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Décisions

CA Nîmes, 2e ch. A, 28 août 2025, n° 23/00967

NÎMES

Arrêt

Autre

CA Nîmes n° 23/00967

28 août 2025

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 23/00967 - N° Portalis DBVH-V-B7H-IYA4

AL

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE NIMES

22 novembre 2022

RG:19/04093

S.C.I. FAJO

C/

SARL ETUDE ET COORDINATION DUBATIMENT dite SECB

Copie exécutoire délivrée

le

à : Selarl Coudurier Chamski...

Selarl Lamy Pomiès-Richaud

COUR D'APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section A

ARRÊT DU 28 AOUT 2025

Décision déférée à la cour : Jugement du Tribunal de Grande Instance de NIMES en date du 22 Novembre 2022, N°19/04093

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Nathalie AZOUARD, Présidente de Chambre,

Madame Virginie HUET, Conseillère,

M. André LIEGEON, Conseiller,

GREFFIER :

Mme Véronique LAURENT-VICAL, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

A l'audience publique du 06 Mai 2025, où l'affaire a été mise en délibéré au 03 juillet 2025 prorogé à ce jour.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.

APPELANTE :

S.C.I. FAJO inscrite au RCS de [Localité 5] sous le n° 347 509 564 prise en la personne de son représentant légal en exercice audit siège

Chez Magasin ECO'HOME CC. [Adresse 4]

[Adresse 7]

[Localité 2]

Représentée par Me Elisabeth RAMACKERS de la SELARL COUDURIER-CHAMSKI-LAFONT-RAMACKERS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES

INTIMÉE :

SARL ETUDE ET COORDINATION DUBATIMENT dite SECB inscrite au RCS de [Localité 5] sous le n°321 251 357 prise en la personne de son gérant en exercice domicilié ès qualités au siège social sis

[Adresse 3]

[Localité 1]

Représentée par Me Clotilde LAMY de la SELARL CABINET LAMY POMIES-RICHAUD AVOCATS ASSOCIES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES

Représentée par Me Jérémy BALZARINI de la SCP ADONNE AVOCATS, Plaidant, avocat au barreau de MONTPELLIER

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 17 Avril 2025

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Nathalie AZOUARD, Présidente de Chambre, le 28 août 2025,par mise à disposition au greffe de la cour

EXPOSE DU LITIGE

La SCI FAJO est propriétaire d'un immeuble sis [Adresse 8] à PONT SAINT ESPRIT (30).

En octobre 2014, la SCI FAJO, souhaitant transformer cet immeuble à usage de bureaux en quatre appartements, a contacté la SARL SOCIETE ETUDE ET COORDINATION DU BATIMENT (ci-dessous nommée SARL SECB) afin d'établir un avant-projet d'aménagement.

Au mois de juillet 2015, la SARL SECB a reçu l'accord de la SCI FAJO pour lancer les travaux.

Une convention d'honoraires a été signée entre la SCI FAJO et la SARL SECB le 28 août 2015.

Les travaux ont débuté le 7 décembre 2015 et ont été achevés le 2 mai 2016.

Estimant avoir dû faire face à de graves difficultés faute pour la SARL SECB d'avoir effectué les démarches préalables, la SCI FAJO a assigné cette dernière devant le tribunal judiciaire de NÎMES sur le fondement des articles 1231-1 et 1792 et suivants du code civil pour obtenir l'indemnisation de ses préjudices.

Par jugement du 21 novembre 2022, le tribunal judiciaire de NÎMES a :

débouté la SCI FAJO de la totalité de ses demandes,

condamné la requérante au paiement des entiers dépens et au paiement à la SARL SECB de la somme de 2.500 EUR en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration au greffe en date du 16 mars 2023, la SCI FAJO a interjeté appel de ce jugement.

