CA Nîmes, 2e ch. A, 28 août 2025, n° 24/02384
NÎMES
Arrêt
Autre
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRÊT N°
N° RG 24/02384 - N° Portalis DBVH-V-B7I-JIMX
NA
TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP D'[Localité 14]
01 juillet 2024
RG:22/01339
[I]
[I]
[I]
Société civile LES FINES ROCHES
C/
[J]
[M]
Copie exécutoire délivrée
le
à :
Selarl Lamy Pomiès Richaud
COUR D'APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
2ème chambre section A
ARRÊT DU 28 AOUT 2025
Décision déférée à la cour : Ordonnance du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d'[Localité 14] en date du 01 Juillet 2024, N°22/01339
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Mme Nathalie AZOUARD, Présidente de Chambre,
Madame Virginie HUET, Conseillère,
M. André LIEGEON, Conseiller,
GREFFIER :
Mme Véronique LAURENT-VICAL, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision
DÉBATS :
A l'audience publique du 03 Juin 2025, où l'affaire a été mise en délibéré au 28 Août 2025.
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.
APPELANTS :
M. [R] [I]
né le [Date naissance 3] 1964 à [Localité 15]
[Adresse 18]
[Localité 11]
Représenté par Me Clotilde LAMY de la SELARL CABINET LAMY POMIES-RICHAUD AVOCATS ASSOCIES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES
Représenté par Me Vincent PUECH de la SCP PUECH-BARTHOUIL, Plaidant, avocat au barreau D'AVIGNON
M. [K] [I]
né le [Date naissance 2] 1966 à [Localité 15]
[Adresse 20]
[Adresse 4]
[Localité 13]
Représenté par Me Clotilde LAMY de la SELARL CABINET LAMY POMIES-RICHAUD AVOCATS ASSOCIES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES
Représenté par Me Vincent PUECH de la SCP PUECH-BARTHOUIL, Plaidant, avocat au barreau D'AVIGNON
M. [F] [I]
né le [Date naissance 1] 1972 à [Localité 23]
[Adresse 9]
[Localité 11]
Représenté par Me Clotilde LAMY de la SELARL CABINET LAMY POMIES-RICHAUD AVOCATS ASSOCIES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES
Représenté par Me Vincent PUECH de la SCP PUECH-BARTHOUIL, Plaidant, avocat au barreau D'AVIGNON
Société civile LES FINES ROCHES au capital de 200 Euros immatriculée au RCS d'[Localité 14] sous le numéro 387 491 814 prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié es-qualité au siège social sis
[Adresse 21]
[Adresse 16]
[Localité 12]
Représentée par Me Clotilde LAMY de la SELARL CABINET LAMY POMIES-RICHAUD AVOCATS ASSOCIES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES
Représentée par Me Vincent PUECH de la SCP PUECH-BARTHOUIL, Plaidant, avocat au barreau D'AVIGNON
INTIMÉES :
Mme [W] [J]
née le [Date naissance 5] 1977 à [Localité 17]
[Adresse 19]
[Adresse 10]
[Localité 12]
Représentée par Me Emmanuelle VAJOU de la SELARL LX NIMES, Postulant, avocat au barreau de NIMES
Représentée par Me Sonia GHERZOULI de la SELARL SG AVOCATS, Plaidant, avocat au barreau D'AVIGNON substituée par Me AZORIN
Mme [O] [M]
née le [Date naissance 7] 1975 à [Localité 17]
[Adresse 8]
[Localité 12]
Représentée par Me Emmanuelle VAJOU de la SELARL LX NIMES, Postulant, avocat au barreau de NIMES
Représentée par Me Sonia GHERZOULI de la SELARL SG AVOCATS, Plaidant, avocat au barreau D'AVIGNON substituée par Me AZORIN
Affaire fixée en application des dispositions de l'ancien article 905 du code de procédure civile
ARRÊT :
Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Nathalie AZOUARD, Présidente de Chambre, le 28 Août 2025,par mise à disposition au greffe de la cour
EXPOSE DU LITIGE
Par acte notarié, reçu par Maître [E], notaire à ECULLY (Rhône), en date du 20 décembre 1947, a été institué la SOCIETE CIVILE (SC) DES FINES ROCHES, ayant son siège social [Adresse 22], immatriculée au registre du commerce et des sociétés le 17 septembre 2002, sous le numéro 387 491 814.
Par assemblée générale extraordinaire en date du 6 avril 2001, les associés de la SC DES FINES ROCHES ont décidé de répartir le capital social de la société de la manière suivante':
- M. [I] 52 parts ;
- M. [F] [I] 1 part ;
- M. [R], [I] 12 parts ;
- M. [K] [I] 12 parts ;
- MM [R] et [K] [I] 1 part ;
- Mme [O] [M] 26 parts ;
- Mme [W] [G] 26 parts ;
TOTAL': 130 parts.
M. [T] [I] est décédé le [Date décès 6] 2012 et ses fils, Messieurs [Z] -[C], [F] et [K] [I] se sont revendiqués comme ses seuls héritiers.
Le 24 décembre 2018, Mme [H] [I] épouse [N] a transmis par donation à ses filles, Mesdames [W] [N] épouse [G] et [O] [N] épouse [M] ses 48 parts (24 chacune) de la SC DES FINES ROCHES.
A l'occasion de ces actes, le notaire de la famille [N] a mis à jour les statuts mais sans mentionner le décès de M. [T] [I] alors que les fils de ces derniers se sont revendiqués comme ses seuls héritiers.
Le 11 juin 2019, sur convocation des cogérants Messieurs [R] et [K] [I], l'assemblée générale-extraordinaire de la société DES FINES ROCHES a autorisé la modification de la répartition des associés en faisant apparaitre l'indivision "[R] [I], [K] [I] et [F] [I]' en qualité d'associée aux lieu et place de M. [T] [I] décédé.
