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Décisions

CA Nancy, 5e ch., 27 août 2025, n° 24/01282

NANCY

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Ugoce Loisirs (SAS)

Défendeur :

Lasem (SARL), Cosmic Jump 54 (SARL), Lasem Immobilier (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Beaudier

Conseillers :

M. Beaudier, M. Firon, M. Jobert

Avocats :

Me Chollet, SCP Gasse Carnel Gasse Taesch Lederle

T. com. Nancy, du 18 avr. 2024, n° 20200…

18 avril 2024

FAITS ET PROCEDURE

Par acte sous seing privé en date du 22 juillet 2012, la société Lasem a cédé son fonds de commerce de loisirs et de jeux laser, exploité sous l'enseigne 'LaserMaxx', à la société Ugoce Loisirs.

Le fonds de commerce inclut un bail conclu, le 2 août 2007, entre la société Lasem et la société Lasem Immobilier portant sur un local sis [Adresse 2] à [Localité 9].

Les sociétés Lasem et Lasem Immobilier ont pour dirigeants M. [C] [F] et M. [U] [S].

Cet acte de cession comporte une clause de non-concurrence imposée au cédant d'une durée de cinq ans et dans un rayon de 25 kilomètres à vol d'oiseau de l'établissement exploitant le fonds sur le territoire de la commune de [Localité 9].

Le 25 septembre 2017, la société Cosmic Jump 54 a été constituée, dont M. [C] [S] est le gérant. Elle a pour objet l'exploitation d'une activité de trampoline, d'aménagement et d'exploitation d'espace de jeux et de loisirs interactifs.

Le 21 mars 2018, la société Cosmic Jump 54 a démarré son activité avec un complexe de trampoline, situé [Adresse 5]. Le 7 octobre 2019, elle obtenu une autorisation d'ouverture d'une extension portant sur une activité annexe de jeux de laser et de réalité virtuelle.

Par actes en date des 4 et 5 novembre 2020, la société Ugoce Loisirs a assigné la société Lasem, Lasem Immobilier et Cosmic Jump 54 devant le tribunal de commerce de Nancy aux fins de voir notamment condamner cette dernière à payer la somme de 30 193 euros, celle de 100 000 euros pour le préjudice d'image. Elle demande également de prononcer la résolution de la cession de la branche d'activité, conclue entre la société Ugoce Loisirs et la société Lasem, aux torts de cette dernière, ainsi que celle du sous-bail commercial. Elle demande enfin de condamner la société Lasem à lui payer la somme de 400 000 euros au titre de la restitution du prix du fonds de commerce cédé, outre celle de 100 000 euros, à titre de dommages et intérêts.

Suivant jugement, rendu contradictoirement le 18 avril 2024, le tribunal de commerce de Nancy a :

- Sur la compétence,

- déclaré la société Lasem Immobilier mal fondée en son exception d'incompétence, l'en a débouté,

- s'est déclaré être compétent pour connaître du litige.

Sur le fond,

- déclaré la société Ugoce Loisirs mal fondée en sa demande de résolution de la cession de la branche d'activité de la société Lasem, l'en a débouté ;

- déclaré la société Ugoce mal fondée en sa demande de résolution du sous-bail commercial conclu entre la société Ugoce Loisires et la société Lasem en date du 22 juillet 2012, l 'en a débouté,

- déclaré la société Ugoce Loisirs mal fondée en sa demande de restitution du prix, l'en a débouté,

- déclaré la société Ugoce Loisirs mal fondée en sa demande de dommages et intérêts, l'en a débouté ;

- déclaré la société Ugoce Loisirs mal fondée en sa demande de dommages et intérêts pour actes de parasitisme, l''en a débouté ;

- déclaré la société Ugoce Loisirs mal fondée en sa demande de dommages et intérêts au titre du préjudice d'image, l''en a débouté,

- dit n'y avoir lieu a condamnation au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société Ugoce Loisirs aux dépens,

- rappelé que l'exécution provisoire est de droit.

Par déclaration du 27 juin 2024, la société Ugoce Loisirs a interjeté appel du jugement rendu par le tribunal de commerce de Nancy le 18 avril 2024.

