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Décisions

CA Nîmes, 2e ch. A, 28 août 2025, n° 23/01135

NÎMES

Arrêt

Autre

CA Nîmes n° 23/01135

28 août 2025

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 23/01135 - N° Portalis DBVH-V-B7H-IYSO

AL

TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE NIMES

07 mars 2023 RG :21/03653

[P]

C/

Syndic. de copro. [7]

Copie exécutoire délivrée

le

à : SCP Lobier

Selarl Delran Sergent

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section A

ARRÊT DU 28 AOUT 2025

Décision déférée à la cour : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de Nîmes en date du 07 Mars 2023, N°21/03653

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Mme Nathalie AZOUARD, Présidente de Chambre, et M. André LIEGEON, Conseiller, ont entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats et en ont rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Nathalie AZOUARD, Présidente de Chambre

Virginie HUET, Conseillère

André LIEGEON, Conseiller

GREFFIER :

Mme Véronique LAURENT-VICAL, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

A l'audience publique du 13 Mai 2025, où l'affaire a été mise en délibéré au 28 Août 2025.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

APPELANT :

M. [R] [P]

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représenté par Me Raphaël LEZER de la SCP LOBIER & ASSOCIES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES

INTIMÉE :

SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES [7] représenté par son Syndic en exercice TISSOT IMMOBILIER, dont le siège social est sis [Adresse 6] à [Localité 4], agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice domicilié es qualité audit siège social

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Sylvie SERGENT de la SELARL DELRAN BARGETON DYENS SERGENT ALCALDE, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 24 Avril 2025

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Nathalie AZOUARD, Présidente de Chambre, le 28 Août 2025, par mise à disposition au greffe de la cour

EXPOSE DU LITIGE

Courant 2017, la copropriété [7], située [Adresse 1] et [Adresse 3] à [Localité 4], a contacté M. [R] [P], architecte, en vue d'entreprendre la réalisation des plans et relevés, dans une base de données numériques, des parties et installations communes et privatives de la copropriété.

M. [R] [P] a proposé un devis en date du 23 janvier 2017 d'un montant de 5.984 EUR TTC portant sur une mission complète devant être réalisée en deux phases : relevé de l'intérieur et de l'extérieur avec dessin du relevé, transcription en 3 D et labellisation BIM, les relevés devant être effectués au niveau des caves, du rez-de-chaussée, des niveaux 1 à 8 et des toits-terrasses.

Le délai de réalisation a été fixé à huit semaines.

Lors de l'assemblée générale de la copropriété du 14 mars 2017, ce devis a été approuvé.

Celui-ci a été signé par le syndic en exercice le 4 mai 2017.

Un nouveau devis complémentaire en date du 15 février 2018 d'un montant de 4.114 EUR TTC a été adressé à la copropriété.

Ce devis a été soumis aux copropriétaires qui l'ont refusé, lors d'une assemblée générale. Il a toutefois été signé le 15 octobre 2018 par M. [O] [T], syndic bénévole.

Deux nouveaux devis ont été adressés à la copropriété les 15 février 2019 et 29 avril 2019.

La copropriété s'est acquittée d'une somme totale de 10.976 EUR, refusant de s'acquitter de la dernière facture de M. [R] [P].

Considérant que ce dernier n'avait jamais été en mesure de lui justifier de son travail et n'avait pas terminé sa mission, le syndicat des copropriétaires lui a adressé, en date du 9 mars 2021 et par l'intermédiaire de son conseil, une mise en demeure de lui transmettre le fruit de son travail et de lui restituer la somme de 4.992 EUR (soit 10.976 EUR ' 5.984 EUR) correspondant aux sommes complémentaires versées sans l'autorisation des copropriétaires.

Cette mise en demeure a été suivie d'autres mises en demeure dont une dernière en date du 21 juillet 2021 qui est restée sans effet.

