CA Colmar, 19 avril 2021, n° 17/02953
COLMAR
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Argru (SAS)
Défendeur :
Brot Factory (Sté)
Faits, Procédure, Prétentions des Parties:
La SAS ARGRU, créée en 1993, a notamment pour activité la fabrication industrielle et la vente de pâtisseries alsaciennes et allemandes à des grossistes en France et à l’étranger.
La société BROT FACTORY SL, de droit espagnol des Îles Canaries, créée en 2008, est spécialisée dans la fabrication et la commercialisation de produits de boulangerie, viennoiserie et pâtisserie. La société BROT FACTORY est fournisseur de la société MERCADONA, chaîne de supermarchés espagnols, depuis 2011 et lui livre différentes sortes de pains et pâtisseries.
Le 19 Février 2012, un contrat de livraison est conclu entre la société ARGRU et la société BROT FACTORY relatif à la fourniture exclusive de beignets congelés de type Berliner multifruits destinés à la chaîne de supermarchés MERCADONA, pour le marché des Îles Canaries.
Le 21 mars 2012, la société BROT FACTORY a fourni une lettre de crédit stand by, soit une garantie à première demande pour un montant de 50 000 euros au profit de la société ARGRU.
En mai 2012, face au succès des beignets, les sociétés MERCADONA et BROT FACTORY décident de développer une «Action Beignets», une grande campagne de vente de beignets (Vanille, Nutella et Multifruits), chaque fin de semaine de juin à octobre 2012, sur l’ensemble du territoire espagnol. Un planning de livraison est élaboré.
Une nouvelle commande est passée par la société BROT FACTORY auprès de la société ARGRU pour une valeur de 304 361,90 euros. La société ARGRU a livré la marchandise pour le montant de 252 730,67 euros. La société BROT FACTORY a estimé qu’il y avait des problèmes de fourrage et de glaçage des beignets, et n’a pas payé la société ARGRU. Cette dernière a perçu la somme de 50 000 euros au titre de la garantie à première demande. Il reste donc la somme de 202 738,68 euros d’impayée.
Pour le surplus, un montant de 127 631,23 euros, la société BROT FACTORY a refusé la livraison en invoquant un défaut de qualité des beignets.
La société ARGRU a revendu une partie de la commande à hauteur de 20 637,28 euros.Par acte du 14 mai 2013, la société ARGRU a fait assigner la société BROT FACTORY devant le Tribunal de grande instance de Strasbourg à fin d’obtenir, avec exécution provisoire, le paiement de factures impayées.
Par un jugement rendu le 28 avril 2017, la chambre commerciale du Tribunal de grande instance de Strasbourg a condamné la société BROT FACTORY à payer à la société ARGRU la somme de 202 738,68 euros au titre des marchandises vendues et livrées, la somme de 106 993,95 euros à titre de dommages et intérêts, la somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Elle a retenu que le défaut de conformité n’est pas démontré, qu’il n’appartient pas au tribunal d’ordonner une expertise pour suppléer la carence de la société BROT FACTORY, que les conditions de conservations, en Espagne, des cartons de beignets litigieux sont totalement ignorées.
Elle a retenu l’absence de manquement suffisamment grave à l’obligation de délivrance conforme par la société ARGRU, le contrat doit donc être maintenu.
La société BROT FACTORY a interjeté appel par déclaration faite au greffe le 3 juillet 2017.
La société ARGRU s’est constituée intimée le 7 juillet 2017.
Par un arrêt avant dire droit du 02 septembre 2019, la Cour d’appel de COLMAR a ordonné la révocation de l’ordonnance de clôture, et renvoyé l’affaire à l’audience de la mise en état du 22 novembre 2019, à 9 heures, afin que les parties présentent leurs observations sur le moyen susceptible d’être soulevé d’office par la cour et tiré de l’article 82 de la Convention des Nations Unies sur les contrats de vente internationale de marchandises.
Par ses dernières conclusions du 20 février 2020, auxquelles était joint le bordereau de communication de pièces récapitulatif, qui n’a fait l’objet d’aucune contestation, la société BROT
FACTORY demande de constater l’interdépendance de l’opération commerciale «Berliner», de dire et juger que le refus de livraison des beignets par la société MERCADONA estimés invendables par celle-ci et l’annulation de la campagne estivale par cette dernière a entraîné la disparition de la cause du contrat liant les sociétés BROT FACTORY et ARGRU et par voie de conséquence, sa caducité, admettre que la société BROT FACTORY est fondée à soumettre une demande reconventionnelle en dommages et intérêts, condamner la société ARGRU à lui payer la somme de 17 609,37 euros correspondant aux frais de stockage et de destruction des marchandises défectueuses, la somme de 652 420,18 euros en raison du manque à gagner, la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile et les entiers frais et dépens.