Aux termes de ses dernières conclusions remises au greffe le 8 janvier 2025, la société Ugoce Loisirs demande à la cour de :

- infirmer le jugement du tribunal de commerce de Nancy en date du 18 avril 2024, en toutes ses dispositions,

statuant à nouveau,

à titre principal :

sur la résolution de la cession de branche d'activité :

- prononcer la résolution de la cession de branche d'activité conclue entre la société Lasem et la société Ugoce Loisirs en date du 22 juillet 2012 aux torts de la société Lasem,

- prononcer la résolution de la cession de sous bail commercial conclu entre la société Lasem et la société Ugoce Loisirs en date du 22 juillet 2012,

- dire et juger que la résolution de la cession de sous bail commercial est opposable à la société Lasem Immobilier.

- ordonner les restitutions en conséquence,

- condamner la société Lasem à payer à la société Ugoce Loisirs la somme de 400 000 euros au titre de la restitution du prix,

à titre subsidiaire,

- faire droit à la demande d'expertise concernant la fixation du prix formulée par les sociétés Lasem, Cosmic Jump 54 et Lasem Immobilier à leurs frais avancés,

à titre encore plus subsidiaire, si la résolution de la cession n'est pas prononcée,

pour les agissements de parasitisme :

- condamner la société Cosmic Jump 54 à payer à la société Ugoce Loisirs la somme de 174 800 euros, sauf à parfaire à titre de dommages et intérêts pour actes de parasitisme, outre les intérêts légaux à compter des présentes,

- condamner la société Cosmic Jump 54 à payer à la société Ugoce Loisirs la somme de 100 000 euros pour préjudice d'image,

- condamner la société Cosmic Jump 54, sous astreinte de 1 000 euros, par jour de retard à compter de la signification décision à intervenir, à cesser toute utilisation du nom commercial « LaserMaxx » dans sa documentation civile et commerciale (papier, site internet, réseaux sociaux, enseignes, publicités),

En toute hypothèse,

- ordonner la capitalisation des intérêts,

- ccondamner solidairement la société Lasem, la société Cosmic Jump 54 à payer à la société Ugoce Loisirs la somme de 10 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les éventuels dépens.

Aux termes de leurs dernières conclusions remises au greffe le 17 mars 2025, les sociétés Lasem, Lasem Immobilier et Cosmic Jump 54 demandent à la cour de :

- débouter la société Ugoce Loisirs de toutes ses demandes, fins et prétentions ;

- confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Nancy le 18 avril 2024,

- condamner la société Ugoce Loisirs à payer la somme de 10 000 euros, chacune, à la société Cosmic Jump 54, la société Lasem Immobilier, la sociéré Lasem, au titre des frais irrépétibles de l'instance ;

- condamner la société Ugoce Loisirs aux entiers dépens.

Pour un plus ample exposé du litige la cour renvoie expressément à leurs conclusions visées ci-dessus, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

Vu l'ordonnance de clôture en date du 3 avril 2025 ;

- MOTIFS :

- Sur la garantie d'éviction :

Conformément à l'article 1626 du code civil, quoique lors de la vente il n'ait été fait aucune stipulation sur la garantie, le vendeur est obligé de droit à garantir l'acquéreur de l'éviction qu'il souffre dans la totalité ou partie de l'objet vendu, ou des charges prétendues sur cet objet, et non déclarées lors de la vente.

Le vendeur d'un fonds de commerce a l'obligation de s'abstenir de tout acte de nature à détourner la clientèle du fonds cédé. Même lorsque les parties ont stipulé que le vendeur ne pourrait se rétablir pendant un certain délai, l'expiration de ce délai ne met pas fin à l'obligation de garantie légale d'éviction qui est d'ordre public.