Par acte du 3 septembre 2021, le syndicat des copropriétaires de la copropriété [7] a assigné M. [R] [P] devant le tribunal de grande instance de NÎMES en vue d'obtenir la résiliation du contrat aux torts de ce dernier pour faute grave ainsi que sa condamnation au paiement des sommes de 10.976 EUR perçue indûment au titre d'une prestation jamais réalisée, 5.000 EUR à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive et 4.000 EUR sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre aux entiers dépens.

Par jugement du 7 mars 2023, le tribunal judiciaire de NÎMES a :

dit que M. [R] [P] a manqué gravement à ses obligations contractuelles nées du contrat conclu le 4 mai 2017 entre les parties sur la base du devis du 23 janvier 2017 accepté par l'assemblée générale de la copropriété [7] le 14 mars 2017,

prononcé la résolution du contrat conclu le 4 mai 2017 entre les parties sur la base du devis du 23 janvier 2017 accepté par l'assemblée générale de la copropriété [7] le 14 mars 2017,

constaté que le devis PRREL338/JFD du 15 février 2018 établi par M. [R] [P] pour un montant de 4.114 EUR n'a pas été accepté par l'assemblée générale de la copropriété [7],

dit que la signature du devis PRREL338/JFD du 15 février 2018 par le syndic de la copropriété [7] n'est pas valable,

dit que la signature du devis PRREL338/JFD du 15 février 2018 par le syndic de la copropriété [7] n'a pas pour conséquence d'engager contractuellement la copropriété [7] à l'égard de M. [R] [P],

Par conséquent,

condamné M. [R] [P] à payer au syndicat des copropriétaires de la copropriété [7] représenté par son syndic TISSOT IMMOBILIER la somme de 10.976 EUR représentant le montant total des sommes indûment encaissées,

débouté les parties de leurs demandes plus amples,

condamné M. [R] [P] au paiement des entiers dépens,

condamné M. [R] [P] à payer au syndicat des copropriétaires de la copropriété [7] la somme de 1.500 EUR au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration au greffe du 31 mars 2023, M. [R] [P] a interjeté appel de ce jugement.

Aux termes des dernières conclusions de M. [R] [P] notifiées par RPVA le 30 juin 2023, il est demandé à la cour de :

vu les articles L. 216-1 et suivants du code de la consommation,

vu l'article 1224 du code civil,

vu l'article 1998 du code civil,

vu l'article 1111-1 du code civil,

infirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris,

Statuant à nouveau,

débouter le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [7] de toutes ses demandes, fins et conclusions,

Accueillant la demande reconventionnelle de M. [R] [P],

condamner le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [7] à payer à M. [R] [P] la somme de 4.299,30 EUR,

condamner le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [7] à payer à M. [R] [P] la somme de 2.500 EUR en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

En substance, M. [R] [P] soutient :

que le devis du 23 janvier 2017 n°335C a été signé et accepté par le syndic de copropriété ; que ce devis portait sur la réalisation d'une maquette en trois dimensions de l'ensemble de l'immeuble, selon la méthodologie envisagée permettant la réalisation des relevés 3D plus rapidement que par la procédure traditionnelle ;

que le devis dont s'agit précise qu'en cas de dépassement du temps estimé, les prestations supplémentaires seront facturées ;

qu'alors que le devis avait été validé mais que le travail de relevé n'avait pas encore été entrepris, le syndic de l'époque a estimé devoir compléter les prestations confiées en rappelant au conseil syndical l'utilité d'un relevé relatif au calcul des surfaces des appartements servant au géomètre pour les tableaux de répartition des charges, de sorte que son travail a sensiblement évolué entre l'acceptation du devis et le début des travaux et que le planning initialement fixé n'était plus d'actualité d'un commun accord, ce qui exclut toute faute dans l'exécution des travaux surtout en terme d'exécution ;