En conséquence de cette résolution, la répartition du capital a été modifiée comme telle':
- M. [Z] [L] [I] 12parts ;
- M. [K] [I] 12 parts ;
- Messieurs [R] et-[K] [I] 1 part ;
- Mme [W] [N] [G] 26 parts';
- Mme [O] [M] 26 parts ;
- Messieurs [R], [K] et [F] [I] 52 parts ;
- M. [F] [I] 1 part;
TOTAL : 130 parts.
Reprochant à cette assemblée générale selon le procès-verbal, de n'avoir pas statué sur l'agrément de cette indivision en qualité d'associée et le fait que l'assemblée générale extraordinaire n'a pas non plus été informée de l'acte de dévolution de succession de M. [T] [I] à ses enfants [R], [K] et [F] [I], les consorts [N] [G], considérant qu'il en résultait une violation des articles combinés 10 et 12 des statuts prévoyant l'agrément des ayants droit de l'associé décédé par une assemblée générale (pour la continuation de la société), les dames [N] [G] ont demandé par lettre recommandée avec accusé de réception du 4 mai 2022 auprès du gérant de la SC DES FINES ROCHES la convocation d'une telle assemblée générale extraordinaire a'n de statuer sur l'ordre du jour suivant':
- Annulation des décisions prises par l'assemblée générale extraordinaire du 11 juin 2019,
- Agrément de l'indivision [R], [K] et [F] [I] ensuite du décès de [T] [I]
- Modification du capital social suivant la décision qui sera prise par l'assemblée générale extraordinaire sur la-question de l'agrément,
- Pouvoir pour accomplissement de ces formalités.
Tenue le 11 juillet 2022 l'assemblée générale extraordinaire a constaté, en raison de réserves et «'liens chronologiques de l'ordre du jour'», le rejet de la demande d'annulation de l'assemblée générale extraordinaire 11 juin 2019 et l'impossibilité de voter les résolutions demandées par les dames [N] [G].
Par exploit délivré le 10 juin 2022, selon procédure accélérée au fond introduite devant le tribunal judiciaire d'Avignon, les dames [N] [G] ont demandé principalement à voir constater que les co-gérants [R] et [K] [I] ne s'étaient pas exécutés dans le délai imparti d'un mois (pour annuler les décisions de l'assemblée générale extraordinaire du 11juin 2019, agréer l'indivision des fils [I], et modi'er la répartition du capital social) et ont demandé en conséquence la désignation d'un mandataire à ces mêmes fins.
Par jugement en date du 30 mai 2023, les dames [N] [G] ont été déboutées de leurs demandes, cette décision étant confirmée par arrêt de la cour d'appel de Nîmes en date du 21 décembre 2023.
Par exploit en date du 11 mai 2022, les dames [N] [G] ont fait assigner devant le tribunal judiciaire d'Avignon les deux indivisions '[R] et [K]' et "[R], [K] et [F] [I]" pour voir principalement constater la violation de la procédure d'agrément instituée par la combinaison des articles 10 et 12 des statuts de la SC DES FINES ROCHES et prononcer la nullité des délibérations de l'assemblée générale extraordinaire du 11 juin 2019.
Par conclusions d'incident du 26 janvier 2023, les consorts [I] ont saisi le juge de la mise en état de 'ns de non-recevoir tenant à l'absence d'assignation de la SC DES FINES ROCHES et à la prescription de l'action des demanderesses.
Par exploit délivré le 17 avril 2023, les dames [N] [G] ont alors fait assigner la SC DES FINES ROCHES ainsi appelée en cause.
La jonction de ces deux affaires a été prononcée par ordonnance du 05 septembre 2023.
Par conclusions du 12 mars 2024, les consorts [I], ont pris acte de l'assignation de la SC DES FINES ROCHES, et ont maintenu la 'n de non-recevoir tirée de la prescription, le délai de 3 ans pour agir prévu par l'article 1844-14 du- code civil étant dépassé à la date de l'assignation de la SC DES FINES ROCHES par rapport à la date de la délibération litigieuse.
Par conclusions du 2 mars 2024, les dames [N] [G] ont conclu au débouté des demandeurs à l'incident, arguant de ce que ce n'est pas l'assignation à l'encontre de la SC DES FINES ROCHES mais celle à l'encontre des associés qui constitue le point de départ de la prescription, soit en l'occurrence moins de trois ans après l'assemblée générale extraordinaire critiquée.
Par ordonnance du 1er juillet 2024, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire d'Avignon a statué comme suit':
RECOIT en leur incident Messieurs [R], [K] et [F] [I], la SC DES FINES ROCHES, 'l'indivision [R] et [K] [I]', 'l'indivision [R], [K] et [F] [I]",
- REJETTE Ia fin de non-recevoir,
DIT n'y avoir lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile et rejette en conséquence les demandes de ce chef,
RESERVE les dépens,
RENVOlE la cause et les parties à l'audience de mise en état du 17 septembre 2024 à 9 h 30 pour leurs conclusions au fond.
Sur les fins de non-recevoir tirées d'une part de la prescription de l'action au motif qu'elle a été introduite plus de trois après la date de la délibération de l'assemblée générale, le juge de la mise en état relève que concernant les associés c'est-à-dire les indivisions, [I] il est constant que l'assignation a été régulièrement délivrée dans le délai de trois ans à compter du 11 juin 2019, et il considère ensuite que la présence tardive, mais régularisée par les consorts [J] de la SC DES FINES ROCHES dans l'instance initiale introduite à temps contre les consorts [I], ne saurait avoir d'incidence sur celle-ci et en entrainer l'irrecevabilité pour cause de prescription.
Il ajoute que si l'action des dames [J] pourrait être déclarée prescrite à l'encontre de la SC DES FINES ROCHES, cela est sans conséquence en l'absence de demande à son encontre, et ne peut avoir d'incidence sur l'action exercée contre les consorts [I] les deux instances n'étant pas liée.
Par déclaration du 11 juillet 2024, la SC DES FINES ROCHES, M. [R] [I], [K] [I] et [F] [I] ont relevé appel de cette ordonnance.
L'affaire a été fixée à l'audience du 10 décembre 2024 à 8h45 par application des dispositions de l'article 905 du code de procédure civile, renvoyée à l'audience du 3 juin 2025 et mise en délibéré au'28 août 2025 .
