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Décisions

CA Versailles, ch. com. 3-2, 2 septembre 2025, n° 24/07253

VERSAILLES

Arrêt

Autre

CA Versailles n° 24/07253

2 septembre 2025

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 4DC

Chambre commerciale 3-2

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 2 SEPTEMBRE 2025

N° RG 24/07253 - N° Portalis DBV3-V-B7I-W4F2

AFFAIRE :

SAS STP ENTREPRISE GÉNÉRALE

C/

[R] [D] ès-qualités de mandataire liquidateur de la Société STP ENTREPRISE GENERALE

...

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 05 Avril 2024 par le Tribunal de Commerce de VERSAILLES

N° Chambre : 04

N° RG : 2023F00126

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Fabrice HONGRE-BOYELDIEU

Me Franck LAFON

Me Asma MZE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DEUX SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT CINQ,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

APPELANT :

SAS STP ENTREPRISE GÉNÉRALE en liquidation judiciaire représentée par son dirigeant social, Monsieur [H] [K] [G], dans le cadre de l'exercice de ses droits propres, domiciliée

Chez Monsieur [H] [K] [G]

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représentant : Me Fabrice HONGRE-BOYELDIEU de l'ASSOCIATION AVOCALYS, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 620 - N° du dossier 005977 -

Plaidant : Me Ismail BENAISSI, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D0436

****************

INTIMES :

Maître [R] [D] ès-qualités de mandataire liquidateur de la Société STP ENTREPRISE GENERALE

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représentant : Me Franck LAFON, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 618 - N° du dossier 20240330

Plaidant : Me Jean-noël COURAUD de la SELAS DÉNOVO, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : K0178 -

S.A.S. BC.n exerçant sous l'enseigne BATEG

Ayant son siège

[Adresse 1]

[Localité 4]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social

Représentant : Me Asma MZE de la SELARL LX PARIS-VERSAILLES-REIMS, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 699 - N° du dossier 2474835

Plaidant : Me Maria VASSILEVA, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P 0585

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 12 Mai 2025 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Ronan GUERLOT, Président, chargé du rapport et Monsieur Cyril ROTH, Président.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Ronan GUERLOT, Président de chambre,

Monsieur Cyril ROTH, Président de chambre,

Madame Gwenael COUGARD, Conseillère,

Greffier, lors des débats : Madame Françoise DUCAMIN

EXPOSE DU LITIGE

La SAS BC.n, exerçant sous l'enseigne Bateg (la société BC.n), a confié, par contrat de sous-traitance du 4 février 2020, à la SAS STP Entreprise Générale (la société STP) des travaux de peinture et revêtements muraux pour la somme de 990 000 euros HT.

Cette dernière a sous-traité une partie de ses travaux à la société EMT bâtiment par contrat du 1er juin 2020.

Considérant que la société STP n'avait réalisé qu'une partie des travaux, la société BC.n l'a mise en demeure le 19 janvier 2021 de prendre les mesures nécessaires.

Le 19 janvier 2021, le tribunal de commerce de Bobigny a placé la société STP en liquidation judiciaire et a désigné Mme [D] en qualité de liquidateur.

La SAS BC.n a déclaré au passif de la procédure collective une créance de 728 539,18 euros HT.

Par ordonnance du 9 janvier 2023, le juge-commissaire a constaté qu'il existait une contestation sérieuse et invité BC.n à saisir le juge du fond.

Le 13 février 2023, la société Bateg a assigné Mme [D], ès qualités, devant le tribunal de commerce de Versailles.

Le 5 avril 2024, par jugement contradictoire, ce tribunal a :

- fixé à la somme de 491 982,67 euros HT le montant de la créance à titre chirographaire de la société Bateg au passif de la société STP Entreprise Générale ;

- débouté la société STP Entreprise Générale de l'ensemble de ses demandes ;

- dit que les dépens, dont les frais de greffe s'élevant à la somme de 69,59 euros, seront employés en frais privilégiés de procédure.

Le 19 novembre 2024, la société STP Entreprise Générale a interjeté appel de ce jugement en tous ses chefs de disposition.

