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Décisions

CA Fort-de-France, ch. civ., 28 août 2025, n° 24/00436

FORT-DE-FRANCE

Arrêt

Autre

CA Fort-de-France n° 24/00436

28 août 2025

ARRET N°25/228

N° RG 24/00436 - N° Portalis DBWA-V-B7I-CPSY

S.A. BPCE LEASE REUNION

C/

SELARL [V] [U] [A]

S.C.P. [W] [P] ET MARIELLE [T]

COUR D'APPEL DE FORT DE FRANCE

CHAMBRE CIVILE

ARRET DU 28 AOUT 2025

Décision déférée à la cour : ordonnance du juge commissaire de [Localité 10], en date du 12 septembre 2024, enregistrée sous le n° 24/00002

APPELANTE :

S.A. BPCE LEASE REUNION, prise en la personne de sa Directrice Générale en exercice Madame [Z] [I] demeurant es qualité audit siège et en son établissement secondaire de MARTINIQUE situé [Adresse 11].

[Adresse 2]

[Localité 9]

Représentée par Me Myriam WIN BOMPARD, avocat plaidant au barreau de GUADELOUPE, SAINT-MARTIN et SAINT-BARTHELEMY

Me Loän BUVAL, avocat postulant au barreau de MARTINIQUE

INTIMEES :

S.C.P. [W] [P] ET MARIELLE [T], prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège; Jugement du tribunal judiciaire du 10.12.23 arrêtant le plan de sauvegarde pour une durée de 10ans. Commissaire à l'exécution du plan la SELARL [K] ASSOCIES, en la personne de [M] [K], [Adresse 1]

[Adresse 5]

[Adresse 12]

[Localité 7]

Représentée par Me Sébastien HAREL de la SELARL Cornet Vincent Ségurel, avocat plaidant au barreau de RENNES

Me Gladys BEROSE de la SELARL CJM ASSOCIES, avocat postulant au barreau de MARTINIQUE

SELARL [V] [U] [A], prise en la personne de son co gérant Me [U] [A], Mandataire judiciaire demeurant es qualité à l'adresse du siège social [Adresse 6] et en son adresse sur la MARTINIQUE [Adresse 4]

[Adresse 3]

[Localité 8]

Non représentée

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 20 juin 2025, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Nathalie Ramage, présidente de chambre chargée du rapport. Ce magistrat a rendu compte dans le délibéré de la cour, composée de :

Présidente : Madame Nathalie RAMAGE, présidente de chambre

Assesseur : Monsieur Thierry PLUMENAIL, conseiller

Assesseur : Madame Claire DONNIZAUX, conseillère

Greffière lors des débats : Madame Béatrice PIERRE-GABRIEL,

Greffière lors du délibéré : Madame Carole GOMEZ

Les parties ont été avisées, dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, de la date du prononcé de l'arrêt fixée au 28 août 2025.

ARRÊT : réputé contradictoire

Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Exposé du litige :

La S.C.P. [W] [P] et Marielle [T] exploite une activité de commissaire de justice. Pour les besoins de son activité, elle a conclu avec la société BPCE Lease Réunion, le 9 novembre 2022, un contrat de location longue durée n°61718 portant sur un véhicule Ford Mustang, dont le dernier loyer doit être payé le 26 octobre 2026, et un contrat de location longue durée n° 54729 relatif à un véhicule Land Rover.

Par jugement en date du 24 janvier 2023, le tribunal judiciaire de Fort de France a ouvert une procédure de sauvegarde au bénéfice de la SCP précitée.

La SELARL [V] [U] [A], prise en la personne de Me [G] [U] [A], a été désignée en qualité de mandataire judiciaire.

La SELARL [S] [F] et associé prise en la personne de Me [M] [S] [F] a été désignée en qualité d'administrateur judiciaire avec une mission de surveillance de la S.C.P. [W] [P] et Marielle [T] pour tous les actes relatifs à la gestion.