EXPOSE DES MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Dans leurs dernières conclusions remises et notifiées le 2 décembre 2024, auxquelles il est expressément référé, la SC DES FINES ROCHES, M. [R] [I], M. [K] [I] et M. [F] [I] et en tant que de besoin, l'indivision [R] [I], [K] [I] et l'indivision [R] [I], [K] [I] et [F] [I] demandent à la cour de':
Statuant sur l'Appel d'une Ordonnance Juge Mise en Etat du Tribunal Judiciaire d'Avignon du
01/07/2024,
Vu les pièces versées aux débats, et plus particulièrement, le Procès-Verbal de l'AGE de la société civile des FINES ROCHES du 11/06/2019,
Vu les articles 122 et suivants du CPC,
Vu l'article 1844-14 du Code Civil,
Vu les assignations des 11 mai 2022 et 17 avril 2023,
Réformer purement et simplement l'Ordonnance du Juge Mise en Etat du Tribunal Judiciaire d'Avignon du 01/07/2024, en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau,
Déclarer irrecevable l'action de Mesdames [W] [J] et [O] [M] pour défaut d'intérêt à agir à l'encontre des seuls associés,
Déclarer irrecevable pour prescription l'action de Mesdames [W] [J] et [O] [M], à l'encontre de la société civile DES FINES ROCHES ;
et en conséquence, les débouter de toutes leurs demande, moyens, fins et conclusions ;
Les condamner solidairement à payer à Messieurs [R], [K] et [F] [I], et à la société civile DES FINES ROCHES, une somme de 3.000 € à chacun en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Condamner Mesdames [W] [J] et [O] [M] aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Les appelants font valoir essentiellement':
- que les dames [J] et [M] ont lancé deux procédures distinctes, l'une à l'encontre de leurs co-associés par assignation du 11 mai 2022, et l'autre à l'encontre de la SC DES FINES ROCHES et que la jonction ne créant pas une procédure unique, la recevabilité des demandes faites par les demandeuses doit être analysée instance par instance,
- que l'action contre les consorts [I] se heurte à une fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir, dans la mesure où l'action visant à la nullité d'une assemblée générale d'une société civile, cette action doit être faite directement et prioritairement contre la société et non contre les seuls co-associés, ce d'autant que la nullité n'est pas sollicitée pour abus de majorité, la décision en cause ayant été adoptée à l'unanimité,
- que d'ailleurs les dames [N] [G] ont acquiescé à la nécessité impérieuse de mettre en cause la SC DES FINES ROCHES ce qu'elles ont fait par assignation du 17 avril 2023,
- que l'assignation du 17 avril 2023 de la SC DES FINES ROCHES se heurte à une fin de non-recevoir pour prescription car toutes les assemblées générales depuis le décès le [Date décès 6] 2012 de M. [T] [I] ont produit des effets juridiques dont la prescription triennale de l'article 1844-1 du code civil, interdit toute remise en cause,
- que l'action en nullité des délibérations de l'assemblée générale du 11 juin 2019 devait être introduite contre la SC DES FINES ROCHES sous peine d'être non recevable dans le délai de trois ans à compter de la date de l'assemblée critiquée, ce qui n'est pas le cas, la SC DES FINES ROCHES n'ayant été assignée que le 17 avril 2023 et l'assignation du 11 mai 2022 elle-même irrecevable pour défaut d'intérêt à agir ne pouvant avoir interrompu le délai de prescription à l'égard de la société,
- qu'en outre l'action des consorts [N] [G] se heurte à un défaut d'intérêt à agir puisqu'elles demandent la nullité de délibération prises à l'unanimité leurs votes compris, et elles ne peuvent aujourd'hui venir contester la répartition du capital depuis le décès de M. [T] [I] alors qu'elles l'ont confirmée en votant «'Pour'» lors de l'assemblée générale critiquée.
Dans leurs dernières conclusions remises et notifiées le 16 mai 2025, auxquelles il est expressément référé, Mme [W] [J] et Mme [O] [M] intimés, demandent à la cour de':
Vu l'article 31 du Code de procédure civile,
Vu l'article 1844-14 du Code Civil,
Vu les pièces versées aux débats,
Vu les pièces communiquées sous bordereau annexé aux présentes,
Statuant sur l'appel formé par la SC DES FINES ROCHES, Monsieur [F] [I], Monsieur
[K] [I] et Monsieur [R] [I] à l'encontre de l'Ordonnance rendue par le
Juge de la Mise en Etat du Tribunal Judiciaire d'Avignon le 1 er juillet 2024,
Confirmer l'ordonnance en ce qu'elle a rejeté la fin de non-recevoir, renvoyé la cause et les parties à la mise en état pour leurs conclusions au fond.
Déclarant recevable et bien fondé l'appel incident des concluants, infirmer la décision en ce qu'elle a :
DIT n'y avoir lieu de faire application de l'article 700 du CPC et rejeté en conséquence les demandes de ce chef,
Statuer à nouveau :
CONDAMNER la SC DES FINES ROCHES, Monsieur [F] [I], Monsieur [K] [I] et Monsieur [R] [I] à payer à Madame [W] [J] et Madame [O] [M], la somme de 5 000 € chacune au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile, ainsi qu'aux entiers dépens de 1 ère instance et d'appel.
En tout état de cause :
DEBOUTER la SC DES FINES ROCHES, Monsieur [F] [I], Monsieur [K] [I] et Monsieur [R] [I], de leur appel, de toutes leurs demandes, fins et prétentions plus amples ou contraires.
CONDAMNER la SC DES FINES ROCHES, Monsieur [F] [I], Monsieur [K] [I] et Monsieur [R] [I] à payer à Madame [W] [J] et Madame [O] [M], aux entiers d'appel.
