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Décisions

CA Rennes, 1re ch., 2 septembre 2025, n° 24/05848

RENNES

Arrêt

Autre

CA Rennes n° 24/05848

2 septembre 2025

1ère chambre B

ARRÊT N°

N° RG 24/05848

N° Portalis

DBVL-V-B7I-VJY7

(Réf 1ère instance : 24/00867)

M. [J] [W]

Mme [U] [S]

C/

M. [K] [M]

Mme [C] [X]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 2 SEPTEMBRE 2025

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Président : Madame Véronique VEILLARD, présidente de chambre

Assesseur : Monsieur Philippe BRICOGNE, président de chambre

Assesseur : Madame [C] BRISSIAUD, conseillère

GREFFIER

Madame Elise BEZIER, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS

A l'audience publique du 5 mai 2025, devant Madame Véronique VEILLARD, magistrate rapporteur, tenant seule l'audience, sans opposition des représentants des parties et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT

Contradictoire, prononcé publiquement le 2 septembre 2025 par mise à disposition au greffe

****

APPELANTS

Monsieur [J] [W]

né le 10 avril 1974 à [Localité 13] (35)

[Adresse 1]

[Localité 4]

Madame [U] [S]

née le 8 janvier 1974 à [Localité 9] (22)

[Adresse 3]

[Localité 4]

Tous deux représentés par Me Antoine LE MASSON, avocat au barreau de NANTES

INTIMÉS

Monsieur [K] [R] [D] [A] [M]

né le 23 mai 1956 à [Localité 12]

[Adresse 7]

[Localité 5]

Madame [C] [V] [X]

née le 17 juin 1962 à [Localité 12]

[Adresse 7]

[Localité 5]

Tous deux représentés par Me Jean-Marc LEON de la SELARL ROULLEAUX-LEON AVOCAT, avocat au barreau de NANTES

FAITS ET PROCÉDURE

1. M. [J] [W] et Mme [U] [S] sont propriétaires d'une maison d'habitation située [Adresse 2] à [Localité 15] et M. [K] [M] et Mme [C] [X] (ci-après M. et Mme [M]) sont propriétaires de la maison mitoyenne voisine située au [Adresse 11].

2. Ces deux maisons sont séparées par un mur construit en pierre, dans lequel des conduits de cheminées sont intégrés, de telle sorte que chacune des maisons dispose d'un foyer de cheminée.

3. A l'occasion de travaux réalisés en 2014 par M. et Mme [M], le tubage de leur cheminée a été installé dans le conduit de la cheminée des consorts [Y].

4. Dans le cadre de la vente de leur maison, les consorts [Y] ont informé les acquéreurs M. et Mme [H] de ce que leur conduit de cheminée était utilisé par M. Mme [M] qui y avaient passé le tubage de leur poêle à bois lors de travaux réalisés en 2014 et avaient, dans le même temps, pris l'engagement de le libérer à première demande.

5. Se heurtant à l'exigence de M. et Mme [M] de mettre à leur charge le coût des travaux de retrait et la moitié du coût d'installation d'un nouveau tubage, les consorts [Y] ont, le 9 août 2024, fait assigner M. et Mme [M] devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Nantes pour obtenir la libération du conduit de cheminée sous astreinte de 100 € par jour de retard, outre une provision de 5.000 € à valoir sur leur préjudice moral, une somme de 4.000 € au titre des frais irrépétibles et la condamnation des défendeurs aux dépens.

6. Par ordonnance du 10 octobre 2024, le juge des référés a :

- déclaré la demande recevable,

- débouté M. [J] [W] et Mme [U] [S] de leur demande,

- condamné M. [J] [W] et Mme [U] [S] à payer à M. [K] [M] et Mme [C] [X] une somme de 1.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. [J] [W] et Mme [U] [S] aux dépens.

7. Pour statuer ainsi, le juge des référés a retenu qu'en dépit de la vente de leur maison le 20 août 2024 et par l'effet d'une stipulation spéciale dans l'acte de vente, les consorts [Y] avaient conservé leur qualité et intérêt à agir et étaient donc recevables en leur action, que la propriété du mur séparatif n'était pas établie de sorte que le trouble manifestement illicite ne l'était pas non plus, qu'enfin, l'engagement de M. [M] de libérer le conduit était entouré de réserves liées notamment au statut dudit mur, conduisant à juger que son obligation était sérieusement contestable.