Au soutien de ses prétentions, la société BROT FACTORY fait valoir, sur le rejet des demandes financières adverses, sur l’ensemble contractuel interdépendant et la disparition de la cause d’un des contrats, que les relations contractuelles entre les sociétés BROT FACTORY et ARGRU s’inscrivent dans une opération globale avec la société MERCADONA comme destinataire et bénéficiaire exclusif des produits donc de sa satisfaction dépend le bon déroulement de tout le contrat de fourniture.
La société BROT FACTORY affirme aussi que le contrat de fourniture formé entre elle et la société ARGRU peut être qualifié de contrat à exécution échelonnée et l’annulation de la campagne des beignets par la société MERCADONA atteint le fondement même du contrat qui voit alors sa cause disparaître rendant par conséquent son exécution impossible en raison de sa caducité.
La société BROT FACTORY fait valoir que la présente demande n’est pas «nouvelle» au sens des articles 564 et 565 du Code de procédure civile puisqu’elle entend faire valoir une prétention qui tend aux mêmes fins que celles qui avaient été soumises aux premiers juges.
La société BROT FACTORY affirme qu’un contrat existe bien entre elle et la société MERCADONA, que le contrat initial a été conclu et signé le 19 Février 2012 et mentionne le lien contractuel unissant la société BROT FACTORY à la société MERCADONA, que la société ARGRU était au courant du rapport contractuel unissant les deux sociétés ainsi que des conditions de volumes de livraison fixés par la société MERCADONA qui s’imposaient à elle.
Sur le manquement à l’obligation de délivrance conforme, la société BROT FACTORY soutient, que le problème de fourrage des beignets a été signalé par elle plus d’un mois et demi avant le début de la campagne soit le 09 avril 2012, que la société ARGRU a admis elle même que des problèmes de fourrage et de capacité de production existaient, que deux procès verbaux de constat et un rapport ont été effectués par des notaires du 18 au 26 octobre 2012 sur les trois lieux où étaient entreposés les beignets.
La société BROT FACTORY affirme que malgré l’annulation par la société MERCADONA des livraisons effectuées, la société BROT FACTORY a tout fait pour sauver la campagne de beignets et les livraisons qui en découlent pour la société française mais que la société ARGRU est restée intransigeante exigeant le règlement préalable des produits défectueux.
Sur le fondement juridique de la résolution du contrat, la société BROT FACTORY affirme qu’elle est fondée à faire constater le défaut de livraison conforme pour se prévaloir d’un cas de résolution fondée sur l’article 1184 du Code civil et ne pas régler le prix des factures litigieuses.
Sur l’article 82 de la Convention de Vienne, la société BROT FACTORY soutient avoir effectué une déclaration de résolution par mail du 05 juin 2012 avec comme manquement affectant la marchandise, le fait que les beignets n’aient pas été jugés commercialisables par la société MERCADONA unique destinataire des produits, que l’exception énoncée à l’article 82 n’a pas vocation à s’appliquer puisque les beignets ont été détruits postérieurement à la déclaration et qu’elle n’a donc pas perdu son droit de résolution contractuelle.
Par ses dernières conclusions du 23 décembre 2019, auxquelles était joint le bordereau de communication de pièces récapitulatif, qui n’a fait l’objet d’aucune contestation, la SAS ARGRU demande de déclarer les nouvelles prétentions de l’appelante sollicitant la caducité du contrat irrecevables, débouter la société BROT FACTORY de son appel et de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions, de confirmer le jugement en toutes ses dispositions, condamner l’appelante à verser à la société ARGRU la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile et à payer les entiers frais et dépens de l’appel.
Au soutien de ses prétentions, la société ARGRU fait valoir, sur l’interdépendance des contrats, que la demande de caducité sollicitée à hauteur d’appel n’a pas été soumise au juge de première instance auquel il a été soumis une demande de résolution du contrat, que la caducité se distingue d’une demande en résolution pour avoir des effets juridiques distincts, que par conséquent, ces prétentions sont nouvelles et donc irrecevables à hauteur d’appel selon les articles 564 et 565 du Code de procédure civile.
La société ARGRU soutient que le contrat prétendument existant entre la société BROT FACTORY et la société MERCADONA n’est nullement produit dans les pièces de l’appelante, il en résulte que la théorie de l’interdépendance ne saurait recevoir application.