Aux termes des dernières écritures de la SCI FAJO notifiées par RPVA le 15 juin 2023, il est demandé à la cour de :

réformant totalement la décision entreprise,

faisant application des articles 1231-1 et suivants du code civil,

dire et juger la SARL SECB entièrement responsable du préjudice subi,

la condamner à payer à la SCI FAJO les sommes suivantes :

au titre du surcoût rendu nécessaire pour faire cesser le trouble et le préjudice créé par l'imprévision commise et la nécessité complexe de pouvoir aboutir au changement de destination des locaux de bureaux en locaux d'habitation, tenant l'exposition de frais considérables à hauteur de 150.000 EUR,

la somme de 50.000 EUR à titre de dommages-intérêts pour les pertes locatives et les apports en financement qu'il aura fallu mettre en place pour maintenir la SCI,

condamner la SARL SECB à payer la somme de 10.000 EUR sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de première instance et d'appel.

La SCI FAJO fait valoir en substance que la SARL SECB avait en charge la conception du projet et a gravement failli à son devoir de conseil puisqu'elle a manqué au respect des règles essentielles de constructibilité et d'urbanisme qu'il lui appartenait de vérifier, s'agissant plus particulièrement des dispositions applicables en matière de places de parking, de sorte que sa responsabilité est pleinement engagée au visa de l'article 1231-1 du code civil, aucun partage de responsabilité ne pouvant être retenu au cas d'espèce. Elle précise avoir exposé de nombreux frais jusqu'à ce qu'une régularisation de la situation intervienne et a subi une perte de loyers.

Aux termes des dernières conclusions de la SARL SECB notifiées par RPVA le 15 septembre 2023, il est demandé à la cour de :

confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de NÎMES le 21 novembre 2022 en ce qu'il a débouté la SCI FAJO de l'ensemble de ses demandes,

débouter la SCI FAJO de l'ensemble de ses demandes,

Subsidiairement, à défaut,

juger que la SCI FAJO a commis des fautes qui sont à l'origine de son propre préjudice à concurrence de 50 %,

débouter la SCI FAJO de l'ensemble de ses préjudices qui ne sont pas démontrés et fondés,

A défaut,

limiter l'indemnisation aux seules pertes locatives,

limiter les pertes locatives à une durée de 10,5 mois,

limiter le préjudice locatif à la somme de 15.268,75 EUR,

limiter l'indemnisation de la SCI à concurrence de 50 % tout au plus du préjudice retenu,

Faire droit à l'appel incident,

constatant que le jugement a omis de statuer sur la demande reconventionnelle de la SARL SECB,

compléter la décision,

condamner la SCI FAJO à payer à la société SARL SECB la somme de 1.056 EUR avec intérêts au taux légal à compter du 30 novembre 2015 et capitalisation année par année,

En toute hypothèse,

ordonner la compensation de cette créance avec toute dette de responsabilité qui pourrait être mise à la charge de la SARL SECB,

condamner la SCI FAJO au paiement de la somme de 4.000 EUR sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

La SARL SECB soutient pour l'essentiel que sa responsabilité ne peut être engagée sur le fondement contractuel que pour faute et rappelle que l'architecte n'est tenu, sur ce point, que d'une obligation de moyen. Elle conteste toute faute en relevant qu'en 2014, le POS alors applicable ne prévoyait pas de dispositions particulières en matière de places de parking attenantes aux logements, et qu'aucune déclaration préalable n'était nécessaire, au regard des travaux projetés. Ne niant pas l'existence de difficultés sérieuses tenant à l'aboutissement du projet, elle fait cependant valoir que celles-ci ne sont pas de son fait mais résultent d'un changement de réglementation suivi du changement de position de la mairie de [Localité 6]. Elle ajoute qu'en définitive, ce n'est pas la problématique des stationnements qui a directement retardé l'achèvement des travaux mais le fait que le raccordement au réseau électrique a été décalé dans le temps du fait de l'autorisation demandée par ENEDIS, et que ce n'est qu'ensuite qu'une discussion est intervenue avec la mairie sur la question des parkings. Elle indique encore, à supposer que sa responsabilité soit retenue, qu'un partage doit alors avoir lieu puisque la SCI FAJO, maître d'ouvrage, ne pouvait ignorer, en ce cas, qu'une déclaration préalable était nécessaire. Enfin, elle conteste les préjudices invoqués, relevant à propos des places de parking que la SCI FAJO n'aurait pas renoncé à son projet si elle avait connu la contrainte tenant à celles-ci et que les pertes locatives invoquées ne sont elles-mêmes que constitutives d'une perte de chance d'encaisser les loyers qui est fonction des durées des vacances locatives et des loyers impayés.