8. Les consorts [Y] ont interjeté appel par déclaration du 24 octobre 2024.

9. M. et Mme [M] ont interjeté appel incident de la recevabilité de l'action.

10. L'ordonnance de clôture a été prononcée le 1er avril 2025.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

11. Les consorts [Y] exposent leurs prétentions et moyens dans leurs dernières conclusions remises au greffe et notifiées le 29 mars 2025 aux termes desquelles ils demandent à la cour de :

- réformer l'ordonnance en ce qu'elle les a déboutés de leur demande et condamnés une somme de 1.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens de l'instance,

- statuant de nouveau,

- les recevoir en leurs demandes et les dire bien fondées,

- débouter M. et Mme [M] de leurs demandes,

- les condamner à libérer le conduit de cheminée litigieux conformément à leurs engagements issus du courrier du 7 décembre 2014, et ce sous astreinte de 100 € par jour de retard passé un délai de 15 jours suivant la décision qui sera rendue et jusqu'à parfaite libération du conduit de cheminée,

- les condamner à leur payer la somme de 5.000 € à titre provisionnel à valoir sur leur préjudice moral,

- les condamner à leur payer la somme de 4.000 € par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de l'instance.

12. M. et Mme [M] exposent leurs prétentions et moyens dans leurs dernières conclusions remises au greffe et notifiées le 20 décembre 2024 aux termes desquelles ils demandent à la cour de :

- infirmer l'ordonnance en ce qu'elle a déclaré recevable la demande des consorts [Y],

- à titre subsidiaire,

- confirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a débouté M. [J] [I] et Mme [U] [S],

- débouter les consorts [Y] de leurs demandes,

- les condamner in solidum à leur payer une somme de 4.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre la charge des dépens d'appel.

13. Pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il convient de se reporter à leurs écritures ci-dessus visées figurant au dossier de la procédure.

MOTIVATION DE LA COUR

1) Sur la recevabilité de l'action

14. M. et Mme [M] soutiennent que M. [W] et Mme [S] sont dépourvus d'intérêt pour agir, n'étant ni occupants ni propriétaires de la maison qu'ils ont vendue le 20 août 2024 à M. et Mme [H] et que la clause de poursuite de la procédure ne leur confère pas plus un intérêt à agir dans la mesure où elle n'a aucun sens puisqu'elle prévoit à la fois que la titularité de l'action en justice est maintenue pour les vendeurs mais également que l'acquéreur fera "son affaire personnelle de l'issue" de ladite procédure et ce, alors que l'acquéreur n'a absolument pas la qualité de partie à la procédure ni en première instance, ni actuellement en cours en appel.

15. Les consorts [Y] font valoir que le notaire a classiquement inséré une clause de maintien de la procédure engagée préalablement à la vente face au comportement querelleur des intimés qui se sont saisis de la vente immobilière à intervenir pour mettre un place un chantage et que les acquéreurs feront leur affaire personnelle, une fois le conduit libéré, de la mise en 'uvre d'un nouveau tubage respectant les normes en vigueur.

Réponse de la cour

16. L'article 31 du code de procédure civile dispose que "L'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé."

17. L'article 32 du même code prévoit que "Est irrecevable toute prétention émise par ou contre une personne dépourvue du droit d'agir."

18. En l'espèce, l'acte authentique de vente signé le 20 août 2024 entre les consorts [Y] et M. et Mme [H] dispose en page 21 que :

"A ce jour, M. et Mme [K] [M] n'ont toujours pas retiré le tubage et par conséquent libéré le conduit de cheminée litigieux.

Par conséquent, le VENDEUR a, par l'intermédiaire de son avocat, Maître [Z] [N], inscrit au barreau de NANTES assigné en référé devant le président du tribunal judiciaire de NANTES, M. et Mme [M], ainsi qu'il résulte des significations extrajudiciaires en date du 9 août 2024, demeurées annexées aux présentes.

Une copie de ladite assignation à comparaître le jeudi 5 septembre 2024 demeure annexée aux présentes, demandant notamment aux époux [M] de libérer le conduit de cheminée litigieux, conformément à leurs engagements issus du courrier du 7 décembre 2014.

Le VENDEUR prend l'engagement aux termes des présentes à poursuivre ladite procédure.

L'ACQUEREUR informé de la situation a manifesté son désir de poursuivre son acquisition. Il déclare faire son affaire personnelle de l'issue de ladite procédure.

Par ailleurs, l'ACQUEREUR informé de l'impossibilité d'installer un nouveau tubage dans le conduit existant, compte-tenu des normes en vigueur, déclare à nouveau poursuivre son acquisition et fait son affaire personnelle de toutes nouvelles installations."