Par dernières conclusions du 4 avril 2025, elle demande à la cour de :

- la dire et la juger recevable et bien fondée en son appel, étant rappelé que son dirigeant n'a pas reçu ni l'assignation du 13 février 2023 de la société Bateg, ni le jugement du 5 avril 2023 ;

- infirmer le jugement du 5 avril 2024 en toutes ses dispositions ;

Et statuant à nouveau :

- déclarer la société Bateg irrecevable en l'intégralité de ses demandes en raison de la forclusion encourue ;

Et,

- déclarer la société Bateg mal fondée en l'intégralité de ses demandes ;

- condamner la société Bateg à payer à Mme [D], ès qualités, la somme en principal de 118 992,13 euros, outre intérêts au taux légal sur cette somme à compter de l'arrêt à intervenir ;

- condamner la société Bateg à lui payer, au titre des frais irrépétibles, les sommes de 5 000 euros HT (de première instance), et 5 000 euros HT (d'appel), soit au total la somme globale de 10 000 euros HT sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- la condamner aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Hongre Boyeldieu, avocat.

Par dernières conclusions formant appel incident du 27 mars 2025, Mme [D], agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la société STP Entreprise Générale, demande à la cour de :

- la déclarer tant redevable que bien fondée en ses demandes ;

- infirmer le jugement du 5 avril 2024 en toutes ses dispositions ;

Et statuant à nouveau :

- déclarer la société Bateg irrecevable en l'intégralité de ses demandes en raison de la forclusion encourue ;

Subsidiairement,

- déclarer la société Bateg mal fondée en l'intégralité de ses demandes ;

- débouter la société Bateg de l'intégralité de ses demandes ;

- condamner la société Bateg à lui payer la somme en principal de 118 992,13 euros, outre intérêts au taux légal sur cette somme à compter de l'arrêt à intervenir ;

- condamner la société Bateg à lui payer la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- la condamner aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Lafon, avocat.

Par dernières conclusions du 16 avril 2025, la société BC.n demande à la cour de :

- rejeter la fin de non-recevoir opposée par la société STP Entreprise Générale et par Mme [D], ès qualités ;

- la déclarer recevable et bien fondée, en ses demandes, fins et conclusions ;

- confirmer le jugement du 5 avril 2024 en ce qu'il a :

fixé à la somme de 491 982,67 euros HT le montant de sa créance à titre chirographaire au passif de la société STP Entreprise Générale ;

débouté la société STP Entreprise Générale de l'ensemble de ses demandes ;

dit que les dépens, dont les frais de greffe s'élevant à la somme de 69,59 euros, seront employés en frais privilégiés de procédure ;

- débouter la société STP Entreprise Générale et Mme [D], ès qualités, de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;

- condamner la société STP Entreprise Générale aux entiers dépens de la présente procédure.

La clôture de l'instruction a été prononcée le 28 avril 2025.

Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux conclusions susvisées.

MOTIFS

Sur la forclusion

Mme [D], ès qualités, soutient que les demandes de la société BC.n sont irrecevables pour cause de forclusion, l'obligation tenant à la mise en cause de la société STP Entreprise Générale, à raison de l'indivisibilité de la procédure de vérification de créance, n'ayant pas été respectée, faute d'avoir été régularisée avant l'expiration du délai d'un mois prévu à l'article R. 624-5 du code de commerce.

Pour les mêmes raisons, la société STP Entreprise Générale considère également que la société BC.n a omis de l'attraire devant le juge du fond.

La société BC.n soutient qu'elle a assigné le liquidateur dans le délai d'un mois. Elle fait valoir que la société STP Entreprise Générale étant intervenue volontairement devant le tribunal de commerce de Versailles, elle est devenue partie à la procédure et que de ce fait, les demandes formulées à son égard sont recevables.

Réponse de la cour

L'article R. 624-5 du code de commerce prévoit que « lorsque le juge-commissaire se déclare incompétent ou constate l'existence d'une contestation sérieuse, il renvoie, par ordonnance spécialement motivée, les parties à mieux se pourvoir et invite, selon le cas, le créancier, le débiteur ou le mandataire judiciaire à saisir la juridiction compétente dans un délai d'un mois à compter de la notification ou de la réception de l'avis délivré à cette fin, à peine de forclusion à moins d'appel dans les cas où cette voie de recours est ouverte ».

La procédure d'admission des créances devant le juge-commissaire présente un caractère indivisible entre le débiteur, le créancier et le mandataire ou le liquidateur judiciaire. La partie qui saisit le juge compétent pour trancher cette contestation doit donc mettre en cause devant ce juge ces deux autres parties.

Toutefois, la partie qui a saisi la juridiction compétente dans le délai de l'article R. 624-5 du code de commerce sans mettre en cause toutes les parties concernées, n'encourt pas la forclusion et dispose de la faculté de mettre en cause les parties omises après l'expiration de ce délai jusqu'à ce que le juge statue (Com. 14 juin 2023, n° 21-25.638 ; Com. 7 février 2024, n° 22-21.110).