Suivant un acte de cession de branche d'activité en date du 22 juillet 2012, la société Ugoce Loisirs a acquis auprès de la société Lasem un fonds de commerce de loisirs et de jeux laser cet acte de cession prévoit une clause de non-concurrence rédigée comme suit :

'la vente est réalisée sous les charges et conditions ordinaires et de droit, et notamment sous celles suivante. Pour le cédant : de s'interdire expressément la faculté d'exploiter, de diriger, directement ou indirectement, de s'intéresser même à titre salarié, d'associé ou de commanditaire, à un fonds de commerce similaire en tout ou partie au fonds cédé pendant un délai de cinq ans à compter de l'entrée en jouissance et dans un rayon de vingt-cinq kilomètres à vol d'oiseau de l'établissement sis à [Localité 9], sous peine de dommages et intérêts envers le cessionnaire ou les successeurs sans préjudice du droit qu'il auraient de faire cesser cette contravention.

Cette interdiction de non concurrence s'appliquera également à titre personnel à Messieurs [C] [F] et [U] [S], directement ou indirectement, comme dit précédemment. En cas de non-respect de cette clause, Messieurs [C] [R] et [U] [V] seront responsables vis-à-vis du cessionnaire solidairement et indéfiniment'.

Il est constant en l'espèce qu'à l'expiration de cet engagement de non-rétablissement (30 juillet 2017), M. [C] [F] et M. [U] [S] ont constitué, le 25 septembre 2017, la société Cosmic Jump 54 ayant pour objet l'exploitation d'une activité d'une activité de trampoline, ainsi que d'un espace de jeux interactifs, dans un établissement situé [Adresse 5]. Celle-ci a obtenu, le 7 octobre 2019, l'autorisation d'ouvrir une extension en vue d'y exploiter une activité de jeux de laser, sous l'enseigne 'LaserMaxx', à l'instar de celle exploitée par le cessionnaire du fonds de commerce, la société Ugoce Loisirs, dans les locaux situés au [Adresse 2] à [Localité 9].

Au soutien de son appel, la société Ugoce Loisirs reproche à la société Cosmic Jump 54 d'avoir, à l'expiration de la clause de non-rétablissement précitée, violé son obligation au titre de la garantie d'éviction, en détournant sa clientèle à son profit par l'usage de moyens frauduleux. Elle rappelle que l'acte de cession de branche porte expressément sur l'enseigne et le nom commercial 'LaserMaxx', la clientèle et l'achalandage y attachés, de sorte qu'elle bénéficie de l'antériorité de l'usage de ces derniers sur le territoire local. La société Cosmic Jump 54 qui se fait appeler 'LaserMaxx' et exerce une activité de jeu de lazer concurrente ne respecte pas son obligation selon elle.

La société Ugoce Loisirs prétend également que la société Cosmic Jump 54 a capté de manière illicite sa clientèle, par une utilisation illicite de son nom et de son logo 'LaserMaxx',

dans ses tracts publicitaires, sur son site internet, ainsi que ceux sur de sa billeterie 'Inter Cea' et 'facebook', dont notamment la ville de [Localité 11], l'équipe du SLUC [Localité 10].

En exécution l'acte établi le 22 juin 2012 avec la société Lasem, la société Ugoce Loisirs, en sa qualité de cessionnaire de branche, ne justifie toutefois d'aucun droit privatif, tant sur le nom même, que sur l'enseigne 'LaserMaxx'. Il est établi en effet que 'LaserMaxx' est la marque et le nom commercial du fabricant de matériel de jeu laser (pistolets, plastrons et logiciels) développés par la société Lasermaxx Lasergames BV, société de droit néerlandais, immatriculée à Utrecht. Cette société est filiale de la société néerlandaise Proton Midden Nederland, titulaire de la marque de l'union européenne Lassermax, déposée le 2 juin 2010 et renouvelée en 2020. Cette marque porte expressément sur les produits et services des classes internationales 9, 28 et 41, et concerne notamment 'les services de divertissements, services de salles de jeux.'

