MJA, la SELARL EMJ et Monsieur Didier COURTOUX, pris chacun à titre personnel ;

Constate que la Selafa M. et Monsieur Didier COURTOUX, attraits ès qualités de liquidateurs à la liquation judiciaire des sociétés FIBT et GBT n'ont plus qualité pour représenter celles ci;

Dit que l'arbitrage qui a donné lieu aux sentences rendues à Paris le 7 juillet 2008 et le 27 novembre 2008 est un arbitrage interne ;

Vu les dispositions de l'article 1491 du Code de procédure civile dans sa rédaction applicable à la date des sentences ;

Dit, en conséquence, que le recours en révision formé par les sociétés CDR CREANCES et CDR CONSORTIUM DE REALISATION à l'encontre desdites sentences relève du pouvoir juridictionnel de la cour ;

Dit régulière la citation introductive d'instance du 28 juin 2013 ;

Ecarte le moyen tiré des dispositions de l'article 11 du code de procédure pénale ;

Dit le recours en révision recevable pour avoir été introduit dans le délai prévu par l'article 596 du Code de procédure civile ;

Déclare irrecevable l'intervention volontaire de l'ETABLISSEMENT PUBLIC DE FINANCEMENT ET DE RESTRUCTURATION ;

Accueille le recours en révision ;

Ordonne la rétractation de la sentence arbitrale rendue le 7 juillet 2008 ainsi que des trois sentences du 27 novembre 2008 qui en sont la suite et la conséquence;

Vu l'article 601 du Code de procédure civile ;

Enjoint aux parties afin qu'il soit à nouveau statué en fait et en droit de conclure sur le fond avant le 30 avril 2015 pour les parties demanderesses au fond et avant le 30 juin 2015 pour les parties défenderesses au fond ;

Dit que l'ordonnance de clôture sera rendue le 2 septembre 2015 ;

Dit que l'affaire sera appelée pour plaidoirie sur le fond à l'audience du 29 septembre 2015 à 9h30 ;

Déboute Monsieur Bernard T., Madame Dominique M. D. épouse T. et la SNC Groupe Bernard T. de leur demande de dommages intérêts pour procédure abusive;

Réserve les demandes formées en application de l'article 700 du Code de procédure civile et les dépens.

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