Le 18 mars 2021, la société BC.n a déclaré à la procédure collective une créance de 728 539,18 euros.

Par ordonnance du 9 janvier 2023, le juge-commissaire a constaté l'existence d'une contestation sérieuse et invité la société BC.n à saisir le juge du fond.

Le 13 février 2023, la société BC.n a assigné le liquidateur devant le tribunal de commerce de Versailles.

La cour constate que le jugement dont appel a été rendu de manière contradictoire, que des conclusions ont été soutenues à l'audience du 8 mars 2024 dans l'intérêt de la société STP (page 4 du jugement) et que celle-ci a formulé des demandes de paiement (page 8 du jugement).

La forclusion n'est donc pas encourue.

Il convient en conséquence de déclarer recevables les prétentions de la société BC.n.

Sur l'abandon de chantier

La société STP Entreprise Générale soutient que les travaux ont été exécutés à hauteur de 40,61 % ; que la société BC.n a interdit l'accès au chantier aux ouvriers de la société STP Entreprise Générale en désactivant leurs badges ; que la société BC.n a attendu le jour de sa mise en liquidation judiciaire pour faire état d'un prétendu abandon de chantier ; qu'elle n'a pas pu accéder au chantier le jour de l'expertise en raison de l'annulation des badges.

Mme [D], ès qualités, s'associe aux moyens susvisés et conteste l'abandon de chantier. Elle précise toutefois que, si une condamnation devait être prononcée, elle devrait l'être à son encontre en raison du dessaisissement prévu à l'article L. 641-9 du code de commerce.

La société BC.n soutient quant à elle que le chantier a été abandonné depuis le 4 janvier 2021, soit bien avant la publication au Bodacc du jugement d'ouverture intervenue le 28 janvier 2021 ; que le décompte produit par la société STP Entreprise Générale s'arrête fin décembre 2020 et que , si elle était intervenue courant janvier, cela devrait ressortir dudit décompte ; qu'en dépit des courriers qu'elle a adressés à son sous-traitant, les travaux n'ont jamais repris ; que cet abandon trouve notamment son origine dans l'absence de paiement par la société STP Entreprise Générale de son propre sous-traitant.

Répondant à la société STP Entreprise Générale, elle fait observer que le constat d'huissier relatif à l'état d'avancement des travaux été établi contradictoirement en présence de M. [F] en qualité de représentant de la société STP Entreprise Générale.

La société BC.n évalue sa créance à 491 982,26 euros HT. Elle fait valoir qu'elle résulte du surcoût engendré par la substitution de la société STP Entreprise Générale par les sociétés Ranyas Deco, SBG et [E]. Elle précise qu'il faut y ajouter le montant des travaux de reprise des dégradations qui sont imputés à la société STP Entreprise Générale, les frais d'huissier et le montant des pénalités de retard.

Réponse de la cour

L'article 9 du code de procédure civile dispose quant à lui qu' « il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention ».

L'article 1217 du code civil dispose que « la partie envers laquelle l'engagement n'a pas été exécuté, ou l'a été imparfaitement, peut : refuser d'exécuter ou suspendre l'exécution de sa propre obligation ; poursuivre l'exécution forcée en nature de l'obligation ; obtenir une réduction du prix ; provoquer la résolution du contrat ; demander réparation des conséquences de l'inexécution. Les sanctions qui ne sont pas incompatibles peuvent être cumulées ; des dommages et intérêts peuvent toujours s'y ajouter ».

L'article 14-2 « Résiliation pour défaillance contractuelle du sous-traitant » des

conditions générales du contrat liant les parties prévoit que « la défaillance contractuelle dûment établie du sous-traitant peut entraîner de plein droit la résiliation du contrat après mise en demeure ['] lorsque la mise en demeure est restée infructueuse à l'expiration d'un délai de 8 jours, l'entrepreneur principal peut résilier le contrat dans sa totalité ».

L'article 14.2 « Résiliation après mise en demeure » du contrat de sous-traitance précise qu' « en complément de l'article 14-2 des CG, la défaillance contractuelle du ST dans l'exécution de ses prestations est caractérisée notamment en cas de :

- abandon du chantier,

- retard dans l'exécution des travaux »

- Sur l'existence de retards

Tout d'abord, la cour constate que le contrat de sous-traitance conclu le 4 février 2020 entre les sociétés BC.n et STP Entreprise Générale prévoit en son article 7 « délais et calendriers d'exécution » que « les travaux du contrat sont exécutés suivant le calendrier d'exécution ci-joint en annexe 2 ».