Ainsi, toute société désireuse d'exploiter une activité de jeu de lasers, en utilisant le système et les accessoires 'LaserMaxx' doit conclure un contrat d'achat d'équipements et de licence auprès de la société néerlandaise Lasermaxx Lasergames BV. La société Lazem qui n'était pas propriétaire du nom et de l'enseigne 'LaserMaxx' n'a pu en conséquence les céder avec la fonds de commerce à la société Ugoce Loisirs. L'acte de cession de branche indique que celle-ci a trait uniquement au 'droit au contrat portant sur une licence d'exploitation Lassermax' (article 'Vente-Désignation'). Il est également précisé que le cédant 'exerce parallèlement une activité de vente et de location de matériels de loisirs sous la licence lasermaxx' (Article 'chiffre d'affaires et résultats commerciaux'). A l'article 'autres déclarations', il est spécifiquement mentionné que 'le Cédant déclare qu'il n'existe pas de contrat de licence de marque, de contrat d'approvisionnement exclusif ou non exclusif le liant à un quelconque fournisseur ou prestataire, à l'exception de la licence Lasermaxx'. L'article 'charges et conditions' stipule enfin que 'le Cédant s'engage à signer tous avenants de transfert de contrat et polices existant et notamment de prêter son concours pour que son successeur bénéficie de (...) la licence d'exploitation Lasermaxx'.

En vertu de l'acte de cession de branche d'activité, la société Ugoce Loisirs est en conclusion devenue cessionnaire d'une licence d'utilisation d'une système commercialisé sous le nom et la marque 'LaserMaxx', appartenant à la société néerlandaise Lasermaxx Lasergames BV, sur lequel elle ne peut revendiquer en conséquence aucun droit d'usage exclusif, même sur le plan local, comme elle le prétend. Il est justifié sur ce point par plusieurs constats d'huissier en date des 9 et 10 novembre 2020 que 17 sociétés exploitent en France des salles de jeux de laser sous le nom et l'enseigne 'LaserMaxx'.

L'article L. 131-3 du code de la propriété intellectuelle dispose à cet égard que la transmission des droits de l'auteur est subordonnée à la condition que chacun des droits cédés fasse l'objet d'une mention distincte dans l'acte de cession et que le domaine d'exploitation des droits cédés soit délimité quant à son étendue et à sa destination, quant au lieu et quant à la durée.

La société Ugoce Loisirs ne peut revendiquer davantage un droit exclusif sur le logo 'LaserMaxx', lequel ne lui a pas non plus été cédé par de l'acte de cession de branche d'activité. Il ressort en effet de l'article 'Vente-Désignation', ainsi que de 'la liste du matériel grevant le fonds' de celui-ci que le seul actif incorporel cédé est le site internet 'lasermaxxnancy.fr'. En l'absence des précisons complémentaires exigées par les dispositions susvisées, il doit être considérée que la cession du site internet concerné ne peut porter que sur le programme ou le logiciel organisant la diffusion à l'attention du public des pages, des informations et de publicités, et non sur le contenu de celui-ci, incluant le logo 'LaserMaxx' qui est affiché en entête de ce dernier.

Par ailleurs, la société Lasem verse aux débats une note d'honoraire, établie le 25 février 2009 par M. [Z] [H], artiste indépendant, attestant que le logo 'LaserMaxx' a été dessiné à son initiative personnelle, dans le but de le promouvoir librement et sans aucun droit d'auteur le protégeant. Le constat d'huissier dressé le 10 novembre 2020 prouve en effet que celui-ci est utilisé par d'autres exploitants en France, en y associant généralement le nom de la ville référence ('LaserMaxx' [Localité 13], 'LaserMaxx' [Localité 7], 'LaserMaxx' 74, 'LaserMaxx' [Localité 8] et 'LaserMaxx' [Localité 12]).

La société Ugoce Loisirs 54 ne démontre pas en conclusion que l'usage du commercial, de l'enseigne, et du logo 'LaserMaxx', postérieurement à l'expiration de la clause de non-rétablissement prévue à l'acte de cession de branche en date du 22 juillet 2012, serait de nature à constituer une détournement de clientèle. Il convient en conséquence de confirmer le jugement entrepris, en ce qu'il a débouté l'appelante de toutes ses demandes formées au titre de la garantie légale d'éviction due par le cédant, la société Lasem.