Les dames [J] [M] font essentiellement valoir':
- qu'elles ont bien un intérêt à agir à l'encontre des associés de la SC DES FINES ROCHES dans la mesure où leur action a pour objet de contester une décision prise par les associés et l'assignation de la SC DES FINES ROCHES n'était pas une nécessité impérieuse mais une simple démarche additionnelle,
- qu'elle ont introduit leur action en nullité de la délibération du 11 juin 2019 contre les fils de [T] [I] par exploit du 11 mai 2022, soit dans le délai de prescription de trois ans,
- que la qualité d'héritier ne se présume pas, que l'indivision [I] n'a jamais justifiée de sa qualité d'héritière de feu [T] [I] et n'a jamais sollicité l'agrément de l'assemblée générale pour devenir associée, et il n'est pas possible de pouvoir se prévaloir d'un agrément tacite';
- que le fait que les membres de cette indivision qui étaient par ailleurs cogérants de la société aient fait apparaitre dans certaines assemblées générales la présence de cette indivision sans avoir respecté les règles ne peut suffire à faire présumer de la qualité d'héritier et d'associé';
- que la mise en cause a postériori de la société est sans conséquence sur la recevabilité de l'action intentée à l'encontre des associés, la société elle-même ne pouvant qu'être appelée en présence.
MOTIFS
Il sera rappelé tout d'abord que la jonction d'instances, décision d'administration judiciaire ne crée pas une procédure unique de sorte que les actes et diligences faits dans l'une des instances n'ont pas d'effets sur ceux de l'autre instance.
L'annulation d'une assemblée générale d'une société civile (SC) repose sur des bases légales précises, définies par le code civil et la jurisprudence. Le principe fondamental est que toute décision prise lors d'une assemblée générale doit respecter scrupuleusement les dispositions légales et statutaires. En cas de manquement, la validité de l'assemblée peut être remise en question.
Les articles 1844 et suivants du code civil qui encadrent le fonctionnement des sociétés civiles, stipulent notamment que les décisions collectives doivent être prises selon les modalités prévues par les statuts. Tout écart par rapport à ces règles peut constituer un motif d'annulation.
La procédure d'annulation d'une assemblée générale de SC ou de ses délibérations, obéit à des règles strictes, en particulier sur les délais à respecter, ainsi le délai pour agir en annulation d'une assemblée générale ou de l'une de ses délibérations est généralement de trois ans à compter de la date de l'assemblée contestée, conformément à l'article 1844-14 du code civil.
Par ailleurs la procédure d'annulation suppose l'assignation de la société civile personne morale dotée de la personnalité juridique et qui a un intérêt légitime au rejet de la demande d'annulation.
En l'espèce il est constant que les dames [J] [M] poursuivent l'annulation des décisions prises par l'assemblée générale extraordinaire du 11 juin 2019 de la SC DES FINES ROCHES.
Il ressort des pièces de la procédure que par acte en date du 11 mai 2022 soit dans le délai de trois ans à compter de l'assemblée générale critiquée, elles ont assigné devant le tribunal judiciaire d'Avignon M. [R] [I], M. [K] [I] et M. [F] [I], l'indivision [R] [I], [K] [I] et l'indivision [R] [I], [K] [I] et [F] [I] pour voir en particulier prononcer la nullité des délibérations prises par l'assemblée générale du 11 juin 2019 de la SC.
Ce n'est que par acte en date du 17 avril 2023 que les dames [J] [M] ont fait assigner aux mêmes fins devant le tribunal judiciaire d'Avignon la SC DES FINES ROCHES, en l'occurrence après que les consorts [I], aient déposé des conclusions d'incident portant sur des fins de non-recevoir.
L'assignation délivrée contre la SC DES FINES ROCHES ayant été délivrée au-delà du délai de trois ans à compter de l'assemblée générale critiquée, l'action des dames [J] [M] contre la SCI DES FINES ROCHES est irrecevable pour cause de prescription.
Il a été ci-dessus rappelé que la demande d'annulation d'une délibération d'une société civile suppose pour être recevable que la société civile soit assignée ce qui n'est pas le cas en l'espèce puisque la société civile DES FINES ROCHES n'a été assignée que postérieurement au délai de prescription.
Il en résulte que l'action diligentée par les dames [J] [M] à l'encontre des seuls associés par acte du 11 mai 2022 est irrecevable faute de mise en cause de la SC DES FINES ROCHES et que ce défaut d'assignation de la personne morale qu'est la SC DES FINES ROCHES ne peut être valablement régularisé par l'assignation délivrée à la SC DES FINES ROCHES le 17 avril 2023, l'action contre la société civile étant prescrite à cette date.
Par conséquent la cour infirme l'ordonnance rendue le 1er juillet 2024 par le juge de la mise en état du tribunal judicaire d'Avignon en toutes ses dispositions et statuant à nouveau':
Déclare irrecevable l'action diligentée par Mme [W] [J] et Mme [O] [M] à l'encontre de M. [R] [I], M. [K] [I] et M. [F] [I], l'indivision [R] [I], [K] [I] et de l'indivision [R] [I], [K] [I] et [F] [I]';
Déclare irrecevable l'action diligentée par Mme [W] [J] et Mme [O] [M] à l'encontre de la société civile DES FINES ROCHES.
Si l'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code civil s'agissant d'un conflit au sein d'une société civile familiale en revanche Mme [W] [J] et Mme [O] [M] devront supporter les entiers dépens de la procédure de première instance comme de la procédure d'appel.
PAR CES MOTIFS':
La cour statuant par arrêt contradictoire et rendu par mise à disposition au greffe,
Infirme l'ordonnance rendue le 1er juillet 2024 par le juge de la mise en état du tribunal judicaire d'Avignon en toutes ses dispositions,
S'y substituant et y ajoutant,
Déclare irrecevable l'action diligentée par Mme [W] [J] et Mme [O] [M] à l'encontre de M. [R] [I], M. [K] [I] et M. [F] [I], l'indivision [R] [I], [K] [I] et de l'indivision [R] [I], [K] [I] et [F] [I]';
Déclare irrecevable l'action diligentée par Mme [W] [J] et Mme [O] [M] à l'encontre de la société civile DES FINES ROCHES.
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code civil';
Condamne Mme [W] [J] et Mme [O] [M] aux entiers dépens de la procédure de première instance comme de la procédure d'appel.