Pour un plus ample rappel des moyens des parties, il convient, par application de l'article 455 du code de procédure civile, de se référer à leurs dernières écritures notifiées par RPVA.

Par ordonnance du 6 décembre 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 17 avril 2025.

MOTIFS

SUR LA RESPONSABILITE DE LA SARL SECB

Dans son jugement, le tribunal expose qu'il ressort de l'examen du dossier que le projet envisagé par la SCI FAJO et confié à la SARL SECB n'était pas soumis à une demande de permis de construire de sorte que cette dernière qui n'a pas la qualité d'architecte ne peut se voir imposer des obligations dues par l'architecte qui doit signer les demandes nécessaires à la demande de permis de construire et vérifier par conséquent au préalable la faisabilité du projet et sa conformité au regard de la réglementation applicable en particulier en matière d'urbanisme.

Il ajoute que la convention d'honoraires du 28 août 2015 constitue le seul document contractuel liant les parties entre elles comme ayant le caractère d'un contrat de maîtrise d''uvre et relève que selon la description détaillée et exacte du travail confié à la SARL SECB, il n'est pas mentionné les travaux devant donner lieu à un permis de construire ou déclaration de travaux, ni que celle-ci se voit confier de manière générale la conception du projet avec l'examen de la faisabilité générale de l'opération notamment au regard de la réglementation administrative en matière d'urbanisme, laquelle incombe par conséquent et en tout état de cause à la SCI FAJO qui devait, avant la désignation du maître d''uvre, s'assurer de la faisabilité de son projet, en définir les termes et préparer les informations nécessaires à l'obtention des autorisations légales et nécessaires. Sur ce point, il note que la convention d'honoraires du 28 août 2015 indique expressément que « La SECB est chargée des missions de maîtrise d''uvre ci-dessous référencées selon le programme établi par le Maître d'Ouvrage ». Il observe encore que le PLU adopté le 26 février 2015 par la commune de [Localité 6] imposant, dans son article UB 12, la réalisation de places de parking sur la parcelle ou dans un périmètre de 50 mètres est donc intervenu avant la convention d'honoraires du 28 août 2015, voire même avant l'avant-projet du 13 avril 2015, et qu'il n'appartenait pas en conséquence au maître d''uvre d'informer le maître de l'ouvrage des modifications techniques indispensables pour assurer la conformité de l'ouvrage à cette réglementation, mais au maître de l'ouvrage de préparer pour le maître d''uvre les informations nécessaires à l'obtention des autorisations réglementaires et légales éventuelles, ce qui impliquait la connaissance préalable par le maître de l'ouvrage de la nécessité d'obtenir ces autorisations.

Au vu de l'ensemble de ces éléments, le tribunal considère que la SCI FAJO ne démontre pas un manquement de la SARL SECB à ses obligations contractuelles, ce qui justifie le débouté de ses prétentions.

La SCI FAJO a confié à la SARL SECB des missions de maîtrise d''uvre portant sur la réhabilitation de quatre appartements, selon une convention d'honoraires de maîtrise d''uvre du 28 août 2015 qui fixe sa mission comme suit :

Dossier technique : relevé des existants ' Mise à jour des plans, avant-projet sommaire avec chiffrage, plans des ouvrages projetés (plans par niveaux/plans de détail suivant ouvrages), cahier des clauses techniques particulières (CCTP), cahier des clauses administratives particulières (CCAP) et devis quantitatif ;

Direction de chantier : Liaisons inter administrations, appel d'offre d'entreprises, assistance et dépouillement des marchés d'entreprises et ordres de service, direction générale du chantier (réunions hebdomadaires, planning, appel de fonds), comptabilité générale du chantier / appels de fonds, réception de chantier / comptabilité.

