Cass. 1re civ., 17 novembre 2010, n° 09-12.352
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
CNCA-Centre extérieur de Coordination (Sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Charruault
Rapporteur :
Mme Pascal
Avocat général :
M. Domingo
Avocats :
Me Foussard, SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Defrenois et Levis, SCP Ortscheidt
Attendu que le Conselho National de Carregadores (ci-après CNC), organisme public angolais chargé de la réglementation du trafic maritime, a conclu le 1er janvier 2000 un contrat de gestion d'un réseau mondial d'agents dans les ports maritimes pour la délivrance de certificats d'embarquement de toute marchandise destinée à l'Angola avec la société CNCA-Centre extérieur de Coordination (ci-après CNCA-CEC) ; qu'un différend étant intervenu à l'occasion de la résiliation de l'accord, M. X... et la société CNCA-CEC ont formé, au vu de la clause compromissoire du contrat, une demande d'arbitrage ; que M. X... et la société CNCA-CEC ont désigné comme arbitre, M. Y..., le CNC, M. Z..., les deux arbitres désignant comme président du tribunal arbitral, M. A... qui a démissionné le 22 octobre 2003 ; que le juge d'appui a, par ordonnance du 24 novembre 2003, nommé M. B... président du tribunal arbitral ; que, par décision du 16 septembre 2005, le tribunal arbitral a pris acte de son dessaisissement par les parties et leur a fait savoir qu'il mettait fin à l'instance ; que M. X... et la société CNCA-CEC ont engagé une action en responsabilité contre les trois arbitres ;
Sur le moyen unique, pris en ses deuxième et cinquième branches ci-après annexé :
Attendu que ces griefs ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Sur le moyen unique, pris en ses première, troisième et quatrième branches :
Attendu que M. X... et la société CNCA-CEC font grief à l'arrêt attaqué (Paris, 6 novembre 2008) d'avoir rejeté leur action en responsabilité des arbitres, alors, selon le moyen :
1°/ qu'en exécution du contrat d'arbitre, l'arbitre est tenu de rendre sa sentence dans un délai raisonnable ; qu'en statuant comme elle l'a fait, après avoir constaté qu'à l'issue des plaidoiries, soit les 6 et 7 juillet 2004, le tribunal arbitral avait fixé un nouveau calendrier avec une date prévisionnelle de sentence « avant fin 2004 », que cette date avait été repoussée le 28 octobre suivant pour être fixée « avant fin février 2005 », malgré l'opposition de M. X... et de la société CNCA-CEC, exprimée par courriers du 13 octobre et 9 décembre 2004, et que le tribunal arbitral avait tenu une nouvelle audience le 24 mars 2005, fixé la « clôture des débats » le 21 avril suivant et mis l'affaire en délibéré pour une sentence prévisible avant le 30 septembre 2005, ce dont il résultait que le délai entre l'audience des plaidoiries et la date prévisible de la sentence n'était pas raisonnable et que les arbitres avaient commis une faute engageant leur responsabilité, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations au regard des articles 1142 et 1147 du code civil ;
2°/ que si les délais de communication des pièces, documents et mémoires doivent être suffisants pour respecter les droits de la défense, la conduite de l'instance arbitrale ne doit pas conduire l'arbitre à prolonger les délais en allant à l'encontre de l'efficacité de la procédure ; qu'en se prononçant comme elle l'a fait, sans rechercher, comme elle y était pourtant expressément invitée, si les arbitres n'avaient pas manqué de diligence en acceptant les nombreux reports de délais sollicités par le CNC pour déposer ses mémoires, malgré l'opposition exprimée par M. X... et la société CNCA-CEC, notamment les 13 octobre et 9 décembre 2004, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 1142 et 1147 du code civil ;
3°/ qu'en écartant la responsabilité des arbitres motifs pris que le calendrier de la procédure avait été précisément réactualisé en fonction des nombreux incidents ayant émaillé la procédure, complexe, comme en témoignent quatre mémoires, seize classeurs cartonnés de pièces, un rapport d'expertise accompagné de seize volumes d'annexes et des consultations de professeurs de droit, et que l'antagonisme entre les parties a perturbé le déroulement de l'instance, sans répondre aux conclusions de M. X... et de la société CNCA-CEC, qui faisaient précisément valoir que, malgré ces éléments, le délai de l'arbitrage ne pouvait être considéré comme raisonnable compte tenu du montant très important des honoraires versées aux arbitres, du travail de synthèse effectué par les parties à l'issue de l'audience de plaidoiries et de ce que les questions juridiques à résoudre étaient particulièrement simples et concernaient l'exécution d'un seul mandat, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu que l'arrêt relève, d'abord, que le tribunal arbitral a rendu une sentence préalable le 26 août 2002 dont le recours en annulation a été rejeté par arrêt du 18 septembre 2003, que le président, M. A..., a démissionné et n'a été remplacé par le juge d'appui que le 24 novembre 2003, date avant laquelle la responsabilité de M. B... ne peut être recherchée, puis, qu'après l'audience du 30 janvier 2004, le CNC ayant sollicité un sursis à statuer en l'état d'une plainte pénale, un nouveau calendrier de procédure a été fixé et un autre à l'issue de l'audience de plaidoiries des 6 et 7 juillet 2004, une sentence étant prévue fin février 2005, ensuite, qu'en décembre 2004, M. X... et la société CNCA-CEC ont sollicité le rejet de la nouvelle demande de délai présentée par le CNC, encore, qu'une nouvelle audience a été tenue en mars 2005, de nouvelles pièces étant réclamées aux parties et l'affaire mise en délibéré au 30 septembre 2005 ; que, de ces faits souverainement constatés, la cour d'appel a pu déduire, sans encourir les griefs du moyen, d'une part que la demande d'une note aux parties le 6 juin 2005 et le refus de démission de M. B... constituaient l'exercice du pouvoir juridictionnel des arbitres susceptible de donner lieu à recours en annulation de la sentence et non de caractériser une faute dans l'exécution du contrat d'arbitre, d'autre part que le calendrier de procédure avait été fixé puis réactualisé en fonction des nombreux incidents ayant émaillé la procédure pour tenir compte de la complexité de la procédure et de l'antagonisme entre les parties et enfin que la suspension du délibéré à partir du 10 juin 2005 ne pouvait être reprochée aux arbitres dont le dessaisissement était demandé, de sorte que l'action en responsabilité des arbitres, qui ne sont tenus que d'une obligation de moyens, ne pouvait être accueillie ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X..., ès qualités, et la société CNCA-CEC aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;