Sur l’absence de preuve de non conformité de l’appelante, la société ARGRU fait valoir qu’elle n’a reçu aucun retour des produits en question ou copie des réclamations des clients finaux, que la stratégie de la société appelante, puisqu’elle refuse de payer ou à moindre frais et renégocie déjà une commande pour l’avenir, est de provoquer une réunion lors de laquelle la société BROT FACTORY tentera d’imposer ses conditions commerciales drastiques, que le taux de fourrage des beignets émane d’un choix de commande de la société BROT FACTORY, que la destruction des marchandises par la société appelante a été faite dans le seul objectif de supprimer toutes les preuves et d’éviter le recours à une expertise judiciaire contradictoire.
La société ARGRU soutient que les constats par notaire ne sont pas des preuves valables car non expertales, non contradictoires, subjectives, non significatives, non probantes et sujettes à caution, notamment, aucune pesée du beignet ou du fourrage n’a été effectuée.
Sur les dispositions de la Convention de Vienne, la société ARGRU fait valoir, qu’elle a rempli son obligation; conformément à l’article 35, en livrant les marchandises, en revanche, l’acheteur doit apporter la preuve de la non conformité de la marchandise livrée, preuve qui n’est nullement apportée, aussi, l’appelante n’a pas véritablement réagi dans les délais de la Convention pour n’avoir adressé aucune réclamation valable à la société ARGRU.
La société ARGRU soutient que la résolution du contrat entraînerait l’obligation pour la société appelante de restituer les marchandises ce qu’elle est dans l’impossibilité de faire pour les avoir volontairement détruites.
La Cour se référera aux dernières conclusions des parties pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 03 décembre 2020.
L’affaire a été appelée et retenue à l’audience du 25 Janvier 2021.
Motifs de la Decision:
La société BROT FACTORY, pour s’opposer à la demande en paiement de la société ARGRU, invoque deux fondements. Elle se prévaut de la caducité du contrat du 19 Février 2012, et à titre subsidiaire, demande à la cour d’en prononcer la résolution, arguant de l’inexécution de
la prestation de l’autre partie. Elle considère en effet, sur le fondement de l’article 35 de la Convention de Vienne, que la société ARGRU n’a pas livré une marchandise conforme.
La société ARGRU s’oppose à ces prétentions, considérant que la caducité n’est pas encourue et qu’elle a, dans tous les cas, livré une marchandise conforme, dont elle demande le versement du prix.
Par ailleurs, il n’est pas discuté que la marchandise en cause a été détruite par l’appelante, après qu’elle a sollicité l’avis de l’intimée. Cette dernière a alors répondu qu’elle considérait la société BROT FACTORY comme la propriétaire des marchandises, et qu’il lui appartenait d’en disposer selon son souhait. Quelle qu’ait été la propriétaire des marchandises au moment de leur destruction, il n’est pas contestable que la société BROT FACTORY a pris la décision de les détruire et l’a mise en œuvre.
Dans ce contexte, la société ARGRU fait pertinemment remarquer que l’éventuel prononcé de la résolution du contrat par la cour se heurterait à une difficulté rédhibitoire, résidant dans l’impossibilité, pour la société BROT FACTORY, de restituer les marchandises. Il est rappelé que la restitution est la conséquence juridique directe de la résolution, qui implique la remise des parties en la situation où elles se trouvaient avant la conclusion du contrat.
La Cour d’appel a demandé aux parties de présenter leurs observations sur l’application des dispositions de l’article 82 de la Convention de Vienne, afin que le principe du contradictoire soit respecté.
L’article 82 de la Convention de Vienne dispose que:
«1) L’acheteur perd le droit de déclarer le contrat résolu ou d’exiger du vendeur la livraison de marchandises de remplacement s’il lui est impossible de restituer les marchandises dans un état sensiblement identique à celui dans lequel il les a reçues.
2) Le paragraphe précédent ne s’applique pas:
a) Si l’impossibilité de restituer les marchandises ou de les restituer dans un état sensiblement identique à celui dans lequel l’acheteur les a reçues n’est pas due à un acte ou à une omission de sa part;
b) Si les marchandises ont péri ou sont détériorées, en totalité ou en partie, en conséquence de l’examen prescrit à l’article 36; ou
c) Si l’acheteur, avant le moment où il a constaté ou aurait dû constater le défaut de conformité, a vendu tout ou partie des marchandises dans le cadre d’une opération commerciale normale ou a consommé ou transformé tout ou partie des marchandises conformément à l’usage normal.»
En l’espèce, c’est bien un acte de l’acheteur qui, conduisant à la destruction des marchandises, l’empêcherait, si la résolution devait être prononcée par la cour, de restituer ces marchandises dans un état sensiblement identique à celui dans lequel il les a reçues.