- Sur la concurrence déloyale et le parasitisme :

Aux termes de l'article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

Il résulte de ce texte qu'en raison du principe de la liberté d'exploitation non contrefaisante, corollaire de la liberté de commerce et d'industrie, en l'absence de tout droit privatif, le seul fait de commercialiser des produits identiques à ceux distribués par un concurrent n'est pas fautif et le fait de copier un produit concurrent qui n'est pas protégé par des droits de propriété intellectuelle ne constitue pas en soit un acte de concurrence déloyale.

Il résulte de ce qui précède que la société Ugoce Loisirs ne peut préliminairement se prévaloir d'un droit exclusif de propriété sur l'usage du nom ou de l'enseigne 'LaserMaxx', dont les droits sont détenus par la société néerlandaise Lasermaxx Lasergames BV. Elle ne peut dans ces conditions faire grief à la société Cosmic Jump 54 d'avoir développé, à l'expiration de la clause de non-concurrence à laquelle elle était astreinte, à compter du 7 octobre 2019, une activité parallèle de jeux de lazer, analogue à celle exploitée par l'appelante. Elle n'a également commis aucune faute dans l'usage du concept et la reprise du 'LaserMaxx', sur lesquels elle dispose des mêmes droits, pour avoir conclu en effet un contrat d'achat d'équipements et de licence auprès de ce fournisseur néerlandais, à l'instar des autres exploitants cités dans le constat d'huissier en date du 10 novembre 2020. Le développement par l'intimée de cette activité annexe sous la dénomination 'LaserMaxx' dans le respect de la clause de non-rétablissement qui était limitée dans le temps ne constitue donc pas un acte fautif de concurrence déloyale.

Au titre de sa demande d'indemnisation sur le fondement de la concurrence déloyale, la société Ugoce Loisirs ne rapporte la preuve d'aucun acte fautif imputable à la la société Cosmic Jump 54 qui serait constitutif d'un détournement de clientèle. Elle ne démontre pas en effet que cette dernière aurait usé de moyens déloyaux dans le démarchage de deux de ses clients (Ville de [Localité 11] et SLUC [Localité 10]), étant observé qu'elle est déliée de la clause de non-rétablissement, depuis le 30 juillet 2017, et qu'elle est donc en droit, dans le cadre du jeu de la liberté de concurrence et d'industrie, de nouer des relations commerciales avec ces derniers, quand bien même il s'agirait de clients ayant conclu précédemment avec la société Ugoce Loisirs un partenariat.

Le parasitisme est défini comme l'ensemble des comportements par lesquels un agent économique s'immisce dans le sillage d'un autre afin de tirer profit, sans rien dépenser, de ses efforts et de son savoir-faire ou de profiter indûment ou de la notoriété acquise ou des investissements consentis. Il résulte des dispositions de l'article 1240 du code civil que le parasitisme en matière commerciale suppose la démonstration d'une faute intentionnelle.

Au soutien de son appel, la société Ugoce Loisirs prétend que la société Cosmic Jump 54 entretient volontairement la confusion dans le cadre de l'exploitation des jeux de lazer avec ses propres activités, en utilisant le nom commercial 'LaserMaxx', sur lequel elle revendique l'antériorité de l'usage sur un plan géographique local. Elle fait également grief à celle-ci de reprendre son logo qu'elle reproduit sur ses billets d'entrée et sur ses tracts publicitaire, ainsi que sur son site internet permettant à ses clients de faire des réservations. L'appelante fait valoir également que son concurrent a développé de manière servile ses techniques de vente et de commercialisation, en l'espèce l'organisation de soirées festives ('feux à volonté', 'black out', 'shoot and burger') avec des sociétés de restauration rapide (Domino's Pizza). Elle conclut que la société Cosmic Jump 54 a profité indûment de sa notoriété locale et de son savoir faire pour développer son activité parallèle de jeux de lazer et ainsi de lui faire concurrence par l'usage de procédés déloyaux.