qu'en tout état de cause, à supposer qu'un dépassement du délai puisse lui être reproché, un tel dépassement ne peut être sanctionné par la résolution du contrat aux torts de l'architecte et entraîner la restitution des sommes versées à défaut pour le syndicat des copropriétaires de l'avoir mis en demeure de s'exécuter conformément aux articles L. 216-1 et suivants du code de la consommation ;

qu'en application de l'article 1224 du code civil, la résolution du contrat ne peut être prononcée judiciairement qu'à charge pour le syndicat des copropriétaires de rapporter la preuve d'une inexécution contractuelle ;

qu'il justifie en l'espèce, contrairement à ce qu'a indiqué le premier juge, de l'exécution de son travail par les plans produits, relevant par ailleurs que la maquette et les documents de travail ont été accessibles à M. [O] [T] qui était son interlocuteur et disposait d'un lien numérique permanent à un dossier de partage lui permettant l'accès à tous les plans et relevés de l'architecte, en temps réel, tous les documents incluant l'édition des caves ayant de surcroît été transmis à MM. [E] et [D] qui ont succédé à M. [O] [T] ;

que le devis du 15 février 2018 s'inscrit dans le prolongement du devis du 23 janvier 2017 et ne le remplace pas en conséquence, un relevé en trois dimensions détaillé ayant été préféré à un relevé de géomètre ; que la maquette en 3D détaillée est donc plus complète, justifiant un investissement en temps plus long, ce qui a été rapporté à l'assemblée générale par M. [O] [T] et explique les différentes factures qui se sont succédé ;

que les travaux commandés objet des devis des 23 janvier 2017 et 15 février 2018 ont bien été acceptés comme l'établissent les devis signés et ont été réalisés ;

que ce dernier devis a fait l'objet de deux factures n°708 et 712 qui ont été payées par le syndic qui par ce paiement les a ratifiées en sa qualité de mandataire du syndicat des copropriétaires, si bien que la nullité éventuelle de l'acte a été couverte avec effet rétroactif ;

que la facture n°714 correspondant au devis n°340 n'a jamais été réglée par le syndicat des copropriétaires, alors même que les échanges de mails du 19 septembre 2019 démontrent que le principe d'une commande supplémentaire n'a jamais été contesté ; qu'elle s'inscrit dans le cadre d'un contrat à exécution successive, conformément à l'article 1111-1 du code civil ;

que ce n'est en définitive que lorsque la société TISSOT IMMOBILIER a été désignée que le syndicat des copropriétaires, en taisant certainement ces éléments, a imaginé émettre sa contestation.

Aux termes des dernières écritures du syndicat des copropriétaires [7] notifiées par RPVA le 26 septembre 2023, il est demandé à la cour de :

vu les articles 1224 et suivants du code civil,

vu l'article 1231-1 du code civil,

vu les articles 17 et 18 de la loi de 1965 relative à la copropriété,

vu les articles 1992 et suivants du code civil,

vu le jugement dont appel en date du 7 mars 2023,

vu l'appel interjeté,

dire et juger l'appel interjeté mal fondé en la forme et sur le fond,

débouter M. [R] [P] de son appel, ainsi que de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,

confirmer le jugement dont appel en date du 7 mars 2023 du tribunal judiciaire de NÎMES, sauf en ce que le tribunal a :

débouté la copropriété de sa demande de condamnation à hauteur de 5.000 EUR à titre de dommages et intérêts,

limité le montant de la condamnation de M. [R] [P] au titre de l'article 700 du code de procédure civile à hauteur de 1.500 EUR au lieu des 4.000 EUR sollicités,

Statuant de nouveau,

prononcer la résolution du contrat en date du 4 mai 2017 selon devis en date du 23 janvier 2017 conclu entre M. [R] [P] et la copropriété [7] aux torts exclusifs de M. [R] [P], pour manquements graves à ses obligations contractuelles,

constater que les devis ultérieurs n'ont pas été acceptés par le syndicat des copropriétaires de la copropriété [7],

juger que M. [R] [P] n'a pas accompli ses obligations contractuelles et a indûment perçu des sommes de la part du syndicat des copropriétaires, devant donc les rembourser,

condamner M. [R] [P] à payer au syndicat des copropriétaires [7] les sommes suivantes :

10.976 EUR perçue indûment pour une prestation jamais réalisée,

5.000 EUR à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive,

4.000 EUR en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens, pour les frais engagés en première instance,

4.000 EUR en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens d'appel, pour les frais engagés au titre de la présente instance d'appel,

débouter M. [R] [P] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions.