En application des dispositions de l’article 36 de la convention de Vienne:
«1) Le vendeur est responsable, conformément au contrat et à la présente Convention, de tout défaut de conformité qui existe au moment du transfert des risques à l’acheteur, même si ce défaut n’apparaît qu’ultérieurement.
2) Le vendeur est également responsable de tout défaut de conformité qui survient après le moment indiqué au paragraphe précédent et qui est imputable à l’inexécution de l’une quelconque de ses obligations, y compris à un manquement à une garantie que, pendant une certaine période, les marchandises resteront propres à leur usage normal ou à un usage spécial ou conserveront des qualités ou caractéristiques spécifiées.»
La société BROT FACTORY soutient qu’une partie des beignets qui lui ont été livrés ne satisfait pas aux exigences minimales convenues et indique que ces marchandises ont été volontairement détruites depuis.
Sur la demande tendant à voir déclarer caduc le contrat liant les parties:
La société appelante a demandé à la Cour de considérer qu’il existait une interdépendance entre le contrat intervenu entre les parties à la présente instance et le contrat intervenu entre la société BROT FACTORY et la société MERCADONA, chaîne de magasins en Espagne, dans lesquels étaient vendus les beignets et que le refus de la société MERCADONA de recevoir la livraison des beignets estimés non conformes à la commande entraîne la caducité du contrat passé entre la société BROT FACTORY et la société ARGRU.
La demande en caducité du contrat liant les parties n’a pas été présentée en première instance et la société ARGRU soutient qu’elle est irrecevable car nouvelle à hauteur de Cour.
Cependant, la demande en caducité et la demande en résiliation du contrat tendent aux mêmes fins, c’est à dire au non paiement du solde de la facture dont le règlement est sollicité par la société ARGRU.
Dans ces conditions, la demande en caducité du contrat présentée par la société BROT FACTORY, ne constitue pas une demande nouvelle au sens de l’article 565 du code de procédure civile.
Il convient d’apprécier si les contrats intervenus entre la société BROT FACTORY et la société ARGRU d’une part, et la société BROT FACTORY et la société MERCADONA d’autre part, sont interdépendants.
Les contrats dits «interdépendants» sont des contrats qui s’inscrivent, au moment où ils ont été conclus, dans une opération unique «clé en main»: ils n’ont individuellement de sens et/ou de raison d’être qu’au regard du groupe de contrats, que les parties ont entendu contracter globalement.
La société BROT FACTORY doit démonter que les contrats formaient un tout indivisible.
Il convient cependant de constater qu’elle n’a pas mis dans la cause la société MERCADONA.
La société BROT FACTORY produit aux débats le contrat de livraison exclusive intervenu entre elle et la société ARGRU le 19 Février 2012, au profit de la société MERCADONA.
En revanche, la société appelante n’a produit ni le contrat qui la lierait à la société MERCADONA, et dans ces conditions, il n’est pas possible d’apprécier si un contrat serait intervenu entre la société BROT FACTORY et la société MERCADONA, concomitamment avec celui passé entre la société ARGRU et la société BROT FACTORY, ni une lettre de résiliation de ce contrat qui permettrait d’apprécier le bien fondé de la demande de caducité du contrat liant la société ARGRU à la société BROT FACTORY.
En page 2 de ses dernières conclusions, la société BROT FACTORY indique qu’elle est un fournisseur de la société MERCADONA depuis début 2011 et qu’elle lui livre différentes sortes de pains ainsi que des pâtisseries, ce qui exclut la concomitance des contrats.
La production du planning de la société MERCADONA pour l’organisation de l’opération «Berliners» au cours de laquelle devaient être vendus les beignets dans les grandes surfaces espagnoles, n’établit pas qu’un contrat a été conclu concomitamment avec celui conclu entre la société BROT FACTORY et la société ARGRU.
Par ailleurs, la lecture de l’annexe 27 produite aux débats par la partie appelante et qui est constituée par le protocole de la réunion du 19 Juin 2012, fait apparaître en fin de page la mention suivante:
«ARGRU SAS a toujours su que BROT FACTORY S.L. ne servait que d’intermédiaire avec MERCADONA SA, c’est pourquoi le produit final devait invariablement recevoir l’approbation de ce client».
Dans ces conditions, l’interdépendance des contrats n’est pas établie et la société appelante ne peut soutenir que le contrat la liant à la société ARGRU est caduc.