Arrêt signé par la présidente et par la greffière.
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRÊT N°
N° RG 24/02384 - N° Portalis DBVH-V-B7I-JIMX
NA
TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP D'[Localité 14]
01 juillet 2024
RG:22/01339
[I]
[I]
[I]
Société civile LES FINES ROCHES
C/
[J]
[M]
Copie exécutoire délivrée
le
à :
Selarl Lamy Pomiès Richaud
COUR D'APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
2ème chambre section A
ARRÊT DU 28 AOUT 2025
Décision déférée à la cour : Ordonnance du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d'[Localité 14] en date du 01 Juillet 2024, N°22/01339
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Mme Nathalie AZOUARD, Présidente de Chambre,
Madame Virginie HUET, Conseillère,
M. André LIEGEON, Conseiller,
GREFFIER :
Mme Véronique LAURENT-VICAL, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision
DÉBATS :
A l'audience publique du 03 Juin 2025, où l'affaire a été mise en délibéré au 28 Août 2025.
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.
APPELANTS :
M. [R] [I]
né le [Date naissance 3] 1964 à [Localité 15]
[Adresse 18]
[Localité 11]
Représenté par Me Clotilde LAMY de la SELARL CABINET LAMY POMIES-RICHAUD AVOCATS ASSOCIES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES
Représenté par Me Vincent PUECH de la SCP PUECH-BARTHOUIL, Plaidant, avocat au barreau D'AVIGNON
M. [K] [I]
né le [Date naissance 2] 1966 à [Localité 15]
[Adresse 20]
[Adresse 4]
[Localité 13]
Représenté par Me Clotilde LAMY de la SELARL CABINET LAMY POMIES-RICHAUD AVOCATS ASSOCIES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES
Représenté par Me Vincent PUECH de la SCP PUECH-BARTHOUIL, Plaidant, avocat au barreau D'AVIGNON
M. [F] [I]
né le [Date naissance 1] 1972 à [Localité 23]
[Adresse 9]
[Localité 11]
Représenté par Me Clotilde LAMY de la SELARL CABINET LAMY POMIES-RICHAUD AVOCATS ASSOCIES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES
Représenté par Me Vincent PUECH de la SCP PUECH-BARTHOUIL, Plaidant, avocat au barreau D'AVIGNON
Société civile LES FINES ROCHES au capital de 200 Euros immatriculée au RCS d'[Localité 14] sous le numéro 387 491 814 prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié es-qualité au siège social sis
[Adresse 21]
[Adresse 16]
[Localité 12]
Représentée par Me Clotilde LAMY de la SELARL CABINET LAMY POMIES-RICHAUD AVOCATS ASSOCIES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES
Représentée par Me Vincent PUECH de la SCP PUECH-BARTHOUIL, Plaidant, avocat au barreau D'AVIGNON
INTIMÉES :
Mme [W] [J]
née le [Date naissance 5] 1977 à [Localité 17]
[Adresse 19]
[Adresse 10]
[Localité 12]
Représentée par Me Emmanuelle VAJOU de la SELARL LX NIMES, Postulant, avocat au barreau de NIMES
Représentée par Me Sonia GHERZOULI de la SELARL SG AVOCATS, Plaidant, avocat au barreau D'AVIGNON substituée par Me AZORIN
Mme [O] [M]
née le [Date naissance 7] 1975 à [Localité 17]
[Adresse 8]
[Localité 12]
Représentée par Me Emmanuelle VAJOU de la SELARL LX NIMES, Postulant, avocat au barreau de NIMES
Représentée par Me Sonia GHERZOULI de la SELARL SG AVOCATS, Plaidant, avocat au barreau D'AVIGNON substituée par Me AZORIN
Affaire fixée en application des dispositions de l'ancien article 905 du code de procédure civile
ARRÊT :
Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Nathalie AZOUARD, Présidente de Chambre, le 28 Août 2025,par mise à disposition au greffe de la cour
EXPOSE DU LITIGE
Par acte notarié, reçu par Maître [E], notaire à ECULLY (Rhône), en date du 20 décembre 1947, a été institué la SOCIETE CIVILE (SC) DES FINES ROCHES, ayant son siège social [Adresse 22], immatriculée au registre du commerce et des sociétés le 17 septembre 2002, sous le numéro 387 491 814.
Par assemblée générale extraordinaire en date du 6 avril 2001, les associés de la SC DES FINES ROCHES ont décidé de répartir le capital social de la société de la manière suivante':
- M. [I] 52 parts ;
- M. [F] [I] 1 part ;
- M. [R], [I] 12 parts ;
- M. [K] [I] 12 parts ;
- MM [R] et [K] [I] 1 part ;
- Mme [O] [M] 26 parts ;
- Mme [W] [G] 26 parts ;
TOTAL': 130 parts.
M. [T] [I] est décédé le [Date décès 6] 2012 et ses fils, Messieurs [Z] -[C], [F] et [K] [I] se sont revendiqués comme ses seuls héritiers.
Le 24 décembre 2018, Mme [H] [I] épouse [N] a transmis par donation à ses filles, Mesdames [W] [N] épouse [G] et [O] [N] épouse [M] ses 48 parts (24 chacune) de la SC DES FINES ROCHES.
A l'occasion de ces actes, le notaire de la famille [N] a mis à jour les statuts mais sans mentionner le décès de M. [T] [I] alors que les fils de ces derniers se sont revendiqués comme ses seuls héritiers.
Le 11 juin 2019, sur convocation des cogérants Messieurs [R] et [K] [I], l'assemblée générale-extraordinaire de la société DES FINES ROCHES a autorisé la modification de la répartition des associés en faisant apparaitre l'indivision "[R] [I], [K] [I] et [F] [I]' en qualité d'associée aux lieu et place de M. [T] [I] décédé.
En conséquence de cette résolution, la répartition du capital a été modifiée comme telle':
- M. [Z] [L] [I] 12parts ;
- M. [K] [I] 12 parts ;
- Messieurs [R] et-[K] [I] 1 part ;
- Mme [W] [N] [G] 26 parts';
- Mme [O] [M] 26 parts ;
- Messieurs [R], [K] et [F] [I] 52 parts ;
- M. [F] [I] 1 part;
TOTAL : 130 parts.