Par jugement en date du 12 décembre 2023, le tribunal judiciaire de Fort de France a homologué le plan de sauvegarde de la S.C.P. [W] [P] et Marielle [T] pour une durée de 10 ans.

La SELARL [S] [F] et associés prise en la personne de Me [M] [S] [F] a été désignée en qualité de commissaire à l'exécution du plan. A cette date, des contestations de créances étaient toujours en cours dont celle élevée à l'encontre de la créance déclarée par la société BPCE Lease Réunion au titre du contrat n°617183.

L'exécution du contrat n° 61718 se poursuivant, par courrier en date du 9 février 2023, la société BPCE Lease a déclaré, entre les mains de Me [U] [A] ès-qualités de mandataire judiciaire, une créance provisoire et chirographaire d'un montant de 97007,37 euros TTC à ce titre, ce montant correspondant à la somme des loyers à courir au titre de ce contrat.

La créance étant contestée, le juge commissaire près le tribunal mixte de commerce de Fort de France, par ordonnance du 03 octobre 2024, a rejeté la créance de la BPCE Lease Réunion.

Par déclaration reçue le 18 octobre 2024, signifiée par actes des 22 et 25 novembre 2024 à la SELARL [V] [U] [A] es qualités et à la SCP [W] [P] et Marielle [T], la BPCE Lease Réunion a interjeté appel de l'ordonnance du « 12 septembre 2024 » à l'encontre de la SELARL [V] [U] [A] es qualités et de la SCP [P] [W] et [T] Marielle.

Le 08 novembre 2024, le greffe de la cour a adressé au conseil de l'appelante un avis de fixation de l'affaire à bref délai.

Aux termes de ses premières et dernières conclusions du 06 novembre 2024, l'appelante demande de :

- constater que la société BPCE Lease Réunion a dûment justifié de ses déclarations de créance au titre du contrat LLD N°67118 en adressant toutes pièces justificatives au mandataire judiciaire dans le cadre de sa déclaration de créance initiale et en répondant à la contestation de créances soulevée ;

- infirmer par suite l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions ;

- prononcer en conséquence suite à la contestation de créance portant l'admission définitive de la créance de la société BPCE Lease Réunion pour un montant actualisé dans le cadre du contrat susvisé LLD 67118 au 29 janvier 2024 de 77 787,89 € au passif chirographaire de la procédure de sauvegarde de la SCP [W] [T];

- dire que les dépens tant de première instance que d'appel seront employés en frais privilégiés de la procédure collective.

Par conclusions du 06 mars 2025, la SCP [W] [T] demande de :

- confirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance du 12 septembre 2024 rendue par le juge-commissaire à la procédure de sauvegarde de la S.C.P. [W] [P] et Marielle [T] ;

Y ajoutant,

- condamner la société BPCE Lease Réunion à payer S.C.P. [W] [P] et Marielle [T] la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société BPCE Lease Réunion aux dépens.

La SELARL [V] [U] [A] n'a pas constitué avocat.

La clôture de l'instruction est intervenue le 19 juin 2025.

L'affaire a été évoquée à l'audience du 20 juin 2025 et la décision a été mise en délibéré au 28 août 2025.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère aux conclusions susvisées et à l'ordonnance déférée.

Motifs :

1/ Sur les chefs de jugement critiqués :

L'intimée affirme que les conclusions d'appelante notifiées le 06 janvier 2025 ne visent pas les chefs de jugement critiqués ; qu'elles ne sont donc pas conformes aux exigences de l'article 954 du code de procédure civile et que, la cour ne devant statuer que sur les prétentions énoncées au dispositif, l'ordonnance doit être confirmée.