Pour l'essentiel, le syndicat des copropriétaires soutient :

que le tribunal a fait une juste analyse des pièces et circonstances de la cause ;

que si M. [R] [P] allègue que le travail demandé aurait sensiblement évolué entre la date de l'acceptation du devis du 23 janvier 2017 et le début des travaux, il ne justifie cependant pas d'une demande supplémentaire de sa part, observant par ailleurs qu'il n'est pas contesté par l'appelant que les devis ultérieurs n'ont pas fait l'objet d'une validation par l'assemblée générale des copropriétaires ;

que l'appelant n'a pas respecté le délai de huit semaines, n'ayant rien fait pendant cette période, et n'a jamais justifié du travail qui aurait été accompli, et ce même ultérieurement, malgré les demandes faites en ce sens à six reprises ; que l'existence d'un manquement contractuel est donc à cet égard établie ;

que M. [R] [P] ne justifie pas par ailleurs de la réalisation de sa prestation dont il admet qu'elle n'a pas été achevée, ainsi qu'il l'indiquait dans un mail du 20 septembre 2020 ; que les pièces qu'il verse aux débats sont constituées par quelques plans, dont la plupart en 2D, qui n'ont manifestement pas été établis par lui, et par quelques plans 3D qui ne concernent qu'une partie de l'immeuble et qui ne sont pas finalisés ni exploitables ; que toutes les demandes qui lui ont été adressées pour justifier de son travail sont restées lettre morte ; que l'appelant ne peut arguer de l'échange de mails dont il se prévaut dès lors que celui-ci est intervenu près de deux ans après la mission confiée et que les documents joints ne sont pas produits ; qu'en outre, il résulte de cet échange que le travail confié à M. [R] [P] était loin d'être achevé et ne constituait qu'une ébauche ;

que le seul devis accepté est celui du 23 janvier 2017 ; que le prix est forfaitaire et les prestations claires et complètes ; qu'il ne s'agit donc pas d'une première campagne de relevés ; qu'à aucun moment, M. [R] [P] n'a informé la copropriété qu'il y aurait des devis complémentaires et que si tel avait été le cas, elle n'aurait pas validé le devis initial, l'ensemble des devis portant sur une somme totale de 23.936 EUR ;

que le devis du 15 février 2018 n'a pas été signé, ni accepté et validé par l'assemblée générale ; que M. [O] [T], aujourd'hui décédé, n'avait pas le pouvoir d'accepter un tel devis au nom et pour le compte de la copropriété, de sorte que son accord ne lui est pas opposable ; qu'il en va de même des paiements effectués sans l'accord de l'assemblée générale ;

que les deux autres devis des 15 février et 29 avril 2019 n'ont pas davantage été acceptés ni par le syndic, ni par la copropriété, ainsi que l'admet l'appelant, n'étant par ailleurs pas plus justifiés que celui du 15 février 2018 au regard du devis initial comportant une mission complète à un prix forfaitaire ;

que sa demande reconventionnelle en paiement au titre de travaux complémentaires qui auraient été effectués entre les mois de novembre 2018 et mars 2019 ne peut prospérer dès lors qu'il n'est pas justifié d'un accord pour la réalisation de ces travaux et de leur exécution effective.

Pour un rappel exhaustif des moyens des parties, il convient, par application de l'article 455 du code de procédure civile, de se référer à leurs dernières écritures notifiées par RPVA.

Par ordonnance du 9 décembre 2024, la clôture de la procédure a été fixée au 24 avril 2025.