Cette mission de maîtrise d''uvre est complète, exception faite de la constitution du permis de construire ou du dépôt d'une déclaration de travaux qui ne sont pas prévus, dès lors qu'elle a trait à la conception de l''uvre, à la direction et la surveillance des travaux et à la réception de l'ouvrage.

Il est constant que dans les limites de sa mission, le maître d''uvre est tenu à l'égard du maître de l'ouvrage d'une obligation de renseignement, sauf pour les faits connus de tous, et de conseil qui lui impose notamment de conseiller le maître de l'ouvrage sur la faisabilité du projet au regard notamment de la réglementation en vigueur dont il lui appartient de veiller à l'application, observation étant faite que cette obligation vise l'ensemble des contraintes inhérentes aux travaux envisagés.

Cette obligation de renseignement et de conseil pèse non seulement sur l'architecte mais également sur toute personne physique ou morale assurant une mission de maîtrise d''uvre, partielle ou totale, telle que précitée.

Aussi, la SARL SECB était tenue vis-à-vis de la SCI FAJO d'une obligation de renseignement et de conseil au titre de la mission qui lui avait été confiée suivant la convention d'honoraires du 28 août 2015. Au demeurant, il sera observé, sur ce point, que la SARL SECB en avait parfaitement conscience puisqu'elle allègue, sans toutefois le démontrer par aucune pièce, qu'elle avait, sans que l'on en connaisse exactement la date, pris au préalable l'attache de la mairie de [Localité 6] pour lui expliquer le projet, laquelle lui précisait, selon ses dires, qu'aucune démarche particulière ne devait être faite dans la mesure où aucun des travaux envisagés ne touchaient à l'esthétique extérieure du bâtiment.

Ainsi qu'en conviennent les parties, le dépôt d'un permis de construire n'était pas nécessaire au cas d'espèce et si la question de la déclaration préalable a fait l'objet d'un débat ainsi que le démontre notamment le recours formé devant la juridiction administrative par la SCI FAJO à l'encontre de l'arrêté d'opposition de la commune de PONT SAINT ESPRIT du 19 avril 2019, il sera toutefois relevé que le PLU approuvé par celle-ci le 26 février 2015 s'imposait en tout état de cause, s'agissant plus particulièrement de son article UB 12 dans sa rédaction d'alors exigeant la création d'une place de parking par appartement et d'une place supplémentaire par tranche de cinq appartements dans un rayon de 50 mètres de l'immeuble. Or, il est constant que la SARL SECB, en sa qualité de maître d''uvre tenu à une obligation de renseignement et de conseil, n'a pas alors pris en compte ce nouveau cadre juridique et il importe peu, à cet égard, que l'ancien POS en vigueur à l'automne 2014 n'ait prévu, le cas échéant, aucune disposition en ce sens. De même, le fait que la question des places de parking soit apparue à l'occasion de la demande de pose de compteurs électriques faite par la SARL SECB auprès de la société ERDF au mois de novembre 2015 est sans incidence dès lors qu'il n'est pas discuté que le PLU du 26 février 2015 était bien applicable, ce dont devait tenir compte la SARL SECB à qui il appartenait de s'assurer, avant la régularisation de la convention d'honoraires du 28 août 2015 et le début des travaux, de la conformité du projet avec les règles d'urbanisme en vigueur, précision étant faite qu'il ne peut être tiré de conséquence de l'intervention alléguée auprès de la mairie de [Localité 6] qui n'est étayée par aucune pièce.

Aussi, la SARL SECB a manqué à l'égard de la SCI FAJO à son devoir de conseil et c'est à tort, s'agissant d'un point juridique relevant du devoir de conseil et en considération des éléments qui précèdent, qu'elle soutient que celle-ci a elle-même commis une faute, motif pris de ce qu'elle ne pouvait pareillement ignorer qu'une demande de déclaration préalable devait être déposée.