Reprochant à cette assemblée générale selon le procès-verbal, de n'avoir pas statué sur l'agrément de cette indivision en qualité d'associée et le fait que l'assemblée générale extraordinaire n'a pas non plus été informée de l'acte de dévolution de succession de M. [T] [I] à ses enfants [R], [K] et [F] [I], les consorts [N] [G], considérant qu'il en résultait une violation des articles combinés 10 et 12 des statuts prévoyant l'agrément des ayants droit de l'associé décédé par une assemblée générale (pour la continuation de la société), les dames [N] [G] ont demandé par lettre recommandée avec accusé de réception du 4 mai 2022 auprès du gérant de la SC DES FINES ROCHES la convocation d'une telle assemblée générale extraordinaire a'n de statuer sur l'ordre du jour suivant':
- Annulation des décisions prises par l'assemblée générale extraordinaire du 11 juin 2019,
- Agrément de l'indivision [R], [K] et [F] [I] ensuite du décès de [T] [I]
- Modification du capital social suivant la décision qui sera prise par l'assemblée générale extraordinaire sur la-question de l'agrément,
- Pouvoir pour accomplissement de ces formalités.
Tenue le 11 juillet 2022 l'assemblée générale extraordinaire a constaté, en raison de réserves et «'liens chronologiques de l'ordre du jour'», le rejet de la demande d'annulation de l'assemblée générale extraordinaire 11 juin 2019 et l'impossibilité de voter les résolutions demandées par les dames [N] [G].
Par exploit délivré le 10 juin 2022, selon procédure accélérée au fond introduite devant le tribunal judiciaire d'Avignon, les dames [N] [G] ont demandé principalement à voir constater que les co-gérants [R] et [K] [I] ne s'étaient pas exécutés dans le délai imparti d'un mois (pour annuler les décisions de l'assemblée générale extraordinaire du 11juin 2019, agréer l'indivision des fils [I], et modi'er la répartition du capital social) et ont demandé en conséquence la désignation d'un mandataire à ces mêmes fins.
Par jugement en date du 30 mai 2023, les dames [N] [G] ont été déboutées de leurs demandes, cette décision étant confirmée par arrêt de la cour d'appel de Nîmes en date du 21 décembre 2023.
Par exploit en date du 11 mai 2022, les dames [N] [G] ont fait assigner devant le tribunal judiciaire d'Avignon les deux indivisions '[R] et [K]' et "[R], [K] et [F] [I]" pour voir principalement constater la violation de la procédure d'agrément instituée par la combinaison des articles 10 et 12 des statuts de la SC DES FINES ROCHES et prononcer la nullité des délibérations de l'assemblée générale extraordinaire du 11 juin 2019.
Par conclusions d'incident du 26 janvier 2023, les consorts [I] ont saisi le juge de la mise en état de 'ns de non-recevoir tenant à l'absence d'assignation de la SC DES FINES ROCHES et à la prescription de l'action des demanderesses.
Par exploit délivré le 17 avril 2023, les dames [N] [G] ont alors fait assigner la SC DES FINES ROCHES ainsi appelée en cause.
La jonction de ces deux affaires a été prononcée par ordonnance du 05 septembre 2023.
Par conclusions du 12 mars 2024, les consorts [I], ont pris acte de l'assignation de la SC DES FINES ROCHES, et ont maintenu la 'n de non-recevoir tirée de la prescription, le délai de 3 ans pour agir prévu par l'article 1844-14 du- code civil étant dépassé à la date de l'assignation de la SC DES FINES ROCHES par rapport à la date de la délibération litigieuse.
Par conclusions du 2 mars 2024, les dames [N] [G] ont conclu au débouté des demandeurs à l'incident, arguant de ce que ce n'est pas l'assignation à l'encontre de la SC DES FINES ROCHES mais celle à l'encontre des associés qui constitue le point de départ de la prescription, soit en l'occurrence moins de trois ans après l'assemblée générale extraordinaire critiquée.
Par ordonnance du 1er juillet 2024, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire d'Avignon a statué comme suit':
RECOIT en leur incident Messieurs [R], [K] et [F] [I], la SC DES FINES ROCHES, 'l'indivision [R] et [K] [I]', 'l'indivision [R], [K] et [F] [I]",
- REJETTE Ia fin de non-recevoir,
DIT n'y avoir lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile et rejette en conséquence les demandes de ce chef,
RESERVE les dépens,
RENVOlE la cause et les parties à l'audience de mise en état du 17 septembre 2024 à 9 h 30 pour leurs conclusions au fond.
Sur les fins de non-recevoir tirées d'une part de la prescription de l'action au motif qu'elle a été introduite plus de trois après la date de la délibération de l'assemblée générale, le juge de la mise en état relève que concernant les associés c'est-à-dire les indivisions, [I] il est constant que l'assignation a été régulièrement délivrée dans le délai de trois ans à compter du 11 juin 2019, et il considère ensuite que la présence tardive, mais régularisée par les consorts [J] de la SC DES FINES ROCHES dans l'instance initiale introduite à temps contre les consorts [I], ne saurait avoir d'incidence sur celle-ci et en entrainer l'irrecevabilité pour cause de prescription.
Il ajoute que si l'action des dames [J] pourrait être déclarée prescrite à l'encontre de la SC DES FINES ROCHES, cela est sans conséquence en l'absence de demande à son encontre, et ne peut avoir d'incidence sur l'action exercée contre les consorts [I] les deux instances n'étant pas liée.
Par déclaration du 11 juillet 2024, la SC DES FINES ROCHES, M. [R] [I], [K] [I] et [F] [I] ont relevé appel de cette ordonnance.
L'affaire a été fixée à l'audience du 10 décembre 2024 à 8h45 par application des dispositions de l'article 905 du code de procédure civile, renvoyée à l'audience du 3 juin 2025 et mise en délibéré au'28 août 2025 .