MOTIFS

SUR LA RESILIATION ET LA DEMANDE EN RESTITUTION

Dans son jugement, le tribunal expose que M. [R] [P] a manqué à ses obligations contractuelles prévues dans le devis du 23 janvier 2017 accepté par le syndic de la copropriété [7] le 4 mai 2017. En substance, il ajoute que ces manquements contractuels tiennent à l'absence de réalisation des travaux mentionnés dans le devis du 23 janvier 2017 dans le délai de huit semaines prévu au contrat et relève que le deuxième devis du 15 février 2018 correspond uniquement à la poursuite de la prestation objet de ce premier devis, ne contenant aucune prestation nouvelle. Il indique encore que M. [R] [P] ne produit aucun courrier, courriel ou attestation du syndic de l'époque sollicitant expressément des prestations complémentaires, et considère, au vu de l'ensemble de ces éléments, que ces manquements présentent un caractère suffisamment grave pour justifier la résolution du contrat régularisé le 4 mai 2017.

L'article 1111-1 du code civil dispose : « Le contrat à exécution instantanée est celui dont les obligations peuvent s'exécuter en une prestation unique.

Le contrat à exécution successive est celui dont les obligations d'au moins une partie s'exécutent en plusieurs prestations échelonnées dans le temps. »

En l'occurrence, le contrat en date du 23 janvier 2017, signé par la société FONCIA LANGUEDOC PROVENCE, syndic alors de la copropriété [7], suite à la résolution n°22 adoptée par les copropriétaires lors de l'assemblée générale du 14 mars 2017, est un contrat à exécution successive dans la mesure où il prévoit deux phases, la première consistant en une opération de relevé des caves et différents niveaux du bâtiment et dessin du relevé et la seconde en une opération de mise en 3D et de labellisation BIM.

Aux termes de ses écritures, M. [R] [P] soutient que ce premier devis accepté a été suivi en date du 15 février 2018 d'un deuxième devis d'un montant de 4.114 EUR TTC qui ne remplace pas le premier mais s'inscrit dans le prolongement de celui-ci, suite à la demande du syndic de l'époque, M. [O] [T], ledit devis signé par ce dernier le 15 octobre 2018 étant lui-même complété par un troisième devis du 15 février 2019.

Il est constant, aucune discussion n'existant sur ce point, que les devis des 15 février 2018 et 15 février 2019 n'ont pas fait l'objet d'un vote par l'assemblée générale de la copropriété [7], les copropriétaires rejetant expressément le devis du 15 février 2018 lors d'une assemblée générale ainsi qu'il en est justifié aux débats par la production d'un extrait du procès-verbal. Par ailleurs, il ressort du devis du 15 février 2018 que les prestations prévues par celui-ci sont strictement identiques à celles du devis signé le 4 mai 2017, seul le nombre de journées affectées à la réalisation de ces prestations étant différent. De la même façon et sous la même réserve, les devis des 15 février et 29 avril 2019 prévoient des prestations similaires, sauf en ce qui concerne le relevé des caves qui n'est pas repris dans le devis du 15 février 2019 mais l'est à l'inverse sans plus d'explication dans celui postérieur du 29 avril 2019.

Selon l'article 1103 du code civil, « Les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits. »

Par ailleurs, l'article 1998 du code civil énonce : « Le mandant est tenu d'exécuter les engagements contractés par le mandataire, conformément au pouvoir qui lui a été donné.

Il n'est tenu de ce qui a pu être fait au-delà, qu'autant qu'il l'a ratifié expressément ou tacitement. »

En application de ces dernières dispositions, si en principe, le mandant n'est pas obligé envers les tiers pour ce que le mandataire a fait au-delà du pouvoir qui lui a été donné, il en est autrement lorsqu'il résulte des circonstances que le tiers a pu légitimement croire que le mandataire agissait en vertu d'un mandat et dans les limites de ce mandat.