19. C'est à juste titre que le premier juge a retenu qu'il résultait de cette clause que les consorts [Y] avaient conservé leur qualité et leur intérêt à agir et que leur demande était recevable, ayant intérêt à respecter l'engagement pris vis à vis des acquéreurs.

20. Il sera ajouté qu'ainsi que la clause le prévoit, M. et Mme [H] feront leur affaire personnelle de l'issue de la procédure, ce qui signifie qu'à l'issue de celle-ci, ils aviseront par eux-mêmes des suites à donner. Il n'y a là aucune incohérence contrairement à ce que tentent de soutenir M. et Mme [M].

21. L'ordonnance qui a déclaré recevable l'action des consorts [Y] sera confirmée sur ce point.

2) Sur le trouble manifestement illicite

22. Les consorts [T] soutiennent que M. et Mme [M] ont pris l'engagement irrévocable de libérer le conduit de cheminée occupé illégalement à la suite des travaux qu'ils ont entrepris en 2014, que par courrier du 27 mai 2024, ils ont mis en demeure leurs voisins de remplir leurs obligations qui s'y sont refusés sauf en contrepartie du paiement d'une importante somme d'argent, qu'il n'y a pas lieu de céder à ce chantage et qu'au contraire, il est démontré que l'utilisation illégale du conduit de cheminée constitue un trouble manifestement illicite auquel il doit être mis fin, que l'expertise amiable contradictoire réalisée en présence de M. et Mme [M] a permis de démontrer la dangerosité de l'installation, restée en place depuis désormais près de 10 ans, provoquant un risque d'incendie, illustrant le trouble de jouissance, qu'il ne fait aucun doute pour M. et Mme [M] qu'ils savent parfaitement que le tubage de leur cheminée passe par celle de leurs voisins, ce qui a été clairement reconnu par eux, qu'enfin, il n'existe aucune contestation sérieuse sur l'occupation illégale du conduit, dont la libération pourra être ordonnée.

23. M. et Mme [M] font valoir que les appelants ne font pas la démonstration de leur propriété du conduit de cheminée dont ils demandent la libération, qu'au contraire, ils ont tenté de négocier une servitude et que l'expert amiable indique que le mur de séparation semble appartenir à M. et Mme [M], que l'engagement pris par M. [M] de libérer le conduit était temporaire et intuitu personae et surtout conditionné à une utilisation pour les propres besoins des appelants et à une situation juridique éclaircie, ce qui n'est pas le cas dès lors que la maison est vendue à des tiers et que la situation n'est pas éclaircie quant au statut précis du mur, qu'aucun droit d'usage du conduit en question n'est donc établi au profit des propriétaires de la maison anciennement propriété de M. [W] et Mme [S], que le nombre important de contestations sérieuses doit conduire la cour à rejeter les prétentions des appelants.

Réponse de la cour

24. Aux termes de l'article 835 alinéa 1 du code de procédure civile, "Le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite."

25. En l'espèce, il est acquis aux débats qu'en 2014, à l'occasion de travaux réalisés dans leur maison d'habitation, M. et Mme [M] ont fait passer le tubage de leur poêle à bois dans le conduit de cheminée utilisé par les consorts [Y], empêchant ceux-ci de l'utiliser pour eux-mêmes.

26. En suite de la constatation de cet état de fait, M. [K] [M] a rédigé le 7 décembre 2014 à l'attention des consorts [Y] une reconnaissance d'utilisation dudit conduit en des termes qu'il convient de restituer intégralement ici :

"Je soussigné [K] [M], [Adresse 8], certifie :

- Reconnaître utiliser le conduit directement connecté à la cheminée du mur mitoyen de mon voisin pour y passer un tubage destiné à y connecter un poêle à bois.

- Constater qu'il existe un conduit au-dessus de ma propre cheminée mais sans sortie apparente sur le toit.

- Avoir contacté mon notaire, Maître [O] pour lui demander de mieux comprendre la mitoyenneté ou pas de notre mur avec celui de notre voisin et les droits et devoirs qui y sont rattachés.

- Demander à mon voisin [J] et [U] l'autorisation d'usage temporaire du conduit pour y installer un tubage conforme à la réglementation en vigueur. Mes voisins m'accordent cet usage temporaire.

- Réaliser l'installation du poêle à bois par un installateur agréé.