Toutefois, ladite annexe n'est pas versée aux débats.

Si la société STP Entreprise Générale reconnaît dans ses écritures que les travaux ont commencé en retard en raison du confinement lié à la Covid, toutefois seul un « planning travaux ind L du 16/12/20 » établi par Bateg (BC.n) est versé aux débats et rien ne permet de s'assurer que les parties se sont entendues sur celui-ci, à défaut du calendrier prévu dans l'annexe précitée (pièce 7 BC.c).

La cour n'est donc pas en mesure de connaitre le calendrier d'exécution qui avait été convenu entre les parties et ce faisant d'apprécier l'existence de retards par rapport aux prévisions du contrat.

- Sur l'abandon de chantier

Pour démontrer l'abandon du chantier, la société BC.n verse aux débats :

- une lettre du 19 janvier 2021 dans laquelle elle met en demeure la société STP Entreprise Générale de reprendre les travaux et d'augmenter ses effectifs sous cinq jours. Il y est également précisé que la société STP Entreprise Générale est défaillante au motif qu'elle a abandonné le chantier depuis le 4 janvier 2021 et qu'elle accuse un retard de plusieurs semaines par rapport au planning contractuel du marché de sous-traitance et des plannings révisés ;

- une lettre du 25 janvier 2021 où elle informe la société STP Entreprise Générale que, faute de réaction avant le 28 janvier 2021, elle serait contrainte de constater sa défaillance et de faire achever les travaux par une entreprise tierce aux frais de la société STP Entreprise Générale et dans laquelle elle indique qu'elle fera procéder le 29 janvier 2021 à un constat d'huissier sur l'avancement des travaux, ce constat est versé au débat.

Par lettre du même jour, la société STP Entreprise Générale lui a indiqué qu'elle contestait tout retard, indiquant avoir notamment démarré les travaux hors des délais contractuellement prévus en raison de la Covid-19 et des retards du corps d'état "Placo".

Il ressort du constat du 29 janvier 2021 dressé à la demande de BC.c aux fins de vérifier l'avancement des travaux par « le sous-traitant » que M. [F], représentant de la société STP Entreprise Générale, a indiqué que l'accès au chantier lui est refusé. Le constat, sur ce point, est ainsi libellé : « M. [F] (') me précise que l'accès au chantier lui est refusé, qu'il est en effet en liquidation judiciaire, mais que la société a la possibilité de travailler [jusqu'au] 28 février 2021. »

Sur l'impossibilité d'accès au chantier, la société STP Entreprise Générale verse aux débats une lettre du 1er février 2021, adressée à BC.n, aux termes de laquelle elle fait observer que son conducteur de travaux s'est rendu sur le chantier le 29 janvier 2021, sans avoir pu accéder au chantier avec son badge, celui-ci ayant été désactivé. Elle y indique en outre que l'un de ses sous-traitants, la société EMT Bâtiment, a rencontré la même difficulté en raison de l'annulation des badges le 25 janvier 2021 et que la société BC.c savait que deux de ses ouvriers étaient toujours présents sur le chantier jusqu'à l'annulation de leurs badges.

A la suite de la déclaration de créance de la société BC.n, par lettre du 21 mars 2022, le mandataire judiciaire a indiqué que la société STP Entreprise Générale contestait la créance déclarée au motif qu'il n'y a pas eu d'abandon de chantier, mais que la société BC.n avait désactivé « tous les badges d'accès des ouvriers du sous-traitant EMR Batiment ainsi qu'au conducteur des travaux rendant impossible l'exécution des travaux ».

La société BC.n soutient pour sa part, dans un courrier du 12 avril 2022 adressé au liquidateur, qu'elle a désactivé, sans toutefois préciser de date, les badges de la société STP Entreprise Générale en raison d'un abandon de chantier par cette dernière et que celle-ci n'avait pas repris les travaux dans les délais indiqués de sorte qu'elle avait dû résilier le contrat de sous-traitance. Elle précise que cette désactivation n'est pas intervenue avant l'expiration du délai laissé à la société STP Entreprise Générale pour reprendre ses travaux, qui serait le 28 janvier 2021.

La cour constate que la société BC.n a fait état d'un abandon de chantier, pour la première fois, dans sa lettre du 19 janvier 2021 et que c'est lors du constat d'huissier établi le 29 janvier 2021, que la société STP Entreprise Générale a indiqué pour la première fois qu'elle ne pouvait plus accéder au chantier, l'accès lui étant refusé.

