CA Paris, 1re ch. - C, 25 septembre 2008, n° 07/01253
PARIS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
M. S
Défendeur :
PRODIM (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Périé
Conseillers :
M. Matet, M. Hascher
Avoués :
Me Thevenier, Me Pamart
Avocats :
Me Liebgott, Me Leblond
M. Jean Sylvain S. a introduit le 22 janvier 2007 un recours en annulation à l'encontre d'une sentence arbitrale ad hoc rendue le 10 janvier 2007 par M.M. B. et R., arbitres, Bora, président, qui, statuant en amiable composition sur la base de la clause compromissoire du contrat de franchise conclu avec la société Prodim pour l'exploitation d'un fonds de commerce sous l'enseigne 8 à Huit, ont :
- dit qu'il n'y a pas lieu de surseoir à statuer,
- condamné M. Jean Sylvain S. à payer à la société Prodim :
* la somme de 29.109,08 € à titre de dommages-intérêts du chef de la rupture anticipée et fautive du contrat de franchise du 24 juin 2002,
* la somme de 1 € à titre de dommages et intérêts du chef de la violation de la procédure contractuelle prévue au titre du droit de préférence de Prodim, * la somme de 30.000 € à titre de dommages et intérêts du chef de l'atteint au Réseau 8 à Huit,
* la somme de 15.000 euros au titre de l'article 700 du CPC,
- dit que M. Jean Sylvain S. supportera les entiers dépens de l'instance, en ce compris les honoraires d'arbitrage,
- ordonné l'exécution provisoire de la sentence.
M. Jean Sylvain S., au soutien de son recours, soulève quatre moyens d'annulation, l'expiration de la convention d'arbitrage (art. 1484-1° CPC), le non respect de sa mission par le tribunal arbitral (art. 1484-3° CPC) et du principe de la contradiction (art. 1484-4° CPC), la violation d'une règle d'ordre public (art.1484-5° CPC). Il conclut à la condamnation de la société Prodim aux dépens et à lui payer la somme de 20.000 € du code de procédure civile.
La société Prodim demande de rejeter le recours, de condamner M. Jean Sylvain S. à lui payer une somme de 75.000 € à titre de dommages et intérêts pour son comportement abusif, une somme de 50.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et à supporter les dépens.
SUR CE LA COUR :
Sur le premier moyen d'annulation pour expiration de la convention d'arbitrage (article 1484-1° du code de procédure civile) :
M. Jean Sylvain S. expose que l'acte de mission prévoyait une reddition de la sentence pour le 15 décembre 2006 alors qu'elle n'est intervenue que le 10 janvier 2007.
Considérant que M. Jean Sylvain S. qui n'a fait aucune critique de cette décision à l'époque de l'arbitrage, est irrecevable, en raison de la règle de l'estoppel, à soutenir dans son recours en annulation que les arbitres auraient statué sur convention d'arbitrage expirée d'autant que l'article 4 de l'acte de mission prévoyait la possibilité pour le tribunal arbitral, en cas de difficulté, de différer d'un mois la date du prononcé de la sentence ;
Sur le deuxième moyen d'annulation pour non respect par le tribunal arbitral de sa mission (art. 1484 3° du code de procédure civile) :
M. Jean Sylvain S. soutient ici que le tribunal arbitral a failli à sa mission de statuer en amiable composition en s'abstenant de fournir des explications sur les dommages qu'il a pris en considération et, accessoirement, d'évaluer chacun d'eux ainsi qu'en omettant de prendre en considération, au nom de l'équité, la clause d'approvisionnement exclusif parfaitement valable qui liait M. Jean Sylvain S. et la société coopérative Codis dont il est membre.
Considérant que M. Jean Sylvain S. critique le fond de la décision des arbitres, lesquels ont, d'après les indications de la sentence, statué en équité ainsi qu'ils en avaient mission ;
Que le deuxième moyen d'annulation est rejeté ;
Sur le troisième moyen d'annulation pour non respect par le tribunal arbitral du principe de la contradiction (article 1484-4° du code de procédure civile) :
M. Jean Sylvain S. reproche aux arbitres d'avoir violé le principe de la contradiction à un double titre, d'abord du fait des circonstances ayant entraîné la clôture de l'instance dont la date a été reportée afin de permettre à la société Prodim de produire son mémoire en duplique sans lui permettre d'y répondre, ensuite du fait de la contestation du mandat de représentation de M. T., directeur général de la coopérative Codis, qui n'a pas été admis à assister aux débats en tant que représentant du recourant.
Considérant qu'en raison du retard dans la communication des précédentes écritures des parties, le mémoire en duplique de la société Prodim ayant été déposé le 12 octobre 2006, le tribunal arbitral a repoussé au 26 octobre 2006, jour de l'audience, la date de la clôture initialement prévue le 15 octobre et offert aux parties la possibilité de produire des notes en délibéré, ce dont M. Jean Sylvain S. s'est abstenu, que cette décision ne viole pas le principe de la contradiction, d'autant que le mémoire en duplique de la société Prodim ne contenait aucune demande nouvelle ;
Que pareillement, n'est pas une violation du principe de la contradiction, la décision du tribunal arbitral ne pas admettre le directeur général de la coopérative Codis, avec laquelle la société Prodim était par ailleurs en litige, en qualité de représentant de M. Jean Sylvain S., déjà représenté par son conseil et qui a donc pu être entendu ;
Que le troisième moyen d'annulation est rejeté ;
Sur le quatrième moyen d'annulation pour violation d'une règle d'ordre public (article 1484-6° du code de procédure civile) :
M. Jean Sylvain S. dit que le tribunal arbitral a violé le principe de la force obligatoire des conventions, postulé une violation de l'article 1382 du code civil par la société CSF avec laquelle la coopérative Codis était liée ainsi que la société Prodim par des contrats de partenariat et d'approvisionnement et que le tribunal a contrevenu aux règles d'ordre public en matière de réparation intégrale puisqu'on ne sait pas quels sont les dommages qui ont été pris en considération
Considérant que M. Jean Sylvain S. exprime son mécontentement de la condamnation prononcée contre lui par les arbitres et s'en prend à la motivation de la sentence en particulier sur l'absence d'ensemble juridiquement indivisible du contrat de franchise litigieux et de la convention de partenariat conclue entre les sociétés Prodim et Codis sans rapporter la preuve de la violation d'une règle d'ordre public, que le quatrième moyen d'annulation est rejeté avec le recours ;
Sur les dommages et intérêts, les dépens et l'article 700 du code de procédure civile :
Considérant que la société Prodim ne rapportant pas la preuve d'un abus commis par le recourant, sa demande de dommages et intérêts est rejetée ;
Considérant que M. Jean Sylvain S. supporte les dépens et ne peut prétendre à une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile sur le fondement duquel il verse en revanche une indemnité de 50.000 € à la société Prodim ;
PAR CES MOTIFS :
Rejette le recours en annulation,
Condamne M. Jean Sylvain S. à verser à la société Prodim une somme de 50.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,
Rejette toute autre demande ;
Condamne M. Jean Sylvain S. aux dépens et admet Me Pamart, avoué, au bénéfice du droit prévu par l'article 699 du code de procédure civile.