- Accepter en cas de demande de mes voisins de libérer le conduit utilisé sous 1 mois s'ils souhaitent l'utiliser pour leur propre besoin tant que la situation n'est pas éclaircie.
- Prendre toutes les dispositions légales et de travaux nécessaires pour se mettre en conformité une fois les éclaircissements de nos notaires communiqués.

- Sous règles claires, rédiger un accord avec mon voisin pour clarifier notre situation.

- Boucher et calfeutrer mon ouverture actuelle de cheminée et mon propre conduit pour limiter autant que faire se peut les nuisances de bruit et d'odeur due à la faible épaisseur de notre mur mitoyen.

Fait à [Localité 14] le 7 décembre 2014

[K] [M]

Suit la signature"

27. Il s'infère de cette reconnaissance de situation par M. [M] qu'il y reconnaît bien utiliser un conduit de cheminée précédemment utilisé par ses voisins les consorts [Y] et ce parce que le conduit situé au-dessus de sa propre cheminée se trouvait sans sortie apparente sur le toit.

28. M. [M] s'est engagé à libérer le conduit sous un mois à première demande des consorts [Y] pour les propres besoins de ceux-ci.

29. L'engagement n'indique pas que les "besoins" des voisins doivent être interprétés comme ceux d'utiliser eux-mêmes le conduit. La libération du conduit peut en effet trouver à se justifier pour les besoins de la vente immobilière que les consorts [Y] entendaient mener à bien courant 2024.

30. En ce sens, les consorts [Y] ont d'ailleurs par courrier du 27 mai 2024 mis en demeure leurs voisins de remplir leur obligation de libérer le conduit, en rappelant à cette occasion qu'au moment des travaux en 2014, ils n'avaient "pas été consultés" et avaient constaté les faits en rentrant du travail et "en trouvant des gravats dans [leur] salon et un tube flexible alu dans [leur] cheminée."

31. M. et Mme [M] n'ont pas contesté les circonstances dans lesquelles se sont déroulés les travaux de tubage de leur poêle à bois en 2014, à savoir sans l'accord des consorts [Y].

32. En réponse à la demande de libération du conduit, ils ne se sont pas opposés au principe de cette remise en état.

33. Ils ont en réalité proposé un protocole d'accord à la signature des consorts [Y] exigeant la prise en charge par ces derniers d'une part du coût du retrait du tubage et du bouchage de la communication entre conduits et, d'autre part, de la moitié du coût de la nouvelle installation de M. et Mme [M] comprise dans une fourchette de 7.500 € à 12.000 €, avec consignation d'une somme de 5.000 € à la charge des consorts [Y].

34. Ces éléments confirment que M. et Mme [M] reconnaissent sans contestation possible qu'ils utilisent bien le conduit de cheminée initialement à l'usage de la maison des consorts [Y].

35. Par ailleurs, l'engagement de libérer le conduit a été pris par M. [M] "tant que la situation n'est pas éclaircie", c'est-à-dire indépendamment du point de savoir si le mur séparatif est mitoyen ou pas.

36. Le fait pour M. et Mme [M] de refuser de libérer le conduit tant que la situation n'est pas éclaircie procède en réalité d'une inversion d'interprétation de l'engagement de M. [M] qui n'a pas fait de l'éclaircissement de la situation une condition préalable à la libération du conduit, contrairement à ce qui est soutenu, mais a bien accepté de libérer celui-ci "tant que la situation n'est pas éclaircie", c'est-à-dire quand bien même le statut juridique du mur séparatif n'était pas encore déterminé.

37. Par ailleurs, si l'engagement de M. [M] s'adresse à ses voisins "[J] et [U]", il s'applique au conduit de cheminée de la maison d'habitation dont ces derniers étaient propriétaires jusqu'à la vente le 20 août 2024 à M. et Mme [H] et à l'occasion de laquelle ils ont signé une clause d'exercice du droit de suite concernant le présent litige, de sorte que l'engagement de libérer le conduit est de nature réelle et non de nature personnelle.

38. Enfin, il résulte de l'expertise amiable diligentée le 5 juillet 2024 sur les lieux par M. [E] [L], ingénieur bâtiment, à la demande des consorts [Y] et en présence de M. et Mme [M] et de leur conseil que le tubage de M. et Mme [M] n'est pas conforme pour avoir mis en communication les deux logements sans aucune isolation spécifique (thermique ou acoustique), et qu'il est déconseillé d'utiliser un conduit commun pour les deux maisons.