Il est constant cependant, en présence d'actes excédant manifestement le domaine de l'administration courante de la copropriété, que le mandat apparent ne peut être invoqué et que le cocontractant du syndic doit vérifier les pouvoirs de ce dernier, et que tel est le cas lorsque le syndic engage des travaux qui ne sont pas urgents et nécessaires à la sauvegarde de l'immeuble, tels que prévus à l'article 18 de la loi du 10 juillet 1965 (Civ 3° 30/05/2012 n°11-11.993).

Aussi, il importe peu que M. [O] [T] ait en date du 15 octobre 2018 signé le devis complémentaire du 15 février 2018 et procédé au règlement de la somme de 4.114 EUR, ce paiement ne valant aucunement ratification par la copropriété, et il appartenait en conséquence à M. [R] [P] de vérifier que ce dernier était bien autorisé par l'assemblée générale à engager des travaux à hauteur de cette somme, ce qui n'était pas le cas.

Il s'ensuit que le syndicat n'est tenu que par les termes du contrat du 23 janvier 2017 signé par M. [O] [T] le 4 mai 2017, les devis des 15 février et 29 avril 2019 dont se prévaut M. [R] [P] n'ayant par ailleurs jamais donné lieu à un vote de l'assemblée générale des copropriétaires, ni de surcroît été signés.

Selon l'article 1353 du code civil, « Celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.

Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui produit l'extinction de son obligation. »

Par ailleurs, l'article 1224 du code civil énonce : « La résolution résulte soit de l'application d'une clause résolutoire soit, en cas d'inexécution suffisamment grave, d'une notification du créancier au débiteur ou d'une décision de justice. »

Il est de principe, en cas de contrat à exécution successive, que la résiliation n'opère que pour l'avenir, sauf si celui-ci n'a pas été régulièrement exécuté pour la période passée, les effets de la résiliation étant dans cette hypothèse ceux applicables à la résolution du contrat en cas de contrat à exécution instantanée.

En outre, il est constant, au visa de l'article 1224 du code civil, qu'il appartient au juge de caractériser le caractère suffisamment grave de l'inexécution, lequel peut résulter, selon les circonstances, du retard existant dans l'exécution de la prestation (Civ 3° 04/01/1995 n°92-17.858), ce qui rend inopérantes les observations formées par M. [R] [P] au titre des dispositions des articles L. 216-1 et suivants du code de la consommation, observation étant encore faite que l'obligation pour le créancier de délivrer préalablement une mise en demeure est prévue lorsque celui-ci décide de résoudre le contrat conformément à l'article L. 216-1 du code de la consommation et non en cas de résolution ou résiliation demandée en justice.

En l'espèce, le contrat du 23 janvier 2017 signé le 4 mai 2017 par M. [O] [T] prévoit un délai de réalisation de huit semaines à partir du bon pour accord, de sorte que les travaux devaient être achevés au 4 juillet 2017. Or, M. [R] [P] admet dans ses écritures qu'il n'avait pas procédé à des relevés en raison d'une modification du champ de son intervention, précisant qu'une nouvelle méthodologie avait été rappelée sous la forme d'un début de planning d'intervention rédigé par M. [O] [T] dans un compte-rendu de réunion du 27 juin 2017 à laquelle il participait avec M. [C], géomètre-expert. En outre, cette modification alléguée qui n'est pas démontrée ne pouvait en tout état de cause être de nature à engager la copropriété, étant encore observé qu'ainsi qu'il en a été fait état, le devis du 15 février 2018 établi près de huit mois après cette réunion est strictement identique quant à son objet au devis initial, et il importe peu, dans ce contexte mettant en évidence l'absence d'exécution dans le délai convenu, que le devis initial prévoyait qu'en cas de dépassement du temps estimé, la prestation serait facturée au taux de 50 EUR HT l'heure. Par ailleurs, les pièces produites par M. [R] [P] consistant pour l'essentiel en quelques photocopies de plans demeurent insuffisantes à établir la réalité et l'étendue de la prestation effectuée, observation étant faite que celui-ci ne peut prétendre au paiement de sa prestation que pour autant qu'il achevé celle-ci, ce qui suppose la preuve de l'exécution des phases 1 et 2 prévues au contrat, preuve qui n'est pas rapportée.