EXPOSE DES MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Dans leurs dernières conclusions remises et notifiées le 2 décembre 2024, auxquelles il est expressément référé, la SC DES FINES ROCHES, M. [R] [I], M. [K] [I] et M. [F] [I] et en tant que de besoin, l'indivision [R] [I], [K] [I] et l'indivision [R] [I], [K] [I] et [F] [I] demandent à la cour de':
Statuant sur l'Appel d'une Ordonnance Juge Mise en Etat du Tribunal Judiciaire d'Avignon du
01/07/2024,
Vu les pièces versées aux débats, et plus particulièrement, le Procès-Verbal de l'AGE de la société civile des FINES ROCHES du 11/06/2019,
Vu les articles 122 et suivants du CPC,
Vu l'article 1844-14 du Code Civil,
Vu les assignations des 11 mai 2022 et 17 avril 2023,
Réformer purement et simplement l'Ordonnance du Juge Mise en Etat du Tribunal Judiciaire d'Avignon du 01/07/2024, en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau,
Déclarer irrecevable l'action de Mesdames [W] [J] et [O] [M] pour défaut d'intérêt à agir à l'encontre des seuls associés,
Déclarer irrecevable pour prescription l'action de Mesdames [W] [J] et [O] [M], à l'encontre de la société civile DES FINES ROCHES ;
et en conséquence, les débouter de toutes leurs demande, moyens, fins et conclusions ;
Les condamner solidairement à payer à Messieurs [R], [K] et [F] [I], et à la société civile DES FINES ROCHES, une somme de 3.000 € à chacun en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Condamner Mesdames [W] [J] et [O] [M] aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Les appelants font valoir essentiellement':
- que les dames [J] et [M] ont lancé deux procédures distinctes, l'une à l'encontre de leurs co-associés par assignation du 11 mai 2022, et l'autre à l'encontre de la SC DES FINES ROCHES et que la jonction ne créant pas une procédure unique, la recevabilité des demandes faites par les demandeuses doit être analysée instance par instance,
- que l'action contre les consorts [I] se heurte à une fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir, dans la mesure où l'action visant à la nullité d'une assemblée générale d'une société civile, cette action doit être faite directement et prioritairement contre la société et non contre les seuls co-associés, ce d'autant que la nullité n'est pas sollicitée pour abus de majorité, la décision en cause ayant été adoptée à l'unanimité,
- que d'ailleurs les dames [N] [G] ont acquiescé à la nécessité impérieuse de mettre en cause la SC DES FINES ROCHES ce qu'elles ont fait par assignation du 17 avril 2023,
- que l'assignation du 17 avril 2023 de la SC DES FINES ROCHES se heurte à une fin de non-recevoir pour prescription car toutes les assemblées générales depuis le décès le [Date décès 6] 2012 de M. [T] [I] ont produit des effets juridiques dont la prescription triennale de l'article 1844-1 du code civil, interdit toute remise en cause,
- que l'action en nullité des délibérations de l'assemblée générale du 11 juin 2019 devait être introduite contre la SC DES FINES ROCHES sous peine d'être non recevable dans le délai de trois ans à compter de la date de l'assemblée critiquée, ce qui n'est pas le cas, la SC DES FINES ROCHES n'ayant été assignée que le 17 avril 2023 et l'assignation du 11 mai 2022 elle-même irrecevable pour défaut d'intérêt à agir ne pouvant avoir interrompu le délai de prescription à l'égard de la société,
- qu'en outre l'action des consorts [N] [G] se heurte à un défaut d'intérêt à agir puisqu'elles demandent la nullité de délibération prises à l'unanimité leurs votes compris, et elles ne peuvent aujourd'hui venir contester la répartition du capital depuis le décès de M. [T] [I] alors qu'elles l'ont confirmée en votant «'Pour'» lors de l'assemblée générale critiquée.
Dans leurs dernières conclusions remises et notifiées le 16 mai 2025, auxquelles il est expressément référé, Mme [W] [J] et Mme [O] [M] intimés, demandent à la cour de':
Vu l'article 31 du Code de procédure civile,
Vu l'article 1844-14 du Code Civil,
Vu les pièces versées aux débats,
Vu les pièces communiquées sous bordereau annexé aux présentes,
Statuant sur l'appel formé par la SC DES FINES ROCHES, Monsieur [F] [I], Monsieur
[K] [I] et Monsieur [R] [I] à l'encontre de l'Ordonnance rendue par le
Juge de la Mise en Etat du Tribunal Judiciaire d'Avignon le 1 er juillet 2024,
Confirmer l'ordonnance en ce qu'elle a rejeté la fin de non-recevoir, renvoyé la cause et les parties à la mise en état pour leurs conclusions au fond.
Déclarant recevable et bien fondé l'appel incident des concluants, infirmer la décision en ce qu'elle a :
DIT n'y avoir lieu de faire application de l'article 700 du CPC et rejeté en conséquence les demandes de ce chef,
Statuer à nouveau :
CONDAMNER la SC DES FINES ROCHES, Monsieur [F] [I], Monsieur [K] [I] et Monsieur [R] [I] à payer à Madame [W] [J] et Madame [O] [M], la somme de 5 000 € chacune au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile, ainsi qu'aux entiers dépens de 1 ère instance et d'appel.
En tout état de cause :
DEBOUTER la SC DES FINES ROCHES, Monsieur [F] [I], Monsieur [K] [I] et Monsieur [R] [I], de leur appel, de toutes leurs demandes, fins et prétentions plus amples ou contraires.
CONDAMNER la SC DES FINES ROCHES, Monsieur [F] [I], Monsieur [K] [I] et Monsieur [R] [I] à payer à Madame [W] [J] et Madame [O] [M], aux entiers d'appel.