Il résulte de ce qui précède que la société Ugoce Loisirs ne dispose d'aucun droit de propriété sur le nom 'LaserMaxx', s'agissant de la marque du fabricant néerlandais de matériels, dont l'usage est permis par tous les titulaires de celle-ci, et sur laquelle elle n'a pas l'exclusivité. Il est établi certes que l'usage de celle-ci est susceptible de créer un risque de confusion auprès des clients, ce qui est attesté par les témoignages de ces derniers qui sont produits aux débats. Cependant, l'appelante ne démontre aucune faute imputable à la société Cosmic Jump 54 dans son utilisation, dans la mesure où elle est également titulaire de la licence 'LaserMaxx', autorisant son exploitation à des fins commerciales. Elle ne justifie par ailleurs de l'existence d'actes, caractérisant la volonté de l'intimée de créer un risque volontaire de confusion auprès de la clientèle, étant observé que celle-ci a conservé dans ses supports publicitaires les nom de 'Cosmic Jump' et 'Cosmic Park' et de mentionner son adresse pour se distinguer de son concurrent. A la différence de la société Ugoce Loisirs elle exerce par ailleurs une activité de trampoline qui est régulièrement rappelée dans sa communication au public.

Il en va de même du logo 'LaserMaxx' qui a été créé en 2009, soit avant l'acte de cession de branche en date du 22 juillet 2012, par un artiste indépendant, ce dernier étant utilisé librement par tous les exploitants titulaires en France de la licence acquise par la société néerlandaise Lasermaxx Lasergames BV. L'acte de cession de branche ne porte pas sur le logo litigieux et la société Ugoce Loisirs ne peut en conséquence revendiquer le monopole de la jouissance de ce dernier, même sur 'le plan local', comme elle le prétend. Sa seule utilisation par la société Cosmic Jump 54, à des fins promotionnelles, ne caractérise dans ces conditions aucun acte de concurrence déloyale par un détournement fautif de clientèle.

Enfin, la société Ugoce Loisirs ne démontre aucune faute constitutive d'un acte de parasitisme dans l'organisation par son concurrent de soirées festives en partenariat avec des sociétés de restauration rapide, à l'instar de la société Domino's Pizza. Il est constant en effet que la société Lasem a exploité le fonds de commerce de loisirs et de jeux de laser, avant sa cession à la société Ugoce Loisirs, ayant déjà avant celle-ci développé son propre savoir faire dans l'organisation d'événements festifs ou de soirées à thème. La société Ugoce Loisirs ne démontre pas qu'à compter du 30 juillet 2012, date de la cession, elle aurait été la première

à organiser ce type d' événements, notamment avec le concours de sociétés de restauration rapide en vue d'assurer sa promotion et sa notoriété. Elle ne peut dans ces conditions prétendre être détentrice d'un savoir faire dont la société Cosmic Jump 54 aurait indûment

tirée profit. Elle n'établit dans ces conditions la preuve d'aucun acte de parasitisme commis par celle-ci.

Au vu ce de qui précède, il convient de confirmer le jugement du tribunal de commerce de Nancy, en ce qu'il a débouté la société Ugoce Loisirs de toutes ses demandes formées au titre de la concurrence déloyale et du parasitisme en matière commerciale.

- Sur les demandes accessoires :

La société Ugoce Loisirs succombant dans son appel est condamnée aux entiers frais et dépens de première instance et d'appel. Elle est déboutée de ses demande formées devant le tribunal et la cour au titre des frais irrépétibles de procédure.

La société Uguce Loisirs est condamnée à payer à la société Lasem, la société Cosmic Jump 54 et la société Lasem Immobilier, chacune, la somme de 2 500 euros au titre de l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

LA COUR, statuant par arrêt contradictoire prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450 alinéa 2 du Code de procédure civile,

- Confirme le jugement rendu le 18 avril 2024 par le tribunal de commerce de Nancy en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant :

- Déboute la société Ugoce Loisirs de sa demande formée au titre de l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamne la société Ugoce Loisirs aux entiers frais et dépens de l'appel ;

- Condamne la société Uguce Loisirs à payer à la société Lasem, la société Cosmic Jump 54 et la société Lasem Immobilier, chacune, la somme de 2 500 euros au titre de l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Le présent arrêt a été signé par M.Olivier BEAUDIER, Conseiller à la cinquième chambre commerciale , à la Cour d'Appel de NANCY, et par Madame Christelle CLABAUX-DUWIQUET, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

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