Ces manquements qui mettent en évidence le fait que le contrat n'a jamais reçu, même en ce qui concerne la phase 1, une pleine exécution sont suffisamment graves pour justifier la résiliation du contrat.

Aussi, le jugement sera confirmé de ce chef, sauf à préciser, s'agissant d'un contrat à exécution successive, que c'est la résiliation et non la résolution du contrat qui est prononcée.

Par ailleurs, en application de l'article 1229 alinéa 3 du code civil, la restitution des sommes inutilement versées par le syndicat des copropriétaires à hauteur de la somme de 10.976 EUR sera ordonnée.

Le jugement sera donc également confirmé de ce chef.

SUR LA DEMANDE EN DOMMAGES-INTERETS POUR RESISTANCE ABUSIVE

Dans son jugement, le tribunal rejette la demande en dommages-intérêts du syndicat des copropriétaires au motif que celui-ci ne justifie pas de l'existence d'un préjudice spécifique distinct de celui déjà indemnisé par la condamnation de M. [R] [P] à rembourser la totalité des sommes indûment perçues par lui.

Relevant appel incident, le syndicat des copropriétaires demande la condamnation de M. [R] [P] au paiement de la somme de 5.000 EUR à titre de dommages-intérêts.

Toutefois, il se contente d'alléguer l'existence d'une résistance abusive sans apporter la moindre démonstration.

Aussi, le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté sa demande en dommages-intérêts.

SUR LA DEMANDE RECONVENTIONNELLE DE M. [R] [P]

Dans son jugement, le tribunal rejette la demande de M. [R] [P] en paiement de la somme de 4.299,30 EUR au titre d'une facture n°714/2019 du 8 avril 2019 émise en vertu du devis du 15 février 2019. Pour ce faire, il relève que le devis dont s'agit ne comporte aucune mention « Bon pour accord » ni aucune signature, et note que celui-ci n'a pas été approuvé par l'assemblée générale des copropriétaires, de sorte que M. [R] [P] est défaillant dans l'administration de la preuve.

Pour les motifs précités, seul le devis du 23 janvier 2017 signé le 4 mai 2017 lie les parties. Aussi, M. [R] [P] ne peut être tenu par le devis du 15 février 2019 dont l'objet est au demeurant identique, exception faite du relevé des caves, de celui du 23 janvier 2017 qui n'a pas reçu, ainsi qu'il en a été fait état, une pleine exécution.

Le jugement déféré sera donc confirmé de ce chef.

SUR L'ARTICLE 700 DU CODE DE PROCEDURE CIVILE

Le jugement déféré sera confirmé en ses dispositions relatives à l'application de l'article 700 du code de procédure civile, en l'absence de tout élément justifiant qu'une somme supérieure à celle de 1.500 EUR soit allouée.

L'équité commande, en cause d'appel, de faire application de ces dispositions en faveur du syndicat des copropriétaires qui obtiendra donc à ce titre la somme de 2.500 EUR.

M. [R] [P], qui succombe, sera débouté de sa demande présentée à ce titre.

PAR CES MOTIFS

La cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe et en dernier ressort :

CONFIRME le jugement du tribunal judiciaire de NÎMES du 7 mars 2023 en toutes ses dispositions, sauf à dire que le contrat du 23 janvier 2017 signé le 4 mai 2017, contrat à exécution successive, est résilié et non résolu,

Et y ajoutant,

DEBOUTE M. [R] [P] de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE M. [R] [P] à payer sur ce fondement au syndicat des copropriétaires de l'immeuble [7] la somme de 2.500 EUR,

CONDAMNE M. [R] [P] aux entiers dépens d'appel

Arrêt signé par la présidente et par la greffière.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,

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