Aux termes de ses écritures, la SCI FAJO expose que le dossier n'a pu être régularisé, après la modification du PLU adoptée le 27 février 2017 prévoyant que les places de parking pourraient désormais se situer jusqu'à une distance de 300 mètres, que par l'acquisition qu'elle a faite, suivant un acte authentique du 2 juillet 2018, de huit box pour un coût total de 96.000 EUR auquel s'ajoutent les frais de notaire pour un montant de 9.234,62 EUR. Par ailleurs, elle indique que du 1er janvier 2016 au 31 décembre 2018, elle a dû supporter diverses dépenses de fonctionnement constituées par l'assurance du bâtiment (750,60 EUR), les assurances décès-invalidité au titre des emprunts contractés (3.145,35 EUR), des frais bancaires (3.413,54 EUR), des agios bancaires (5,34 EUR), une consommation d'eau (215,15 EUR) et d'électricité (1.525 EUR), des taxes foncières dues pour les garages (624 EUR) et l'immeuble (5.378 EUR), des frais de constat d'huissier (250 EUR) et des intérêts d'emprunt qu'elle est obligée de supporter (21.292,77 EUR), soit une somme totale de 147.294,97 EUR arrondie à 150.000 EUR. Elle précise encore que les branchements ERDF n'ont pu être réalisés que le 29 juin 2017, que l'appartement n°1 n'a été loué qu'à compter du 21 décembre 2018, et considère en conséquence avoir subi une perte locative du 2 mai 2016 jusqu'à la date de la mise en location du dernier appartement à hauteur d'une somme totale de 47.115 EUR, soulignant par ailleurs que des apports financiers considérables ont dû être faits à hauteur de 120.000 EUR pour éviter sa mise en redressement judiciaire. De plus, elle fait valoir qu'elle s'est vue contrainte d'exposer des frais pour la révision du PLU et d'engager une procédure devant le tribunal administratif.

Il est constant, en application de l'article 1147 ancien du code civil, que le préjudice consécutif à un manquement au devoir de conseil réside dans la perte d'une chance, laquelle est définie comme la disparition actuelle et certaine d'une éventualité favorable.

Dans le cas présent, il sera noté qu'aux termes de ses écritures, la SCI FAJO ne soutient pas que si elle avait été mieux renseignée et conseillée par la SARL SECB, elle aurait renoncé à son projet de transformation de bureaux en quatre appartements qui impliquait, en raison de l'article UB 12 du PLU de la commune de PONT SAINT ESPRIT, la création de cinq places de parking. Aussi, le coût de l'acquisition de places de parking ou box ne saurait constituer un élément de préjudice, étant encore observé qu'il résulte du mail de M. [B] [M], gérant de la SCI FAJO, du 13 mars 2018, que celle-ci disposait de deux places de parking au pied de l'immeuble, ce qui ramenait à trois places et non à huit ses besoins. Et pas davantage dès lors, la SCI FAJO n'est fondée à arguer d'un préjudice tenant aux frais et intérêts liés à l'emprunt qu'elle a souscrit pour l'acquisition de ces places dans la mesure où elle se serait en toute hypothèse trouvée dans l'obligation, ayant fait le choix de ne pas avancer les fonds nécessaires, de rembourser le prêt contracté, rappel étant fait que c'est uniquement de trois places dont elle avait besoin et qu'un prêt moindre en rapport avec ses besoins réels aurait pu être sollicité.