39. Sous le bénéfice de ces observations, en refusant de remettre en état le conduit de cheminée des consorts [Y] par la libération du tubage leur appartenant et en empêchant ces derniers de vendre leur bien purgé de tout passif litigieux, M. et Mme [M] commettent un trouble manifestement excessif auquel il convient de mettre un terme.

40. L'ordonnance sera donc infirmée sur ce point et M. et Mme [M] condamnés à libérer le conduit litigieux sous astreinte de 100 € par jour de retard qui courra passé un délai de 3 mois suivant le présent arrêt et ce pendant 3 mois ou jusqu'à parfaite libération du conduit de cheminée si elle est réalisée avant.

3) Sur la demande au titre du préjudice moral

41. Les consorts [Y] soutiennent que M. et Mme [M] se sont saisis de l'urgence de la vente en cours pour prétendre leur faire supporter leurs propres errements en leur faisant régler la facture des travaux nécessaires à la libération du conduit, qu'il s'agit d'un évident chantage qui doit être sanctionné, que l'expertise amiable contradictoire a permis de se convaincre de la dangerosité de l'installation, restée en place depuis désormais près de 10 ans, provoquant un risque d'incendie, justifiant au plus fort le trouble de jouissance, qu'une somme de 5.000 € à titre provisionnel doit leur être allouée à valoir sur leur préjudice moral.

42. M. et Mme [M] n'ont pas spécifiquement conclu sur ce point sauf à plaider que "compte tenu du nombre important de contestations sérieuses en l'espèce, la cour devra considérer que les prétentions des appelants ne peuvent pas non plus prospérer sur le fondement de l'article 835 alinéa 2 du code de procédure civile."

Réponse de la cour

43. Aux termes de l'article 835 alinéa 2 du code de procédure civile, "Dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, [le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence] peuvent accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire."

44. En l'espèce, compte tenu de ce qui précède, l'obligation à libérer le conduit de cheminée imposée à M. et Mme [M] n'est pas sérieusement contestable tandis que le non-respect de l'engagement de M. [M] a causé un préjudice pour les consorts [T] les empêchant de vendre leur bien libéré de tout contentieux et les obligeant à purger la procédure en lieu et place de leurs acquéreurs.

45. Il leur sera alloué une somme de 2.000 € au titre du préjudice moral subi.

46. L'ordonnance sera infirmée sur ce point et M. et Mme [M] seront condamnés à payer aux consorts [T] ladite somme de 2.000 €.

4) Sur les dépens et les frais irrépétibles

47. Succombant, M. et Mme [M] supporteront les dépens d'appel.

48. L'ordonnance sera infirmée s'agissant des dépens de première instance qui seront pareillement mis à leur charge.

49. Enfin, eu égard aux circonstances de l'affaire, il n'est pas inéquitable de condamner M. et Mme [M] à payer aux consorts [T] la somme de 2.000 € au titre des frais irrépétibles exposés par eux en première instance et en appel qui ne sont pas compris dans les dépens.

50. L'ordonnance sera infirmée s'agissant des frais irrépétibles de première instance tandis que les demandes de M. et Mme [M] de ce chef seront rejetées.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort, par mise à disposition au greffe conformément à l'article 451 alinéa 2 du code de procédure civile,

Confirme l'ordonnance du juge des référés du tribunal judiciaire de Nantes du 10 octobre 2024 en ce qu'elle a déclaré recevable l'action de M. [J] [W] et Mme [U] [S],

L'infirme pour le surplus,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Condamne M. [K] [M] et Mme [C] [X] à libérer le conduit de cheminée litigieux situé dans le mur séparatif des maisons situées aux [Adresse 10] et n° [Adresse 6] à [Localité 15], ce sous astreinte de 100 € par jour de retard qui courra passé un délai de 3 mois suivant le présent arrêt d'appel et ce pendant 3 mois consécutif ou jusqu'à parfaite libération du conduit de cheminée si celle-ci est réalisée avant l'expiration dudit délai de 3 mois,

Condamne M. [K] [M] et Mme [C] [X] à payer à M. [J] [W] et Mme [U] [S] une somme de 2.000 € à titre de provision à valoir sur leur préjudice moral,

Condamne M. [K] [M] et Mme [C] [X] aux dépens de première instance et d'appel,

Condamne M. [K] [M] et Mme [C] [X] à payer à M. [J] [W] et Mme [U] [S] une somme de 2.000 € au titre de leurs frais irrépétibles de première instance et d'appel,

Rejette le surplus des demandes.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

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