Sur la demande en résolution du contrat de livraison:
L’annexe 14 de la partie appelante établie que 1536 cartons contenant chacun 12 paquets de quatre beignets ont été détruits le 06 Novembre 2012, par compactage.
La lecture des pièces versées aux débats par la société BROT FACTORY démontre qu’aucun courrier n’a été adressé par la société BROT FACTORY à la société ARGRU pour solliciter la résolution du contrat de livraison du 19 Février 2012, que les échanges de mails portent sur la mauvaise qualité de la décoration des beignets et sur l’absence de fourrage de certains, que dans un mail du 05 Juin 2012 la société BROT FACTORY indique à la société ARGRU «qu’il n’est même pas question de réclamations, ni même de dommages et intérêts de la part de BROT FACTORY», que ce mail ne peut pas s’analyser comme un courrier de résiliation unilatérale, que dans un mail du 31 Juillet 2012, la société BROT FACTORY indique la nécessité d’éliminer les beignets en raison des frais de stockage, et que dans de nombreux échanges il est question de maintenir les relations commerciales dans un cade loyal.
Aucune des pièces versées aux débats par la société appelante ne fait apparaître la volonté de la société BROT FACTORY de mettre un terme au contrat de livraison qui la lie à la société ARGRU.
La demande de résolution du contrat n’a été présentée par la société BROT FACTORY que dans le cadre de la présente procédure, et dès lors qu’elle avait procédé à la destruction des marchandises, les dispositions de l’article 82 de la Convention de Vienne doivent s’appliquer.
La demande de résolution du contrat présentée par la société BROT FACTORY sera rejetée.
Sur la demande en indemnisation du manque à gagner présentée par la société BROT FACTORY:
La société BROT FACTORY a présenté une demande reconventionnelle en indemnisation d’un manque à gagner.
La société BROT FACTORY invoque une non conformité des beignets livrés, sans produire de cahier des charges descriptif des «Berliners» et les modalités de la décongélation.
Au soutien de cette prétention, la société BROT FACTORY produit des constats opérés par des notaires habilités à procéder à ces constatations, mais à la requête de la société BROT FACTORY, et un rapport d’expertise judiciaire qui n’a pas été sollicité devant une juridiction, et dans lequel les conditions dans lesquelles ces constats ont été réalisés sur les beignets surgelés ne sont pas précisées.
Seules sont précisées les modalités de ces contrôles et notamment leur caractère aléatoire et le nombre de paquets de beignets contrôlés.
Dans le constat établi par les notaires, il est indiqué que les constatations ont été effectuées après deux heures de décongélation, alors qu’en pièce 39 de la partie intimée, constituée par la fiche technique, il est précisé qu’il faut «laisser décongeler à température ambiante pendant 30 à 45 minutes».
Ces constats relevaient que la décoration des Berliners ne tenait pas alors que les fiches de contrôle constituées par l’annexe 45 de la partie intimée font apparaître la mention suivante:
«la présentation du produit dans son emballage correcte».
La société BROT FACTORY n’a produit aux débats aucune réclamation de ses clients et dans son mail du 05 Juin 2012, elle indique même qu’il n’est pas question actuellement de réclamation et précise même que le «produit sera unique une fois toutes les erreurs évacuées» et indique «nous faisons d’ores et déjà toutes sortes de choses afin de vendre les Berliner objet des réclamations, le cas échéant nous devons agir sur le prix».
Dans le mail adressé par la société MERCADONA à la société BROT FACTORY, Monsieur X indique que:
«néanmoins je tiens à vous faire savoir que nous sommes toujours intéressés par vos produits qui arborent un goût et une présentation satisfaisants à nos yeux».
La société BROT FACTORY soutient que les beignets fournis par la société ARGRU ne sont pas conformes à la commande, cependant la non conformité de la marchandise n’est pas établie par la société BROT FACTORY.
Dans ces conditions, la société BROT FACTORY ne justifie pas du manque à gagner qu’elle sollicite.
Elle sera en conséquence, déboutée de l’intégralité de ses demandes et la décision entreprise sera confirmée.
Sur le surplus des demandes:
La société BROT FACTORY sera condamnée aux entiers dépens.
L’équité n’appelle pas l’application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au profit de la société BROT FACTORY.
L’équité appelle l’application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au profit de la société ARGRU.
Par ces Motifs
La Cour,
Confirme le jugement rendu le 28 avril 2017, par le Tribunal de Grande de Instance de Strasbourg,
Y Ajoutant,
Condamne la société BROT FACTORY aux entiers dépens,
Rejette la demande de la société BROT FACTORY fondée sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne la société BROT FACTORY à verser à la société ARGRU la somme de 4 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.