Toutefois, l'huissier de justice s'est borné à faire un état de l'avancement des travaux au 29 janvier 2021, et non de la défaillance de la société STP Entreprise Générale, contrairement à ce que soutient la société BC.n, postérieurement à la date de résiliation du contrat par la société BC.n, de sorte que la preuve de l'abandon de chantier n'est pas démontrée.

De surcroît, la société BC.n ne verse aux débats aucun élément concernant les badges d'accès au chantier qui pourrait établir que des salariés des sociétés STP Entreprise Générale ou EMR Bâtiment étaient présents entre le 4 janvier et le 28 février 2021.

Faute d'autres éléments probants, la cour retient que la société BC.n ne démontre pas que la société STP Entreprise Générale ait abandonné le chantier. Par voie d'infirmation, la demande de fixation à hauteur de 491 982,26 euros de la créance de BC.n au passif de STP Entreprise Générale sera rejetée.

III. Sur la créance de la société STP Entreprise Générale

La société STP Entreprise Générale sollicite la condamnation de la société BC.n à lui payer la somme de 118 992,13 euros au titre d'une facture impayée.

La société BC.n considère que l'avis de situation de la société STP Entreprise Générale n'est pas conforme aux stipulations contractuelles et qu'aucun état d'avancement des travaux visé par BC.n n'est produit.

Elle relève encore que sa créance n'est pas justifiée, que la société STP Entreprise Générale a abandonné le chantier, qu'elle n'a pas réalisé l'ensemble des prestations confiées et que sa défaillance a engendré pour elle des surcoûts.

Réponse de la cour

L'article 6.3.1 « Acomptes » du contrat de sous-traitance prévoit que « Le ST présente à l'EP ses demandes d'acomptes mensuels cumulatives, accompagnées de l'ensemble des pièces justificatives définies à l'article 6.3.3 infra en 3 exemplaires et avant le 20 du mois, en mentionnant les éléments du prix permettant d'exécuter les règlements, et notamment :

- l'avancement des travaux évalué d'après la décomposition du prix visée à l'article

1.2.1,

- les travaux modificatifs ayant fait l'objet d'un accord écrit,

- les éventuelles actualisations ou révisions.

La demande d'acompte mensuel doit intégrer les corrections apportées par l'EP à la demande d'acompte du mois précédent »

L'article 6.3.3 « Pièces justificatives » du contrat précité prévoit que : « Pour servir de base au paiement direct, au paiement par délégation ou au paiement par l'EP, le ST présente à ce dernier les pièces justificatives suivantes :

- tous les six mois, l'ensemble des pièces visées à l'article 2.2.1

- un état d'avancement des travaux visé par le représentant de l'EP

- s'il évacue à sa charge ses déchets dangereux, ses Bordereaux de Suivi de Déchets

Dangereux.

Le ST doit par ailleurs avoir fourni les garanties bancaires exigées de sa part par le Contrat.

Toute demande de paiement ne remplissant pas ces conditions est réputée irrecevable».

La cour constate que les clause susvisées n'évoquent aucunement l'accord de la société BC.n et qu'en ce qui concerne l'état d'avancement des travaux, celui-ci a été réalisé au moyen du constat d'huissier que cette dernière a fait dresser le 29 janvier 2021.

Comme il a été relevé ci-dessus, la société BC.n ne démontre ni l'abandon de chantier. Elle n'apporte pas d'éléments sur la réalisation des prestations de la situation n°5

Par ailleurs, les surcoûts liés à la substitution de la société STP Entreprise générale sont uniquement imputables à la société BC.n.

Par conséquent, il convient d'infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Versailles et de condamner la société BC.n à payer à la société STP Entreprise Générale la somme de 118 992,13 euros au titre de la situation n° 5.

IV.Sur les autres demandes

Les dépens de première instance et d'appel seront passés en frais privilégiés de la procédure de liquidation judiciaire.

L'équité commande de condamner la société BC.n à payer à la STP Entreprise Générale la somme de 2.500 euros au titre des frais non compris dans les dépens.

PAR CES MOTIFS,

La cour, par arrêt contradictoire,

Infirme le jugement en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,

Dit recevables les prétentions de la société BC.n. ;

Les rejette ;

Condamne la société BC.n à payer à la société STP Entreprise Générale la somme de 118 992,13 euros ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société BC.n à payer à la STP Entreprise Générale la somme de 2 500 euros ;

Dit que les dépens d'appel seront employés en frais de procédure.

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Ronan GUERLOT, Président, et par Madame Françoise DUCAMIN, Greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT

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