En outre, la SCI FAJO n'est pas fondée à invoquer une perte de loyers. A ce propos, il sera noté que les locations afférentes aux pertes alléguées n'ont pas été immédiates après la régularisation de la situation administrative du dossier suivant un arrêté de non opposition à déclaration de travaux de la commune de [Localité 6] du 19 avril 2018 et la réalisation des branchements ERDF, et souligné qu'au mieux, il ne pourrait donc s'agir, ainsi que le soutient la SARL SECB, que d'une perte de chance dont le caractère sérieux n'est pas établi dès lors qu'aucun élément ne vient démontrer qu'informée dès le printemps 2015 de la nécessité de disposer de places de parking suffisantes pour faire aboutir son projet, elle aurait été en capacité d'une part, de faire rapidement l'acquisition de telles places, ce qui s'est avéré compliqué ainsi que cela ressort du dossier, une telle acquisition supposant par ailleurs une modification du PLU qu'elle n'aurait pu éviter, avec tous les tracas et le cas échéant aléas procéduraux liés à une telle modification, puisqu'aucune place de parking distante de moins de 50 mètres de l'immeuble n'était disponible, et d'autre part, de louer dans de brefs délais les appartements, observation étant faite que seuls trois appartements ont été loués, le dernier restant vacant, selon les pièces produites.

Il s'ensuit qu'aucune indemnisation ne saurait donc intervenir à ce titre et pas davantage au titre de l'indemnisation des autres dépenses dont il est fait état, précision étant faite que le règlement des taxes foncières tient à sa qualité de propriétaire et qu'il n'est pas établi de lien de causalité entre les autres dépenses exposées (eau, électricité, assurance du bâtiment) et la faute imputable à la SARL SECB, étant encore précisé que les frais de constat relèvent des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Au vu de l'ensemble de ces éléments, la SCI FAJO, qui n'invoque aucun autre préjudice, ne pourra qu'être déboutée de sa demande en dommages-intérêts, les conditions de l'article 1147 ancien du code civil n'étant pas réunies.

Le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes d'indemnisation.

SUR LA DEMANDE RECONVENTIONNELLE

La SARL SECB sollicite la condamnation de la SCI FAJO au paiement de la somme de 1.056 EUR avec intérêts au taux légal à compter du 30 novembre 2015, avec capitalisation année par année, précisant que le jugement a omis de statuer de ce chef.

Le jugement déféré ne fait pas mention dans son rappel de la procédure d'une demande en paiement de la somme de 1.056 EUR et les conclusions notifiées en première instance ne sont pas produites aux débats, ce qui exclut toute vérification quant à une éventuelle omission de statuer.

Il sera statué sur cette demande dont il n'est pas argué du caractère nouveau en cause d'appel.

Au soutien de sa demande, la SARL SECB verse aux débats une facture d'un montant de 1.056 EUR TTC en date du 30 novembre 2015 afférente au démarrage du chantier.

La SCI FAJO alléguant uniquement avoir réglé la SARL SECB de l'ensemble de ses factures sans toutefois en justifier, elle sera condamnée à lui payer la somme de 1.056 EUR TTC, avec intérêts à compter du 15 septembre 2023, date des conclusions de la SARL SECB valant mise en demeure, et ce avec capitalisation dans les conditions fixées par l'article 1154 ancien du code civil.

SUR L'ARTICLE 700 DU CODE DE PROCEDURE CIVILE

Le jugement déféré sera infirmé en ce qu'il a condamné la SCI FAJO au paiement d'une indemnité de 2.500 EUR sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et statuant à nouveau, la demande formée à ce titre par la SARL SECB sera rejetée en équité.

La SCI FAJO, qui succombe, sera déboutée de sa demande présentée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'équité ne commande pas de faire application de ces dispositions en faveur de la SARL SECB qui sera donc déboutée de sa demande présentée à ce titre.

PAR CES MOTIFS

La cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe et en dernier ressort :

CONFIRME le jugement du tribunal judiciaire de NÎMES du 21 novembre 2022 en toutes ses dispositions soumises à la cour, sauf en ce qu'il a alloué à la SARL SECB une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Et statuant à nouveau de ce seul chef,

DEBOUTE la SARL SECB de sa demande présentée au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Et y ajoutant,

CONDAMNE la SARL FAJO à payer à la SARL SECB la somme de 1.056 EUR TTC, avec intérêts à compter du 15 septembre 2023, et ce avec capitalisation dans les conditions fixées par l'article 1154 ancien du code civil,

DIT n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la SARL FAJO aux entiers dépens d'appel

Arrêt signé par la présidente et par la greffière.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,

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