La cour relève que :

- dans la déclaration d'appel du 19 octobre 2024, la BPCE Lease Réunion détaille les différents chefs de l'ordonnance critiqués et précise : « l'objet de l'appel tend à l'infirmation de l'ordonnance du juge commissaire attaquée porte sur l'intégralité du dispositif de la décision en ce qu'elle a « rejette la créance de la BPCE Lease Réunion au titre des loyers à échoir du contrat n° 97118. Dit qu'il y a lieu à notification de la présente ordonnance par les soins du greffier conformément aux dispositions de l'article R 621-21 du code de commerce. Dit qu'il y a lieu à application des dispositions de l'article L 624-3 du code de commerce » ;

- dans ses conclusions n° 2, l'appelante sollicite l'infirmation de l'ordonnance en toutes ses dispositions et l'admission définitive de sa créance pour un montant de 55 611,58€.

La cour, nonobstant l'erreur matérielle relative à la date de l'ordonnance attaquée dans la déclaration d'appel, est donc valablement saisie d'une demande d'infirmation de l'ordonnance du 03 octobre 2024 en toutes ses dispositions.

2/ Sur le fond :

Le juge commissaire, au visa des articles L 622-25 alinéa 1er, L 622-24, L 622-17-1 et R 622-22 du code de commerce, a rejeté la créance de la BPCE Lease Réunion en ce que :

- le contrat de crédit-bail 61718 concernant la Ford Mustang était un contrat à exécution successive conclu antérieurement au jugement d'ouverture de la procédure collective, dont l'exécution avait été poursuivie postérieurement au jugement,

- s'agissant d'un contrat de crédit-bail, le fait générateur de la créance était la jouissance du bien objet du contrat,

- la créance de loyers due pour la période de jouissance postérieure à l'ouverture du redressement judiciaire constituait donc une créance née régulièrement après ce jugement, qui n'avait pas à être déclarée au titre des créances antérieures et donc à être comprise dans un plan de sauvegarde ou redressement ;

- la BPCE Lease Réunion ne pouvait en conséquence déclarer une créance à échoir à ce titre, étant observé que les loyers étaient payés et qu'elle ne détenait pas de créance antérieure.

L'appelante soutient qu'il appartient à tous les créanciers dont le fait générateur de créance est antérieur à la procédure collective de déclarer leurs créances hors les salaires et les créances alimentaires conformément aux dispositions de l'article L 622-24 du code de commerce ; qu'elle devait donc déclarer ses créances contractuelles nées de deux contrats LLD n° 61718 du 09 novembre 2022.

L'intimée, qui souligne que l'administrateur judiciaire avait opté pour la poursuite du contrat, impliquant le règlement des loyers à échéance, réplique que, s'agissant d'un contrat à exécution successive, la créance nait au fur et à mesure de l'exécution du contrat ; qu'en conséquence l'appelante n'a pas à déclarer ses créances au titre des loyers à échoir.

Sur ce, la cour retient qu'en cas de poursuite, après l'ouverture d'un redressement judiciaire, d'un crédit-bail conclu antérieurement, la créance relative aux loyers de ce crédit-bail pour la période de jouissance suivant l'ouverture de la procédure collective constitue une créance née régulièrement après le jugement d'ouverture qui n'est pas soumise à l'obligation de déclaration.

L'ordonnance sera donc confirmée.

3/ Sur les dépens et les frais irrépétibles :

Succombant en son recours, l'appelante supportera les dépens d'appel.

Il paraît en outre inéquitable de laisser à l'intimée l'intégralité des frais exposés par elle en cause d'appel et non compris dans les dépens. Une somme de 3 000€ lui sera allouée en application de l''article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La cour, par arrêt réputé contradictoire, en dernier ressort et mis à disposition par le greffe,

Confirme l'ordonnance du juge commissaire près le tribunal mixte de commerce de Fort de France du 03 octobre 2024 ;

Et y ajoutant,

Condamne la SA BPCE Lease Réunion aux dépens d'appel ;

Condamne la SA BPCE Lease Réunion à payer à la SCP [W] [P] et [T] Marielle la somme de 3 000€ (trois mille euros) en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel.

Signé par Mme Nathalie Ramage, présidente de chambre et par Mme Carole GOMEZ, greffière, lors du prononcé à laquelle la minute a été remise.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,

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