Les dames [J] [M] font essentiellement valoir':
- qu'elles ont bien un intérêt à agir à l'encontre des associés de la SC DES FINES ROCHES dans la mesure où leur action a pour objet de contester une décision prise par les associés et l'assignation de la SC DES FINES ROCHES n'était pas une nécessité impérieuse mais une simple démarche additionnelle,
- qu'elle ont introduit leur action en nullité de la délibération du 11 juin 2019 contre les fils de [T] [I] par exploit du 11 mai 2022, soit dans le délai de prescription de trois ans,
- que la qualité d'héritier ne se présume pas, que l'indivision [I] n'a jamais justifiée de sa qualité d'héritière de feu [T] [I] et n'a jamais sollicité l'agrément de l'assemblée générale pour devenir associée, et il n'est pas possible de pouvoir se prévaloir d'un agrément tacite';
- que le fait que les membres de cette indivision qui étaient par ailleurs cogérants de la société aient fait apparaitre dans certaines assemblées générales la présence de cette indivision sans avoir respecté les règles ne peut suffire à faire présumer de la qualité d'héritier et d'associé';
- que la mise en cause a postériori de la société est sans conséquence sur la recevabilité de l'action intentée à l'encontre des associés, la société elle-même ne pouvant qu'être appelée en présence.
MOTIFS
Il sera rappelé tout d'abord que la jonction d'instances, décision d'administration judiciaire ne crée pas une procédure unique de sorte que les actes et diligences faits dans l'une des instances n'ont pas d'effets sur ceux de l'autre instance.
L'annulation d'une assemblée générale d'une société civile (SC) repose sur des bases légales précises, définies par le code civil et la jurisprudence. Le principe fondamental est que toute décision prise lors d'une assemblée générale doit respecter scrupuleusement les dispositions légales et statutaires. En cas de manquement, la validité de l'assemblée peut être remise en question.
Les articles 1844 et suivants du code civil qui encadrent le fonctionnement des sociétés civiles, stipulent notamment que les décisions collectives doivent être prises selon les modalités prévues par les statuts. Tout écart par rapport à ces règles peut constituer un motif d'annulation.
La procédure d'annulation d'une assemblée générale de SC ou de ses délibérations, obéit à des règles strictes, en particulier sur les délais à respecter, ainsi le délai pour agir en annulation d'une assemblée générale ou de l'une de ses délibérations est généralement de trois ans à compter de la date de l'assemblée contestée, conformément à l'article 1844-14 du code civil.
Par ailleurs la procédure d'annulation suppose l'assignation de la société civile personne morale dotée de la personnalité juridique et qui a un intérêt légitime au rejet de la demande d'annulation.
En l'espèce il est constant que les dames [J] [M] poursuivent l'annulation des décisions prises par l'assemblée générale extraordinaire du 11 juin 2019 de la SC DES FINES ROCHES.
Il ressort des pièces de la procédure que par acte en date du 11 mai 2022 soit dans le délai de trois ans à compter de l'assemblée générale critiquée, elles ont assigné devant le tribunal judiciaire d'Avignon M. [R] [I], M. [K] [I] et M. [F] [I], l'indivision [R] [I], [K] [I] et l'indivision [R] [I], [K] [I] et [F] [I] pour voir en particulier prononcer la nullité des délibérations prises par l'assemblée générale du 11 juin 2019 de la SC.
Ce n'est que par acte en date du 17 avril 2023 que les dames [J] [M] ont fait assigner aux mêmes fins devant le tribunal judiciaire d'Avignon la SC DES FINES ROCHES, en l'occurrence après que les consorts [I], aient déposé des conclusions d'incident portant sur des fins de non-recevoir.
L'assignation délivrée contre la SC DES FINES ROCHES ayant été délivrée au-delà du délai de trois ans à compter de l'assemblée générale critiquée, l'action des dames [J] [M] contre la SCI DES FINES ROCHES est irrecevable pour cause de prescription.
Il a été ci-dessus rappelé que la demande d'annulation d'une délibération d'une société civile suppose pour être recevable que la société civile soit assignée ce qui n'est pas le cas en l'espèce puisque la société civile DES FINES ROCHES n'a été assignée que postérieurement au délai de prescription.
Il en résulte que l'action diligentée par les dames [J] [M] à l'encontre des seuls associés par acte du 11 mai 2022 est irrecevable faute de mise en cause de la SC DES FINES ROCHES et que ce défaut d'assignation de la personne morale qu'est la SC DES FINES ROCHES ne peut être valablement régularisé par l'assignation délivrée à la SC DES FINES ROCHES le 17 avril 2023, l'action contre la société civile étant prescrite à cette date.
Par conséquent la cour infirme l'ordonnance rendue le 1er juillet 2024 par le juge de la mise en état du tribunal judicaire d'Avignon en toutes ses dispositions et statuant à nouveau':
Déclare irrecevable l'action diligentée par Mme [W] [J] et Mme [O] [M] à l'encontre de M. [R] [I], M. [K] [I] et M. [F] [I], l'indivision [R] [I], [K] [I] et de l'indivision [R] [I], [K] [I] et [F] [I]';
Déclare irrecevable l'action diligentée par Mme [W] [J] et Mme [O] [M] à l'encontre de la société civile DES FINES ROCHES.
Si l'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code civil s'agissant d'un conflit au sein d'une société civile familiale en revanche Mme [W] [J] et Mme [O] [M] devront supporter les entiers dépens de la procédure de première instance comme de la procédure d'appel.
PAR CES MOTIFS':
La cour statuant par arrêt contradictoire et rendu par mise à disposition au greffe,
Infirme l'ordonnance rendue le 1er juillet 2024 par le juge de la mise en état du tribunal judicaire d'Avignon en toutes ses dispositions,
S'y substituant et y ajoutant,
Déclare irrecevable l'action diligentée par Mme [W] [J] et Mme [O] [M] à l'encontre de M. [R] [I], M. [K] [I] et M. [F] [I], l'indivision [R] [I], [K] [I] et de l'indivision [R] [I], [K] [I] et [F] [I]';
Déclare irrecevable l'action diligentée par Mme [W] [J] et Mme [O] [M] à l'encontre de la société civile DES FINES ROCHES.
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code civil';
Condamne Mme [W] [J] et Mme [O] [M] aux entiers dépens de la procédure de première instance comme de la procédure d'appel.
Arrêt signé par la présidente et par la greffière.
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,